:
Merci beaucoup de m'avoir invitée à vous parler aujourd'hui.
J'aimerais vous présenter trois observations. La première sera une description de ce que nous subissons aux Philippines en assumant nos rôles de journalistes et de défenseurs des droits de la personne. Deuxièmement, je vous expliquerai comment la technologie à but lucratif est devenue un outil insidieux pour la tyrannie un peu partout au monde. Ma troisième observation sera une description de ce que nous faisons pour aider à protéger nos élections, qui auront lieu dans exactement 42 jours aux Philippines. En fait, ce sera 41 jours maintenant, parce que les Philippins viennent de se réveiller. Je dirais que nous vivons un épisode d'Avengers Rassemblement dans notre combat pour les faits.
Je suis journaliste depuis plus de 36 ans. En 2016, nous avons été la cible d'attaques intenses en ligne, parce que nous avions exposé la brutalité de la lutte contre la drogue ainsi que l'appareil de propagande qui attaquait les journalistes, les médias, les défenseurs des droits de la personne et les politiciens de l'opposition. La transformation des médias sociaux en armes politiques s'est poursuivie en une guerre du droit. On déformait les lois jusqu'à leurs points de rupture en ciblant ces mêmes groupes. En 2018, le gouvernement des Philippines a tenté de révoquer le permis d'exploitation de Rappler. Pendant que nous nous battions dans les tribunaux, nous avons perdu 49 % de nos revenus publicitaires en l'espace de quatre mois.
En moins de deux ans, mon gouvernement a déposé 10 mandats d'arrestation contre moi. Quand je veux voyager, je dois obtenir la permission des tribunaux. Parfois je comprends leur décision, d'autres fois je n'y comprends rien. Une fois, mon voyage a été refusé à la dernière minute alors que mes parents vieillissants, qui étaient tous deux malades, m'avaient demandé de venir aux États-Unis pour les aider parce que ma mère allait subir une opération chirurgicale.
Ces trois derniers mois, nous avons reçu 22 nouvelles plaintes, et elles risquent toutes de se transformer en poursuites judiciaires contre nous. Vendredi dernier, nous en avons reçu huit en une journée. Huit assignations à comparaître, c'est un record pour nous. Je suppose que nos actes sont efficaces, car non seulement un secrétaire du Cabinet en poste a poursuivi sept organismes de presse, dont Rappler, mais la Cour suprême a reçu une pétition du solliciteur général alléguant des théories de conspiration non fondées contre nous. La majorité de ces plaintes sont reliées au cas du pasteur du président Duterte, Apollo Quiboloy, qui est recherché par le FBI. Son entreprise mène l'attaque contre les journalistes et contre les militants des droits de la personne. Elle vient même d'obtenir une franchise de télévision. La semaine dernière, j'ai témoigné devant un tribunal sur un arriéré d'impôts — 200 000 pesos — qui était bien inférieur au 1,2 million de pesos que j'avais déjà déposés en cautionnement pour pouvoir rester en liberté et travailler.
Tout compte fait, on pourrait me jeter en prison à vie parce que je refuse de cesser de faire mon travail de journaliste. J'ai toutefois de la chance. Vous vous souvenez de la sénatrice Leila de Lima, ancienne secrétaire à la Justice et présidente de la Commission des droits de l'homme? Le mois dernier, elle a entamé sa sixième année de prison. Amnistie internationale la qualifie de « prisonnière d'opinion ».
Vous vous souvenez de la jeune journaliste Frenchie Mae Cumpio? Elle a passé ses deux derniers anniversaires de naissance en prison.
Vous vous souvenez de notre ancien collègue, Jess Malabanan? Il a été tué par une balle à la tête. Il avait collaboré à la série sur les guerres antidrogue de Reuters, qui a remporté le prix Pulitzer.
Vous vous souvenez d'ABS-CBN, le plus grand radiodiffuseur des Philippines? J'ai dirigé cette salle de nouvelles pendant six ans. En 2020, nous avons perdu sa franchise d'exploitation. Cela ne s'était pas produit depuis 1972, lorsque Ferdinand Marcos a déclaré la loi martiale.
Les gens qui nous défendent en paient aussi le prix. Sous l'administration Duterte, un plus grand nombre d'avocats que de journalistes ont été tués, et au mois d'août l'année dernière, le bilan des militants des droits de la personne assassinés s'élevait à plus de 420. L'an dernier, le matin du 7 mars, neuf dirigeants syndicaux et militants des droits de la personne ont été tués dans des descentes de police exécutées simultanément. Nous appelons maintenant cette journée « le dimanche sanglant ». Notre guerre brutale contre la drogue a fait des milliers, des dizaines de milliers de morts. C'était le premier massacre du combat pour les faits dans mon pays.
J'en arrive ainsi à ma deuxième observation. Je vais expliquer comment la technologie a altéré les faits et divisé nos sociétés. Tout comme à l'ère de l'industrialisation, il existe un nouveau modèle économique qui cause de nouveaux préjudices, un modèle que Shoshana Zuboff a appelé le « capitalisme de surveillance ». L'apprentissage automatique atomise nos expériences personnelles, en recueille les éléments et les réorganise par l'intelligence artificielle afin d'accroître les profits des entreprises. Ces opérations de microciblage très rentables sont conçues pour miner la volonté humaine. Elles causent une modification du comportement semblable à l'expérience des chiens de Pavlov, mais en temps réel, et les conséquences en sont désastreuses.
Vous en êtes victimes vous aussi. Tous les habitants du monde le sont. Ces matrices, conçues par les entreprises technologiques américaines, produisent des algorithmes dont la structure incitative, qui n'est en fait que leur opinion en code, lancée à une échelle que nous n'aurions jamais pu imaginer, façonne notre avenir de façon insidieuse en encourageant les pires comportements humains.
Des études ont démontré que les mensonges empreints de colère et de haine se propagent plus rapidement et plus loin que les faits. Voici deux phrases que j'ai prononcées dans tous mes discours de ces six dernières années.
Sans les faits, il n'y a pas de vérité. Sans vérité, il n'y a pas de confiance. Sans ces deux valeurs, nous n'avons pas de réalité commune, pas de primauté du droit et pas de démocratie.
Que faire?
Nous ne pourrons pas résoudre les problèmes existentiels mondiaux si nous ne remportons pas le combat pour les faits. Sans l'intégrité des faits, nos élections n'auront aucune intégrité.
Dans 42 jours, les citoyens des Philippines voteront en un moment existentiel pour notre démocratie. Tout en avant de la course se trouve Ferdinand Marcos, fils de celui que nous connaissons tous. Sa famille a été évincée par une révolte populaire, il y a 36 ans. Il est de retour, en partie parce que les réseaux de désinformation ont révisé l'histoire aux yeux des citoyens et nous, à Rappler, avons exposé publiquement ces données.
Comment contrer la vitesse virale des mensonges et la distribution préférentielle de la colère et de la haine?
Nous avons créé une pyramide à quatre niveaux que nous appelons #FactsFirstPH. J'en vous en ai remis une copie à tous aujourd'hui. Notre combat commence dans la collectivité. Les gens signalent les mensonges à nos lignes de dénonciation. Cette couche de données unit la pyramide. Pour la première fois, au moins 16 groupes d'information collaborent dans cette couche fondamentale.
Une fois les faits vérifiés, nous passons au niveau du réseautage. Les groupes de la société civile, les ONG, les écoles, les groupes d'affaires, l'Église et les groupes religieux s'unissent pour monter leurs propres campagnes de collecte des faits, créant ainsi un réseau de distribution.
Ces données sont ensuite transmises au troisième niveau, celui des groupes de recherche sur la désinformation, qui travaillent enfin ensemble et qui publient les résultats de leurs recherches hebdomadaires pour dévoiler aux Philippins exactement comment ils sont manipulés et par qui.
Enfin, le quatrième niveau, dont nous avons besoin depuis très longtemps, regroupe des experts en droit. Des groupes juridiques de tous les domaines intentent des recours tactiques et stratégiques. Les groupes de presse philippins font face à des attaques de DDoS toujours plus fréquentes et étendues dans notre site. Ces attaques visent à nous abattre. Ces mensonges exponentiels sont en fait des attaques de DDoS contre notre cerveau, contre notre biologie et elles nous laissent sans défense. Il faut que ces plateformes et les autocrates qui les exploitent soient tenus responsables, et il faut que les gouvernements agissent plus rapidement.
En ce sens, l'invasion de l'Ukraine par la Russie a rassemblé les nations et pourrait apporter des solutions à l'impunité continuelle des plateformes dans des pays comme les Philippines — songez aux sanctions de Magnitski.
Les pays démocratiques doivent s'unir pour défendre les valeurs démocratiques. La solution englobe les trois volets piliers de Rappler: la technologie, le journalisme et la collectivité.
Premièrement, il faut mettre en place des garde-fous autour de la technologie et créer de meilleures technologies. Deuxièmement, il faut renforcer le journalisme et aider à financer les nouvelles indépendantes. Cela explique en partie pourquoi j'ai accepté de coprésider l'International Fund For Public Interest Media. Troisièmement, il faut créer des groupes d'action qui respectent ces valeurs démocratiques.
Je risque la prison à vie simplement pour être journaliste, mais les résultats de mes actes détermineront si cela se produira, alors je tiendrai bon. Nous traversons une période extrêmement exigeante, et les journalistes répondent fidèlement à ces exigences.
Maintenant, la balle est dans votre camp.
Merci.
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Monsieur le président et membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invitée à prendre la parole.
Comme la République islamique se classe parmi les pires au monde selon les divers indices des droits de la personne, soit par l'absence totale de médias libres, par l'accord imminent de Vienne sur le nucléaire iranien et par les tragédies entourant l'écrasement du vol PS752, je me concentrerai aujourd'hui sur ma patrie, l'Iran.
Depuis la révolution de 1979, le refus de tenir des procès équitables et de respecter les règles de droit est un symptôme du mépris qu'affichent les autorités iraniennes pour la primauté du droit et pour ceux qui la défendent. À ce symptôme s'ajoutent les outils de la monopolisation du pouvoir et la persécution de ceux qui s'y opposent. Malheureusement, personne n'a été surpris l'an dernier de voir une fois de plus les forces de sécurité tuer des manifestants et tirer de la grenaille pour écraser des manifestations massives dénonçant les pénuries d'eau dans les provinces du Khuzestan et du Lorestan. Ce massacre s'est soldé par 11 morts et une foule de blessés. Comme vous le savez peut-être et comme Reuters l'a signalé, en 2019, on a dénombré bien plus que 1 500 morts.
Le fait que l'Iran souffre d'une épidémie de torture ne nous surprend pas non plus. Amnistie internationale a documenté le fait que les autorités iraniennes n'ont pas rendu de comptes pour au moins 72 détenus décédés depuis janvier 2010, malgré les rapports crédibles selon lesquels ces décès sont dus à la torture, à de mauvais traitements ou encore à des fonctionnaires utilisant des armes à feu et du gaz lacrymogène. En août 2021, une fuite d'images des caméras de surveillance de la prison d'Evin, à Téhéran, a dévoilé des gardiens de prison qui battaient, harcelaient sexuellement et torturaient des prisonniers.
L'année dernière, plusieurs milliers d'hommes, de femmes et d'enfants, notamment des défenseurs des droits de la personne, des manifestants, des parents endeuillés qui exigeaient des comptes, des avocats, des journalistes, des environnementalistes, des dissidents, des artistes, des écrivains, des enseignants et des ressortissants ayant une double nationalité et des étrangers ont été interrogés et injustement détenus pour avoir simplement exercé leurs droits à la liberté d'expression, d'association et de réunion. Des centaines d'entre eux étaient encore détenus à tort à la fin de l'année.
Des centaines de femmes défenseures des droits de la personne demeurent injustement emprisonnées en Iran. Au moins six femmes qui ont milité pacifiquement contre le port du voile obligatoire purgent de longues peines de prison. Par un acte courageux de désobéissance civile, Narges Mohammadi, célèbre défenseure des droits, qui a passé la plus grande partie de ces 13 dernières années derrière les barreaux pour son plaidoyer pacifique, résiste à une ordonnance de se présenter à la prison qu'elle a reçue le 8 mars et qu'elle trouve injuste.
Les autorités ont interdit la formation de partis politiques indépendants, de syndicats et d'organisations de la société civile. Elles ont censuré les médias et bloqué les chaînes de télévision par satellite. En janvier, elles ont ajouté l'application de messagerie Signal à la liste des plateformes de médias sociaux qu'elles bloquent. Cette liste comprend déjà Facebook, Twitter et YouTube.
Les autorités ont bloqué Internet pendant les manifestations afin de cacher l'ampleur des violations commises par les forces de sécurité et d'empêcher les gens de s'organiser. Elles continuent de cacher la vérité sur la fusillade du vol PS752 par les Gardiens de la révolution en janvier 2020, qui a tué 176 personnes. Il est important que vous, à titre de législateurs canadiens, reconnaissiez que les proches endeuillés des victimes qui cherchent à obtenir justice en Iran subissent de l'intimidation et du harcèlement. Ils sont détenus arbitrairement, torturés et sont assujettis à d'autres mauvais traitements. Il est impératif que le Canada, de concert avec l'Ukraine, le Royaume-Uni, la Suède et l'Afghanistan, continue d'exiger la pleine transparence, la reddition de comptes et la justice.
Une étude de cas a été menée pendant 43 ans sur la République islamique et sur la montée à la présidence d'Ebrahim Raisi. Cet homme est un pilier de l'État oppressif impliqué dans des crimes contre l'humanité qui dirige le pays depuis les années 1980. Les résultats indiquent très évidemment qu'une culture d'impunité règne en maître dans le pays et qu'il est impossible de réformer ce système. N'oublions pas que l'Iran n'offre aucune voie nationale pour les gens qui cherchent à obtenir justice. Les victimes de crimes graves commis par les autorités iraniennes prient la communauté internationale de prendre des mesures concrètes pour soutenir leurs droits.
Voilà pourquoi Amnistie internationale et d'autres ONG exhortent les États membres du Conseil des droits de l'homme des Nations unies à appuyer la création d'un mécanisme impartial de collecte, d'analyse, de consolidation et de sauvegarde des preuves des crimes les plus graves commis en Iran afin de faciliter la tenue de procédures criminelles justes et indépendantes. Nous exhortons aussi les États membres à renouveler le mandat du rapporteur spécial sur la situation des droits de la personne en Iran.
Il est encourageant de constater que le Canada est l'un des principaux parrains d'une résolution des Nations unies sur la protection et la promotion des droits de la personne en Iran depuis 2003, année où la double citoyenne irano-canadienne et photojournaliste pigiste Zahra Kazemi a été tuée en prison. Plus tard, son médecin légiste a déclaré qu'elle avait été victime de torture et de viol brutaux.
Le peuple iranien s'attend au moins à ce que le monde libre appuie ces résolutions et en fasse la promotion.
Depuis beaucoup trop longtemps, nous défendons les droits de la personne avec laxisme dans notre politique étrangère, mais les droits de la personne sont étroitement liés au respect de la primauté du droit, et un pays ne peut pas gouverner adéquatement à long terme sans appliquer la primauté du droit. Les pays qui maintiennent une bonne gouvernance respectueuse des lois deviennent de bons voisins régionaux et de meilleurs membres de la communauté internationale.
Ce n'est pas seulement un impératif moral d'accorder la priorité aux droits de la personne dans notre politique étrangère; c'est à notre avantage que nous ne laissions pas nos intérêts géopolitiques, économiques et autres les éclipser.
Merci.
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Je peux en parler sur deux fronts. Tout d'abord, une grande partie du débat sur cette question se déroule en quelque sorte plus en aval, alors comment y réfléchir? La première part de la lutte pour les droits de la personne, ou pour la liberté d'expression, repose en réalité sur les faits.
À l'heure actuelle, les plateformes veulent toutes que nous discutions de la modération du contenu, ce qui se situe le plus en aval. Pour ceux qui sont coincés à ce niveau, les plateformes font plus d'argent du capitalisme de surveillance. Il faut que nous allions vraiment plus en amont vers le système d'exploitation, vers l'amplification algorithmique. C'est extrêmement important. C'est ce que l'auteure d'un excellent livre intitulé Weapons of Math Destruction, appelle « les opinions codifiées ».
Une fois sur place, on remonte plus haut vers la cause profonde. C'est le point de départ. Nous partons d'ici, du capitalisme de surveillance, et c'est là que les différents problèmes semblent s'être cloisonnés. Cela comprend la sécurité, la protection de la vie privée, l'antitrust et la modération du contenu.
Une partie de notre problème à l'heure actuelle est le fait que les puissances géopolitiques ont exploité ces cloisonnements. Ces réseaux forment maintenant un système nerveux mondial de ce que j'appelle les « boues toxiques » et qui est alimenté par des pays comme la Chine et la Russie.
En 2018, nous avons découvert des opérations d'information des Philippines reliées aux réseaux russes de désinformation par l'entremise de sites Web situés au Canada. En 2020, Facebook a supprimé les opérations d'information en provenance de la Chine qui créaient de faux comptes pour la campagne électorale américaine. Aux Philippines, ces mêmes comptes polissaient l'image des Marcos et menaient campagne pour la fille de Duterte en attaquant Rappler.
En 2021, les États-Unis et l'Union européenne ont dénoncé la Chine et la Russie pour leur désinformation sur la COVID‑19. Je tiens à souligner dans quelle mesure nous sommes tous reliés.
Je suppose que cette situation a l'avantage de faire adopter un plus grand nombre de lois. La semaine dernière, l'Union européenne a mis au point les derniers détails de sa loi sur les marchés numériques. Elle sera suivie de la loi sur les services numériques. Je sais que le Canada s'y prépare aussi, mais il lui faudra du temps.
Comme je l'ai dit dans mon allocution du prix Nobel, je ne cesserai de demander aux législateurs américains de modifier ou de révoquer l'article 230 de la Communication Decency Act, parce que nous, qui sommes en première ligne, avons besoin d'une aide immédiate.
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Merci beaucoup. Je tiens à souligner à quel point je suis impressionnée par Mme Ressa et par M. Leung. Merci beaucoup pour tout ce que vous faites.
Narges Mohammadi est tout aussi courageuse. Elle a risqué sa vie en défendant les droits de la personne en Iran. Je lui ai parlé récemment. Elle défie courageusement l'ordonnance de se présenter à la prison qu'elle a reçue il y a quelques semaines. Elle a passé près de 13 ans en prison pour avoir défendu pacifiquement les droits de la personne. Elle s'est retrouvée en isolement à quatre reprises. La dernière fois, elle y a passé 64 jours, dont 40 jours entièrement sans communications, sans accès à un avocat, rien. Pourtant, elle continue à risquer tout cela. Elle y sacrifie sa sûreté et sa sécurité.
Elle vous demande une chose: lorsque des législateurs de l'étranger ou quiconque a des liens quelconques avec l'Iran fait une visite officielle à quelqu'un en Iran, comme le ministre des Affaires étrangères — et je crois comprendre que le Canada n'a pas ces liens officiels —, que ces législateurs exigent d'abord de rencontrer une personne comme Narges afin d'amplifier la voix de la société civile. De cette façon, les dissidents de la société civile sauront que ces fonctionnaires étrangers ne se sont pas rangés du côté de leurs oppresseurs.
Il est très important que nous fournissions des plateformes à ces dissidents. Narges vous demande à tous de fournir une tribune aux gens comme elle. Elle vous demande de ne pas permettre à des gens comme Zarif, l'ancien ministre des Affaires étrangères, d'écrire des éditoriaux dans nos journaux occidentaux. Elle désire que nous donnions des plateformes et une voix aux dissidents de l'Iran afin de renforcer la société civile. Narges en est la championne à bien des égards. Il est très important d'aider des gens comme elle, comme Nasrin Sotoudeh, comme Atena Daemi et d'innombrables autres militants courageux.
J'aimerais aussi ajouter, au sujet du journalisme en Iran, que le monde s'est beaucoup concentré, et à juste titre, sur la tragédie de la mort atroce de Jamal Khashoggi. Cependant, il a complètement oublié Rahul Azam, qui a été attiré en Irak, enlevé, emmené en Iran et exécuté à la suite d'un procès tout à fait injuste. Nous n'entendons donc pas suffisamment parler des luttes de la société civile en Iran.
[Traduction]
J'aimerais bien pouvoir répondre à cette question, mais la vérité, c'est que le gouvernement, les autorités iraniennes, font passer l'idéologie révolutionnaire avant le bien-être du peuple. C'est à cela que le peuple iranien se heurte. Il n'y a aucun intérêt réel à protéger le peuple iranien. L'intérêt réel des autorités est de préserver l'idéologie révolutionnaire, la révolution elle-même.
Il est révélateur que le Corps des Gardiens de la révolution islamique, le CGRI, soit chargé de protéger la révolution. Les mots « Iran » ou « iranien » ne figurent même pas dans son nom. Cela en dit long sur ce que les autorités, la République islamique, pensent de l'Iran et du peuple iranien.
Ce que je peux dire, c'est que les décisions prises en Iran n'ont pas profité au peuple. Même lors de la première levée des sanctions, au temps du président Obama, l'argent qui a été versé à l'Iran n'a pas rapporté grand-chose au peuple iranien. L'argent allait toujours au Hamas, au Hezbollah et à Assad. Concrètement, rien n'a vraiment changé sur le terrain en ce qui concerne les droits de la personne. Le peuple n'en a pas bénéficié.
Pour la même raison que les vaccins américains, les vaccins occidentaux, ont été interdits d'entrée au pays, ces gens‑là ne s'intéressent pas au bien-être du peuple iranien.
:
Merci, monsieur le président.
Merci à tous nos témoins d'être présents ce soir. C'est un grand honneur de vous entendre. Je sais que des gens l'ont dit avant ce soir, mais je reconnais... [Difficultés techniques]... pour faire le travail que vous faites. Notre comité salue certainement votre bravoure et votre engagement courageux envers la vérité et le journalisme.
J'aimerais commencer par Mme Ressa.
J'ai lu le discours que vous avez prononcé en octobre lorsque vous avez accepté le Prix Nobel de la paix. C'était incroyablement émouvant, et certaines parties avaient de quoi glacer le sang, bien sûr.
J'aimerais en citer un extrait. Vous disiez:
Ces opérations de microciblage très rentables sont conçues pour miner la volonté humaine. Elles causent une modification du comportement semblable à l'expérience des chiens de Pavlov [...]
Puis vous ajoutiez:
Ces sociétés destructrices ont siphonné les ressources financières des groupes de presse et constituent maintenant une menace fondamentale pour les marchés et les élections.
C'est bien sûr extrêmement terrifiant, et je pense que nous comprenons tous que cela ne se limite pas aux Philippines. Cela ne se limite pas à un pays quel qu'il soit, démocratique ou non. Nous sommes tous concernés par cela, et nous sommes tous touchés.
Vous avez parlé aujourd'hui de la nécessité de légiférer et j'ai bon espoir que cela va se faire. Le gouvernement a présenté un projet de loi au Canada, qui provoque un ressac en ce sens que certains y voient jusqu'à une atteinte aux droits de la personne. De nombreux députés de l'opposition ont dit à la Chambre qu'on aurait tort d'adopter des lois pour contrôler les médias sociaux.
Comment contourner ce problème? Comment réfuter cet argument et pouvoir adopter une loi qui oblige les médias sociaux à rendre des comptes?
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Merci beaucoup de la question.
Tout d'abord, c'est un vieil argument qui ne tient pas. Encore une fois, la liberté d'expression est reconnue comme le droit le plus sacré en Occident, mais à l'heure actuelle, pensez‑y — et les militants des droits de la personne le répètent —, la liberté d'expression de quelques-uns empiète en fait sur le droit à la vie de bien d'autres, sur le droit à la sécurité et le droit à la dignité.
Prenons l'exemple du génocide au Myanmar.
Si nous convenons tous que les faits existent, cela les rend objectifs, ce qui mène à la vérité, qui mène à la confiance.
J'ai essayé de montrer comment le débat sur le contenu se déroule en aval. La loi devrait intervenir en amont, là où se fait l'amplification algorithmique et où s'exerce directement le capitalisme de surveillance. La question fondamentale de la confidentialité des données est de savoir à qui appartiennent ces données. Ces grandes entreprises américaines devraient-elles être propriétaires de notre vie privée?
Par ailleurs, je vous remercie de soulever un point que j'ai omis de mentionner, mais dont j'ai parlé dans mon discours aux Prix Nobel: la désinformation fondée sur le sexe. L'autre raison qui doit nous motiver est que les défenseurs des droits de la personne, les femmes journalistes et les femmes politiques, ont droit aussi à la liberté d'expression. À l'heure actuelle, on s'en sert pour museler les femmes et faire taire des voix vulnérables. Ce sont des opérations d'information.
Le Canada, comme les États-Unis, a maintenant un grave problème avec les attaques qui visent les femmes en politique et en journalisme. Les mêmes formes d'abus qu'on voit dans les régimes répressifs ont maintenant libre cours dans vos sociétés grâce à ces plateformes de médias sociaux.
Je peux aussi vous envoyer l'étude « #ShePersisted », un livre blanc qui a été rédigé au Canada à la suite de discussions avec des femmes en journalisme et en politique.
:
Je pense qu'il est vraiment important de ne pas appliquer deux poids, deux mesures dans notre politique étrangère.
Si nous demandons des sanctions contre Poutine, qui terrorise l'Ukraine, comment pourrions-nous avoir des liens diplomatiques avec les autorités iraniennes, qui terrorisent leur propre peuple? Nous ne pouvons pas dire: faites ce que vous voulez à votre peuple, mais ne le faites pas aux autres. La justice pour les proches endeuillés de ces êtres chers qui ont perdu la vie à bord du vol peut prendre la forme d'un suivi des enquêtes et d'une recherche des faits réels. La reddition de comptes et la transparence sont très importantes.
J'aimerais simplement ajouter, à la suite des propos de Mme Ressa, que les dissidents à l'intérieur de l'Iran ne sont pas la seule cible; il y a aussi les dissidents à l'étranger.
Dans le cas de Masih Alinejad, une journaliste iranienne extrêmement courageuse, établie aux États-Unis, dont le frère a été condamné à huit ans de prison pour la faire taire, nous nous rendons compte que ces autocraties, ces gouvernements oppressifs, ne s'arrêtent pas à leurs frontières. Ils essaient aussi de faire taire tous ceux qui élèvent la voix à l'étranger, surtout les femmes. Ils ont particulièrement peur des femmes comme Masih.
Il est vraiment important, même si nous n'avons pas de liens avec l'Iran, de renforcer collectivement la société civile non seulement en Iran même, en appuyant des médias indépendants — ce qui est extrêmement important, vu que, bien entendu, les médias en Iran appartiennent à l'État —, mais aussi à l'étranger, en soutenant des personnes comme Mehdi Yahyanejad, qui a créé l'application Toosheh. En cas de panne d'Internet, si vous avez cette application en Iran, vous avez accès aux vraies nouvelles, à ce qui se passe dans le monde et vous pouvez vous joindre à des réseaux et vous organiser.
Ce sont toutes là des façons d'aider le peuple iranien.
[Français]
Je remercie également les autres distingués témoins de leurs perspectives, ainsi que les membres du Comité de cette invitation.
Je suis vraiment honorée d'être ici avec vous et de vous faire part de quelques idées, ainsi que des situations et du travail des journalistes avec qui nous travaillons chez Journalistes pour les droits humains, ou JDH. Je veux aussi prendre un petit moment pour remercier tous les fonctionnaires qui travaillent actuellement à certains dossiers pour aider les journalistes en danger. C'est un travail difficile et compliqué.
Je m'appelle Rachel Pulfer et je suis la directrice générale de Journalistes pour les droits humains, une ONG internationale qui appuie le développement des médias pour aider les journalistes et promouvoir le respect des droits de la personne partout au monde.
[Traduction]
Journalists for Human Rights est un organisme canadien de développement des médias, qui travaille à la promotion des droits de la personne dans le monde entier.
À cette fin, nous renforçons la capacité des médias de couvrir les sujets liés aux droits de la personne dans les endroits où l'engagement est fragile à l'égard de la liberté des médias et de ces droits. À l'heure actuelle, nous faisons ce travail dans 17 pays, dont le Mali, l'Irak et le Yémen.
Au cours des six derniers mois, nous avons travaillé à l'évacuation de journalistes qui faisaient l'objet de menaces en Afghanistan. C'est sur cela que je veux me concentrer dans cette discussion, mais je ne serais pas une bonne journaliste si je ne commençais pas mon intervention en vous racontant une histoire.
Je veux vous parler de Katira Ahmadi, une présentatrice de télévision de Zan TV.
Zan TV était une station de télévision entièrement constituée de femmes et basée à Kaboul. Jusqu'au 15 août de l'an dernier, elle produisait des nouvelles et des reportages sur l'Afghanistan. Après la chute de Kaboul, Mme Ahmadi et ses collègues se sont cachées. Elles savaient qu'en tant que femmes ayant une telle notoriété publique, elles seraient des cibles de choix.
Journalists for Human Rights s'est chargé de l'évacuation de Mme Ahmadi et de certaines de ses collègues de Kaboul, en octobre 2021. Depuis, elle est coincée à Islamabad. En tant que réfugiée afghane, les portes se sont toutes fermées devant elle, sauf celle qui lui a permis de se rendre au Pakistan.
À son arrivée, Mme Ahmadi était enceinte. Quelques semaines plus tard, elle a fait une fausse couche. Elle a désespérément besoin d'un endroit permanent pour s'établir, mais des mois d'efforts de la part d'une coalition d'organismes de défense des libertés des médias, dont Journalists for Human Rights, n'ont jusqu'à présent rien donné. Elle fait partie des 500 journalistes, dirigeants, défenseurs des droits de la personne et membres de leur famille en Afghanistan que Journalists for Human Rights aide depuis le 15 août.
Au cours des dernières semaines, notre organisme a été contacté par un nombre croissant de journalistes ukrainiens, russes et biélorusses, qui se trouvent tous dans la même situation désespérée. Les reportages qu'ils ont faits avant l'invasion de l'Ukraine par Poutine les ont mis en danger. Il faut trouver des solutions pour eux de toute urgence.
Heureusement, vous, les membres de ce comité, êtes en mesure de les aider. J'aimerais donc recommander que le Canada prenne immédiatement des mesures concrètes pour les journalistes qui fuient les conflits et la persécution — des journalistes comme Mme Ahmadi —, en créant un programme permanent de visas d'urgence pour eux. Cela va dans le sens des recommandations du groupe d'experts juridiques de haut niveau qui conseille la Coalition pour la liberté des médias, dont le Canada est le coprésident, et de l'IFEX, dont vous entendrez des représentants plus tard au cours de cette discussion.
En ce qui concerne la liberté des médias et les droits de la personne, nous constatons une érosion mondiale de ceux‑ci en raison de la COVID‑19, et nous remarquons aussi que la montée de l'autoritarisme menace les démocraties et les droits de la personne dans le monde entier. Comme il est indiqué dans le dernier rapport de Freedom House, l'ordre mondial approche d'un point de basculement, et si les défenseurs de la démocratie ne travaillent pas ensemble pour aider à garantir la liberté de tous, le modèle autoritaire l'emportera.
Que pouvons-nous faire pour renverser la vapeur? Des organisations comme Journalists for Human Rights interviennent pour renforcer la capacité des journalistes indépendants à couvrir les questions liées aux droits de la personne. Depuis 2016, d'abord au Soudan du Sud, Journalists for Human Rights s'est associé à Affaires mondiales Canada pour renforcer l'environnement habilitant dans lequel les journalistes travaillent. Cela signifie une forme très holistique de travail de développement des médias au sein du gouvernement, des médias et de la société civile, qui permet d'assurer un soutien à l'échelle de la société aux journalistes indépendants qui couvrent les sujets des droits de l'homme, ainsi que d'en tirer parti.
Nous formons également les journalistes sur la façon de dénoncer en toute sécurité les campagnes de désinformation dont Maria Ressa a parlé plus tôt dans cette discussion. Ce genre de travail n'a jamais été plus nécessaire que maintenant. Plus tôt aujourd'hui, par exemple, Novaya Gazeta, le dernier journal indépendant de Russie, a fermé ses portes sous la pression des censeurs de l'État russe.
Face à l'oppression flagrante de l'État, nous devons nous assurer que les journaux comme Novaya Gazeta ne sont pas censurés et réduits au silence, mais qu'ils trouvent plutôt des façons de poursuivre leur travail. Face à la manipulation flagrante de l'information, nous devons nous assurer que les citoyens de pays comme la Russie, le Bélarus et l'Afghanistan ont accès aux faits et à la vérité.
La meilleure façon de contrer les tendances de l'autoritarisme et de la détérioration de l'appui aux droits de la personne et à la démocratie libérale est de soutenir le journalisme indépendant qui couvre les questions de droits de la personne. La meilleure façon de lutter contre les mensonges étatiques de régimes comme celui de Vladimir Poutine est de présenter les faits et la vérité.
Cela m'amène à ma deuxième demande qui va dans le sens d'une pétition que l'IFEX a adressée à la Coalition pour la liberté des médias en février, priant le Canada d'intervenir et de consacrer jusqu'à 1 % de son soutien au développement international à ce genre de travail de développement des médias. Ce niveau d'aide est nécessaire pour financer le genre de travail holistique de réseautage et de renforcement des capacités à l'échelle du secteur, qui permet à ceux qui subissent ces conflits d'avoir accès à des renseignements fiables sur ce qui se passe pendant le conflit et au‑delà, en particulier pour ce qui est des droits de la personne.
Je vais m'arrêter ici. Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les distingués membres du Sous-comité d'avoir invité M. Cotler à discuter du cas et de la cause de M. Dawit Isaak.
Le professeur Cotler ne peut pas comparaître pour des raisons de santé et il m'a demandé de témoigner en son nom, étant donné que je collabore avec lui. Il m'a également demandé de transmettre ses salutations au comité, dont il a été président et vice-président pendant son expérience parlementaire, et qu'il considère comme représentatif de la poursuite de la justice dans un ordre international fondé sur des règles.
En 2001, le gouvernement érythréen a fermé toute la presse indépendante en Érythrée. M. Isaak, un courageux dramaturge et auteur suédois d'origine érythréenne travaillant comme journaliste au sein de Setit, le premier journal indépendant de l'Érythrée, a été détenu arbitrairement, sans communication avec l'extérieur, et s'est vu refuser l'accès à sa famille, à de l'aide consulaire, au droit à un avocat et à tout semblant de droit constitutionnel et d'application régulière de la loi.
Quel crime a‑t‑il commis? Setit avait publié une lettre ouverte critiquant la concentration du pouvoir et réclamant une réforme démocratique et le rétablissement des droits de la personne en Érythrée, qui avait été signée par 15 membres du gouvernement du président Isaias Afwerki. Aucun média indépendant n'a été actif en Érythrée depuis l'arrestation de M. Isaak. Selon le Classement mondial de la liberté de la presse, l'Érythrée arrive au dernier rang sur 180 pays depuis plus d'une décennie, derrière la Chine et la Corée du Nord. En 2019, le Comité pour la protection des journalistes a désigné l'Érythrée comme le pays le plus censuré au monde.
Il y a lieu de croire que M. Isaak est détenu dans le camp de prisonniers d'Eiraeiro, qui fait partie d'un réseau de prisons secrètes où des milliers de prisonniers politiques sont détenus dans des conditions qui, selon Amnistie internationale, sont d'une atrocité inimaginable. En effet, M. Isaak n'a bénéficié d'aucun semblant de justice et de dignité humaine et continue d'être victime de crimes contre l'humanité.
Le mois de septembre dernier a marqué la 20e année de détention de M. Isaak. Lui et ses collègues sont les journalistes qui ont été le plus longtemps détenus dans le monde aujourd'hui. Le cas de M. Isaak est non seulement emblématique des assauts contre la sécurité des journalistes, mais aussi contre un ordre international fondé sur des règles. Il est représentatif des assauts contre la liberté de la presse par des régimes autoritaires à l'échelle mondiale dont l'immunité disculpatoire continue de s'intensifier, les auteurs de ces assauts ne cessant d'être enhardis par la pandémie mondiale d'impunité.
La double citoyenneté suédoise et érythréenne de M. Isaak en fait également un cas unique, qui démontre bien la raison d'être de la Déclaration canadienne contre la détention arbitraire dans les relations d'État à État. Par conséquent, la Suède est particulièrement concernée par cette affaire et par ses responsabilités nationales et internationales connexes à cet égard.
Selon le rapport sur la protection consulaire des journalistes à risque à l'étranger du Groupe d'experts juridiques de haut niveau sur la liberté de la presse, dont le professeur Cotler est membre, la protection diplomatique n'est pas une question discrétionnaire, mais plutôt une obligation légale internationale, une obligation qui incombe au pays dont le journaliste emprisonné a la nationalité, ainsi qu'au pays qui détient le journaliste.
Le gouvernement érythréen a également ignoré à maintes reprises toutes les pétitions et toutes les décisions pertinentes concernant la libération de M. Isaak, y compris une requête en bref d'habeas corpus devant la Cour suprême de l'Érythrée en 2011 et une décision finale et exécutoire de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples en 2016.
En un mot, cette impunité n'a été que renforcée par l'absence d'une action concertée de la communauté des démocraties au nom de M. Isaak.
Ce qui suit est un résumé des principales recommandations stratégiques et avenues juridiques.
Premièrement, le Canada devrait mobiliser les signataires de la Déclaration contre la détention arbitraire dans les relations d'État à État pour assurer la mise en œuvre de cette déclaration. En effet, le cas de M. Isaak représente la raison d'être et l'adoption d'une telle déclaration et démontre la nécessité de celle‑ci.
Deuxièmement, le Canada doit imposer des sanctions ciblées en vertu de la loi Magnitski de façon concertée, dans un cadre multilatéral, aux hauts fonctionnaires érythréens impliqués dans des actes de corruption et de violation des droits contre M. Isaak et ses collègues, une initiative préconisée en octobre dernier par une coalition internationale d'ONG de premier plan, d'organisations de défense des droits de la personne, d'experts, de défenseurs et de journalistes, dont faisait partie le Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne. En effet, l'importance des sanctions de la loi Magnitski en réponse à l'emprisonnement de journalistes était la première recommandation du Groupe d'experts juridiques de haut niveau sur la liberté de la presse.
Troisièmement, nous devrions appuyer l'appel lancé par d'éminents experts des Nations unies, ceux qui ont participé aux procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme des Nations unies et qui ont eux-mêmes demandé la libération immédiate et urgente de M. Isaak.
Quatrièmement, nous devons mettre en œuvre les recommandations formulées en 2016 par la Commission d'enquête des Nations unies sur les droits de l'homme en Érythrée et renvoyer l'affaire au procureur de la Cour pénale internationale.
Cinquièmement, le Canada, qui copréside la Coalition pour la liberté des médias, laquelle s'est engagée à protéger la liberté des médias et la sécurité des journalistes, devrait mobiliser les autres membres concernant M. Isaak, dont le cas est emblématique pour cette coalition.
J'aurai bientôt terminé.
Sixièmement, le Canada devrait diriger une enquête au Conseil des droits de l'homme concernant le cas de M. Isaak.
Septièmement, le Canada devrait tenir compte de l'assaut de l'Érythrée contre l'ordre international fondé sur des règles dans ses relations bilatérales avec ce pays.
Enfin, la Suède devrait être invitée à exercer une panoplie de recours juridiques, qu'elle aurait pu prendre et qu'elle peut encore entreprendre, afin d'obtenir justice pour M. Isaak et ses collègues et de responsabiliser les auteurs des crimes en Érythrée.
Merci.
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Tout d'abord, je tiens à remercier les membres du comité de me donner l'occasion de m'exprimer.
Je suis ici ce soir au nom de l'IFEX, un réseau mondial de groupes qui défendent la liberté d'expression et d'information sous toutes ses formes. Notre objectif est de tirer de plus en plus parti des travaux qui sont menés pour assurer la liberté de la presse, l'accès à l'information, ainsi que la sécurité et la justice pour les journalistes, entre autres droits.
Comme d'autres qui ont pris la parole ce soir, nous assistons à l'expansion de l'autoritarisme sous toutes ses formes. L'information est militarisée de façon à avoir un impact profond sur les gens et à créer une sorte de chaos. Dans notre seul réseau, l'utilisation abusive de la législation sur l'accès à l'information, les fermetures de sites Internet, la désinformation, les attaques contre les médias et, bien sûr, l'assassinat de journalistes deviennent monnaie courante. Comme il a été souligné précédemment, lorsque les personnes directement visées par les campagnes de désinformation et de salissage en ligne sont des femmes, la forme que prennent les attaques est habituellement sexospécifique et ces dernières mènent souvent à l'autocensure. Le but est de faire taire ces voix et c'est exactement ce qui arrive.
On peut le voir dans le contexte actuel. Il faut agir immédiatement dans les situations les plus urgentes, comme en Afghanistan, au Bélarus, en Éthiopie, au Myanmar, au Nicaragua, au Soudan, en Ukraine et en Russie, pour ne nommer que ces pays.
Comme ma collègue Mme Pulfer l'a recommandé, il est impératif de créer un système coordonné de soutien d'urgence pour les journalistes à risque et leur famille. Le Canada est déjà sur la bonne voie, mais nous devons continuer d'accroître notre influence. Pour être efficaces, ces systèmes devraient inclure la délivrance de visas d'urgence assortis de méthodes de demande simples et sécuritaires. En l'absence de telles mesures, on devrait accélérer le traitement des visas pour les journalistes et leur famille et leur assurer un passage sécuritaire.
Un élément clé de cela est la coordination efficace avec les organisations locales et internationales de la société civile, comme Journalists for Human Rights, qui travaillent à la protection et à l'évacuation des journalistes.
Nous constatons que la liberté des médias n'a jamais été aussi cruciale. Les démocraties ne peuvent survivre et prospérer sans des médias libres, indépendants et pluralistes. Nous devons renverser la représentation actuelle des médias comme porteurs de fausses nouvelles et ennemis du peuple. C'est un discours qui est utilisé partout dans le monde. C'est un langage qui se répand et qui comprend des attaques verbales et physiques, qui sont menées en toute impunité contre les médias.
Cela a eu un impact profond sur la liberté de la presse et sur les journalistes en particulier. Soyez certains qu'aucun pays, y compris le Canada, n'est à l'abri de cette tendance. Il faut contrer ce discours avec force, par des paroles et des gestes.
En plus d'intervenir dans des situations d'urgence, le gouvernement doit jouer un rôle important et permanent pour renforcer l'importance de la liberté de la presse et du respect des journalistes dans son propre contexte national.
Il faut aussi rendre des comptes. La criminalisation du journalisme et les abus que font de la loi les acteurs étatiques doivent cesser. Dans leurs relations multilatérales, nous demandons aux institutions de veiller à ce que ceux qui s'en prennent aux médias subissent les conséquences réelles de leurs actes. Autrement, les attaques contre la presse continueront de s'intensifier, et les normes préconisées par le Canada resteront lettre morte.
Dans le cadre de ces relations, le Canada doit être visible en demeurant connecté et engagé à l'égard des mécanismes internationaux, en s'engageant dans des coalitions, en finançant et en reconnaissant les avantages que les institutions internationales tirent du maintien de la liberté de la presse, ainsi qu'en étant présent et en appuyant énergiquement leurs efforts. Le leadership du Canada en tant que coprésident de la Coalition pour la liberté des médias, de même que président actuel de la Freedom Online Coalition, ainsi que du groupe de travail de la Communauté des démocraties sur l'habilitation et la protection de la société civile, est déjà un exemple très positif et bienvenu de cela.
À l'IFEX, notre réseau de plus de 100 organisations basées dans plus de 70 pays milite activement en faveur de la liberté d'expression et d'information en tant que droit humain fondamental. Beaucoup le font dans des circonstances très dangereuses. La répression ciblée des défenseurs de la liberté de la presse et des journalistes, et l'attaque contre les communautés et les institutions font en sorte que les normes acceptées sont minées et affaiblies.
On nous a demandé d'appuyer plus directement nos membres dans toutes les régions qui sont de plus en plus la cible d'attaques de la part d'États autoritaires, qui cherchent à étouffer la voix de la société civile et à menacer la dissidence à tout prix. Les organisations dont les bureaux et le personnel sont ciblés et harcelés, sans autre but que de les fermer et de les réduire à néant, doivent être soutenues, financées et mobilisées, car ce sont elles qui réclament la responsabilisation. Si ces intervenants sont réduits au silence, cela créera un vide pour la démocratie.
Nous savons que ces questions sont complexes. Les membres de l'IFEX et leurs alliés dans le monde y travaillent depuis des années en assurant la défense des droits à la base, en publiant des rapports et des indices, en offrant des solutions et en faisant campagne. Il s'agit d'un riche bassin de connaissances, qui pourraient éclairer les politiques et les discussions du Canada, dans une perspective nationale et mondiale nuancée. Dans le cadre de vos efforts et de l'accent que vous mettez sur la liberté de la presse, nous serions heureux d'agir comme intermédiaire vers ces sources.
Les gouvernements et les groupes de la société civile doivent continuer de trouver des moyens de collaborer et de participer aux discussions.
Merci.
Je vous remercie, honorables députés, de me donner l'occasion de témoigner devant le Sous-comité des droits internationaux de la personne.
Je suis ici à titre de représentant du Committee for Freedom in Hong Kong, dont le principal objectif est la libération des prisonniers politiques à Hong Kong, ce qui est tout à fait remarquable, parce que qui parmi nous aurait dit, il y a trois ans seulement, que nous parlerions de prisonniers politiques à Hong Kong, un endroit autrefois connu comme l'un des plus libres en Asie.
Cependant, par suite de la loi sur la sécurité nationale qui a été imposée à Hong Kong au milieu de 2020 par le gouvernement chinois, toute critique du Parti communiste chinois ou de l'État chinois est essentiellement considérée comme un acte criminel. La plupart des journaux pro-démocratie ont été fermés et la société civile a été détruite.
Je me concentre particulièrement sur... Dans les cinq minutes qui me sont allouées, j'aimerais vous parler du groupe Next Digital Media, dont j'ai été le directeur indépendant. En fait, c'est l'histoire de sept de mes anciens collègues qui sont actuellement en prison. Ils sont en prison pour la plupart sans procès, et encore moins sans condamnation. Ce ne sont que sept parmi les quelque 10 000 personnes qui ont été arrêtées pour des raisons politiques à la suite d'activités antigouvernementales en 2019 et en 2020 à Hong Kong.
Je suis l'ancien directeur indépendant de Next Digital, une entreprise qui est ou était cotée à la bourse de Hong Kong. Elle avait une capitalisation boursière d'environ 100 millions de dollars lorsqu'elle a été détruite au milieu de 2021, par suite des mesures prises par le gouvernement en vertu de la loi sur la sécurité nationale.
Mes sept anciens collègues représentent bien les quelque 10 000 habitants de Hong Kong et, en fait, les 7 500 000 personnes qui ont été opprimées en vertu de la loi sur la sécurité nationale. Leur cas démontre la façon dont le Parti communiste chinois et ses facilitateurs au sein de l'administration de Hong Kong et du secteur privé se livrent à des activités légales, en se cachant derrière le système juridique qui sous-tend bien les démocraties gouvernées, non pas pour la justice ou pour parvenir à un verdict juste, mais dans la poursuite d'une fin politique prédéterminée. Dans ce cas‑ci, il s'agit du musellement du journal pro-démocratie Apple Daily.
La loi sur la sécurité nationale est une loi générale qui criminalise toute critique du Parti communiste chinois par qui que ce soit dans le monde. En fait, la semaine dernière, un de mes collègues à Londres, Benedict Rogers, de Hong Kong Watch, a été menacé de prison s'il ne fermait pas son site Web, un site établi à Londres et géré par un citoyen britannique, qui est considéré comme criminel par les autorités de Hong Kong.
Dans le cas de Next Digital, d'abord, les actions du fondateur et principal actionnaire, Jimmy Lai, ont été bloquées par le secrétaire à la sécurité, parce qu'il a dit avoir des raisons de croire que M. Lai avait violé la loi sur la sécurité nationale. Il n'y a pas eu d'ordonnance du tribunal avant l'emprisonnement de M. Lai, et le secrétaire à la sécurité a gelé trois comptes bancaires détenus par M. Lai à l'OCBC et à la Citi, à Singapour.
Je mentionne cela parce que beaucoup de gens ont encore l'illusion que Hong Kong est un endroit où on se soucie de la primauté du droit et des droits de propriété, et où il subsiste encore quelque chose du temps où la primauté du droit et une société de libre marché toléraient et encourageaient même la liberté de presse et la libre discussion.
Il est important de noter que le secrétaire à la sécurité n'a fourni aucun élément de preuve à l'appui de son allégation selon laquelle M. Lai avait enfreint la loi sur la sécurité nationale, et qu'il n'a pas non plus demandé une ordonnance du tribunal, sans parler d'un procès, pour prouver la culpabilité de M. Lai devant un jury.
Un mois plus tard, à la mi‑juin 2021, les autorités ont pris une autre série de mesures. Ils ont envoyé 550 policiers armés au siège de notre journal, qui ont arrêté le directeur général, Cheung Kim‑hung, ainsi que le rédacteur en chef, Ryan Law, et qui ont détenu d'autres membres du personnel. M. Cheung Kim‑hung et M. Law sont détenus sans cautionnement depuis et attendent aussi leur procès.
Quatre autres anciens collègues sont détenus sans cautionnement depuis l'été 2021. Je pense qu'il est important de les nommer, parce qu'ils font partie des centaines de milliers de personnes qui font face à des accusations politiques à Hong Kong. Ce sont Chan Pui‑man, Yeung Ching‑Kee, Fung Wai‑kong et Lam Man‑Chung.
Le secrétaire à la sécurité a ensuite gelé les comptes bancaires de nos sociétés d'exploitation. Nous n'avons pas pu accepter les paiements de nos quelque 600 000 abonnés numériques. Malgré la peur et en dépit du fait que certains de nos employés ont vu leurs notes, leurs ordinateurs et leurs documents saisis, ils ont continué de publier le journal jusqu'à ce que nous soyons finalement forcés de fermer, cette dernière édition ayant eu un tirage record d'un million d'exemplaires, qui ont été vendus rapidement.
Privés d'argent, nous n'avons eu d'autre choix que de fermer le journal, et les administrateurs ont fini par démissionner, mais le gouvernement continue de nous poursuivre. Quatre enquêtes différentes nous concernant sont menées, nous dit‑on, et le gouvernement semble déterminé à prouver que cela n'a rien à voir avec la liberté de la presse, mais tout à voir avec une mauvaise gestion d'entreprise.
Ma demande pour le Canada n'est pas aussi spectaculaire ou aussi vaste que celle de certains autres témoins, mais il y a environ 300 000 titulaires de passeports canadiens à Hong Kong. J'espère que vous continuerez à défendre leurs intérêts, qu'ils soient journalistes ou non. Je souhaite que, compte tenu de l'expérience que le Canada a malheureusement eue avec l'approche de la Chine en matière de diplomatie axée sur la prise d'otages, vous mettrez les droits de la personne à l'avant-plan de toutes les conversations que vos ambassadeurs, d'autres diplomates et d'autres fonctionnaires auront avec des représentants de la Chine et de Hong Kong.
Je recommanderais également des sanctions de type Magnitski, non seulement pour les hauts fonctionnaires du gouvernement de Hong Kong — parce qu'elles seront prises en charge par les autorités chinoises —, mais aussi pour les hauts fonctionnaires, les juges et les facilitateurs du secteur privé, qui ont poursuivi non seulement d'anciens directeurs de Next Digital, mais aussi d'autres personnes. Ils font une partie du sale boulot du gouvernement pour essayer de détruire la liberté à Hong Kong.
Hong Kong est...
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Je vous remercie de cette excellente question. L'honorable député est manifestement très bien informé au sujet de la situation à Hong Kong et de l'utilisation des lois sur la sédition et d'autres menaces.
Nous assistons à une attaque généralisée contre la société civile. Nous avons vu des dizaines d'organisations de la société civile se dissoudre. Les tactiques juridiques sont les plus efficaces, parce qu'elles font en sorte que les dirigeants des organisations centrent leur attention sur les menaces d'emprisonnement ou de faillite. Les banques, notamment HSBC, ont été très actives dans le gel des comptes lorsque le gouvernement le leur a demandé, mais je pense aussi que nous devons examiner le rôle de l'élite de Hong Kong et des médias pro-Pékin. Je fais partie des nombreuses personnes qui ont été attaquées par Wen Wei Po qui, avec Ta Kung Pao, est l'un des deux journaux à prédominance communiste de Hong Kong. Nous constatons une tendance chez ces médias à souvent citer des experts de la Chine continentale, qui commencent par attaquer une personne ou une organisation. Si cette personne ou cette organisation ne cesse pas ses activités, ne se désiste pas ou ne fuit pas le territoire, ces attaques prennent alors la forme d'une guerre juridique.
C'est une attaque généralisée et remarquablement efficace, du point de vue communiste, contre les organisations de la société civile, l'éducation et, évidemment, le système juridique et les médias. Par exemple, quiconque souhaitait commémorer les meurtres commis le 4 juin 1989 sur la place Tiananmen était menacé d'emprisonnement, de faillite ou d'autres peines.
Je dirais que les députés devraient également se pencher sur la religion, il s'agit de l'une des dernières institutions indépendantes à Hong Kong. Les Églises catholique et protestante en particulier sont une source pour l'éducation et la libre pensée, et je pense qu'il sera intéressant de voir si ces tactiques commenceront à s'appliquer à elles également.
Je remercie les députés de leur intérêt.
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J'ai mentionné plusieurs recommandations antérieurement, et je serai heureuse d'en répéter quelques-unes.
Le Canada pourrait, de façon relativement rapide, imposer des sanctions ciblées, de manière concertée au sein d'un cadre multilatéral, sur les hauts fonctionnaires érythréens impliqués dans des actes de corruption et de violation des droits de la personne contre M. Isaak et ses collègues. C'est une chose que nous pourrions faire de façon assez efficace et rapide.
Ce mouvement a été préconisé, dans le cadre de ce cas, par une coalition internationale d'ONG, comme je l'ai déjà mentionné, d'organisations de défense des droits de la personne, d'experts, de défenseurs et de journalistes.
Il y a donc de nombreuses recommandations. Le Canada pourrait aussi soutenir l'appel des principaux experts des Nations unies qui sont engagés dans des procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme des Nations unies, qui ont eux-mêmes déjà appelé à la libération urgente et immédiate de M. Isaak.
Par exemple, le Canada, qui occupe la coprésidence de la Coalition pour la liberté des médias, s'est engagé à protéger la liberté des médias et la sécurité des journalistes. Il peut engager les membres de la Coalition dans l'affaire de M. Isaak et en faire une étude de cas emblématique. Il y a plusieurs autres choses que nous pourrions faire, mais voilà quelques idées et recommandations pour le Canada.
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Merci, monsieur le président. Je vais essayer d'être brève.
Tout d'abord, je tiens à remercier tous nos témoins d'être ici aujourd'hui et de nous faire part de leurs expériences.
Il est très, très important de vous entendre. Je réfléchis au fait qu'il est évident que nous sommes en présence de journalistes, les histoires dont vous nous faites part frappent notre imagination.
Pour ce qui est de ce que nous pouvons faire à ce sujet, mon collègue, M. Trudel, vient de soulever qu'il puisse arriver que le Canada fasse très peu ou qu'il y ait des limites à ce qu'il peut faire. Bien sûr, il est toujours préférable d'être dans une situation où on est capable d'empêcher qu'une chose se produise, plutôt que de condamner cette chose après coup.
Je pensais un peu à la façon dont nous travaillons avec nos médias au Canada et partout dans le monde, et au modèle de revenus des médias — à savoir la publicité.
Dans le groupe de témoins précédent, Maria Ressa a parlé de ses travaux avec le Fonds international pour les médias d'intérêt public et de la façon dont nous pourrions renverser la vapeur.
J'aimerais beaucoup en savoir davantage à ce sujet, alors je vais peut-être commencer par vous, madame Pulfer.
Comment pourrions-nous financer les médias? Comment pouvons-nous nous assurer que les médias peuvent continuer de fonctionner sans ce modèle axé sur la publicité qui, avec Facebook et d'autres médias sociaux, rend nos journalistes si vulnérables?