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Je déclare la séance ouverte. Bienvenue à la 26
e réunion du Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 19 octobre 2020, le Comité se réunit dans le cadre de son étude sur l'état du saumon du Pacifique.
Pour ceux qui participent virtuellement, j'aimerais réitérer quelques règles à suivre. Les membres et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont disponibles pour cette réunion. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, l'anglais ou le français. Avec la dernière version de Zoom, vous pouvez désormais vous exprimer dans la langue de votre choix sans avoir à sélectionner le canal linguistique correspondant. Vous remarquerez également que, si vous voulez prendre la parole ou signaler quelque chose au président, la fonction « Lever la main » de la plateforme se trouve maintenant dans la barre d'outils principale, ce qui la rend plus accessible.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins. Nous accueillons aujourd'hui, du ministère des Pêches et des Océans, Kyle Garver, chercheur scientifique, Région du Pacifique; John Holmes, chef de division, Division de l'évaluation des stocks et de la recherche; Simon Jones, chercheur scientifique, Région du Pacifique; Kristi Miller-Saunders, chercheuse scientifique, Région du Pacifique; Jay Parsons, directeur, Division des sciences de l'aquaculture, de la biotechnologie et de la santé des animaux aquatiques; Rebecca Reid, directrice générale régionale, Région du Pacifique et Andrew Thomson, directeur régional - Science, Région du Pacifique.
Nous allons maintenant passer aux déclarations liminaires.
Madame Reid, vous pouvez commencer par les présentations. Ensuite, je crois que nous allons entendre au moins une autre personne du ministère.
Nous vous donnerons la parole lorsque vous serez prête.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Bonjour à tous les membres du Comité.
Oui, je m'appelle Rebecca Reid. Je suis la directrice générale régionale de la région du Pacifique. Mes collègues et moi sommes très heureux de cette occasion qui nous est donnée de comparaître devant vous au nom du ministère des Pêches et des Océans, le MPO.
[Français]
Tout d'abord, nous voulons vous remercier de vous être intéressés à cette question extrêmement importante.
[Traduction]
Notre objectif aujourd'hui est de vous fournir le plus de renseignements possible pour appuyer vos délibérations.
[Français]
Nous sommes particulièrement heureux d'avoir l'occasion de discuter des mesures prises par le ministère pour conserver et reconstituer les populations de saumon du Pacifique.
[Traduction]
Au cours des 10 prochaines minutes, je vais vous présenter les témoins et décrire leurs domaines d'expertise respectifs. J'inviterai ensuite Mme Kristi Miller-Saunders, à décrire plus en détail son domaine de recherche, puis je terminerai par quelques dernières observations.
Andrew Thomson, que beaucoup d'entre vous ont déjà rencontré, a récemment été nommé directeur régional des sciences. Avant cela, il a été directeur régional de la gestion des pêches pendant plus de six ans et il a occupé d'autres postes de direction, dont notamment celui de directeur de la gestion de l'aquaculture.
Jay Parsons, est le directeur de la Direction des sciences de l'aquaculture, de la biotechnologie et de la santé des animaux aquatiques. M. Parsons travaille depuis plus de 30 ans dans le domaine de l'aquaculture, tant du côté de la recherche que de la gestion de ce type de culture.
John Holmes, qui est chef de la Division de l'évaluation des stocks et de la recherche, est actuellement responsable des enquêtes, des activités et de la prestation de conseils concernant l'évaluation des stocks pour tous les poissons marins, les invertébrés et le saumon du Pacifique.
Kyle Garver est chercheur scientifique à la Division du diagnostic aquatique, de la génomique et de la technologie. Les recherches de M. Garver portent sur l'identification et la caractérisation des virus des poissons à nageoires, et elles nous aident à mieux comprendre le mode de transmission de ces virus et leur potentiel pathogène.
Simon Jones est chercheur scientifique à la Division du diagnostic aquatique, de la génomique et de la technologie. Ses recherches portent sur les maladies des salmonidés sauvages et d'élevage.
Kristi Miller-Saunders est chef de la section de la génétique des saumons. Ses recherches portent sur la biologie moléculaire, la génétique et la génomique, ainsi que sur l'écologie et la santé des poissons.
J'inviterai maintenant Mme Miller-Saunders à vous faire un court exposé, à la suite duquel je reviendrai avec quelques dernières observations.
Merci.
:
Je vous remercie de cette occasion de m'adresser à vous.
Je m'appelle Kristi Miller-Saunders. Je suis titulaire d'un doctorat de l'Université Stanford et je suis chercheuse scientifique au MPO depuis 1994. Mes domaines de spécialisation sont la biologie moléculaire, la génétique et la génomique, ainsi que l'écologie et la santé des poissons. J'ai passé toute ma carrière à étudier le saumon au MPO, ainsi que les enjeux relatifs à la santé et au déclin du saumon au cours des 20 dernières années. Au moins 75 des 140 publications produites par mon programme portent sur le stress et les maladies du poisson.
En 2012, j'ai mis au point l'Initiative stratégique pour la santé du saumon en collaboration avec M. Brian Riddell afin de remédier aux lacunes évidentes concernant les données sur les maladies infectieuses dont a parlé l'enquête Cohen. Cette initiative était un vaste projet de plusieurs millions de dollars qui visait à clarifier le rôle des maladies infectieuses comme facteur de déclin du saumon, et à identifier les agents pathogènes qui compromettent la survie de ce poisson en Colombie-Britannique.
Prenant en considération tous les saumons de la Colombie-Britannique — le saumon sauvage, les stocks mis en valeur et le saumon d'élevage —, l'initiative a évalué plus de 30 000 individus et est parvenue à détecter plus de 50 virus, bactéries et parasites associés aux maladies du saumon dans le monde entier. Les progrès technologiques réalisés dans le domaine de la surveillance et du diagnostic des maladies dans le cadre de cette initiative ont fourni une nouvelle base pour l'étude des processus pathologiques complexes chez les poissons échantillonnés vivants, notamment un système de surveillance moléculaire à haut débit des agents infectieux, une approche novatrice pour la résolution des nouveaux virus et des maladies virales, ainsi que pour la visualisation des virus dans les tissus, et la mise au point d'un outil holistique appelé Fit-Chips qui peut jauger les états particuliers de stress et de maladie chez le saumon à partir de rien de plus qu'une petite pince brachiale.
Le financement du programme de l'Initiative stratégique pour la santé du saumon s'est terminé à la fin du mois de mars 2021. Le programme a permis d'obtenir un portrait plus précis du rôle des agents pathogènes dans le recul des taux de survie des saumons sauvages de la Colombie-Britannique. Au nombre des principales réalisations du programme, mentionnons la découverte de plus d'une douzaine de virus non caractérisés auparavant qui infectent le saumon dans les lieux d'élevage, dans les écloseries et à l'état sauvage. Aucune détection de plusieurs virus préoccupants sur le plan réglementaire n'a été faite, ce qui corrobore les preuves fournies par l'Agence canadienne d'inspection des aliments montrant que ces agents ne sont pas présents en Colombie-Britannique.
L'identification de plusieurs agents présentant des probabilités accrues de transmission et de maladie lorsque la température de l'eau est plus élevée laisse entendre que les risques de maladie pourraient continuer à s'aggraver avec le réchauffement climatique. On parle notamment de l'orthoréovirus pisciaire chez le saumon d'élevage et le saumon sauvage de la Colombie-Britannique, d'une inflammation du cœur et des muscles squelettiques chez le saumon atlantique d'élevage — la première observation documentée en milieu d'élevage — et d'une maladie différente mais apparentée associée à l'orthoréovirus pisciaire chez le saumon quinnat d'élevage de la Colombie-Britannique.
Chez les saumons juvéniles, en utilisant des données d'infection couvrant une décennie et des approches traditionnelles de modélisation de l'évaluation des stocks, on a pu identifier plusieurs agents infectieux qui montrent l'existence de liens avec les fluctuations annuelles des taux de survie en mer des saumons Chinook, coho et sockeye.
Il s'agit de l'analyse la plus complète de l'incidence des infections sur les populations de saumons sauvages migrant naturellement. Deux des six agents présentant des associations cohérentes entre les espèces présentent également des liens avec la transmission par les élevages, ce qui nous renseigne sur les risques que l'élevage en filets ouverts fait courir au saumon sauvage.
Les agents les plus remarquables sont l'orthoréovirus pisciaire, ou RVP, qui est associé aux fluctuations annuelles des taux de survie et au faible poids des saumons quinnat et coho, l'incidence de l'infection étant la plus élevée dans un rayon de 30 kilomètres autour des fermes salmonicoles. Des études phylogénétiques montrent que le RVP a été échangé à plusieurs reprises entre les saumons d'élevage et les saumons sauvages en Colombie-Britannique.
La bactérie Tenacibaculum maritimum, responsable d'une mortalité importante dans les élevages de saumon, est fortement associée aux fluctuations annuelles des taux de survie et au faible poids des saumons rouges, quinnat et coho. Pour le saumon rouge, l'incidence la plus élevée d'infection a été constatée chez les individus échantillonnés près des fermes des îles Discovery.
Le petit parasite de la peau Ichthyophthirius multifiliis qui infecte le saumon en eau douce montre un effet de transfert marqué sur le taux de survie et le faible poids des saumons rouges, quinnat et coho dans l'océan, ce qui pourrait indiquer les années au cours desquelles des individus en mauvaise santé rejoignent l'océan.
Un nidovirus du saumon du Pacifique récemment découvert, apparenté aux coronavirus respiratoires des mammifères, infecte les tissus respiratoires des branchies des saumons relâchés par certaines écloseries fédérales. Des liens préliminaires ont été décelés avec le taux de survie chez le quinnat et le coho.
Un atelier international virtuel s'est tenu à la fin du mois de mars afin de fournir des conseils d'experts sur les prochaines étapes du programme, qui, pour peu que des installations et des fonds soient trouvés, comprendra des études de provocation de maladies sur des agents sous-étudiés.
Notre programme passe maintenant à l'application des Fit-Chips pour mettre au jour le rôle des facteurs de stress cumulatifs sur la survie du saumon. Cet outil peut révéler si le saumon subit un stress de salinité, un stress de faible teneur en oxygène ou un stress thermique, et s'il est atteint d'une maladie virale. Il peut également prédire si le saumon est susceptible de mourir dans les 72 heures ainsi que l'ampleur du stress cumulatif qu'il subit, ce qui permet de prédire une survie plus faible sur des périodes plus longues.
Grâce à cet outil, nous pouvons évaluer le rôle des changements climatiques sur la santé des saumons et identifier les environnements et les années où les saumons sont les plus menacés. Plus important encore, notre objectif est d'utiliser cet outil pour déterminer les facteurs de stress qui, s'ils sont atténués, pourraient augmenter la survie et la productivité de nos saumons sauvages. Le succès du programme a suscité une demande pour la technologie et l'approche qui ont été utilisées. En effet, les chercheurs de par le monde tentent de comprendre l'origine de problèmes similaires chez le saumon, notamment en Norvège, aux Pays-Bas et aux États-Unis.
Nous travaillons également en étroite collaboration avec de nombreuses Premières Nations de la Colombie-Britannique et nous partageons certains outils avec le premier laboratoire de génomique dirigé par des Autochtones au Canada.
Merci.
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Merci, madame Miller-Saunders.
[Français]
Comme vous le savez, le mandat principal du MPO est de gérer les pêches du Canada et de protéger nos eaux.
[Traduction]
Conformément à ce mandat, la protection, la conservation et la restauration des stocks du saumon sauvage du Pacifique sont une de nos grandes priorités.
Le saumon du Pacifique est menacé, et les problèmes auxquels il est confronté sont nombreux et complexes. Des événements imprévus comme le glissement de terrain de Big Bar sont venus décupler les menaces qui pèsent sur ces populations.
Le ministère prend des mesures importantes en se guidant sur la Politique du Canada concernant le saumon sauvage et son plan de mise en œuvre, ainsi que sur les 75 recommandations de la Commission Cohen. Concernant l'aquaculture des poissons marins, le ministère continue de s'appuyer sur les meilleures données scientifiques disponibles et sur un système de réglementation robuste pour gérer les risques à l'endroit des stocks de poissons sauvages et des écosystèmes.
Nous avons fait un certain nombre d'investissements stratégiques, dont une somme de 142 millions de dollars — avec la province de la Colombie-Britannique — destinée au Fonds de restauration et d’innovation pour le saumon de la Colombie-Britannique, 5 millions de dollars pour soutenir le travail de la Fondation du saumon du Pacifique et 15 millions de dollars pour mettre en œuvre les nouveaux engagements du Traité sur le saumon du Pacifique en matière d'évaluation des stocks, de marquage au fil codé et de surveillance des prises.
La lettre de mandat supplémentaire de la comporte l’engagement de « proposer une stratégie [à long terme] sur le saumon du Pacifique et de réaliser notre engagement de conserver et de protéger le saumon sauvage du Pacifique, ses habitats et ses écosystèmes ». Le Budget 2021 a prévu 647 millions de dollars sur cinq ans pour soutenir ce travail.
Au cours des prochains mois, nous appuierons activement la dans l'élaboration et la mise en œuvre de cette initiative, notamment en collaborant étroitement avec nos nombreux partenaires qui travaillent sur la ligne de front pour assurer la conservation du saumon.
[Français]
Nous vous remercions de votre attention. Vos questions seront les bienvenues.
[Traduction]
Merci.
Je vais commencer par vous donner une réponse du point de vue de la Direction des sciences.
Comme vous le savez, le MPO est un ministère à vocation scientifique. Le secteur des sciences au sein du MPO est chargé de produire des avis scientifiques qui contribuent au mandat du ministère. Lorsque des résultats de recherche sont publiés, ils sont certainement pris en compte dans le cadre de notre approche de gestion adaptative.
Plus précisément, nous disposons d'un processus officiel, rigoureux et très solide d'examen par les pairs, à savoir le Secrétariat canadien de consultation scientifique, ou SCCS, qui nous aide à fournir des avis scientifiques officiels aux gestionnaires des ressources du MPO. Dans le cadre de ce processus, nous examinons notamment l'ensemble des publications scientifiques qui sont accessibles. Il ne s'agit pas seulement des activités scientifiques effectuées au sein du ministère, mais bien de toutes les données scientifiques disponibles. Nous en faisons une synthèse. Ces renseignements font ensuite l'objet d'un examen par les pairs dans le cadre d'un processus qui réunit des experts internes et externes chargés d'étudier le tout et de fournir des conseils. Par la suite, ces avis sont communiqués aux gestionnaires du ministère, en plus d'être publiés sur notre site Web.
Il s'agit d'un processus rigoureux et transparent qui permet d'officialiser les avis et de les transmettre aux gestionnaires de l'aquaculture afin qu'ils s'en servent au moment de prendre des décisions.
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Je recommanderais quatre stratégies, la première consistant à investir principalement dans l'habitat, la conservation et les activités de restauration.
Je recommanderais d'apporter des améliorations stratégiques pour aider les stocks préoccupants et, si possible, soutenir la pêche dans les régions pertinentes.
Il faut effectuer des transformations d'envergure dans le secteur des pêcheries afin de miser sur la pêche sélective pour éviter les stocks préoccupants.
Enfin, il faut mettre l'accent sur l'intégration et la collaboration pour assurer le fonctionnement optimal des structures de gouvernance, et ce, tant au sein qu'à l'extérieur du ministère.
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Il nous faut mieux comprendre où se trouvent les goulots d'étranglement et savoir à quels endroits les changements climatiques ont le plus d'effet sur la côte et sur les rivières. Nous savons que dans les réseaux d'eau douce, quand survient une mortalité prématurée chez les saumons adultes qui effectuent un retour, ces derniers meurent probablement là où ils ont été soumis à un stress thermique élevé pendant des périodes prolongées.
Les conditions qui prévalent dans un réseau permettent parfois l'infiltration d'eau froide. C'est évidemment plus courant à proximité de barrages, mais il n'en existe malheureusement pas autant ici que sur le fleuve Columbia. Nous devons toutefois agir sur ce que nous pouvons contrôler, notamment en produisant les poissons les plus robustes possible si nous recourons aux écloseries. Nous savons que les conditions des poissons qui émergent des eaux douces constituent un des facteurs qui permettent de prédire comment ils s'en sortiront dans le milieu marin quand ils sont exposés à divers agents stressants. Si nous pouvons produire des poissons à la santé optimale qui sont prêts à faire la transition en eau salée et qui ont aussi peu d'infections que possible, nous augmenterons la probabilité qu'ils survivent assez longtemps pour soit servir de proies aux épaulards, dans le cas du saumon chinook, soit faire l'objet de la pêche.
Il est certain que les effets des changements climatiques ne se font pas sentir que sur la température; ils touchent la disponibilité pour la pêche, les prédateurs et d'autres éléments. Le problème ne se limite donc pas à cela. À mon avis, toutefois, en identifiant les régions côtières où se trouvent des goulots d'étranglement stressants associés à des changements climatiques, nous pourrons déterminer quelles mesures d'atténuation nous pourrions prendre le long des différentes parties de la côte. Je pense d'ailleurs que la technologie Fit-Chip pourra nous être d'un grand secours à cet égard.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de comparaître cet après-midi.
Le Comité a entendu à maintes reprises que les populations de pinnipèdes hors de contrôle déciment les populations de jeunes saumons du Pacifique, ce qui contribue au déclin constant du stock.
M. Carl Walters a déclaré qu'il a aidé la Pacific Balance Pinniped Society à « élaborer des propositions pour que les Premières Nations puissent pratiquer la chasse au phoque et à l’otarie sur une base commerciale, dans le but de réduire ces populations de pinnipèdes » afin de favoriser le rétablissement du stock de saumon. Il a poursuivi en disant ce qui suit, et je cite: « Ces propositions ont été soumises au ministère il y a deux ans, mais elles sont restées lettre morte; le ministère a invoqué toutes sortes d’excuses pour ne rien faire. »
Qu'advient-il des propositions que la Pacific Balance Pinniped Society a présentées au MPO?
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Je voudrais répondre à cette question, monsieur Mazier. Dans mes anciennes fonctions, j'étais directeur régional de la gestion des pêches et j'étais responsable de la gestion de toutes les pêches, y compris de la gestion des mammifères marins.
Les proposions de la Pacific Balance Pinniped Society ont été évaluées au titre d'une politique sur les nouvelles pêches. Cette politique, qui s'applique à chaque nouvelle pêche, exige que les promoteurs fournissent une quantité substantielle de renseignements pour que nous puissions évaluer adéquatement les répercussions potentielles de la nouvelle pêche non seulement sur le stock ciblé, mais aussi sur l'écosystème et sur d'autres endroits, bien entendu.
Nous avons eu des échanges avec la Pacific Balance Pinniped Society et d'autres groupes ayant fait des propositions pour tenter d'avoir un portrait d'ensemble afin que nous puissions évaluer les répercussions potentielles que la chasse au pinnipède pourrait avoir sur ce mammifère, évidemment, mais aussi sur d'autres stocks. Les pinnipèdes consomment du saumon, comme nous le savons tous. Ils consomment également des espèces proies du saumon et des poissons prédateurs du saumon. Il faut étudier et comprendre entièrement une myriade de répercussions sur l'écosystème pour pouvoir déterminer si, tout bien considéré, une pêche devrait être autorisée ou non.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Ma question s'adresse à Mme Reid.
Madame Reid, si vous ne vous sentez pas suffisamment à l'aise pour répondre, vos collègues peuvent également le faire si elles le souhaitent. J'aimerais bien les entendre aussi.
Ma question concerne les Premières Nations. Nous n'avons pas beaucoup entendu parler du rôle que les Premières Nations devraient jouer dans la conservation du saumon.
Selon vous, quel devrait être le rôle des Premières Nations dans la conservation du saumon?
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Certainement. Je suis convaincue que l'outil FIT-CHIP nous donnera une précision inégalée. Auparavant, nous pouvions mesurer les températures et étudier les conditions environnementales, et supposer qu'elles pouvaient avoir une incidence sur le saumon. Les FIT-CHIP nous permettent d'observer les saumons et de laisser leurs signatures génomiques parler d'elles-mêmes. En fait, nous pouvons savoir à quel moment le saumon subit un stress thermique. Il ne s'agit pas seulement de savoir s'il se trouve dans une zone à température élevée, mais s'il subit le stress de l'environnement.
L'objectif des FIT-CHIP est de mieux comprendre la corrélation entre les différents types de facteurs de stress et les maladies. Si vous pouvez comprendre s'ils sont cumulatifs, ce qui signifie qu'ils s'additionnent, ou s'ils sont synergiques, ce qui signifie qu'ils peuvent être multiplicatifs. Donc, vous avez deux facteurs de stress distincts qui, combinés, sont 10 fois plus puissants. Avec ce genre d'information, vous pouvez vous demander ce qui arriverait si vous pouviez en éliminer un des deux.
Il est impossible d'éliminer tous les facteurs de stress, mais si nous pouvons cibler les facteurs de stress que nous pouvons atténuer et comprendre comment ils interagissent, nous serons mieux informés sur les stratégies à adopter pour inverser le déclin des populations et mettre au point une mesure pour accroître considérablement la survie.
L'outil nous permet en outre de déterminer les habitats les plus stressants. À quel endroit le stress est-il le plus élevé? Nous pouvons ainsi cibler nos mesures d'atténuation sur ces zones. Je sais que nous avons consacré beaucoup d'efforts aux systèmes d'eau douce, mais je ne soulignerai jamais assez que l'environnement marin — où une bonne partie de nos stocks passe jusqu'à un an, lors des premiers stades de croissance — a aussi une importance vitale et que nous devons étudier les interventions possibles dans ce milieu.
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La survie accrue des poissons d'écloserie?
M. Gord Johns: Oui.
Mme Kristi Miller-Saunders: Oui. Nous avons notamment mis au point un outil de mesure des divers types de stress dans les écloseries. Essentiellement, l'élevage du poisson se fait sans habitat. Un des problèmes que l'on constate, c'est que les poissons d'écloserie n'ont pas le même comportement ni le même taux de survie que les poissons sauvages. Si nous pouvions trouver des façons de créer des poissons d'écloserie ayant de très faibles niveaux de stress et des comportements semblables à ceux des poissons sauvages, nous pourrions non seulement augmenter leur potentiel de survie, mais aussi réduire les effets de domestication des écloseries.
La technologie FIT-CHIP pourrait permettre de déterminer la période propice à l'introduction du saumon — des saumoneaux — dans l'environnement marin et ainsi nous assurer qu'ils pourront s'adapter au changement de salinité lors de la très stressante transition à l'environnement marin.
Par exemple, nous pouvons déterminer si les poissons sont dans un état de maladie virale dans l'écloserie. Il s'agit d'une méthode non invasive qui permet l'échantillonnage sans avoir à tuer le poisson. Nous pouvons donc savoir si les pratiques que nous utilisons dans les écloseries sont une source de stress pour les poissons. Dès les premiers indices de stress chez les poissons, nous pouvons mettre en place des mesures d'atténuation des activités afin de trouver la méthode la moins stressante d'élever des saumons et de relâcher des poissons les plus sains et les moins stressés possible.
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Eh bien, nos recherches portent sur la bactérie
Tenacibaculum maritimum, l'agent causal de la pourriture de la bouche dans les exploitations salmonicoles.
Nos travaux de recherche ont eu lieu après le processus du SCCS. Donc, à ce moment-là, ils n'avaient pas autant d'information que nous. Je pense qu'il est important, comme précisé lors de chaque processus du SCCS, de réévaluer le niveau de risque en fonction des nouvelles informations et des nouvelles données scientifiques.
Je m'attends à ce que les nouvelles données issues de notre programme, qui tendent non seulement à montrer l'existence d'un risque pour la population... Dans le cadre du processus du SCCS, ils n'ont pu examiner cet aspect de manière exhaustive à l'aide de données empiriques, tout simplement parce qu'ils n'avaient pas des années de données pour étudier les variations de chacun de ces agents et le taux de survie. Nous avons pu le faire, car nous avions ces données. C'est ce qui fait l'unicité de nos programmes de recherche sur la côte Ouest. Maintenant que nous savons qu'il existe un effet potentiel sur la population, ils doivent réexaminer leur estimation selon laquelle l'impact sur le saumon rouge est de moins de 1 %.
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Personnellement, dans le processus du SCCS, j'ai uniquement participé à l'étude sur le RVP. Mon collègue Andrew Bateman a participé à l'étude sur
Tenacibaculum maritimum. Je ne peux donc pas vraiment me prononcer sur la teneur des discussions lors de ces neuf études.
Je peux vous dire que dans l'étude sur le RVP du processus du SCCS, nous nous sommes beaucoup appuyés sur les études de provocation réalisées par le MPO. Ils étaient réticents à examiner une lacune fondamentale que j'avais signalée à plusieurs reprises dans le cadre du processus du SCCS, soit que ces études de provocation considéraient la mortalité et les signes cliniques de la maladie comme critères définitifs pour déclarer que le RVP cause la maladie. Dans le monde, aucune étude de provocation par le RVP n'a démontré la mortalité, pas même en Norvège.
Pourquoi s'attendrait-on à observer la mortalité et les signes cliniques de la maladie dans une étude de provocation en Colombie-Britannique alors que ce n'est pas le cas dans les études de provocation réalisées en Norvège? Ces études reposent généralement sur les incidents de lésions pathologiques chez les poissons. Les analyses contenues dans les premières études réalisées, sur lesquelles reposait une grande partie du processus du SCCS, ne tenaient pas beaucoup compte des pathologies.
Je pense qu'on a fait fi des incertitudes, en ce sens qu'ils étaient plus certains des résultats des études de provocation qu'ils n'auraient dû l'être.
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Je vous remercie, encore une fois, monsieur le président.
Je dois dire que je suis fort impressionné par la compétence dont font preuve les membres du personnel du MPO qui ont comparu devant le Comité, les chercheurs.
Madame Miller-Saunders, je suis impressionné par votre passion pour les travaux scientifiques que vous effectuez et pour la cause qui nous occupe. J'espère vraiment que les groupes qui se réuniront utiliseront la précieuse ressource qui a été mise en valeur devant ce comité, à savoir le secteur scientifique du MPO... Nous pouvons ne pas être d'accord; nous pouvons ne pas aimer le message, mais il est clair, d'après les témoins que j'ai entendus ici, que vous le présentez de façon impartiale. Je pense que c'est extrêmement important. Les décideurs doivent simplement écouter.
J'aimerais que vous nous donniez votre point de vue, car nous considérons souvent la Norvège comme l'exemple à suivre. Vous avez dit tout à l'heure que nous étions en avance sur la Norvège. J'aimerais savoir à quels égards nous sommes en avance sur elle et dans quels secteurs.
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Je pense que nous devons oublier l'idée que le simple fait de produire plus de poissons dans les écloseries va inverser les déclins. Nous devons comprendre que c'est dans l'environnement marin que la force des classes d'âge de bon nombre de ces populations est déterminée, ce qui signifie que c'est dans l'environnement marin que nous devons envisager de prendre le plus de mesures.
Je pense que le fait d'avoir des pêches sélectives des poissons marqués pour les poissons d'écloserie signifierait que la pression de la pêche sur nos poissons sauvages diminuerait, donc s'il y a suffisamment de poissons à exploiter, alors les poissons exploités ne sont pas nos stocks sauvages.
Je pense que nous devons utiliser les technologies les plus récentes pour comprendre les effets synergiques et cumulatifs de différents types de facteurs de stress et de maladies, ainsi que le rôle que jouent la disponibilité des proies et les effets des prédateurs, afin de prendre des décisions fondées sur des modèles permettant de déterminer les facteurs que l'humain peut modifier pour renverser la tendance.
Je sais qu'on se concentre beaucoup sur les pinnipèdes. Mon laboratoire a réalisé une partie des travaux sur les pinnipèdes, en fait. Les travaux moléculaires appuyant les travaux sur l'alimentation ont été effectués dans mon laboratoire. De nombreux scientifiques du MPO s'interrogent sur les chiffres qui ont été générés en ce qui a trait aux répercussions sur le saumon, parce que bon nombre des premières études étaient axées principalement sur les pinnipèdes qui se nourrissaient dans les estuaires. Toutefois, la grande majorité des pinnipèdes ne se nourrissent pas dans les estuaires. Si l'on peut extrapoler ce qui est observé quant au nombre de saumons qui sont consommés dans les estuaires par rapport au nombre de saumons qui sont consommés dans tout le Sud de la Colombie-Britannique, ces chiffres peuvent ne pas concorder.
Je pense que nous devons être prudents. À mon avis, il est possible que nous cherchions à rejeter le blâme sur la seule chose que nous pouvons contrôler. Je crains que nous fassions fausse route dans cette décision particulière.
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La bactérie
Tenacibaculum. Veuillez m'excuser.
La bactérie Tenacibaculum ne sera pas facile à contrôler, car on la trouve chez les poissons marins, ainsi que chez les saumons et les poissons d'élevage. On ne la trouve pas seulement chez le saumon d'élevage. Le problème concernant le saumon d'élevage, c'est que la quantité de bactéries rejetées dans la colonne d'eau peut être considérablement accrue. Il est certain que les premières études basées sur l'ADNe, soit l'ADN environnemental, indiquent que la bactérie Tenacibaculum est principalement présente à proximité des fermes.
Je pense que nous devons examiner à nouveau les effets des traitements et ce que nous pouvons faire pour réduire la présence de cette bactérie dans ces fermes. Par ailleurs, nos données montrent qu'elle est présente chez les poissons d'élevage avant qu'ils ne soient transportés dans l'océan. Il est probable que lorsqu'ils introduisent de l'eau salée dans les écloseries, ils introduisent déjà cette bactérie dans leurs poissons.
Vous savez, le moyen le plus simple de contrôler... Eh bien, ce n'est peut-être pas facile. Cependant, si l'on filtrait toute l'eau qui entre dans une ferme et toute l'eau qui en sort, comme dans les systèmes de confinement en circuit fermé ou les systèmes terrestres, nous n'aurions aucun de ces problèmes, car le pou du poisson n'infecterait pas les poissons d'élevage parce qu'il serait filtré hors de la colonne d'eau. Par conséquent, il n'aurait pas non plus de répercussions sur nos poissons sauvages. On pourrait faire cela pour beaucoup de choses, comme la bactérie Tenacibaculum. Pour les virus, c'est plus difficile, mais le fait est que si les poissons d'élevage étaient moins stressés, s'ils ne subissaient pas de stress causé par le pou du poisson, tous les traitements et tout ce qui y est associé, il y aurait moins de risque qu'ils développent des maladies. Il n'y aurait pas autant de maladies si nous contrôlions ce qui entre dans les fermes piscicoles et ce qui en sort.