:
Nous reprenons nos travaux.
[Français]
Je vais reprendre à peu près à la moitié si cela vous convient. Vous connaissez assez bien les lignes directrices, alors je vais continuer.
[Traduction]
J'aimerais profiter de l'occasion pour rappeler à tous les participants à cette réunion qu'il n'est pas permis de faire des captures d'écran ou de prendre des photos de leur écran.
[Français]
Pour garantir le bon déroulement de la réunion, j'aimerais vous faire part de certaines règles. Avant de prendre la parole, attendez que je vous nomme. Si vous participez par vidéoconférence, cliquez sur le microphone pour désactiver le mode sourdine. Le microphone des participants qui se trouvent dans la salle sera, comme d'habitude, contrôlé par l'agent des délibérations et de la vérification.
Je vous rappelle que toutes les observations des députés et des témoins doivent être adressées à la présidence. Lorsque vous n'avez pas la parole, mettez votre microphone en mode sourdine.
[Traduction]
Avant de donner la parole à nos témoins, je tiens à rappeler aux membres du Comité que la date limite pour envoyer des amendements au projet de loi est le vendredi 11 juin à midi. Les amendements doivent être envoyés à la greffière. Si vous voulez des conseils sur la recevabilité d'un amendement, vous pouvez communiquer avec le greffier législatif, Jacques Maziade. Si vous avez besoin d'aide pour rédiger des modifications, vous pouvez communiquer avec la conseillère législative Alexandra Schorah. Je ne sais pas s'il y aura des questions, mais je voulais le rappeler à tous.
Cela dit, je souhaite maintenant la bienvenue aux témoins d'aujourd'hui.
De ALUS, qui signifie, je crois, Services de diversification des modes d'occupation des sols, nous accueillons Bryan Gilvesy, directeur général, et de Farmers Edge Inc., nous accueillons Wade Barnes, directeur général, et Bruce Ringrose, responsable de la durabilité et des relations avec les intervenants.
Bienvenue à tous. Nous allons commencer par une déclaration préliminaire de sept minutes et demie.
Allez‑y, monsieur Gilvesy.
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Merci beaucoup de m'avoir donné l'occasion d'être ici aujourd'hui.
Je suis un ancien agriculteur du comté de Norfolk, en Ontario. Je suis également cadre en résidence à l'Ivey Business School. Mais aujourd'hui je comparais à titre de PDG d'ALUS.
Pour mettre en contexte mes fonctions au sein d'ALUS, j'ai été le troisième agriculteur à participer à ce programme en 2006. J'ai grandi avec ce programme, au sein de ma communauté, au point où je le dirige aujourd'hui.
En français, ALUS signifie Services de diversification des sols. Le concept est né en 2008 dans les régions agricoles du Manitoba sous le nom de plan de conservation des agriculteurs. L'acronyme signifie simplement qu'un agriculteur utilisera sa terre d'une autre façon et produira un service — un service écosystémique — qui, selon nous, a une valeur marchande.
Depuis cette date, ALUS s'est développé dans six provinces et plus de 30 communautés. ALUS est un organisme de bienfaisance canadien qui travaille avec des partenaires ruraux comme des comtés, des offices de protection de la nature, des districts de bassins versants et d'autres ONG pour aider les agriculteurs et les éleveurs du Canada à restaurer et à améliorer la nature sur leurs terres agricoles ou, pour le dire autrement, les aider à modifier la façon dont la terre est cultivée.
Il est important de comprendre qu'ALUS se distingue en établissant, dans chaque collectivité où nous sommes présents, un comité consultatif sur le partenariat composé à 50 % d'agriculteurs et d'autres responsables communautaires pour évaluer le programme dans leur région. C'est devenu le secret de la prestation d'un solide programme environnemental qui croît rapidement partout au pays.
Il ne fait aucun doute que les agriculteurs canadiens sont en première ligne face aux changements climatiques. Les modifications des saisons et les phénomènes météorologiques violents affectent la production alimentaire et les moyens de subsistance des agriculteurs. Les agriculteurs et les éleveurs ALUS luttent contre les changements climatiques. Ils offrent des solutions climatiques axées sur la nature qui profitent à tous les Canadiens. Nos projets en lien aux terres humides, aux prairies, au pâturage durable et aux arbres réduisent tous les émissions de gaz à effet de serre et séquestrent le carbone, tout en procurant une foule d'avantages connexes, comme la création d'un nouvel habitat faunique — y compris pour les espèces en péril et les pollinisateurs —, la rétention et le ralentissement des eaux pluviales afin de protéger les collectivités locales qui se trouvent en aval, et l'amélioration de la qualité de l'air et de l'eau.
Notre organisation a la chance de travailler avec de nombreux chercheurs de tout le Canada qui nous aident à mieux comprendre les répercussions des projets de nos agriculteurs. Ces derniers constatent, et c'est désormais documenté par nos chercheurs, la rapidité avec laquelle ils obtiennent des résultats. Lorsque les projets sont bien planifiés et gérés, les avantages s'accumulent rapidement. Après un an, nos projets de restauration peuvent avoir une diversité et une abondance de pollinisateurs et d'espèces prédatrices des ravageurs des cultures égales à celles d'une zone non perturbée. Mieux encore, nos partenaires de recherche nous ont appris que rendre à l'état naturel des terres qui ne sont pas rentables pour l'agriculture aide les agriculteurs à produire plus de nourriture, même avec moins de terres, en raison de la pollinisation supplémentaire et de la protection des cultures offertes par la nature.
La recherche nous aide également à identifier les domaines les plus prometteurs en matière de climat et d'eau, ce qui garantit l'optimisation des ressources financières. Toutes les données indiquent qu'investir dans la nature par l'entremise des agriculteurs est une stratégie intelligente compte tenu des avantages qu'en retirent nos collectivités. Pour renverser la vapeur en ce qui concerne les changements climatiques, il faut que tout le monde soit sur le pont ou, dans ce cas, que les agriculteurs puissent se retrousser les manches pour changer les choses.
Depuis 2015, notre programme s'est développé et compte maintenant 31 partenariats communautaires dans six provinces, avec la participation de plus de 1 100 agriculteurs à ce jour et plus de 125 kilomètres carrés de terres. Notre organisation a pris de l'expansion pour offrir un soutien financier aux agriculteurs. Nous avons commencé humblement sous l'égide de la Delta Waterfowl Foundation, puis nous sommes devenus indépendants, dans le cadre d'une initiative de la Weston Family Foundation. Nous sommes maintenant financés par plus de 30 partenaires, et il convient de noter qu'ALUS a pris grand soin de trouver une valeur marchande au travail des agriculteurs, comme en témoigne l'appui de sociétés comme Cargill, A&W, Danone, RBC et TD.
De toute évidence, au fil des ans, nous avons tiré de nombreuses leçons dont j'aimerais vous faire part aujourd'hui, alors que le Comité réfléchit à ce que le gouvernement du Canada pourrait mettre en œuvre en collaboration avec les producteurs pour reconnaître l'importance de l'agriculture dans ce domaine.
Premièrement, pour être efficaces, les programmes doivent créer de la valeur à la ferme et non être considérés comme des incitatifs temporaires. Il ne s'agit pas de subventions ou d'incitations. Nous voulons récompenser les agriculteurs qui produisent les services écosystémiques à même de résoudre les problèmes les plus urgents de la planète.
Deuxièmement, il faut reconnaître que lorsqu'elles sont appliquées à la gestion de solutions axées sur la nature, la créativité, les compétences et l'expérience des personnes qui se trouvent sur le terrain donnent lieu à de puissantes solutions locales, comme nous n'en avions jamais vu auparavant. Le processus des comités consultatifs sur le partenariat a prouvé que le travail en collaboration avec les collectivités fournit un effet de levier et permet de trouver des solutions locales qui peuvent aider les collectivités à s'adapter aux changements climatiques.
Troisièmement, il ne s'agit pas seulement du carbone. Pour maximiser la valeur réelle que les agriculteurs peuvent produire avec leurs solutions axées sur la nature, nous devons reconnaître l'ensemble de cette valeur, y compris la biodiversité, la qualité de l'eau et la résilience climatique.
Quatrièmement, le soutien, la vulgarisation et les conseils techniques au moyen de contacts avec la communauté sont essentiels. Nos agriculteurs répètent constamment que c'est la clé du succès. Il est important de se rappeler que l'âge moyen d'un agriculteur est d'environ 56 ans, ce qui est mon cas, et nous n'avons pas nécessairement une bonne connaissance de ces pratiques. Il est crucial de bénéficier de l'appui d'un programme communautaire et de conseils techniques pour nous aider à les adopter.
Cinquièmement, un marché pour les services écosystémiques émerge sous nos yeux, et ALUS est un chef de file dans le développement de ce domaine grâce à son projet New Acre. Les entreprises se tourneront vers ce marché pour trouver des solutions pour leurs rapports en matière d'environnement, de société et de gouvernance d'entreprise et pour leurs autres objectifs. Pour en optimiser l'effet, il est essentiel que nous tirions parti de ces fonds privés grâce à une initiative publique.
Sixièmement, et c'est le point le plus important que je veux faire valoir ici, les agriculteurs ont besoin de souplesse pour participer pleinement aux programmes de conservation. Il est donc essentiel d'adopter des approches souples en matière de séquestration du carbone. Nous devons élaborer et approuver des protocoles de quantification des contreparties de la fixation du carbone et d'octroi de crédits qui sont très différents de ce que nous avons vu jusqu'à maintenant et qui reflètent les souhaits de la communauté agricole et les réalités de l'agriculture. Le fait de confier aux agriculteurs la responsabilité de fournir des solutions environnementales a été conforté par de nombreuses études et s'avère très efficace.
Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé aujourd'hui et je suis prêt à répondre à vos questions.
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Bonjour. Merci beaucoup de m'accueillir aujourd'hui.
Je m'appelle Wade Barnes. Je suis PDG et cofondateur de Farmers Edge. Farmers Edge est une entreprise spécialisée dans la technologie et qui exerce ses activités dans la majorité des principaux pays exportateurs de produits agricoles. Farmers Edge a été fondé ici, au Manitoba. Rien qu'au Canada, nous travaillons sur neuf millions d'acres. Nous allons sur le terrain et nous branchons les fermes. Nous aidons ces fermes à passer à la numérisation. Nous leur fournissons des analyses et les aidons à prendre des décisions clés dans leur ferme qui ont notamment pour résultat la compensation du carbone et la durabilité.
Par ailleurs, je suis agriculteur, je suis né et j'ai grandi dans la ferme familiale au Manitoba, à la frontière de la Saskatchewan, du bon côté de la frontière, pour soutenir la bonne équipe de football, celle qui gagne — sans vouloir offenser les gens de la Saskatchewan qui nous écoutent. Je suis également agronome de formation. Je travaille dans l'industrie depuis près de 20 ans. Nous avons un point de vue unique sur l'avenir de l'agriculture et de la durabilité.
Nous voulons insister sur quatre initiatives clés.
La première est la collaboration. Il n'est pas nécessaire de séparer développement économique et environnement. Comme la plupart des agriculteurs le savent, il est bon pour les affaires d'être respectueux de l'environnement. Je pense que la majorité des exploitations agricoles au sein desquelles nous travaillons au Canada — et nous sommes présents en Ontario et dans l'Ouest canadien, pas encore au Québec, mais cela viendra, espérons‑le — font ce qu'il faut pour assurer la durabilité. Les agriculteurs ont un attachement naturel à cette terre, mais ils mettent vraiment l'accent sur la productivité.
Du point de vue agronomique, ce qui nous préoccupe, c'est l'idée d'une réduction de l'azote. Je peux vous dire qu'une partie essentielle du travail qu'accomplit Farmers Edge auprès des entreprises consiste à améliorer l'utilisation par les agriculteurs des intrants agricoles, et singulièrement l'azote. À notre avis, si le gouvernement intervient et réduit la quantité d'azote qui est utilisée à la ferme, cela aura pour principal effet de réduire la productivité. Prenons l'exemple de ma propre ferme, si nous réduisons l'apport d'azote de 30 %, nous réduirons la productivité de 25 %, ce qui en fin de compte me coûte environ 225 $ l'acre pour le canola que je cultive. Si vous multipliez cela par 20 millions d'acres de canola, cela représente un manque à gagner énorme pour le monde agricole.
Du point de vue agronomique, je crains qu'une réduction de l'azote n'aboutisse pas à la réduction de l'oxyde nitreux que les gens recherchent, et c'est là la véritable préoccupation. Je pense que nous avons une occasion importante d'améliorer les choses et d'aider les agriculteurs à adopter des pratiques durables comme le programme 4B. Cela permet vraiment de ne faire aucun compromis sur la productivité. Vous pouvez avoir le beurre et l'argent du beurre. On peut combiner productivité maximale et emploi des intrants agricoles parmi les plus respectueux de l'environnement qui existent sur le marché.
Selon Farmers Edge, le Canada a une occasion unique — et n'oubliez pas que j'ai travaillé dans de nombreux marchés partout dans le monde — de devenir une puissance dans le domaine de l'agriculture numérique. Il serait possible de brancher les fermes et d'utiliser la technologie pour être un chef de file mondial. Cela permettra aux fermes d'utiliser la technologie, de mettre en œuvre des outils comme le programme 4B, de créer beaucoup plus de durabilité sur les exploitations, ce qui générera d'importantes possibilités au‑delà de la production de céréales, et permettra de communiquer avec le consommateur final ce qui, à mon avis, est vraiment important et pourrait constituer une occasion unique.
Cela dit, ayons à l'esprit que si nous pouvons améliorer les fermes et motiver les agriculteurs à adopter la technologie, il y a une énorme possibilité de créer des compensations. Aujourd'hui, Farmers Edge, sur les neuf millions d'acres sur lesquels nous travaillons, créera plus de 3 à 4 millions de dollars en compensation, que ce soit par la gestion de l'azote, la culture sans labour ou les cultures de couverture, et nous utiliserons ces compensations et les vendrons sur le marché volontaire.
Nous pensons qu'il y a là une occasion en or de créer de la valeur, au‑delà de la culture des céréales comme simple produit, en utilisant les outils dont nous disposons pour créer des compensations et permettre au Canada d'être une puissance en matière de durabilité.
Grâce à cela, à mesure que les agriculteurs mettent en œuvre la technologie, la capacité de créer des compensations carbone dans les fermes crée d'importantes possibilités en aval, si l'on tient compte de la façon dont la majorité des entreprises alimentaires envisagent maintenant leurs propres objectifs zéro émission. Bon nombre d'entre elles cherchent à se procurer du grain à faible teneur en carbone. Encore une fois, l'agriculteur canadien peut être un chef de file mondial dans ce domaine. L'occasion de saisir cette valeur est devant nous.
Je voudrais également dire que lorsque nous utilisons les crédits de carbone pour créer de la valeur pour les producteurs afin qu'ils investissent dans la technologie, cela crée un écosystème beaucoup plus vaste. Si l'on considère d'une part le rôle du gouvernement dans la gestion du risque et dans son financement ainsi que le soutien qu'il apporte aux programmes de prêt, et d'autre part les possibilités offertes aux agriculteurs par la mise en œuvre de la technologie, qui leur permettent d'obtenir de meilleurs produits d'assurance, une meilleure gestion du risque et de meilleures possibilités de prêt, on comprend que cela commence à soulager le gouvernement d'une partie du risque pour le confier au secteur privé. Le secteur privé peut utiliser les données que les agriculteurs créent et adopter de meilleures pratiques de gestion.
À l'heure actuelle, nous constatons au Canada, mais plus particulièrement dans l'Ouest canadien, où se trouvent la plupart de nos clients, que les restrictions environnementales imposées par le gouvernement sont un grand sujet d'inquiétude. Nous voyons cela comme une occasion. Encore une fois, s'ils s'y prennent correctement, les agriculteurs peuvent créer une valeur importante grâce à ces compensations. L'utilisation de la technologie et la numérisation de l'agriculture peuvent alors permettre une meilleure gestion des risques, une meilleure assurance-récolte et de meilleurs prêts.
Je vais terminer en disant que le Canada a une occasion extraordinaire à saisir si les choses sont faites correctement, en utilisant une approche de collaboration qui inclut l'industrie, les agriculteurs et le gouvernement.
Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions. Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie nos invités de leur excellent témoignage.
Je vous remercie également, monsieur le président ainsi que mon collègue Richard Lehoux. Je ne vois pas de balai derrière vous, alors je vous félicite de vos encouragements. Sur ce, nous allons poursuivre.
Je vais commencer par vous, monsieur Gilvesy, même si je ne vous vois pas. Je suis heureux de vous revoir. Je crois vous avoir vu à la fin de mon mandat au conseil d'administration d'Agricorp. Agricorp était l'organisme d'arbitrage lorsqu'ALUS a démarré. Je suis ravi de vous retrouver.
J'ai tiré une citation des documents que vous nous avez fait parvenir. « La conservation se résumera finalement à récompenser le propriétaire privé qui préserve l'intérêt public. » C'est une citation d'Aldo Leopold.
Pouvez-vous nous en dire plus? De nombreux changements ont été apportés au niveau de la ferme. Vous en avez mentionné quelques-uns. J'en connais beaucoup. Pouvez-vous nous dire comment l'agriculture ne s'en est pas forcément vue attribuer le mérite? Que voulez-vous dire exactement par cette affirmation?
:
Aldo Leopold est une grande figure à suivre parce qu'il a reconnu le rôle d'intendance.
L'idée de notre programme est venue d'Ian Wishart, qui était producteur de pommes de terre au Manitoba à l'époque et qui est maintenant ministre de l'Environnement du Manitoba.
Il estimait que la ferme peut être multifonctionnelle et qu'elle peut produire plus que de la nourriture et des fibres. Il n'est pas nécessaire que ce soit à l'exclusion de la nourriture et des fibres, mais les services écosystémiques qui sont précieux pour tous les Canadiens, y compris ceux qui touchent la biodiversité, les espèces en péril et les terres humides, valent la peine d'être récompensés. Si nous ne nous tournons pas vers la communauté agricole pour la récompenser de ces services, nous raterons cette immense occasion au Canada.
Tout le Sud du Canada, où nous vivons, travaillons et nous divertissons, est géré et entretenu par des agriculteurs. Si nous voulons maximiser à la fois notre qualité de vie et ce que nous obtenons de ces fermes, nous devons les considérer sous un autre angle et envisager de les récompenser pour les choses supplémentaires qu'elles produisent en plus des aliments et des fibres. Je pense que c'est de là que vient cette remarque.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie nos invités de leur témoignage d'aujourd'hui.
Ce qu'il faut retenir, d'après ce que j'ai entendu comme membre de ce Comité, c'est qu'il y a un pouvoir extraordinaire dans le recours aux solutions naturelles qui s'offrent à nous et au travail des agriculteurs dans ce domaine. Un travail qu'ils peuvent bien sûr poursuivre et accroître dans leurs pratiques existantes.
Ma première question s'adresse à Farmers Edge et à M. Barnes.
J'ai eu l'occasion de visiter votre site Web, qui est excellent je dois dire. Vous y établissez un parallèle entre bonification du sol et rendement financier, et vous en avez parlé dans votre témoignage. Je suppose que vous travaillez directement avec les agriculteurs pour créer des programmes qui leur permettent de vérifier leurs résultats afin qu'ils puissent à l'avenir tirer parti des occasions d'affaires qui se présentent et, bien sûr, des mesures compensatoires d'ECCC. Est‑ce juste?
:
Nous le faisons. Nos comités consultatifs sur le partenariat ont trouvé une façon d'établir les prix des projets partout au pays, mais c'est grâce à la recherche que nous déterminerons leur véritable valeur.
Nous travaillons avec M. Wanhong Yang, de l'Université de Guelph, qui nous a fourni des modèles IMWEBs très impressionnants pour certains des bassins hydrographiques où nous sommes présents. Ce modèle estime de façon assez précise les quantités d'eau que ces sites agricoles filtreront, l'accroissement de la biodiversité et de la résilience des collectivités en aval ainsi que la quantité de carbone séquestré.
Il est possible d'obtenir ces chiffres et de comprendre la véritable valeur. Au fil des ans, nous avons appris que certains des premiers adhérents à notre programme sont les municipalités, parce qu'elles savent que lorsqu'elles investissent dans les exploitations agricoles en amont, elles peuvent économiser énormément d'argent si les routes ne sont pas détruites par les crues. En effet, nous avons fait des programmes sur les terres humides, par exemple.
Il y a un marché pour tout ce travail. Nous pouvons le comprendre en comparant d'une part le travail que font les agriculteurs grâce à des solutions axées sur la nature, et l'infrastructure bâtie d'autre part. Ensuite les calculs sont faciles à faire.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à nos deux témoins. Je trouve remarquable que vous soyez tous les deux ici. Je crois que c'est M. Barnes qui a mentionné que l'agriculture et la durabilité vont de pair. Le travail que vous faites tous les deux, l'agroécologie et l'agrotechnologie, vont de pair. Je trouve cela très utile aujourd'hui.
Je vais commencer par vous, monsieur Gilvesy. Tout d'abord, je tiens à vous saluer de la part des représentants de la rare Charitable Research Reserve. Je suis à côté de chez vous, à Kitchener—Conestoga, dans la région de Waterloo. Ils étaient très heureux de savoir que vous étiez ici. Ils m'ont beaucoup parlé de vous, et je comprends pourquoi.
Nous avons parlé de ces solutions climatiques axées sur la nature, plus précisément de l'atténuation des inondations et de la façon dont les municipalités et les autres ordres de gouvernement peuvent travailler ensemble et, en fait, économiser sur l'infrastructure en limitant les dégâts provoqués par les crues et ainsi de suite. Pouvez-vous nous donner des exemples issus de votre région, qui est aussi la mienne, d'infrastructures qui peuvent être protégées grâce à des solutions climatiques?
:
J'ai hâte d'en entendre davantage et de vous revoir, parce que, comme je l'ai dit, je suis tout près de chez vous.
Compte tenu du temps dont je dispose, je vais changer de sujet et m'adresser à M. Barnes. Ici, dans la région de Waterloo, la circonscription de Kitchener—Conestoga représente le secteur agricole, mais en même temps, nous représentons aussi l'essentiel du secteur des technologies du Canada. La technologie et l'agriculture semblent naturellement aller de pair. Je suis tout près de l'Université de Guelph et de l'Université de Waterloo.
Vous avez parlé d'encourager les futures entreprises, les entreprises en démarrage dans l'industrie. Quand je parle des universités, cela m'amène à penser à certains de nos jeunes.
Comment pouvons-nous encourager cette prochaine génération d'agriculteurs, qui semblent naturellement adopter certaines de ces idées, et les aider à pénétrer un marché et à travailler avec la technologie?
:
Je pourrais passer une heure entière à en parler, mais en bref, lorsque Farmers Edge a vu le jour, nous avons eu beaucoup de mal à obtenir des capitaux issus du marché canadien.
Notre première injection de capitaux importante est venue de la Silicon Valley. À l'époque, cette entreprise avait pour objectif le déménagement de Farmers Edge de Winnipeg à la Silicon Valley. Heureusement, nous avions un conseil d'administration suffisamment fort pour nous retenir sur ce marché et nous avons eu la chance de devenir une société cotée en bourse cette année.
Une fois que vous créez cet écosystème dans la technologie et l'agriculture, il se nourrit de lui-même. Farmers Edge a probablement innové en lançant un premier appel public à l'épargne, mais il y a de plus en plus d'entreprises qui peuvent y participer. La supergrappe, en particulier la grappe des industries des protéines de la Saskatchewan, nous a procuré d'énormes avantages. Cela a été d'un grand soutien, non seulement pour Farmers Edge, mais aussi pour les entreprises dissidentes qui en découleront.
C'est un changement de culture, et je constate maintenant que l'accent est beaucoup plus mis sur le soutien de ce genre d'entreprises en démarrage aujourd'hui qu'il ne l'était lorsque nous avons commencé.
:
Nous allons passer à la deuxième heure, pendant que nous travaillons à brancher Mme Donnelly.
Je souhaite la bienvenue à M. Duane Thompson, président du Comité de l'environnement de la Canadian Cattlemen's Association. Nous accueillons également Fawn Jackson, directrice, Politique et relations internationales.
[Français]
Je vous souhaite la bienvenue.
[Traduction]
De Terramera Inc., nous accueillons Aldyen Donnelly, conseillère spéciale, Marchés du carbone.
J'espère que nous pourrons régler votre son.
Entretemps, nous allons commencer par une déclaration préliminaire de la Canadian Cattlemen's Association, pour un maximum de sept minutes et demie.
Vous avez la parole. Merci.
:
Bonjour et merci de me donner l'occasion de comparaître devant le Comité pour discuter de la contribution environnementale de l'industrie canadienne du bœuf.
Je m'appelle Fawn Jackson et je suis directrice, Politique et relations internationales à la Canadian Cattlemen's Association, la CCA. Je suis accompagnée aujourd'hui de Duane Thompson, producteur de bœuf de la Saskatchewan et président du Comité de l'environnement de la CCA.
La CCA représente les 60 000 producteurs de bœuf du Canada. L'industrie du bœuf contribue à hauteur de 22 milliards de dollars au PIB du Canada tout en soutenant 348 000 emplois, mais ce qui est très important dans notre discussion d'aujourd'hui, c'est que l'industrie du bœuf est aussi un joyau méconnu en matière d'environnement et d'emplois verts. Bien que cela ne soit pas très connu en dehors de ce comité, dont les membres le savent parfaitement, la production de bœuf au Canada est en fait l'un des meilleurs outils dont nous disposons pour atteindre nos objectifs communs en matière de conservation et de changements climatiques, tout en offrant des emplois bien rémunérés aux familles canadiennes.
Le Canada est un chef de file en matière de production durable de bœuf. La Canadian Roundtable for Sustainable Beef, la CRSB a été créée pour promouvoir la durabilité au sein de l'industrie du bœuf et comprend une communauté d'intervenants qui travaillent en collaboration. Par l'entremise de la CRSB, le Canada a été le premier pays à créer un cadre certifié durable pour le bœuf, qui est utilisé aujourd'hui par les petits distributeurs directs, ainsi que par des entreprises comme McDonald et Chop Steakhouse. À la suite du leadership du Canada, d'autres administrations ont maintenant repris le modèle de la CRSB, et nous sommes heureux de vous en faire part.
Je suis ravie que Duane Thompson se joigne à moi aujourd'hui pour m'aider à mieux vous expliquer comment l'industrie du bœuf peut être un partenaire clé dans l'atteinte des objectifs environnementaux du Canada.
Allez‑y, monsieur Thompson.
Notre famille exploite une ferme qui produit des bovins et des cultures près de Kelliher, en Saskatchewan, au nord-est de Regina. Nous sommes fiers de prendre soin de l'environnement dans notre travail d'éleveurs. Au Canada, les éleveurs de bétail s'occupent de 35 millions d'acres de prairies naturelles tempérées, et bien que cela ne fasse pas souvent les manchettes, cet écosystème de prairies disparaît plus rapidement que la forêt amazonienne. Depuis les années 1970, près de 75 % des prairies indigènes ont été détruites par la conversion des terres.
Lorsque les prairies disparaissent, les espèces qui en dépendent pour leur habitat disparaissent également. Il y a actuellement plus de 60 espèces en péril dans les prairies du Canada, qui ne subsistent que parce que la production de bœuf se poursuit dans les prairies indigènes. Les éleveurs de bovins de boucherie travaillent en étroite collaboration avec leurs partenaires en conservation sur l'habitat des prairies et le maintien et l'amélioration de la biodiversité afin de protéger l'écosystème des prairies. Le pâturage du bétail et la présence continue du bétail dans ces paysages exploités appuient la conservation des espèces qui dépendent des prairies indigènes, comme le tétras des armoises, la chevêche des terriers et de nombreux oiseaux chanteurs.
Dans le rapport de 2019 de l'Initiative de conservation des oiseaux de l'Amérique du Nord intitulé « L'état des populations d'oiseaux du Canada », on note que les populations d'oiseaux des prairies du Canada ont diminué de 57 % depuis 1970, et on souligne que: « de bonnes pratiques de pâturage sur les terres publiques et privées sont essentielles pour la création et le maintien d'habitats propices aux oiseaux de prairies. » À titre de mesure de conservation, le rapport recommande d'appuyer la production durable de bœuf engraissé dans des parcours naturels, et notamment la gestion bénéfique des pâturages et du foin. Sans la production de bœuf, ces prairies indigènes menacées risquent d'être converties et ces espèces en péril en subiront les conséquences.
Depuis 2015, notre industrie travaille dans le cadre du Partenariat relatif aux espèces en péril présentes sur les terres agricoles d'Environnement et Changement climatique Canada, connu sous le nom de PEPTA. Nous travaillons directement avec les producteurs de bœuf pour promouvoir et améliorer l'habitat d'une multitude d'espèces en péril. PEPTA s'est avéré être un excellent programme environnemental grâce à la collaboration avec le secteur bovin et les organismes de conservation.
Nous travaillons en étroite collaboration avec nos partenaires de conservation, dont Canards Illimités Canada, Conservation de la nature Canada, Oiseaux Canada et d'autres, afin de promouvoir et d'offrir des solutions de gestion et de conservation qui soient bénéfiques sur le terrain pour nos producteurs. Récemment, Canards Illimités Canada a lancé son site Web Beef Belongs, qui souligne le rôle essentiel que jouent les bovins de boucherie dans la santé et l'amélioration des prairies, des terres humides et de la biodiversité des sols au Canada. « Élever du bœuf au Canada est bon pour l'environnement. »
Le pâturage par le bétail est essentiel à l'épanouissement des prairies indigènes complexes. Ces prairies laissées sans pâturage sont pour l'essentiel perdues à cause de la progression naturelle vers des habitats dont la valeur de conversion est plus faible avec, par exemple, l'implantation des broussailles et des arbres. En générant des revenus grâce à des pratiques de pâturage durables, les éleveurs aident à faire en sorte que les prairies indigènes ne soient pas converties à d'autres utilisations.
En ce qui concerne les changements climatiques, les pâturages et les terres humides gérés par les producteurs de bœuf au Canada sont des puits de carbone qui stockent, selon une estimation prudente, environ 1,5 milliard de tonnes de carbone. Les émissions de gaz à effet de serre de l'industrie canadienne du bœuf ne représentent que 2,4 % des émissions totales de gaz à effet de serre du Canada et 0,4 % des émissions mondiales.
Les émissions de gaz à effet de serre de notre industrie sont inférieures à la moitié de la moyenne mondiale et parmi les plus faibles au monde. Aujourd'hui, l'industrie bovine produit plus de bœuf avec moins d'émissions de gaz à effet de serre, moins de terres et moins d'eau. Les réductions de l'empreinte environnementale de l'industrie du bœuf sont en grande partie attribuables à la génétique, à la santé animale et aux technologies qui améliorent l'efficacité de la production.
Nous en sommes très fiers, mais nous ne restons pas les bras croisés. Partout au Canada, les producteurs continuent d'innover et de chercher de nouvelles façons d'être durables et d'aider l'environnement.
En Colombie‑Britannique, les producteurs de bovins mènent des études pilotes sur l'utilisation du pâturage du bétail pour réduire les charges de combustibles sous les canopées forestières afin de diminuer le risque d'incendies de forêt. Les études portent sur la mise au point d'une technologie de clôture virtuelle qui changera la donne de façon novatrice pour les stratégies de pâturage tournant, la gestion des feux de forêt et l'amélioration de l'habitat des espèces dans les zones de pâturage éloignées.
La perte et le gaspillage d'aliments demeurent un sujet de discussion important dans le système alimentaire canadien. Les éleveurs de bétail sont de merveilleux suprarecycleurs. Par exemple, les sous-produits des céréales que nous produisons sur notre ferme, comme la paille et les tiges qui restent après la récolte du grain, peuvent être donnés au bétail, et il en va de même pour les céréales qui sont destinées aux marchés alimentaires, mais qui ne répondent peut-être pas aux normes élevées requises pour le marché des céréales parce qu'elles ont été gâtées ou chauffées.
Cet exemple va beaucoup plus loin que notre propre ferme. Le bétail se nourrit de sous-produits vinicoles ou de brasserie, de produits flétris et de sous-produits de la production de canola. Au début de la pandémie, l'année dernière, une grande quantité de pommes de terre, qui ne pouvait plus être acheminée vers les restaurants, a servi à nourrir le bétail au lieu d'aboutir dans les sites d'enfouissement.
En terminant, il est important de souligner que l'an dernier, l'industrie bovine canadienne s'est fixé des objectifs ambitieux pour 2030 en matière de réduction des gaz à effet de serre et de séquestration du carbone. Notre industrie s'est également engagée à préserver les 1,5 milliard de tonnes de carbone actuellement stockées dans l'environnement. Nous allons également séquestrer 3,4 millions de tonnes supplémentaires de carbone par année afin de réduire de 33 % l'intensité des émissions de gaz à effet de serre de notre production primaire d'ici 2030.
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Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invitée à m'adresser à vous aujourd'hui.
Je m'appelle Aldyen Donnelly et je me joins à distance, de mon domicile situé dans le territoire traditionnel des nations Squamish, Musqueam et Tsleil‑Waututh.
Je suis conseillère principale en matière de marchés du carbone chez Terramera, une entreprise de technologie agricole de Colombie-Britannique. Je suis également cofondatrice et principale actionnaire de Nori, Inc., une entreprise de démarrage faisant appel à la technologie de la chaîne de blocs, créée il y a trois ans et demi. Nous sommes en train de bâtir aux États-Unis un marché transparent, crédible et accessible aux agriculteurs pour l'élimination du carbone. Le siège social de Nori est à Seattle, dans l'État de Washington.
Du milieu des années 1990 jusqu'à l'an 2000, j'ai fondé et dirigé le Greenhouse Emissions Management Consortium qui comptait, parmi ses membres, 14 des principaux émetteurs de gaz à effet de serre du Canada de l'époque. À ce titre, j'ai recueilli les fonds privés qui ont permis de lancer le projet sur le bilan carbone dans les sols des prairies, un partenariat public-privé créé dans le cadre de l'initiative d'investissement de contrepartie d'AAC. En octobre 1999, au nom des grands émetteurs canadiens, j'ai signé le premier accord au monde visant l'achat de crédits pour la réduction des émissions auprès d'agriculteurs. Je suppose que cela veut dire que je travaille dans le domaine depuis un bon bout de temps.
Le travail de Terramera vise surtout à trouver des moyens de mettre l'intelligence de la nature au service des agriculteurs afin qu'ils prennent des décisions éclairées en matière de gestion de leurs terres. Nous mettons au point des logiciels et des outils d'analyse pour aider nos producteurs d'aliments et de fibres forestières à améliorer la santé des sols et à accroître la productivité des nutriments, à atténuer le risque climatique, à obtenir des rendements financiers plus stables à la ferme et à léguer aux générations futures un sol plus résilient. Le stockage de carbone organique dans le sol est l'une des rares mesures qui nous permettent d'atténuer les risques climatiques, tout en construisant un écosystème plus résilient et plus productif en prévision des changements climatiques.
J'insiste sur l'importance que les législateurs et les influenceurs canadiens saisissent cette occasion de faire connaître au reste du monde une nouvelle voie vers un véritable marché de solutions climatiques naturelles. Le Protocole de Montréal a propulsé le Canada comme chef de file mondial. Nous avons maintenant une deuxième chance d'orienter le monde vers des solutions essentielles et réalisables en matière d'atténuation des risques climatiques et d'adaptation.
Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, le Canada se classe parmi les cinq premiers pays au monde, aux côtés de la Russie, des États-Unis, de la Chine et du Brésil, pour leur potentiel de retirer de l'atmosphère les gaz qui retiennent la chaleur et de stocker le carbone ainsi récupéré dans les sols et les systèmes racinaires. Selon certaines études, il se classe au deuxième rang.
Selon une analyse publiée récemment par d'éminents scientifiques canadiens, nos terres cultivées et nos pâturages ont la capacité de séquestrer 78 millions de tonnes supplémentaires d'équivalent CO2 par année d'ici 2030. Cela représente 25 à 35 % de la réduction nationale que nous devons atteindre par rapport à nos niveaux d'émissions de 2019 pour respecter nos objectifs de l'Accord de Paris d'ici 2030.
Quelle est la situation réelle? Après 18 années d'expérimentation, les initiatives de crédits compensatoires, à participation volontaire et obligatoire, lancées dans d'autres pays n'ont pas réussi à mobiliser un investissement suffisant dans la réduction et la séquestration des gaz à effet de serre. Et cela dans tous les secteurs, pas seulement l'agriculture.
Depuis 2002, les initiatives de crédits compensatoires à participation volontaire et obligatoire ont permis, dans leur ensemble, d'octroyer et de retirer moins de 2,5 milliards en crédits. Cela semble beaucoup, mais même si la totalité de ces crédits avait eu la valeur sous-jacente d'une tonne de dioxyde de carbone de moins dans l'atmosphère ou séquestrée dans le sol, ces crédits retirés ne représentent que 10 à 15 % des émissions de gaz à effet de serre relâchées dans l'atmosphère au cours d'une année par les grands émetteurs du monde. Cette expérience a donc peu de valeur d'un point de vue statistique.
Les législateurs canadiens et les autres acteurs du domaine doivent travailler ensemble pour guider le monde sur une nouvelle voie. Pour le Canada, ce pourrait être une occasion semblable au Protocole de Montréal. Il est temps que nous prenions les devants et montrions au monde comment bien faire les choses, comme nous l'avons fait quand il a fallu sortir de nos chaînes d'approvisionnement les substances dont les rejets causaient des trous dans la couche d'ozone.
Le Canada est bien placé pour mettre en place les premières solutions climatiques naturelles vraiment efficaces et fonctionnelles et les faire connaître au reste du monde. Nous essayons de promouvoir de nouveaux marchés qui récompensent les services écosystémiques, et non de nouveaux programmes de subventions sous-financés qui imposent aux agriculteurs des pratiques de gestion des terres.
Dans le texte de mon allocution préliminaire, je formule six recommandations précises sur ce que nous devons faire. Je vais m'interrompre ici et je vous invite à prendre connaissance de mon mémoire dès que vous l'aurez.
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Je dois répondre que non, je ne suis pas d'accord avec l'idée de ne pas accorder de crédits aux agriculteurs qui ont pris des mesures précoces, mais en même temps, j'ai beaucoup d'empathie pour les fonctionnaires et je comprends pourquoi c'est leur point de départ. Nous devons seulement leur donner les outils dont ils ont besoin pour s'assurer qu'ils ne finiront pas par prendre cette décision.
J'ai quelques remarques à faire. Premièrement, pour ce qui est de la solution, dans le marché de Nori, toute décision prise par vous ou quelqu'un d'autre sera un compromis. Nous avons sondé énormément d'acheteurs très intéressés par ce marché et recueilli un soutien parmi la communauté des acheteurs en faveur de notre projet d'émission de crédits. Il y a deux critères. Le carbone déjà stocké dans le sol change en fonction des nouvelles pratiques adoptées après le 31 décembre 1999. J'aime beaucoup la date proposée par Bryan Gilvesy, celle de Kyoto 1997. Aux États-Unis, nous avons choisi 1999 pour la simple raison que nous avons découvert que nous avions des difficultés à avoir accès à des données antérieures à cette année‑là et que cela nous imposait des contraintes. Nous nous sommes également dit que nous allions émettre des crédits acquis seulement pour une durée maximale de cinq ans à l'égard de tout projet.
Quand vous adoptez un modèle comme celui‑ci, il faut se demander ce que signifie la date « pas avant le » pour l'investissement qui déclenche le changement graduel des stocks de carbone par rapport au nombre d'années de crédits que vous obtiendrez. Toute décision que nous prendrons sera arbitraire, mais je pense qu'il est très important de s'attaquer à cela et d'en arriver à une décision consensuelle d'accorder des crédits aux agriculteurs qui ont été les premiers à adopter ces pratiques.
Ma deuxième remarque concerne le fait que dans toute variation du plafond et des règles commerciales — du moins à l'extérieur du Canada —, tout producteur pétrolier ou exploitant de raffinerie dont l'intensité des émissions est inférieure à celle de leurs pairs obtient des quotas d'émissions échangeables ou excédentaires en contrepartie de son rendement, même si cela fait 25 ans qu'il obtient ce rendement.
Pourquoi donnerions-nous des crédits aux raffineries de pétrole qui ont pris des mesures précoces et pas aux agriculteurs? Je ne comprends pas cette logique.
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Je vous remercie. Je vais répondre à certaines de vos questions et je donnerai la parole à mon collègue Duane Thompson.
Il est certain que nous constatons que, si le pâturage se déroule bien, nous en retirons une diversité d'avantages, par exemple un enrichissement de la biodiversité, le rétablissement de terres humides, l'atténuation des inondations. Tous ces avantages s'additionnent et je pense que c'est une excellente chose, surtout pour les acteurs du marché qui s'intéressent à la réduction des gaz à effet de serre, mais aussi aux effets connexes.
À titre d'exemple, l'Australie a mis en place, en collaboration avec Microsoft, un projet dans le cadre duquel elle a acheté des crédits compensatoires de carbone, tout en profitant de tous ces avantages connexes sur la biodiversité.
Ces dernières années, il a vraiment été intéressant de voir que les organisations de conservation ainsi que la communauté des agriculteurs et des éleveurs nous ont emboîté le pas. En jumelant l'expertise du producteur, qui connaît bien la terre, et celle des biologistes et des spécialistes des zones riveraines, il a été possible d'obtenir des résultats fabuleux. Je pense que nous devons reproduire cette collaboration.
La plus importante, c'est de saisir l'occasion. Il est nécessaire de mettre en place des protocoles de quantification et d'octroi de crédits compensatoires. Ce sont en fait deux choses très différentes qui tiennent compte des leçons tirées des expériences menées dans d'autres États. Les marchés de compensation existants ont échoué. Nous avons beaucoup appris de ces expériences. Il est maintenant temps de mettre en place le système qui va vraiment fonctionner.
De nos six recommandations, la deuxième chose vraiment importante qu'il faut retenir, c'est que, dans les années 1990, les experts, la communauté agricole et AAC ont tous convenu que pour que ce marché fonctionne, il était essentiel de créer et de maintenir, d'un bout à l'autre du pays, un réseau de sites expérimentaux où nous effectuons des tests rigoureux sur les éléments nutritifs des sols et des végétaux et publions les données afin que l'ensemble de la communauté agricole puisse savoir ce que contiennent ces sols. En fait, le Canada s'est engagé à créer et à maintenir ce réseau dans les années 1990. Le financement s'est tari vers 2005.
Le département de l'Agriculture des États-Unis a fait la même chose. Il a obtenu du financement en 2002. Les Américains ont dit que c'était l'épine dorsale indispensable. Le département a distribué tout le financement requis pour faire ce qui devait être fait aux États-Unis sous forme de subventions. Les Américains disaient que les Canadiens faisaient la bonne chose et qu'ils devaient s'en inspirer. En 2009, leur financement a été interrompu.
Ces expériences nous ont appris que nous devons bâtir cette épine dorsale, ce réseau de sites expérimentaux. Nous devons le bâtir de façon à ce qu'il soit perçu comme une infrastructure clé capable d'attirer des capitaux privés, afin que nous ne soyons plus obligés de dépendre des fonds du gouvernement qui risquent d'être coupés et de disparaître dans cinq ou sept ans.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je vais commencer par la Canadian Cattlemen's Association. Je vais faire quelques brèves observations.
Monsieur Thompson, dans mon ancienne vie, j'ai passé huit ans à planter des arbres. L'un de mes gros fournisseurs de contrats était le Douglas Lake Ranch, en Colombie-Britannique. J'ai donc pu voir comment le bétail réduit le risque d'incendie de forêt grâce à la rotation des pâturages sur les terres.
Je tiens aussi à remercier l'Association d'avoir eu l'amabilité de m'inviter dans la région de l'Okanagan en septembre dernier. J'ai visité deux exploitations agricoles qui avaient remporté le prix de l'exploitation agricole durable décerné par votre association. Je suis allé au ranch Clifton à Keremeos et au ranch Carorso, à Oliver. Ces visites très instructives m'ont donné l'occasion de m'entretenir avec des éleveurs, d'aller voir les pâturages et de comprendre la relation entre le bétail et l'herbe, une relation qui n'a pas changé depuis des millénaires. Avant que nous ayons du bétail, nous élevions des bisons ici. Nous devons nous rappeler que les meilleures méthodes d'élevage imitent ce qui se passe dans la nature. Cette relation entre les végétaux et les animaux est donc indispensable et elle reproduit ce qui se passe depuis des millénaires.
Madame Jackson, vous avez déjà donné beaucoup d'information au Comité, mais brièvement, souhaitez-vous ajouter quelque chose quant aux recommandations que vous aimeriez voir dans notre rapport au gouvernement fédéral?