:
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, j'ai grand plaisir à vous rencontrer aujourd'hui pour ce qui est vraisemblablement ma dernière comparution devant vous en tant que commissaire aux langues officielles.
[Français]
Le 9 mai dernier, j'ai déposé mon 7e et dernier rapport annuel, et c'est avec plaisir que je vous en présente aujourd'hui les faits saillants. Vous trouverez, en complément de ma présentation, une copie des quatre recommandations que j'adresse au gouvernement. Il faudra en ajouter une autre touchant Air Canada et dont je vous parlerai plus tard.
[Traduction]
Ce nouveau rapport s'intitule Les langues officielles au Canada: Le tournant à prendre. Présenté à un nouveau gouvernement, ce rapport donne des pistes d'action pour assurer la mise en oeuvre des modifications importantes qui ont été sanctionnées par le Parlement au cours de la dernière année. Il s'agit d'un rapport annuel tourné vers l'avenir, et il est un appel à l'action et à la responsabilité gouvernementales. Il rappelle le discours que j'ai tenu durant les sept dernières années, à savoir que sans un leadership soutenu de la part du gouvernement, le dossier des langues officielles ne peut progresser ou risque de reculer.
Avec le renforcement de la Loi sur les langues officielles en novembre dernier, chaque institution doit désormais prendre des mesures positives pour appuyer la vitalité des communautés de langue officielle et pour promouvoir la dualité linguistique. Dans ce dernier rapport annuel, je suggère donc des pistes d'intervention que j'estime primordiales à l'engagement ferme du gouvernement au renouveau et à la consolidation. On y trouve également la deuxième édition des bulletins de rendement des institutions fédérales.
Par ailleurs, mes recommandations visent principalement quatre domaines d'intervention, soit la gouvernance horizontale, la promotion de la dualité linguistique, la vitalité des communautés de langue officielle et une nouvelle réglementation.
[Français]
La modification importante apportée à la loi au cours de la dernière année exige désormais que les institutions fédérales se dotent d'une stratégie visant à favoriser la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Ces institutions devront revoir leurs politiques et leurs programmes à la lumière des nouvelles dispositions de la loi, pour s'assurer que ces communautés retirent des avantages équivalents à ceux des majorités. Les institutions fédérales devront nécessairement se rapprocher des communautés et les considérer comme de véritables membres de l'équipe dans cette démarche en faveur d'une vitalité accrue.
Le gouvernement et les communautés doivent adopter une approche cohérente de la vitalité, basée sur des indicateurs et sur la recherche, et ce pour en arriver à des actions mieux ciblées et des résultats concrets pour le bénéfice de la société canadienne. Il faudra également documenter les démarches entreprises et clarifier les objectifs à l'aide de l'élaboration d'indicateurs de vitalité pertinents qui soient adaptés aux réalités particulières des communautés de langue officielle.
Le gouvernement est responsable des actions qu'il prend autant que de celles qu'il omet de prendre. Il est responsable de ses actes auprès des Canadiennes et des Canadiens.
Je recommande donc que la ministre de la Francophonie et des Langues officielles s'assure que toutes les institutions fédérales, dans le cadre de leur mandat respectif, se donnent une stratégie en faveur de la vitalité communautaire qui soit basée sur des données factuelles et de la recherche soutenue, et axée sur des résultats concrets.
[Traduction]
Je passe maintenant à la promotion de la dualité linguistique.
Le développement des communautés de langue officielle et la promotion de la dualité linguistique passent obligatoirement par des rapports plus étroits entre l'administration fédérale et les acteurs de la société. Avec le renforcement de la loi, chaque institution fédérale devra incarner la dualité linguistique en tant que valeur fondamentale et en faire la promotion tout en considérant la composition actuelle de la société.
Le dossier des langues officielles évolue dans le contexte d'un Canada changeant. Mondialisation, ère de l'information, société du savoir, innovation, autant de notions qui nous rappellent la puissance sans cesse croissante de certaines forces en présence. La composition linguistique de notre pays évolue, elle aussi, tout comme l'incidence des mariages mixtes entre francophones et anglophones, l'influence des nouveaux arrivants, le profil démographique des régions rurales et urbaines, et le rôle des provinces et des territoires dans le développement des communautés.
La diversité culturelle et la dualité linguistique constituent des valeurs centrales de la société canadienne, et les institutions fédérales doivent les considérer comme allant de pair.
Je recommande donc à la ministre des Langues officielles qu'un dialogue soit amorcé auprès des divers intervenants de la société canadienne dans le but de déterminer les actions à prendre afin de pleinement intégrer à notre mode de gouvernance les valeurs fondamentales que sont la dualité linguistique et la diversité culturelle et d'en tirer tous les avantages qui en découlent.
[Français]
Pour aider le gouvernement à mettre en oeuvre ces nouvelles exigences, un chapitre du rapport annuel est consacré à la question de la gouvernance horizontale, ces mécanismes qui régissent les liens entre l'administration fédérale et les communautés de langue officielle. Il propose des orientations afin de rendre plus efficace le traitement des enjeux horizontaux dans le dossier des langues officielles.
Le gouvernement doit se doter de mécanismes de concertation appropriés et soutenus à l'égard des communautés elle-mêmes, mais également des joueurs clés, notamment les autres gouvernements. Des initiatives de concertation, entre autres dans le secteur de l'immigration, ont donné d'excellents résultats.
Vous connaissez bien les communautés dont je parle. Il faudra que l'appareil gouvernemental engage le dialogue avec elles afin de les connaître davantage et de s'ajuster aux besoins diversifiés qui les caractérisent.
J'ai donc recommandé que la ministre des Langues officielles s'assure de l'efficacité des mécanismes de gouvernance de la politique linguistique canadienne.
[Traduction]
La deuxième partie du rapport annuel porte sur l'assurance de la conformité de l'appareil fédéral à ses obligations. Il se dégage de toutes les enquêtes, les évaluations, les études et les vérifications que l'appareil gouvernemental a réussi assez bien à mettre en place des plans et certains processus administratifs pour satisfaire à ses obligations. Si des moyens sont en place, les résultats convaincants, eux, ne sont pas encore perceptibles.
Cette année, l'analyse des constats globaux présentés dans cette deuxième édition du bulletin de rendement des institutions fédérales nous permet de noter que les mesures prises à l'égard du service au public et de la langue de travail ont besoin d'être examinées de près, ces deux facteurs ayant donné lieu à des rendements globaux très moyens.
L'appareil fédéral doit prendre les moyens afin que l'offre active de service qui favorise l'usage du français et de l'anglais fasse davantage partie de la culture des institutions. Il doit se responsabiliser afin d'améliorer le rendement actuel des institutions et enrayer le plafonnement qui persiste. Après plus de 35 ans d'attente, un sérieux coup de barre est nécessaire.
[Français]
Enfin, pour ce qui est de la réglementation en matière de langues officielles, tel que je l'ai signalé dans mon rapport annuel de l'an dernier, j'incite le gouvernement à entreprendre une réflexion sérieuse sur l'état du régime linguistique. Le gouvernement doit adopter un cadre réglementaire qui précise les modalités en vertu desquelles les institutions fédérales doivent s'acquitter de leurs obligations à l'égard du développement des communautés et de la promotion de la dualité linguistique. Il faut revoir l'approche relative à la loi, de façon à envisager les communications avec le public, la langue de travail, la promotion, et ainsi de suite, non pas comme une série de parties, mais plutôt comme un tout cohérent, logique et représentatif des réalités changeantes de la société.
Considérant les modifications que la loi a connues au cours de la dernière année et les changements sociodémographiques qui ont eu lieu au pays pendant la dernière décennie, on ne peut que constater que le règlement actuel de la loi ne colle plus à la réalité de la société canadienne. Le plafonnement de l'offre de services dans les deux langues officielles n'est qu'un exemple parmi d'autres nous permettant de conclure qu'une refonte du règlement s'impose. Il serait donc approprié qu'une nouvelle réglementation visant une mise à jour cohérente et efficace voie le jour.
J'ai donc recommandé que le président du Conseil du Trésor modernise le Règlement sur les langues officielles--communications avec le public et prestation des services, de façon à permettre aux Canadiennes et aux Canadiens de recevoir des services de qualité égale dans la langue officielle de leur choix. J'ai en outre recommandé qu'on évalue la pertinence d'adopter une nouvelle réglementation visant à préciser la mise en oeuvre des obligations prévues aux autres parties de la Loi sur les langues officielles, notamment les parties V et VII.
Enfin, la situation d'Air Canada a été un sujet de préoccupation tout au long de mon mandat. Je ne peux terminer ma présentation sans aborder un dernier devoir que je me dois de soumettre au gouvernement fédéral. Il s'agit bien entendu de la situation d'Air Canada. On se souviendra que la dernière restructuration a créé un vide juridique quant aux obligations linguistiques de ses différentes composantes.
Je demande donc au ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités de déposer un projet de loi au plus tôt pour s'assurer que les voyageurs canadiens, tant francophones qu'anglophones, conservent leur droit d'être servis dans la langue de leur choix au sein de toutes les composantes d'Air Canada, et que les employés conservent également leurs droits linguistiques.
[Traduction]
En conclusion, la dualité linguistique est plus que jamais enracinée dans l'esprit collectif des Canadiens et des Canadiennes. Et pourtant, les décisions et les actions des leaders politiques et administratifs de l'État ne sont pas toujours conformes à cette valeur centrale de la société, de sorte que l'égalité du français et de l'anglais est encore loin d'être atteinte. Les citoyens s'attendent plus que jamais à ce que les institutions fédérales remplissent les obligations que leur confère la Loi sur les langues officielles.
Le gouvernement a la responsabilité de faire respecter les lois du pays et les parlementaires doivent aussi veiller au plein respect de la Loi sur les langues officielles pour franchir le seuil d'une véritable égalité.
La réponse du gouvernement à mon rapport s'est faite plutôt discrète jusqu'à maintenant. Puisque son leadership public est nécessaire pour que l'appareil fédéral reconnaisse et mette en oeuvre les changements souhaités, je m'attends à ce que le gouvernement dise clairement l'approche qu'il entend adopter pour obtenir des résultats probants.
Je vous remercie de votre attention. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
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Je donnerai des exemples concrets, mais je pense que des mesures positives signifient aussi une approche différente pour chaque institution. Par exemple, prendre des mesures positives signifie adopter une approche proactive et systématique pour concevoir, mesurer et évaluer les programmes. Il faut que l'institution, lorsqu'elle établit ses politiques et ses programmes, adopte le point de vue de la minorité et évalue si l'impact de cette mesure ou de cette initiative donnera des résultats comparables pour la minorité et la majorité.
Chaque institution doit aussi établir des liens de concertation — ce qu'on a appelé une gouvernance horizontale — permanents avec ses communautés de langue officielle. Pour tenir compte de leurs intérêts et de leur spécificité, elle doit établir des rapports permanents avec elles. C'est une autre façon différente de gouverner.
Concrètement, qu'est-ce que cela peut vouloir dire pour certaines institutions? Je vais donner quelques exemples.
Postes Canada a décidé d'ouvrir un comptoir postal à la Cité francophone, un centre communautaire situé à Edmonton. En choisissant d'ouvrir un comptoir bilingue à cet endroit, l'institution a plus ou moins contribué à favoriser la croissance et le développement des communautés, parce qu'elle a pignon sur rue là où sont regroupés d'autres services destinés à la minorité francophone. Bref, elle crée un espace de vie pour cette communauté et y contribue.
Nos institutions fédérales doivent examiner leurs décisions quant au choix de l'emplacement et à la façon dont les services sont offerts. Elles doivent tenir compte de la localisation.
Voici un autre exemple d'une mesure positive qui a été prise par Industrie Canada. Industrie Canada a ajusté les critères du Programme d'accès communautaire afin de mieux prendre en compte les besoins spécifiques des communautés minoritaires quant à un accès abordable à Internet. Si on appliquait les critères de ce programme à l'ensemble des Canadiens, les communautés, du fait qu'elles sont moins nombreuses, n'y auraient pas nécessairement accès. Elles seraient donc privées des avantages de ce programme. C'est ce genre de mesures que nous attendons des différentes institutions. De plus, il revient aux institutions elles-même de les définir.
Je pourrais vous donner d'autres exemples, comme le guichet unique de services bilingues au Manitoba, qui est une initiative provinciale, fédérale et municipale. Il s'agit d'un autre exemple illustrant comment le fédéral peut agir de façon positive pour soutenir la vitalité. Dans ce cas-ci, les trois gouvernements collaborent pour créer un point unique de services bilingues dans cette région, où la langue de travail est le français. Or, le Manitoba n'est pas une région désignée bilingue fédérale en ce qui a trait à la langue de travail. C'est une façon de soutenir la communauté de façon positive qui permet beaucoup plus de souplesse et de flexibilité.
Cela répond-il à votre question?
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Merci, monsieur le président.
Madame la commissaire Adam, j'aimerais sincèrement, au nom des citoyens, vous dire merci pour les années que vous avez passées comme agent de la Chambre des communes représentant les deux langues officielles de notre pays. C'est une chose importante puisqu'une loi stipule que notre pays devrait servir les gens dans les deux langues officielles, surtout au fédéral.
Au Nouveau-Brunswick, une loi à cet effet fait en sorte que cette province est la seule province bilingue au Canada. Malgré tout, on a encore des problèmes, par exemple avec la GRC. Je ne sais pas s'ils vont se frapper dans le front à un moment donné, mais l'un et l'autre se relancent la balle devant les tribunaux. Il est regrettable qu'on en soit encore là après tant d'années. Après 400 ans, on discute encore du respect des deux langues et de la prestation aux Canadiens et Canadiennes de services dans les deux langues. À titre de député, je veux vous dire merci.
Je sais que vous êtes à la fin de votre mandat. Votre responsabilité n'est pas de donner des ordres, mais plutôt de faire des suggestions et de faire rapport au Parlement des résultats de vos enquêtes, tout en disposant d'un certain pouvoir vous permettant d'aller devant les tribunaux. Vous avez joué un bon rôle à cet égard et encore une fois, au nom des citoyens anglophones et francophones, je veux vous remercier.
La semaine dernière, il a été question des services de traduction. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet. Service Canada mentionnait que la commissaire aux langues officielles était contre le fait de cesser d'afficher des emplois lorsque la traduction n'était pas faite par des humains. Votre opinion sur ce sujet est importante.
Service Canada compte mettre en place un système qui fera en sorte que si un humain ne fait pas la traduction ou la correction finale, l'emploi ne sera pas affiché publiquement. C'est la responsable des services de traduction qui a fait ces commentaires, et elle est une experte en la matière.
Vous serez d'accord avec moi pour dire que la traduction automatique a son utilité, mais la machine n'a pas de sentiments, contrairement à l'humain. Si on veut dire quelque chose, cela doit avoir du sens. Comme il s'agit de traduction automatique, la machine fait une traduction mot à mot. Madame la commissaire, laisser cette situation perdurer en souhaitant qu'un jour elle se règle, c'est vraiment faire insulte à la langue et au peuple, tant anglophone que francophone.
Service Canada nous a dit que cela se produisait également dans la traduction anglaise. On a dit que lorsque l'emploi était affiché en français et que la traduction anglaise y était ajoutée, c'était terrible. J'ai vérifié si c'était le cas auprès de certaines gens, et c'est ce qui se produit.
Comment peut-on accepter que le gouvernement, alors que la Loi sur les langues officielles est claire à cet effet, mette en place un système qui fera en sorte qu'un jour la machine remplacera l'humain?
La directrice de la traduction dit que c'est tout à fait impossible. J'aimerais entendre un expert affirmer le contraire. Si c'était possible, je suis certain que le système aurait déjà été mis en place. Je dois dire sincèrement que je suis fier que le gouvernement ait pris la décision de n'afficher aucune offre d'emploi avant qu'elle n'ait été vérifiée par un humain. Et j'espère qu'il maintiendra sa décision. C'est ce qui a été mentionné au comité la semaine dernière. Je vais suivre le dossier de près afin de m'assurer que c'est bien ce qui se passe.
La raison pour laquelle je vous pose la question, madame Adam, c'est que vous avez mentionné que vous étiez contre cette décision, à savoir que ces 13 p. 100 d'avis de concours traduits par des machines devraient être affichés. Cela va à l'encontre de tout ce que vous dites depuis que je vous connais.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à souhaiter la bienvenue à Mme Adam et à toute l'équipe du commissariat.
Moi aussi, je voudrais vous remercier. Je suis député et membre de ce comité depuis quatre ans, période pendant laquelle j'ai appris à vous connaître et à beaucoup vous apprécier. Quand on vient d'une province où l'on ne représente que 4 p. 100 de la population, on apprécie qu'il y ait au commissariat une personne qui comprend les minorités. Merci beaucoup pour tout le travail que vous avez accompli.
J'aimerais vous poser deux questions. Elles sont de portée très générale, et peut-être sera-t-il difficile d'y répondre.
D'abord, je pense qu'au cours des dernières sept années, vous étiez la personne qu'il fallait pour occuper ce poste. Vous avez mis en place des structures et un système. D'après vous, que devrait être le rôle du prochain ou de la prochaine commissaire?
Les choses changent. À la Caisse populaire Saint-Boniface, par exemple, une personne très douée en finances vient de terminer son mandat. Nous sommes donc à la recherche de quelqu'un qui se chargera de la promotion et du marketing. Je dirai, sans vouloir vous mettre les mots dans la bouche, que j'imagine une personne circulant dans le pays et disant aux Canadiens qu'ils ont droit à certains services. Cette personne ferait de la promotion active sur le terrain.
Par ailleurs, nous avons célébré dernièrement au Manitoba le 25e anniversaire de l'organisme Canadian Parents for French. Ce que ces gens ont réalisé au Manitoba depuis 25 ans est absolument incroyable. J'ai assisté hier à la cérémonie de remise des diplômes du Collège universitaire de Saint-Boniface et j'ai été étonné de voir, dans un collège où n'enseigne qu'en français, la quantité de diplômés qui portaient des noms anglais. Je suis certain qu'il s'agissait du tiers des étudiants au moins. Comme cela m'est souvent arrivé, je me suis dit que nous avions peut-être un peu manqué notre coup pour ce qui est d'intégrer ces gens et, par le fait même, d'agrandir l'espace culturel francophone.
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Vous mettez le doigt sur un des aspects qui, à mon avis, a été négligé. Je parle ici de la promotion de la dualité linguistique au sein de la société canadienne. Vous constaterez d'ailleurs que dans le cadre de l'une de mes recommandations, je suggère qu'on s'occupe davantage de cet objectif, qui est inclus dans notre loi. Bien sûr, je fais cette recommandation au gouvernement.
Depuis que je suis commissaire, je suis frappée par le fait que la dualité linguistique semble davantage intéresser les minorités. C'est l'affaire des francophones hors du Québec, des anglophones au Québec, et des francophones en général au Canada. On s'entend pour dire que le fait français est minoritaire au pays. Pour ma part, j'ai toujours travaillé dans des institutions bilingues, qu'il s'agisse d'universités ou d'hôpitaux.
Si la majorité n'adhère pas à une valeur ou qu'elle y est indifférente, on ne peut pas parler d'un projet de société canadien. Il faut donc s'employer à faire plus de promotion et, surtout, à amener les deux communautés linguistiques à travailler activement. Il faut responsabiliser les uns et les autres à l'égard de cet objectif canadien commun.
Cela dit, tout est en place pour que le prochain commissaire puisse faire des choix qui correspondent à sa personnalité. Pour ma part, je vous renvoie la balle. Ce sont les acteurs politiques, en l'occurrence les élus, qui doivent se charger de promouvoir la dualité linguistique. Aucun commissaire ne peut le faire autant que vous. Il n'a ni les ressources ni le temps nécessaire. Il ne peut pas être partout à la fois au pays. Pour cette raison, je dis qu'il appartient aux élus de toujours parler en anglais ou en français, selon le cas, dans leur circonscription. Bien entendu, cela s'applique aussi au gouvernement, aux ministres, et ainsi de suite. Si, par surcroît, les hauts fonctionnaires en faisaient autant à leur niveau, aucune campagne visant à promouvoir la dualité linguistique ne serait nécessaire au Canada. Nous avons tous les acteurs qu'il nous faut.
Bref, si j'étais la prochaine commissaire, ce n'est pas moi qui irais me promener d'un bout à l'autre du pays. Je ferais de mon mieux pour persuader les élus, les hauts fonctionnaires et le gouvernement de s'exprimer dans les deux langues officielles et de soutenir activement la dualité linguistique.
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Tout à l'heure, la commissaire a mentionné que le droit du public de recevoir des services dans les deux langues officielles était conditionnel à l'importance de la demande. C'est prévu dans la loi.
Le règlement prévoit justement les circonstances où la demande est importante. Ce sont des règles démographiques qui reposent sur la taille de la population des minorités et sur la proportion de cette population par rapport à la majorité.
Dans le rapport annuel, on a illustré les lacunes dans l'application de ces règles démographiques quant à l'impact que peut avoir sur la communauté, francophone ou anglophone, la réception des services dans les deux langues. Cela entraîne des incohérences dans certaines communautés. Par exemple, à Yarmouth, en raison du nombre et du pourcentage, la communauté francophone aura droit aux services dans sa langue. À l'inverse, la communauté anglophone de Sept-Îles, qui est plus nombreuse mais qui ne correspond au seuil de 5 p. 100 de la population, n'a pas droit aux services en anglais.
C'est un exemple d'incohérence dans l'application des règles actuelles. C'est un volet qui mérite d'être révisé en fonction du principe. Si une communauté démontre des indices de vitalité, elle devrait avoir droit à des services dans la langue de son choix. C'est un concept qu'on explore davantage. On devrait avoir des critères axés sur la présence des communautés et sur leur vitalité plutôt que sur le nombre ou la proportion de la population qu'elles représentent.
En ce qui concerne Air Canada, il y a des règles applicables au sujet des trajets bilingues ou non. Cela sème la confusion auprès des voyageurs, qui ne savent pas s'ils ont le droit d'être servis dans leur langue par le personnel au sol mais non en plein vol, et vice versa. C'est un autre exemple d'incohérence que nous avons examiné.
Nous poursuivons notre réflexion pour déterminer des pistes de solutions afin que les Canadiens et les Canadiennes aient le droit de recevoir des services de qualité égale. Le règlement ne prescrit nullement la façon dont le service doit être offert. Nous sommes d'avis qu'il devrait y avoir un minimum de règles pour guider les institutions fédérales, de façon à offrir un service de qualité égale.
Plus tôt, la commissaire a donné en exemple la localisation et le nombre de bureaux. Parfois, dans les grandes villes, il n'y a qu'un seul bureau désigné bilingue. À Vancouver, par exemple, si les gens doivent faire le tour de la ville pour avoir des services dans leur langue, il est peu probable qu'il le feront.
Ce sont tous ces aspects de la prestation des services qui méritent d'être révisés et examinés.
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Je crois que votre question arrive à point nommé. Le fait que vous la posiez est une preuve des bénéfices que vous avez tirés de votre échange linguistique.
Les jeunes d'aujourd'hui sont plus bilingues qu'ils ne l'étaient. En fait, ils sont deux fois plus nombreux à être bilingues qu'il y a 35 ans. Ils sont même de plus en plus multilingues, mais ce n'est pas le cas de tous les jeunes. Ayant travaillé dans des universités, je me suis beaucoup mêlée à la jeunesse. Elle ne définit pas son identité de la même façon que les gens des générations précédentes. Comme on peut le constater dans les régions plus bilingues, les jeunes s'identifient souvent, non pas comme des francophones ou comme des anglophones, mais comme des personnes bilingues. Ce fait n'existait pas autrefois.
Selon moi, la façon d'aller chercher les jeunes — on l'a mentionné tout à l'heure lorsqu'on parlait des priorités pour un commissaire ou peut-être même pour vous —, c'est probablement en utilisant les nouvelles technologies de communication. Les jeunes ont des blogues et d'autres choses de ce genre. Je crois que c'est là qu'on doit aller les chercher. Je ne crois pas que ce soit en prononçant des allocutions, etc. En ayant un public jeune, on pourrait vraiment procéder différemment et d'une meilleure façon afin de les inciter à s'engager. Ils sont déjà un terreau fertile en regard de l'accueil à la diversité, puisque plusieurs d'entre eux, particulièrement ceux qui viennent des milieux urbains, ont grandi dans un cadre multilingue et diversifié.
Bien sûr, l'éducation relève des provinces et non du fédéral. Par contre, le grand défi du gouvernement fédéral, c'est d'en arriver, comme on l'a fait dans le plan d'action, à aider les provinces dans leurs efforts pour améliorer l'accès à l'apprentissage de la deuxième langue officielle. On pourrait donc offrir des ressources et même examiner, comme certains l'ont fait récemment, les recommandations afin que les institutions postsecondaires s'engagent davantage à préserver les connaissances de l'anglais et du français qui ont été acquises au secondaire. En effet, dans plusieurs régions du pays, comme les institutions postsecondaires n'offrent pas de programmes ou de services en français, les jeunes perdent leurs connaissances dans cette langue.
:
Je suis désolée, madame Adam, d'avoir manqué votre présentation.
Vous avez dit tout à l'heure que c'est la minorité qui se préoccupe de la langue. On le comprend: c'est pour des raisons d'assimilation, etc. C'est un peu normal.
L'élément qui me frappe, depuis que je m'occupe de ce dossier, est la qualité de la langue. On aura beau parler de promotion de la langue seconde, si, en même temps, on ne met pas l'accent sur la qualité... Je ne parle pas seulement de traduction. On en a parlé tout à l'heure; c'était horrible.
Comment peut-on s'y prendre pour atteindre les gens qui parlent la langue?
Lorsque j'entends certaines personnes parler un « français » qui n'est pas du français, cela m'écorche. J'aimerais autant qu'ils me parlent en anglais, quand leur langue n'est pas le français.
Vous invitiez les gens à parler français et anglais en même temps. Nous avons déjà eu un premier ministre qui parlait deux langues secondes. Je ne crois pas que ce soit un idéal. Je comprends qu'il soit difficile d'arriver, dans un pays qui se dit bilingue, à avoir cette qualité de langue partout. Par contre, lorsqu'on prend la parole pour parler officiellement en français, à mon avis, il faudrait que ce soit véritablement du français.
J'ai déjà été moi-même très gênée, dans une enceinte internationale, devant un ministre qui lisait un texte d'une façon parfaitement incompréhensible.
Alors, de quelle façon peut-on s'y prendre afin que les gens réalisent que parler une langue, ce n'est pas seulement pouvoir donner un renseignement. Il y a plus que cela. Dans la mesure où je suis francophone ou anglophone, je concevrais très bien que la personne parle sa langue, tout en n'étant pas en désaccord sur le fait qu'on est dans un contexte bilingue. C'est très difficile, évidemment, puisque ça touche les personnes, mais il me semble qu'on devrait trouver une façon de régler cela, parce que non seulement c'est incompréhensible, mais on paraît très mal auprès des étrangers qui sont face à nous dans une telle situation.
L'autre élément concerne la dualité linguistique, l'espèce de juxtaposition qu'on fait de la dualité linguistique et de la diversité culturelle, qui, à mon avis, sont deux éléments complètement différents, qui n'ont, même à la limite, rien à voir. Vous me direz ce que vous en pensez.
En ce qui concerne les langues officielles, je conçois qu'on parle bien du français et de l'anglais. La promotion du français et de l'anglais, lorsqu'on parle de dualité linguistique, est une chose. On peut avoir pour objectif d'atteindre d'autres éléments, mais selon moi, cela ne cadre pas systématiquement dans la question de la promotion des langues officielles telle qu'on semble la faire de plus en plus.
Qu'en pensez-vous?
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C'était tellement intéressant que je vais poursuivre dans la même veine.
Madame la commissaire, je suis d'accord avec vous qu'il faut faire attention. Je ne pense pas que l'intention de la députée était d'envoyer le message qu'il faut parler un langue parfaitement, car cela gênerait certaines personnes.
Moi, Yvon Godin, à l'âge de 16 ans, quand j'étais dans le nord de l'Ontario, dans une petite ville qui s'appelait White River et que j'essayais d'apprendre l'anglais, je vous assure que je le cassais; je le casse encore. Or, aujourd'hui, je suis député et je représente une importante communauté anglophone de ma région. Je pense que les gens savent que mon anglais « fait dur », dirais-je dans mon français qui, lui non plus, n'est pas parfait. Cependant, ils l'acceptent et l'apprécient. Quand une personne fait l'effort de parler une langue seconde, je lui lève mon chapeau.
Autrement, on pourrait éliminer tous les Acadiens, car notre français fait parfois pitié. Enfin, peut-être aussi que c'est nous qui parlons le bon français, puisqu'on emploie encore des mots comme « icitte », venus du vieux français. Les phrases telles que: « Viens icitte, pis prends l'broom, pis ramasse la dust dans l'corner » sont encore courantes dans notre coin de pays. C'est notre culture, c'est nous. On s'exprime ainsi depuis 400 ans.
J'utilise du temps, mais c'est du temps à ma disposition pour poser des questions et faire des commentaires.
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Oui, certains ministères se démarquent par leur attitude. Des ministères peuvent avoir des difficultés, des ratés, etc. On le comprend. Il s'agit de grosses machines qui assurent plusieurs services. Pour ce qui est de l'attitude, je mentionnerais Air Canada, qui démontre beaucoup de résistance. Certains diront que c'est parce qu'Air Canada est une entreprise privée. Là n'est pas la raison. Elle a toujours agi de cette façon, même lorsqu'elle était constituée en société d'État, et ce, depuis la création du commissariat.
Les autorités aéroportuaires ont elles aussi de la difficulté à reconnaître leurs obligations au chapitre des langues officielles. Quand des institutions ne veulent pas se conformer à la loi, le commissariat doit envisager des recours beaucoup plus musclés, comme le recours judiciaire. C'est ce qu'on a fait dans le cas de VIA Rail. Air Canada est l'institution qui a fait l'objet du plus grand nombre de recours judiciaires, non seulement de la part du commissariat mais aussi de la part de plaignants.
Le ministère de la Défense nationale pose aussi problème. Vers la fin de mon mandat, ce ministère a fait l'objet de deux ou trois enquêtes. Nous avons consulté les rapports annuels des commissaires précédents et nous avons pu remonter jusqu'à l'époque du premier commissaire, M. Keith Spicer. Nous avons constaté qu'on avait fait à peu près les mêmes recommandations depuis 35 ans et que les mêmes problèmes persistent. Ce ministère mérite donc une attention vraiment sérieuse. Il y était question de représentation à l'étranger et au pays; les militaires sont partout.
Il y a également, bien sûr, Travaux publics et Services gouvernementaux. Ce ministère mérite également une attention très soutenue. On a parlé d'un dénouement favorable en ce qui concerne Guichet emplois, car c'était un dossier qui traînait. Il semble donc y avoir une volonté de changer la situation.
Le leadership devrait également être examiné. Je semble radoter, mais si les langues officielles ne sont pas soutenues par un leadership très fort au niveau du gouvernement, tant sur le plan politique qu'administratif, on n'avancera pas. L'appareil administratif est lourd et il a besoin d'une sorte de whip, au même titre que le gouvernement.
Le ministère du Patrimoine canadien a maintenant la responsabilité à la fois de livrer des programmes en matière de langues officielles et de faire fonction de coordonnateur, de whip, pour l'ensemble des institutions fédérales, y compris lui-même. La façon dont il pourra jouer ces deux rôles simultanément n'est pas claire, et j'ai des inquiétudes à cet égard.
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D'abord, j'aimerais mentionner que nous nous sommes beaucoup intéressés à la représentation du gouvernement fédéral dans le cadre de la dualité linguistique sur la scène internationale. Nous avons fait deux études qui pourrait peut-être vous intéresser.
Il y en a une qui porte sur les politiques du ministère des Affaires étrangères. Comment ce ministère intègre-il la dualité linguistique dans ses politiques? Nous faisons un suivi de cette étude, qui a été publiée en 2004 ou en 2005.
Nous avons également fait une étude des sites web des ambassades et des missions étrangères ici, au pays, ainsi que des organisations internationales dont les deux langues officielles étaient le français et l'anglais. Ce fut très révélateur. Cela pourrait peut-être vous intéresser également.
La dualité linguistique se rapporte à l'égalité ou à la reconnaissance du statut d'égalité des deux langues officielles au pays. On parle de droits linguistiques enchâssés dans la Constitution canadienne et de la Loi sur les langues officielles. On parle aussi de valeurs. Derrière tout projet de loi, il y a une vision, et la Constitution ne fait que traduire la vision d'un pays en termes juridiques.
En ce qui me concerne, les valeurs qui sous-tendent la dualité linguistique sont l'égalité entre les citoyens, le respect de la différence et la justice.
Qu'est-ce qui réunit ces deux concepts?
Au Canada, la diversité culturelle s'exprime dans deux langues, le français et l'anglais. D'abord, je porte mon épinglette du commissariat, qui illustre vraiment le mariage entre les deux grandes communautés linguistiques. Elle représente aussi le tissu social du Canada. Chaque communauté linguistique est représentée, et le tissu qui la compose est fait de nombreux fils représentant les différentes cultures.
Le Canada, et le Québec par la suite, a été l'un des défenseurs de la diversité culturelle à l'UNESCO. Dans cette déclaration, on mentionne la diversité culturelle, mais non la diversité linguistique.
En ce qui me concerne, ce qui réunit la diversité culturelle et la dualité linguistique, c'est que ces deux concepts sont basés sur les mêmes valeurs, soit l'égalité entre les citoyens, peu importe la culture qu'ils transportent avec eux, le respect de la différence, parce qu'être ouvert aux différentes cultures c'est aussi respecter et accueillir cette différence, et, bien sûr, la justice sociale.
À mon avis, la dualité linguistique canadienne existe parce que les gens qui ont construit ce pays ont adopté deux langues officielles, deux cultures, deux religions, deux systèmes juridiques, etc. C'est ce qui a façonné le tempérament des Canadiens, car ils ont toujours vécu avec cette espèce de malaise et d'inconfort causé par l'obligation de côtoyer constamment la différence, contrairement à la situation dans un État unitaire. C'est ce qui fait aussi que le Canada et les Canadiens sont reconnus dans le monde comme étant un peuple qui, bien qu'il ne soit pas parfait en ce qui concerne l'accueil des immigrants, est plus accueillant que la plupart des autres nations au monde.
À mon avis, c'est parce qu'on a grandi et adopté un modèle basé sur la diversité. La dualité linguistique est une différence. C'est dans ce sens que les deux font partie d'un tout, qu'elle se nourrissent mutuellement.
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Tout d'abord, il faudra définir cette notion de gouvernance horizontale, et nous avons un chapitre entier à ce sujet dans mon rapport annuel. Nous avons publié d'autres ouvrages sur la question et examiné les travaux déjà existants. Nous avons constaté qu'il existait diverses définitions de cette notion, et c'est donc un problème.
Nous avons choisi notre propre définition. Pour nous, cela ne veut pas dire qu'on gère une entreprise ou un ministère ensemble. Par gouvernance horizontale des langues officielles, nous entendons le mécanisme mis en place pour garantir la continuité de la coopération entre les ministères.
Parlons des institutions fédérales. Il s'agit d'un dossier horizontal. On ne parle pas de transport ou de patrimoine. On parle de tous les ministères et de l'utilisation au gouvernement d'une démarche uniforme axée sur les résultats, et on parle évidemment de rapports entre les ministères et la société civile.
Il existe déjà des exemples de mécanismes horizontaux. Par exemple, dans le secteur de la santé, certains mécanismes ont fait leurs preuves. Dans ce domaine, il y a deux comités — au niveau communautaire et ministériel — qui se concentrent sur la question, élaborent un plan, précisent les priorités et conçoivent ensemble une sorte de plan d'action, répartissent les ressources et évaluent les résultats.
Je pourrais continuer. Il y a la même chose au niveau de l'immigration. Cette coopération entre communautés, intervenants et gouvernements a par exemple permis au gouvernement fédéral de signer avec les provinces des ententes comportant des clauses linguistiques qui tiennent compte de la spécificité des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Comme le gouvernement fédéral était en prise sur les communautés, il pouvait plus facilement établir avec les provinces un dialogue à propos de ces communautés. C'est la même chose qui s'est passé avec le dossier de la petite enfance.
C'est donc le mécanisme que nous encourageons et le résultat que nous visons.
Est-ce que j'ai répondu à votre question?
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J'ai abordé ce sujet plus tôt. J'ai des inquiétudes et en voici les raisons.
Avant 2001, il n'y avait pas de ministre responsable des langues officielles. C'est à la suite de certaines de mes recommandations et de celles de plusieurs autres groupes qu'on a jugé qu'il était important d'avoir, puisqu'on parle d'un dossier qui concerne tous les ministères, un champion, un leader dont la responsabilité serait de coordonner, de stimuler, parfois même de fouetter au besoin certains ministères qui ne respecteraient pas leurs obligations. De plus, cette responsabilité devrait être exercée par le gouvernement par l'entremise d'un groupe de ministres responsables des langues officielles et d'un groupe de sous-ministres.
Ce ministre responsable des langues officielles ne s'occupait pas de la livraison des services. Il avait un regard plus indépendant, de l'extérieur. On se retrouve maintenant dans une situation où on a toujours un ministre responsable des langues officielles, mais qui est à la fois responsable de la prestation des programmes de langues officielles, qui sont des programmes majeurs livrés par Patrimoine canadien, et qui jouit toujours de l'appui du même sous-ministre.
Je connais peu de personnes qui peuvent avoir l'indépendance pour défendre leur ministère et livrer des services — c'est leur rôle de le faire —, tout en agissant comme critiques de leur propre ministère. Il s'agit là d'un problème. Même s'il y a deux structures distinctes, il demeure que c'est toujours le même sous-ministre et deux sous-ministres adjoints.
Comment pourront-ils envoyer un message distinct à l'appareil administratif fédéral? À mon avis, il y a danger de confusion et de conflit de rôles. Lorsque cette situation se produit dans une organisation — on a tous été membres d'organisations —, c'est la stagnation. Le risque, c'est la stagnation. On passe plus de temps à essayer de se faire comprendre et à clarifier les choses qu'à agir véritablement.
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Je vais d'abord répondre à votre dernière question. Quand j'ai commencé mon mandat, on me disait que la Loi sur les langues officielles était comme un monument, c'est-à-dire qu'on n'y touchait que si c'était absolument nécessaire.
Après avoir passé sept ans en poste, je constate qu'on a modifié la loi de façon importante, sans qu'il n'y ait vraiment eu de débat. Il n'y a pas eu de remous dans la société, et la loi a beaucoup plus de mordant.
Selon moi, si le gouvernement agissait face à la partie VII comme on le lui a recommandé, il ferait du bon travail. La loi est plutôt bien, en ce moment. Il suffit de mettre l'accent sur les outils de mise en oeuvre, comme la réglementation. Selon moi, ce devrait être la priorité pour un certain temps.
L'autre question portait sur le Plan d'action pour les langues officielles. Je sais que le gouvernement actuel s'est engagé à le soutenir et à le respecter, mais on ne sait pas. Le Plan d'action pour les langues officielles avait des objectifs différents. Un de ces objectifs touchait la fonction publique fédérale. On visait à ce que la fonction publique soit exemplaire en matière de langues officielles. Les ressources allouées à cet objectif l'étaient pour trois ans. On peut se demander ce que va faire le gouvernement actuel. Il n'a rien annoncé. Va-t-il maintenir le Fonds d'innovation pour les langues officielles? Va-t-il maintenir les investissements additionnels pour la formation linguistique? Nous n'avons pas encore suffisamment de main-d'oeuvre bilingue. C'est une des questions qui se pose de façon immédiate, en ce qui a trait au Plan d'action pour les langues officielles.
Comme il se termine en 2008, il est important de penser au réinvestissement et à la démarche qui sera entreprise presque immédiatement par le gouvernement pour s'assurer de le réviser et d'y ajouter, au besoin, d'autres éléments qui ont été négligés. À mon avis, votre question est très pertinente et c'est le moment, pour le gouvernement, de se pencher sur cette question.