FAAE Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 23 février 2021
[Énregistrement électronique]
[Traduction]
[Français]
Chers collègues, je vous remercie.
J'aimerais indiquer à notre groupe de témoins que, pour assurer une réunion ordonnée, tous les participants sont priés d'éteindre leur micro lorsqu'ils ne parlent pas et d'adresser leurs commentaires à la présidence. Lorsqu'il restera 30 secondes à leur temps de parole, je leur ferai signe avec ce papier.
L'interprétation est disponible en cliquant sur l'icône du globe terrestre, au bas de votre écran.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
Nous avons avec nous la Dre Natalia Kanem, directrice exécutive et sous-secrétaire générale des Nations unies, du Fonds des Nations unies pour la population, et M. Joel Spicer, président-directeur général de Nutrition international.
[Traduction]
Bienvenue au Comité.
Sous-secrétaire général Kanem, nous allons commencer avec vous; vous disposez de cinq minutes pour faire votre déclaration liminaire, je vous prie.
Monsieur le président, vice-présidents et membres du Comité, je vous remercie d'avoir invité le FNUAP, l'agence des Nations unies pour la santé sexuelle et reproductive, à témoigner devant le Comité aujourd'hui. De plus, je vous remercie beaucoup pour le soutien généreux et continu du Canada au FNUAP, en particulier pour l'aide humanitaire et notamment pour votre réponse à la COVID l'année dernière.
Imaginez une fille. Elle a 12 ans. En raison des combats dans sa région, elle vient de fuir avec sa famille le seul foyer qu'elle ait jamais connu. Cette fille de 12 ans aime l'école. Elle rêve de finir ses études, de trouver un travail décent et de fonder une famille quand elle sera prête. Aujourd'hui, son espoir s'effrite. Sa famille de six personnes est confinée dans une tente dans un camp de réfugiés de fortune, et elle se demande quand elle retournera à l'école. De nombreuses nuits, elle se couche le ventre vide. Elle vit dans la peur de la violence et de la COVID dans le camp surpeuplé. Elle est loin de se douter qu'elle ne retournera peut-être jamais à l'école. Elle ne sait pas que, dans quelques mois, elle va se marier pour alléger le fardeau économique de la famille. Sans contraception et sans avoir son mot à dire, l'accouchement précoce sera sans doute son destin, et bientôt, ses enfants et elle risquent d'être piégés dans une pauvreté impitoyable qui se répercutera sur plusieurs générations.
La pandémie de COVID a mis en évidence les inégalités existantes et les répercussions disproportionnées de la crise sur les femmes et les filles. Je vois la violence fondée sur le sexe monter en flèche. Les services de santé sexuelle et génésique sont perturbés, et il y a un besoin accru de services de santé mentale, le soutien psychosocial dont les femmes et les filles ont besoin. Oui, les mariages d'enfants, les mutilations génitales féminines et les grossesses chez les adolescentes sont tous en hausse, et nous savons que la traite des adolescents et la coercition montent en flèche dans ces contextes.
Une crise humanitaire peut être dévastatrice à elle seule. Imaginez maintenant être une jeune fille enceinte de 15 ans déplacée en raison d'un conflit et devant accoucher dans une zone de guerre, ou faire une fausse couche tout en faisant face au traumatisme d'un déplacement ou d'une catastrophe. Imaginez que cette situation se produit tous les jours: vous avez vos premières règles et vous n'avez pas d'articles sanitaires.
Nous savons, d'épidémies passées dans des contextes humanitaires et fragiles, que lorsque des services de soins de santé jugés sans rapport direct avec la réponse à l'épidémie, tels que les services de santé sexuelle et génésique, sont interrompus, cela peut entraîner plus de décès que l'épidémie elle-même. En fait, le manque d'accès à des services de santé sexuelle et reproductive de qualité chez les femmes en âge de procréer est une cause majeure de décès et d'invalidité.
Les pays en crise touchés par la fragilité sont responsables de plus de 50 % des décès lors de l'accouchement dans le monde. Les services et les fournitures médicales pour la santé sexuelle et génésique ne sont pas un luxe. Ils sont essentiels. Ils sauvent des vies et doivent faire partie de la réponse de la COVID. La situation est particulièrement dévastatrice pour les adolescents, même avant la pandémie de COVID-19, qui sont confrontés à des obstacles sociaux et logistiques plus importants pour accéder aux soins de santé et à un accès limité aux programmes de protection sociale.
Comme la pandémie exacerbe ces défis, les adolescents ont besoin de soins de santé sexuelle et génésique confidentiels. Ils demandent des renseignements précis et de qualité sur la sexualité, ce qui est essentiel. L'année dernière, le FNUAP a pu, grâce au Canada, distribuer plus de sept millions de trousses d'hygiène, qui contiennent des articles d'hygiène essentiels. Nous avons aidé près de 50 millions de femmes et de jeunes à accéder à des services de santé sexuelle et génésique et de prévention et de lutte contre la violence fondée sur le sexe. Nous avons fourni de l'EPI, de l'équipement de protection individuelle, aux travailleurs de la santé dans plus de 100 pays. Comme vous le savez, ce sont majoritairement des femmes.
Notre réponse pour lutter contre la COVID a réaffirmé notre orientation stratégique visant à mettre fin aux besoins non satisfaits en matière de contraception, à mettre fin aux décès inutiles pendant la grossesse et l'accouchement, et à mettre fin à la violence fondée sur le sexe et aux pratiques préjudiciables.
Tout au long de la pandémie, nous avons été à l'avant-garde des efforts visant à galvaniser l'action en faveur des femmes, et le temps est venu pour cette guérison et pour cette autonomisation.
Merci encore une fois au gouvernement et aux personnes du Canada de leurs contributions généreuses qui ont permis de faire la différence.
Merci beaucoup, sous-secrétaire-général Kanem, de votre déclaration liminaire.
Nous allons maintenant céder la parole à M. Spicer pour cinq minutes.
On vous écoute, monsieur.
[Français]
J'aimerais remercier les membres du Comité de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui pour discuter des vulnérabilités créées et exacerbées par la pandémie de COVID-19.
[Traduction]
Je suis Joel Spicer. Je suis le président-directeur général de Nutrition International, qui est une organisation mondiale de nutrition qui a son siège social ici au Canada.
Chez Nutrition International, nous travaillons avec des gouvernements en tant qu'allié expert pour les aider à élaborer des interventions de nutrition et de santé à faible coût et à incidence élevée depuis près de 30 ans.
Normalement, vous vous attendez à trouver une organisation mondiale dont le siège social est à Londres, à Genève ou à New York. Nous sommes fiers d'avoir nos racines au Canada, mais nos filiales sont mondiales. Nous touchons plus de 500 millions de personnes dans le monde entier chaque année dans plus de 60 pays. Notre partenariat avec le Canada a jusqu'à présent permis de sauver la vie de cinq millions d'enfants et d'éviter des millions de cas d'anémie, de retard de croissance et de déficience mentale permanente.
Au cours de cette partie de l'année, nous avons été témoins des effets dévastateurs de la COVID-19 dans les pays d'Afrique et de l'Asie où nous travaillons. Pour comprendre comment cette pandémie a amplifié et intensifié les vulnérabilités en raison de la malnutrition, il est important de souligner le rôle que joue la nutrition dans la santé générale et l'immunité. Pour dire les choses simplement, une bonne nutrition est le fondement du développement humain. C'est l'élément essentiel dont chacun d'entre nous a besoin pour survivre et s'épanouir. Sans lui, le cerveau ne peut pas se développer correctement, le corps ne peut pas grandir et le système immunitaire ne peut pas fonctionner efficacement, ce qui rend les gens vulnérables aux infections et aux maladies. Il s'agit d'accéder aux bons nutriments au bon moment pour éviter des dommages irréversibles et permanents.
Dans cette optique, examinons les répercussions de la pandémie.
Des millions de femmes, d'adolescentes, d'enfants et de nouveau-nés n'ont pas pu accéder aux soins préventifs et aux vitamines et minéraux vitaux dont ils ont besoin. Même les estimations les plus modestes prévoient que d'ici 2022, nous verrons 2,1 millions de cas supplémentaires d'anémie maternelle, 170 000 décès d'enfants supplémentaires et plus de 30 milliards de dollars de pertes de productivité supplémentaire en raison de la hausse de la malnutrition liée à la COVID. Il est clair pour nous que les effets d'entraînement de la COVID-19 dans la création d'une crise de la malnutrition vont être un obstacle majeur dans la reprise mondiale à la suite de la pandémie.
Comme nous le savons, ce sont les femmes, les filles et les enfants qui sont les plus touchés. La malnutrition sous forme d'anémie est l'une des manifestations les plus dévastatrices des perturbations associées à la COVID-19. Plus d'un milliard de femmes et de filles souffraient d'anémie avant la pandémie, mais ces taux augmentent maintenant en raison de la COVID-19. L'anémie augmente le risque de décès chez la femme pendant la grossesse et l'accouchement. Elle ralentit la croissance des nourrissons et nuit à leur développement cognitif, tout en affaiblissant leur système immunitaire, ce qui les rend plus sensibles aux infections et aux maladies. Si ce n'était pas assez, cela compromet leur capacité d'apprendre à l'école et d'y réussir.
Je vais vous en donner un exemple au niveau national, et c'est un bon exemple qui recoupe le témoignage de la Dre Kanem. L'anémie menace la survie et la santé des femmes et des filles dans nos programmes nationaux en Tanzanie. Dans un pays où les grossesses d'adolescentes sont en hausse, et à plus forte raison depuis la COVID-19, une adolescente sur quatre âgée de 15 à 19 ans tombe enceinte, parfois plus d'une fois. Cinquante pour cent de ces filles, y compris ces jeunes mères, souffrent d'anémie. Si l'on combine ces facteurs — augmentation des taux de grossesse précoce et augmentation de l'anémie —, cela les expose, elles et leur bébé, à un risque incroyable. Le taux de mortalité maternelle est 70 fois plus élevé qu'au Canada et ne cesse d'augmenter. L'anémie est responsable de plus d'un décès évitable sur cinq, même si elle peut être évitée à faible coût.
La vie et le potentiel d'une génération de femmes tanzaniennes, et de la prochaine génération aussi, sont minés par l'anémie. La bonne nouvelle, c'est que nous savons ce qu'il faut faire pour la combattre et comment le faire à grande échelle. C'est une des interventions en matière de développement les plus rentables qui soient. Elle donne des résultats. Jusqu'à présent, il manquait à la lutte contre l'anémie un champion mondial ayant l'expérience et la crédibilité nécessaires pour rallier le monde. Le Canada est bien placé pour être ce champion.
En étudiant les vulnérabilités créées et amplifiées par la COVID-19, nous savons que les besoins mondiaux sont énormes et que les ressources mondiales sont limitées. Le Canada ne peut pas être le chef de file partout, mais nous pouvons faire une réelle différence si nous augmentons nos investissements dans un ensemble de domaines stratégiques à incidence élevée qui s'appuient sur le leadership, la crédibilité et l'expertise existants. La nutrition est l'un de ces domaines et elle est essentielle pour une reprise mondiale à la suite de la COVID.
L'année 2021 est une année essentielle pour la nutrition. Au Japon, le Sommet sur la nutrition pour la croissance, qui se tiendra en décembre, en sera le point culminant. Nous sommes un donateur de longue date, avec une expérience solide pour rallier le monde autour de cette question et mobiliser cette énergie pour résoudre un problème mondial majeur. Le fait d'être le catalyseur d'une initiative mondiale de lutte contre l'anémie fera augmenter les investissements plus importants du Canada pour renforcer les systèmes immunitaires dans le monde entier tout en garantissant que les plus vulnérables de cette génération et de la suivante aient la possibilité de survivre et de s'épanouir. Tous les Canadiens pourront en être fiers dans le cadre de la réponse de notre pays à la COVID-19.
Merci.
Merci beaucoup, monsieur Spicer, de votre déclaration liminaire.
Chers collègues, étant donné que nous devons absolument terminer à 17 h 30, nous avons le temps pour une seule série de questions, mais je peux octroyer un peu plus de temps à chaque intervenant. Nous pouvons probablement accorder jusqu'à environ sept minutes par intervenant. N'hésitez pas à partager votre temps de parole avec vos collègues comme bon vous semble.
La première série de questions s'adresse à M. Chong, pour une durée maximale de sept minutes, s'il vous plaît.
Merci, monsieur le président, et merci, docteure Kanem et monsieur Spicer, de vos déclarations liminaires.
Monsieur Spicer, pourriez-vous nous parler du problème de l'anémie et, plus précisément, des mesures qui pourraient être prises pour y remédier?
En bref, je dirai que des mesures comme la fortification des denrées de base et des aliments peu coûteux comme les suppléments de micronutriments multiples qui sont donnés avant la livraison peuvent aider à réduire l'anémie. Il est important de noter qu'il existe de grandes vulnérabilités avant la naissance et avant de tomber enceinte, alors si vous pouvez réduire ces vulnérabilités, vous réduisez également le bassin de risques.
Lorsque le volume sanguin chez une femme enceinte double durant la grossesse et qu'elle est déjà anémique, cela lui fait courir un risque extrême d'hémorragie pendant la grossesse. Le visage de cette pandémie et de cette crise de malnutrition est une adolescente qui se vide de son sang dans la salle d'opération parce qu'elle n'a pas bénéficié d'interventions peu coûteuses à forte incidence comme celle-là.
Dans un mémoire que vous avez présenté, vous avez également mentionné que l'accès à la supplémentation en vitamine A est un défi. Vous estimez qu'en raison de la pandémie, jusqu'à 100 millions d'enfants de moins de cinq ans manqueront leurs deux premiers cycles annuels de supplémentation en vitamine A à cause des confinements et de la réaffectation des ressources, et 60 millions d'enfants risquent de manquer leur deuxième supplémentation.
Pourriez-vous nous parler un peu de ce qui se passe là-bas et de ce qui pourrait être fait pour parer au contrecoup de la pandémie?
Le problème est très grave, car il ne s'agit pas seulement d'un manque de couverture de la vitamine A.
J'aimerais rappeler rapidement au Comité qu'il a été démontré que la vitamine A réduit la mortalité infantile jusqu'à 24 % si l'on peut administrer deux capsules à un enfant en l'espace d'un an. Elle réduit les décès dus à la pneumonie, en particulier la rougeole et la diarrhée.
Le Canada est un chef de file dans ce domaine. L'offre mondiale est produite en Ontario. Elle coûte deux cents par capsule, et elle doit être le meilleur exemple de rendement sur l'investissement.
Comme vous l'avez dit à juste titre, 100 millions d'enfants n'ont pas reçu leur dose et on prévoit que d'autres ne la recevront pas non plus.
Notre modus operandi à Nutrition International est de travailler aux côtés des gouvernements et de renforcer leurs capacités, mais dans ces cas-là, les gouvernements sont débordés. Il est essentiel de travailler avec des partenaires comme UNICEF pour multiplier les journées de la santé de l'enfant et de renforcer les systèmes gouvernementaux afin qu'ils puissent être à la hauteur la prochaine fois.
Ce qui nous inquiète, c'est que si vous interrompez en même temps les vaccins réguliers comme celui contre la rougeole, vous laissez la population extrêmement vulnérable mourir de maladies que nous pensions être chose du passé pour la plupart. Nous assistons à une résurgence de ce type de décès.
La vitamine A réduit la prévalence de la rougeole de 50 %, par exemple.
J'ai une question avant de m'adresser à la Dre Kanem.
S'il est si peu coûteux de fournir le supplément, quel est l'obstacle qui empêche de s'attaquer réellement à ce problème? Ce n'est clairement pas l'argent.
Dans certains cas, je pense qu’il est juste que les pays puissent faire leur part et financer davantage leur propre approvisionnement, mais il ne s’agit pas seulement du produit. Encore une fois, le Canada qui fournit le produit garantit l’approvisionnement, mais il s’agit du système de santé sous-jacent et de la manière dont nous veillons à ce que ces systèmes de santé le fournissent également.
Il s’agit en partie d’aider les gouvernements à réaliser et à planifier les activités, et à en établir le budget, mais nous voulons arriver à un monde où la plupart des gens obtiennent ce dont ils ont besoin de leur nourriture. Malheureusement, dans de nombreux pays, cela va prendre beaucoup de temps.
Nous sommes très heureux que ce ne soit que récemment que le Canada ait pris l’initiative de financer une campagne de rattrapage d’urgence pour la vitamine A.
Merci.
Docteure Kanem, dans l’introduction à votre rapport de 2020 concernant les pratiques qui nuisent aux femmes et aux filles et qui minent l’égalité, vous dites:
Il est clair que les engagements et les résolutions n’ont pas suffi à mettre fin une fois pour toutes aux pratiques préjudiciables. Ce dont nous avons besoin maintenant, c’est d’un véritable changement et des résultats concrets.
Au-delà des engagements et des résolutions, quelles sont les actions nécessaires pour mettre fin à des pratiques préjudiciables telles que les mutilations génitales et le mariage des enfants? Plus précisément, quels types de programmes, d’initiatives diplomatiques et de mécanismes de financement seraient susceptibles d’être plus efficaces que d’autres?
Merci beaucoup de cette question. Le concept de la dignité humaine fondamentale repose sur le fait que chaque femme et fille mérite cette dignité, quel que soit l’endroit où elle habite.
C’est un honneur pour moi de faire ce témoignage en présence de la Dre Hedy Fry, qui a défendu l’idée que la mentalité selon laquelle les droits des femmes sont quelque chose de « bien à avoir » n’est pas la bonne. Il s’agit en fait d’une égalité pour la moitié des habitants de la planète. C’est le type de dialogue que le FNUAP — avec ONU Femmes et UNICEF — promeut actuellement en ce qui concerne la violence inhérente que représentent non seulement les mutilations génitales féminines, mais aussi le mariage des enfants. Les deux sont trop répandus.
Avec la situation de COVID et les soi-disant confinements, avec les filles qui ne vont pas à l’école, avec toute la perturbation du système de santé à laquelle M. Joel Spicer a fait allusion, le cauchemar logistique d’un enfant, d’une fille, le fait d’être à la maison et d’être exposé à un environnement abusif potentiel, comme dans la vignette que j’ai donnée, le fait de se faire donner en mariage... Nous faisions des progrès en matière de mariage d’enfants et d’abandon des mutilations génitales féminines avant l’année dernière.
Là encore, on doit rendre à César ce qui revient à César. Le Canada, en tant que principal soutien du FNUAP, a contribué à notre capacité de dialoguer avec les parents, y compris les pères qui, pour la première fois, ont appris ce qui se passe réellement lors de cette cérémonie d’initiation et pourquoi de nombreuses femmes peuvent être affectées, même pendant la grossesse, lorsqu’on endommage la filière génitale. Nous essayons d’être très pratiques.
Plus fondamentalement, nous encourageons l’idée que le corps de la jeune fille est le sien. Elle a le droit de dire non. Elle doit être entraînée à ne pas accepter ce qu’on lui demande, mais à penser par elle-même et à aspirer à être traitée de la même manière devant la loi et au sein de la famille.
Merci beaucoup.
Monsieur Chong, j’ai bien peur que votre temps soit écoulé. Merci de cet échange.
Nous allons maintenant passer à Mme Sahota pour sept minutes, s’il vous plaît.
Monsieur le président, premièrement, puis-je seulement remercier la Dre Kanem de ses bons mots? Merci.
Oui, c'était très gentil.
J'aimerais remercier nos deux témoins de s'être joints à nous. Vos témoignages sont incroyables, tout comme votre expérience et vos connaissances dans ce domaine. Nous sommes admiratifs devant le travail que vous faites.
Docteure Kanem, j'aimerais vous interroger sur les ouvrages très intéressants que vous avez écrits. Je pense que beaucoup de Canadiens peuvent comprendre pourquoi les mutilations génitales féminines, les mariages d'enfants et la maltraitance des femmes sont condamnables. Malheureusement, ce sont des problèmes qui existent même au Canada. Ces problèmes prennent de l'ampleur dans le monde entier, ce qui est très préoccupant pour le Canada. Bien sûr, l'engagement que le Canada a annoncé en matière de santé et de droits sexuels et reproductifs est parfois un peu plus controversé, même si le gouvernement est un partisan convaincu de la nécessité de veiller à ce que nous respections ces droits.
Tout d'abord, pouvez-vous m'expliquer la terminologie? Ensuite, vous pourriez me dire pourquoi c'est si essentiel... ou ce que vous en pensez, en fait. Je ne veux même pas vous orienter dans votre réponse à cette question. Pouvez-vous me parler des incidences du financement dans ce domaine et me dire en quoi il est nécessaire?
Merci beaucoup.
En bref, je pense que c'est en partie la raison pour laquelle, à mon avis, le Canada se distingue par la façon dont vous abordez votre politique étrangère, et il y a l'effet de solidarité dans le monde, qui ne peut être minimisé. Le FNUAP est en première ligne lorsque les femmes et les filles ont besoin d'attention dans des endroits comme le Soudan du Sud, en ce moment même dans le Tigré, en Éthiopie, et partout dans le monde où nous sommes appelés non seulement à être témoins de certaines situations très tristes, mais aussi à agir et à faire des choses.
Ce que vous voulez savoir essentiellement, c'est ce qui peut être fait. De notre point de vue, lorsque vous demandez aux femmes ce qu'elles voudraient, c'est la terminologie de la santé sexuelle et reproductive qui sert à résumer le principe du respect du corps de la femme et du respect du pouvoir qu'elle devrait avoir pour ce qui est de prendre des décisions. C'est triste de constater que parmi les femmes que nous avons interrogées l'année dernière, moins de 60 % — 57 % en fait — ont déclaré avoir le pouvoir de prendre des décisions, comme celle d'aller à la clinique aujourd'hui, celle de quitter la maison aujourd'hui, ou celle de décider des relations sexuelles qu'elle aura avec le membre masculin de la famille.
En fin de compte, qu'elles soient mariées ou non, je pense que les femmes sont dans une situation précaire. En parlant de sexualité, le FNUAP aborde parfois des questions taboues. Nous savons pertinemment qu'une éducation sexuelle complète, telle que celle qui est préconisée au Canada, a un effet protecteur. Elle change les choses.
La dernière remarque que je ferai, compte tenu du temps qui est limité, est que le Canada fait également preuve d'une grande souplesse en ce qui concerne la manière dont le FNUAP peut programmer son financement dans un contexte humanitaire, mais aussi en temps de paix. Pendant la pandémie de COVID, nous avons pu prendre de l'avance parce que le financement de base était disponible. J'ai pu prendre des décisions de redéploiement à un moment où la logistique, le passage des frontières et tous les obstacles ont été levés pour le transport de l'EPI, la livraison de l'équipement de protection individuelle. Cette reprogrammation des fonds nous a vraiment permis de nous remettre sur pied, de nous adapter aux nouvelles circonstances et d'être à la hauteur des événements.
Je voudrais également souligner que nous avons essayé d'interpréter pour le contribuable canadien la valeur de ce que fait un dollar canadien lorsqu'il est possible d'en faire plus. Cela recoupe également les propos de Joel Spicer, qui disait qu'il n'est pas question que de marchandises. Comment allons-nous acheminer cela vers la région rurale où vit une personne handicapée ou une femme qui ne sait pas nécessairement qu'elle a des droits et qu'elle peut se prévaloir de quelque chose comme la contraception?
Au bout du compte, votre poids politique ainsi que votre poids financier changent tout.
Comment le FNUAP fait-il pour s'attaquer à ce tabou en particulier? Comment pénétrer dans ces communautés où vous dites qu'un pourcentage si élevé de femmes et de filles ne savent même pas qu'elles ont ces droits? Comment les atteignez-vous? Comment communiquez-vous avec elles? Comment faites-vous disparaître ce tabou dans les communautés en général ou dans les pays?
C'est une excellente question.
C'est une approche à deux volets. Comme vous le savez, le FNUAP, l'ONU, travaille par l'intermédiaire des gouvernements.
Une partie de ma tâche à titre de directrice du FNUAP consiste à travailler avec les fonctionnaires responsables. Les ministres de la Santé, mais aussi les ministres des Finances et les ministres de l'Éducation comprennent que le tabou et la stigmatisation sont les moteurs de phénomènes comme le VIH, dont la prévalence la plus élevée de nouvelles infections concerne les adolescentes africaines.
En fait, les statistiques et les preuves sont là, mais elles doivent être interprétées pays par pays. Nous avons l'avantage d'avoir une présence locale dans plus de 150 endroits dans le monde; nous y étions déjà, nous y sommes pour la COVID, et nous y serons encore après.
Le deuxième élément, tout aussi important, est d'interpréter les statistiques et l'épidémiologie du point de vue de l'utilisateur final. Pour moi, c'est cette fille de 12 ans que j'ai décrite. Elle est peut-être très intelligente, mais elle ne sait pas, et l'ignorance ne devrait pas la tuer. Dans un endroit comme le Niger, nous avons des écoles des maris pour les maris qui doivent être formés par des sages-femmes. Les hommes viennent en grand nombre. Ils s'assoient sous l'arbre, ou peu importe où, et la sage-femme leur explique ce qui se passe pendant l'accouchement. Si la femme a des enfants chaque année, son corps peut s'épuiser et le mari peut faire quelque chose pour y remédier. Voici un préservatif, et voici les autres possibilités de planification des naissances.
Nous travaillons également en étroite collaboration avec les ONG. Il se trouve que Nutrition International est l'une des organisations avec lesquelles nos activités se chevauchent. Vous avez entendu M. Spicer dire que l'anémie peut être l'une des causes de décès pendant l'accouchement. C'est évitable. Faisons quelque chose pour qu'on donne aux femmes des explications sur ce qu'elles doivent manger, ce qu'elles doivent faire si elles sont essoufflées, et qui appeler.
La dernière chose que j'ai à dire — et là encore, il s'agit de l'aide du Canada —, c'est que je suis très sincèrement honorée de faire ce témoignage aujourd'hui.
La violence fondée sur le sexe est un tabou et elle est très répandue. C'est un crime qui touche une femme ou une fille sur trois au cours de leur vie. Ce sont elles qui subissent la honte et la stigmatisation, et c'est tellement injuste. Ce que nous essayons de faire, en particulier cette année, c'est de dénoncer la violence sexuelle et fondée sur le sexe, la terrible situation que représente l'exploitation sexuelle, qui est parfois le fait de travailleurs humanitaires. Nous sommes déterminés à mettre un terme à cette situation et à appliquer la tolérance zéro en tant qu'ONU unie, sous la direction de notre secrétaire général, qui a appelé à la paix dans les foyers.
C'est un appel auquel le Canada a répondu. Cette trêve doit également avoir lieu chez nous, et nous devons nous engager dans la protection des droits des femmes et des filles.
Merci beaucoup.
Docteure Kanem, je vous remercie. Je dois vous arrêter là.
Merci, madame Sahota.
[Français]
Monsieur Bergeron, vous avez la parole pour les sept prochaines minutes, peut-être un peu plus.
Merci, monsieur le président.
Je veux remercier nos témoins de leur contribution des plus appréciées et éclairantes pour les travaux de ce comité.
À première vue, lorsque j'ai regardé les thèmes qu'allait aborder notre comité aujourd'hui, soit la santé sexuelle d'un côté et la nutrition de l'autre, on pouvait penser qu'il s'agissait de deux mondes complètement différents. Or vos interventions nous auront permis de comprendre que ces deux mondes sont très intimement liés l'un à l'autre, et qu'il y avait une grande pertinence de vous recevoir tous les deux, ensemble, à cette séance du Comité.
Docteure Kanem, je tiens à vous remercier de votre témoignage des plus éclairants. D'aucuns parmi nous auront pu comprendre que les droits entourant la santé sexuelle ne se limitent pas à l'avortement, que, conséquemment, il y a tout un éventail de droits qui se rattachent à la santé sexuelle, et qu'il est effectivement important d'appeler un chat un chat et de dire les choses telles qu'elles sont et telles qu'elles doivent l'être. Je vous remercie infiniment.
Vous parlez de la contribution du Canada, dont vous semblez être très reconnaissante. Ma question est fort simple. Votre organisation n'est pas financée à même le fonds général des Nations unies, mais par des contributions particulières des États. Avez-vous vu ou ressenti une baisse de la contribution d'un certain nombre d'États dans le contexte de la COVID-19?
[Traduction]
J'aimerais répondre.
Je vous remercie beaucoup de cette question et aussi d'avoir fait comprendre que lorsque nous parlons de santé et de droits sexuels et reproductifs, cela dépasse largement le cadre d'un seul enjeu.
Nous sommes reconnaissants au Canada pour son soutien indéfectible. Ce soutien a également tendance à arriver suffisamment tôt dans l'année pour que nous puissions améliorer la situation et planifier correctement. Lorsque la COVID a frappé, j'ai absolument chargé mon équipe de ne pas laisser la COVID devenir un prétexte pour ne pas progresser vers les objectifs de 2030. Je suis fière de dire que l'année dernière — et ce n'était pas facile —, nous n'avons pas remarqué de baisse, même si, comme vous le savez, nous avons perdu le financement des États-Unis au cours des quatre dernières années. Cependant, nous savons que les effets de la COVID sur les économies seront bien différents en 2021.
J'ai beaucoup d'anxiété et de nuits blanches, sachant que les gestes de solidarité internationale peuvent parfois entrer en concurrence avec ce qui se passe dans le pays. Je crois aussi que les effets dévastateurs de la crise économique mondiale ont une dimension sexospécifique, car les femmes s'occupent des personnes âgées et des enfants, et qu'elles représentent 70 % du personnel de la santé. Tout cela m'inquiète beaucoup.
Je m'empresse d'ajouter que, dans le contexte humanitaire, les besoins ont augmenté. Notre appel à 800 millions de dollars américains pour aider pendant la crise humanitaire causée par la COVID... Je dois dire que c'est une situation désespérée, et je ne pense pas que cette demande sera satisfaite.
[Français]
Je vous remercie de votre réponse. Elle est rassurante dans la mesure où l'on constate que, malgré la crise, le financement général de l'organisation n'a pas été affecté outre mesure. Cependant, j'entends votre appel quant au fait que les besoins seront plus importants encore et que la communauté internationale devra se montrer plus généreuse.
Vous-même et M. Spicer avez insisté sur les répercussions de la COVID-19 sur les problèmes entourant la santé sexuelle et la nutrition, problèmes qui sont souvent interreliés. Docteure Kanem, vous avez expliqué que c'était en grande partie dû au fait que les enfants, par exemple, étaient confinés à la maison plutôt que d'aller à l'école, qu'ils avaient moins accès au système de santé, et ainsi de suite.
J'aimerais que vous m'expliquiez ceci, ne serait-ce que pour permettre aux gens qui nous écoutent de comprendre la situation: une fois confinée à la maison, que se passe-t-il qui ne se passerait pas si la jeune fille allait à l'école, par exemple? C'est le même milieu familial, ce sont les mêmes membres de la famille. Qu'est-ce qui change dans la dynamique pour qu'on assiste à une hausse de la malnutrition, des mariages forcés et des mutilations génitales? Qu'est-ce qui se passe?
[Traduction]
En bref, l'école produit un effet protecteur à plusieurs égards. Bien sûr, elle offre une éducation, et c'est là que les filles auront, à long terme, la chance de se sortir de la pauvreté.
Cependant, dans un pays comme le Kenya, que nous avons étudié, si la fille reste à la maison plutôt que d'aller à l'école tous les jours, cela signifie tout d'abord qu'elle est susceptible d'être contrainte, par exemple, à subir la mutilation génitale féminine, rituel qui se produit normalement à un moment précis de l'année. Lorsque la jeune fille est à la maison, divers enjeux sociaux l'exposent au risque d'être emmenée ailleurs pour subir une intervention traditionnelle. Le président du pays, le président Kenyatta, a déclaré vouloir mettre un terme à la mutilation génitale féminine, mais en raison de l'accessibilité en zone rurale, le message ne passe pas.
Il en va de même pour le mariage d'enfants. Si la fille est à la maison plutôt qu'à l'école, il n'y a plus de surveillance comme c'est normalement le cas, plus d'interaction sociale, et personne à qui signaler les cas.
Enfin, à cause des perturbations du système de santé, l'enfant n'a pas les points de contact auxquels on s'attendrait normalement.
Merci beaucoup.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur Bergeron.
[Traduction]
Pour le dernier tour de cet après-midi, la parole est à Mme McPherson. Vous disposez de sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci à nos deux témoins d'être avec nous aujourd'hui. C'est fascinant.
Je suis ravie de voir vos épinglettes ODD — pour Objectifs de développement durable. Je dois vous montrer que je prends toutes mes notes pour ce comité dans mon carnet ODD5, car je dois garder à l'esprit comme il est important que nous nous battions sans cesse pour les femmes et les filles.
Docteure Kanem, je m'inquiète profondément comme vous du fait que la communauté internationale ne reconnaisse pas l'importance vitale de cet investissement.
En ce qui me concerne, les répercussions de la COVID-19 sur les femmes et les filles dans le monde sont ma préoccupation immédiate, bien sûr, mais aussi la longue queue de la COVID-19 et les années, voire les décennies, qu'il nous faudra peut-être pour nous en remettre. Nous pourrions réussir à convaincre les gouvernements de faire ce qui doit être fait à court terme, mais je m'inquiète vraiment de l'austérité et de la nationalisation à long terme.
Je veux que ce soit très clair et que nos analystes tiennent compte de la réponse à la question suivante. Que risquons-nous de perdre si la communauté mondiale ne reconnaît pas à quel point cet investissement est vital en ce moment?
Je serai brève, quitte à en dire plus après la réunion. Le Canada, par exemple, est un des principaux donateurs de produits du FNUAP. Nous sommes le plus grand fournisseur de moyens de contraception — de contraception volontaire — que les femmes veulent utiliser pour être en mesure de planifier leur vie. Cela a aussi permis d'éviter des grossesses non désirées, soit près de quatre millions en un an grâce au financement canadien, par exemple.
J'ai également mentionné les filles marginalisées — le soutien que nous offrons pour que les filles marginalisées puissent bénéficier de programmes de compétences de vie. Leur nombre approche les 400 000 par an. Cela ne serait pas possible autrement.
La chose la plus importante que je puisse dire, cependant, c'est que dans un monde où sévit la COVID, nous avons vu à quel point nous sommes tous interconnectés. Nous avons également vu à quel point la discrimination, le racisme et les tabous peuvent être dévastateurs pour les femmes, quand il s'agit des décisions concernant leur propre corps. Dans l'optique de Beijing+25, le FNUAP joue un rôle de co-responsable de la question de l'autonomie corporelle en matière de santé et de droits sexuels et reproductifs, une fois de plus pour montrer clairement que, lorsqu'elles grandissent, les filles doivent intégrer le principe de leur égalité dans tous les sens de l'ODD5, et il faut que cela soit réel.
Très rapidement — et nous passerons ensuite à M. Spicer —, comment faire en sorte que les femmes et les jeunes filles participent à ce processus décisionnel?
L'un des principaux éléments de l'ODD5 est que les femmes et les filles doivent faire partie du processus décisionnel. Elles doivent participer à l'élaboration des programmes qui les concernent. Comment pouvons-nous nous assurer de cela?
Ici, à l'ONU, ainsi que dans la société civile, l'idée est que les femmes peuvent diriger à tous les niveaux, dans leur village, dans leur école, et qu'elles peuvent certainement être ministre et députée, mais l'invitation à prendre la parole est une chose que nous ne pouvons pas considérer comme acquise. J'ai fourni les résultats d'une enquête que nous avons réalisée sur la question de savoir qui décide si vous pouvez même avoir accès à la clinique. En fin de compte, je pense que nous inculquons la compréhension de la politique selon laquelle l'égalité des sexes signifie l'égalité dans tous les domaines et la dynamique du pouvoir qui consiste à dire à une agricultrice rurale: « Vous êtes une femme et vous devriez vous aussi obtenir ce bon ou cet investissement. » Nous appelons cela la formation au leadership. Dans de nombreux domaines, c'est l'infirmière et la sage-femme qui incarnent cette compréhension, mais nous voulons que les filles aspirent à être pleinement égales à tous égards.
Je vous remercie.
Monsieur Spicer, c'est à vous que je m'adresse maintenant.
Vous pourriez nous dire comment vous voyez les lacunes qui nous préoccupent — qui nous préoccupent tous profondément — et qui affectent les populations. Peut-être pourriez-vous aborder les aspects sanitaires de certains des reculs ou des échecs que nous constatons en ce qui concerne la rougeole, le paludisme, d'autres vaccins, ce que nous avons perdu pendant la pandémie de COVID et ce que nous risquons de perdre si nous ne fixons pas des objectifs audacieux et ambitieux pour les années et la décennie à venir.
Je vous remercie de votre question.
Je dirais que nous sommes face à des résultats catastrophiques. La possibilité de perdre 20 ans de progrès est très réelle dans le monde de la nutrition. Nous nous attendons à des reculs encore plus importants en matière d'égalité. Nous nous penchons sur la question des gouvernements qui réaffectent une grande partie de leurs budgets existants — qui sont soumis à une forte pression en raison de la COVID — pour réagir à la COVID, et qui renoncent aux investissements dans le secteur social.
Je crains que les perturbations économiques que nous allons voir — j'aime votre évocation de la longue queue de la COVID, parce que c'est là que nous allons sentir le dard... C'est là que certaines des répercussions seront encore plus importantes que celles que nous avons observées ailleurs.
Je pense que les gouvernements vont consacrer de plus en plus d'argent au traitement et de moins en moins à la prévention. Au fur et à mesure que nous verrons les pays sombrer dans la crise, et au fur et à mesure que la malnutrition chez les enfants s'aggravera en raison de cette crise, il faudra consacrer plus d'argent à des traitements plus coûteux au détriment des investissements dans les structures communautaires, qui sont un élément essentiel du système de santé pour la prévention de certains de ces problèmes. C'est pourquoi il est essentiel de se pencher sur la question dès maintenant.
Comme je l'ai déjà dit, et comme l'a dit la Dre Kanem, ce sont les femmes et les filles qui subissent les conséquences les plus lourdes, et nous devons comprendre que les dommages ne s'arrêtent pas là; il y a un effet domino. Lorsqu'une mère est mal nourrie, l'enfant a un faible poids à la naissance et risque davantage de souffrir d'un retard de croissance. Lorsque l'enfant qui souffre d'un retard de croissance grandit et va à l'école, ses résultats d'apprentissage seront inférieurs et les revenus qu'il gagnera plus tard dans la vie seront également bien moindres.
Nous parlons de la nécessité d'un ciblage intelligent qui peut briser le transfert de la pauvreté d'une génération à l'autre. Alors que nous parlons du plus grand transfert de richesse, des baby-boomers à la génération X, le plus grand transfert de pauvreté que nous ayons jamais vu est sur le point de se produire en ce moment même, et c'est le moment de donner à cette question toute notre attention.
J'aimerais réagir à un point soulevé précédemment sur les occasions manquées. Le monde est structuré et financé — tout comme la réponse à la COVID — de manière à causer des occasions manquées. La Dre Kanem et moi avons été appelés à comparaître ensemble, ce qui constitue peut-être un heureux hasard, mais j'espère que le Comité retiendra surtout qu'il est essentiel que le Canada et les autres donateurs adoptent une attitude axée sur la nécessité de ne pas rater les occasions qui se présentent par rapport à ce que nous faisons.
On ne peut absolument pas investir dans l'éducation sans se préoccuper de la nutrition ou de la santé sexuelle et reproductive. Le faire mènerait invariablement à des occasions manquées. Nous pouvons accomplir beaucoup de choses en adoptant une approche ciblée et intentionnelle, et nous pouvons accomplir beaucoup de choses en tant que pays si nous choisissons les créneaux dans lesquels le Canada peut être un chef de file.
Je vous remercie.
Madame McPherson, je vous remercie beaucoup de cet échange.
Chers collègues, nous voici arrivés à la fin de la période réservée à nos témoins.
Je pense que nous aurions tous souhaité passer beaucoup plus de temps avec vous pour explorer ces questions très importantes. En notre nom à tous, je vous remercie du temps que vous nous avez consacré, de votre expertise et, surtout, de votre leadership et des services que vous rendez pour rendre notre monde meilleur. Nous vous en sommes reconnaissants.
Il est toujours possible que des collègues vous demandent par écrit des points supplémentaires. Vous pouvez aussi nous envoyer par écrit les observations que vous auriez voulu faire sans en avoir eu l'occasion. Nous sommes reconnaissants d'avoir pu passer du temps avec vous cet après-midi.
Chers collègues, merci.
La séance est levée. Nous nous reverrons lors de notre prochaine réunion.
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