Bienvenue à la sixième séance du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le 24 octobre, nous entreprenons notre étude sur la capacité de transformation.
[Français]
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride. Conformément à l'ordre de la Chambre adopté le 23 septembre 2020, les délibérations seront publiées sur le site Web de la Chambre des communes.
À titre d'information, la diffusion Web montrera toujours la personne qui parle, plutôt que l'ensemble du Comité.
Pour garantir le bon déroulement de la réunion, j'aimerais vous faire part de certaines règles. Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Au bas de votre écran, vous pouvez choisir le parquet, l'anglais ou le français. Avant de prendre la parole, attendez que je vous nomme.
Je vous rappelle que les observations des députés et des témoins doivent être adressées à la présidence.
Assurez-vous que votre micro est éteint lorsque vous ne parlez pas.
[Traduction]
Sur ce, nous sommes prêts à commencer.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
Pour la première heure, nous accueillons Mme Theresa Iuliano et Mme Tammy Switucha, de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Nous recevons également des représentants du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire: M. Warren Goodlet, directeur général, Direction de la recherche et de l'analyse; M. Frédéric Seppey, sous-ministre adjoint, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés; M. Marco Valicenti, directeur général, Direction du développement et analyse du secteur, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés. Enfin, nous accueillons une représentante du ministère de l'Industrie: Mme Sheryl Groeneweg, directrice générale, Direction générale de la fabrication et des sciences de la vie.
Nous allons commencer par Mme Iuliano. Vous avez sept minutes et demie.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
C'est un grand plaisir et un grand honneur pour nous tous de témoigner devant le Comité et d'avoir l'occasion de nous exprimer.
Avant de parler de la situation actuelle dans le secteur agroalimentaire, permettez-moi de commencer par présenter quelques faits qui démontrent l'importance de cette industrie pour l'économie du Canada.
En 2019, le secteur agroalimentaire a contribué grandement à notre produit intérieur brut, à nos emplois et à nos exportations.
La transformation des aliments et des boissons est la plus importante industrie du secteur manufacturier: elle représente 17 % du PIB du secteur manufacturier et emploie 290 000 personnes.
L'industrie alimentaire est un moteur économique majeur de nos collectivités rurales, car elle achète 40 % de la production agricole canadienne totale.
Les petites et moyennes entreprises représentent plus de 95 % des établissements, alors que les grands établissements comptent pour environ la moitié de la production totale de l'industrie.
En 2019, les exportations d'aliments et de boissons transformés ont atteint une valeur record de 38,1 milliards de dollars. À l'échelle mondiale, le Canada est le 11e exportateur de produits alimentaires et de boissons transformés.
Au total, les transformateurs établis au Canada fournissent environ 70 % de tous les aliments et boissons transformés que les Canadiens consomment chaque jour.
[Français]
L'industrie de la transformation des aliments et des boissons a obtenu des résultats relativement positifs au cours des cinq dernières années. Plus précisément, permettez-moi de vous donner un aperçu de ces résultats sur le plan de la croissance, du commerce et de l'emploi.
Les revenus de l'industrie de la transformation des aliments ont augmenté à un taux moyen de 3,5 % par an, comparativement à 2,3 % dans l'ensemble du secteur manufacturier. En outre, l'emploi y a augmenté de 2,9 % par an, comparativement à 1,1 % dans l'ensemble du secteur manufacturier. Enfin, les exportations d'aliments et de boissons transformées ont augmenté à un taux annuel moyen de 6,9 % au cours des cinq dernières années, alors que, pour l'ensemble du secteur manufacturier, la croissance était de 3,5 %.
Dans l'ensemble, les possibilités sont grandes pour cette industrie, compte tenu de la demande mondiale croissante pour les aliments et les boissons transformés, ainsi que de la croissance de la population et des revenus dans les économies émergentes. La reconnaissance de notre cadre réglementaire sur le plan de la salubrité alimentaire est un attribut positif clé pour nos produits sur les marchés étrangers.
Il ne fait aucun doute que la pandémie actuelle a porté un coup sans précédent à l'ensemble du système alimentaire en raison des changements importants concernant la demande des produits alimentaires.
Mes commentaires sur les incidences de la pandémie à ce jour commencent par une mise en garde. Toute évaluation actuelle de la situation ne reflète pas comment cette situation peut évoluer dans les mois à venir.
Pour vous donner une idée de ce changement spectaculaire de la demande, entre février et avril 2020, les ventes dans le secteur de la restauration ont baissé de 57 %, et les ventes au détail d'aliments et de boissons ont, quant à elles, augmenté seulement de 18 % au cours de la même période. Les achats dans les restaurants continuent à être inférieurs aux niveaux qui avaient cours avant la pandémie de la COVID-19. La demande des services de restauration se situait, au mois d'août, à environ 80 % des niveaux antérieurs à la pandémie. Toutefois, ce pourcentage est sans doute inférieur à l'heure actuelle, compte tenu des récentes restrictions qui ont été appliquées dans de nombreuses régions du pays.
Les achats dans les épiceries, en octobre, étaient de 8 % supérieurs aux niveaux antérieurs à la pandémie de la COVID-19. Comme il a été mentionné précédemment, bien que la chaîne d'approvisionnement semble s'être stabilisée, nous ne pouvons pas tenir pour acquise la résilience du secteur. Des efforts extraordinaires ont été nécessaires pour maintenir les rayons des épiceries bien remplis et assurer qu'il y ait des aliments sur la table. Le système reste vulnérable, tandis qu'il continue de subir les répercussions de la pandémie de la COVID-19.
Depuis le début de la pandémie, l'industrie de la transformation alimentaire a connu son lot de défis en raison des nouvelles pressions importantes liées aux coûts. Par exemple, l'industrie a dû s'adapter aux protocoles sanitaires, qui ont nécessité des modifications dans les usines, des mesures d'assainissement accrues à la suite d'un renforcement des mesures sanitaires suggérées et des changements dans les processus de fabrication, qui ont souvent conduit à une diminution de la production.
Pour assurer une plus grande sécurité des travailleurs, les entreprises ont dû fournir de l'équipement de protection individuelle à leurs employés. De plus, les coûts de la main-d'œuvre ont considérablement augmenté en raison des heures supplémentaires, des primes de risque et de la formation. Parmi les autres coûts accrus, citons l'augmentation des frais de transport et des frais d'emballage ou l'augmentation des frais devant être payés aux détaillants pour le développement d'infrastructures telles que le commerce électronique. Enfin, certaines entreprises ont dû faire face à des pertes de revenus liés aux services de restauration, sans augmentation proportionnelle des ventes au détail, ainsi qu'à une augmentation des coûts liés aux stocks excédentaires.
Les répercussions financières totales de la pandémie de la COVID-19 sur l'industrie de la transformation alimentaire restent à voir, car les agences statistiques, comme Statistique Canada, continuent de recueillir des informations au fil du temps. Cependant, il est manifeste que les effets sur l'ensemble de l'industrie n'ont pas été homogènes.
Pour affronter la pandémie de la COVID-19, le gouvernement du Canada a mis en œuvre plusieurs initiatives spécialement destinées à l'industrie alimentaire pour assurer le maintien d'un système alimentaire sûr et fiable. Je mentionnerai seulement trois de ces initiatives.
Le gouvernement a mis en place un Fonds d'urgence pour la transformation, ou FUT, d'une valeur de 77,5 millions de dollars pour aider les entreprises à apporter les changements nécessaires à la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs et de leur famille, et pour améliorer leurs installations dans le but de rehausser la capacité d'approvisionnement alimentaire du Canada.
Le gouvernement a également mis en place le Programme d'achat d'aliments excédentaires, qui est doté d'une enveloppe de 50 millions de dollars pour aider à acheminer le plus efficacement possible les surplus de produits dans le système afin de nourrir les Canadiens vulnérables.
Enfin, il y a le Programme d'aide pour l'isolement obligatoire des travailleurs étrangers temporaires, travailleurs qui sont absolument essentiels non seulement pour notre secteur horticole, mais également pour notre industrie de la transformation alimentaire. Le fonds de 50 millions de dollars aide à couvrir les coûts supplémentaires liés à la période d'isolement obligatoire de 14 jours prescrite dans la Loi sur la mise en quarantaine.
J'aimerais également souligner les efforts accomplis par l'Agence canadienne d'inspection des aliments, ou ACIA, afin de préserver l'intégrité du système de salubrité alimentaire du Canada. Tout d'abord, l'ACIA a donné la priorité à des activités et à des services d'une importance capitale pendant la pandémie de la COVID-19 en introduisant une suspension temporaire des activités à faible risque qui n'avaient pas d'incidence immédiate sur la salubrité des aliments ou la protection de nos ressources agricoles.
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C'est très gentil. Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
L'Agence assure une surveillance de la production nationale et des produits alimentaires importés tout en soutenant le commerce et la chaîne d'approvisionnement, notamment par la certification des exportations.
L'Agence a également suspendu temporairement certaines exigences en matière d'étiquetage de produits qui n'étaient pas liés à la salubrité alimentaire dans le domaine de la restauration afin qu'ils puissent être rapidement réorientés vers la vente au détail. En outre, afin de prévenir toute pénurie de viande, l'ACIA a travaillé avec les provinces et les territoires afin de permettre le commerce interprovincial de la viande produite dans des établissements réglementés par les provinces. L'Agence a reçu un financement supplémentaire de 20 millions de dollars pour appuyer ces efforts. Cela lui permet de poursuivre son travail important de sauvegarde du système alimentaire canadien et de mieux soutenir les demandes de l'industrie alimentaire canadienne.
[Traduction]
En conclusion, bien que la COVID-19 ait eu un impact financier sur l'industrie de la transformation alimentaire, compte tenu de son agilité et de sa résilience, le secteur peut jouer un rôle majeur dans la reprise économique.
Mes collègues et moi-même serons heureux de répondre à vos questions aujourd'hui.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Lorsque nous regardons au-delà de la COVID-19, nous nous attendons à ce que l'innovation dans l'industrie de la transformation alimentaire soit davantage mise de l'avant. Les dépenses des entreprises au titre de la recherche et du développement sont essentielles pour que le secteur canadien de la transformation des aliments et des boissons puisse répondre à l'évolution de la demande des consommateurs grâce à des produits et à des procédés concurrentiels à l'échelle mondiale.
Avec le soutien continu des innovateurs canadiens, nous pouvons miser sur les domaines technologiques émergents et les nouvelles attentes des consommateurs, tout en saisissant des occasions de croissance incroyables dans le secteur alimentaire.
Le gouvernement du Canada effectue des investissements ciblés dans les entreprises innovantes du secteur de la transformation alimentaire à valeur ajoutée par l'entremise du Fonds stratégique pour l'innovation ou de l'Initiative des supergrappes d'innovation.
Pour renforcer encore ce secteur et pour donner suite à ces recommandations, le gouvernement du Canada a également accordé jusqu'à 30 millions de dollars au Réseau des innovateurs canadiens en alimentation, par le biais du Fonds stratégique pour l'innovation, afin de mettre en place un réseau dont la mission est d'accélérer l'innovation et la collaboration dans le secteur de la transformation des aliments.
En ce qui concerne les investissements, nous continuons à investir dans l'industrie pour renforcer ses capacités dans le secteur de la transformation des aliments et des boissons à valeur ajoutée, de manière à concilier les débouchés commerciaux et le potentiel canadien.
Les investissements du gouvernement du Canada dans la Supergrappe des industries des protéines du Canada témoignent de ces efforts. Dans le cadre du programme des supergrappes d'innovation, le gouvernement fédéral reconnaît le potentiel de la force actuelle du Canada dans le domaine des légumineuses et la demande mondiale croissante d'aliments à base de plantes à valeur ajoutée.
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Je vous remercie, monsieur Drouin, de cette excellente question.
Nous sommes de très importants producteurs agricoles dans le monde. En effet, en ordre d'importance, nous sommes le cinquième exportateur de produits agricoles et agroalimentaires du monde et le cinquième importateur. Cela démontre que nous avons une très forte capacité d'absorption. Nous importons énormément pour répondre à nos besoins. Cependant, comme je l'ai mentionné dans mon discours d'ouverture, il faut garder à l'esprit que ce sont des produits fabriqués et transformés au Canada qui répondent à une très grande partie de la demande canadienne en produits transformés.
Pour ce qui est de la capacité de transformation, elle peut varier d'un secteur à l'autre. Dans des secteurs comme celui de la transformation laitière, elle est très forte pour ce qui est de nos besoins internes. Le système de gestion de l'offre fait en sorte que notre capacité est suffisamment élevée pour transformer tous les produits dont nous avons besoin. Dans d'autres secteurs, nous avons un avantage comparatif très important à l'échelle mondiale. Je pense au secteur de la transformation des produits carnés, c'est-à-dire de la viande. Il est évident que notre capacité de production est nettement supérieure à nos besoins, au Canada. Nous exportons la très grande majorité de nos produits.
Il est difficile de répondre à cette question en raison de l'hétérogénéité du secteur. Dans certaines régions et pour certains secteurs, les capacités peuvent être insuffisantes, mais, compte tenu de la manière dont notre économie de marché fonctionne, c'est aux forces du marché et aux entreprises de déterminer les endroits où investir pour bonifier la capacité de transformation.
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Oui, tout à fait. À vrai dire, le ministère de l'Innovation, des Sciences et du Développement économique a été très actif dans ce dossier, bien au-delà des organismes de développement régional.
Je peux dire que, depuis 2017, notre ministère a engagé jusqu'à 203 millions de dollars pour appuyer l'innovation dans le secteur canadien de la transformation des aliments et des boissons à valeur ajoutée, et ce, au moyen de deux programmes: le Fonds stratégique pour l'innovation et l'Initiative des supergrappes d'innovation. M. Seppey a déjà parlé des investissements à cet égard.
En 2018, le Fonds stratégique pour l'innovation a également permis de financer un projet des Aliments Maple Leaf pour la construction d'une usine de transformation de la volaille à valeur ajoutée de calibre mondial à London, en Ontario. Ce projet de 744 millions de dollars, qui a bénéficié d'un financement de 20 millions de dollars en provenance du Fonds stratégique pour l'innovation, devrait créer l'une des usines de volaille les plus évoluées au monde du point de vue technologique, et la nouvelle installation comprendra des procédés et des technologies de pointe en matière de salubrité des aliments, d'environnement et de bien-être animal.
Toujours en 2018, nous avons lancé un concours dans le cadre du quatrième volet du Fonds stratégique pour l'innovation. Il s'agit d'encourager les consortiums à rassembler différents acteurs dans un même écosystème, de telle sorte que les petits joueurs de tout le pays puissent interagir avec les grands joueurs ayant des composantes de recherche, en vue de créer de la valeur et, idéalement, d'acquérir de nouvelles parts de marché.
Parmi les 55 demandeurs ayant participé au processus, 2 ont été retenus: le Réseau canadien d'automatisation et d'intelligence artificielle de l'agroalimentaire et le Réseau des innovateurs canadiens en alimentation.
Je remercie les témoins d'être avec nous.
Je vais poursuivre dans le même sens que la question posée par mon collègue M. Drouin. On a abordé le sujet de la décentralisation, mais je l'explorerais un peu plus.
Pendant la pandémie, on a dit avoir une forte capacité de transformation dans le domaine de la viande, entre autres. C'est bien. Par contre, on a vu l'effet marqué que la fermeture d'une usine en raison de l'éclosion de la COVID-19 a eu sur les marchés et sur les producteurs en amont. On ne sait pas quelle sera la situation dans trois, quatre ou cinq ans. Il faut s'adapter et il faut adapter notre système.
Au ministère, est-ce que l'on s'est penché sur ce problème? Comment pourrait-on faire en sorte de diversifier l'offre?
Cela pourrait être autre chose, mais, si l'on parle de l'abattage, comment pourrait-on donner de la place à de plus petits joueurs, par exemple?
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Merci, monsieur le président, et merci aux témoins qui comparaissent devant nous aujourd'hui.
Hier, je me suis entretenu avec des représentants des TUAC, un syndicat qui représente environ 70 000 travailleurs d'usines de transformation dans tout le Canada. Je suis heureux d'entendre que le gouvernement reconnaît que la main-d'œuvre est un élément crucial de l'équation, car c'est effectivement le cas. Toutefois, durant notre entretien, les représentants des TUAC m'ont clairement fait savoir qu'ils se préoccupent constamment de la sécurité de leurs membres.
Si nous reconnaissons le rôle important que joue la main-d'œuvre... Je tiens à rappeler aux membres du Comité et à nos témoins que les TUAC ont présenté au ministère de la sept recommandations concernant des pratiques exemplaires. Malgré la chronologie des événements jusqu'ici et malgré tout ce que nous savons au sujet de la COVID-19, les TUAC ont constaté que, dans certains cas, les recommandations avaient été adoptées et suivies, mais que, dans bien d'autres cas, elles ne l'avaient pas été.
Le nombre de cas de COVID étant de nouveau à la hausse, et compte tenu de la vulnérabilité que nous avons déjà observée dans notre chaîne d'approvisionnement, comme en témoigne la fermeture de certaines usines de transformation, pourquoi l'Agence canadienne d'inspection des aliments n'intervient-elle pas pour faire appliquer ces protocoles de manière uniforme afin de protéger la santé et la sécurité de nos travailleurs?
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Bienvenue à cette deuxième heure et au deuxième groupe d'experts pour notre étude sur la transformation.
Du Conseil des doyens - Agriculture, Alimentation et Médecine Vétérinaire, nous accueillons Martin Scanlon, doyen de la faculté des sciences de l'agriculture et de l'alimentation de l'Université du Manitoba;
[Français]
nous recevons également Mme Christine Theoret, doyenne à la Faculté de médecine vétérinaire de l'Université de Montréal;
[Traduction]
de Food, Health and Consumer Products of Canada, nous recevons Michael Graydon, directeur général;
[Français]
enfin, nous recevons M. Jean-Sébastien Gascon, directeur général de la Société des parcs d'engraissement du Québec - Boeuf Québec.
Vous avez chacun sept minutes et demie pour faire votre présentation.
[Traduction]
Monsieur Scanlon, nous allons commencer par votre déclaration liminaire.
:
Merci beaucoup de me donner l'occasion de m'exprimer ici aujourd'hui au nom du Conseil des doyens pour parler de la transformation des aliments au Canada, un sujet dont l'importance a été mise encore plus en évidence par la pandémie de COVID-19.
Après une brève introduction du Conseil des doyens - facultés d'agriculture, d'alimentation et médecine vétérinaire, nous souhaitons aborder deux points. Le premier est l'importance que revêtent l'innovation et la formation à l'innovation pour l'édification d'un secteur de la transformation alimentaire concurrentiel à l'international. Le deuxième point est l'importance d'adopter une approche intégrée à l'égard du continuum que constituent la santé environnementale, la santé animale et la santé humaine. L'industrie canadienne de la transformation alimentaire fait partie intégrante de ce continuum.
Le Conseil des doyens est un réseau pancanadien de huit facultés d'agriculture et de cinq collèges vétérinaires qui est axé sur la formation, la recherche et l'application des connaissances. Il s'agit d'un véritable noyau dans l'écosystème national regroupant l'alimentation, l'agriculture et la santé. Comme il fait partie des producteurs d'aliments les plus avancés au monde, le Canada a un rôle de meneur à jouer pour répondre aux exigences croissantes de la planète en ce qui concerne la qualité des aliments.
Pour cela, les communautés canadiennes et les partenaires commerciaux du Canada doivent avoir confiance dans l'intégrité, la résilience et la sécurité de notre système alimentaire. Outre le fait que les facultés du Conseil des doyens sont les détentrices du talent, il est important de souligner qu'elles sont également responsables du développement du talent et des connaissances qui permettront de concrétiser l'énorme potentiel de croissance économique et d'exportation du secteur agroalimentaire canadien.
Nos facultés contribuent également à raffermir la confiance du public à l'égard de l'intégrité et la sécurité du système alimentaire canadien, et à protéger ce dernier — ainsi que notre système de soins de santé, le cas échéant — contre les futures incursions de maladies infectieuses, les menaces à la sécurité alimentaire et les risques environnementaux.
Il y a environ un an, le Conseil des doyens a collaboré avec Industrie, Sciences et Développement économique Canada à la production d'un rapport examinant l'orientation que le secteur canadien de la transformation des aliments et des boissons doit prendre pour assurer sa croissance. Plus précisément, le ministère nous a demandé comment le Conseil des doyens pouvait contribuer à la constitution d'une main-d'œuvre qualifiée et tournée vers l'innovation. Comment pourrions-nous également mobiliser l'énorme capacité de recherche et de développement de nos facultés pour répondre aux objectifs à court, moyen et long terme d'un secteur alimentaire transformé?
Dans le rapport que nous avons produit pour Industrie, Sciences et Développement économique Canada, nous avons formulé diverses recommandations sur ce qu'il serait nécessaire de faire pour attirer un ensemble diversifié d'étudiants dans nos facultés, et ainsi nous assurer de rassembler un large éventail d'idées et de solutions créatives pour la mise au point d'innovations en matière d'ingrédients et de procédés.
L'une des recommandations était la nécessité de renouveler l'infrastructure de base qui est absolument vitale tant pour la formation des étudiants que pour la recherche. Il convient de noter que des centaines de scientifiques et des milliers d'étudiants mènent dans nos facultés des recherches reconnues au niveau international qui nourrissent l'innovation en matière d'ingrédients pour les cultures et l'élevage au Canada. Ces chercheurs et ces étudiants conçoivent également des innovations en matière de science des procédés pour réoutiller les petites et moyennes entreprises canadiennes. Comme vous le savez sans doute, ce sont ces PME qui sont au centre de la sphère de la transformation alimentaire au Canada.
Lorsque nous avons fait cela, cependant, en tant que doyens, nous avons reconnu que nous ne pouvions pas adopter une perspective étroite sur le simple renouvellement des infrastructures pour le secteur de la transformation alimentaire, car le choix et la confiance des consommateurs en matière d'aliments sont de plus en plus influencés par des considérations sur cette importante ligne de vie qui relie la santé humaine, la santé animale, la santé des plantes et la santé de l'environnement. La relation avec cette ligne de vie est reconnue par un concept de santé unique, un concept que l'Organisation mondiale de la Santé et l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture considèrent être le moyen de lutter contre les menaces de zoonoses.
Si nous sommes réalistes dans nos aspirations à transformer le capital naturel par le truchement de notre capital humain et à faire en sorte que notre industrie agroalimentaire devienne un meneur à l'échelle mondiale, le renouvellement des capacités de recherche, d'innovation et de formation dans nos installations vétérinaires et agricoles doit être une priorité.
Un investissement dans des initiatives nationales uniques en leur genre, à la pointe du progrès et fortement interreliées prouvera que le Canada est prêt à protéger ses frontières et ses communautés contre les maladies infectieuses et les menaces actuelles et futures pour la sécurité alimentaire. En outre, cet investissement renforcera les assises de la reprise économique du Canada après cette pandémie et nous préparera aux pandémies à venir.
Le premier de ces investissements, « Growing Canada », est destiné à la formation et à la capacité de recherche dans le domaine de l'agriculture et de la transformation alimentaire durables. Il intégrera l'innovation universitaire qui se fait à l'échelle du pays pour la prospérité des secteurs canadiens de l'agriculture et de la transformation alimentaire. Le second, « One Health Canada », intégrera les approches fondées sur la science et les données en ce qui concerne les risques qui menacent la santé humaine, animale et environnementale. Ces risques ont été brutalement mis en évidence au cours de la dernière année, mais l'initiative s'emploiera aussi à proposer des solutions à ces menaces. Ces deux instruments sont interreliés et interdépendants, et ils sont tous deux des éléments essentiels du progrès économique et social d'un secteur agroalimentaire en pleine croissance.
Comme le disait M. Seppey, cela est justifié non seulement par la taille de l'industrie et son importance pour notre économie nationale, mais aussi par l'effet de ce secteur sur le marché de l'emploi. M. Seppey a notamment souligné le fait que ces deux composants — la taille de l'industrie et les emplois qui y sont rattachés — croissent plus rapidement dans l'agroalimentaire que dans d'autres secteurs de l'économie.
En conclusion, le Conseil des doyens tient à souligner une leçon salutaire qui a été apprise de la COVID: nous ne pouvons pas tenir notre système alimentaire pour acquis. Nous vous demandons d'utiliser le Conseil des doyens comme une ressource précieuse pour le développement des talents et la création de connaissances pour le secteur agroalimentaire. C'est cette perspective axée sur l'innovation et le développement des outils et des talents dans le domaine de l'agroalimentaire et de la science vétérinaire qui soutiendra durablement la génération par le système agroalimentaire canadien d'avantages économiques et sociaux à long terme.
Merci.
:
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, bonjour.
Je m'appelle Michael Graydon et je suis chef de la direction de Food, Health and Consumer Products of Canada, le principal porte-parole du plus grand employeur manufacturier du Canada. Le secteur des produits alimentaires, de santé et de consommation emploie plus de 350 000 Canadiens dans des entreprises de toutes tailles qui fabriquent et distribuent des produits sûrs et de grande qualité favorisant la santé de nos foyers, de nos collectivités et du Canada tout entier.
Nous transformons les richesses agricoles du pays en produits finis à valeur ajoutée qui nourrissent des familles d'ici et de partout dans le monde. Nous travaillons en étroite collaboration avec les agriculteurs canadiens, et en tant que lien essentiel entre les collectivités rurales et urbaines, nous sommes le plus important employeur des régions rurales du Canada. Présents dans toutes les régions du pays, nous fournissons des emplois bien rémunérés, renforçons les collectivités et apportons plus de 39,9 milliards de dollars à l'économie chaque année.
Des initiatives clés telles que la Politique alimentaire pour le Canada, la Table sectorielle de stratégies économiques sur l'agroalimentaire et la Table ronde de l'industrie de la transformation des aliments ont toutes permis de reconnaître l'importance cruciale de l'industrie agroalimentaire, en particulier le fait que la fabrication à valeur ajoutée pourrait faire du Canada un chef de file mondial dans la production et l'innovation alimentaires. Notre secteur est un moteur nécessaire à l'emploi, à la croissance et à l'autonomie.
Je voudrais vous parler aujourd'hui de deux des principales contraintes auxquelles l'industrie canadienne de la fabrication alimentaire est confrontée. Il s'agit premièrement de la pénurie chronique et croissante de main-d'œuvre qui nous empêche de doter un emploi sur dix dans notre secteur, et deuxièmement, des pratiques déloyales des grands détaillants de produits alimentaires qui nuisent aux agriculteurs, aux fournisseurs alimentaires et aux consommateurs canadiens.
Afin que le Canada devienne une destination attrayante pour les investisseurs, nous devons être en mesure d'attirer et de retenir des travailleurs. Pourtant, le manque de main-d'œuvre continue de s'aggraver chez les fabricants de produits alimentaires où l'on compte près de 28 000 postes vacants. Les emplois de notre secteur sont bien payés et devraient être en demande. Le salaire horaire offert par les fabricants de produits alimentaires a augmenté de 16 % par rapport à l'année précédente et le salaire moyen atteint 24 $ l'heure, ce qui représente 60 % de plus que le salaire minimum provincial le plus élevé. Les fabricants de produits alimentaires se sont également mobilisés pour investir massivement dans la sécurité des travailleurs tout au long de la crise de la COVID-19, offrir des incitatifs aux travailleurs et accroître les initiatives pour l'engagement et l'appréciation des employés.
Malgré nos efforts, les problèmes de main-d'œuvre persistent. Nous demandons au gouvernement d'encourager les Canadiens sans emploi à occuper ces postes vacants, de continuer d'assurer un accès prévisible et opportun à des travailleurs de l'extérieur du Canada pour compenser notre manque de main-d'œuvre, de fournir un soutien et des incitatifs aux entreprises pour qu'elles investissent dans l'automatisation, et de convoquer une table ronde avec les fabricants de produits alimentaires pour pouvoir discuter de ces problèmes et tâcher d'y trouver ensemble des solutions.
Si le Canada accorde vraiment la priorité à l'emploi et à la croissance, il doit aussi corriger de toute urgence la deuxième contrainte dont je veux vous parler aujourd'hui, soit les pratiques déloyales d'un petit groupe de géants de la vente au détail de produits alimentaires. Seulement cinq détaillants en alimentation contrôlent maintenant plus de 80 % des épiceries et des pharmacies du Canada, ce qui crée un grave déséquilibre des forces par rapport aux fabricants, aux agriculteurs, aux fournisseurs, aux petits détaillants et aux consommateurs.
Certains de ces grands détaillants ont abusé de leurs pouvoirs en imposant des pratiques commerciales injustes et contraires à l'éthique qui nuisent à tous ceux qui cultivent, fabriquent, achètent ou vendent des denrées alimentaires et d'autres produits essentiels. Depuis trop longtemps, quelques détaillants se servent des agriculteurs et des fournisseurs comme d'une tirelire en leur faisant payer des frais arbitraires, en augmentant les coûts et en réduisant les paiements aux fournisseurs, tandis qu'ils haussent de plus en plus les prix aux consommateurs.
Les conséquences sont graves. S'ils sont obligés de payer les factures des grands détaillants, les agriculteurs et les fournisseurs auront du mal à payer les leurs et ne pourront plus investir autant dans l'innovation de nouveaux produits, les nouvelles installations et la création d'emplois. Les aliments « fabriqués au Canada » deviendront plus chers et notre système alimentaire s'affaiblira. Les consommateurs auront un choix de produits moins nombreux et plus coûteux, les travailleurs perdront des occasions d'emploi et le Canada voit déjà des investisseurs lui préférer d'autres pays plus compétitifs.
Et maintenant, en pleine pandémie, des entreprises comme Loblaws et Walmart mettent le comble à ce comportement d'intimidation en forçant les fournisseurs à financer leurs projets d'expansion alors qu'elles enregistrent des bénéfices records. On estime que les nouveaux frais imposés par Walmart et Loblaws coûtent à eux seuls 1 milliard de dollars par an aux fournisseurs. Le placement et le maintien des produits sur les tablettes des magasins totalisent donc des coûts d'environ 6 milliards de dollars dont les fournisseurs et les consommateurs ne tirent aucun avantage réel.
Les géants canadiens de l'alimentation contrôlent peut-être la majorité des magasins et des étalages de produits du pays, mais il est temps de se rappeler que, sans les fournisseurs de denrées et de produits alimentaires, il n'y aurait rien à vendre.
Certains modèles éprouvés, tels que le code des bonnes pratiques pour l’approvisionnement en produits alimentaires du Royaume-Uni et son organisme d’exécution, contribuent de façon remarquable à rétablir l’équilibre et l’équité entre les détaillants et les fournisseurs tout en limitant la hausse du coût des aliments. Un récent examen législatif a confirmé que ce code a amélioré la communication, la collaboration et l’efficacité tout en préservant la souplesse de la chaîne d’approvisionnement. Il en découle des avantages évidents pour toutes les parties intéressées. Ces résultats remarquables prouvent qu’une supervision rigoureuse et une gouvernance judicieuse sont bonnes pour les affaires comme pour les consommateurs.
Nous demandons aux provinces et aux territoires d’ouvrir la voie en établissant un code de conduite exécutoire semblable au modèle du Royaume-Uni afin de tenir les grands détaillants de produits alimentaires responsables du traitement équitable des fournisseurs. Nous demandons également au gouvernement fédéral d’élaborer un cadre commun destiné aux provinces et aux territoires pour éviter la création de plusieurs codes potentiellement incompatibles.
Il est grand temps que nos gouvernements prennent au sérieux les conséquences néfastes des pratiques déloyales des géants canadiens de l’alimentation. Les leaders de la chaîne d’approvisionnement s’accordent pour dire que sans cela, notre sécurité alimentaire sera menacée, nos chaînes d’approvisionnement essentielles s’affaibliront, les consommateurs s’en ressentiront, et la croissance économique, les emplois et la reprise du Canada après la COVID-19 seront en péril.
Monsieur le président, je vous remercie de votre attention.
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Distingués parlementaires, j'aimerais d'abord vous remercier de cette invitation. Je suis honoré, je dirais même excité. J'adore le niveau de réflexion à ce comité. C'est la première fois que je suis invité et que je comparais à un comité fédéral. C'est très excitant pour moi. J'espère que ma présentation va vous intéresser dans un certain sens.
La mondialisation place la production québécoise et canadienne du bœuf de boucherie en compétition avec le monde. C'est une filière commercialement instable, d'une grande complexité et qui comporte un risque élevé. C'est pourquoi le secteur de la transformation est concentré dans les mains de quelques géants.
Je souligne quatre éléments qui illustrent bien les défis auxquels nous devons faire face.
Le libre marché expose les producteurs et les transformateurs de bœuf à des prix d'une grande volatilité, et peu d'entreprises y survivent. Plusieurs pays disposent d'une main-d'oeuvre abondante et qui ne coûte pas cher, notamment les États-Unis, le Mexique et le Brésil. La réglementation manque de réciprocité. On importe du bœuf d'éleveurs qui sont assujettis à des normes de production inférieures à celles du Québec, tant en matière de santé et de bien-être animal que d'environnement. C'est la même chose pour les éleveurs dans le reste du Canada. Enfin, plusieurs États soutiennent financièrement leur secteur de la transformation.
Boeuf Québec est une initiative innovante pour la relance du secteur. Les ventes doublent tous les quatre à six mois, et nous souhaitons que ce rythme se maintienne pour les deux prochaines années, même s'il s'agit quand même d'une filière de petite envergure.
Comment le gouvernement peut-il soutenir le programme Boeuf Québec pour que nous puissions saisir les occasions qui s'offrent? Le programme Boeuf Québec est simple, et je vous dirai un grand secret tantôt. Il repose sur quatre éléments clés pour viser l'excellence et faire partie des meilleurs du monde. Ainsi, l'aide gouvernementale annoncée aujourd'hui doit nous aider à innover pour répondre à ces quatre grands défis. Quels sont-ils?
Premièrement, il faut mieux répondre aux demandes des consommateurs. En effet, le consommateur, c'est l'arbitre final de notre projet.
Deuxièmement, il faut assurer une meilleure coordination verticale de la ferme à la table, parce que la collaboration entre les maillons de la production permet de gagner de manière importante en productivité et en agilité. M. Graydon a souligné les difficultés à collaborer avec les distributeurs et les grandes bannières.
Troisièmement, il Il faut entreprendre la course pour une plus grande productivité des entreprises. Si nous souhaitons une relance, il faut aller chercher une meilleure valeur et une meilleure profitabilité pour toutes les entreprises, particulièrement pour ce qui est des transformateurs, des abattoirs et des producteurs. Au Canada, il n'y a pas de relance dans le secteur du bœuf, et c'est encore pire au Québec.
Quatrièmement, il faut augmenter la compétitivité de l'environnement d'affaires. Il faut innover pour mieux gérer les risques, mieux réglementer, former la main-d'oeuvre, et favoriser la recherche, l'investissement et l'innovation. Le soutien du gouvernement est un levier incontournable pour compenser les disparités mondiales. Il est clair que nous ne jouons pas à armes égales avec le reste du monde.
Les besoins sont clairement exprimés pour accélérer le programme Partenaires Boeuf Québec, qui a les mêmes orientations que celles du programme Canadian Beef. Tout le défi d'un tel programme est de réussir à le faire fonctionner à grande échelle, et tous les partenaires ont intérêt à ce que cela fonctionne.
Sur un plan plus concret, je vous glisse maintenant quelques mots sur la productivité.
L'élément clé qui nécessitera le plus d'investissements au cours des prochaines années est la productivité. Il n'y aura pas de relance de la production et de la transformation de la filière Boeuf Québec sans une augmentation de la profitabilité des entreprises. Je suis convaincu que c'est le même défi qui se pose partout au Canada.
En ce qui concerne les producteurs, Boeuf Québec s'est notamment donné pour objectif d'augmenter la profitabilité de la production de 6 % en lançant un projet pilote en 2021. Il faut produire davantage de valeur à moindre coût. Cela implique aujourd'hui d'innover, de mieux vendre et de mieux produire. C'est ainsi que nous amènerons les producteurs à investir et à produire davantage.
Pour ce qui est des abattoirs et des transformateurs, on peut dès maintenant transformer nos maillons faibles en force vive. Nous disposons de plusieurs abattoirs qui font l'objet d'inspections fédérales. Fait surprenant, au Québec, il y a constamment des abattoirs qui sont à l'arrêt ou qui mènent d'autres activités parce qu'ils n'y arrivent pas. Des abattoirs assujettis aux inspections provinciales ont démontré pendant la pandémie qu'ils avaient une formidable capacité d'abattage stratégique. Encore une fois, si on les laisse à eux-mêmes, ils ne seront pas capables de le faire.
Il nous faut réaliser un virage technologique radical. La technologie nous permet de gérer la complexité d'un projet comme celui de Boeuf Québec et elle nous permet d'être plus productifs. Nous devons dès maintenant faire un virage technologique radical en matière de production et de transformation. Cela rime avec automatisation, robotisation, industrie 4.0, chaîne de blocs. Il nous faut miser sur l'innovation, sinon, nous ne lutterons pas à armes égales avec les autres pays.
Nous élaborons actuellement un projet de chaîne de blocs qui changera la manière de produire. Nous avons besoin du gouvernement pour arriver à faire de cette filière un leader technologique et pour rivaliser avec les géants qui dominent cette industrie. Vous avez probablement déjà vu les robots qui arrivent dans les usines à grande vitesse. Dans cinq ans, si nous n'avons pas innové, nous serons morts.
J'ai apporté une note. Actuellement, il y a deux tremblements de terre dans le secteur de la transformation qu'il faut voir venir et comprendre. Le premier est la technologie — je pense que je l'ai assez bien exprimé. Une comète vient vers nous, et si nous ne prenons pas le virage maintenant, j'estime qu'il sera trop tard dans cinq ans. Le deuxième tremblement de terre s'est révélé avec la crise liée à la pandémie. Cela fait des années que l'Amérique du Nord est en sous-capacité quant à l'abattage.
[Traduction]
En outre, dans Business Insider, on peut lire des propos qui se traduisent comme suit:
Les Américains se tournent vers les petits bouchers pendant la pandémie, ce qui pourrait sonner le glas des géants de l’industrie bovine.
La pandémie de COVID-19 a mis au jour la précarité de la chaîne d’approvisionnement en viande aux États-Unis, où des dizaines de milliers de travailleurs de cette industrie sont tombés malades et des centaines ont perdu la vie. Les consommateurs, en quête d’autres fournisseurs, se tournent vers les petites fermes, qui ont vu la demande monter en flèche. Actuellement, 80 % du marché américain du bœuf est contrôlé par 4 grands producteurs de viande, qui font l’objet d’une enquête antitrust menée par le département de la Justice.
[Français]
Le contexte actuel est particulier. Il y a une sous-capacité en matière d'abattage, et nous nous retrouvons devant la nécessité d'effectuer non seulement un virage technologique, mais aussi un virage relativement au consommateur. Le consommateur pose plus de questions et il est prêt à en poser davantage. Il faut répondre maintenant à la demande.
Pendant des années, on concevait le secteur de la production de bœuf comme un système qui produisait de la marchandise. Dans un certain sens, cette ère est peut-être en train de se terminer. C'est là que nous intervenons, et je reprends les points stratégiques que j'ai mentionnés plus tôt: le consommateur, la productivité, la coordination verticale et la compétitivité.
Mon but est de faire en sorte que nous devenions d'une certaine manière le Cirque du Soleil du secteur du bœuf en Amérique du Nord. Pour ce faire, nous souscrivons à une stratégie de marketing que l'on appelle l'« océan bleu ». D'après moi, c'est ce que nous sommes en train de réussir par l'entremise de Bœuf Québec. Nous souhaitons vous surprendre.
Pour ma part, je trouve cela tout à fait excitant d'avoir des conversations comme celle qui se tient aujourd'hui avec les leaders du Canada en la matière. Cependant, je crois qu'il faut réussir à...
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Merci, monsieur le président.
J’aimerais d’abord remercier tous les témoins pour leur participation.
J’aimerais axer mes questions sur l’un des obstacles à l’augmentation de la capacité de transformation qui ont été mentionnés, soit la concentration des détaillants, qui a fait l’objet de reportages récemment. Par votre intermédiaire, monsieur le président, j’aimerais poser certaines questions à M. Graydon.
Je vous remercie pour votre témoignage et vous remercie beaucoup pour la note d’information très détaillée que vous avez fournie et qui répond à la quasi-totalité des questions que j’avais préparées.
J’aimerais commencer au bout de la chaîne de valeur, c’est-à-dire avec le consommateur. Hier, Statistique Canada a publié son dernier rapport mensuel sur l’Indice des prix à la consommation, qui indiquait une fois de plus une hausse, cette fois de 0,7 %. L’Indice est globalement en hausse de 1 %, en excluant l’essence, ce qui est principalement dû à l’augmentation des prix des aliments.
Toutefois, j’aimerais connaître l’incidence de ces relations commerciales sur le consommateur? Comment est-il possible pour le consommateur de tirer profit du comportement de l’industrie si ce comportement entre fournisseurs et agriculteurs, d’une part, et fabricants et transformateurs, d’autre part, est altéré? Si tous les intervenants reçoivent un prix plus équitable pour leurs produits, est-ce que cela ne fera pas augmenter les prix pour les consommateurs?
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En fait, plus ce projet avance...
[Français]
Est-ce que je réponds en français?
[Traduction]
Allez-vous comprendre si je réponds dans ma langue?
D’accord.
[Français]
Plus ce projet progresse, plus nous découvrons les marges qui se dissimulent partout, tout le long de la filière. En tenant compte de toutes ces petites marges qui s'ajoutent et en coordonnant la filière de façon de plus en plus serrée, nous réussissons à abaisser le prix au consommateur afin de le rapprocher de celui de la concurrence.
C'est là où il faut reconnaître l'importance de la coordination verticale. Par cette approche, nous faisons travailler les joueurs ensemble, et nous sommes alors capables d'offrir un prix qui s'apparente presque à celui d'un produit de base.
Nous avons le choix: rivaliser avec le secteur des produits de base ou créer de la valeur supplémentaire. C'est un très beau choix, honnêtement, sauf que la difficulté est que personne ne se fait de cadeaux dans cette industrie. J'utilise la même orientation que celle prise par Canadian Beef, mais nous ne réussissons pas à la réaliser comme il faut.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
À l'instar de mes collègues, j'aimerais remercier nos témoins de comparaître devant le Comité. Votre témoignage nous aidera beaucoup à rédiger notre rapport.
Lors des dernières séances du Comité, nous avons beaucoup parlé de la puissance qu'est le Canada en matière d'exportations. Cependant, j'aimerais ramener l'attention sur notre aptitude à assurer l'approvisionnement alimentaire local.
Je représente une circonscription de l'île de Vancouver, où l'on estime avoir de quoi s'approvisionner probablement trois jours en aliments frais. Si une catastrophe faisait dérailler nos chaînes d'approvisionnement, nous ressentirions tout un choc. Je sais qu'il y a beaucoup de collectivités au pays qui sentent le même genre de pression. C'est un peu ironique que le Canada soit un si grand producteur d'aliments, mais qu'il y ait tout de même autant d'exemples d'insécurité alimentaire au pays.
Je peux peut-être m'adresser d'abord à vous, monsieur Scanlon, parce que je sais que vous avez écrit sur le sujet et que j'ai beaucoup apprécié vos observations sur la résilience. C'est un thème qui me rejoint beaucoup.
Avez-vous des réflexions à communiquer au Comité sur la façon dont nous pouvons acquérir cette résilience et créer des conditions propices, par des programmes comme celui du Fonds des infrastructures alimentaires locales, pour accroître la sécurité alimentaire des petites collectivités et leur résilience?