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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 026 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 13 avril 2021

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Chers collègues, bienvenue à la 26e séance du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.

[Français]

     Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le jeudi 29 octobre 2020, le Comité entreprend son étude de l'octroi de licences d'exportation d'armes avec une attention particulière sur les licences d'exportation vers la Turquie.

[Traduction]

    Au cours de la première heure, nous allons entendre les représentants d'Affaires mondiales Canada.
    J'invite tous les participants à mettre leur micro en sourdine lorsqu'ils n'ont pas la parole et à adresser tous leurs commentaires à la présidence.
    Lorsqu'il vous restera 30 secondes pour poser vos questions ou [Difficultés techniques], je vous ferai signe avec ce bout de papier.
    Les services d'interprétation sont accessibles à partir de l'icône du globe au bas de votre écran.

[Français]

    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins. Nous recevons Bruce Christie, sous-ministre adjoint délégué...

[Traduction]

    Monsieur le président, si vous me le permettez, j'aimerais proposer une motion.
    Monsieur Harris, nous pouvons vous céder la parole dès maintenant. Prévoyez-vous un long débat? Vous avez une intervention de prévue dans quelques minutes.
    J'ai une motion qui porte sur les affaires du Comité. Elle n'est pas expressément liée aux témoignages d'aujourd'hui. C'est une motion qui s'inscrit dans la foulée d'une autre liée à la publication de documents.
    J'aimerais proposer que...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Je me demande de quelle façon M. Harris peut obtenir la parole quand cela n'est pas à l'ordre du jour. Il ne s'agit pas d'une séance de travail.
    J'aimerais obtenir l'avis du président ainsi que celui de la greffière. Je sais que M. Harris peut proposer une motion quand il a la parole. Il y a eu un incident il y a quelques mois à peine au sein du Comité, quand le président a donné la parole à quelqu'un sans respecter l'ordre des intervenants. Je souhaite seulement confirmer que tout ceci est admissible.
    Merci beaucoup pour votre rappel au Règlement, monsieur Oliphant.
    Y a-t-il débat sur ce rappel au Règlement?
    J'ai essayé d'inciter M. Harris à attendre son tour, qui viendra sous peu. Il a précisé que sa motion ne portait pas directement sur les exposés des témoins. Je suis légèrement préoccupé par cela, car cette intervention ne figure pas à l'ordre du jour.
    Monsieur Harris, pourquoi ne vous céderions-nous pas la parole quand votre tour viendra? Si vous pouviez rendre la motion aussi pertinente que possible par rapport aux témoignages et aux documents devant nous aujourd'hui, alors je vous inviterai à la proposer à ce moment-là.
    Je réponds au rappel au Règlement, si c'est de cela qu’il est question.
    La motion est liée au sujet et porte sur l'étude en cours. Dans ces circonstances, cette motion est pertinente et peut être proposée sans avis.
    Elle porte sur l'ordre de production de documents dont nous avons déjà traité, depuis la dernière motion, afin de rendre publics les documents antérieurement soumis au Comité. Je souhaite simplement réitérer cette motion pour d'autres documents reçus depuis. J'aimerais être en mesure de proposer une motion pour que le Comité rende aussi ces documents publics.
(1535)
    Monsieur Harris, j'essayais de vous inciter à utiliser le temps qui vous est alloué à cet effet. J'étais sur le point de présenter nos témoins.
    Encore une fois sur le rappel au Règlement, monsieur Fry, je vous en prie.
    Je suis d'accord avec M. Oliphant. Quand le tour de M. Harris viendra, je crois qu'il pourra alors proposer sa motion, si elle est liée aux affaires du jour. Toutefois, en ce moment, nous présentons les témoins, et nous devrions continuer en nous en tenant à l'ordre du jour.
    Merci beaucoup, monsieur Fry.
    Est-ce que quelqu'un d'autre souhaite intervenir sur ce rappel au Règlement?
    Monsieur Oliphant, allez-y.
    J'ai vraiment besoin d'éclaircissements. Je crois qu'il est inhabituel d'accepter une motion quand quelqu'un n'a pas la parole. J'ai peur que quelqu'un ait pris la parole sans autorisation, ce qui n'est pas habituel pour M. Harris. Ce n'est pas quelque chose que j'ai remarqué jusqu'ici.
    Je suis préoccupé. J'interprète peut-être mal les règles. J'aimerais comprendre. Peut-être que la greffière pourrait m'éclairer là-dessus. Je crois que c'est inhabituel.
    Monsieur Oliphant, merci beaucoup pour ce rappel au Règlement.
    J'étais encore en train d'établir si M. Harris a bel et bien la parole ou si nous devions la lui donner. J'essayais de l'inciter, une fois de plus, à utiliser le moment qui lui est réservé et qui correspond, je crois, à six minutes au cours du premier tour de questions. À ce moment, s'il souhaite proposer une motion, il est tout à fait libre de le faire.
    S'il n'y a pas d'autres interventions là-dessus, peut-être que madame la greffière pourrait tout simplement clarifier brièvement s'il s'agit bien là de la bonne façon de procéder, de sorte à répondre à la question de M. Oliphant. J'ai tendance à conclure que M. Harris n'avait pas officiellement la parole, car j'étais sur le point de présenter les témoins que nous accueillons pour la première heure de cette séance, cet après-midi.
    Merci, monsieur le président.
    Si c'est votre décision que M. Harris n'avait pas officiellement la parole, il ne pouvait pas proposer la motion à ce moment-là. Toutefois, en ce qui a trait à l'autre partie la question de M. Oliphant, soit la motion de fond, si elle est directement liée aux affaires en cours, aucune période de préavis n'est nécessaire, ce qui veut dire que M. Harris pourrait la proposer pendant son intervention de six minutes.
    Merci beaucoup, madame la greffière, et monsieur Oliphant. Voilà qui nous éclaire.
    J'essaie d'être le plus consensuel possible. J'invite donc le Comité à voir la situation comme suit: la façon adéquate de procéder est que M. Harris prenne la parole quand son tour sera venu. Je suis prêt à en faire une décision de la présidence si c'est nécessaire. Une fois de plus, j'incite M. Harris à formuler sa motion de sorte qu'elle soit étroitement liée au sujet, et il affirme qu'elle l'est. Ensuite, si tel est le cas, il est tout à fait apte à prendre la parole dans quelques minutes.
    Si cela convient au Comité, nous allons maintenant passer à la présentation des témoins.
    Merci, chers collègues.

[Français]

     J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre premier groupe de témoins d'Affaires mondiales Canada.
    Il s'agit d'abord de Bruce Christie, sous-ministre adjoint délégué, Politique et négociations commerciales.
    Ensuite, il y a Sandra McCardell, sous-ministre adjointe, Europe, Arctique, Moyen-Orient et Maghreb.
    Colleen Calvert, secrétaire des Affaires ministérielles intérimaire et directrice générale, se joint également à nous.
    Finalement, nous accueillons Andrew Turner, directeur adjoint, Europe du Sud-Est et Eurasie, ainsi que Shalini Anand, directrice générale intérimaire, Réglementation commerciale et contrôles à l'exportation.
    Monsieur Christie, si j'ai bien compris, vous allez faire la présentation. Vous disposez donc de cinq minutes. Nous vous écoutons.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président, et merci aux membres du Comité pour votre invitation à comparaître aujourd'hui pour discuter du régime canadien de contrôle des exportations.
    Comme vous le savez, l'ancien ministre des Affaires étrangères et les directeurs généraux du Bureau de Réglementation commerciale et contrôles à l’exportation, de même que de la Direction générale des affaires européennes, à Affaires mondiales ont comparu devant le Comité pour traiter de la question de la suspension de certaines licences d'exportation vers la Turquie en octobre dernier. Comme l'a déclaré le ministre Champagne lors de sa comparution devant le Comité en novembre dernier, le gouvernement prendra les mesures appropriées s'il dispose d'éléments de preuve crédibles selon lesquels les marchandises et la technologie exportées par le Canada ont été utilisées de façon abusive.
    À la suite d'allégations voulant que des exportations canadiennes contrôlées aient été déployées dans le conflit récent du Haut-Karabakh, un examen de ces allégations a été mené par Affaires mondiales Canada en collaboration avec le ministère de la Défense nationale. L'examen a permis de conclure que de la technologie canadienne a été [Difficultés techniques] au Haut-Karabakh et dans d'autres conflits régionaux, puis que le présumé transfert de technologie canadienne à une tierce partie pourrait ne pas avoir été conforme aux assurances d'utilisation finale fournies par le gouvernement turc. Ainsi, le ministre des Affaires étrangères a décidé hier d'annuler les licences suspendues et a demandé aux fonctionnaires de son ministère d'entamer un dialogue avec la Turquie afin d'établir une confiance mutuelle et une plus grande coopération en matière de licences d'exportation afin de veiller au respect des assurances d'utilisation finale avant que toute autre licence pour des marchandises et des technologies militaires soit délivrée.
    La politique du Canada sur le contrôle des exportations applicable à la Turquie demeure en vigueur. Comme l'a précisé le ministre Garneau dans sa déclaration hier, la Turquie est un allié important au sein de l'OTAN, et les demandes de licences d’exportation à destination de la Turquie dans le cadre de programmes de coopération de l'OTAN seront examinées au cas par cas.
    Même si l'équipe et moi-même serons heureux de répondre à toute question sur l'examen des licences d'exportation vers la Turquie après mon exposé, je vais axer mes brèves remarques aujourd'hui sur la description du processus d'évaluation des demandes de licence d'exportation, puisque, de ce que je comprends, le Comité a demandé des précisions à cet effet.
    Le Canada dispose d'un des régimes de contrôle des exportations les plus rigoureux au monde et, au cours des dernières années, nous avons pris des mesures pour accroître la rigueur et la transparence de ce régime déjà très efficace. L'accession du Canada au Traité sur le commerce des armes des Nations unies, ou TCA, en septembre 2019, est la première de ces mesures prises par le Canada. En outre, avant d'adhérer au TCA, le Canada a apporté des modifications à la Loi sur les licences d'exportation et d'importation afin d'assurer sa pleine conformité au TCA.
    La modification la plus importante portait sur l'intégration de l'obligation d'évaluer toutes les demandes de licence pour des marchandises militaires par rapport aux critères établis dans le TCA. Selon ces critères, les fonctionnaires doivent établir le risque que les exportations puissent servir à commettre ou à faciliter une violation grave du droit international, du droit humanitaire ou des droits de la personne ou encore à commettre des actes de terrorisme ou des infractions au regard des conventions et protocoles internationaux relatifs au crime organisé transnational, voire des actes de violence fondés sur le sexe.
    Au titre de la Loi, le ministre des Affaires étrangères est tenu de refuser une licence d'exportation pour des marchandises militaires s'il détermine, après avoir pris en compte les mesures d'atténuation disponibles, qu'il existe un risque sérieux que l'exportation proposée entraîne toute conséquence négative citée dans les critères du TAC.
    Les Canadiens s'attendent, à juste titre d'ailleurs, à ce que nos exportations militaires et stratégiques ne servent pas à la violation des droits de la personne à l'étranger. Cela dit, nous devons également être conscients de l'importance de l'industrie de la défense au sein de l'économie canadienne, surtout en ces temps de grandes difficultés économiques. En fait, nos exportations de marchandises militaires à l'extérieur des États-Unis représentaient à elles seules près de 3,7 milliards de dollars en 2019. Nos mesures de contrôle des exportations ne visent pas à nuire de manière indue au commerce international, mais plutôt à veiller à ce que les marchandises contrôlées soient exportées de façon conforme à nos valeurs et intérêts.
    J'aimerais très brièvement discuter du processus grâce auquel le ministère évalue quelque 6 000 demandes de licence d'exportation [Difficultés techniques]. Une fois la demande de licence d'exportation reçue, nos ingénieurs confirment que les marchandises sont bel et bien contrôlées à des fins d'exportation. Ensuite, les demandes de licence d'exportation pour des marchandises militaires et stratégiques sont examinées au cas par cas selon les critères du TAC et le critère de risque sérieux. Dans le cas d'exportations vers des destinations à faible risque, par exemple des alliés aux vues similaires qui participent au même régime multilatéral de contrôle des exportations que le Canada, un agent de licence évalue la demande en procédant à une analyse du pays destinataire en fonction des critères du TAC. S'il ne cerne aucune préoccupation, la licence est délivrée.
(1540)
    Dans le cas des exportations vers toutes les autres destinations, ou d'une licence pour une destination à faible risque qui soulève des préoccupations, la demande est transférée pour les fins de vastes consultations. Les partenaires consultés comprennent des spécialistes en géographie, en droits de la personne et en sécurité internationale, de même que d'autres issus de l'industrie de la défense, comme Affaires mondiales Canada, de même que nos missions à l'étranger et le ministère de la Défense nationale. Enfin, si cela est nécessaire, on consulte également d'autres ministères et organismes gouvernementaux.
    Si aucune préoccupation n'est soulevée pendant le processus de consultation, la demande est assujettie à l'approbation supplémentaire de la direction, qui doit valider la conformité aux processus d'examen. Ensuite, la demande de licence est remise au ministre des Affaires étrangères dans le cadre d'un rapport hebdomadaire afin qu'il en fasse l'examen.
    Toutefois, si des préoccupations sont soulevées par les partenaires consultés, la demande est envoyée à un comité interministériel composé de hauts fonctionnaires pour examen. Si le comité recommande la délivrance de la licence, la demande est envoyée au ministre pour examen et approbation finaux. S'il n'y a pas consensus ou si le comité de spécialistes recommande de refuser la licence, la demande est soumise au ministre, qui doit trancher.
    Comme vous le savez, le ministre des Affaires étrangères a également le pouvoir au titre de la Loi de suspendre, de modifier ou d'annuler toute licence délivrée à la lumière de tout élément de preuve que les marchandises exportées sont utilisées ou seront utilisées d'une manière qui ne correspond pas à la politique étrangère du Canada, ni à ses intérêts en matière de défense et de sécurité.
    Il est également important de souligner que l'introduction d'un cadre d'évaluation plus rigoureux a entraîné des retards dans le traitement des demandes. Ces retards ont été remarqués par l'industrie, qui a réclamé haut et fort un régime plus transparent, rapide et prévisible. Actuellement, nous étudions de quelle façon nous pourrions rationaliser notre processus d'évaluation tout en maintenant le degré de rigueur exigé au titre de la Loi et en demeurant fidèles aux attentes des Canadiens.
    Voilà qui termine mon exposé, monsieur le président. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Merci.
(1545)
    Merci beaucoup, monsieur Christie, pour votre déclaration préliminaire. Je tiens à vous remercier, votre équipe et vous, d'être des nôtres aujourd'hui.
    Entamons notre premier tour des questions. Chaque intervention durera six minutes.
    La parole est d'abord à M. Diotte.
    Bonjour. Merci d'être ici, chers amis.
    Il a été allégué que de l'équipement canadien, soit des capteurs optiques de drone TB2, a été utilisé dans le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Voilà de quoi nous parlons.
    J'aimerais connaître le rôle que jouent les drones TB2 dans le conflit. Aussi, les capteurs Wescam constituent-ils un élément essentiel du drone ou peuvent-ils être facilement remplacés par d'autres composantes?
    Monsieur le président, l'examen des licences d'exportation à destination de la Turquie mené d'octobre à décembre 2020 a établi que des véhicules aériens sans pilote turcs, c'est-à-dire des drones, ont été utilisés dans la région du Haut-Karabakh dans le cadre de ce conflit.
    Pendant l'examen des licences turques utilisées, on a trouvé des éléments de preuve crédibles indiquant que des technologies canadiennes étaient utilisées dans ce conflit. À savoir si d'autres technologies peuvent convenir et être installées sur les drones turcs, cela dépasse mes compétences techniques, mais je présume que, dans ce cas, il est possible de recourir à d'autres technologies.
    Merci.
    Quelles restrictions avons-nous imposées à la Turquie, le cas échéant, lorsque nous avons autorisé l'exportation des capteurs Wescam vers ce pays?
    Monsieur le président, dans le cadre du processus de demande de licence d'exportation, l'entreprise canadienne, travaillant dans ce cas avec le consignataire turc, devait fournir des déclarations d'utilisateur final et d'utilisation finale pour rendre compte des personnes qui recevraient la technologie en Turquie et de l'utilisation finale de cette technologie.
    Tout au long de ce processus, nous avons dialogué avec nos homologues turcs afin de confirmer que les caméras ou les capteurs canadiens exportés vers la Turquie allaient être utilisés à des fins défensives et humanitaires, mais non pour participer au conflit dans le Haut-Karabakh.
    Nous savons maintenant que des circonstances exceptionnelles peuvent être déclarées pour permettre l'exportation d'articles militaires vers la Turquie. Comment Affaires mondiales Canada détermine-t-il que des circonstances exceptionnelles existent qui justifient la délivrance d'une licence d'exportation?
(1550)
    Pour faire un rapide retour en arrière dans le temps, en octobre 2019, après l'incursion de la Turquie dans le nord-est de la Syrie, le ministre des Affaires étrangères a suspendu la délivrance de nouvelles licences à la Turquie jusqu'à ce que nous, c'est-à-dire le ministère en collaboration avec nos partenaires aux vues similiaires, puissions déterminer si les exportations de technologies canadiennes utilisées dans le nord-est de la Syrie pourraient déstabiliser davantage la région.
    À la suite de cet examen, au cours duquel aucune nouvelle licence d'exportation n'a été autorisée, le ministre des Affaires étrangères a, en avril de l'année dernière, a permis que les exportations d'articles militaires vers la Turquie reprennent, mais selon de nouveaux critères en vertu desquels toutes les demandes de licence seront examinées au cas par cas. Essentiellement, ce qui est entré en vigueur en avril 2020, c'est une politique de refus présumé. Nous avons informé les exportateurs canadiens d'articles et de technologies militaires qu'ils devaient présumer que leur demande de licence serait refusée, à moins qu'ils ne puissent prouver la présence de circonstances exceptionnelles, qui ne se limitent pas aux programmes de coopération de l'OTAN, mais qui sont surtout fondées sur ces programmes. Ce sont là les circonstances exceptionnelles qui existent.
    Juste [[Difficultés techniques] quels articles ont été approuvés pour l'exportation vers la Turquie en vertu de la cause portant sur les circonstances exceptionnelles, et en quelles quantités ont-ils été exportés? Pouvez-vous nous éclairer à ce sujet?
    Monsieur le président, depuis avril 2020, un petit nombre de licences d'exportation vers la région ont été approuvées dans ces circonstances exceptionnelles, c'est-à-dire certainement moins de 20, et la grande majorité des demandes de licence qui ont été approuvées par le ministre font partie de la catégorie des demandes de modification de licence. En d'autres termes, une licence valide doit être révisée parce que la date de la licence a expiré, que le montant d'argent lié à la licence a changé, que le nom de la société a changé, etc. Très peu de demandes de licence ont été approuvées au cours de cette période. Comme je l'ai dit, la majorité d'entre elles étaient ce que nous considérons comme des demandes de modification de licence.
    Merci.
    J'ai une très brève question à vous poser. Pouvez-vous faire le point sur les allégations selon lesquelles des équipements canadiens ont été utilisés par des acteurs approvisionnés par le gouvernement turc?
    Veuillez répondre brièvement, monsieur Christie.
    Grâce à l'examen des licences d'exportation vers la Turquie que le ministre a rendu public hier, nous avons trouvé des preuves crédibles que des technologies militaires canadiennes ont été utilisées dans la région du Haut-Karabakh.
    Merci beaucoup, monsieur Diotte.
    Le prochain intervenant est M. Fonseca, qui prendra la parole pendant six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Christie, c'est bon de vous revoir.
    Dans le cadre de votre déclaration préliminaire, vous avez mentionné que le ministre Garneau a annoncé hier l'annulation des licences d'exportation vers la Turquie qui avaient été suspendues au cours de l'automne 2020, à la suite de préoccupations liées au conflit en cours dans le Haut-Karabakh. Pouvez-vous fournir à notre comité plus de détails sur cette annonce? Veuillez expliquer les éléments qui ont orienté cette décision [Difficultés techniques] ont franchi les étapes de ce processus.
    Monsieur le président, au cours de la période de quatre mois pendant laquelle le ministère a procédé à l'examen des licences d'exportation vers la Turquie... Je dois commencer par dire que nous n'avons pas examiné uniquement les licences qui ont été suspendues par le ministre Champagne en octobre dernier. Ces licences ont été suspendues parce qu'elles étaient liées au conflit qui a débuté à l'automne dernier dans le Haut-Karabakh. Toutes les demandes de licence ont été étudiées au cours de l'examen.
    Tout d'abord, nous avons organisé des consultations avec l'ensemble des ministères du gouvernement fédéral, comme je l'ai mentionné au cours de ma déclaration préliminaire. L'examen des licences d'exportation vers la Turquie a été mené en collaboration avec le ministère de la Défense nationale, mais nous avons également collaboré avec d'autres ministères et organismes du gouvernement fédéral, par exemple le Centre de la sécurité des télécommunications, au besoin. Nous avons examiné le rapport final du groupe d'experts sur la Libye. Nous avons examiné certains des reportages diffusés par les médias pendant le conflit, y compris les séquences vidéo qui montraient qu'un des UAV ou des drones turcs avait été abattu dans la région. Nous avons également analysé ces séquences vidéo.
    Nous avons parlé aux entreprises canadiennes qui étaient responsables de l'exportation de ces technologies. Nous avons également évalué toutes ces informations en fonction des critères du Traité sur le commerce des armes que j'ai mentionnés précédemment. Nous avons également parlé à nos partenaires aux vues similaires. De plus, nous avons communiqué avec le gouvernement turc et le gouvernement arménien pour qu'ils nous aident à procéder à un examen. Malheureusement, ils n'ont pas fourni de renseignements qui nous ont aidés à orienter la décision finale du ministre. Bien entendu, nous avons aussi étudié les rapports fournis par le Project Ploughshares avant de faire une recommandation finale au ministre.
(1555)
    Je vous remercie de votre réponse. Il semble que l'examen ait été très approfondi et complet.
    Pouvez-vous maintenant expliquer l'évolution, au cours des dernières années, de la politique du Canada en ce qui concerne ces exportations contrôlées vers la Turquie? Il semble qu'une assez grande évolution ait eu lieu pour que nous nous retrouvions là où nous sommes aujourd'hui.
    Monsieur le président, oui, il y a eu une évolution depuis... Comme je l'ai mentionné précédemment, le ministre des Affaires étrangères a suspendu les licences d'exportation vers la Turquie dès octobre 2019, à la suite de l'incursion militaire de la Turquie en Syrie.
    En avril 2020, notre politique en matière de licences d'exportation vers la Turquie a encore évolué. Nous n'avons approuvé les demandes de licence d'exportation de biens militaires ou stratégiques qu'au cas par cas et uniquement si elles entraient dans les exceptions essentiellement liées aux programmes de coopération de l'OTAN.
    Comme je l'ai mentionné, en octobre dernier, le ministère des Affaires étrangères a alors suspendu les licences d'exportation vers la Turquie ayant trait au conflit qui a éclaté en septembre dernier dans la région du Haut-Karabakh. Pendant cette période, aucune licence d'exportation vers la Turquie n'a été délivrée. À la suite d'une évaluation de la situation dans le Haut-Karabakh, les licences suspendues ont été annulées hier par le ministre Garneau. Ces licences ne sont plus valides. Les entreprises ont été avisées, et les licences d'exportation ont été annulées dans notre système.
    Ma prochaine question sera quelque peu déroutante pour de nombreuses personnes.
    Comment le ministère d'Affaires mondiales peut-il être objectif, alors qu'il est chargé de promouvoir des occasions d'affaires —  de l'ordre de quelque 3 milliards de dollars, comme vous l'avez mentionné — pour les entreprises canadiennes du secteur de la défense, tout en assurant la protection des droits de la personne?
    Il est devenu de plus en plus difficile pour nous d'équilibrer les intérêts canadiens en matière d'exportation de biens et de technologies militaires, tout en continuant d'appliquer un cadre rigoureux d'évaluation des risques à l'aide des critères énoncés dans le Traité sur le commerce des armes, afin de déterminer si l'exportation potentielle d'un bien militaire ou stratégique canadien pourrait entraîner l'une des conséquences négatives du Traité sur le commerce des armes dont j'ai parlé plus tôt, c'est-à-dire le risque qu'elle entraîne une violation des droits de la personne, y compris des actes graves de violence fondée sur le sexe.
    Ce que nous faisons pour essayer de gérer ces deux composantes des intérêts que nous avons à titre de pays exportateur et pour nous assurer que nous pouvons continuer de nous occuper de ces licences d'exportation avec une approche cohérente et rigoureuse d'évaluation des risques, si vous voulez, c'est d'avoir régulièrement des conversations avec les industries par l'intermédiaire de nos divers groupes de travail sectoriels. Nous parlons aux entreprises elles-mêmes périodiquement, et nous parlons aux associations industrielles. Nous sommes en communication constante avec les entreprises afin d'obtenir toutes les informations supplémentaires dont nous avons besoin pour déterminer si une licence d'exportation doit être approuvée.
    En même temps, nous avons essayé de travailler avec les entreprises canadiennes au cours des deux dernières années afin qu'elles respectent davantage les critères du Traité sur le commerce des armes et qu'elles travaillent avec nous dans le cadre d'un partenariat plus étroit pour que nous puissions traiter les demandes de licence d'exportation d'une manière plus rapide et plus prévisible. Nous avons également...
(1600)
    Monsieur Christie, je suis désolé de vous interrompre. Nous allons devoir en rester là pour respecter le temps qui nous est imparti.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Fonseca.
     Je cède maintenant la parole à M. Bergeron pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Je vous remercie, monsieur Christie, d'être des nôtres. Je remercie tous vos collaborateurs et collaboratrices qui sont également ici de nous éclairer dans le cadre des travaux de ce comité.
    Je ne vous cacherai pas que plusieurs saluent la décision annoncée hier par le ministre des Affaires étrangères. Cela dit, force est de constater qu'il aura fallu de nombreuses pertes de vies humaines pour qu'on en vienne à cette décision. Pourtant, les signaux d'alarme ont été nombreux. Il y a un proverbe arabe selon lequel, me dit-on, lorsqu'une chose nous arrive une fois, ce n'est pas notre faute; lorsqu'elle nous arrive deux fois, il faut se poser des questions, mais quand elle se produit trois fois, c'est notre faute.
    Pour ce qui est du cas qui nous intéresse, vous avez vous-même souligné que, en octobre 2019, des questions avaient été soulevées à la suite de l'intervention de la Turquie dans le Nord de la Syrie. En décembre 2019, le Groupe d'experts sur la Libye des Nations unies a soumis un rapport au Conseil de sécurité des Nations unies. On y signalait entre autres que la Turquie avait fourni régulièrement des armes aux parties prenant part au conflit en Libye, parfois de manière flagrante, sans se donner la peine d'en dissimuler la provenance.
    Est alors survenu le conflit au Haut-Karabakh. Entre-temps, le Canada avait autorisé l'exportation d'un certain nombre d'équipements dont certains, on le sait, ont servi à la fabrication de drones. Ceux-ci ont été employés, non seulement en Libye, mais également dans le conflit au Haut-Karabakh et, possiblement, dans le Nord de la Syrie. Après au moins deux signaux d'alarme, on a autorisé, d'une façon que je qualifierais d'un peu permissive, l'exportation de ces équipements vers la Turquie.
    N'est-ce pas cher payer?

[Traduction]

    Permettez-moi de commencer par aborder la question de la situation en Syrie. Comme vous le dites, en octobre 2019, nous avons suspendu les demandes de licence après l'incursion militaire de la Turquie dans le sud-est de la Syrie. À la suite de notre examen de la situation, nous avons déterminé, de concert avec nos partenaires et nos alliés, que l'incursion turque en Syrie n'avait pas déstabilisé la région. En fait, ils y sont allés dans le but de protéger les intérêts turcs et non de perpétrer des violations des droits de la personne.
    Toutefois, lorsque nous avons évalué les demandes de licence et déterminé si elles avaient contribué au problème, nous n'avons pas cherché à savoir si les violations des droits de la personne avaient subi des répercussions dans la région. Nous avons cherché à savoir si la technologie canadienne avait contribué à des violations des droits de la personne ou à des violations du droit international humanitaire. Selon la Loi sur les licences d'exportation et d'importation et selon les critères du Traité sur le commerce des armes qui sont maintenant inscrits dans la loi, nous n'avons pas, sur le plan juridique, le droit d'examiner les violations des droits de la personne en général. Nous déterminons si les violations des droits de la personne ont été causées par l'exportation canadienne de technologies militaires.
    Tout d'abord, dans le cas de la Libye, étant donné que la Turquie est un partenaire de l'OTAN, nous savions qu'elle faisait face à de très graves problèmes de défense et de sécurité dans toute la région, y compris en Libye et en Syrie. À l'époque, nous avons déterminé, grâce à l'examen publié hier, qu'il y avait peut-être des preuves crédibles que la technologie canadienne à laquelle vous faites allusion, c'est-à-dire les capteurs et les caméras, avait été utilisée aussi dans cette région, mais avant cela, nous n'avions aucune preuve que les exportations militaires canadiennes ou les exportations de technologie étaient utilisées à des fins offensives en Libye ou en violation des critères du Traité sur le commerce des armes.
(1605)

[Français]

     Je vous remercie.
    Comme l'a mentionné M. Fonseca, vous avez souligné, dans votre présentation, qu'il fallait malgré tout chercher à préserver les intérêts commerciaux canadiens. Or, lors d'une rencontre avec des parlementaires canadiens, un diplomate turc en poste à Ottawa a candidement avoué que la Turquie n'avait plus vraiment besoin de cet équipement, soit la technologie WESCAM fabriquée par L3Harris à Burlington, en Ontario, puisqu'elle avait créé ses propres produits maison en copiant, probablement, la technologie canadienne.
    En essayant de préserver les intérêts commerciaux canadiens, ne leur avons-nous pas plutôt nui, dans la mesure où un pays a simplement copié la technologie et l'intègre dans ses propres armes?

[Traduction]

    Monsieur le président, le député soulève une question très intéressante, en ce sens qu'en octobre dernier, lorsque l'ancien ministre Champagne nous a demandé de suspendre les licences d'exportation relatives à la région du Haut-Karabakh, la grande majorité de ces licences étaient liées aux capteurs ou aux caméras qui étaient exportés pour être fixés aux drones turcs. À l'époque, dans le cadre de nos délibérations avec la Turquie, nous avons tenté d'aider le gouvernement turc à fournir des renseignements supplémentaires au gouvernement canadien afin que ce dernier détermine si les technologies canadiennes étaient utilisées dans cette région à l'encontre des assurances d'utilisation finale et d'utilisateur final que le gouvernement canadien avait reçues du gouvernement de la Turquie, mais malheureusement, comme je l'ai mentionné, le gouvernement turc ne nous a pas fourni de renseignements supplémentaires.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Christie.
    Merci beaucoup, monsieur Bergeron.

[Traduction]

    Nous allons devoir en rester là.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Harris pendant six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Christie, je m'intéresse vivement à vos commentaires concernant le fait que le ministère ne semblait pas savoir que ces capteurs Wescam étaient utilisés dans les UAV Bayraktar TB2, parce qu'il semble être de notoriété publique que ces drones ont été conçus pour utiliser des capteurs Wescam. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
    Lorsque ces allégations ont été formulées par diverses sources — les médias, le rapport du Project Ploughshares et d'autres sources d'information —, le ministre Champagne nous a demandé de suspendre ces licences pendant que nous examinions les allégations.
    En repensant au conflit du Haut-Karabakh, je dois dire qu'il dure depuis un certain nombre d'années, mais qu'il est resté en veilleuse pendant plusieurs de ces années. Ce n'est que le 25 septembre dernier que les combats ont repris dans la région du Haut-Karabakh... Quelques jours plus tard, nous avons rencontré le ministre Champagne, qui nous a donné l'ordre de suspendre les licences en question. Je dirais donc que le ministre est passé à l'action en quelques jours.
    En toute honnêteté, comme je l'ai déclaré, le conflit et les combats dans cette région étaient restés en veilleuse depuis plusieurs années. Le conflit a éclaté assez rapidement. Donc, il n'y avait aucune preuve avant cela que les technologies que nous exportions vers la Turquie étaient utilisées.
    Monsieur, cela ne cadre pas avec le mémoire pour intervention qui a été approuvé et signé au nom du sous-ministre des Affaires étrangères le 2 septembre, un mémoire qui recommande l'approbation d'un nombre caviardé de demandes de licence et qui traite des différents précédents mentionnés dans le mémoire du 2 mai, en faisant observer que les drones construits en Turquie et dotés des systèmes optiques L3Harris Wescam ont été essentiels à la campagne aérienne turque dans la région syrienne.
    Il y a également une allusion à la façon dont, depuis que cette approbation a été accordée en 2013, nous avons inclus la demande de licences d'exportation des systèmes L3Harris, qui sont énumérées à l'annexe A. Depuis que cette approbation a été accordée, la Turquie a poursuivi son engagement militaire en Syrie, en Irak et en Libye, et elle s'est fortement prononcée en faveur de l'Azerbaïdjan au cours des récents combats. Cela donne également à penser que d'autres activités ont lieu en Méditerranée, des activités toutes susceptibles d'accroître le risque que ces drones soient utilisés dans le cadre de conflits. Je suis donc un peu préoccupé par votre affirmation selon laquelle vous n'aviez pas connaissance, a) de la présence de capteurs Wescam dans ces drones, et b) du fait que ces activités étaient susceptibles d'entraîner l'utilisation de ces drones dans des conflits.
(1610)
     Monsieur le président, il se pourrait que je demande à ma collègue, Mme Anand, d'intervenir pour apporter des précisions à ce sujet.
    À l'époque, nous prenions nos décisions et faisions nos recommandations au ministre en nous fondant sur les renseignements de sécurité dont nous disposions alors et sur les assurances d'utilisation finale que nous avait données le gouvernement turc. En d'autres termes, le gouvernement turc nous avait assuré qu'il n'utiliserait pas ces capteurs canadiens, ces technologies, à des fins offensives. Nous savions qu'ils étaient utilisés dans des drones construits en Turquie, mais nous n'avions aucune preuve que leur utilisation contrevenait à notre engagement en vertu du Traité sur le commerce des armes.
    Madame Anand, avez-vous quelque chose à ajouter à ma réponse?
    Nous pourrions peut-être en rester là, parce que j'aimerais vous poser d'autres questions.
    Vous avez dit que la seule exception semblait avoir trait aux opérations de l'OTAN — c'était après le 2 avril — et que vous n'avisiez pas la population de l'ensemble des exceptions associées à ces opérations. Dans ce même mémoire, il y a au moins six exceptions, cinq autres en plus des opérations de l'OTAN, alors je pense que vous ne nous dites pas tout ici, monsieur Christie, si vous parlez uniquement de l'exception associée aux opérations de l'OTAN. Est-ce exact?
    À ce moment-là, monsieur le président, l'approbation relative à l'utilisation des technologies canadiennes faisait l'objet d'une évaluation au cas par cas, comme je l'ai dit plus tôt. Les exceptions visaient des circonstances exceptionnelles et ne se limitaient pas aux programmes de coopération de l'OTAN. La demande de licence aurait pu être approuvée pour promouvoir les intérêts humanitaires du Canada dans la région, mais aussi en vue de la coopération avec les alliés de la région. Comme ces licences ont été révoquées par le ministre Garneau, les circonstances exceptionnelles ont été davantage précisées afin de viser uniquement la coopération avec l'OTAN.
    Merci beaucoup, monsieur Christie et monsieur Harris.
    Nous allons maintenant passer à la deuxième série de questions. Les deux premiers intervenants disposeront de cinq minutes chacun.
    La parole est maintenant à M. Chong. Allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence.
    Monsieur Christie, vous avez dit une chose à M. Harris, que j'ai trouvée surprenante. Vous avez dit que le conflit était en dormance depuis de nombreuses années, et que ce n'était que depuis le 25 septembre dernier qu'il avait refait surface.
    Toutefois, l'été dernier, en juillet, il y a eu des conflits entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. En fait, une simple recherche Google permet de trouver des centaines d'articles à ce sujet. Le conflit a été relaté dans la presse grand public occidentale, comme dans le magazine Forbes et dans le New York Times; je suis donc surpris de voir que le ministère n'était pas au courant de ces conflits qui se déroulaient en juillet dans le Caucase.
    Ce qui me surprend, aussi, c'est que les articles sur les conflits évoquaient le recours aux technologies de drones. Par exemple — et c'est un exemple parmi de nombreux autres —, dans le magazine Forbes, David Hambling a écrit le 17 juillet que des drones Bayraktar turcs avaient été utilisés dans le cadre des conflits opposant l'Arménie à l'Azerbaïdjan cet été-là: l'été dernier. Je suis vraiment surpris de constater que le ministère n'était pas au courant.
    Ce qui m'a particulièrement surpris, lorsque j'ai lu les documents du ministère, c'est que dans la note d'information à l'intention du ministre des Affaires étrangères au sujet de la rencontre avec son homologue turc le 17 septembre, on ne mentionne aucunement les conflits du Caucase, qui impliquent la Turquie. De nombreux articles faisaient état de la participation de la Turquie et de l'Azerbaïdjan à ces conflits, et de leur coopération. Les deux pays avaient réalisé des exercices militaires conjoints de grande envergure. Or, dans cette note d'information, on ne mentionne aucunement les conflits au Caucase.
    Le document est daté du 14 septembre, et il portait sur une rencontre qui aurait lieu le 17 septembre entre le ministre Champagne et son homologue turc. On y fait référence au conflit entre la Turquie et la Grèce dans la Méditerranée orientale. On parle de nombreux autres enjeux dans la région, mais pas des conflits dans le Caucase.
    En septembre dernier, le ministère était-il au courant des conflits entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan qui se déroulaient dans le Haut-Karabakh?
(1615)
    Je vais demander à mes collègues de répondre à cette question. Ils pourront peut-être mieux vous expliquer les nuances entre ce que j'ai dit au sujet de la reprise du conflit le 25 septembre et ce qui s'est passé au cours de l'été d'avant.
    Oui, j'aimerais vous entendre. Est-ce que le ministère était au courant de ces conflits en juillet?
    Madame McCardell ou monsieur Turner, voulez-vous répondre?
    Monsieur le président, le membre du Comité a raison d'évoquer les échauffourées de juillet à la frontière. Le ministère était au courant. Malheureusement, 16 personnes sont mortes.
    Merci.
    Pourquoi ne les avez-vous pas évoquées dans la note d'information à l'intention du ministre des Affaires étrangères en vue de sa réunion du 17 septembre?
    Cela me semble être une omission flagrante que de ne pas mentionner les conflits dans le Caucase.
    Monsieur le président, les conflits de juillet 2020 se sont déroulés sur un fond de tensions variables entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan dans la région du Haut-Karabakh, qui durent depuis de nombreuses années. Cette flambée du mois de juillet, bien qu'elle soit préoccupante, ne laissait pas présager ce qui viendrait quelques mois plus tard: un éclatement de violence très important et un conflit entre les deux pays.
    En tout respect, cela me semble être une omission flagrante. Je vais en rester là.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Chong.
    Notre prochain intervenant est M. Oliphant.
    Vous disposez de cinq minutes. Allez-y.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais tout d'abord remercier les analystes, Mme Goody et M. Siekierski, pour leurs notes d'information en vue de la réunion d'aujourd'hui.
    Ces notes étaient exceptionnelles. Votre travail m'a permis de mieux comprendre la situation. Je suis la situation relative aux licences d'exportation d'armes depuis quelques années maintenant. Vous avez fait un très bon travail. Je vais transmettre les documents aux représentants afin qu'ils les lisent, parce qu'ils décrivent très bien le fil des événements.
    Ma première question est la suivante: la Turquie est-elle l'alliée du Canada?
(1620)
    Oui. La Turquie est un partenaire bilatéral et stratégique important du Canada et, comme je l'ai dit plus tôt, un partenaire précieux de l'OTAN.
    À ce titre, nous participons avec elle à la lutte contre Daech. Nous collaborons avec elle dans d'autres domaines également. Elle partage nos préoccupations au sujet de l'agression russe en Ukraine, par exemple. Est-ce exact?
    Oui, c'est exact.
    Il ne serait pas inhabituel d'accorder des licences d'exportation d'armes à un allié qui soulève d'importantes préoccupations... avec n'importe quel allié, pour veiller à ce que l'utilisation finale des armes soit bel et bien celle prévue. Ce serait une procédure normale que suivrait le Canada avec les sociétés canadiennes qui réalisent ce type d'activités.
    Oui, c'est exactement notre façon d'aborder ces discussions.
    Comme je l'ai dit plutôt — et je vais le répéter en guise de réponse à votre question —, dans le cadre du processus de demande de licence d'exportation, nous voulons des garanties quant à l'utilisateur final et à l'utilisation finale. L'utilisateur final est le destinataire dans l'autre pays, soit la Turquie dans le cas présent. Ce qui est particulièrement difficile — et qui dépasse la portée juridique de la Loi sur les licences d'exportation et d'importation —, c'est le délai entre le moment de l'exportation d'une technologie ou d'un bien d'une société canadienne vers la Turquie et le moment de son utilisation. Les biens peuvent être gardés dans des entrepôts pendant des années, par exemple. Il est très difficile pour nous de déterminer si, dans le cas présent, les technologies qui ont été... pour lesquelles il y a des preuves d'utilisation, d'établir le lien avec une demande de licence d'exportation en particulier.
    Nous voulons faire preuve de vigilance à cet égard. Nous travaillons avec d'autres alliés. Nous obtenons des renseignements de la part des ONG. Nous recueillons nos propres renseignements afin d'être le plus à jour possible.
    Je vous vois faire oui de la tête.
    En ce qui a trait à la Turquie, toutefois, nous avons perçu un problème. Lorsqu'elle était ministre des Affaires étrangères, Mme Freeland a ouvert la porte à ce problème. On voit dans nos notes d'information que nous avons des préoccupations au sujet de la Turquie depuis octobre 2019, même si elle est notre alliée. En termes simples, nous l'avons avertie de nombreuses façons. Enfin, en octobre et en novembre l'année dernière, le ministre Champagne a agi dans l'urgence lorsqu'il a obtenu des preuves à l'égard de ces équipements en particulier. Est-ce exact?
    Oui.
    Le ministre avait plusieurs options en ce qui a trait à la suspension des licences. Selon ce que je comprends, la licence est d'une durée de cinq ans. Elles ont été suspendues. Il aurait pu les rétablir. Il aurait pu les modifier. Il a choisi de les révoquer. C'est une mesure assez forte, à mon avis.
    C'est exact. Après avoir procédé à l'examen des licences d'exportation turques au cours des quatre derniers mois de 2020, nous avons présenté diverses options au ministre Garneau à des fins d'examen. Il pouvait révoquer les licences, ce qu'il a choisi de faire. Il aurait pu maintenir la suspension des licences alors que nous nous affairions à déterminer la validité des garanties d'utilisation finale ou il aurait pu les annuler pour ensuite les rétablir selon des conditions distinctes.
    Il a toutefois choisi de révoquer les licences. Il a aussi fait valoir à la Turquie que nous voulions entamer une discussion avec elle, en tant que partenaire de l'OTAN, afin de rétablir la confiance nécessaire avant de pouvoir revenir à la présomption de bonne foi. À l'heure actuelle, nous avons une présomption de refus, et nous avons demandé à la Turquie de s'engager dans un dialogue avec nous pour nous prouver qu'elle agira à nouveau de bonne foi.
    Est-ce exact?
    Oui, c'est exact.
    Dans le cadre de sa discussion avec son homologue turc hier matin, avant l'annonce, le ministre Garneau a fait part de son intention de demander à ses représentants de tenter d'établir un mécanisme de dialogue avec la Turquie, dans le but d'accroître la validité ou l'assurance relative aux déclarations d'utilisation finale ou d'utilisateurs finaux.
    Je tiens à remercier M. Christie pour son travail continu. C'est un travail difficile. Je vous remercie pour ce que vous faites.
(1625)
    Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Bergeron, vous avez maintenant la parole pour les deux prochaines minutes et demie.
    Dans le même esprit, si je poursuis la logique venant d'être exposée, il est d'autant plus important de demander des assurances plus solides de la part de notre allié turc. Précédemment, lorsque nous lui avons demandé des précisions, il ne les a pas fournies. Par ailleurs, pour reprendre le questionnement de M. Oliphant, je crois qu'on peut dire que notre allié turc a retourné ses armes, armes possiblement conçues au moyen de la technologie canadienne, contre un autre allié nous ayant aidé à lutter contre Daech. Je parle bien sûr des Kurdes du Nord-Ouest de la Syrie.
    Cela étant dit, monsieur le président, lorsque le précédent ministre des Affaires étrangères, conseillé par ses fonctionnaires, a décidé de suspendre les permis d'exportation d'armes vers l'Arabie saoudite, il nous a annoncé la création d'un comité d'experts. Or, en octobre dernier, lors de la comparution de représentants d'Affaires mondiales Canada devant le Comité, on nous a signalé que la composition du groupe d'experts restait toujours à définir.
    M. Christie nous a dit, dans sa présentation, que des gens à l'externe étaient souvent consultés. Je présume que ce comité d'experts devrait normalement l'être également. Cela dit, qui peut-on consulter lorsqu'on tarde autant à créer un comité d'experts qui doit justement servir à conseiller le ministère à cet égard?

[Traduction]

    En ce qui a trait aux licences du Haut-Karabakh qui ont été suspendues par le ministre Champagne en octobre dernier, nous consultons les sociétés canadiennes dans le cadre de nos délibérations. Nous consultons nos partenaires aux vues similaires.
    Depuis que nous avons signé le traité sur le commerce des armes, nous procédons régulièrement à une analyse comparative de la façon dont le Canada met en oeuvre les critères ou ses obligations en vertu du traité par rapport à celle des autres pays. Ces délibérations nous ont permis de déterminer que notre façon de faire était étroitement liée à celle de la majorité de nos homologues européens, par exemple. Elles sont toutes légèrement différentes.
    Vous avez fait référence à la création d'un conseil consultatif sur le traité sur le commerce des armes. Oui, le ministre Champagne a annoncé la création de ce conseil en avril dernier. Nous travaillons, en consultation avec d'autres, à déterminer les conditions, le mandat et la composition de ce conseil. Selon les recommandations qui ont été faites, le conseil serait composé d'universitaires et de représentants du secteur privé, en plus de représentants d'organisations non gouvernementales. Leur rôle serait de conseiller le Canada, non seulement sur la façon de mettre en oeuvre le traité, mais aussi sur la façon de l'évaluer. Quant au moment de son annonce, nous espérons que ce sera bientôt.
    Monsieur Christie, je suis désolé, mais nous devons nous arrêter là.

[Français]

    Monsieur Bergeron, votre temps est écoulé, je suis désolé.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer à la dernière série de questions.
    Monsieur Harris, vous disposez de deux minutes et demie. Allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais ajouter aux propos de M. Chong de tout à l'heure au sujet de la connaissance d'Affaires mondiale de ce qui se passait dans le Haut-Karabakh et des renseignements qui étaient déjà disponibles ou connus. Premièrement, en ce qui a trait aux capteurs... Dans son propre rapport, publié hier, le gouvernement indique que le catalogue de produits de Baykar présente les capteurs canadiens à titre de technologie exclusive pour ses véhicules aériens sans pilote, ce qui donne à penser que les capteurs canadiens ont probablement été utilisés pour les drones TB2 de la société. Cette information était disponible depuis un bon moment, alors je ne comprends pas pourquoi il y aurait confusion à cet égard.
    De plus, en juin et en juillet — et je fais référence au rapport du gouvernement, à la page 5 —, selon des reportages dans les médias, l'Azerbaïdjan achetait ces drones de la Turquie. De plus, le président de l'industrie de la défense de la Turquie avait fait valoir qu'il fournirait toujours l'Azerbaïdjan en drones, en munitions, en missiles et en systèmes de guerre électroniques. Je souligne qu'il s'agit du rapport du gouvernement, ce qui est bien, et je suis heureux qu'il ait rendu ce rapport public, mais cela signifie qu'il avait accès à cette information, et à d'autres renseignements, en juillet.
    Je n'ai pas beaucoup de temps pour d'autres questions et réponses à ce moment-ci, puisque je ne dispose que de deux minutes et demie, monsieur le président, mais j'aimerais présenter une motion:
Que le Comité rende publics les documents fournis à ce jour par Affaires mondiales Canada, conformément à la motion adoptée le 29 octobre 2020; et que la greffière réitère le droit du Comité d'avoir accès sans entrave aux documents non expurgés demandés aux fonctionnaires d'Affaires mondiales Canada.
(1630)
    Merci beaucoup, monsieur Harris.
    La motion est recevable, car elle traite du sujet qui nous occupe.
    Si vous désirez débattre de la motion, je vous prierais d'utiliser la fonction « main levée ». Je pense que nous sommes tous en ligne, aujourd'hui, alors si vous désirez discuter de la motion, je vous prierais d'utiliser la fonction « main levée » pour ce faire.
    Madame Sahota, je vois que vous avez la main levée. Vous êtes la première sur la liste. Allez-y, je vous prie.
    Je ne veux pas vraiment parler de la motion. Je voulais simplement savoir si on pouvait nous l'envoyer par courriel.
    D'accord.
    La motion a été lue.
    Monsieur Harris, seriez-vous capable de l'envoyer par courriel ou par l'entremise du bureau de la greffière?
    Je pense qu'on pourrait veiller à ce que la greffière en ait un exemplaire. Je ne sais pas si nous avons un groupe d'envoi pour les adresses courriel de tout le monde, mais c'est peut-être le cas de la greffière.
    Est-ce possible de le faire pour faciliter la discussion, madame la greffière? La motion a été inscrite au compte rendu et fait donc maintenant officiellement l'objet d'une discussion au Comité, sans compter le fait qu'une interprétation a été fournie — je n'ai du moins pas reçu de rappel au Règlement qui m'indiquerait le contraire. Il serait probablement utile de la distribuer aux membres du Comité.
    Merci, madame Sahota.
    J'ai M. Harris sur ma liste, puis M. Oliphant.
    Je voulais juste ajouter quelque chose à propos de la motion. Je crois qu'elle parle d'elle-même. Le Comité a adopté une motion semblable récemment après avoir reçu des documents. Nous voulions bien sûr veiller à ce que la seule exception à notre motion du 29 octobre soit reliée à la confidentialité du Cabinet.
    En fin de compte, nous avons plutôt reçu des documents caviardés intentionnellement au-delà de notre demande par Affaires mondiales Canada, qui a expliqué le type de caviardage qui avait été fait, caviardage qui semblait être, d'après les conseils octroyés au Comité, semblable à ce qui est fait pour les demandes d'accès à l'information. Ces documents étaient essentiellement clairement accessibles au public, et le Comité s'était entendu pour les publier. Je crois que nous pouvons confirmer — la greffière peut peut-être nous aider avec cela — que ce jeu précis de documents a aussi été assujetti au même mécanisme qui vise à veiller à ce qu'ils soient rendus publics.
    Merci beaucoup, monsieur Harris.
    Allez-y, monsieur Oliphant.
    Je suis d'accord en principe. Je pense qu'il s'agit en effet d'une motion semblable à celle que nous avons déjà adoptée.
    J'ai deux questions. J'aimerais d'abord qu'on m'éclaire et je vais peut-être demander au président de suspendre la séance d'ici à ce que nous recevions un exemplaire de la motion. J'aimerais pouvoir comparer cette motion avec la motion précédente pour voir si elles sont identiques ou non. Si elles sont identiques, alors nous l'appuierons, bien sûr. Je voterai en faveur de cette motion et je présume que ce sera aussi le cas de mes collègues.
    Pour ma deuxième question, je cherche de la clarté. Je n'ai pas les bleus — le compte rendu des débats — sous les yeux. La motion précédente s'appliquait-elle seulement aux documents que nous avions reçus jusqu'alors? Je vois que la greffière hoche la tête. C'était une motion limitée; il nous faut donc cette nouvelle motion pour appliquer le même mécanisme pour ces nouveaux documents que nous venons de recevoir.
    Je voulais aussi vérifier si le libellé des deux motions est bel et bien identique. S'il l'est, nous pouvons passer à autre chose et poursuivre la réunion avec nos témoins, qui est plutôt importante. Si le libellé diffère, alors je dois pouvoir y jeter un œil pour examiner les différences. Je dois pouvoir les examiner.
(1635)
    Merci, monsieur Oliphant.
    Monsieur Harris, pouvez-vous nous le confirmer? Nous pourrions suspendre la séance brièvement si nécessaire afin de retrouver le libellé de la motion initiale, si les membres du Comité veulent y jeter un œil. Si vous pouvez offrir des éclaircissements à M. Oliphant, alors peut-être que nous pouvons simplement régler la question oralement.
    Monsieur Harris.
    Je pense que la motion est basée sur la motion précédente. La question de nous réserver le droit d'avoir un accès sans entrave aux documents non caviardés n'était pas dans la motion en soi, mais c'était une condition enregistrée par la greffière dans le cadre de la décision prise à ce moment-là. Je l'ai incluse dans la motion, plutôt que de procéder ainsi à nouveau.
    Si les membres du Comité désirent jeter un œil à la motion avant de procéder à un vote, alors peut-être que nous pouvons la déposer et en reparler plus tard aujourd'hui, si la procédure nous permet de le faire sans que je doive utiliser mon temps de parole à nouveau.
    Si les membres du Comité s'entendent pour dire qu'ils aimeraient un exemplaire des deux motions pour les comparer, alors nous pouvons procéder au vote plus tard aujourd'hui.
    Merci, monsieur Harris.
    Les collègues sont-ils d'accord pour qu'on réserve 10 minutes à la fin de la comparution du deuxième groupe de témoins pour réviser le libellé brièvement? Je ne vois pas d'objection. Quelqu'un désire-t-il ajouter quelque chose à ce sujet?
    Monsieur Oliphant, cela vous irait?
    Pourquoi ne pas procéder ainsi? Nous conclurons la période de comparution du deuxième groupe de témoins à 17 h 20. Nous aurons reçu le libellé de la motion initiale entretemps. Nous réserverons 10 minutes de notre temps pour procéder au vote sur la motion de M. Harris.
    Merci, monsieur le président, et merci, chers collègues.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais remercier notre premier groupe de témoins de leur témoignage, de leur service et des renseignements qu'ils nous ont fournis aujourd'hui. Nous allons prendre le temps de les laisser se déconnecter. Nous allons suspendre la séance un court instant afin que notre deuxième groupe de témoins puisse ensuite se connecter, puis nous poursuivrons notre discussion sur les licences d'exportation vers la Turquie.
    Nous allons suspendre la séance.
(1635)

(1635)
    Bienvenue à tous. Nous sommes maintenant prêts à poursuivre notre étude sur l'octroi de licences d'exportation d'armes, avec une attention particulière sur les licences d'exportation vers la Turquie. Nous accueillons notre deuxième groupe de témoins.

[Français]

     Pour la gouverne de nos nouveaux témoins, j'encourage tous les participants à mettre leur microphone en sourdine lorsqu'ils ne parlent pas et à adresser leurs commentaires à la présidence.
    Lorsqu'il vous restera 30 secondes pour poser des questions, je vous ferai signe avec un bout de papier. L'interprétation est accessible à partir de l'icône du globe au bas de votre écran.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.

[Traduction]

    Nous accueillons Mme Bessma Momani, professeure à l'Université de Waterloo, M. Chris Kilford, écrivain sur les questions turques et du Moyen-Orient, ainsi que M. Christian Leuprecht, professeur au Département de sciences politiques au Collège militaire royal du Canada.
    Madame Momani, nous vous cédons la parole en premier. Vous disposez de cinq minutes pour vos remarques liminaires.
(1640)
    Merci à tous. Je serai heureuse de répondre à vos questions, particulièrement sur la politique étrangère de la Turquie et le contexte régional. Je vais vous offrir une mise en contexte de certains des enjeux qui nous occupent aujourd'hui, et plus précisément des licences d'exportation vers la Turquie. Mon ami, M. Leuprecht, poursuivra dans la même veine en vous parlant des systèmes utilisés, mais j'ai pensé que ce serait bien de vous offrir une mise en contexte de certains enjeux qui me semblent importants.
    Bien sûr, l'Arménie et l'Azerbaïdjan sont brièvement entrés en conflit récemment. Nous avons beaucoup parlé du fait que la Turquie avait donné un arsenal moderne aux Azerbaïdjanais. Je crois qu'il est important de mentionner qu'en raison de sa situation économique relative, l'Arménie n'a pas vraiment eu l'occasion de mettre à niveau la plupart de son arsenal. L'arsenal arménien est composé en majorité de systèmes très anciens, et surtout de roquettes russes. Les Azéris se sont fortement enrichis avec le pétrole et ont donc pu investir au cours des 20 dernières années non seulement dans un arsenal d'armes très diversifié, mais aussi, et plus important encore, dans des armes modernes, telles que des missiles, des roquettes et des drones.
    On a beaucoup parlé des drones et c'est certainement important de le faire, mais je crois qu'il est aussi important de mentionner que ces drones se sont avérés particulièrement efficaces en partie parce que les Arméniens ne disposaient pas de très bons systèmes de défense aérienne. Ces drones se sont avérés très utiles sans l'ombre d'un doute, car ils ont donné un grand avantage aux Azéris sur le champ de bataille.
    Il y a aussi l'enjeu des caméras installées sur ces drones et utilisées à d'autres fins. En fait, de nombreux Arméniens ont dit qu'elles avaient été utilisées pour faire des vidéos de propagande très explicites, alors c'est un autre enjeu dont nous devons tenir compte. Les Azéris n'avaient pas seulement un avantage tactique, mais aussi un avantage très intéressant pour transmettre des messages.
    J'aimerais aborder un autre enjeu important pour les débats sur l'avenir. Ce conflit précis représente un changement dans le monde de la guerre moderne. La technologie des drones va réellement changer la donne sur les champs de bataille, en partie parce qu'ils ne sont pas dispendieux. D'autres pays vont se mettre à utiliser des drones, surtout ceux qui n'ont pas une force aérienne robuste. Si vous ne voulez pas investir beaucoup d'argent pour avoir une force aérienne, alors vous pouvez utiliser des drones afin d'accomplir la même chose efficacement à une fraction du coût. Nous allons voir de nombreux pays plus petits mettre la main sur ces outils d'aviation tactiques peu coûteux, qui ont parfois des armes à guidage de précision. Ces outils peuvent s'avérer très efficaces, car ils peuvent détruire de l'équipement beaucoup plus cher, tels que des chars d'assaut, des véhicules, des unités d'artillerie, etc. Certains disent que ces drones ont permis de détruire efficacement environ le tiers des chars d'assaut arméniens, alors ils ont réellement eu tout un effet sur le champ de bataille.
    Ce type de technologie est aussi plutôt répandue. Les Turcs, les Chinois et les Israéliens font affaire dans le marché d'exportation des drones. Cela dit, bien que la Turquie fabrique des drones depuis une décennie afin de renforcer son industrie d'armement locale, elle doit importer la majorité des logiciels de ces drones. La Turquie, ce faisant, ne dispose donc pas entièrement d'une industrie d'armement locale. Elle n'est pas complètement indépendante. J'espère que ce point peut vous être utile.
    Enfin, ces drones ont été utilisés lors du conflit entre les Azéris et les Arméniens, mais ils ont aussi été utilisés, comme l'ont mentionné certains, lors de la guerre civile en Libye. Nous savons aussi qu'ils ont été utilisés pour appuyer les rebelles syriens, tout comme pour cibler des insurgés kurdes, que ce soit en Turquie avec le PKK, le Parti des travailleurs du Kurdistan, ou en Irak.
    Je vais m'arrêter là. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, madame Momani.
    Nous allons maintenant passer à M. Kilford, qui dispose de cinq minutes pour faire sa déclaration liminaire, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du Comité, de l'aimable invitation à prendre la parole aujourd'hui. Je vous parle depuis les territoires non cédés des Salish du littoral ici à Victoria.
    J'espère pouvoir vous aider aujourd'hui en répondant à vos questions. À titre d'information, en plus d'écrire et de donner mon avis sur les questions qui touchent la Turquie et le Moyen-Orient, j'ai également servi dans les Forces armées canadiennes pendant 36 ans, notamment en tant que commandant du 4e Régiment d'artillerie antiaérienne. Je comprends donc assez bien la défense aérienne, la guerre aérienne et l'utilisation de drones. J'ai également servi en Afghanistan pendant un an, et entre juillet 2011 et juillet 2014, au grade de colonel, j'ai été l'attaché de défense canadienne en Turquie avec accréditation double en Azerbaïdjan. J'ai pris ma retraite des Forces armées canadiennes en septembre 2014. Ma dernière visite en Turquie remonte à novembre 2019.
    En me préparant pour ma comparution d'aujourd'hui, j'ai eu l'occasion d'examiner toute la documentation que vous aviez, et plus particulièrement les documents sur les nacelles de surveillance et de ciblage Wescam qui sont utilisées dans les drones Bayraktar TB2.
    Il ne fait aucun doute qu'après des décennies d'embargos intermittents sur les armes imposés à la Turquie par bon nombre de ses alliés de l'OTAN, le pays s'est doté d'une importante industrie de l'armement. Une grande partie de cette industrie est supervisée par la Fondation des forces armées turques du gouvernement et la Présidence des industries de la défense, qui sont toutes deux — et c'est vraiment important, je pense — directement contrôlées par le président turc, Recep Tayyip Erdogan.
    L'assistance militaire récemment offerte par la Turquie à l'Azerbaïdjan, dans le cadre d'opérations de reprise du territoire azérien occupé par les Arméniens, n'est qu'un exemple des progrès réalisés par son industrie de l'armement. Je dirais que l'utilisation des drones Bayraktar a sans doute contribué davantage au succès de l'Azerbaïdjan que toute autre capacité qu'elle dispose.
    En ce qui concerne la Turquie, je ne vois aucune autre force armée dans le monde qui soit actuellement impliquée dans autant de conflits armés, que ce soit directement ou indirectement, à part la Russie. La Russie, par exemple, a récemment demandé à la Turquie de cesser de vendre des drones à l'Ukraine, craignant sans doute qu'elle ne fasse pencher la balance militaire en faveur de l'Ukraine.
    Pour revenir à la Turquie, elle dispose certes d'une armée bien entraînée et compétente, mais elle est en proie à de nombreux problèmes internes, avec les purges prolongées et constantes qui ont suivi un coup militaire raté en juillet 2016. J'ajouterais également que tout le pays — sur les plans politique, économique et des droits de la personne — est également confronté à de nombreux défis. Néanmoins, le gouvernement turc soulignerait sans doute que sans son intervention en Libye, le gouvernement reconnu par les Nations unies serait tombé aux mains des forces du général Haftar. Ce n'est pas pour minimiser la situation ou laisser entendre que nous excusons les activités régionales de la Turquie qui ont donné lieu à notre embargo sur les armes, mais il s'agit bien souvent d'une perspective qui fait défaut dans la situation d'ensemble. Selon des rapports de l'année dernière, je sais qu'Aselsan a mis au point sa propre nacelle de ciblage et pourrait ne plus avoir besoin des nacelles Wescam à l'avenir.
    En conclusion, aussi mortels qu'ils puissent être, les drones sont équipés de ces systèmes électro-optiques sophistiqués et, s'ils sont pilotés par des opérateurs bien formés qui respectent les règles d'engagement légales, leur utilisation devrait permettre d'éviter ou de réduire du moins les pertes civiles dans les zones de conflit.
    Merci beaucoup.
    J'ai hâte de répondre à vos questions.
(1645)
    Merci beaucoup, monsieur Kilford.
    Pour terminer, monsieur Leuprecht, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.

[Français]

    Je vais m'exprimer en anglais, mais vous pourrez poser vos questions dans la langue officielle de votre choix.

[Traduction]

    Le but de notre discussion d'aujourd'hui, pour autant que je sache, est d'avoir une conversation constructive sur la robustesse de notre système de contrôle des exportations et sur la possibilité d'offrir plus de certitude à l'avenir en ce qui concerne le système que nous avons.
    En ce qui concerne la conversation avec le groupe de témoins précédent, il est également important de comprendre que le système que nous avons a été construit pendant la guerre froide, où nous avions un type de conflit assez prévisible. Aujourd'hui, en revanche, nous sommes engagés dans des missions antiterroristes, des missions anti-insurrectionnelles, des conflits qui ne franchissent pas le seuil de la guerre, et avec des pays comme la Turquie qui adoptent des politiques étrangères révisionnistes et hégémoniques. Par conséquent, le système a manifestement du mal à gérer cette plus grande diversité de conflits.
    Ce qui est en jeu est fondamentalement une controverse sur les exportations en matière de défense. Il est important de comprendre que les exportations en matière de défense sont en fin de compte un instrument de politique étrangère, et c'est pourquoi la Liste des marchandises et technologies d'exportation contrôlée, la LMEC, relève du ministre des Affaires étrangères. C'est également la raison pour laquelle le ministre des Affaires étrangères dispose d'un pouvoir discrétionnaire considérable pour délivrer, suspendre, révoquer ou rétablir des permis. La décision prise hier par le ministre de révoquer les permis est assez inhabituelle. Ordinairement, il y a une suspension, mais pas une révocation.
    Je dirais que le Canada a un système de contrôle des exportations très robuste. Ce système s'est considérablement amélioré depuis 2019 avec l'adhésion du Canada au Traité sur le commerce des armes. Il est parmi les plus robustes au monde. Je suis sûr qu'il y a des choses que nous pouvons faire pour l'améliorer, mais je pense que nous sommes à peu près aussi bons que nous pouvons l'être. Le système fonctionne parce qu'il est multilatéral. Nous décidons avec d'autres pays ce qui doit être contrôlé et comment nous allons le contrôler.
    La question est donc de savoir s'il s'agit d'une défaillance du système de contrôle des exportations. Eh bien, le Canada n'aurait jamais permis que ce type d'équipement soit exporté vers le parti tiers en question, c'est-à-dire l'Azerbaïdjan. C'est donc en définitive une question d'utilisation finale et d'autorisation qui accompagnait cette utilisation finale. Il semblerait que la Turquie ait donné des assurances quant à l'utilisation finale et que le gouvernement canadien, selon mon interprétation, ait été trompé par la Turquie à cet égard.
    Dans le groupe de témoins précédent, nous avons discuté de ce que l'évaluation interministérielle des risques a révélé. Selon moi, à la lumière des observations de M. Kilford et Mme Momani, il y avait un risque élevé que cette technologie soit utilisée à des fins qui pourraient ne pas correspondre aux assurances données, et qui pourraient également ne pas correspondre aux intérêts canadiens par rapport à ceux de l'OTAN et de ses partenaires, et nous avons les preuves déjà citées du nord de la Syrie et de l'Irak. Si la LMEC a fonctionné, alors il s'agit en fin de compte d'une question de discrétion du ministre.
    La raison pour laquelle cette conversation est si importante — oui, il s'agit de technologie, de drones et de droits de la personne —, c'est qu'en fin de compte, la technologie canadienne a fondamentalement changé le statu quo géostratégique, et ce, d'une manière qui n'était pas dans l'intérêt du Canada et qui n'était pas alignée sur les intérêts de l'OTAN. Le Canada a donc involontairement favorisé et encouragé un changement dans le statu quo géostratégique.
    Nous devons donc nous poser des questions plus difficiles à propos de l'exportation de technologies qui pourraient entraîner ce type de répercussions et qui sont contraires aux intérêts des Canadiens et de l'OTAN. Je pense que l'évaluation des risques aurait dû montrer cela.
    Le problème, bien entendu, comme l'a signalé le sous-ministre adjoint, c'est qu'il est difficile de prédire le début de ce type de conflit. Des semaines, des mois, voire des années, peuvent s'écouler avant que le permis soit octroyé. Bien entendu, nous savons que la Turquie lançait ouvertement des oeufs à l'Azerbaïdjan et qu'il y avait déjà une vaste coopération militaire.
    Qu'aurait-on pu faire alors pour empêcher cela?
    Une option est de procéder à des vérifications après expédition. Dans le mémoire plus long que j'ai soumis à ce comité, j'expose quatre options de ce qui aurait pu être fait. Je ne suis pas certain si l'une de ces quatre options aurait beaucoup changé la donne.
    Ce qui aurait changé la donne, cependant, c'est si nous avions des ambassades dans la région. Nous vendons cette technologie à une région où nous n'avons pas d'ambassades ni à Erevan ni à Bakou. Cela signifie que nous devions nous fier à nos ambassades à Moscou et à Ankara pour nous fournir les renseignements pour notre évaluation stratégique. Je dirais que si nous nous livrons à ce type d'exportations dans ces zones et régions à risque élevé, nous devons nous assurer d'avoir notre propre représentation sur le terrain.
    Je dirais qu'il est très gênant pour le gouvernement du Canada que le Globe and Mail ait envoyé un journaliste pour enquêter, mais nous n'avions pas de diplomates sur le terrain pour mener une enquête. C'est pourquoi nous devons nous poser des questions difficiles.
    Voici deux points pour conclure mes remarques.
    On avait des inquiétudes concernant le caviardage dans les documents fournis. Je pense que s'il y a des inquiétudes, on peut toujours en saisir le CPSNR, qui pourrait alors examiner ces documents plus en détail. Cela dit, il était nécessaire de caviarder des renseignements relatifs à des tiers dans ces documents.
    Je voudrais juste conclure en nous rappelant que nous vivons dans un environnement géostratégique mondial très difficile, compétitif et hostile, où les exportations en matière de défense sont importantes. Elles sont importantes dans le cadre de la politique étrangère, mais elles le sont aussi en tant qu'instrument permettant de garantir la stabilité du monde. Elles nous permettent d'avoir une influence que nous n'aurions pas autrement.
    Les gens qui soutiennent que les exportations en matière de défense minent en quelque sorte notre sécurité et que nous ne devrions pas nous engager ont tout à fait tort. Ils ne comprennent absolument rien au monde dans lequel nous vivons, où il est essentiel pour le Canada d'apporter ses contributions à la haute technologie. Nous avons cependant la responsabilité de nous assurer que ces technologies sont utilisées de façon responsable et sont alignées sur les assurances que tous les pays partenaires nous donnent en ce sens.
    Merci.
(1650)
    Merci beaucoup, monsieur Leuprecht.
    Nous allons maintenant passer à notre première série d'interventions de six minutes. Nous allons commencer avec M. Chong.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos trois témoins de comparaître devant nous aujourd'hui. Je vous suis reconnaissant de prendre le temps de discuter avec nous.
    Je ne sais pas s'ils ont eu l'occasion de passer en revue le dernier rapport du gouvernement, le rapport final sur l'examen des permis d'exportation vers la Turquie, mais il renferme un certain nombre de conclusions que le ministère a tirées et sur lesquelles je voulais interroger nos trois témoins.
    La première conclusion est en réponse à une question. La question qui est posée dans le rapport est la suivante: « L'exportation continue de marchandises et de technologies militaires canadiennes vers la Turquie est-elle conforme aux obligations du Canada aux termes de la Loi sur les licences d'exportation et d'importation et du Traité sur le commerce des armes? ». Le ministère a tiré la conclusion suivante: « Le ministère estime qu'il n'existe pas de risque sérieux que les marchandises et les technologies militaires canadiennes exportées vers la Turquie soient utilisées pour porter atteinte à la paix et à la sécurité. »
    Nos trois témoins sont-ils du même avis?
(1655)
    Monsieur Chong, je me ferai un plaisir de donner mon point de vue.
    Je dirais que c'est une conclusion qui a été tirée à partir des critères que M. Christie a exposés, mais je pense que ce que j'essaie de mettre de l'avant dans mon exposé, c'est de savoir si nous évaluons cela en fonction des bons critères. Nous devons en fait avoir une compréhension géostratégique plus vaste des répercussions de la technologie, et peut-être que nos critères sont formulés de manière trop restrictive pour arriver aux conclusions que nous avons tirées.
    Je ne remets pas en question les conclusions de nos collègues d'Affaires mondiales Canada. Je pense qu'ils ont un travail difficile à faire, et je crois en leur professionnalisme et leur compétence.
    À la lumière de votre réponse, les critères sont-ils trop étroitement définis en raison de la loi-cadre, la Loi sur les licences d'exportation et d'importation, ou le ministère a-t-il défini trop étroitement les critères?
    Les bons fonctionnaires essaieront toujours de travailler dans le cadre du pouvoir octroyé par la législation, alors je pense qu'il y a peut-être une occasion de revoir soit la législation, soit l'interprétation de la législation telle qu'elle est fournie aux ministères lors de leurs évaluations.
    Je pense, à la lumière de mes remarques sur la nature changeante du conflit, ce que mes collègues ont signalé, qu'il y a peut-être une nécessité d'avoir une meilleure compréhension géostratégique des répercussions éventuelles de la technologie canadienne dans le cadre de l'évaluation.
    J'ajouterais rapidement quelques observations, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
    Oui, absolument.
    Sur cette question, et je pense qu'elle est très importante, il faut se demander où la technologie est utilisée. En Libye, d'une certaine manière, je dirais oui, car elle appuie le gouvernement sanctionné par la communauté internationale.
    En Syrie aussi, la technologie est certainement utilisée pour combattre l'EIIS et défendre le peuple syrien contre les incursions russes.
    Je ne pense pas que ce soit le cas en Irak, où la guerre contre le PKK s'accompagne de nombreuses violations des droits de la personne, malgré le fait que le PKK est assez terrible en soi. Cela dit, l'Irak a certainement beaucoup appuyé le gouvernement kurde de l'Irak et combat activement l'EIIS également et nous aide.
    Je pense que dans le récent conflit, Nagorno-Karabakh, je dirais non. C'était un conflit latent. Je pense que la paix et la stabilité auraient été meilleures si le conflit latent avait été maintenu. Il y a certainement beaucoup de choses à dire sur le fait que la grande majorité de la population était d'origine arménienne, même si, je pense, conformément aux normes du droit international, le territoire n'appartenait pas à Azerbaïdjan, mais pour les gens sur le terrain, je ne pense pas que vous pourriez soutenir que cela maintient la paix et la sécurité.
    Merci pour cette réponse, madame Momani.
    Vous avez parlé des violations des droits de la personne en Irak, particulièrement à l'encontre de la minorité kurde. Voici la conclusion d'Affaires mondiales Canada à ce sujet, à la page 14 de son rapport:
Sur la foi de ce qui suit, et après un examen des rapports de l'ONU et d'autres sources ouvertes, le Ministère estime qu'il n'y a pas de risque sérieux que les exportations canadiennes de marchandises et de technologies militaires vers la Turquie soient utilisées pour la commission ou pour faciliter la commission de violations graves du [droit international humanitaire].
    Cela m'apparaît être une conclusion différente de celle que vous venez de nous présenter concernant la minorité kurde.
    Autre élément intéressant dans ce rapport, le ministère conclut aussi que ces exportations militaires ne mettraient pas en péril la paix et la sécurité. Je cite encore une fois le rapport:
... dans l'ensemble, les exportations canadiennes de marchandises et de technologies militaires vers la Turquie contribuent à la paix et à la sécurité régionales, malgré certains cas récents qui justifient certaines préoccupations.
    Le ministère conclut enfin ce qui suit:
Rien n'indique que les exportations canadiennes de marchandises et de technologies militaires vers la Turquie aient un effet important sur la déstabilisation de la région.
    Il semble y avoir une contradiction entre certaines des conclusions du rapport et les événements survenus à notre connaissance au cours des deux dernières années dans cette région.
    Je vous soumets simplement que l'ensemble du processus d'évaluation des risques et d'approbation de ces licences semble déficient à Affaires mondiales Canada.
(1700)
    Monsieur Chong, je crois que nous devons mettre l'accent...
    Je vous demanderais d'être bref, car il nous reste très peu de temps.
    Vous pouvez répondre, monsieur Leuprecht.
    Nous devons nous intéresser d'abord et avant tout à la feuille de route de chaque pays concerné pour ce qui est de l'utilisation de nos équipements et de ceux qui sont fournis par nos partenaires multilatéraux afin de maintenir l'intégrité du système multilatéral de contrôle des exportations.
    Merci beaucoup, monsieur Chong.
    Monsieur Fonseca, vous avez la parole pour les six prochaines minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à nos témoins.
    Les témoins de notre premier groupe nous ont indiqué qu'Affaires mondiales Canada analyse chaque année plus de 6 000 demandes de licences d'exportation. Ils nous ont également précisé que cette analyse est des plus exhaustive. Il y a des politiques et tout un processus en place à cette fin. D'après ce que nous avons pu entendre, tout cela semble très rigoureux.
    J'aimerais que l'un ou l'autre de nos témoins puisse nous dire combien d'autres pays ont recours à un mécanisme indépendant de contrôle des ventes et des licences pour les exportations militaires. Combien de pays en font autant?
    Que voulez-vous dire exactement par mécanisme indépendant de contrôle?
    Je fais référence au mécanisme dont nous ont parlé les gens d'Affaires mondiales Canada.
    Est-ce que d'autres pays analysent ces demandes de licences en tenant compte des répercussions sur les droits de la personne?
     Comme vous le savez sans doute, il existe actuellement quatre régimes internationaux de contrôle des exportations d'armes auxquels vient s'ajouter la mesure importante que représente le Traité sur le commerce des armes. Parmi ces régimes, il faut noter l'Arrangement de Wassenaar qui établit les normes de référence guidant tous les pays parties à ces régimes dans leur évaluation des demandes de licences d'exportation.
    En fin de compte, chaque pays peut interpréter à sa guise ces normes de référence, et chacun d'eux accorde — dans les limites de ce pouvoir souverain — une marge de manœuvre considérable à son ministre ou à son secrétaire d'État responsable des affaires étrangères. Cela s'explique du fait que les exportations d'armes et de technologies de défense constituent un instrument de politique étrangère pour tous ces pays.
    Nous savons bien sûr que le ministre a annulé les licences d'exportation vers la Turquie, ce qui n'est pas rien.
    Est-ce que d'autres pays ont pris des mesures aussi radicales? Avez-vous pu observer des actions semblables ailleurs dans le monde?
    Nous avons vu par exemple la France adopter une approche musclée qui s'appuie également sur des motifs politiques, à savoir les intérêts géostratégiques du pays, sa perception de la Turquie en tant qu'acteur régional et son analyse de la mesure dans laquelle ont peut compter sur la Turquie à titre de pays membre de l'OTAN.
    D'autres pays se sont inspirés des mêmes normes de référence pour en arriver à des conclusions assez différentes, et ce, à des moments différents, concernant les licences d'exportation de matériel de défense vers la Turquie.
    Madame Momani, nous avons mené une étude sur la situation au Haut-Karabakh. On nous a alors indiqué que les Azerbaïdjanais avaient totalement supplanté les Arméniens grâce aux ressources à leur disposition et aux sommes d'argent qu'ils étaient en mesure d'investir dans ce conflit.
    Pourriez-vous nous en dire plus long au sujet de la situation relative de l'Azerbaïdjan et de l'Arménie?
    Certainement.
    Vous y avez vous-même fait allusion.
(1705)
    Oui. Merci.
    L'Azerbaïdjan a acquis une certaine quantité de systèmes d'armes depuis 10 ou 15 ans. En fait, plusieurs se demandaient pourquoi on en stockait autant. Il semblerait que ce soit... Les observateurs ont pensé que l'Azerbaïdjan voulait tenter de reprendre la mainmise sur la région.
    Ils ont beaucoup investi dans cet exercice. Ils ont bien sûr surtout acquis des technologies israéliennes. Il y a quelques éléments de technologie turque, mais la plus grande partie de leurs systèmes d'armes sont israéliens.
    Selon moi, l'Azerbaïdjan est un pays qui jouit d'une grande richesse et qui essaie certes de plus en plus de gagner la faveur de sa base nationaliste. Le président est assurément nationaliste, et c'était une guerre très prisée par la plupart des Azéris.
    Ils ont importé des dizaines, des centaines, voire des milliers d'armes de différents endroits du monde, comme Israël que vous avez mentionné. On parle donc de milliers d'armes en provenance de nombreux pays, et nous sommes en train de discuter de quelques caméras importées du Canada.
    Monsieur Kilford, est-ce que la Turquie aurait pu importer pour ses drones des systèmes de capteurs semblables en provenance d'autres pays?
    Oui. Il y a d'autres fabricants, mais les Turcs préfèrent les capteurs Wescam. Cette entreprise s'est de toute évidence emparée d'une large part du marché mondial en raison de la très grande qualité de son produit. Je crois cependant les Turcs tout à fait capables de concevoir leurs propres systèmes. Je pense d'ailleurs qu'ils sont en voie de le faire.
    Les Turcs peuvent bien affirmer qu'ils peuvent se passer de nos produits, mais le fait est qu'ils en ont sans doute encore besoin. Ils peuvent prétendre qu'ils disposent déjà de cette capacité, mais je pense qu'ils seraient ravis de pouvoir installer de nouveau les capteurs Wescam sur leurs drones et continuer de les utiliser. Ils pourraient donc effectivement chercher d'autres fournisseurs.
    Comme vous avez pu l'entendre, monsieur Kilford, ce ne sont pas les armes qui manquent sur notre planète.
    Comme vous connaissez bien la région, pourriez-vous nous donner quelques exemples des programmes de coopération entre le Canada, l'OTAN et la Turquie?
    On ne peut pas dire qu'il y a coopération sur de nombreux tableaux, mais on peut penser à l'entraînement des forces armées irakiennes aux quartiers généraux de l'OTAN à Bagdad. Depuis deux ans, c'est le Canada qui est aux commandes de cette opération pendant que la Turquie est le deuxième pays responsable. Nous travaillons en étroite collaboration avec les Turcs. Je serais toutefois porté à dire qu'il n'y a pas énormément d'exemples semblables de coopération.
    Monsieur Fonseca, il vous reste du temps pour une question et une réponse, mais il faudra que ce soit très bref.
    Je crois que je vais m'arrêter ici, monsieur le président. Merci.
    Excellent. Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Bergeron, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier nos témoins de leurs témoignages fort éclairants pour les travaux de ce comité. Ils viennent mettre en perspective, si je puis dire, les points de vue qui nous ont été exprimés par les fonctionnaires d'Affaires mondiales Canada, il y a quelques instants.
    Deux éléments semblent se dégager des propos de ces derniers. D'abord, il est évident que la difficulté liée à nos ventes d'armes à un pays comme la Turquie tient au fait que celle-ci est membre de l'OTAN. Si ce n'était pas le cas, ce serait infiniment plus facile pour le Canada de statuer sur les ventes d'armes à ce pays.
    L'autre élément, c'est le fait qu'on ne perçoit pas encore très bien le changement qui est en train de s'opérer dans ce pays. Contrairement à ce que Mme Momani nous a dit, monsieur Leuprecht, dans votre document, vous nous indiquez que l'intervention turque en Libye est, somme toute, en porte-à-faux avec les politiques de l'OTAN. C'est donc dire que la Turquie a adopté, par le passé, une politique étrangère souveraine dont les objectifs divergent de ceux de l'OTAN. C'est ce qu'on constate. Selon ma lecture, c'est également le cas en Syrie, où les Turcs se sont notamment retournés contre les Kurdes, qui avaient été nos alliés contre Daech.
    J'aimerais que vous nous parliez du changement de paradigme qui semble être en train de s'opérer quant au fait que la Turquie, qui a toujours été un allié un peu turbulent au sein de l'OTAN, le devient toujours davantage avec le changement qui s'opère à l'intérieur du pays.
     La Turquie poursuit une politique étrangère révisionniste et hégémonique qui, à certains moments, s'accorde avec nos intérêts et ceux de l'OTAN, mais à d'autres moments, c'est le contraire. La Turquie ne demande pas à l'OTAN et au Canada de lui dire quelle politique poursuivre, comme on le voit en Libye, par exemple. C'est donc par hasard que nos intérêts tantôt s'accordent, tantôt ne s'accordent pas.
    C'est donc cela qu'il faut considérer. La Turquie agit souvent de façon beaucoup plus souveraine et unilatérale que la plupart des autres pays membres de l'OTAN. On s'en rend compte au sein de notre ministère des Affaires étrangères, puisque la Turquie, depuis plusieurs années, fait l'objet d'enquêtes beaucoup plus précises quant aux permis d'exportation d'armes que d'autres membres de l'OTAN.
    Ce que vous disiez est donc déjà pris en considération par le ministre et les fonctionnaires dans le cadre de l'octroi des permis.
(1710)
    Je ne sais pas si...

[Traduction]

    Est-ce que je pourrais répondre également à cette question?
    Je vous en prie.
    Merci.
    Je pense qu'il faut aussi considérer la situation en Libye en 2011. C'est l'OTAN qui est intervenue en Libye. C'est un général canadien qui était aux commandes de cette opération de l'OTAN. Comme nous le savons, le pays s'est effondré et s'est retrouvé en pleine guerre civile. Voilà que nous avons à Tripoli un gouvernement reconnu par l'OTAN qui est encerclé et presque renversé par le général Haftar, un présumé seigneur de guerre. La Turquie est intervenue. Les drones équipés de la technologie canadienne ont permis de renverser la vapeur, si bien qu'il y a maintenant un cessez-le-feu et des élections, ce qui pourrait nous permettre de voir les choses d'un oeil positif.
    En parlant de leurs actions en Syrie à l'encontre des forces des YPG kurdes, les Turcs soutiennent simplement qu'il s'agit d'un prolongement du PKK, une organisation que le Canada considère comme étant un groupe terroriste. Les Turcs veulent surtout dans l'immédiat protéger leurs propres intérêts. Je comprends qu'ils souhaitent utiliser ces drones, car cela leur permet d'assurer la sécurité de leur pays.
    Je suis un peu inquiet d'entendre M. Kilford établir un parallèle semblable, car l'intervention de l'OTAN s'inscrivait de toute évidence dans le cadre d'un pacte international alors que ce n'était pas le cas pour celle de la Turquie. Il existe au contraire un désaccord majeur entre la Turquie et l'Union européenne, ainsi qu'entre des pays comme la Turquie et la France, relativement à différents éléments allant de l'intervention turque jusqu'aux exportations d'armes turques vers la Libye.
    Je crois qu'il y a certaines limites aux parallèles que l'on peut établir dans ce contexte.
    Je veux seulement ajouter que la France avait elle aussi ses propres intérêts à défendre en Libye. C'est ce qu'on a pu observer avec le déploiement de bâtiments militaires dans la Méditerranée.
    J'estime qu'il faut surtout comprendre qu'il y a tout un contexte dont nous devons tenir compte lorsqu'un pays vend des armes au Moyen-Orient.

[Français]

    Le ministre des affaires étrangères de la Turquie laisse entendre que le Canada a une politique de deux poids, deux mesures, puisqu'il ne voit aucune objection à exporter des armes vers des pays qui sont militairement impliqués dans la crise du Yémen, où se déroule l'une des plus grandes tragédies humanitaires du siècle.
    Doit-on lui donner raison?

[Traduction]

    Je vous demanderais de répondre très brièvement.

[Français]

    Je crains que, encore une fois, ce ne soit pas forcément équivalent, parce que l'Arabie saoudite a donné des assurances, ainsi que des moyens de les vérifier, quant à l'exploitation des armes et n'a pas menti au sujet de ces assurances comme la Turquie l'a fait. Selon ce que je sais, à ce jour, au sujet de l'utilisation des armes canadiennes exportées vers l'Arabie saoudite, celles-ci ont été utilisées conformément aux conditions selon lesquelles les permis d'exportation avaient été octroyés.
    Merci beaucoup, monsieur Bergeron.

[Traduction]

    Notre dernier intervenant cet après-midi sera M. Harris.
    À vous la parole pour les six prochaines minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins qui sont des nôtres aujourd'hui pour nous aider dans notre étude.
    J'ai une question pour Mme Momani.
    Vous avez indiqué que le recours aux drones est caractéristique de la guerre moderne en raison de leur coût peu élevé et de leur facilité d'utilisation par des gens qui ne pourraient pas sans cela avoir accès à des équipements militaires complets.
    Ne craignez-vous pas que cela crée encore davantage d'instabilité dorénavant compte tenu de la possibilité d'acquérir ces drones qui permettent de causer des dommages à un adversaire sans avoir à mettre en péril ses propres troupes?
    Nous savons qu'on les utilise pour des assassinats ciblés qui peuvent très bien viser des civils. Est-ce que la prolifération de cette technologie à l'échelle planétaire soulève des préoccupations quant au respect des droits de la personne? Y a-t-il quoi que ce soit que nous puissions y faire?
(1715)
    Monsieur Harris, je vous prie de m'excuser un instant. Je vous demanderais pour votre prochaine question de soulever quelque peu votre microphone afin de faciliter la tâche à nos interprètes qui ont du mal à bien vous entendre.
    Nous allons d'abord écouter la réponse de Mme Momani. Merci.
    C'est une bonne question. C'est effectivement une technologie qui change la donne, mais elle se distingue uniquement du fait qu'elle est nouvelle. C'est une technologie émergente. De nombreuses questions vont se poser concernant l'utilisation des drones dans à peu près tous les aspects de nos existences. C'est vraiment une nouvelle réalité qui nous attend à bien des égards, de la livraison des colis par Amazon jusqu'à la manière dont les guerres sont menées.
    Les drones deviennent de plus en plus efficaces. Ils font partie de ces équipements technologiques que l'on peut sans cesse miniaturiser et alléger davantage en les dotant notamment de piles ayant une plus longue durée de vie et de caméras et de capteurs toujours plus performants. Je pense que cela va certes marquer un tournant. Ainsi, la barrière des coûts qui empêchait certains pays de déployer des forces aériennes à part entière est en train de s'estomper du fait que cette technologie est accessible à un prix très raisonnable.
    Comme je le soulignais précédemment, les Chinois sont aussi désormais dans la course. Je n'irais pas jusqu'à dire qu'ils ont dépassé les pays occidentaux, mais ils n'en sont pas loin. Je ne crois pas que les Chinois aient à composer — et j'en suis pas mal persuadée — avec des mesures de contrôle liées aux droits de la personne ou aux exportations pour cette technologie, comme c'est d'ailleurs le cas pour n'importe quelle technologie qu'ils souhaitent vendre.
    Il est donc important que nous ne perdions pas de vue cette nouvelle caractéristique de la guerre moderne. Merci.
    Monsieur Kilford, je tiens à vous remercier pour les services rendus à notre pays.
    Je ne sais pas si vous allez pouvoir me répondre à ce sujet, mais j'ai une question d'ordre technique pour vous concernant les drones utilisés dans le Haut-Karabakh. Vous avez indiqué que ces drones peuvent notamment servir à la désignation d'objectifs. S'agit-il simplement de désigner des objectifs que l'on pourra atteindre par d'autres moyens, ou est-ce que ces drones sont équipés d'armes leur permettant de viser directement les cibles en question?
    Les drones Bayraktar TB2 peuvent survoler un secteur pendant un maximum de 25 heures. Ils sont équipés de fonctions de surveillance, mais aussi de quatre points d'accrochage pour des armes. Il leur est ainsi possible de lancer une roquette ou un missile vers une cible qu'ils ont détectée. C'est vraiment du tout-en-un.
    J'ai une question pour M. Leuprecht concernant les notes d'allocution qu'il nous a transmises avant la séance.
    Vous y faites référence aux informations déjà du domaine public à propos du rôle joué par la Turquie et des autres activités qui avaient cours:
S'agissant d'information publiquement connue, il ne fait guère de doute que l'évaluation interministérielle des risques fournie au ministre dans ce dossier aura signalé que l'octroi de cette licence particulière comportait des risques élevés. À l'époque, la Turquie menait déjà des exercices militaires avec l'Azerbaïdjan et encourageait ce dernier à changer le statu quo par une action militaire.
    Vous faites ensuite le constat suivant:
Le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire en approuvant néanmoins la licence.
    Tout indique que vous estimez que le ministère n'a pas bien évalué les risques. Cependant, si l'on en croit un autre document qui nous a été transmis — un mémoire pour intervention daté du 2 septembre —, il semblerait que le ministère ait indiqué avoir satisfait aux exigences du Traité sur le commerce des armes et recommandait, en prévoyant toutefois certaines exceptions, que l'on approuve la délivrance des licences en réponse aux demandes présentées en annexe. Il me semble donc que l'on a approuvé ces demandes.
    J'en conclus par conséquent que vous devez juger que l'évaluation faite par le ministère était inadéquate.
(1720)
    L'évaluation du ministère était sans doute fondée sur les renseignements à sa disposition. Je pense que le ministère aurait peut-être pu être mieux renseigné, notamment quant aux transferts illicites de technologies, s'il avait pu compter sur des gens — des diplomates — sur place. Comme d'autres témoins l'ont fait valoir, cette technologie est extrêmement préoccupante du fait qu'elle peut être utilisée aussi bien pour des missions de surveillance et d'aide humanitaire que dans des situations de conflit.
    C'est la raison pour laquelle il faut miser à fond sur l'évaluation stratégique. Il est également souhaitable de mettre à contribution cette technologie pour stabiliser un monde fortement instable par ailleurs. La solution ne consiste donc pas simplement à ne plus vendre cette technologie à qui que ce soit.
    Je suis conscient qu'il y a une quantité considérable de licences qui sont demandées et octroyées, mais nous savons pertinemment — ce qui n'est pas le cas de tout le monde, mais c'est bien connu de ceux qui s'intéressent à ces enjeux — que les capteurs en question ont été utilisés par Bayraktar pour son drone et qu'ils lui ont été vendus à cette fin. Les représentants du ministre nous ont parlé de leurs discussions soutenues et de leurs liens étroits avec le fabricant, ce qui montre bien qu'ils savent de quoi il en retourne.
    Recommanderiez-vous que le ministère prenne des précautions supplémentaires dans l'évaluation de telles demandes, surtout dans des situations comme celle de l'été 2020 où des sources publiques ont confirmé que des drones avaient été vendus à l'Azerbaïdjan?
    Veuillez répondre très brièvement.
    Ces drones sont dotés non seulement d'équipements technologiques canadiens, mais aussi d'outils technologiques provenant de l'Allemagne et des États-Unis. Ils sont ensuite fabriqués sous licence en Turquie, ce qui donne à penser qu'il pourrait être possible de mieux coordonner les choses. C'est une occasion qui s'offre à nous. Les informations dont nous disposons actuellement concernant les comportements de la Turquie seraient certes prises en compte dans une éventuelle évaluation des risques pour des licences d'exportation vers ce pays. À mes yeux, la décision prise par le ministre semble indiquer qu'il a pris ces informations en considération.
    Merci beaucoup, monsieur Leuprecht.
    Merci, monsieur Harris.

[Français]

     Chers collègues, au nom du Comité, j'aimerais remercier nos témoins de cet après-midi de leur expertise et de leurs témoignages.

[Traduction]

    Un grand merci d'avoir été des nôtres aujourd'hui. Nous avons eu des échanges très productifs.
    Vous pouvez maintenant quitter cette séance que nous devons poursuivre un moment pour discuter de la motion de M. Harris. Merci de votre participation. Faites attention à vous et à bientôt.
    Pour reprendre la discussion que nous avions amorcée tout à l'heure, notre greffière vous a transmis à tous la version du 11 mars de la motion qui nous apparaît presque identique à celle présentée par M. Harris. Vous la trouverez dans votre boîte de réception. Vous en aurez ainsi une version dans les deux langues officielles.
    Monsieur Harris, je ne sais pas si vous pourriez relire votre motion avec interprétation. Vos collègues pourraient ainsi suivre et déterminer à quel point les deux motions se recoupent.
    Certainement. Je veux remercier notre greffière d'avoir trouvé si rapidement cette traduction. Je lui en suis très reconnaissant, car mes collègues y ont maintenant accès dans la langue officielle de leur choix. Un grand merci.
    Les deux motions sont très similaires. La première phrase est exactement la même:
Que le Comité rende publics les documents fournis à ce jour par Affaires mondiales Canada, conformément à la motion portant production de documents adoptée le 29 octobre 2020;
    La deuxième phrase de la nouvelle motion se lit comme suit:
et qu'il se réserve le droit d'avoir accès sans entrave aux documents non expurgés demandés aux fonctionnaires d'Affaires mondiales Canada conformément à la motion.
    Merci beaucoup, monsieur Harris.
    Quelqu'un veut débattre de la motion? Veuillez utiliser la fonction « Lever la main » comme nous l'avons fait précédemment.
    Monsieur Oliphant, vous avez la parole.
    Je préférais le libellé de la motion originale, mais comme je ne veux pas prolonger indûment nos discussions, je peux vous dire que cette motion-ci me convient également et que je m'attends à ce que les libéraux votent en faveur.
(1725)
    Quelqu'un d'autre veut débattre de la motion présentée par M. Harris?
    Je ne vois aucune main levée pour l'instant. Je veux seulement m'assurer qu'aucun d'entre vous n'éprouve de problèmes techniques qui l'empêcheraient d'intervenir.
    Comme cela ne semble pas être le cas, je veux vous demander si le Comité souhaite adopter par consentement unanime la motion de M. Harris dans sa forme actuelle. Est-ce que quelqu'un s'y oppose?
    (La motion est adoptée)
    Le président: Je veux vous remercier de l'indulgence dont vous avez fait montre cet après-midi. Nous finissons un peu plus tôt que normalement, mais nous avons eu amplement le temps de discuter avec nos témoins.
    Faites bien attention à vous.
    La séance est levée.
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