:
Merci, madame la présidente.
Je suis heureux de prendre la parole devant le comité au sujet de l'enquête que le Bureau du Conseil privé a récemment menée sur la divulgation non autorisée de renseignements diplomatiques sensibles. Vous avez déjà présenté tous mes collègues, et mieux que je ne l'aurais fait.
Le 5 mars 2008, le premier ministre m'a demandé d'entamer une enquête de sécurité interne sur les allégations de divulgation non autorisée concernant M. Brodie et l'ambassadeur Wilson au sujet des positions supposées des candidats démocrates aux présidentielles américaines sur l'Accord de libre-échange nord-américain, et de la divulgation non autorisée d'un rapport diplomatique envoyé par le consul général du Canada à Chicago le 13 février 2008.
[Traduction]
Le 22 mai 2008, j'ai remis au premier ministre le rapport d'enquête sur la divulgation non autorisée de renseignements diplomatiques sensibles, dans lequel les résultats et conclusions de l'enquête étaient formulés, ce dont nous parlerons aujourd'hui. Le rapport a été rendu public le lendemain et peut être consulté sur le site Web du BCP.
L'enquête avait pour but de déterminer la chronologie des faits pertinents qui ont précédé et suivi la divulgation de l'information, d'établir aussi précisément que possible la ou les sources de la divulgation, de rendre compte des résultats de l'enquête et de formuler des recommandations en vue de réduire les risques que de tels incidents ne se reproduisent.
L'enquête a été dirigée par le directeur des opérations de la sécurité du BCP. Les services indépendants et professionnels de la firme BMCI Investigations & Security Limitée ont été retenus en raison de la portée et de la complexité de l'enquête ainsi que de la quantité d'information à examiner. Nous avons ici aujourd'hui deux des directeurs de cette firme.
Comme l'indique le rapport, l'enquête a été effectuée de manière exhaustive, systématique et impartiale, en conformité avec les normes d'enquête établies. Je suis certain que M. Tardif et nos deux enquêteurs principaux vous décriront ces normes.
[Français]
Le processus d'enquête entrepris comprend une excellente documentation, des entrevues approfondies avec 36 personnes, la collecte et l'analyse de données de sources fiables et l'examen des remarques obtenues de diverses sources secondaires au cours des réunions et des séances d'information. La Direction générale de la sécurité du renseignement du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, représentée ici par M. Paul Meyer, la Division de l'informatique et des services techniques ainsi que la division des Services de télécommunications du BCP, qui est également représentée ici, ont aussi contribué à l'enquête, en plus des agents de sécurité de quatre autres ministères fédéraux.
L'enquête a été exhaustive et indépendante. Elle a nécessité la collecte et l'analyse d'une vaste quantité de renseignements dans un délai relativement court. Les 36 fonctionnaires et membres du personnel politique interrogés étaient des responsables du Cabinet du premier ministre, du Bureau du Conseil privé, de l'Administration centrale du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international à Ottawa, de l'ambassade canadienne à Washington, du consulat général à Chicago et du cabinet du ministre des Affaires étrangères. Plusieurs d'entre eux ont été interrogés deux fois.
[Traduction]
Outre les entrevues, l'enquête a consisté à examiner les relevés des appels téléphoniques passés à partir du bureau par les personnes d'intérêt sur leurs téléphones conventionnels ou leurs téléphones cellulaires pendant la période visée. Les enquêteurs cherchaient d'éventuelles preuves de communication avec les médias ou avec d'autres interlocuteurs d'intérêt, tant au Canada qu'aux États-Unis. Les relevés des télécopies envoyées pendant la même période à partir des appareils qu'utilisent les personnes d'intérêt ont également été scrutés. De même, tous les courriels de ces mêmes personnes ont été examinés afin de déterminer qui savait quoi et à quel moment, et si des transmissions répréhensibles ont eu lieu.
Enfin, les boîtes aux lettres électroniques (classifiées, non classifiées et BlackBerry) des fonctionnaires fédéraux et des employés des cabinets des ministres qui ont reçu le rapport diplomatique original de Chicago ont été examinées. Cette recherche a servi à vérifier à quels autres destinataires le rapport a été transmis, et à déterminer si ces transmissions auraient dû avoir lieu ou non.
Au cours de l'enquête, les noms de quelques citoyens américains qui auraient pu être en contact avec des responsables canadiens qui avaient accès au rapport ont été cités. Ce fait est explicitement mentionné dans le rapport d'enquête, à la page 8.
Aucun enquêteur mandaté par le gouvernement canadien, y compris un membre de la GRC, n'a compétence pour agir sur le territoire des États-Unis sans le consentement du gouvernement américain ou des autorités de police locales. Par conséquent, les enquêteurs ont adopté une approche axée sur les employés de cabinets ministériels et les fonctionnaires travaillant pour le gouvernement du Canada qui auraient pu être en contact avec ces citoyens américains. Cette approche consistait à interroger ces responsables, à effectuer un examen approfondi des relevés de leurs appels téléphoniques, de leurs envois de télécopies et de messages électroniques, ainsi que de leur correspondance électronique.
Le rapport d'enquête décrit la méthodologie et la procédure suivies par les enquêteurs. Il comprend une chronologie des faits importants, résume l'analyse et les constatations des enquêteurs et présente des recommandations visant à renforcer les mesures de protection de l'information. Les conclusions du rapport reposent entièrement sur les constatations de l'équipe d'enquête indépendante qui a travaillé en collaboration avec le directeur des opérations de la sécurité du BCP. La section 5 du rapport, madame la présidente, présente les conclusions de l'enquête, à savoir:
Premièrement, rien de ce que M. Brodie peut avoir dit pendant le huis clos du budget, le 26 février, n'a révélé quoi que ce soit au sujet du rapport diplomatique dont il n'a eu connaissance que le 28 février. Aucun élément de preuve ne démontre que M. Brodie a divulgué des renseignements classifiés.
Deuxièmement, l'enquête n'a pas permis d'établir que l'ambassadeur Wilson a révélé quelque information que ce soit au sujet du rapport diplomatique ou de la position des candidats à la présidence des États-Unis à l'égard de l'ALENA, quoique ces propos aient sans doute aidé le journaliste à suivre la piste conduisant au camp du sénateur Obama. Aucun élément de preuve ne démontre que l'ambassadeur Wilson a divulgué des renseignements classifiés.
Troisièmement, l'enquête n'a pas permis de déterminer qui a divulgué le rapport, à qui, ni s'il y a eu plus d'une fuite.
Quatrièmement, le rapport diplomatique original de Chicago a été incorrectement classifié. Il était sans classification et la liste de distribution n'était pas assez restreinte (232 adresses).
[Français]
Madame la présidente, voilà l'aperçu des faits.
[Traduction]
Je répondrai maintenant volontiers aux questions des honorables membres du comité et de mes collègues également.
Merci.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Je voudrais remercier les témoins d'être ici. Merci beaucoup.
Comme vous le savez, il s'agit d'une question importante. Dans les médias, on dit « NAFTAgate » pour parler de cette question, c'est-à-dire la divulgation non autorisée de renseignements diplomatiques sensibles.
Nous estimons qu'il s'agit d'une infraction très grave à la sécurité qui a terni notre réputation internationale. Il y a beaucoup de questions qui demeurent sans réponse relativement au mandat. Le principal objectif de votre comparution devant notre comité est de répondre à certaines préoccupations que nous avons et à certaines questions qui demeurent sans réponse.
Monsieur Lynch, vous avez dit que votre mandat était en réalité d'examiner les fuites verbales, et plus particulièrement la note de service qui a fait l'objet d'une fuite.
Ma première question concerne les journalistes de CTV qui ont en fait relaté l'information. Pourquoi n'a-t-on pas communiqué directement avec eux? Pourquoi avez-vous choisi de passer par CTV? Pourquoi n'a-t-on pas communiqué directement avec les journalistes? Manifestement, leur témoignage serait crucial pour le processus, particulièrement par rapport à ce que les fonctionnaires disaient.
Premièrement, c'est le rôle du Bureau du Conseil privé de fournir des conseils non partisans au gouvernement, peu importe le parti au pouvoir. C'est son travail. C'est le rôle du greffier. C'est le rôle de chaque fonctionnaire au Bureau du Conseil privé. Et cela s'applique à chaque aspect de notre travail quotidien, qu'il s'agisse des enquêtes de cette nature ou d'autre chose.
Deuxièmement, il faut comprendre qu'il s'agissait d'une enquête très vaste, indépendante, globale. Depuis que je suis greffier du Bureau du Conseil privé, je crois que c'est la première fois que nous embauchons une agence externe qui a la capacité d'enquêter et l'expérience de BMCI pour faire une telle chose. En effet, on a mené cette enquête en faisant preuve de la rigueur cherchée, je crois, par le premier ministre et également de l'indépendance que je voulais absolument obtenir. M. Tardif a mené l'enquête, en travaillant avec deux enquêteurs, qui sont ici pour vous parler aujourd'hui. Ils ont mené cette enquête sans condition. Le mandat a été clair. Il n'y avait pas de contraintes. Les résultats et les conclusions contenus dans mon rapport, dont je rends compte, ont été validés par les enquêteurs.
Il faut mettre les choses dans leur contexte afin de comprendre pourquoi cela a soulevé un tel tollé. En effet, je pense que le problème va bien plus loin que le fait qu'un fonctionnaire se soit trompé dans une ambassade. La possibilité qu'une campagne démocrate qui soulevait des questions liées à l'ALENAgate a de toute évidence eu des conséquences importantes pour le gouvernement minoritaire conservateur qui appuie le libre-échange sans réserves. Nous avion donc une campagne... M. Obama, plus particulièrement, se démarquait, ce qui surprenait les gens. Ces primaires approchaient et la question de l'ALENAgate exerçait beaucoup de pression sur le gouvernement au Canada. Le 21 février, chez nous, le gouvernement tentait de limiter les dégâts en disant que les candidats à l'investiture démocrate ne prenaient pas cette question au sérieux, qu'il ne fallait pas s'inquiéter, pas du tout.
M. Brodie est allé à Washington le 25 février. Donc, dès le début de cette histoire, il se trouvait à Washington. Le 26 février, au cours du huis clos, M. Brodie dit aux journalistes de ne pas s'inquiéter. Il leur donne sa parole que ce problème n'est pas sérieux puisqu'ils savent tous très bien ce que les campagnes de M. Obama et de Mme Clinton ne font que lancer de belles paroles. Le lendemain, le 27 février, CTV discute avec l'ambassadeur Wilson afin de savoir s'ils ont discuté avec les représentants des campagnes de M. Obama et de Mme Clinton. L'on confirme ce fait. Puis, le 2 mars, l'Associated Press reçoit un rapport diplomatique dont nous ne pouvons trouver la source.
Il me semble évident que, à prime abord, le gouvernement qui essayait de saper un débat des candidats démocrates sur l'ALENAgate faisait ce qu'il pouvait... Je ne vois pas comment vous pouvez nous dire que M. Wilson, avec toute son expérience politique, connaissant tout le caractère délicat qu'il y avait à prendre la parole dans le cadre d'une primaire de cette importance, pensait qu'il pouvait parler en toute confidentialité.
Vous attendez-vous véritablement à ce qu'on vous croie sur parole qu'il s'agit tout simplement de l'erreur d'un petit chiffreur sans importance, que quelqu'un au Cabinet du premier ministre doit être tenu responsable d'avoir tenté d'influencer les primaires démocrates et de faire oublier l'histoire de l'ALENAgate?
:
Monsieur, j’ai travaillé pendant un certain temps comme journaliste-enquêteur. Je dois vous dire que je ne commençais pas mes recherches avec le document, mais plutôt avec la source.
Donc, M. Brodie rentre de Washington et fait une observation non officielle en disant qu’il ne fallait pas s'inquiéter et que le camp de M. Obama n’était pas sérieux. Puis, le 27 février, M. Wilson a eu une conversation. Les journalistes commencent à fouiller plus loin. Ils se rendent compte qu’il y a sans doute une histoire. Ils commencent à contacter toutes leurs sources et quelqu’un leur donne un document.
De dire que M. Brodie n’a pas vu le rapport avant d’avoir cette conversation et que M. Wilson ne l’avait pas vu non plus me semble une tactique de diversion. M. Wilson en aurait su bien davantage sur les campagnes de Mme Clinton et de M. Obama que ce qu’une note d’information de Chicago pouvait contenir.
Il faut plutôt se demander pourquoi M. Wilson et M. Brodie ont parlé d’un sujet aussi sensible. Cela fait en sorte que l’histoire a été connue avant même qu’il n’y ait de fuite à Chicago.
J’aimerais maintenant parler des recommandations. Elles sont complètement inutiles. On recommande d’abord de rappeler périodiquement aux destinataires des rapports diplomatiques le caractère sensible de ces documents. Je ne comprends pas pourquoi on devrait rappeler aux diplomates d’agir ainsi.
Ensuite, on recommande que tout futur engagement signé par les représentants des médias avant l’admission à un huis clos prébudgétaire devrait indiquer clairement que les propos tenus par les responsables du gouvernement du Canada et les employés de cabinets ministériels sont à titre d’information seulement et qu’ils ne doivent pas leur être attribués. Grosso modo, on est en train de dire que M. Brodie a tout bousillé, mais qu’on va accuser à la place les médias d’avoir fait leur travail. M. Brodie parlait de quelque chose qui ne portait pas du tout sur le budget. Il était en train de faire une fuite afin de miner la campagne des démocrates. Cela n’avait rien à voir avec le budget. Il devrait être tenu responsable des observations qu’il a faites, peu importe s’il les a faites dans le cadre du huis clos ou dans un bar ou un avion.
J’arrive maintenant à la dernière recommandation. Vous suggérez que, pour remédier à ce problème, il faudrait offrir davantage de formation en ligne à l'intention de tous les utilisateurs du corps diplomatique pour qu’ils sachent comment réagir dans de telles situations à l'avenir. Je ne vois franchement pas comment on peut s’attendre à ce que le public canadien croie que ce rapport répond à la gravité de la situation où un ambassadeur et un conseiller du CPM se sont ingérés dans la campagne de M. Obama, ont fait une fuite qui sapait cette campagne -- et aurait même pu causer un préjudice irréparable.
:
Merci, madame la présidente. J'aimerais remercier les témoins.
Monsieur Lynch, dans le résumé de votre rapport, vous avez conclu essentiellement que l'enquête n'avait pu déterminer qui avait coulé le rapport, à qui il avait été envoyé ou s'il y avait eu une seule fuite. En d'autres termes, vous nous dites que le rapport n'est pas parvenu à aller au fond des choses.
Comme l'a déjà mentionné mon collègue, vos quatre premières recommandations sont très faibles. Elles ne font que rappeler aux gens leurs responsabilités et traitent de séances de formation.
Pensez-vous que cela est acceptable pour le public? En effet, il s'agit d'un problème très grave, de renseignements confidentiels qui ont été divulgués et d'ingérence dans les primaires du Parti démocrate aux États-Unis. Ne croyez-vous pas que, étant donné la nature du scandale, le public et les parlementaires étaient justifiés de s'attendre à ce que l'on aille bien plus loin que de tout simplement rappeler aux gens de ne pas oublier leurs responsabilités?
:
D'abord, au sein du Bureau du Conseil privé et partout au gouvernement, en tant que hauts fonctionnaires, nous prenons extrêmement au sérieux la protection des renseignements sensibles. Le processus à suivre est fort complexe.
Cette question touchait deux choses. D'abord, il y avait la question du rapport. Il fallait savoir qui y avait accès, qui pouvait le consulter et quelle était sa classification. Une des recommandations et une des leçons que nous avons tirées de cette histoire c'est que les documents diplomatiques sensibles doivent être mieux classifiés et contrôlés. Le fait même que cela n'a pas été le cas fait en sorte que cette recommandation sera très importante pour l'avenir. Je ne trouve pas qu'elle soit inutile. En effet, étant donné les circonstances, elle me semble plutôt essentielle. Les gens changent d'emploi et les circonstances peuvent changer. Afin de protéger la confidentialité d'un document, il faut constamment rappeler aux gens la valeur du document en question et leur dire comment l'aborder.
Ensuite, ce serait fantastique si chaque enquête arrivait à répondre à tous les objectifs. Mais ce n'est pas le cas. Je crois que les deux enquêteurs vous diront que l'on n'arrive jamais à atteindre tous les objectifs. Cela ne veut pas dire que l'enquête n'était pas d'une excellente qualité, exhaustive ou approfondie. Je suis convaincu qu'elle l'était.
Mais, malgré tous les efforts déployés par M. Cummins et M. Tardif, l'enquête n'a pas pu déterminer la source de la fuite, à qui les renseignements avaient été donnés et à combien de reprises cela s'est produit.
:
Si vous me permettez, j'aimerais revenir à la nature d'une enquête. On ne peut pas fonctionner en se basant sur la spéculation. Nous ne pouvons qu'utiliser des preuves empiriques. C'est ce que les deux enquêteurs et M. Tardif ont fait. Nous avons déployé beaucoup d'efforts pour tenter de voir qui avait fait quoi.
Comme je l'ai déjà mentionné, suite aux deux mois de travail des deux enquêteurs principaux, l'on n'a trouvé aucune preuve d'acte criminel. J'aimerais d'ailleurs souligner que ces deux enquêteurs sont des personnes chevronnées qui travaillent dans des forces policières nationales. Ils ont déployé beaucoup d'efforts.
Je pense aussi que le rapport permet aux gens de mieux comprendre la chronologie et la chaîne des événements par rapport aux opinions et points de vue qui circulaient à l'époque.
De plus, cela nous a permis de déterminer, au meilleur de nos connaissances, ce que l'ambassadeur Wilson et M. Brodie peuvent avoir ou ne pas avoir dit.
Donc, dans un domaine aussi complexe et rempli d'inconnues, je pense que le rapport nous a fait progresser.
:
J'ai commencé à travailler pour la GRC en 1967 et j'ai pris ma retraite en 2001. J'ai travaillé dans divers domaines depuis.
J'ai travaillé avec le commissaire Romanow, dans le cadre de la Commission sur l'avenir des soins de santé au Canada.
J'ai effectué un examen opérationnel du programme de liaison et de formation international de la GRC en 2002-2003.
De 2003 à 2007, j'ai été co-enquêteur pour le Tribunal d'enquête sur le An Garda Síochána concernant certains méfaits du Gardai dans le comté de Donegal, en Irlande. J'étais chargé de la réalisation des entrevues, de la recherche, de la mise en place de pratiques exemplaires internationales, de conseiller le tribunal en ce qui concerne ces pratiques exemplaires et où trouver de l'information là-dessus, d'identifier des experts en la matière et où les trouver, et de les faire venir en Irlande. L'expertise en la matière comprenait, notamment, la balistique, la graphoanalyse, l'étude de documents et, surtout, les pratiques exemplaires portant sur les méthodes d'entrevue et les questions à poser comme on le fait partout dans le monde. J'ai invité des experts du Canada, du Royaume-Uni et de la Nouvelle-Zélande à témoigner devant le tribunal.
J'ai acquis beaucoup d'expérience au sein de la GRC à titre d'inspecteur-détective en enquêtant sur des fuites de documents sensibles, y compris le document constitutionnel et, plus récemment, la prétendue fuite budgétaire, également connue comme l'affaire Doug Small. J'étais enquêteur dans l'affaire de la fuite du document constitutionnel. Dans l'affaire Small, j'étais directeur des enquêtes de sécurité nationale chargé de ce genre d'enquêtes qui pouvaient faire intervenir la Loi sur les secrets officiels.
J'ai également effectué d'autres enquêtes politiquement sensibles au nom du président de la Chambre des communes et d'autres.
Donc, dans bien des cas, mon expertise portait sur l'abus de confiance, en vertu de l'ancien article 118 du Code criminel du Canada. C'est à peu près tout ce que je peux vous dire.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Selon votre rapport, Ian Brodie a probablement parlé à un journaliste au sujet de l'ALENA. À mon avis, cela veut dire qu'il a effectivement parlé à un journaliste. Et le rapport précise qu'il n'a pas révélé ou transmis quelque renseignement confidentiel que ce soit, mais c'est quelqu'un qui est en possession de renseignements diplomatiques sensibles, des informations confidentielles. C'est le chef de cabinet du premier ministre. Je ne crois pas qu'il ait besoin de donner des notes de service ou des éléments précis pour transmettre un message. Un simple commentaire de sa part peut être très significatif. Donc, je crois qu'il y a un peu de confusion à ce sujet.
Il n'a peut-être pas remis une note de service en tant que tel, mais même s'il a fait un commentaire à ce sujet, peu importe qu'il se soit trompé sur les noms « Clinton » ou « Obama ». Il est quand même un chef de cabinet en possession de renseignements confidentiels. La fuite peut être attribuée à son manque de discrétion, et je crois que cela est clairement démontré dans le rapport. C'est comme ça que je l'interprète , et bon nombre de Canadiens aussi.
Je connais la raison. Monsieur Lynch, je sais que vous ne voulez pas commenter sur la raison pour laquelle le chef de cabinet du premier ministre, un chef de cabinet conservateur, qui a des liens avec le Parti républicain, ferait un tel commentaire. C'est une question qui pourrait peut-être être discutée plus tard.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
La question de la criminalité a été soulevée à quelques reprises, et je crois que c'est une autre façon de noyer le poisson. Je crois qu'il s'agit d'un abus de confiance. Il y a eu une fuite de renseignements confidentiels, ce qui a terni notre réputation internationale. Si nous l'avions vraiment voulu, je crois que nous aurions pu trouver la source de cette fuite.
Quelque chose me taraude — et, monsieur Lynch, peut-être que vous pourriez répondre —, et c'est toute la question de conflit d'intérêts. Vous avez une relation de travail très proche avec le chef de cabinet, Ian Brodie, et on vous demande d'effectuer une enquête sur M. Brodie et son manque de discrétion, ainsi que son rôle en tant que déclencheur de ce gâchis, disons, ou ce problème ou incident international. On vous demande d'effectuer une enquête sur quelqu'un avec qui vous collaborez de façon très proche. Ceci pose-t-il un conflit d'intérêts?
:
Je vais commencer en répondant à votre dernière question: non, cela ne pose pas de conflit d'intérêts. Comme je l'ai dit plus tôt, mon rôle est d'être tout à fait non partisan dans toutes mes transactions avec le premier ministre et son cabinet, y compris lorsqu'il nous demande d'effectuer une enquête.
Dans ce cas, nous avons demandé à M. Tardif, pas moi, de diriger cette enquête. Je suis responsable des résultats de l'enquête et du rapport, et je suis en fait très content de sa rigueur. Mais ce rapport a été élaboré par un tiers. Nous avons recruté une entreprise avec une excellente réputation pour produire ce rapport, sous la direction de M. Tardif. J'ai reçu des directives selon lesquelles cette entreprise devrait avoir toute la latitude nécessaire dans son enquête. Voilà ce qui constitue l'indépendance du rapport.
J'aimerais revenir à votre question précédente sur M. Brodie et sur les conclusions du rapport. Si vous remontez dans le temps, je crois qu'il y avait beaucoup d'incertitude et de questions au sujet de ce que M. Brodie peut avoir dit ou ne pas avoir dit. Dans les conclusions du rapport, je crois que des enquêteurs ont fourni beaucoup d'éclaircissements.
Selon les enquêteurs, même s'il y a des avis différents, les preuves les plus fiables que nous avons indiquent que M. Brodie aurait parlé au journaliste au sujet de l'ALENA, dans le huis clos, et qu'il lui aurait dit qu'il y avait eu un contact entre les gens de la campagne de la sénatrice Clinton et l'ambassade à Washington. On ne parle pas de la campagne du sénateur Obama, et je crois qu'il y a là une différence importante. Je crois que le travail des enquêteurs a contribué à clarifier cette question.
:
L'examen exhaustif, très exhaustif des communications électroniques pendant une période de 24 mois couvrait les échanges qui auraient pu avoir lieu entre certaines parties et certains représentants ministériels et d'autres. Je peux vous assurer qu'il n'y a absolument rien, absolument rien, dans ces échanges pendant cette période de 24 mois qui laisserait entendre de quelque façon que ce soit que les rapports entretenus par ces personnes avec des fonctionnaires du gouvernement canadien étaient autre chose que des échanges et activités politiques légitimes.
J'irais encore plus loin en disant que la documentation semble indiquer que ces personnes n'avaient rien à voir avec la divulgation alléguée. Selon moi, et cela a été mon approche pendant toute ma carrière à la GRC et ailleurs, il serait plutôt déplacé de s'intéresser à quelqu'un suite à de la spéculation, ou de la spéculation non fondée. Il n'y avait aucune preuve qui aurait pu indiquer que cette personne aurait participé à la divulgation non autorisée.
Monsieur le président, je ne m'oppose pas à la description des renseignements confidentiels faite par M. Bains, quoique j'inviterais le comité à tenir compte du fait que les observations faites par M. Brodie étaient du domaine public. Ce n'était pas confidentiel. Il ne s'agissait pas de renseignements diplomatiques confidentiels.
L'enquête a démontré que ces types d'observations et de commentaires circulaient au Capitol à Washington à l'époque. C'était un sujet de conversation comme les séries mondiales, comme la Coupe Stanley le serait au Canada, en ce qui a trait à qui disait quoi. Il y avait des commentateurs des deux côtés de l'affaire qui faisaient des observations, qu'ils aient été sérieux ou non.
Donc je ne suis pas ici pour remplacer...
:
Merci, madame la présidente. Malgré la décision que vous avez rendue selon laquelle cette question est pertinente à l'étude que fait notre comité aujourd'hui, je voulais rappeler aux membres que le comité se réunit pour déterminer si la portée de l'examen était appropriée.
À cet égard, je voulais reprendre une question posée plus tôt par M. Kramp en ce qui a trait à la méthodologie qui a été utilisée. Le point numéro 3, à la page 2 du rapport, indique ce qui suit.
L’enquête a été effectuée de manière exhaustive, systématique et impartiale afin qu’elle atteigne les objectifs fixés, en conformité avec les pratiques prescrites par l’Association des examinateurs certifiés de fraude et l’Institut des vérificateurs internes. Les normes généralement reconnues ont été respectées, de façon à ce que soient recueillies suffisamment de preuves empiriques pertinentes pour permettre de juger de la véracité des allégations donnant lieu au présent rapport.
Ça me fait penser à une phrase écrite à la fin de mes états financiers par les vérificateurs et qui dit « Vérifié conformément aux principes comptables généralement reconnus ». Je le crois, et cet énoncé m'importe.
Pourriez-vous me donner brièvement, en deux ou trois minutes, une idée de ce que seraient ces principes comptables généralement reconnus? Je sais que je vous en demande beaucoup en peu de temps, mais je crois que cela pourrait aider un profane comme moi à comprendre de quoi il est question.
:
Puis-je me référer à un document ici?
Selon la pratique courante, on énonce clairement la portée de l'activité, le mandat, ce qui est recherché, et dans quelle direction les activités se poursuivront. On s'entend à l'avance sur les méthodes qui seront utilisées pour déterminer comment procéder. On se familiarise avec les pratiques de travail et les activités du client. En ce sens, puisque c'était le gouvernement du Canada, dont M. Bird et moi-même avons beaucoup d'expérience, il ne s'agissait pas de comprendre l'appareil gouvernemental ou les enquêtes internationales. Il fallait utiliser les pratiques généralement admises, se concentrer sur l'objectif principal et les renseignements factuels, écartant toute spéculation. En effet, c'est appuyé par une
[Français]
pièce justificative
[Traduction]
d'une façon ou d'une autre.
Je vais un peu plus loin, en effet. Une fois que nous avons recueilli les renseignements provenant de toutes les sources différentes, sources ouvertes, communications électroniques, relevés de télécopieur, relevés des appels téléphoniques, des BlackBerry, et plusieurs milliers de pages de données électroniques, tout est examiné, analysé et énuméré en ordre chronologique, ensuite on prépare le rapport.
Je dois dire qu'il est extrêmement facile de préparer le rapport une fois le calendrier établi. La chronologie, c'est la bête noire. C'est en fonction de la chronologie que l'on sait ce qui va pouvoir se retrouver dans le rapport.
Voilà ce que nous faisons, et pour ce qui est de BMCI, une fois que cela est fait, il y a le processus d'assurance de la qualité qui intervient; le président s'assure que toute déclaration se trouvant dans le document peut être appuyée par une source primaire. Il peut s'agir d'une note écrite en entrevue. Ça peut être un article de journal, des renseignements de l'Associated Press, etc. Mais tout énoncé dans le rapport doit pouvoir être appuyé par une pièce justificative.
:
Merci, madame la présidente.
Messieurs, au début j'ai dit que je ne pouvais pas apprécier correctement votre rapport. Je peux quand même, après vous avoir écouté pendant une heure trente, vous faire part de ma vision et de mes conclusions sur toute cette histoire. Je vais faire des commentaires, mais vous n'êtes pas obligés d'y répondre.
Monsieur Lynch, dans votre document d'introduction, vous avez dit que l'enquête avait été exhaustive et indépendante. Je pense qu'elle a été indépendante. Par contre, je doute qu'elle ait été exhaustive puisque, et vous le disiez vous-même, les délais étaient trop courts. Parce que vous n'aviez pas assez de temps et qu'il n'y avait pas assez d'investissement dans cette démarche d'enquête, votre rapport comporte beaucoup de « peut-être ».
Par exemple, au dernier paragraphe du rapport, à la page 6, on dit:
[...] il semblerait que des renseignements au sujet de la rencontre entre le conseiller du sénateur Obama et le consul général Rioux aient été connus des médias avant cette date, peut-être même dès le 28 février.
Il y a un « peut-être ». À la page 8, au dernier paragraphe, il est écrit: « certains indices laissent croire ». À la page 9, il est écrit, au paragraphe 5.1: « il semble que ». Il y a beaucoup de « peut-être » et de « il semble ». Jamais ce rapport, sauf peut-être quand il parle des faits, ne mentionne que vous avez trouvé tel élément et que vous déclarez telle chose. Je trouve qu'il y a beaucoup de « peut-être », mais c'est une opinion.
Monsieur Cummins, je pense qu'on ne vous a pas fourni tous les pouvoirs nécessaires. La presse canadienne de l'époque rapporte que des représentants du gouvernement avaient indiqué qu'ils ne chercheraient pas à découvrir la source de la fuite initiale. Il aurait peut-être été bien d'avoir une entente avec le gouvernement américain pour contacter l'Associated Press. Lorsqu'on reçoit une télécopie, il y a toujours un numéro qui permet d'en retracer la provenance. Je pense qu'on ne vous a pas fourni tous les pouvoirs nécessaires pour mener à fond votre enquête qui, à mon avis, a été bien faite. Je crois, comme les journalistes de l'époque et le commun des mortels, que quelqu'un quelque part avait intérêt à laisser couler des informations. L'histoire nous en apprendra peut-être davantage.
Le ministère des Affaires étrangères, son personnel et les fonctionnaires semblent avoir commis beaucoup de bourdes depuis quelques années. Je trouve cela très dommage et étonnant. J'ai voyagé et j'ai rencontré ces gens. Ils me semblent très compétents et professionnels, mais depuis peu, ils sont toujours mêlés à des histoires qui traduisent une certaine incompétence ou un manque d'expérience et de professionnalisme. D'ailleurs, les recommandations du rapport sont toujours faites en fonction du personnel du ministère des Affaires étrangères. Or, je ne suis pas certaine que ces gens soient responsables de toutes les fuites et de tous les mauvais coups du ministère des Affaires étrangères dont la presse parle actuellement.
Je m'arrête ici et je vous remercie d'avoir comparu devant nous.
:
Je peux peut-être répondre.
[Traduction]
Vous avez essentiellement dit quatre choses; tout d’abord, qu’il n’y avait pas assez de temps. J’imagine que des enquêteurs diraient toujours qu’ils aimeraient davantage de temps, mais je crois que M. Cummins et M. Bird ont pu dire de façon catégorique qu’ils n’avaient trouvé aucune preuve d’activité criminelle. Le fait qu’ils aient pu arriver à une conclusion catégorique dans cette période me laisse croire que c’était assez de temps pour qu’ils en arrivent aux conclusions énoncées dans leur rapport.
Deuxièmement, je crois que M. Cummins et M. Bird ont en fait dit l’opposé quant à savoir si oui ou non ils avaient les pouvoirs nécessaires. Ils ont trouvé qu’on leur avait donné complète indépendance et en effet les instructions qu’on leur a données leur permettaient de poursuivre l’enquête comme bon leur semblait en tant qu’enquêteurs chevronnés, extrêmement expérimentés.
Troisièmement, pour ce qui est des États-Unis, je crois que nous avions indiqué que ce n’était pas une question de pouvoir mais plutôt de droit et de traité, et donc que ce n’était pas quelque chose que ni nous ni les enquêteurs aurions pu affecter.
Quatrièmement, pour ce qui est du ministère des Affaires étrangères, je crois que nous avons parlé de certains détails, mais je dois dire qu’il ne faut pas trop généraliser. Je reviens d’un voyage en Afghanistan, où j’ai passé 10 jours non seulement avec les Forces canadiennes mais avec des fonctionnaires des Affaires étrangères. Je crois qu’ils font des choses tout à fait remarquables de par le monde. Je ne voudrais aucunement qu’ils fassent l’objet d’une généralisation à partir d’un incident précis pour lequel je crois que nous avons une solution.
Merci.
Je tiens à vous dire à quel point je vous suis reconnaissant d'avoir pris le temps de venir, messieurs. Si je pose des questions, ce n'est pas que.... Je pense que vous avez fait un travail approfondi, étant donné la tâche. Je me demande, par contre, si nous cherchons la même chose?
Je crois que la question des dates cibles est essentielle. Il y a une période de 10 jours entre le moment où l'histoire commence à circuler, soit du 21 février, quand le gouvernement se met en mode de limitation des dégâts en ce qui concerne les primaires démocrates, au 1er ou 2 mars, quand AP déclare qu'elle a la note de service. Maintenant, vous avez décidé de miser sur la note de service, mais je pense que la vraie question c'est qu'on ait essayé de noyer le poisson.
J'aime beaucoup le cinéma. J'ai vu Des hommes d'influence plusieurs fois, et dans Des hommes d'influence, ils font venir Robert De Niro pour atténuer une question nuisible sur le plan politique. Il commence à se lancer dans une campagne de désinformation. Il n'existe pas de bombardiers B-3; qui a parlé de bombardiers B-3? Et la première chose qu'on apprend, tout le monde parle du bombardier B-3 au lieu du scandale.
Donc, nous avons M. Brodie à Washington le 25 février, au moment même où cette question de l'ALENA et des primaires démocrates devient une question d'actualité politique brûlante, et il dit qu'il ne se souvient pas d'avoir reçu des renseignements concernant l'ALENA et il dit qu'il y a peut-être eu une discussion non formelle à ce sujet. Donc, nous devons supposer que le premier ministre a envoyé M. Brodie à Washington pour discuter de toutes sortes de sujets sauf l'ALENA, mais qu'ils en ont peut-être parlé.
Le 26 février, il a parlé à un journaliste pendant le huis clos. Nous savons cela. Soit que le journaliste ment, soit qu'il ne fait tout simplement pas son travail.
Le 27 février, la salle des nouvelles de CTV communique avec l'ambassadeur Wilson et lui demande de confirmer que c'était bien l'équipe Clinton qui envoyait les messages de ne pas se préoccuper de la position sur l'ALENA, et M. Wilson ne nous laisse pas vraiment savoir ce qu'il leur a répondu, mais au bulletin de nouvelles de CTV le soir même on dit qu'un haut responsable de l'équipe Obama aurait téléphoné à Michael Wilson pour lui dire de ne pas prendre ce discours au sérieux.
Maintenant quelqu'un devait clarifier l'incident. Quelqu'un devait préciser ce que M. Brodie avait dit, et CTV dit clairement qu'il s'agissait de Michael Wilson.
Le 28 février, M. Wilson s'entretient à nouveau avec CTV. Mais cette fois, bien sûr, il a quelqu'un avec lui dans son bureau au moment de l'appel téléphonique. Mais CTV s'en tient à son histoire...
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Je peux commencer en répétant ce que j'ai dit d'emblée.
La portée c'était d'examiner les deux, de voir ce qu'étaient les présumées divulgations verbales, ce qu'elles auraient pu être ou ne pas être, à qui on aurait pu en faire part, et la question de la divulgation non autorisée d'un rapport diplomatique sensible. Les deux choses étaient importantes à l'époque et représentaient la portée de l'enquête que nous a demandée le premier ministre.
Si vous lisez notre rapport, monsieur Angus, vous verrez dans la chronologie que nous avons tenté avec les enquêteurs de voir clair, dans un sens, dans toutes les interactions afin de fournir un compte rendu beaucoup plus clair de ce que les gens ont dit ou pas, qui représente quelque chose de mieux que la spéculation disponible à ce moment. Je crois que c'est la raison pour laquelle c'est très important, comme M. Cummins l'a dit, d'établir la chronologie dès le début.
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Je vous remercie de ces informations.
Ma préoccupation c'est de savoir à qui on adresse le blâme dans les recommandations. Il s'adresse à des employés inconnus. Nulle part est-il indiqué qu'une partie de la responsabilité doit être assumée par les propagandistes du premier ministre et par des personnes nommées par le gouvernement à des postes d'ambassadeurs qui ne devraient pas se tirer dans le pied, influencer les primaires américaines et s'ingérer dans leur processus politique. Voilà, à mes yeux, la recommandation clé qui manque à ce rapport.
Pour ce qui est des recommandations, j'ai trouvé très intéressant d'entendre M. Cummins dire très clairement — et je pense qu'il a raison — que M. Brodie n'a rien fait de mal. Vous avez dit que ses propos étaient du domaine public, qu'ils n'étaient pas confidentiels, et c'était comme si les gens parlaient des séries mondiales. Il n'a été à l'origine d'aucune fuite. Non, il n'a pas provoqué de fuites; il semait une idée.
Pourtant, la recommandation la plus claire c'est que lorsque des personnes comme M. Brodie plantent des idées dans les médias, on ne doit pas les nommer. Ça me semble très clair ici. M. Brodie doit être exempté afin qu'il puisse assister à un huis clos ou n'importe où pour planter une idée et influencer les journalistes. On a dit aux médias que ça devait rester confidentiel, et pourtant les enquêteurs ont clairement dit que M. Brodie n'était pas en position de confidentialité. Alors, pourquoi la contradiction?
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Il se peut qu'il y ait un vote. Nous le saurons quand la sonnerie retentira.
Nous allons faire une pause pour aller voter, et si nous en avons terminé avec ces témoins-ci, nous reviendrons et entendrons les témoins suivants. Il y a d'autres questions.
Je vais faire une observation à ce stade-ci. Il y a des milliers et des milliers de ces notes diplomatiques qui circulent dans le monde entier tous les jours. C'est très curieux que celle-ci ait fait surface juste au bon moment.
Malheureusement pour vous, messieurs, vous avez fait un rapport sur l'appareil gouvernemental. D'après ce que je vois, les aspects politiques l'emportent sur l'appareil gouvernemental. Vous ne pouvez parler que de l'appareil gouvernemental. Votre rapport est donc aussi complet qu'il vous était possible de faire. Comme l'a dit M. Cummins, vous ne pouvez pas aller interroger les Américains.
Il est question d'intérêt politique plutôt que de l'appareil gouvernemental, et la fuite du document s'est curieusement produite à un moment très avantageux pour certains.
Une voix: C'est de la spéculation.
La présidente: C'est de la spéculation de ma part, mais le fait est que votre rapport ne peut pas aborder les considérations politiques; ce n'est pas à vous de faire cela.
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C'était relativement compliqué. Après tout, il y a des missions dans toutes les régions du monde. Le greffier du Conseil privé a indiqué qu'il y avait 232 destinataires, éparpillés partout dans le monde, et récupérer les données expédiées était... Je devrais demander à un expert technique de répondre; je ne suis certainement pas un expert dans le domaine de la récupération des données et des choses du genre. J'ai participé à un bon nombre d'enquêtes qui s'accompagnaient de récupération de données, et j'ai toujours fait appel dans ces circonstances à des experts.
Je peux cependant vous assurer que le ministère des Affaires étrangères, par l'entremise du BCP et du service de la TI, a réussi à récupérer une portion extraordinaire des données nécessaires, des données que nous avions identifiées car elles avaient été acheminées pendant la période visée. Parfois, il fallait rajuster notre tir et relancer l'enquête. Pour ce qui est des aspects techniques, je devrais demander aux experts de répondre. Cependant, nous avons obtenu les renseignements recherchés.
À la même époque, le BCP nous a fourni tous les renseignements que nous avions demandés en ce qui a trait aux relevés des appels téléphoniques et des télécopies des ambassades, des missions dans toutes les régions du monde. Tous les endroits qui avaient reçu et où l'on avait acheminé ce document ont été consultés et les renseignements ont été récupérés et analysés. Vous pensez peut-être que ce n'est pas très compliqué, mais pour moi ce n'était certainement pas une chose facile.
De plus, il ne faut pas oublier qu'il existe des nuances très subtiles entre les rôles joués par exemple par les ambassades et le BCP, le BCP et le CPM, et l'information. Je peux cependant vous assurer que tout le monde, sans exception, a fait preuve d'énormément de collaboration. Nous n'avons pas rencontré un seul témoin réticent qui n'était pas prêt à nous parler. M. Bird et moi avons rencontré des gens qui étaient ouverts, honnêtes et directs et qui n'ont pas hésité à me dire ce qu'ils savaient et ce qu'ils ne savaient pas.
Je juge qu'il est important de signaler que le personnel des ambassades, des consulats, du CPM, du BCP et du MAECI, enfin toutes les personnes que nous avons contactées, ont répondu avec célérité et honnêteté. Nous n'avons rencontré aucun témoin réticent. Personne n'a essayé de noyer le poisson. Nous avons rencontré certains témoins à plus d'une reprise. Madame la présidente, je crois qu'il importe de signaler que c'était pas parce que l'on pensait qu'ils avaient fait quelque chose d'inapproprié; c'est simplement parce qu'après avoir rencontré d'autres personnes nous jugions qu'ils seraient en mesure d'apporter quelques précisions. En plus, j'ai rencontré un jeune employé à quatre reprises simplement parce qu'il était en mesure de me fournir de plus amples détails à certains égards.
Ils ont fait preuve d'une très grande collaboration et je dois avouer qu'ils étaient désemparés face aux répercussions de cette divulgation non autorisée.
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Évidemment, nous avons immédiatement adopté des mesures correctives.
J'aimerais cependant signaler que ce genre de choses est très rare. Il y a des milliers de communications tous les jours, et une fuite du genre à l'égard d'un rapport diplomatique est une chose très rare.
Cela dit, clairement nous avons un système qui est fondé sur la responsabilité de la personne et nous ne pouvons pas avoir un policier qui accompagne jour et nuit un diplomate qui envoie un message. Nous comptons sur ces personnes pour qu'elles fassent preuve de bon jugement. Évidemment, une formation initiale leur est donnée, mais il nous faut offrir des cours de recyclage. Nous devons insister plus sur les cours offerts en ligne sur la sécurité, par exemple. Nous croyons que cette recommandation est une bonne chose. Nous songeons justement à mettre sur pied des cours qui seraient offerts en ligne. Il y a déjà un cours offert sur le système de communication classifié, ce qu'on appelle le système C-5; si l'on vous confie un compte C-5, vous devez réussir l'examen associé à un cours en ligne sur la sécurité avant que ce compte ne soit activé.
En avril, nous avons demandé à nos deux sous-ministres d'envoyer un message à diffusion générale à tout le personnel pour rappeler à nos employés qu'il est très important de protéger les renseignements; ce message faisait mention de la formation et des lignes directrices détaillées qui sont disponibles, pour tous les employés, sur nos sites Internet. Nous leur avons rappelé qu'il y avait des cours sur la protection des renseignements qui étaient offerts à tous. Évidemment, c'est un effort permanent visant à assurer que tous ceux qui sont en contact avec de tels renseignements s'en servent de la façon appropriée, utilisent les systèmes appropriés, et font preuve de bon jugement. Évidemment, l'homme n'est pas infaillible, mais je crois que nous pouvons faire en sorte que des normes plus strictes soient respectées grâce à un programme de formation actif.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Monsieur Brown dit qu'il y a un complot quelconque et que cela a eu un impact sur les élections américaines. L'ambassadeur Wilkins a dit très clairement qu'il y avait eu ingérence. Je voulais simplement le rappeler.
De plus, sauf le respect que je vous dois, monsieur Lynch, ainsi qu'à vos collègues, qui ont d'ailleurs fait du très bon travail, les commentaires qui suivent ne vous visent pas. Tout cela est très frustrant. L'objet et le mandat du groupe chargé de l'enquête étaient de trouver le document qui a fait l'objet d'une fuite, trouver la source de cette fuite; vous n'avez pas pu communiquer avec tous les Américains qui ont eu accès à ces renseignements. Cela est très, mais alors très frustrant. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles nous vous accueillons aujourd'hui. Nous voulons comprendre comment nous aurions pu éviter cela et ce que nous aurions en fait dû faire... Vous pourriez simplement les appeler et dire « Écoutez, je sais qu'il y a une question de compétence dans cette affaire, mais en raison du caractère grave de cette histoire et des préoccupations soulevées par l'enquête, et en raison du fait que vous êtes nos grands amis, notre principal partenaire commercial et allié... »
Comme vous l'avez dit, monsieur Cummins, nombre des personnes avec lesquelles vous avez communiqué, auxquelles vous avez téléphoné et avec qui vous avez parlé ont fait preuve d'une très grande collaboration. Je comprends qu'il s'agit d'une question de compétence, mais compte tenu de la nature de cette enquête, il serait très simple et très facile de simplement prendre le téléphone et de poser la question. Si ces intervenants décidaient de ne pas répondre, c'est une autre paire de manches; mais le fait est qu'on n'a même pas fait l'effort... Bon, on a envisagé la possibilité de le faire, mais rien n'a été fait. Et c'est justement ce qui est très frustrant.
Écoutez, je fais ces commentaires mais j'ai tout le respect du monde pour vous et votre personnel pour le travail que vous avez fait.
Ma question porte sur le commentaire que j'ai fait un peu plus tôt en ce qui a trait à M. Sensenbrenner. Je ne veux pas m'en prendre à la réputation de qui que ce soit. Je mentionne son nom simplement parce qu'il a été mentionné dans des rapports médiatiques. En fait, cela va au coeur même de la question. Le rapport signale que le nom de quelques citoyens américains aurait été mentionné, car il s'agissait de personnes qui auraient eu accès au rapport. Je mentionne simplement les noms qui auraient pu figurer sur cette liste. Pouvez-vous nous dire qui étaient ces personnes? Cela permettrait au comité de mieux approfondir la question.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je m'appelle Ian Brodie. Je suis le chef de cabinet du premier ministre depuis près de trois ans. Auparavant, j'avais été directeur exécutif du Parti conservateur du Canada, et avant cela, chef de cabinet adjoint au Bureau du chef de l'opposition. J'ai également pris un congé de l'Université Western Ontario, où je suis professeur agrégé en sciences politiques.
Plus tôt cette année, des allégations ont été soulevées à la Chambre des communes selon lesquelles j'aurais divulgué des renseignements concernant une note de service de notre consulat général à Chicago portant sur une réunion entre l'un de nos diplomates et un conseiller de la campagne présidentielle du sénateur Barack Obama. Ces allégations étaient et demeurent tout à fait fausses.
En réponse à ces allégations, le premier ministre a demandé au greffier du Conseil privé d'enquêter sur la divulgation non autorisée des renseignements sensibles en question. Au cours de son enquête, le greffier a eu l'entière liberté d'interroger tous les membres du cabinet du premier ministre, et a eu accès à tous les courriels, tous les relevés d'appels téléphoniques et de télécopies, ainsi qu'à tout autre renseignement que les enquêteurs souhaitaient examiner.
Je me suis entretenu personnellement avec les enquêteurs à deux reprises pendant plusieurs heures et j'ai répondu à toutes leurs questions. Huit autres membres du personnel du cabinet du premier ministre ont également été rencontrés et ont répondu à toutes leurs questions. Nous avons pleinement collaboré à l'enquête.
Le rapport d'enquête a été rendu public, comme vous le savez, le 22 mai. Il énonce tous les faits et toutes les conclusions que les enquêteurs ont pu tirer. J'attire l'attention des membres du comité à la page 9 du rapport où l'on conclut qu'aucune preuve ne démontre que j'ai divulgué des renseignements classifiés sur cette question.
Je peux affirmer devant le comité que le premier ministre était furieux qu'il y ait eu fuite au sujet du rapport de Chicago, et qu'il l'est encore aujourd'hui.
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Permettez-moi de préciser la situation.
Lors de ma visite à Washington le lundi 25 février, à l'occasion de laquelle j'ai rencontré un certain nombre d'employés de l'ambassade et certaines personnes venues d'Ottawa ce jour-là, rien de tout ceci ne pointait à l'horizon. En effet, je n'avais parlé de l'ALENA à personne, ni même aux journalistes de CTV. D'après ce que j'ai pu comprendre de la chronologie qui figure dans le rapport de M. Lynch, c'est vrai également pour M. Wilson.
Alors, permettez-moi de vous poser une question à titre de clarification. Laisse-t-on de côté la réunion du 25 février pour se tourner vers une discussion future?
Je ne sais pas ce que vous entendez par un malentendu entre le cabinet du premier ministre et l'ambassadeur Wilson. Je n'ai pas eu l'occasion de parler à M. Wilson à ce moment-là, alors je ne pourrais pas vous dire s'il y a eu un malentendu.
Merci à vous, monsieur Brodie, d'avoir accepté de comparaître encore une fois devant notre comité, en dépit du fait que vous n'ayez reçu que moins de 48 heures de préavis.
La section 5.1 du rapport du Conseil privé, qui traite de M. Brodie et de ceux qui nous intéressent aujourd'hui, est au centre de notre discussion, et bien qu'il ait été déposé, il n'a pas été lu et j'aimerais en citer les conclusions, qui sont importantes:
Rien n'indique que M. Brodie a divulgué quoi que ce soit concernant le sénateur Obama ou son camp.
Rien de ce que M. Brodie peut avoir dit pendant le huis clos n'a révélé quoi que ce soit au sujet du rapport diplomatique, dont il n'a eu connaissance que le 28 février. Aucun élément de preuve ne démontre que M. Brodie a divulgué des renseignements classifiés.
Je me permets donc de répéter la question que nous avons entendue à maintes reprises à la Chambre des communes: Avez-vous, délibérément, tenté d'influencer, de façon négative ou positive, la campagne du sénateur Barack Obama?
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Merci de votre question.
J'ai discuté de cette question de façon assez détaillée avec les enquêteurs pendant nos deux réunions. De temps en temps, en raison de mes responsabilités, le personnel du ministère des Affaires étrangères ou du groupe responsable de la politique étrangère du Bureau du Conseil privé me font part d'informations de nature diplomatique, portant sur toute une panoplie de sujets, et je leur en suis reconnaissant.
Je dirais que je connais bien le système de classification utilisé pour protéger les différentes catégories de renseignements diplomatiques que nous font parvenir nos missions à l'étranger. Mon expérience me porte à croire que les renseignements comme ceux du rapport m'ayant été envoyé par le consulat général de Chicago le 28 février étaient typiques du genre d'information classifiée confidentielle ou secrète.
Le 28 février, lorsque j'ai finalement reçu le texte du rapport du consulat général de Chicago, je dois vous avouer que j'étais occupé. Si je ne m'abuse, j'ai passé la matinée ici devant votre comité, à demander de pouvoir prendre la parole sur l'enquête Soudas, mais le comité n'a pas accédé à ma demande à ce moment-là. En tout cas, j'ai passé ma matinée ici à suivre les délibérations du comité.
J'ai donc reçu le rapport de Chicago. La date et l'heure figurent à l'annexe du rapport de M. Lynch. Bien que j'aie lu le texte du rapport attentivement, j'ai tenu pour acquis qu'il était classifié confidentiel ou secret. Il est vrai que le texte n'était pas assorti d'une telle mention et je suppose que je n'ai pas lu les informations en haut du message sur les destinataires. J'ai tout simplement pensé qu'il s'agissait de rapports diplomatiques comme ceux que j'avais vus par le passé qui traitaient du même genre de sujets.
J'ai traité le rapport comme s'il s'agissait d'un document secret, je l'ai imprimé, je l'ai lu, puis je l'ai mis dans la boîte des documents confidentiels destiné à la déchiqueteuse dans mon bureau, ici à l'édifice du Centre. Par la suite, le personnel autorisé l'a pris dans mon bureau pour le déchiqueter, le pulvériser, le faire disparaître.
J'ai donc lu le rapport. Cela a dû me prendre cinq ou dix minutes pour le lire et le relire afin de bien l'absorber et, n'ayant même pas pris le temps de le déposer, je me suis dirigé vers la boîte d'information destinée à la déchiqueteuse pour m'en débarrasser conformément aux règles de sécurité.
Je viens de vous décrire la pratique normale qui régit les rapports diplomatiques.