Bienvenue à la 37e séance du Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 21 avril, le Comité se réunit pour examiner la question des permis d'entreprise pour la pêche hauturière.
La séance d'aujourd'hui se déroule en format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre adopté le 25 janvier. Ainsi, les membres peuvent y assister en personne dans la pièce ou à distance par le truchement de l'application Zoom. Les délibérations seront diffusées sur le site Web de la Chambre des communes, ne montrant que la personne qui parle et non l'ensemble du Comité.
Pour assurer le bon déroulement de la séance, je voudrais énoncer quelques règles à suivre. Les membres et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont offerts au cours de la séance. Au bas de votre écran, vous avez le choix entre « parquet », « anglais » ou « français ». Vous pouvez utiliser l'icône « Lever la main » dans la barre d'outils principale de la plateforme si vous voulez prendre la parole ou attirer l'attention de la présidence. Avant de parler, cliquez sur le microphone pour activer votre micro. Quand vous ne parlez pas, votre micro devrait être désactivé.
Je voudrais maintenant accueillir nos témoins d'aujourd'hui. En première heure, nous recevons des représentants du ministère des Pêches et des Océans: M. Adam Burns, directeur général de la gestion des ressources halieutiques; Mme Heather McCready, directrice générale de la conservation et de la protection; et M. David Whorley, directeur des opérations d'émission des permis.
Avant que M. Burns fasse sa déclaration préliminaire, j'aimerais souhaiter la bienvenue à M. D'Entremont, député de West Nova, à notre comité encore une fois. De plus, bien entendu, nous avons également parmi nous le député de Thornhill, M. Kent. Il est bon de vous voir tous les deux aujourd'hui.
Monsieur Burns, lorsque vous êtes prêt, vous pouvez commencer. Veuillez ne pas dépasser cinq minutes, s'il vous plaît.
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Merci, monsieur le président. Bonjour à tous les membres du Comité.
Je m'appelle Adam Burns. Je suis le directeur général de la gestion des ressources halieutiques à Pêches et Océans Canada. Comme vous l'avez dit, je suis accompagné de Heather McCready, directrice générale de la conservation et de la protection; et de David Whorley, directeur des opérations d'émission des permis.
Nous sommes ici aujourd'hui dans le but de soutenir l'étude que le Comité mène sur les pêches hauturières, notamment les processus d'émission des permis et de transferts de quotas. Nous nous réjouissons de cette occasion qui nous a été donnée.
J'aborderai brièvement certaines des questions qui pourraient être liées à cette étude et j'espère que nous serons en mesure de vous fournir davantage de détails au cours de la discussion.
La pêche hauturière dans l'Est du Canada comprend les navires de plus de 100 pieds de longueur. Il y a actuellement 97 permis de pêche hauturière dans l'Est du Canada et l'Arctique, qui représentent environ 37 % des débarquements totaux dans la région.
[Français]
Sur la côte Est, le ministère reste déterminé à soutenir la propriété canadienne. Dans ce cadre, il examine les achats d'entreprises de pêche afin de s'assurer que l'exigence de propriété, qui veut qu'une entreprise soit détenue à au moins 51 % par des intérêts canadiens pour être admissible à recevoir un permis de pêche, est respectée.
Selon la Politique d'émission des permis pour la pêche commerciale dans l'Est du Canada, si des intérêts étrangers acquièrent plus de 49 % des actions ordinaires d'une société canadienne détenant des permis de pêche, cette société ne pourra renouveler ces permis au moment de leur expiration.
[Traduction]
En outre, la réglementation prévoit que s'il y a modification des intérêts qui contrôlent une société détenant un permis, Pêches et Océans Canada doit en être informé dans les 15 jours suivant la modification.
L'examen de propriété exige que la société titulaire du permis et toutes les sociétés mères qui détiennent une participation majoritaire dans cette société appartiennent majoritairement à des intérêts canadiens. L'intention ici est d'empêcher que des intérêts étrangers prennent le contrôle effectif de sociétés détenant des permis de pêche hauturière.
Alors que, sur la côte Est, les permis de pêche hauturière sont délivrés à des sociétés qui peuvent désigner divers navires pour pêcher en vertu du permis, un régime de délivrance de permis rattachés à un bateau est en vigueur sur la côte Ouest. Dans ce cas, lorsqu'un navire change de propriétaire, le MPO exige de Transports Canada un avis de changement de propriétaire indiquant le ou les propriétaires figurant au registre, ainsi que l'immatriculation canadienne du bâtiment. Le Règlement fixe un délai similaire de 15 jours pour cet avis.
[Français]
En ce qui concerne les transferts de permis, ces derniers ne sont pas, à proprement parler, transférables. Les permis ne sont généralement pas considérés comme un bien et, de ce fait, ils ne peuvent être légalement vendus ou légués. Toutefois, la ministre a le pouvoir discrétionnaire de transférer un permis détenu par un détenteur de permis à un autre pêcheur, sur demande du détenteur du permis et avec l'accord du bénéficiaire potentiel.
[Traduction]
Dans ce cas, les agents du ministère vérifient si la partie qui effectue le transfert est bien une propriété canadienne, comme je l'ai décrit auparavant. De plus, la ministre prend en compte les obligations liées aux revendications territoriales qui pourraient se rapporter à la demande de transfert. Enfin, la ministre a également le pouvoir discrétionnaire de prendre en compte l'intérêt public en général dans la prise de décision relativement à une demande de transfert de permis.
En ce qui concerne les transferts de quotas, il en existe deux types: les transferts temporaires et les transferts permanents. Dans le cas de transferts temporaires de quotas, c'est‑à‑dire de transfert en saison d'un pêcheur à un autre, les agents du ministère s'assurent que la partie cédante et la partie cessionnaire se sont entendues sur le montant du transfert, que tous les frais de permis ont été payés à la Couronne et que le quota dont dispose la partie cédante peut soutenir la transaction. Ce type de transfert se termine à la fin de la saison de pêche, date à laquelle les quotas sont réattribués en fonction des prises disponibles et du régime de partage de la pêche.
En ce qui concerne les demandes de transfert permanent de quotas liés aux permis de pêche hauturière, les agents du ministère effectuent un examen de propriété canadienne semblable à celui effectué pour les transferts de permis et s'assurent, entre autres, que tous les frais et toutes les amendes ont été payés. Enfin, si, pour une pêche donnée, la proposition de transfert permanent peut modifier l'entente de partage du quota convenue, le ministère consulte l'industrie à propos de la transaction proposée.
Concernant les permis de pêche commerciale et les permis de pêche commerciale communautaires, ces deux formes de permis existent en vertu de règlements différents, les premiers en vertu du Règlement de pêche de l'Atlantique, et les seconds, en vertu du Règlement sur les permis de pêche communautaires des Autochtones.
Théoriquement, il n'y a pas de « transfert » d'un type de permis à un autre. Un pêcheur doit plutôt aviser le ministère de la renonciation volontaire de son permis, puis le ministère doit recevoir une demande distincte de permis de pêche commerciale communautaire.
La demande d'établissement d'un nouveau permis en vertu du Règlement sur les permis de pêche communautaires des Autochtones donne lieu à un examen, comme l'autorise l'article 8 du Règlement de pêche (dispositions générales). Les permis de pêche commerciale communautaires ne peuvent être délivrés qu'à des « organisations autochtones », comme il est énoncé dans le Règlement, plutôt qu'à un particulier ou à une entreprise, comme c'est le cas pour les permis de pêche commerciale dans les Maritimes et au Québec.
J'espère que les membres du Comité auront trouvé cet aperçu utile. Nous nous ferons un plaisir de répondre à leurs questions.
Dans le cas d'un transfert de permis et de la question de la propriété, il faut tenir compte de certains éléments. Habituellement, les agents d'octroi des permis demandent à un avocat de fournir une série de renseignements, ainsi qu'une attestation de ces renseignements. Ils demandent, par exemple, le certificat de constitution ou les statuts constitutifs décrivant la structure de propriété d'une entreprise. Dans le cadre de l'attestation, il est nécessaire de prouver que le demandeur ou le bénéficiaire respectif satisfait aux règlements relatifs à la propriété canadienne. Il s'agit donc de documents sur les personnes qui ont la propriété effective — plus de 10 % des actions d'une organisation —, les actionnaires individuels et les personnes qui ont un contrôle important sur le titulaire de permis éventuel.
Cet examen ne porte pas seulement sur le bénéficiaire éventuel au sens strict, mais aussi sur la structure complète de l'entreprise, de sorte que l'on passe en revue l'ensemble de la structure pour veiller à ce que la proportion de 51 % est atteinte. Lorsqu'on arrive à peu près à ce point et que l'agent ou l'administrateur qui supervise le processus juge que les critères sont remplis, le bénéficiaire a satisfait aux exigences liées à la propriété et la transaction peut être effectuée, en présumant que tous les autres frais et amendes sont payés et que toutes les autres considérations réglementaires sont respectées. C'est donc un aperçu des types d'examens des titres de propriété qui sont effectués.
J'aimerais maintenant aborder certaines des préoccupations que nous avons entendues dans les témoignages, plus précisément le fait que certaines entités étrangères ou certaines entités soutenues par des étrangers pourraient utiliser des méthodes qui leur permettraient de gonfler, de manipuler ou de contrôler les prix au quai au détriment des entreprises canadiennes.
D'autre part, je crois comprendre que dans ces cas, la compétence du ministère des Pêches et des Océans s'arrête en grande partie une fois que le poisson entre au quai et qu'il n'est plus dans la partie de l'équation qui concerne la pêche, puisque l'achat et la transformation sont essentiellement des compétences provinciales.
Tout d'abord, est‑ce que je comprends bien que l'achat et la transformation relèvent principalement de la compétence provinciale?
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Il y a eu un problème technique. Je m'en excuse, monsieur le président.
Je reprends donc mes propos.
Je remercie les témoins qui sont ici, aujourd'hui, pour répondre à nos questions.
Je disais que j'avais des inquiétudes semblables à celles formulées par M. Arnold, sinon des intérêts en commun avec ce dernier. Je me pose des questions quant aux politiques et à la réglementation qui sont distinctes dans les provinces du Pacifique, dans celles de l'Atlantique et au Québec. J'aimerais, en fait, savoir sur quels motifs reposent ces distinctions.
Les témoins peuvent décliner leur réponse de plusieurs façons. Je ne sais pas qui, de Mme McCready, de M. Burns ou de M. Whorley, peut répondre à ma question, mais j'inviterais chacun d'eux à le faire, si cela est possible.
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Monsieur le président, je peux commencer à répondre à ces questions.
La structure de la pêche a évolué différemment sur la côte Est et sur la côte Ouest. Sur la côte Est, par exemple, nous avons une flottille hauturière et une flottille côtière distinctes, mais cette structure et cette approche n'ont pas été utilisées sur la côte Ouest.
Alors que sur la côte Est, nous octroyons des permis à des particuliers ou à des entreprises en vertu de notre régime de permis commerciaux, sur la côte Ouest, il s'agit en grande partie, de toute façon, d'un régime de permis fondé sur les navires. Pour cette raison, le cadre politique qui sous-tend ce régime est différent. Ainsi, sur la côte Ouest, notre examen est axé sur la propriété d'un navire et l'enregistrement de ce dernier auprès de Transports Canada, tandis que sur la côte Est, il est axé sur l'entreprise à laquelle le permis est directement octroyé.
En raison de l'évolution, au fil du temps, de deux approches distinctes sur les deux côtes, l'approche stratégique a également évolué différemment — et c'était inévitable, car elle doit être établie pour soutenir une approche différente pour le régime de permis.
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Je vous remercie, monsieur le président.
J'aimerais poser une question concernant ce que l'on nous a dit lors de la dernière rencontre. Les témoins parlaient de difficultés, malgré ce que l'on dit en ce moment, quant à l'application des politiques et des règlements, parce qu'il y avait un manque de ressources. Ils disaient que cela rendait difficile le travail du ministère. Ce sont des gens du milieu qui le disaient.
Est-ce que c'est le cas, selon vous?
Tout à l'heure, on disait deux choses en même temps. D'un côté, on disait qu'il n'était pas possible de contourner les règles, et de l'autre, on disait que les gens s'inquiétaient de voir que certains réussissaient à les contourner. Encore une fois, on dit que tout est surveillé et que tout va bien, alors que, lors de la dernière rencontre, on disait qu'il y avait beaucoup de difficultés pour ce qui est d'assurer la surveillance et que l'on manquait de ressources. Bref, on a laissé passer beaucoup de choses. Pendant 40 ans, on a fermé les yeux sur certaines choses qui se passaient.
J'aimerais avoir votre avis, monsieur Burns, madame McCready ou monsieur Whorley.
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Je vous remercie de la question.
Avant l'entrée en vigueur du règlement sur la pêche côtière, nous avions une politique beaucoup plus difficile d'application. Nous avons maintenant le règlement sur la pêche côtière, et je pense que c'est à cela que les gens faisaient référence lorsqu'ils parlaient des ressources. La différence, maintenant — et ce n'est pas lié à la pêche hauturière —, c'est que ce règlement sur la pêche côtière prescrit les critères d'admissibilité relatifs à un permis de pêcheur côtier indépendant et au maintien des droits et privilèges qui y sont associés. Il y a des critères d'admissibilité pour la délivrance d'un permis, et si vous n'y satisfaites pas, vous ne pourrez obtenir un permis.
Ce n'était pas le cas auparavant avec la Préservation de l'indépendance de la flottille de pêche côtière dans l'Atlantique canadien ou PIFPCAC. C'était une politique et non un ensemble de critères d'admissibilités prévus par la loi. Donc, les délais étaient beaucoup plus longs. Il est vrai que certains pêcheurs faisaient l'objet d'un examen, comme on l'appelait dans la PIFPCAC, pendant une longue période.
Aux termes du règlement sur la pêche côtière, en cas de doute quant à l'admissibilité et à la séparation des droits et privilèges par le titulaire du permis, le titulaire doit démontrer qu'il se conforme au règlement avant qu'un permis puisse être délivré de nouveau. Il lui serait interdit de pratiquer la pêche dès l'échéance de son permis, jusqu'à ce qu'il apporte les correctifs nécessaires pour recevoir un nouveau permis.
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Merci, monsieur le président.
Il y a deux ou trois choses.
À mon avis, Mme Gill a bien résumé la situation lorsqu'elle a dit qu'on a fermé les yeux. Ce qui me préoccupe, c'est qu'ici, nous entendons les fonctionnaires du ministère. Il y a deux ans, nous avons reçu le rapport sur l'arrêt du transfert de permis à des sociétés étrangères sur la côte Ouest. Rien n'a encore été fait. Nous voulons une base de données publique, ne serait‑ce que pour savoir qui est propriétaire des quotas. Ce n'est pas sorcier. Je pense que les Canadiens méritent de le savoir.
Si le gouvernement ne met pas en œuvre ces mesures claires et importantes — que le Comité appuie —, si le gouvernement n'a pas de colonne, nous perdrons essentiellement toutes nos pêches au profit d'entreprises et d'intérêts étrangers. N'êtes-vous pas d'accord?
Je tiens à remercier tous les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
Je vais m'adresser à M. Burns et poursuivre dans le même ordre d'idées que mes collègues à propos des intérêts étrangers, qui sont de plus en plus présents au pays.
Monsieur Burns, vous êtes probablement au courant que le secteur des pêches va bien dans nos régions. Les quotas sont à la hausse. La ressource est présente, tant pour le homard que pour le crabe, et les prix sont extrêmement bons actuellement. Ce qui est inquiétant, c'est que de plus en plus d'entreprises viennent dans nos régions et offrent des prix dérisoires aux pêcheurs. Elles offrent parfois 2 $ ou 3 $ de plus la livre de crabe ou de homard, par exemple.
Je comprends très bien que les provinces sont responsables de la transformation de ces produits. Toutefois, avant que ceux-ci arrivent au quai, ils demeurent quand même une ressource qui appartient aux Canadiens et aux Canadiennes. Le gouvernement canadien en est responsable.
Connaissez-vous l'entreprise Royal Greenland, qui est de plus en plus présente dans la région? Par exemple, elle a fait certaines offres en ce qui a trait à la crevette, au Québec et à Terre‑Neuve, si je ne me trompe pas. Sur les quais, cette année, elle offrait même de 2 $ à 4 $ de plus la livre, que ce soit dans le cas du homard ou du crabe.
Je n'ai pas besoin de vous énumérer les conséquences de cette pratique. Nos pêcheurs vont vendre le produit de leur pêche à ces entreprises, dont Royal Greenland, qui est subventionnée par le gouvernement du Danemark. Si ces entreprises sont dans la région et qu'elles offrent de tels prix, nos pêcheurs leur vendront leurs produits. Nous aurons alors des problèmes lorsqu'elles prendront le contrôle du marché.
Je pourrais nommer plusieurs autres entreprises, par exemple Corporation financière Champlain, qui se procurent de plus en plus d'usines dans notre région.
Êtes-vous au courant de ces investissements et de la présence de ces entreprises qui sont, elles aussi, subventionnées par le gouvernement du Danemark?
Que faites-vous pour faire en sorte que notre industrie des pêches demeure dans nos communautés côtières, comme vous l'avez dit tantôt?
J'ai quelques commentaires pour notre prochain groupe de témoins. Lorsque vous êtes prêt à parler, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Lorsque vous ne parlez pas, votre microphone doit être en sourdine. Lorsque vous prenez la parole, veuillez parler lentement et clairement.
J'aimerais accueillir notre deuxième groupe de témoins.
Nous accueillons M. Martin Mallet, directeur général de l'Union des pêcheurs des Maritimes; Mme Claire Canet, chargée de projet au Regroupement des pêcheurs professionnels du Sud de la Gaspésie; M. Colin Sproul, président de l'Unified Fisheries Conservation Alliance.
Nous allons maintenant entendre la déclaration d'ouverture de M. Mallet. Vous avez cinq minutes tout au plus, s'il vous plaît.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous.
Au nom de l'Union des pêcheurs des Maritimes, j'aimerais vous remercier de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui. Notre organisme représente plus de 1 300 pêcheurs côtiers indépendants propriétaires-exploitants au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse.
Nous sommes reconnaissants que tous les partis aient appuyé les changements apportés à la Loi sur les pêches, protégeant les propriétaires-exploitants et la séparation des flottilles dans la loi dans le but de garder les ressources publiques du Canada atlantique entre les mains des pêcheurs dans leurs communautés et de protéger les pêches côtières contre le contrôle et l'influence des entreprises.
Cela dit, nous risquons encore grandement de perdre nos pêches autrement.
Au cours des dernières années, les entreprises familiales et communautaires de pêche et de transformation ont été mises au menu international pour être achetées et agglomérées par de grandes entreprises appartenant à des ressortissants étrangers ou à des investisseurs hors province. Alors que les entreprises locales réinvestissent la majorité de leurs revenus d'affaires dans leur communauté et leur province d'origine, les grandes entreprises s'intéressent aux profits des actionnaires, et non pas à la durabilité des collectivités rurales qui dépendent des ressources de pêche locales.
Il y a de plus en plus d'exemples de prise de contrôle par des étrangers de nos ressources et avantages marins au Canada. Sur la côte Est, par exemple, il y a Royal Greenland à Terre-Neuve et au Québec. Thai Union est au Nouveau-Brunswick, Clearwater en Nouvelle-Écosse avec la participation récente de Premium Brands Holdings et, comme l'a dit M. Cormier un peu plus tôt, Champlain Investment fait affaire au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. La liste est longue.
Pour mon témoignage d'aujourd'hui, j'utiliserai l'exemple de l'entreprise Champlain Capital, qui est basée aux États-Unis, mais qui dispose d'une société affiliée, à savoir la Corporation Financière Champlain de Montréal, pour illustrer les préoccupations qui surgissent depuis 2017.
Champlain a pris le contrôle de huit usines de transformation dans des petites collectivités rurales au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. Officiellement, le groupe d'investissement a tenté de promouvoir les effets positifs de cette fusion pour les régions en stipulant qu'elle créera plus de synergie et réduira les coûts, tout en permettant de développer de nouveaux produits.
Cela dit, cela crée aussi un monopole, ce qui pourrait créer un milieu d'affaires inégal pour les autres usines de transformation locales, en plus de les pousser à la faillite pour éliminer la concurrence et d'ouvrir la porte à la fixation du prix du poisson pour les pêcheurs locaux. De plus, les dividendes des entreprises locales qui seraient généralement restées dans la communauté pour appuyer d'autres entreprises ou d'autres membres de la communauté vont maintenant à des actionnaires hors province ou étrangers.
Cette entreprise va‑t-elle fermer les usines les moins efficaces pour augmenter ses profits afin d'augmenter la consolidation et les résultats? La réponse à cette question est « oui ». En 2020, par exemple, l'une des usines récemment achetée par l'entreprise dans l'Est du Nouveau-Brunswick a brûlé et n'a jamais été reconstruite. L'entreprise a plutôt réinvesti son argent dans ses autres usines de transformation, consolidant et augmentant ainsi ses profits au détriment de la communauté qui venait de perdre son usine. La plupart des 150 travailleurs ont perdu leur emploi le jour où l'usine a brûlé. On parle de travailleurs d'une petite collectivité côtière rurale où le secteur de la pêche est le principal employeur.
Pour conclure, notre organisme estime qu'il est nécessaire que l'industrie ait un accès approprié à du capital pour le maintien et la croissance des secteurs de la pêche et de la transformation. Cela dit, la priorité la plus urgente est d'avoir des stratégies efficaces pour des opérations de suivi et de couverture des intérêts étrangers pour nos ressources marines publiques. Peut-être pourrait‑on créer un groupe de travail composé de représentants du gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux, de l'industrie, ainsi que d'experts économiques, financiers et juridiques afin de mener une étude approfondie de la situation et d'établir des options stratégiques pour s'attaquer aux problèmes existants. Tel que mentionné dans les remarques liminaires du ministère juste avant moi, le MPO et les structures de gestion des pêches provinciales ne disposent présentement pas des outils nécessaires pour s'attaquer aux enjeux de propriété et de contrôle étrangers de nos ressources et avantages halieutiques.
Le deuxième point que je désire soulever est le besoin d'avoir des programmes d'aide financière appropriés pour les transferts intergénérationnels de permis de pêche des propriétaires-exploitants aux nouveaux venus, mais, aussi, des incitatifs pour appuyer les entreprises du secteur de la transformation, afin qu'elles puissent rester détenues et gérées localement. Cela dit, même les meilleurs programmes ne pourront pas rivaliser avec les grands moyens financiers des entreprises internationales.
Enfin, nos ressources halieutiques publiques doivent être considérées comme faisant partie de l'intérêt national canadien et des priorités en matière de sécurité alimentaire. Nos ressources sont enlevées aux Canadiens à un rythme alarmant. Cet enjeu doit devenir une priorité pour nos élus et décideurs.
Merci. Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Chers membres du Comité, je vous remercie de recevoir aujourd'hui le témoignage du Regroupement des pêcheurs professionnels du sud de la Gaspésie, qui représente 148 homardiers.
Les communautés côtières de la Gaspésie dépendent fortement des pêches commerciales, dont celle du homard, pour leur santé économique. Le secteur de la capture du homard représente un emploi pour près de 600 personnes.
Les usines de transformation des produits de la mer au Québec, qui dépendent de l'industrie de la capture pour fonctionner, représentent 3 500 emplois. En 2019, la pêche commerciale au Québec, qui englobe les pêches exercées par les groupes des Premières Nations, représente une valeur totale de 378 millions de dollars, au débarquement. Le homard pêché en Gaspésie représente 24 % de cette valeur totale.
Pas moins de 80 % de ces débarquements au Québec sont exportés, et 20 % restent au Canada. Cependant, lorsque l'on regarde les structures, comme celles de l'entreprise Clearwater ou de Royal Greenland Québec, le pourcentage des débarquements exportés est nettement supérieur. Par exemple, Royal Greenland, propriétaire de l'usine de transformation de Matane, a notamment fait des offres au quai pour se garantir un maximum de débarquement, comme l'a souligné M. Cormier plus tôt. Elle exporte 95 % de ses débarquements en Europe ou vers les États‑Unis, ce qui ne laisse que 5 % des produits de la mer qui sont pêchés par la capture pour nourrir les populations québécoise et canadienne.
En 2019 et en 2021, Royal Greenland a utilisé les techniques mentionnées par M. Cormier, qui sont très alarmantes pour la santé et la vitalité de nos usines de transformation canadiennes et qui permettent aux pêcheurs de profiter d'une diversité d'acheteurs.
Dans son rapport annuel de 2019, Clearwater souligne être principalement tournée vers l'exportation. En effet, c'est plus de 90 % de ses ventes qui sont destinées à l'étranger. Sa stratégie est de continuer à tirer parti de son large portefeuille d'espèces, de sa portée sur le marché mondial et de sa base de clients pour générer une croissance rentable, tout en élargissant la distribution de ses ventes sur de nouveaux marchés et canaux. On fait allusion, par exemple, à son association avec l'entreprise Premium Brands pour augmenter la productivité et réduire les coûts, nécessairement les intrants, à savoir le prix des captures, afin de générer des marges plus élevées à partir de sa chaîne d'approvisionnement mondiale verticalement intégrée.
Royal Greenland et Clearwater sont deux exemples qui démontrent que les entreprises étrangères qui participent à la transformation et donc, aux pêches, ainsi que les entreprises canadiennes ayant une logique d'intégration verticale vers l'étranger ont une incidence directe sur la sécurité alimentaire du Canada, puisque les pourcentages exportés sont nettement supérieurs à ce qui est normalement exporté par des entreprises entièrement canadiennes et locales.
Concernant Clearwater et Premium Brands, elles ne sont effectivement pas propriétaires de permis de pêche commerciale côtière. Nous avons entendu de la part du ministère des Pêches et des Océans, ou MPO, que ces entreprises ne pouvaient pas obtenir de permis de pêche côtière. Cependant, Clearwater est maintenant détenue à 50 % par plusieurs groupes des Premières Nations, qui, eux, sont détenteurs de plusieurs dizaines de permis de pêche commerciale côtière. Ce sont des permis de pêche communautaires, auxquels ne s'appliquera donc pas la protection prévue par le nouveau règlement pour les propriétaires exploitants, puisque ce sont des permis communautaires.
Par un effet pervers, les permis de pêche communautaires commerciaux, actuels et futurs, qui permettent la commercialisation des captures détenues par ces groupes des Premières Nations, ne protègent pas les titulaires de permis, ce qui va à l'encontre de l'esprit du règlement et de la protection de notre ressource dans l'intérêt des Canadiens et des pêcheurs.
Dans un contexte où l'accès aux pêches par les Premières Nations augmente pour leur permettre d'atteindre un niveau de vie modéré, nous ne pourrons qu'assister à une augmentation du nombre de permis communautaires, ce qui permettra une prise de contrôle de la commercialisation des captures vulnérables, à moins que le MPO ne s'assure que l'ensemble des permis de pêche autorisant la commercialisation des captures bénéficient de la même protection.
Il nous paraît illusoire de croire que ces entreprises, comme Clearwater, qui s'inscrivent dans une stratégie d'intégration verticale et de contrôle des débouchés des captures de pêche, ne voient pas une opportunité dans un accès non protégé à un nombre croissant de permis de pêche communautaires commerciaux et dans les captures qui résultent de leur exploitation.
Dans le contexte d'une logique de corporisation des pêches, il est évident que, à défaut de garde-fous, nous verrons une érosion de la portée du Règlement sur la protection des pêches côtières, qui assure aussi la protection des propriétaires exploitants. De plus, un nombre croissant de permis de pêche commerciale seront exposés à une prise de contrôle au bénéfice d'un petit nombre d'entreprises.
Une corporatisation des pêches par des intégrations verticales et des investissements privés sert à assurer des dividendes à quelques individus seulement, à quelques familles ou à des gouvernements étrangers, comme dans le cas de Royal Greenland, qui sont actionnaires, plutôt que de donner la priorité au transfert des profits vers les communautés côtières.
Sans que l'on s'en aperçoive...
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Bonsoir, monsieur le président et honorables membres du Comité.
Je vous remercie de me permettre de témoigner devant vous ce soir.
La Unified Fisheries Conservation Alliance est une nouvelle alliance d'intervenants dans le milieu de la pêche commerciale qui demande au gouvernement du Canada d'établir une surveillance réglementaire claire, durable et responsable pour toutes les pêches: commerciale, de subsistance, sociale et cérémoniale.
Notre alliance, connue sous le nom d'UFCA, a été créée en 2020 et représente des milliers de pêcheurs et d'associations de pêcheurs dans le milieu de la pêche commerciale de multiples espèces dans la région des Maritimes. Parmi nos membres, nous comptons aussi des PME qui sont liées directement ou indirectement à la pêche commerciale dans le Canada atlantique. La pêche commerciale est le gagne-pain de milliers de Canadiens dans le Canada atlantique qui travaillent sur des bateaux, des quais, dans des usines de transformation ou dans d'autres mailles de la chaîne d'approvisionnement. Les pêches représentent des emplois, une assiette fiscale et des retombées économiques pour les collectivités et les gouvernements ruraux, ce qui aide à fournir des services essentiels à tous les citoyens.
Malheureusement, l'incertitude réglementaire génère de l'anxiété et des inquiétudes chez les pêcheurs et d'autres intervenants de l'industrie quant à la durabilité et la prospérité de l'industrie à long terme. Nous avons besoin de règles claires, mais aussi de mécanismes pour veiller à ce que les gens s'y conforment et à les faire appliquer.
Nous voulons travailler de concert avec le gouvernement du Canada et les Premières Nations pour entendre et comprendre divers points de vue et atteindre, au final, une certitude réglementaire. Nos membres rejettent toute forme de racisme, d'intolérance et de violence et croient qu'il est possible d'éviter les controverses et les discours incendiaires à l'avenir comme ce qu'on a vu au cours des derniers mois. Nous croyons pouvoir trouver une solution pour tous. L'UFCA croit que les pêcheurs autochtones et non autochtones peuvent travailler côte à côte, comme c'est le cas présentement dans le milieu de la pêche commerciale. Nous reconnaissons qu'il est important de coopérer avec les communautés autochtones et que les pêcheurs de ces communautés ont le droit de pêcher à des fins commerciales, de subsistance, sociales et cérémoniales.
Il y a de la place pour de la diversité, comme c'est le cas dans les pêches commerciales. Il peut y avoir des différences dans les structures d'allocation, l'administration et le processus; cela dit, les règles doivent au final faire partie d'un ensemble de réglementations qui pourront être utiles pour les ressources halieutiques des générations à venir et pour veiller à ce que tous puissent pêcher de façon juste et respectueuse.
Ce soir, j'aimerais vous parler de l'entente à venir avec Clearwater Seafoods et des risques qui y sont associés pour les collectivités côtières.
Le cadre actuel de l'entente est une terrible occasion manquée; on n'a pas intégré davantage les pêcheurs autochtones dans les pêches dans le Canada atlantique et on n'a pas progressé en matière de réconciliation dans nos collectivités. Certaines Premières Nations gagneront au change et d'autres y perdront, creusant encore plus inutilement les écarts entre les communautés de pêcheurs autochtones et non autochtones. Il existe une meilleure façon de faire les choses, et cela commence avec un dialogue ouvert et la fin d'ententes secrètes au MPO. Les collectivités vivant près des ressources méritent d'avoir voix au chapitre pour les décisions prises à Ottawa. Lorsqu'elles sont exclues des discussions, elles en sortent perdantes, inévitablement.
Le cadre proposé de l'entente nous préoccupe grandement, tout comme le manque de protection contre un futur transfert de propriété potentiel des ressources naturelles du Canada à une entité étrangère, des menaces envers la politique des propriétaires-exploitants et une concentration inutile des efforts de pêche, entre autres. La zone de pêche au homard monopolisée par Clearwater est, à elle seule, plus grande que toutes les zones de pêche au homard en Nouvelle-Écosse combinées. L'entente actuelle ne permettrait pas aux pêcheurs d'avoir accès à ces potentielles retombées économiques majeures, incluant la majorité des Premières Nations en Nouvelle-Écosse et les pêcheurs de subsistance convenable. Seuls ceux travaillant sur un immense bateau de type usinier pourraient y avoir accès.
Le Comité devrait aussi se préoccuper autant du fait que l'entente actuelle fera sûrement en sorte que les Micmacs se battront contre les Inuits pour avoir accès aux précieux quotas de crevettes nordiques et de poisson. Ce fait pourrait être une motivation pour l'entente et doit être examiné plus en détail. Il serait difficile de ne pas percevoir la décision récente de Clearwater d'inclure des partenaires autochtones comme une réponse à la décision légitime du gouvernement de respecter les principes de contiguïté pour une ressource dans la gestion des pêches et de saisir une partie des précieux quotas de l'entreprise pour en offrir aux collectivités nordiques, autochtones et non autochtones.
Il est incroyable que le gouvernement actuel puisse ignorer le potentiel de cet accès à la pêche et l'aide que cela pourrait apporter en matière d'intégration des pêcheurs de subsistance convenable. Il est certes possible pour les politiciens de part et d'autre de cette entente de la voir comme une simple transaction commerciale, mais les communautés de pêcheurs dans le Canada atlantique ne la voient certainement pas ainsi. La réalité, c'est que ce qu'il y a de mieux pour les pêcheurs autochtones, pour ceux qui tentent de gagner leur vie sur des bateaux, c'est aussi ce qu'il y a de mieux pour nos membres. C'est rarement le cas avec une grande entreprise. Il est grand temps que le gouvernement cherche à nous unir plutôt qu'à nous diviser. Toutes les communautés peuvent bénéficier de ces ressources si on leur permet de se faire entendre.
Je suis impatient de vous donner plus de détails sur la voix à suivre pour un avenir meilleur.
Je vous remercie, honorables membres du Comité. Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Je vous donnerai d'autres exemples à nouveau, mais je tiens à redire que je n'ai pas beaucoup de solutions à vous offrir pour régler les problèmes soulevés aujourd'hui et au cours des dernières semaines par votre Comité. Je pense qu'il s'agit d'une première étape, et nous aurons besoin qu'un groupe d'experts mène une étude approfondie afin de nous donner plus de détails et de solutions potentielles.
D'après ce que j'ai constaté au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse, la valeur des permis et des entreprises de pêche a augmenté de façon phénoménale au cours des 10 dernières années dans certaines régions; je pense entre autres à la pêche côtière au homard dans certaines régions au Nouveau-Brunswick où, tout d'un coup, beaucoup plus d'intérêts hors province et internationaux se sont mis à s'y intéresser, particulièrement depuis cinq ans. Ils achètent des entreprises locales du secteur de la transformation et agglomèrent ces usines qui, parfois, peuvent être achetées pour quelques millions de dollars.
Il n'est peut-être pas trop tard pour renverser la vapeur dans certaines régions, mais ailleurs en Nouvelle-Écosse et sur la côte Ouest, surtout en Colombie-Britannique, il existe des exemples flagrants d'investissements d'entreprises internationales pour lesquels il nous faut trouver des solutions.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Bonjour à tous les témoins, dont M. Mallet et M. Sproul, des provinces atlantiques, et ma voisine, de l'autre côté de la baie, Mme Canet.
Monsieur Mallet, je veux revenir à la situation concernant Clearwater. Nous avons eu une explication des fonctionnaires du ministère. J'aimerais savoir ce qui vous fait peur dans cette transaction, pour que nous saisissions bien le problème. Je pense que nous avons obtenu des fonctionnaires un portrait assez complet de la situation. Ils semblaient dire que tout était fait selon les normes.
Que craignez-vous?
Je veux saisir l'ampleur de cela. Je sais que vous avez parlé des Premières Nations. Vous avez des préoccupations quant au fait qu'elles pourraient être désavantagées.
Pourriez-vous nous faire un résumé de la situation?
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Très bien. Je vous remercie.
Monsieur Mallet, pour revenir à vous, je sais qu'on m'a souvent cité comme étant celui qui a beaucoup parlé de cette entreprise, Royal Greenland, mais je pense ne pas être le seul aux prises avec ce problème. Comme vous le savez, j'ai reçu beaucoup d'appels de pêcheurs et de producteurs de ma région au cours de l'année pour me dire que l'entreprise était présente sur les quais et offrait beaucoup d'argent aux pêcheurs pour leurs prises.
Les représentants du MPO semblent dire qu'il s'agit plutôt d'un enjeu provincial, mais au bout du compte, comme je l'ai dit, la ressource appartient aux Canadiens. Je pense que nous aurons un grave problème en laissant faire une entreprise comme Royal Greenland, qui bénéficie du soutien du gouvernement danois. On y pense tous.
À votre avis, que devrait faire le ministère à ce sujet? Nous aurons un énorme problème si nous perdons une industrie que nous avons bâtie dans nos communautés au fil des ans. Que devrait‑on faire à ce sujet, d'après vous?
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins d'être ici, aujourd'hui.
Selon moi, le sujet qui nous occupe suscite de l'inquiétude. Plus tôt, nous avons parlé aux gens du ministère, qui ne voyaient pas quels étaient les soucis que nous pourrions avoir au sujet de la situation ni concernant la façon de contourner la réglementation pour faire en sorte que des entreprises passent sous contrôle étranger. Je suis donc heureuse d'entendre les témoignages des témoins, qui démontrent le contraire. En fait, cela est inquiétant, mais il faut trouver des solutions, comme le mentionnait M. Mallet. Il faut trouver des stratégies pour contrer ce qui se produit en ce moment. Nous sommes très sensibilisés à cet égard.
J'aurais des questions pour l'ensemble des témoins, mais je vais m'adresser d'abord à Mme Canet, qui a parlé du manque de connaissances et de compréhension sur le plan socioéconomique au ministère des Pêches et des Océans.
Madame Canet, pourriez-vous nous en dire davantage concernant les conséquences négatives que la situation entraîne sur nos communautés côtières, sur la souveraineté alimentaire et sur nos ressources, comme l'a mentionné d'ailleurs M. Cormier.
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Je vous remercie de la question.
À aucun moment, nous n'avons eu connaissance, au cours des dernières années, d'études d'impact socioéconomique menées par le MPO concernant les décisions qu'il pouvait prendre, que ce soit, par exemple, dans le cadre de la gestion de la baleine noire — où notre municipalité régionale de comté, ou MRC, a perdu 9,5 millions de dollars lors de la fermeture des pêches —, ou encore dans le cadre de l'exclusion des permis communautaires de la protection des propriétaires exploitants, ou même dans le cadre d'ententes d'intégration verticale, comme celle conclue avec Clearwater.
L'impact est indirect, mais il va arriver et il touchera les prix qui seront offerts aux pêcheurs. Par exemple, dans le marché du homard, nous ne pouvons pas, actuellement, négocier nos prix. Les pêcheurs débarquent leurs captures et, une semaine plus tard, ils apprennent combien ils vont être payés. Lorsque l'on se trouve dans une situation de monopsone, où des entreprises comme Clearwater et Champlain viennent prendre le contrôle des achats, les pêcheurs, qui sont censés avoir l'entier pouvoir de retirer de manière indépendante les bénéfices de l'exploitation d'un permis de pêche, se retrouvent dans une position où ils ne peuvent plus retirer ces bénéfices puisqu'ils n'ont pas de pouvoir.
Le MPO n'a jamais examiné cet aspect socioéconomique, qui fait partie intégrante de l'exploitation d'un permis. Le MPO n'a donc aucune connaissance de l'environnement socioéconomique dans lequel un pêcheur évolue pour l'exploitation de son permis.
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Je vous remercie, madame Canet.
On a parlé tout à l'heure de la disparition potentielle d'un secteur économique dans nos communautés au profit de plus grandes entreprises et de sociétés étrangères. Cela m'inquiète également. Je dois vous avouer que je trouve le gouvernement très peu proactif relativement à toutes les études que nous menons au sein de ce comité. Les gens sont bien sûr des fonctionnaires qui relèvent du gouvernement, mais, selon moi, c'est un peu la même chose. Selon mes observations, le gouvernement n'est pas non plus proactif en la matière.
Monsieur Mallet, vous avez parlé d'une stratégie. Or, si cela ne relève pas des fonctionnaires du ministère, qui ne sont absolument pas inquiets, ni du gouvernement, de qui cela relèvera-t-il? Qu'est-ce que vous nous suggérez?
Nous sommes des parlementaires, et certains d'entre nous font partie du gouvernement, mais d'autres, non. Que pouvons-nous faire de notre côté pour aller plus loin et plus rapidement pour mieux répondre aux besoins du secteur?
J'ai adressé ma question à M. Mallet, mais, bien entendu, Mme Canet et M. Sproul peuvent y répondre également.
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Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps avec M. Cormier.
Je tiens à féliciter les trois témoins. J'ai été très impressionné par les témoignages que vous avez livrés. Vous avez très bien décrit la situation de la pêche sur la côte Est. Nous savons tous qui est perdant — les pêcheurs, à long terme, pour ce qui est du tarif sur la côte, lorsque les sociétés se regroupent. Ils doivent récupérer leurs investissements dans le secteur des achats. Pour ce faire, ils réduisent le prix versé aux pêcheurs en échange de la ressource brute. Ce sont une philosophie et une politique d'entreprise qui ont fait leurs preuves. Il se produira la même chose dans ce cas. Nous devons être vigilants.
Je n'ai qu'une seule question à poser avant de céder la parole à mon collègue. Ce sur quoi nous devons nous montrer vigilants, en tant que gouvernement, est de veiller à ce que nos communautés des Premières Nations, qui se sont battues pendant si longtemps pour obtenir l'accès à la pêche et aux permis de pêche communautaires, puissent conserver la propriété et le contrôle de ces permis.
Êtes-vous d'accord avec moi, monsieur Mallet, monsieur Sproul et madame Canet?
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Merci, monsieur Morrissey.
Monsieur Mallet — je ne fais pas de préférences, mais vous venez de ma province —, vous avez dit tout à l'heure que le prix des permis est élevé en ce moment. Pour le crabe, il se chiffre à environ 12 millions ou 15 millions de dollars, et pour le homard, à 1 million ou 1,5 million de dollars. Lorsque je vois des permis quitter ma province et ma région, je m'inquiète.
Pouvons-nous faire quelque chose pour remédier à ce problème? Je sais que les critères de résidence sont différents d'une province à l'autre. Selon vous, que devrions-nous faire pour mettre fin à cette situation?
[Français]
La nouvelle Loi sur les pêches visait à assurer la séparation des flottilles et à protéger les propriétaires exploitants, mais, selon moi, l'esprit de la Loi, c'était aussi de garder ces permis dans nos communautés afin qu'ils ne profitent pas seulement aux pêcheurs, mais qu'ils profitent aussi aux communautés.
Que devrions-nous faire pour arrêter cette vente de permis aux autres provinces et à des intérêts étrangers?
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Merci, monsieur Cormier. Vous n'avez dépassé vos cinq minutes que de quelques secondes.
Nous avons utilisé tout le temps dont nous disposions pour la séance ce soir, soit un peu plus de deux heures.
Je tiens évidemment à remercier sincèrement nos témoins: Mme Canet, M. Mallet et M. Sproul. Encore une fois, les connaissances que vous avez partagées avec nous ce soir ont rendu la séance très instructive pour notre comité.
Je tiens à remercier les membres du Comité, la greffière, les analystes, les traducteurs et les interprètes, ainsi que toutes les personnes qui ont contribué au bon déroulement de la séance de ce soir.
Je vous souhaite à tous une bonne soirée. La séance levée.