HUMA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 1er mai 2003
¹ | 1530 |
La présidente (Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.)) |
Mme Lenore Burton (directrice générale, Direction de l'apprentissage et de l'alphabétisation, ministère du Développement des ressources humaines) |
¹ | 1535 |
¹ | 1540 |
La présidente |
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne) |
Mme Lenore Burton |
M. Ken Epp |
Mme Lenore Burton |
¹ | 1545 |
M. Ken Epp |
Mme Lenore Burton |
M. Ken Epp |
Mme Lenore Burton |
M. Ken Epp |
Mme Lenore Burton |
M. Ken Epp |
Mme Lenore Burton |
M. Ken Epp |
La présidente |
M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.) |
¹ | 1550 |
Mme Lenore Burton |
M. Eugène Bellemare |
Mme Lenore Burton |
M. Eugène Bellemare |
M. Andy Burton |
M. Eugène Bellemare |
Mme Lenore Burton |
M. Eugène Bellemare |
Mme Lenore Burton |
M. Eugène Bellemare |
Mme Lenore Burton |
M. Eugène Bellemare |
Mme Lenore Burton |
¹ | 1555 |
M. Eugène Bellemare |
Mme Lenore Burton |
M. Eugène Bellemare |
Mme Lenore Burton |
M. Eugène Bellemare |
Mme Lenore Burton |
M. Eugène Bellemare |
La présidente |
M. Eugène Bellemare |
La présidente |
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD) |
º | 1600 |
Mme Lenore Burton |
Mme Libby Davies |
Mme Lenore Burton |
Mme Libby Davies |
Mme Lenore Burton |
º | 1605 |
Mme Libby Davies |
Mme Lenore Burton |
Mme Libby Davies |
Mme Lenore Burton |
Mme Libby Davies |
Mme Lenore Burton |
La présidente |
M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.) |
Mme Lenore Burton |
M. Raymond Simard |
Mme Lenore Burton |
M. Raymond Simard |
Mme Lenore Burton |
M. Raymond Simard |
Mme Lenore Burton |
M. Raymond Simard |
º | 1610 |
Mme Lenore Burton |
M. Raymond Simard |
Mme Lenore Burton |
M. Raymond Simard |
Mme Lenore Burton |
M. Raymond Simard |
La présidente |
M. Raymond Simard |
La présidente |
M. Raymond Simard |
Mme Lenore Burton |
M. Raymond Simard |
Mme Lenore Burton |
M. Raymond Simard |
Mme Lenore Burton |
M. Raymond Simard |
La présidente |
º | 1615 |
Mme Lenore Burton |
Mme Yvette Souque (gestionnaire en matière de programme, Secrétariat national à l'alphabétisation, ministère du Développement des ressources humaines) |
La présidente |
M. Ken Epp |
Mme Lenore Burton |
M. Ken Epp |
Mme Lenore Burton |
M. Ken Epp |
Mme Lenore Burton |
M. Ken Epp |
Mme Lenore Burton |
º | 1620 |
M. Ken Epp |
La présidente |
Mme Lenore Burton |
La présidente |
Mme Lenore Burton |
La présidente |
M. Ken Epp |
Mme Lenore Burton |
M. Ken Epp |
Mme Lenore Burton |
M. Ken Epp |
La présidente |
M. John Finlay (Oxford, Lib.) |
Mme Lenore Burton |
M. John Finlay |
Mme Lenore Burton |
M. John Finlay |
Mme Lenore Burton |
º | 1625 |
Mr. John Finlay |
Mme Lenore Burton |
Mr. John Finlay |
Mme Lenore Burton |
M. John Finlay |
Mme Lenore Burton |
M. John Finlay |
Mme Lenore Burton |
M. John Finlay |
Mme Lenore Burton |
M. John Finlay |
Mme Lenore Burton |
º | 1630 |
La présidente |
Mme Libby Davies |
La présidente |
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.) |
Mme Lenore Burton |
Mme Diane St-Jacques |
Mme Lenore Burton |
Mme Diane St-Jacques |
La présidente |
º | 1635 |
Mme Lenore Burton |
La présidente |
Mme Lenore Burton |
La présidente |
Mme Lenore Burton |
La présidente |
Mme Lenore Burton |
La présidente |
Mme Lenore Burton |
º | 1640 |
La présidente |
Mme Lenore Burton |
La présidente |
Mme Lenore Burton |
La présidente |
CANADA
Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 1er mai 2003
[Enregistrement électronique]
¹ (1530)
[Traduction]
La présidente (Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.)): Bon après-midi, mesdames et messieurs. La séance est ouverte.
Nous avons quorum. Je suis heureuse d'accueillir Mme Lenore Burton, du ministère du Développement des ressources humaines, qui est loin d'être une étrangère pour le comité. Elle est accompagnée de Mme Yvette Souque.
Sans plus tarder, je vais vous donner la parole. Vous savez comment les choses fonctionnent ici : vous avez cinq ou six minutes et ensuite, nous passons aux questions.
Mme Lenore Burton (directrice générale, Direction de l'apprentissage et de l'alphabétisation, ministère du Développement des ressources humaines): Merci, madame la présidente, de me donner l'occasion de présenter un sujet qui est, selon moi, de la plus haute importance au pays : s'assurer que tous les Canadiens bénéficient du niveau d'alphabétisme leur permettant de fonctionner efficacement au quotidien.
Je veux que vous compreniez que, lorsque je parle de l'alphabétisation, je veux dire la capacité de lire et de comprendre du matériel écrit, de consulter des documents comme des horaires d'autobus ou des formulaires de demande et de faire des calculs.
[Français]
Je vais vous présenter le travail accompli par le Secrétariat national à l'alphabétisation et les mesures que nous pouvons prendre en tant que nation pour avancer vers l'atteinte de notre objectif.
[Traduction]
Mais d'abord, j'aimerais remercier tous les membres du comité pour l'intérêt que vous avez témoigné envers ce dossier ainsi que pour votre désir de régler les problèmes d'alphabétisation au Canada. Je vous suis reconnaissante d'avoir répondu à l'appel de la ministre Stewart pour contribuer à améliorer les niveaux d'alphabétisme des adultes et pour trouver d'autres moyens efficaces de régler ce problème au sein de notre société canadienne. J'attends avec impatience vos recommandations sur des moyens de travailler encore plus efficacement à l'avenir.
Le comité sait que l'alphabétisation touche à presque tous les aspects de notre vie. L'alphabétisation est indispensable pour toute personne travaillant dans notre société axée sur l'information. Qu'il s'agisse de lire le bulletin scolaire de votre enfant, d'obtenir des services de soins de santé, d'utiliser un ordinateur ou de suivre une formation professionnelle, l'alphabétisation constitue la clé de la réussite des Canadiens au sein de la collectivité et de l'économie.
[Français]
L'alphabétisation a une grande influence sur notre santé et notre bien-être social et économique. Nous savons que le manque de capacité de lecture et d'écriture contribue directement à la pauvreté, à une mauvaise santé et au crime.
[Traduction]
L'alphabétisation est particulièrement importante dans l'économie du savoir d'aujourd'hui, laquelle exige que les travailleurs s'engagent à parfaire leurs connaissances et à perfectionner leurs compétences régulièrement. Elle représente littéralement la base de tout apprentissage—le « velcro » qui retient toutes les activités d'apprentissage.
La technologie a radicalement changé la vitesse de communication de l'information et de production de connaissances nouvelles. Les capacités de lecture et d'écriture sont plus importantes que jamais, car le seuil de compétence ne fait qu'augmenter.
Je ne suis pas ici pour répéter les paroles des autres intervenants ni pour présenter de nombreuses statistiques, bien que ce soit quelque chose que j'aime faire. Cependant, j'aimerais préciser un point critique qui justifie l'importance de réaliser davantage de progrès pour améliorer les niveaux d'alphabétisme au pays : huit millions de Canadiens en âge de travailler ne possèdent pas les capacités de lecture et d'écriture nécessaires, selon les critères de la communauté internationale, pour fonctionner au sein d'une société fondée sur le savoir. Il s'agit là d'un grave problème pour le Canada et également, d'un grave problème pour ces personnes.
Les recherches montrent que l'alphabétisation influe grandement sur le revenu. Chaque année de scolarité additionnelle augmente le revenu annuel d'environ 8 p. 100, dont le tiers est attribuable aux capacités de lecture et d'écriture accrues. Cela signifie que si nous parvenons à améliorer les niveaux d'alphabétisme de la population, cette dernière et le pays au complet pourront en tirer des avantages substantiels. C'est l'une des nombreuses et précieuses leçons tirées depuis que le gouvernement fédéral a assumé un rôle de chef de file dans l'alphabétisation en créant le Secrétariat national à l'alphabétisation (SNA) il y a 15 ans.
[Français]
Les membres du comité savent que l'alphabétisation est une responsabilité commune au Canada. Le secrétariat n'offre pas de cours de lecture et d'écriture directement aux Canadiens. Cette responsabilité incombe aux provinces par l'entremise des établissements d'enseignement, du secteur bénévole, des organismes d'alphabétisation, des représentants des syndicats et des entreprises, ainsi que d'autres intervenants dans le domaine.
Nous sommes conscients du rôle important de nos collègues provinciaux et territoriaux et respectons les considérations relatives aux différentes sphères de compétences. Nous reconnaissons que chaque région a des besoins et des priorités uniques et que les gens les plus près du problème au niveau de la collectivité sont également ceux qui sont les plus près des solutions. Voilà pourquoi le secrétariat fonctionne en partenariat.
[Traduction]
Le programme national sur l'alphabétisation vise à encourager et à favoriser la participation de tous les secteurs de la société pour augmenter les niveaux d'alphabétisme au Canada. À cet égard, l'un des moyens employés consiste à offrir de l'aide financière aux organismes non gouvernementaux et aux collectivités de partout au pays afin qu'ils s'attaquent aux problèmes.
Pour financer les programmes, le SNA possède un budget de 28 millions de dollars qui est divisé en deux volets presque égaux. Le volet fédéral-provincial-territorial appuie les projets d'alphabétisation destinés à satisfaire aux besoins régionaux et locaux. Nous y faisons souvent référence comme le volet communautaire. Les province et les territoires fournissent une somme d'argent équivalente la nôtre et, dans bien des cas, elles dépassent largement cette somme.
Le volet national appuie les projets réalisés par le secteur bénévole qui comprend les organismes nationaux d'alphabétisation, les coalitions provinciales et territoriales pour l'alphabétisation, les représentants des syndicats et des entreprises ainsi que d'autres organismes non gouvernementaux ayant un intérêt pour l'alphabétisation. Le SNA travaille directement avec ces organismes pour appuyer ses propres objectifs nationaux ainsi que ceux des organismes en question.
Depuis 1988, le SNA a financé plus de 5 000 projets novateurs. Je dois rappeler que le mandat du Secrétariat appuie expressément une approche à grande échelle afin de promouvoir l'alphabétisation partout au Canada. Nos activités touchent essentiellement les cinq domaines suivants.
Par exemple, le Secrétariat appuie l'élaboration de matériel et d'outils d'apprentissage et de formation axés sur la vie des Canadiens et qui répondent aux besoins particuliers des apprenants—il s'agit d'outils pratiques qui fonctionnent. De même, le Secrétariat encourage les activités de recherche grâce auxquelles nous pouvons mieux comprendre les répercussions de l'alphabétisation dans la vie des gens et trouver de nouvelles méthodes pour améliorer l'alphabétisation des adultes.
L'un des plus grands défis que nous avons à relever est de réussir à rejoindre le segment de la population qui profiterait le plus de l'alphabétisation. Le Secrétariat explore diverses façons d'entrer en contact avec les personnes qui ont des besoins en alphabétisation et de rendre les programmes accessibles à ceux et celles qui désirent améliorer leurs capacités de lecture et d'écriture. Par ailleurs, pour que nous puissions mener à bien cette activité, il faut améliorer la coordination et la mise en commun de l'information dans le domaine de l'alphabétisation.
¹ (1535)
[Français]
Enfin, le secrétariat s'emploie à mieux faire comprendre les questions d'alphabétisation au moyen d'activités de promotion et de sensibilisation du public et à essayer de trouver de nouvelles solutions. Il faut que les Canadiens sachent que l'alphabétisation fait partie d'un défi que nous avons tous à relever dans l'économie du savoir.
[Traduction]
En plus de contribuer aux cinq activités susmentionnées, le Secrétariat exerce d'autres fonctions pour appuyer l'alphabétisation. Il joue un rôle important dans l'établissement de partenariats entre les divers ministères fédéraux. L'alphabétisation est un dossier horizontal qui fait partie du mandat de bons nombres de ministères et organismes fédéraux comme le Service correctionnel du Canada, Santé Canada, le ministère de la Justice, Communication Canada, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, Citoyenneté et Immigration Canada, pour n'en nommer que quelques-uns.
Par exemple, le Secrétariat, en partenariat avec le Service correctionnel du Canada et Troubles d'apprentissage-Association canadienne, a suivi l'évolution d'ex-détenus pendant une période postcarcérale de deux ans et a constaté que le taux de récidive est considérablement plus bas chez ceux qui ont amélioré leur niveau de compétence. En fait, parmi ceux qui ont terminé le Programme de formation de base des adultes, on a noté que le taux de réadmission était inférieur de 12 p. 100. Ces résultats ont donné lieu à un changement permanent dans la façon dont le gouvernement fédéral utilise l'apprentissage pour combattre la criminalité, surtout lorsque l'on considère que près de 80 p. 100 des nouvelles personnes admises dans des établissements fédéraux n'ont pas de diplôme d'études secondaires.
Notre participation à l'Enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes et notre partenariat avec le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada ont permis d'appuyer d'importantes recherches et d'accroître considérablement nos connaissances de l'alphabétisation des adultes. Des huit millions de Canadiens en âge de travailler que j'ai mentionnés plus tôt, 58 p. 100 ont moins de 56 ans, ce qui signifie qu'ils sont dans la force de l'âge pour ce qui est de la main-d'oeuvre active, et ont le français ou l'anglais comme langue maternelle.
Nous devons atteindre ces Canadiens qui, en raison des difficultés qu'ils éprouvent en lecture et en écriture, s'exposent à un plus grand risque d'exclusion dans une société axée sur l'information et le savoir. Nous savons qu'il n'y a pas de solution miracle et que le gouvernement du Canada ne peut agir seul. Il faudra plutôt miser sur une méthode globale et à long terme qui mettra à contribution les provinces et les territoires, les employeurs, les syndicats, le milieu de l'éducation, le secteur bénévole et tous ceux et celles qui peuvent jouer un rôle pour tenter de relever le défi que pose l'alphabétisation des adultes au Canada.
Nous savons également que nous devons examiner attentivement les programmes existants pour voir comment nous pouvons intégrer le volet alphabétisation à toutes les initiatives de formation et d'apprentissage. Ce que nous faisons actuellement est loin d'être suffisant.
Dans la Stratégie d'innovation du Canada, Le savoir, clé de notre avenir : le perfectionnement des compétences au Canada , on a fixé comme objectif, d'une part, de réduire de 25 p. 100, au cours des dix prochaines années, le nombre de Canadiens dont les capacités de lecture et d'écriture sont faibles et, d'autre part, de faire en sorte que tous les étudiants qui terminent leurs études secondaires aient un niveau d'alphabétisme qui leur permettra de participer à l'économie du savoir. Pour reprendre la terminologie de l'Enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes, il s'agit du niveau 3.
¹ (1540)
[Français]
Madame la présidente, nous avons appris une leçon au cours des années: le Canada ne peut se permettre de ne pas résoudre ce problème, car les enjeux sociaux et économiques sont trop élevés. Les personnes qui se soucient du bien-être des collectivités, de notre économie et de la cohésion sociale ont tout intérêt à résoudre ce problème.
Nous nous rendons compte qu'une approche intégrée, coordonnée et mieux structurée est nécessaire pour atteindre les personnes qui éprouvent des difficultés en lecture et en écriture, mais qui ne participent pas au programme.
[Traduction]
En votre qualité de membres du comité permanent, vous avez entendu d'innombrables témoins. Nous savons que nous n'atteindrons pas nos objectifs tant que tous les enfants canadiens n'arriveront pas à l'école prêts à apprendre; tant que tous les adolescents qui terminent leurs études secondaires n'auront pas atteint le niveau 3 d'alphabétisme; et tant que les huit millions de Canadiens adultes dont les capacités de lecture et d'écriture sont faibles—la grande majorité d'entre eux sont actuellement sur le marché du travail—ne pourront pas améliorer leurs compétences pour atteindre le niveau 3 qui leur permettra de demeurer aptes à l'emploi et d'aider leur employeur à rester concurrentiel.
Pour parvenir à ces résultats, il faudra faire des investissements importants en ressources, en temps et en efforts. Mais vous pouvez être certains que le Secrétariat national à l'alphabétisation compte sur vous pour obtenir des renseignements et des conseils sur la façon d'en faire plus avec les ressources existantes et de mettre en place de nouvelles méthodes qui rendront les possibilités d'alphabétisation et d'apprentissage plus accessibles aux Canadiens.
Thank you. Merci beaucoup.
La présidente: Merci.
Le premier tour sera de sept minutes. Nous allons commencer avec M. Epp et ensuite, ce sera au tour de M. Bellemare.
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Merci beaucoup.
Je voudrais commencer par vous demander d'excuser mon retard. Il ne s'agit pas d'un manque de respect à votre égard, et c'est un sujet qui me tient à coeur. Non, j'ai été retenu par les journalistes et vous ne pouvez les ignorer, sinon ils vont écrire des méchancetés à votre sujet.
J'ai survolé votre mémoire. Merci de nous en avoir remis une copie. Je vous avais presque rattrapée lorsque vous avez terminé. Et c'est parce que j'ai la capacité de faire de la lecture rapide, ce qui, je suppose, est un indice de compétence en lecture. Je suis tellement heureux de pouvoir lire et écrire.
Mais tout le monde n'a pas cette chance.
Il s'agit de ma première question. Vous avez parlé du niveau 3 d'alphabétisme. Je me demande si vous ne pourriez pas me donner une définition très succincte de ce que cela signifie.
Mme Lenore Burton: Il est important que nous commencions à utiliser cette terminologie. Elle est fondée sur l'Enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes. Nous parlons de l'alphabétisme comme étant un continuum. Nous n'utilisons plus le mot analphabétisme parce qu'il existe très peu de gens qui n'ont absolument aucune compétence en matière de lecture et d'écrite. Il s'agit d'un continuum. Le niveau le plus faible est 1 et le niveau le plus élevé est 5. Le niveau 3, qui correspond grossièrement au niveau atteint à la fin des études secondaires, est considéré par la communauté internationale, par l'OCDE, comme le niveau qui est nécessaire aujourd'hui dans un monde axé sur l'information et le savoir.
M. Ken Epp: Très bien. Est-ce qu'on trouve aussi une définition de « vocabulaire »? Par exemple, combien y a-t-il de mots dans le vocabulaire d'une personne? Je sais qu'il y a des méthodes statistiques pour mesurer cette information. Est-ce que les compétences en calcul et d'autres compétences sont également prises en compte dans l'alphabétisme?
Mme Lenore Burton: L'Enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes est de calibre mondial. Elle a été élaborée au Canada par Statistique Canada. Il s'agit d'un test fonctionnel. Vous devez faire quelque chose lorsqu'on mesure vos compétences en alphabétisme. Les mesures portent sur trois domaines : la lecture et la capacité de comprendre ce que vous avez lu; le calcul et l'habileté arithmétique; et ce que nous appelons, l'utilisation des documents—la capacité de consulter un horaire d'autobus, un écran d'ordinateur ou un formulaire de demande.
¹ (1545)
M. Ken Epp: Il arrive que je suis éducateur. J'ai exercé cette profession pendant 31 ans avant d'arriver ici et maintenant, je ne parviens plus à amener les gens à apprendre quelque chose—ce n'est pas vrai.
J'ai une question. Dans le monde de l'éducation, j'étais dans un établissement postsecondaire pendant les années où les ordinateurs ont fait leur apparition. À mon arrivée, nous utilisions encore la règle à calcul. J'étais au département de mathématiques et nous avons progressé jusqu'à finir par utiliser des ordinateurs portables et des ordinateurs de bureau très élaborés. J'ai été témoin de toute cette évolution.
Une des plaintes qu'on entendait, c'était qu'avec les ordinateurs, il y aurait beaucoup plus d'activités de type stimulus-réponse, mais beaucoup moins de compréhension et d'apprentissage. Est-ce que vous savez quelque chose à ce sujet? De nos jours, on fait des blagues en disant que si vous avez des difficultés avec votre ordinateur, il vous suffit de demander l'aide de votre enfant qui est en 5e ou 6e année.
Constatez-vous que la technologie moderne favorise l'alphabétisme? Je suis enclin à croire qu'avec toutes ces choses mâchées d'avance, le cerveau n'est pas stimulé de manière approprié et qu'il y a moins d'apprentissage.
Mme Lenore Burton: En bout de ligne, l'Internet n'est qu'un médium à base d'imprimé. Vous lisez. Il y a l'exemple du projet très réussi d'AlphaRoute en Ontario qui enseigne à lire et à écrire en ligne. Je dirais que les ordinateurs nécessitent un niveau supérieur de compétences en lecture; alors, en contrepartie, ils nous aident à accroître nos compétences.
M. Ken Epp: Vous avez pratiquement besoin d'un certain niveau d'alphabétisme juste pour l'ouvrir.
J'ai quelques autres questions à poser et je suis certain que mon temps sera écoulé lorsque j'aurai terminé.
Vous avez indiqué ici que vous avez un budget d'environ 28 millions de dollars. Je perçois dans votre exposé que l'une de vos frustrations, c'est que ce financement n'est pas régulier. On en fait plus de cas dans les occasions politiques, mais il ne s'agit pas d'un revenu à long terme, durable, garanti. Il y a certaines fluctuations. Veuillez me corriger si je me trompe.
L'autre partie de la question concerne les projets novateurs. Vous avez indiqué que vous avez financé quelque 5 000 projets novateurs différents; pourtant, vous vous plaignez du fait qu'il n'y a pas de stratégie ou de politique unifiée.
Je vois que vous appuyez 5 000 projets; est-ce que cela ne suffit pas à convaincre votre groupe que ce que vous faites est vraiment une initiative unifiée et très bien ciblée? Avec tous ces projets différents, allez-vous tous dans la même direction et n'est-ce pas plutôt votre initiative elle-même qui manque de cohésion?
Mme Lenore Burton: Pour répondre à votre première question au sujet du financement, le Secrétariat national à l'alphabétisation jouit d'un budget de services votés, et ce budget s'élevait à 20 millions de dollars à l'origine. Il y a eu des années où le budget a fluctué légèrement, dans ce sens que nous avons reçu un peu plus d'argent, au moment de la crise de la morue et du programme lié à la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique. Nous avons reçu 7 millions de dollars de plus en 1997, mais nous pouvons compter sur ce 28 millions de dollars.
M. Ken Epp: Est-il assez stable?
Mme Lenore Burton: Oui. Nous pouvons compter sur cette somme.
M. Ken Epp: Très bien et maintenant pour la seconde partie...?
Mme Lenore Burton: Pour votre deuxième question, c'est toujours une source de frustration quand un projet très novateur donne de bons résultats dans une partie du pays et que vous n'avez pas vraiment les moyens de l'appliquer à l'échelle du pays. Mais étant donné que nous travaillons avec les collectivités et les groupes d'alphabétisation locaux pour répondre aux besoins locaux, une partie de ce travail doit être différent parce que les régions et les collectivités sont différentes et que nous essayons de répondre à leurs besoins particuliers.
Les besoins en alphabétisation du Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, sont très différents de ceux que l'on retrouve dans les T.N.-O. ou au Nunavut. Alors, nous avons besoin d'une partie de cette souplesse. Mais nous avons également besoin de prendre ce qu'il y a de meilleur et de pouvoir l'appliquer à l'ensemble du pays.
M. Ken Epp: Merci. Ces renseignements ont été très utiles. Je pense que mon temps est écoulé. Je n'ai pas démarré mon chronomètre.
La présidente: Vous avez trois secondes, que j'ajouterai à votre prochain tour.
Monsieur Bellemare.
[Français]
M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.): Madame Burton, je vous dis bravo pour tout le travail que vous faites.
[Traduction]
À propos des 28 millions de dollars, je ne voudrais pas paraître comme un membre de l'Alliance, mais ne s'agissait-il pas uniquement de projets novateurs? Y avait-il de la recherche ou avez-vous eu des projets qui étaient vraiment pratiques?
Laissez-moi reformuler cette question. Êtes-vous devenus la plaque tournante des fonds fédéraux en matière de programmes d'alphabétisation?
¹ (1550)
Mme Lenore Burton: Je ne suis pas certaine de comprendre votre question au sujet de la « plaque tournante ». Les 28 millions de dollars servent effectivement à financer des projets.
M. Eugène Bellemare: Les 28 millions de dollars viennent du fédéral.
Mme Lenore Burton: Oui, l'argent vient du budget du gouvernement fédéral.
M. Eugène Bellemare: Très bien. Alors, les gens de partout au pays, les organismes et les ONG en particulier—je suppose que ce n'est pas le cas des gouvernements provinciaux—vous réclament des fonds pour des projets particuliers.
M. Andy Burton: C'est exact.
M. Eugène Bellemare: Je suppose que ces projets sont novateurs ou s'agit-il uniquement de projets pratiques, de projets quotidiens, comme installer une école dans un centre commercial et inviter les gens à venir apprendre quelque chose?
Mme Lenore Burton: Il y a cinq domaines d'activité pour lesquels nous attribuons du financement. Il y a la promotion et la sensibilisation du public, et la recherche. Nous aidons les ONG à élaborer du matériel et des outils d'apprentissage. Nous utilisons l'argent pour améliorer la coordination pour l'ensemble des intervenants et des programmes dans le domaine de l'alphabétisation; et nous essayons d'améliorer l'accès aux programmes d'alphabétisation. Par exemple, nous avons apporté une contribution financière à un ONG pour qu'elle puisse élaborer un programme d'alphabétisation en ligne appelé AlphaRoute, de manière que les gens qui vivent dans des régions éloignées en Ontario aient accès à des programmes d'alphabétisation en ligne.
M. Eugène Bellemare: Très bien. Qu'est-il advenu des compétences de base et des habilités pour la vie quotidienne? Tout à coup, nous nous intéressons au niveau des études secondaire parce que nous sommes au Canada dans une économie fondée sur le savoir, mais oublions-nous ceux qui ne peuvent ni lire, ni écrire, ni compter; ou ceux qui n'arrivent pas à lire les instructions pour prendre l'autobus?
Mme Lenore Burton: Ces personnes seraient du niveau 1. On compte environ trois millions de Canadiens en âge de travailler dans ce niveau et ce sont exactement les personnes qui ont besoin de programmes d'alphabétisation.
M. Eugène Bellemare: Voici une problème que je vois : le jargon, un langage propre à une activité particulière. Parfois, lorsque je lis l'étiquette d'un produit pharmaceutique ou que j'achète un jouet à mes petits-enfants et que j'essaie de l'assembler, j'ai beaucoup de mal à comprendre comment faire—ou lorsqu'il s'agit de quelque chose de scientifique.
Mme Lenore Burton: Que dire d'IKEA?
M. Eugène Bellemare: Oui, justement. Si vous achetez quelque chose chez IKEA, eh bien, bonne chance! Je n'ai pas de problème de langue. Je peux parler et lire le français et l'anglais et j'ai un peu de connaissances en espagnol. J'ai un diplôme de maîtrise et pourtant je me sens parfois idiot lorsque j'essaie de comprendre ces étiquettes.
Vous êtes-vous adressé à ces gens qui écrivent dans un jargon de la façon dont ils écrivent leurs trucs? Vous êtes-vous déjà adressés à eux en disant : « Voici ce que vous avez écrit; avez-vous demandé à quelqu'un, à un groupe témoin, d'assembler cette chose ou de comprendre ce que vous avez écrit? »
Mme Lenore Burton: Oui. Cela faisait partie du mandat original du Secrétariat national à l'alphabétisation. Nous avons travaillé très fort avec Communication Canada sur toute la question d'un langage clair et simple et de la communication entre le gouvernement du Canada et les Canadiens ayant moins de compétences en matière d'alphabétisme. Nous avons élaboré des manuels sur l'utilisation d'un langage clair et simple. Nous avons aidé des organismes qui tenaient sincèrement à mieux se faire comprendre de leur clientèle.
Un bel exemple, c'est le travail que nous avons fait avec les juges et le système juridique, parce que ces gens sont appelés à rencontrer de nombreuses personnes dont le niveau de compétences en alphabétisme est très faible. Un autre bon exemple, c'est notre collaboration avec l'Association canadienne de santé publique. De fait, nous allons les aider à parrainer une conférence sur l'alphabétisation et la santé en juin. Lorsque les pharmaciens donnent des instructions à leurs clients sur la façon d'utiliser les médicaments prescrits, ils doivent pouvoir le faire dans un langage claire et simple. Alors, nous participons effectivement à ce genre de projet.
¹ (1555)
M. Eugène Bellemare: C'était par l'intermédiaire de Communication Canada. Avez-vous fait quelque chose directement avec les industries?
Mme Lenore Burton: Nous avons fait les deux.
M. Eugène Bellemare: Très bien.
Sur la question de l'immigration, des réfugiés et des capacités d'apprentissage, vous dites que 8 millions de personnes, sur 31 millions, sont analphabètes selon les critères internationaux.
Mme Lenore Burton: Leur niveau d'alphabétisme est faible.
M. Eugène Bellemare: Lorsque vous dites cela, nous pensons à une famille et nous disons : « Mon Dieu, ils sont 8 millions dans cette situation ». Nous oublions qu'un grand nombre parmi ces 8 millions de personnes peuvent être des réfugiés, des immigrants d'autres pays où la langue s'écrit différemment, comme l'arabe, par exemple. Alors, elles ont des difficultés. Elles peuvent parler un très bon anglais ou un très bon français, mais on pourrait leur administrer un test pour savoir si elles comprennent le jargon propre à une activité particulière et elles n'auraient aucune idée de ce que vous dites. Alors, vous les mettez toutes dans ce groupe de 8 millions, alors qu'en fait, elles ne devraient pas y être. Ces 8 millions devrait être divisés en groupes particuliers.
Qu'en est-il des gens qui ont des difficultés d'apprentissage? Ils forment un groupe. Lorsque vous dites 8 millions, dans mon esprit, je me dis que c'est une situation catastrophique et que les fonctionnaires des ministères de l'Éducation devraient tous être fouettés pour ne pas avoir fait leur travail. Mais lorsque vous réfléchissez un peu, vous vous rendez compte que la plupart de ces 8 millions de personnes pourraient être des réfugiés, des immigrants ou des personnes qui ont des difficultés d'apprentissage, par opposition à des personnes ordinaires qui auraient dû avoir appris à lire.
Mme Lenore Burton: Nous savons qui se trouve au niveau 1, le niveau le plus faible, et on compte environ 3,1 millions de Canadiens dans ce niveau. Lorsque nous travaillons sur des questions de politique, nous nous interrogeons toujours pour savoir si nous devrions utiliser le chiffre de 8 millions, parce que les gens semblent penser que c'est incroyable. Nous savons qui sont les 3 millions de Canadiens qui se situent dans ce niveau le plus faible, mais nous ignorons pourquoi ils sont là. Cette recherche reste à faire. Ce sera un sujet de recherche très important pour nous, parce que nous ne serons pas en mesure de concevoir les meilleures interventions si nous ne faisons pas cette recherche.
Pour ce qui est des immigrants, 36 p. 100 d'entre eux se classent dans le niveau 1, mais, le revers de la médaille, c'est que 25 p. 100 d'entre eux se classent dans les niveaux 4 et 5, les niveaux les plus élevés.
Dans le cadre de notre politique d'immigration, où nous essayons d'attirer chez nous les meilleurs et les plus intelligents et les plus qualifiés, nous constatons qu'il y a plus de diplômés de niveau post-secondaire dans le groupe des immigrants que dans celui des Canadiens de naissance. Nous avons attiré des gens très compétents, mais ils arrivent avec leur famille. Il y a aussi ceux qui jouissent du statut de réfugié qui éprouvent peut-être plus de difficulté.
M. Eugène Bellemare: Puis-je poser une dernière question?
La présidente: Non. Vous avez dépassé votre temps d'une minute.
M. Eugène Bellemare: Très bien. Merci.
La présidente: Madame Davies.
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Merci beaucoup.
Je tiens d'abord à dire que je ne sais pas qui sont les gens ordinaires à qui l'on a fait allusion. Mais j'y reviendrai plus tard.
Merci d'être venue nous rencontrer aujourd'hui. Si je me fie à ce qu'ont dit certains organismes communautaires qui ont témoigné devant le comité et certaines personnes que j'ai rencontrées, le Secrétariat jouit d'une excellente réputation. Il est perçu comme un véritable organisme de soutien et de défense. Vous faites de l'excellent travail.
º (1600)
Mme Lenore Burton: C'est bon à savoir.
Mme Libby Davies: J'aimerais vous poser quelques questions au sujet de ce que vous nous avez dit aujourd'hui. D'abord, vous avez laissé entendre qu'il était important d'intégrer les programmes d'alphabétisation. Vous avez dit, en parlant des initiatives de formation et d'apprentissage, que nous ne faisons pas assez de ce côté-là. Je suis d'accord avec vous. Toutefois, pour ce qui est des niveaux 1 à 5 que vous mentionnez, il est essentiel que tous les centres et programmes de formation et d'apprentissage mettent l'accent sur l'alphabétisation. Il est très important que nous sachions à quel niveau se situent les gens.
Certains organismes communautaires ont laissé entendre que les programmes d'alphabétisation sont peut-être moins efficaces, par exemple, que les programmes d'acquisition de compétences parentales, qui accordent une place au volet alphabétisation.
Croyez-vous que les efforts que nous déployons nous permettent vraiment d'atteindre les Canadiens dans leurs communautés, de leur fournir des ressources d'alphabétisation qui peuvent être intégrées à d'autres programmes?
Ma deuxième question va dans le même sens que celle de M. Bellemare. Il est vrai qu'il y a des personnes qui ont besoin d'aide et de ressources en matière d'alphabétisation. Mais il ne faut pas oublier dans tout cela les gouvernements, les entreprises, l'Internet, les instructions. Notre langue est en train de devenir de plus en plus compliquée et, à certains égards, de plus en plus obscure. Il faut utiliser des termes clairs et simples, démystifier la langue.
Vous avez dit que le problème touche les personnes dont les capacités de lecture et d'écriture sont faibles. Or, je pense qu'il faut adopter à l'égard de ce problème une approche globale qui englobe même ceux qui ont un « haut niveau d'alphabétisation ». Cela me rappelle le débat que nous avons eu concernant les personnes handicapées. Au début, on laissait entendre qu'il fallait changer la conception des logements, ou même du Parlement, pour que les personnes handicapées puissent y avoir accès. Toutefois, on a ensuite poussé le débat plus loin et commencé à parler de la nécessité d'adopter des normes universelles qui conviendraient à tout le monde, qu'on soit handicapé ou non, physiquement apte ou non. ll fallait adopter des normes universelles qui s'appliqueraient à l'ensemble de la communauté.
Cette observation est également valable pour l'alphabétisation. On devrait cibler les segments de la population qui sont confrontés à des problèmes particuliers. Je ne sais pas si j'ai raison ou non de dire cela, mais si on était plus sensibilisé aux enjeux de l'alphabétisation en général, peu importe notre niveau, que le langage utilisé était plus clair et simple... Prenons, par exemple, le gouvernement fédéral. Les documents que nous lisons sont parfois incroyables. Je me considère comme une personne cultivée, mais j'ai beaucoup de mal à comprendre le système judiciaire. Est-il possible d'adopter, à l'égard de ce problème, une approche plus globale?
Mme Lenore Burton: Votre première question sur l'intégration va dans le même sens que celle de M. Bellemare. Nous savons que les programmes d'alphabétisation où le matériel d'apprentissage est axé sur la vie des adultes donnent des résultats beaucoup plus concrets. Si vous êtes un parent et que vous voulez être en mesure, par exemple, de lire le bulletin scolaire de votre enfant, de lire une ordonnance, vous allez avoir le désir et la motivation d'apprendre. Si le matériel d'apprentissage est adapté à vos besoins, vos chances de réussite seront plus grandes.
Il en est de même pour le milieu de travail. Quand nous donnons des cours d'alphabétisation en milieu de travail, le matériel que nous utilisons est adapté au contexte, qu'il s'agisse d'un établissement manufacturier ou d'une entreprise de services comme le Château Laurier, qui a déjà offert des programmes d'alphabétisation dans le passé.
Quand je parlais d'intégration dans ma déclaration, je faisais allusion à tous les programmes offerts par le gouvernement du Canada. Nous avons l'occasion, par le biais de ces programmes, qu'ils s'adressent aux Autochtones ou qu'ils traitent de formation préprofessionnelle, de promouvoir l'alphabétisation. Nous n'avons pas de programmes qui mettent l'accent sur l'amélioration des capacités de lecture et d'écriture des chômeurs. Nous avons plutôt des programmes qui mettent l'accent sur la formation préprofessionnelle des chômeurs, pour qu'ils puissent réintégrer le milieu de travail le plus rapidement possible.
Mme Libby Davies: Existe-t-il quelque chose du côté de l'assurance-emploi? Il y a un important programme du gouvernement qui met l'accent sur la formation continue des personnes qui sont au chômage ou confrontées à des difficultés.
Mme Lenore Burton: On pourrait intégrer davantage le volet alphabétisation aux initiatives qui sont prises dans ce domaine. Il y a sans doute des cours d'alphabétisation et d'amélioration du niveau d'alphabétisation qui sont donnés. Toutefois, comme ils ne s'adressent pas vraiment à des groupes cibles, il n'existe aucune façon d'évaluer les résultats ou de voir combien de personnes suivent cette formation. Certains des programmes peuvent contribuer à améliorer le niveau l'alphabétisation, mais ils ne s'adressent pas à des groupes cibles. Je n'exagère pas en disant cela.
º (1605)
Mme Libby Davies: Pour ce qui est de la deuxième question, de l'approche plus vaste qu'il faudrait adopter à l'égard de l'alphabétisation, de la nécessité d'adopter un langage clair et simple au sein du gouvernement, dans le milieu des affaires, le secteur privé, quel est votre avis là-dessus?
Mme Lenore Burton: Il est dans l'intérêt de tous les organismes qui veulent communiquer avec leurs clients, les citoyens, d'utiliser un langage clair et simple. Toutefois, nous constatons que le seuil de compétences augmente, et je soupçonne que c'est parce que la société dans laquelle nous vivons est davantage axée sur l'information et le savoir.
Mme Libby Davies: Est-ce que vous devez, dans le cadre de votre mandat, analyser ce que font les ministères, par exemple, sur le plan de la communication en général, déterminer s'ils utilisent des stratégies de communication qui sont trop ridicules?
Mme Lenore Burton: C'est ce que prévoyait, à l'origine, le document du cabinet qui a permis au Secrétariat national à l'alphabétisation de voir le jour. Toutefois, au fil des ans, le mandat du Secrétariat a évolué, de sorte que cette responsabilité incombe maintenant à Communications Canada.
Mme Libby Davies: Est-ce que vous travaillez ensemble?
Mme Lenore Burton: Nous travaillons en étroite collaboration avec lui.
La présidente: Monsieur Simard.
M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.): Merci, madame la présidente.
Je voudrais revenir à ce qu'a dit Mme Davies au sujet du SNA. Je ne sais plus combien de témoins nous avons rencontrés—peut-être entre 50 et 100—mais nous n'avons entendu aucun commentaire négatif au sujet du Secrétariat. Nous n'avons entendu que des choses positives. Donc, continuez à faire ce que vous faites. Je n'ai jamais entendu autant de compliments.
Mme Lenore Burton: Merci. Puis-je me permettre d'indiquer au comité que certains des joueurs clés du Secrétariat sont présents dans la salle?
M. Raymond Simard: Ce compliment s'adresse également à eux.
Mme Lenore Burton: Merci.
M. Raymond Simard: Ma première question porte sur l'éducation et la sensibilisation du public. J'étais à Winnipeg il y a quelques semaines, et quand j'ai fourni quelques chiffres sur les niveaux d'alphabétisme, les gens sont restés bouche bée. Ils avaient du mal à me croire—8 millions de personnes. Il est évident que nous n'avons pas réussi à atteindre tout le monde. Je ne sais pas si les Canadiens sont conscients de la situation qui existe, mais s'ils l'étaient, ils exerceraient probablement davantage de pression sur les gouvernements pour qu'ils s'attaquent à ce problème grave. En tout cas, cela m'a ouvert les yeux.
Pouvez-vous nous dire ce que nous faisons pour sensibiliser le public à cette question?
Mme Lenore Burton: La sensibilisation fait partie de notre mandat, de l'un de nos cinq domaines d'activités. Nous finançons de nombreuses coalitions ou organisations provinciales, comme ABC CANADA, qui entreprennent des campagnes de promotion. ABC CANADA a connu beaucoup de succès. Il y a dans les pages jaunes de chaque annuaire téléphonique au Canada la rubrique « apprendre », qui vous met en contact avec plusieurs centres d'apprentissage et d'alphabétisation de votre région.
M. Raymond Simard: Mais cela s'adresse aux personnes qui ont des problèmes, n'est-ce pas? Qu'en est-il du grand public qui veut se renseigner là-dessus? Est-ce qu'il y a quelque chose que je n'ai pas saisi?
Mme Lenore Burton: Non, la question est intéressante. Je dois dire que nous ne nous sommes pas encore penchés là-dessus.
Par ailleurs, il est intéressant de noter que les personnes de niveau 1 savent qu'elles ont un problème. Toutefois, ce sont les personnes de niveau 2 qui sont surtout vulnérables. La majorité d'entre elles travaillent et arrivent à se débrouiller jusqu'à ce que leur employeur introduise de nouvelles technologies ou de nouvelles méthodes, comme ISO 9000, qui exigent la consultation d'un très grand nombre de documents. Elles risquent de perdre leur emploi et d'être obligées de se trouver du travail dans un autre domaine. C'est là que leurs problèmes deviennent évidents.
Quand nous leur avons demandé d'évaluer leurs compétences, 90 p. 100 d'entre elles ont répondu qu'elles étaient de bonnes à excellentes.
M. Raymond Simard: C'est intéressant.
Le gouvernement a beaucoup parlé, dernièrement, de la stratégie d'innovation. J'aimerais savoir si, à votre avis, cette stratégie peut aider le ministère du Développement des ressources humaines, entre autres, à s'attaquer au problème de l'alphabétisation?
Est-ce que cette stratégie s'avère utile? Nous parlons d'innovation, mais en même temps, l'écart que doivent combler ces personnes ne cesse de s'accentuer. Est-ce que cette stratégie d'innovation peut contribuer à améliorer l'alphabétisation au Canada?
º (1610)
Mme Lenore Burton: Absolument. D'abord, je tiens à dire que les personnes cultivées constituent, à mon avis, une source d'innovation. Nous savons que 25 p. 100 des emplois qui vont être créés d'ici 2005 exigeront un diplôme universitaire. Or, ces 25 p. 100 ne pourront, à eux seuls, combler le déficit. Nous allons devoir améliorer nos compétences si nous voulons innover et être concurrentiels.
Le Conference Board of Canada publie chaque année un document que vous connaissez peut-être. Il s'intitule « Performance and Potential : Assessing Canada's Social and Economic Performance ». Il établit une comparaison entre le Canada et un groupe de pays concurrents. Chaque année, la Suède arrive en tête de liste au chapitre des niveaux d'alphabétisation, de l'éducation et de la formation. Elle se classe au premier ou au deuxième rang au chapitre de l'innovation.
La stratégie « Le savoir, clé de notre avenir : Le perfectionnement des compétences au Canada » constitue un pas dans la bonne direction. Elle définit, comme on se plaît à l'expliquer à Ottawa, les enjeux de l'alphabétisation et les mesures que nous devons prendre pour y venir à bout. Nous avons amorcé le dialogue à l'échelle nationale. Nous avions mis en place, une année... une stratégie nationale d'engagement. Nous avions organisé une rencontre fort intéressante, à Toronto, où de nombreux participants avaient eu l'occasion de s'entretenir avec le ministre.
Nous commençons à avoir, de plus en plus, une meilleure idée des politiques et des programmes que nous devrons mettre en place pour relever de façon concrète ce défi.
M. Raymond Simard: Le gouvernement a annoncé, tout récemment, la création d'un institut sur l'apprentissage au coût de 100 millions de dollars. Je ne sais pas si tous les critères de financement ont été établis. À votre avis, est-ce que cet institut va avoir un rôle à jouer au chapitre de l'alphabétisation?
Mme Lenore Burton: Je sais que le mandat et la structure de l'institut ne sont pas encore tout à fait définis. L'institut aura pour mandat de recueillir de l'information sur l'apprentissage et de transmettre ces renseignements aux Canadiens. J'espère qu'il aura un rôle important à jouer, parce que le mandat de l'institut touche à tous les aspects de l'apprentissage, y compris l'apprentissage permanent, et l'alphabétisation devrait en faire partie.
Il est encore trop tôt pour savoir quel genre de possibilités va nous offrir l'institut, mais l'alphabétisation devrait faire partie de son mandat.
M. Raymond Simard: Devrions-nous exercer des pressions pour qu'il consacre une partie de ses fonds à des programmes d'alphabétisation?
Mme Lenore Burton: Absolument, si son mandat consiste, entre autres, à effectuer des recherches importantes fondées sur les résultats.
M. Raymond Simard: Est-ce qu'il me reste encore du temps, madame la présidente?
La présidente: Il vous reste une minute.
M. Raymond Simard: Allons-nous avoir un deuxième tour?
La présidente: Peut-être.
M. Raymond Simard: À votre avis, si le gouvernement décidait d'accroître le financement accordé au SNA, est-ce qu'il faudrait investir les fonds, par le biais du Secrétariat, directement dans les communautés? Croyez-vous qu'un soutien financier accru amènerait également les provinces, et peut-être les municipalités, à investir davantage?
Mme Lenore Burton: Je l'espère. Comme je l'ai indiqué dans ma déclaration liminaire, la mise sur pied du SNA, il y a 15 ans, a eu ceci d'avantageux qu'il nous a permis d'offrir à chaque province et territoire un fonds d'alphabétisation pour leurs communautés, s'ils acceptaient de fournir le même montant. C'est ce qu'ils ont fait, et même plus. Bon nombre d'entre eux consacrent plus d'argent à l'alphabétisation—l'Ontario est un bon exemple— que ne le fait le Secrétariat.
M. Raymond Simard: Est-ce qu'ils doivent verser une contribution identique à la vôtre?
Mme Lenore Burton: Vous voulez dire pour le volet provincial-territorial?
M. Raymond Simard: Oui.
Mme Lenore Burton: Ils fournissent le même montant, soit 12 millions.
M. Raymond Simard: D'accord. Merci beaucoup.
La présidente: Toujours dans le même ordre d'idées, est-ce que les provinces emboîteraient le pas si l'on investissait plus d'argent dans le fonds?
º (1615)
Mme Lenore Burton: Je vais demander à Yvette Souque de répondre à la question, parce qu'elle travaille depuis longtemps avec les provinces.
Il ne faut pas oublier qu'il y a des provinces et des territoires qui ne peuvent augmenter de façon importante les fonds qu'ils consacrent aux programmes, ce qui n'est pas le cas d'autres provinces. Le financement, à l'origine, était proportionnel au nombre d'habitants, aux ressources que pouvaient consacrer les provinces et aux niveaux d'alphabétisation. Toutefois, nous n'avions pas à l'époque les outils de recherche que nous possédons aujourd'hui pour mesurer les niveaux d'alphabétisation.
Yvette.
Mme Yvette Souque (gestionnaire en matière de programme, Secrétariat national à l'alphabétisation, ministère du Développement des ressources humaines): Pour ce qui est des contributions identiques, comme l'a mentionné Lenore, dans la plupart des provinces, la contribution est supérieure à la nôtre. Au Manitoba, nous avons commencé avec une contribution de 500 000 $ et, au fil des ans, la province a ajouté au moins 100 000 $ au fonds, et ce, tous les ans... bien entendu, nous n'avons pas fait la même chose. La contribution du Manitoba est trois fois plus élevée que la nôtre. Celle de l'Ontario est dix fois plus élevée.
Plusieurs provinces ont dit, très clairement, que notre présence leur permet de garder la mainmise sur ces fonds quand des coupures sont décrétées, et aussi d'obtenir plus d'argent. Donc, je pense que nous jouons un rôle très important.
La présidente: Monsieur Epp.
M. Ken Epp: Merci, madame la présidente.
J'aimerais vous poser une question—vous en avez parlé brièvement—au sujet des Territoires du Nord-Ouest. Je ne sais pas s'il y a des provinces qui ne versent pas de contributions identiques. Il me semble qu'il serait préférable de déterminer, par des méthodes statistiques, le pourcentage de personnes qui ont besoin d'une aide et ensuite de procéder au financement du programme par habitant. On pourrait, de cette façon, distribuer les fonds en fonction des besoins. Êtes-vous d'accord?
Mme Lenore Burton: Oui, dans une certaine mesure. Statistique Canada est en train de préparer la nouvelle version de l'enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes. Cette fois-ci, nous allons sonder un plus grand nombre de Canadiens. Nous avons procédé à un suréchantillonnage auprès des Autochtones et des habitants du Nord parce que nous savons qu'ils sont confrontés à de véritables défis. Toutefois, ils sont si peu nombreux que si vous optez pour le financement par habitant, ils vont avoir de la difficulté à obtenir les fonds dont ils ont besoin.
M. Ken Epp: Il faudrait presque recourir à une méthode de financement à base zéro—calculer ce que coûterait le programme et ensuite voir si vous pouvez obtenir les fonds pour l'offrir.
Mme Lenore Burton: Les 13 millions de dollars investis dans le volet provincial-territorial sont précieux. Les provinces s'attendent à recevoir au moins ce montant tous les ans. Dans le cas du Québec, il existe un protocole d'entente formel qui régit ce fonds.
Nous avons rationalisé nos rôles au fil des ans, de sorte qu'ils savent qu'ils peuvent compter sur le Secrétariat pour faire certaines choses. Ils s'occupent du reste. Nous avons rationalisé les deux volets du programme.
M. Ken Epp: Pour ce qui est de l'administration, est-ce que vous faites affaire avec des contractuels? Est-ce que vous recrutez des groupes ou des organisations pour assurer la prestation des programmes, ou est-ce que vous le faites vous-mêmes?
Mme Lenore Burton: Nous n'offrons directement aucun cours d'alphabétisation aux Canadiens. Par contre, dans le cadre de notre volet provincial et territorial, nous faisons chaque année un appel de propositions. Les groupes communautaires et les organismes locaux nous envoient des propositions sur ce qu'ils aimeraient faire. Un comité d'examen composé de personnel du SNA, de personnel provincial en matière d'alphabétisation et de représentants des autres groupes concernés se réunit ensuite pour examiner les propositions que nous avons reçues. Nous les classons en fonction de nos priorités, puis nous en finançons le plus possible.
M. Ken Epp: J'aimerais savoir comment vous évaluez vos résultats. Vous avez parlé d'une enquête, mais évaluez-vous les résultats de chaque personne adhérant au programme ou procédez-vous par échantillonnage? Comment faites-vous?
Mme Lenore Burton: Nous n'évaluons pas les résultats de chaque personne. Comme nous finançons des organismes externes pour faire ce travail, nous ne comptons pas le nombre de Canadiens qui se prévalent de nos programmes. Selon la dernière évaluation réalisée par le SNA, c'est justement l'un de nos points à améliorer. Il nous faut vraiment trouver des moyens de recueillir ces données.
Nous commençons à avoir de bons outils pour évaluer le niveau d'alphabétisme des personnes qui adhèrent à notre programme. Nous devrions également les évaluer aux termes du programme pour voir combien de temps il leur a fallu et à quel point elles se sont améliorées.
º (1620)
M. Ken Epp: Je vous recommanderais même de charger une personne ou un organisme externe au programme d'en produire des rapports. Il serait tragique que les personnes qui obtiennent les contrats pour faire ce travail utilisent votre argent sans faire ce pour quoi elles l'ont reçu de vous.
La présidente: Pouvez-vous nous remettre une copie de cette évaluation?
Mme Lenore Burton: Nous sommes en train d'y mettre la touche finale. Elle n'a pas encore été rendue publique. J'espère pouvoir en obtenir copie pour vous, mais l'évaluation ne sera pas rendue publique avant l'été.
La présidente: Ce serait extrêmement utile pour la préparation du rapport de notre comité.
Mme Lenore Burton: Je comprends.
La présidente: Je suis désolée, vous n'allez pas perdre de votre temps.
M. Ken Epp: C'est bon, cela ne me dérange pas. C'était une bonne question.
Vous avez indiqué que beaucoup de personnes affichaient un bas niveau d'alphabétisme, mais qu'elles avaient tout de même un emploi. Avez-vous réalisé des études sur celles qui sont employées par le gouvernement fédéral? Et je ne plaisante pas.
Mme Lenore Burton: Non, nous n'en avons pas faites.
M. Ken Epp: Vous ne les avez donc pas catégorisées par groupe d'employés.
Mme Lenore Burton: Non. Notre enquête nous permettrait de savoir qui travaille dans l'administration publique, par catégorie générale de profession, mais nous ne pourrions pas savoir précisément qui travaille dans la fonction publique fédérale.
Un comité conjoint de transition de carrière a été établi par le Secrétariat du Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique. Il commence à se pencher sur la question de l'alphabétisme chez les fonctionnaires fédéraux, surtout qu'à une certaine époque, il fallait une 10e année pour pouvoir accéder à la fonction publique fédérale. Le comité travaille en collaboration avec l'Alliance de la Fonction publique du Canada sur ce dossier.
M. Ken Epp: C'est bien.
Je crois que j'ai terminé pour le moment.
La présidente: Merci.
Monsieur Finlay.
M. John Finlay (Oxford, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente. Je vous remercie beaucoup pour votre exposé de cet après-midi.
J'ai lu le document que nous avons reçu des attachés de recherche de la Bibliothèque du Parlement. J'essaie seulement de bien comprendre la situation. Je vous demanderais donc de faire preuve d'indulgence à mon endroit si je me renvoie à ce document.
Ai-je raison de dire que le volet de financement fédéral-provincial-territorial est essentiellement une collaboration avec les provinces et les territoires—avec les ministres de l'Éducation ou du Travail, par exemple? En effet, les provinces et les territoires doivent fournir au moins le même montant que vous et même plus, et vous y consacrez 12 millions de dollars sur 28.
Mme Lenore Burton: Oui.
M. John Finlay: Il y aura donc un financement d'au moins 24 millions de dollars environ.
Consacrez-vous également 12 millions de dollars à l'autre volet, 16 millions de dollars ou l'investissement est-il à peu près le même?
Mme Lenore Burton: Nous consacrons environ 14 millions de dollars au volet national.
M. John Finlay: Les projets des promoteurs ciblent-ils les besoins régionaux ou locaux?
Mme Lenore Burton: Les projets financés dans le cadre du volet provincial-territorial répondent à des besoins régionaux ou locaux.
º (1625)
Mr. John Finlay: D'accord. Et le volet national appuie des projets réalisés en partenariat avec des organismes non gouvernementaux et le secteur bénévole.
Mme Lenore Burton: C'est le volet de financement que nous utilisons pour financer les six organismes d'alphabétisation qui ont comparu devant vous comme témoins. Nous finançons également de la recherche grâce à ces fonds.
Mr. John Finlay: Vous prévoyez également utiliser les fonds de ce volet pour contribuer aux engagements financiers d'autres intervenants du domaine.
Mme Lenore Burton: Absolument. Le Secrétariat national à l'alphabétisation a notamment fait du très beau travail—fort fastidieux, soit dit en passant—en allant frapper à la porte d'organismes non consacrés à l'alphabétisation, comme l'Institut national pour les aveugles et l'Association canadienne de santé publique pour les inciter à participer à des projets d'alphabétisation. En règle générale, lorsqu'ils décident de participer à des projets d'alphabétisation, nous pouvons fournir un financement de base, mais ils le poursuivent ensuite.
M. John Finlay: Bien entendu, vous travaillez également à favoriser des pratiques exemplaires.
Selon les attachés de recherche du Parlement, certains témoins critiquent le mandat du Secrétariat, qui l'empêcherait de financer à long terme des projets qui fonctionnent bien. Si je comprends bien, si un projet fonctionne, c'est très bien, mais nous ne sommes censés le financer que pendant un an ou deux, peut-être trois. Y a-t-il une limite d'une fois après laquelle vous cessez le financement?
Mme Lenore Burton: Nous finançons les projets jusqu'à trois ans. Lorsque j'ai dit qu'il était difficile de prendre un projet local ou provincial particulièrement fructueux pour l'étendre au pays, c'est ce à quoi je faisais allusion.
M. John Finlay: Il faut donc garder ces différences en tête.
Mme Lenore Burton: Je voudrais préciser que les fonds octroyés dans le cadre du volet provincial-territorial ne sont pas des transferts aux provinces. Nous nous asseyons avec les représentants de la province pour décider conjointement quels projets nous financerons chaque année. Nous revenons ensuite à Ottawa et faisons des recommandations à la ministre. Elle nous donne son consentement, puis le Secrétariat national à l'alphabétisation octroie le financement.
M. John Finlay: Cela semble corroborer la critique constante du Québec que nous nous mêlons de l'éducation.
Mme Lenore Burton: En fait, le modèle du Québec est excellent. Nous avons une entente tacite avec toutes les provinces sauf le Québec, avec lequel nous avons signé un protocole d'entente officiel. Ce protocole d'entente a été signé conjointement par le ministre de Développement des ressources humaines Canada, le ministère de l'Éducation du Québec et le Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes du Québec. Il prescrit les modalités de notre relation de financement avec le Québec, dont le nom des groupes financés, le montant qui va aller à la province ainsi que nos responsabilités et les siennes.
M. John Finlay: C'est probablement une initiative unique.
À votre avis, quel serait le plus grand besoin du Canada pour rehausser le niveau d'alphabétisme? Quel est le plus grand avantage économique et social pour les contribuables d'un investissement en alphabétisation?
Mme Lenore Burton: C'est une question difficile. Il y a plusieurs besoins. Il faut à la fois penser prévention et solutions. Il faut nous assurer que les enfants qui arrivent à l'école sont prêts à apprendre. C'est d'ailleurs l'objectif de l'Entente sur le développement de la petite enfance et des prestations fiscales pour enfants. L'enfant doit arriver à l'école prêt à apprendre.
Les provinces sont les premières responsables du système scolaire de la maternelle à la fin du secondaire, et bon nombre d'entre elles ont montré récemment qu'elles s'attaquaient sérieusement au problème des 25 p. 100 d'élèves diplômés du secondaire qui n'atteignent pas le niveau 3. Ils ont tous réussi leurs cours obligatoires, mais ont échouent les examens d'alphabétisme de niveau 3. Nous espérons que les provinces vont prendre ce problème très au sérieux et qu'elles vont se doter de programmes visant à y remédier.
Par ailleurs, l'alphabétisation des adultes relève principalement du gouvernement fédéral, qui s'occupe de bon nombre des groupes qui ont besoin d'aide. Je pense notamment aux Autochtones canadiens, aux immigrants qui arrivent au pays et aux personnes souffrant d'une incapacité. Nous avons également un rôle important à jouer auprès des bénéficiaires de l'assurance-emploi. Cet effort doit être majeur. Il faut mettre à contribution beaucoup de ministères fédéraux, de provinces, d'entreprises, de syndicats et de groupes d'intérêt.
J'aimerais pouvoir prononcer une formule magique pour remédier au problème, mais c'est impossible.
º (1630)
La présidente: C'est au tour de Mme Davies, qui a une brève question à poser.
Mme Libby Davies: S'il y a d'autres députés qui n'ont pas encore posé de questions, je serai heureuse...
La présidente: Madame St-Jacques.
[Français]
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.): Merci, madame la présidente.
Comme tous mes collègues, j'aimerais vous féliciter, vous et vos collègues, pour l'excellent travail que vous faites.
On entend souvent dire qu'il est difficile d'attirer les gens ou de les garder, cela pour différentes raisons. Avez-vous fait de la recherche pour savoir ce qui pourrait être fait pour convaincre ces gens de suivre des cours ou pour les garder? On sait que ces gens ont souvent honte.
[Traduction]
Mme Lenore Burton: Vous avez absolument raison. Nous savons que de 5 à 10 p. 100 seulement des personnes qui auraient besoin de cours de perfectionnement suivent ces cours. Nous avons cherché à comprendre pourquoi.
Les raisons les plus fréquemment évoquées sont l'interférence avec le travail, les problèmes économiques, les soins des enfants et les responsabilités familiales. Ces gens ont beaucoup de problèmes liés à la pauvreté et ont besoin d'autres services sociaux. Je dois dire que c'est également un problème systémique dans les programmes.
Lorsque nous avons mené un sondage pour demander aux gens pourquoi ils ne suivaient pas de cours, 43 p. 100 ont répondu qu'ils ne pouvaient pas y aller et que les cours ne se donnaient pas à des moments opportuns. Bon nombre de ces programmes administrés par des bénévoles. La majorité des programmes communautaires d'alphabétisation n'ont qu'un employé à temps plein ou aucun. Beaucoup sont interrompus pendant plus de quatre semaines par année, généralement durant l'été. Lorsqu'on dépend de bénévoles pour alphabétiser les adultes, la base n'est pas très stable.
[Français]
Mme Diane St-Jacques: Des témoins nous ont mentionné cette semaine qu'il y avait une certaine flexibilité au niveau des programmes, mais qu'il pourrait y en avoir davantage pour qu'on puisse s'adapter aux régions ou à certaines situations. On nous donnait l'exemple des femmes immigrantes, qui veulent bien aller aux cours, mais qui ne veulent pas laisser leurs enfants à d'autres. Tout dépend des besoins de chaque région.
Est-ce qu'on pourrait rendre les programmes encore plus flexibles, sans toutefois perdre le mécanisme d'évaluation et le contrôle de ce qu'on offre afin d'obtenir les résultats escomptés?
[Traduction]
Mme Lenore Burton: Bien sûr que nous le pourrions. Nous ne finançons aucun projet visant le recrutement ou le maintien en poste. Cela ne fait pas partie de notre mandat.
Il est intéressant de noter que lorsque nous avons interrogé les gens peu alphabétisés, ils nous ont dit vouloir fréquenter des institutions accréditées. Ils veulent apprendre dans nos collèges et nos commissions scolaires, comme au Québec. Beaucoup refusent de suivre des cours offerts dans un lieu public comme un café. Le tiers d'entre eux hésitent à adhérer à un programme d'alphabétisation en milieu de travail parce qu'ils craignent que leur employeur ne découvre qu'ils sont peu alphabétisés et qu'il les mette à pied. Certaines personnes font beaucoup d'efforts pour se cacher en milieu de travail.
Lorsque nous les avons interrogées sur leurs raisons émotives et que nous leur avons demandé si elles avaient honte, nous nous attendions à ce que beaucoup de personnes ne veulent pas prendre de cours de perfectionnement parce qu'elles ne voulaient pas que les gens en général le sachent, mais ce facteur ne semble pas jouer. Il semble que ce soit un mythe.
[Français]
Mme Diane St-Jacques: Merci. Merci, madame la présidente.
[Traduction]
La présidente: J'ai une dernière question pour vous. Selon Le savoir, clé de notre avenir, on veut que le nombre de personnes qui le font diminue de 25 p. 100 d'ici 10 ans. Qui a établi cet objectif?
º (1635)
Mme Lenore Burton: C'est le ministère qui a établi cet objectif pendant la préparation du Savoir, clé de notre avenir. C'est une proposition. Nous voulions susciter le débat pour que les gens en discutent pendant le processus national de concertation, mais nous voulions également être réalistes.
La présidente: D'accord. Est-ce un objectif réaliste compte tenu des 28 millions de dollars dont vous disposez actuellement? Vous fixez un objectif pour 10 ans et vous voulez qu'il soit réaliste, mais combien croyez-vous que cela va coûter?
Mme Lenore Burton: Il est prématuré de parler d'argent, parce que pour atteindre cet objectif, nous allons devoir tenir des discussions importantes avec les provinces et les autres groupes intéressés. Nous allons devoir travailler ensemble pour concevoir une stratégie nationale. Nous sommes l'un des rares pays industrialisés du monde qui n'ait pas sa stratégie nationale d'alphabétisation.
La présidente: Je crois que nous avons besoin d'une stratégie d'alphabétisation, mais je m'inquiète de vous voir établir un objectif de 25 p. 100 si vous ne savez pas bien combien cela va coûter. Comment allez-vous convaincre le gouvernement d'accepter cette proposition? Comment nous préparons-nous à la financer? Combien de temps vous faudra-t-il encore avant d'avoir une idée des coûts?
Mme Lenore Burton: Il nous faut en discuter concrètement. Nous devons d'abord nous asseoir pour essayer de comprendre tout ce que nous faisons et tout ce que les provinces font. Où sont les lacunes? Nous devons discuter ensemble des priorités que chacun de nous doit se fixer, convenir des rôles et des responsabilités de chacun et déterminer comment nous allons évaluer la réussite du programme et ses résultats. Nous pourrons ensuite commencer à avoir une idée des coûts.
Une partie des fonds pourrait venir de programmes déjà en place, qui pourraient mettre l'accent sur l'alphabétisation. Il faudrait également prévoir de nouveaux fonds, de nouvelles ressources.
La présidente: Vous avez cité, à titre de lacunes, votre difficulté à évaluer vos résultats. Je m'en inquiète. Vous ne savez pas si vous avez un bon rendement. Nous entendons de bons commentaires, nous entendons votre position. Vous vous êtes fixé un objectif de 25 p. cent d'ici 10 ans. Quand aurez-vous des données à nous fournir pour nous donner une idée de ce qu'il faudra investir pour y arriver?
Mme Lenore Burton: Je ne sais pas exactement quand je pourrai vous dire de combien nous aurons besoin pour y arriver. Le gouvernement fédéral ne peut y arriver seul. Nous devons mobiliser les provinces, de même que les entreprises et les syndicats, pour être honnête, parce que la majorité des gens qui auraient besoin de perfectionnement travaillent actuellement.
J'ai dit que nous ne pouvions pas évaluer nos résultats, mais nous pouvons évaluer le financement octroyé dans le cadre du programme du SNA. Nous savons combien de projets ont été réalisés. Nous savons combien de recherches ont été réalisées. Lorsque le SNA a été fondé, personne ne parlait de l'alphabétisation des adultes. Il n'y avait pas de matériel d'apprentissage pour les adultes. On n'en parlait pas. Il n'y avait aucune infrastructure en place pour offrir des cours d'alphabétisation.
En 1988, nous n'avions pas encore les outils et les mécanismes nécessaires pour évaluer les résultats individuels, le nombre de personnes touchées par nos programmes et la hausse des capacités de lecture et d'écriture. La technologie nous permet maintenant de le faire. Nous commençons à travailler avec nos partenaires pour mettre les morceaux en place. Ce sera certainement un aspect important de toute nouvelle initiative de l'administration fédérale en matière d'alphabétisation.
La présidente: Les ententes sur le développement du marché du travail comprennent-elles un volet alphabétisation?
Mme Lenore Burton: Pas directement. Ces ententes prévoient des cours de formation préalable à l'emploi, et les gens peuvent se perfectionner grâce à ce qu'on appelle les mesures des compétences et des avantages professionnels, mais on n'en fait pas de suivi. Cela doit paraître dans leur plan de réemploi. Les résultats du programme d'assurance-emploi sont évalués en fonction de deux mesures principales. On évalue d'abord la rapidité avec laquelle la personne retourne au travail et le montant économisé dans le fonds. On n'évalue donc pas les compétences ou l'alphabétisme en tant que tels.
º (1640)
La présidente: Nous recommanderiez-vous de modifier les ententes sur le développement du marché du travail pour y ajouter cette composante?
Mme Lenore Burton: Je crois qu'il faut absolument en discuter avec les provinces. Les bénéficiaires de l'AE sont des clients importants du gouvernement fédéral. Dans certains cas, la responsabilité des ententes sur le développement du marché du travail est déléguée à la province; dans d'autres, il y a cogestion et ailleurs, comme en Ontario, nous en sommes toujours les principaux responsables.
Dans les cas où nous sommes les principaux responsables—et je n'ai aucune donnée concrète autre que celles de l'EIAA que je vous ai déjà communiquées—bon nombre de personnes reviennent nous voir à maintes reprises, parce qu'elles obtiennent un emploi, mais ce peut être à court terme parce qu'elles n'ont pas le niveau d'alphabétisme nécessaire, donc elles reviennent nous voir six mois ou un an plus tard.
Il importe de mesurer le niveau d'alphabétisme des gens et de leur offrir le perfectionnement dont ils ont besoin pour demeurer sur le marché du travail lorsqu'ils y entrent.
La présidente: J'aimerais vous remercier toutes les deux d'être venues nous rencontrer ce matin. Vous nous avez aidés dans les délibérations préparatoires à notre rapport.
Je vais suspendre nos travaux environ une minute et demie, le temps de demander aux personnes présentes de quitter la pièce. Nous allons ensuite poursuivre notre séance à huis clos pour explorer quelques idées en vue de notre rapport.
Mme Lenore Burton: Je vous remercie de nous avoir accueillies.
La présidente: Merci.