:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant vous pour cette première réunion consacrée à l'étude du financement des activités terroristes.
[Français]
Aujourd'hui, j'ai l'intention de vous donner un aperçu des efforts que déploie le Canada pour lutter contre le financement des activités terroristes. Ces efforts s'inscrivent dans un cadre de plus grande envergure, connu sous le nom de régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, que j'appellerai ici « le régime ».
[Traduction]
Je vous donnerai un aperçu des menaces actuelles qui guettent le Canada en raison du financement des activités terroristes et des répercussions pour la sécurité et l'économie du Canada. Je présenterai ensuite un résumé des façons dont le Canada est actif sur la scène internationale dans la lutte contre le financement du terrorisme. En dernier lieu, en m'inspirant du rapport récent du Groupe d'action financière (GAFI) sur le financement de l'organisation terroriste de l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL), je décrirai aussi ce que comprend actuellement la communauté internationale du financement de cette organisation et ce que nous tentons encore d'apprendre.
Après que M. Cossette et moi aurons terminé nos observations préliminaires, nous serons heureux de répondre à toutes vos questions.
J'aimerais vous donner un aperçu du régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. C'est une vaste initiative horizontale dirigée par le ministère des Finances qui mobilise 11 ministères et organismes fédéraux. Le régime a pour but de déceler les infractions liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes, de les prévenir et de faciliter les enquêtes et les poursuites qui s'y rapportent, ce qui contribue à l'objectif global consistant à protéger l'intégrité du système financier du Canada et à assurer la sécurité des Canadiens.
Parmi les 11 partenaires, 7 reçoivent collectivement la somme d'environ 70 millions de dollars par année en financement supplémentaire à l'appui de leurs activités exercées dans le cadre du régime. Ces partenaires sont le ministère des Finances, le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE), le ministère de la Justice, le Service des poursuites pénales du Canada, la Gendarmerie royale du Canada, l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) et l'Agence du revenu du Canada. Les autres partenaires contribuent au régime, mais ne reçoivent pas de financement expressément à cette fin. Il s'agit du Bureau du surintendant des institutions financières, de Sécurité publique Canada et du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement.
En plus de lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, le régime se veut un complément au travail des organismes d'application de la loi et du renseignement en ce qui concerne les crimes graves, le crime organisé et les menaces à la sécurité nationale. Il s'avère une composante clé de la stratégie antiterroriste du Canada.
Le régime s'articule autour de trois piliers indépendants: la coordination des politiques, la prévention et la perturbation des activités, chaque partenaire ayant un rôle important à jouer.
Le premier pilier comprend le cadre et la coordination du régime que dirige le ministère des Finances. Ce cadre est établi principalement par la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. La loi exige des institutions et des intermédiaires financiers qu'ils identifient leurs clients, qu'ils tiennent des dossiers et qu'ils disposent d'un programme de conformité interne. La loi instaure en outre un système obligatoire de signalement des opérations financières douteuses, des importants mouvements transfrontaliers d'espèces et de certaines opérations visées par règlement. C'est aussi la même loi qui a créé le CANAFE qu'elle autorise à recueillir et analyser des rapports d'opérations financières et à divulguer des renseignements pertinents aux organismes d'application de la loi et du renseignement.
Le deuxième pilier consiste à empêcher que les fonds liés à des terroristes se retrouvent dans le système financier. Dans le cadre de cette approche dissuasive, la responsabilité de veiller à la conformité des entreprises réglementées incombe aux institutions et aux intermédiaires financiers qui sont les gardiens du système financier, ainsi qu'aux organismes de réglementation que sont le CANAFE et le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF).
La détection et la perturbation des efforts de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes représentent le dernier pilier. Dans le cadre de ce volet, des partenaires du régime comme le SCRS, l'ASFC et la GRC s'appuient sur les renseignements fournis par le CANAFE pour entreprendre des enquêtes où ils suivent la trace de l'argent dans les cas de recyclage des produits de la criminalité, de financement des activités terroristes et d'autres crimes financiers. L'Agence du revenu du Canada joue un rôle important à cet égard en détectant les organismes de bienfaisance à risque et en s'assurant que l'on n'en fait pas mauvais usage pour financer le terrorisme.
Le régime peut aussi compter sur un processus efficace d'inscription des entités terroristes permettant de geler les actifs des terroristes, conformément au Code criminel et aux règlements des Nations unies, processus que dirigent respectivement Sécurité publique Canada et le ministère des Affaires étrangères. Au total, le Canada a recensé 90 entités terroristes au moyen de ces deux régimes.
Enfin, le Service des poursuites pénales du Canada s'assure que les auteurs de crimes qui menacent la sécurité nationale ou internationale, y compris le financement du terrorisme, sont poursuivis avec toute la rigueur que permet la loi.
[Français]
Le régime se veut une approche authentiquement canadienne contre les menaces de recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes. Cette approche respecte la répartition constitutionnelle des pouvoirs, la Charte des droits et libertés et le droit à la vie privée des Canadiens. De plus, le régime est conforme aux normes internationales qui sont élaborées par le Groupe d'action financière, l'organisme international d'établissement de normes contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme.
Le régime du Canada est examiné et amélioré régulièrement dans le but d'aborder les risques naissants. Le Parlement examine la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes tous les cinq ans. Le régime est en outre assujetti à plusieurs autres examens et audits officiels, y compris une évaluation du rendement quinquennale et une vérification biennale par le Commissariat à la protection de la vie privée concernant le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada, le CANAFE.
[Traduction]
En mars 2013, le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a publié un rapport à l'issue de son examen quinquennal. Nous appuyons le comité dans son objectif d'améliorer l'efficacité du régime et nous adhérons à bon nombre de ses recommandations principales qui s'articulent autour de trois grandes visées: mettre en oeuvre une structure de régime destinée à augmenter le rendement; améliorer l'échange de renseignements; et établir une portée adéquate pour le régime. Le gouvernement a donné suite à bon nombre de ces recommandations.
Dans le Plan d'action économique de 2014, le gouvernement a annoncé qu'il apporterait des modifications visant à renforcer le régime, ce qui a été fait par le truchement du projet de loi d'exécution du budget, , qui a reçu la sanction royale en juin 2014.
Ces modifications législatives et réglementaires permettront de resserrer les normes de vigilance à l'égard de la clientèle; de combler les lacunes du régime; d'améliorer les activités visant la conformité, la surveillance et l'application des règles; d'améliorer l'échange de renseignements; et de conférer au le pouvoir de lancer des contre-mesures à l'endroit d'administrations et d'entités étrangères dont les activités de contrôle du recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes ne sont pas suffisantes ou sont inefficaces.
Les modifications renforcent également la capacité du CANAFE à divulguer aux partenaires fédéraux des renseignements sur les menaces à la sécurité du Canada. Le ministère s'emploie à élaborer un ensemble de mesures réglementaires à l'appui de ces modifications.
Sur le plan administratif, nous réexaminons la stratégie d'évaluation du rendement du régime, et le CANAFE a intensifié sa rétroaction à l'intention des entités déclarantes en publiant en ligne ses interprétations des politiques.
Tel qu'annoncé dans le Plan d'action économique de 2014, le gouvernement apportera des changements dans le but d'accroître l'efficacité du régime des sanctions financières ciblées du Canada. Sous la direction du ministère des Affaires étrangères, il deviendra ainsi plus simple pour le secteur privé d'appliquer les sanctions financières, ce qui accroîtra d'autant leur efficacité.
J'aimerais maintenant passer à l'évaluation des menaces de financement des activités terroristes. Dans le but de faire une utilisation optimale des ressources disponibles, le Canada mise, à l'instar de nombreux autres pays, sur une approche fondée sur les risques pour évaluer les menaces de financement des activités terroristes et combattre ce phénomène. En adoptant une approche fondée sur les risques, les organismes d'application de la loi, les services du renseignement et les institutions financières s'assurent que les mesures de prévention et d'atténuation du recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes sont proportionnelles aux risques cernés.
Les partenaires du régime sont sur le point de terminer un exercice pangouvernemental exhaustif d'identification et d'évaluation des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, et de la vulnérabilité du Canada à cet égard. Cet exercice misant sur les pratiques d'évaluation existantes permettra en outre au Canada de donner suite à l'engagement pris dans le Plan d'action G8 du Canada de 2013 en procédant à une évaluation des risques et en allant dans le sens des recommandations du Groupe d'action financière (GAFI).
À la lumière des évaluations menées jusqu'à maintenant, la menace de financement des activités terroristes n'apparaît pas aussi prononcée au Canada qu'elle l'est dans d'autres régions du monde où des régimes moins efficaces de lutte contre ce phénomène ont permis à des groupes terroristes d'implanter leurs opérations et leurs activités de financement. Bien que la menace terroriste que font planer sur le Canada les extrémistes radicalisés qui appuient des entités comme l'EIIL soit bien réelle, les risques de financement des activités terroristes semblent plus faibles.
Le Canada a pris des mesures contre bon nombre de ces groupes terroristes identifiés à l'aide du processus d'inscription des entités terroristes. Cela étant dit, le Canada n'est pas à l'abri des méfaits que peuvent causer des personnes cherchant à appuyer le financement des activités terroristes, et je m'attends à ce que mes collègues de l'Agence du revenu du Canada, de la GRC et du SCRS en traitent dans leurs présentations à ce comité.
J'aimerais maintenant parler des actions qu'entreprend le Canada sur la scène internationale dans ce dossier. Le financement des activités terroristes est une menace qui transcende les frontières, et les efforts que déploie le Canada pour lutter contre cette menace sont menés conjointement avec ses partenaires internationaux. Les initiatives internationales canadiennes de lutte contre le financement des activités terroristes sont accomplies par l'entremise du GAFI, du G7, du G20 et, plus récemment, du groupe de travail pour contrer le financement de l'EIIL.
Sous la direction du ministère des Finances, le Canada est membre fondateur et participant actif du GAFI. Celui-ci élabore des normes internationales contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, et s'assure qu'elles sont mises en oeuvre efficacement dans les 36 pays membres de même que dans les quelque 180 pays qui font partie du réseau mondial du GAFI. Le GAFI dirige les efforts internationaux visant l'élaboration des politiques et l'analyse des risques; il relève les tendances et les pratiques émergentes en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Ces travaux importants aident la communauté internationale à conserver une longueur d'avance sur les criminels, y compris les terroristes et leurs bailleurs de fonds, de telle sorte que les différents pays disposent des outils adéquats pour contrer ces risques sur la scène mondiale.
De plus, le GAFI procède à des examens exhaustifs par les pairs permettant de déterminer dans quelle mesure les régimes de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes des pays membres sont efficaces conformément aux 40 recommandations formulées. Suivant ces recommandations du GAFI, tous les pays doivent se doter d'un système permettant de prévenir le recyclage des produits de la criminalité, le financement des activités terroristes et le financement de la prolifération des armes de destruction massive, et de s'attaquer à ces fléaux.
Les recommandations portent sur les mesures qui devraient être mises en place au sein des systèmes de justice pénale et de réglementation des pays membres; les mesures préventives que doivent prendre les institutions financières; les mesures destinées à garantir la transparence des entreprises; l'établissement d'autorités compétentes assorties de pouvoirs adéquats et de mécanismes de coopération; et les ententes de coopération à conclure avec d'autres pays.
Je vous signale que le Canada fera l'objet d'une évaluation mutuelle du GAFI qui commencera cet automne. Cette évaluation a pour objectif de déterminer la mesure dans laquelle le Canada dispose des lois, des règlements, des institutions, des pouvoirs et des procédures nécessaires pour lutter efficacement contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme. On cherchera en outre à voir si ces éléments sont mis à contribution de façon efficace.
Le Canada contribue également aux efforts internationaux de lutte contre le financement des activités terroristes à l'aide du renforcement des capacités mondiales. Plus précisément, dans le cadre du programme de renforcement des capacités antiterroristes dirigé par le ministère des Affaires étrangères, plusieurs projets de renforcement des capacités en matière de lutte au financement des activités terroristes ont été réalisés dans des pays d'intérêt stratégique dans les Amériques, au Moyen-Orient et en Asie du Sud.
J'aimerais terminer mes remarques en vous parlant des efforts constants qui sont déployés pour lutter contre le financement de l'EIIL. En plus des activités de base du GAFI, le Canada participe activement aux nouveaux travaux entrepris par le groupe pour lutter contre le financement de l'EIIL à la suite de l'appel lancé au mois de février dernier par les ministres des Finances du G20. Le mois dernier, le GAFI a publié un rapport rédigé par des experts de plusieurs pays, dont le Canada. Ce rapport résume les plus grandes sources de revenus de l'EIIL et souligne plusieurs mesures nouvelles et existantes destinées à contrer le financement de ce groupe.
Plus précisément, les auteurs du rapport constatent que l'EIIL parvient à se procurer des fonds considérables grâce à son contrôle de larges bandes de territoire en Irak et en Syrie. Parmi les activités connues de l'EIIL, on note la vente ou l'imposition directe d'actifs économiques comme l'argent, le pétrole, les produits agricoles, les biens culturels et d'autres ressources naturelles et marchandises, ainsi que le pillage de banques dans les territoires dont l'EIIL s'empare.
[Français]
Les autres sources de fonds étrangères comprennent l'enlèvement contre rançon, la vente de biens archéologiques et les donateurs privés de l'extérieur, y compris par l'intermédiaire des secteurs des organismes sans but lucratif ou de bienfaisance et par l'entremise des combattants terroristes étrangers.
Dans le rapport, on fait aussi observer que, par sa présence active sur Internet et dans les médias sociaux, le groupe est parvenu à obtenir un appui international et à le convertir en fonds concrets. Le groupe est connu pour son exploitation des nouvelles technologies et des réseaux de communication modernes, dont les techniques de financement collectif, pour solliciter des contributions financières.
[Traduction]
Comme on l'indique dans le document du GAFI, les besoins de l'EIIL en matière de fonctionnement et d'infrastructures font du financement permanent une nécessité. Les frappes aériennes de la coalition se sont révélées efficaces pour restreindre la capacité de l'EIIL à exploiter les ressources pétrolières et gazières se trouvant dans ces sphères de contrôle. Pour compléter ces activités militaires, des efforts internationaux sont actuellement déployés afin d'empêcher l'EIIL de tirer parti des secteurs financiers et commerciaux qu'il contrôle.
Toutefois, certains aspects du financement de l'EIIL ne sont toujours pas bien compris. Pour combler cette lacune, le GAFI poursuivra ses importants travaux en convoquant en septembre prochain des experts de la lutte contre le financement des activités terroristes en vue d'étudier les tendances et les pratiques émergentes en la matière.
De plus, le GAFI procédera incessamment à un examen visant à déterminer si tous ses membres, dont le Canada, sont capables de restreindre le flux de financement lié au terrorisme conformément à ses 40 recommandations. Cet examen portera principalement sur la criminalisation des infractions liées au financement des activités terroristes et sur le gel des actifs des terroristes, y compris les mesures exigées au titre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies.
L'exercice revêt une importance toute particulière du fait que certains pays n'ont pas encore mis adéquatement en oeuvre les normes du GAFI relatives au financement des activités terroristes, ce qui a pour effet de créer des poches de vulnérabilité dans le système financier international. Dans la lutte contre le financement des activités terroristes comme ailleurs, une chaîne ne peut pas être plus forte que son maillon le plus faible.
En plus des travaux du GAFI, le Canada participe activement à la coalition anti-EIIL dirigée par les États-Unis et à son groupe de travail, récemment mis sur pied, qui est chargé de lutter contre le financement de l'EIIL. Ce groupe qui a tenu sa première réunion la semaine dernière s'emploie à élaborer un plan d'action destiné à faciliter la coordination des activités de la coalition. La participation du Canada à ce groupe de travail anti-financement s'inscrit dans les efforts d'ensemble que déploie le gouvernement canadien pour lutter contre l'EIIL.
[Français]
Permettez-moi de conclure brièvement. Autant au pays que sur la scène internationale, le Canada est engagé et il est très actif dans la lutte contre le financement des activités terroristes. Le risque est présent et il évolue.
[Traduction]
Nous disposons d'un régime solide et sommes en train de le renforcer par de nouvelles modifications réglementaires. Nous continuons à évaluer les risques et à réagir en conséquence.
Je vous remercie.
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Merci, monsieur le président, de m'avoir invité aujourd'hui pour discuter de votre étude élargie du financement du terrorisme.
Je peux vous assurer que nous serons aussi ouverts que possible dans nos réponses. Toutefois, comme vous le savez, nous ne pouvons pas dévoiler de l'information classifiée dans ce lieu public. De plus, notre loi limite ce que nous pouvons dire au sujet de l'information qui nous est confiée.
J'aimerais prendre quelques minutes pour décrire le mandat du CANAFE et le rôle que nous jouons pour aider à protéger les Canadiens ainsi que l'intégrité du système financier canadien. Plus particulièrement, je parlerai de notre contribution, en étroite collaboration avec nos partenaires des services policiers et des organismes de sécurité nationale, à la détection du financement du terrorisme et à la lutte contre ce problème important.
Le CANAFE a été créé en 2000 lors de l'adoption de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes afin de décourager, de prévenir et de détecter le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. En vertu de cette loi, le CANAFE, les services de police, les organismes de renseignement et de sécurité nationale, les procureurs et environ 31 000 entreprises de tout le pays ont tous un rôle à jouer pour créer un environnement hostile à ceux qui tentent d'abuser de notre système financier ou qui menacent la sécurité des Canadiens.
Les mesures législatives obligent les entités offrant des services financiers, les entreprises de services monétaires, les casinos et d'autres entreprises assujetties à la loi à mettre sur pied un programme de conformité, à vérifier l'identité des clients, à surveiller les relations d'affaires, à tenir certains dossiers et à déclarer certaines transactions financières au CANAFE, dont les transactions douteuses et les télévirements internationaux de 10 000 $ ou plus. En outre, les déclarations de biens appartenant à des groupes terroristes qui sont envoyées directement à la GRC et au SCRS doivent aussi être transmises au CANAFE.
J'aimerais profiter de l'occasion pour remercier les entreprises canadiennes de leur réponse à notre demande visant à accélérer la transmission des déclarations de transactions douteuses dans le sillage des attaques à Ottawa et à Saint-Jean-sur-Richelieu en octobre dernier. Notre but était de fournir toute l'aide que nous pouvions, dans le cadre de notre mandat, à nos partenaires des services policiers et des organismes de sécurité nationale afin de prévenir une autre attaque, au Canada ou à l'étranger. Je suis heureux de pouvoir vous dire que la déclaration des transactions douteuses a augmenté de 22 % en octobre 2014 et que l'information que nous avons reçue d'entreprises de tout le pays s'est révélée utile pour nos services de renseignement. Grâce aux entreprises qui ouvrent ainsi la voie, le régime canadien de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme fonctionne donc bien lors de telles attaques.
[Français]
Monsieur le président, la menace terroriste est bien réelle. Un certain nombre de personnes font face à la justice pour des actes terroristes qu'elles envisageaient de commettre ici, au Canada. Je sais que les membres du comité connaissent le cas présentement en cours relatif aux deux personnes censées avoir comploté pour faire exploser des bombes fabriquées au moyen d'autocuiseurs à l'extérieur de l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique.
De même, il y a quelques semaines, des représentants de l'Agence des services frontaliers du Canada ont arrêté une personne soupçonnée de vouloir faire exploser le consulat américain et d'autres immeubles dans le district financier de Toronto. Finalement, en septembre dernier, un résidant d'Ottawa entraîné en Afghanistan a plaidé coupable à des accusations de terrorisme devant une cour d'Ottawa et a reçu une peine de 24 années d'emprisonnement pour ses crimes.
Après les attaques qui ont eu lieu au Canada l'automne dernier, le directeur du Service canadien du renseignement de sécurité — le SCRS — a confirmé que son organisation avait identifié plus de 130 Canadiens qui s'étaient rendus à l'étranger pour soutenir des activités extrémistes. Nous ne devons pas perdre de vue le fait que ces mêmes personnes reçoivent de l'entraînement, qu'elles sont équipées et radicalisées davantage, et qu'elles peuvent revenir au Canada en tout temps. En fait, le SCRS a indiqué qu'au moins 80 de ces personnes sont de retour au pays.
La menace que présentent les combattants étrangers et d'autres extrémistes violents a lourdement été ressentie cette année en France, où les terroristes qui ont attaqué la publication Charlie Hebdo étaient présumés avoir des liens étroits avec des groupes terroristes étrangers.
La nature internationale du terrorisme s'applique également à son financement. Nous savons que le financement du terrorisme provient de sources illégitimes et légitimes. Nous savons également qu'une certaine partie des fonds recueillis pour financer ces crimes violents provient du Canada ou y transite. Il suffit de songer au cas de Momin Khawaja qui, en 2008, a été reconnu coupable, entre autres, de fournir des fonds pour faciliter des activités terroristes.
[Traduction]
Grâce aux quelque 20 millions de déclarations de transactions financières que nous recevons chaque année des entreprises, le CANAFE est en mesure de produire des données financières exploitables qui aident les services de police et les organismes de sécurité nationale à protéger le Canada et les Canadiens. Ces données nous permettent d'établir des liens entre des personnes et des groupes au Canada et à l'étranger qui soutiennent des activités terroristes, et donc de détecter le financement de ces activités.
L'an dernier, nous avons été à l'origine de 1 143 communications de renseignements financiers pour aider nos partenaires du régime dans leurs enquêtes sur le blanchiment d'argent, le financement du terrorisme et les menaces à la sécurité du Canada. De ces communications, 234 portaient sur le financement du terrorisme et des menaces à la sécurité du pays. Cela représente plus d'une communication sur le financement du terrorisme par jour ouvrable.
En avril 2014, les Équipes intégrées de la sécurité nationale de la GRC en Ontario et au Québec ont reconnu notre contribution à une enquête sur le financement du terrorisme visant IRFAN-Canada, une organisation que l'on présume liée à l'entité terroriste Hamas. La GRC a aussi reconnu la contribution du CANAFE au projet Smooth après l'arrestation de deux personnes accusées de complot en vue de perpétrer un attentat terroriste contre un train de passagers de VIA se déplaçant de New York vers Toronto.
Le renseignement financier est devenu un élément important des enquêtes de nos partenaires des services policiers et des organismes de sécurité nationale. Le CANAFE a communiqué différentes informations dans le cadre des efforts plus vastes déployés par le gouvernement pour lutter contre le terrorisme et ceux qui soutiennent ces activités, au pays et à l'étranger.
Compte tenu de la nature complexe et transnationale du terrorisme, nous maintenons des relations de travail très solides et productives avec nos partenaires des services policiers et des organismes de sécurité nationale. Nos données financières ne sont exploitables que dans la mesure où elles concordent étroitement avec les priorités de nos partenaires. Nous collaborons aussi de près avec d'autres unités du renseignement financier partout dans le monde afin d'échanger de l'information et de l'expertise, ce qui élargit d'autant notre portée tout en enrichissant notre analyse des transactions financières internationales. Dès que nous avons entendu parler de la prise d'otages à Sydney, en Australie, et des attaques à Charlie Hebdo, en France, nous avons effectué de la recherche proactive sur des cibles à un niveau tactique et avons offert de l'aide. Nos alliés ont fait de même après les attaques au Canada l'année dernière.
[Français]
Dans le cadre de notre mandat, nous produisons également des rapports classifiés de renseignement stratégique sur des activités présumées de financement du terrorisme et sur les grandes tendances dans le domaine. Par exemple, nous avons effectué une analyse stratégique géospatiale des flux financiers vers la Syrie qui présentent un risque élevé en analysant les déclarations de télévirements internationaux.
Grâce à notre travail sur le renseignement financier tactique et stratégique, nous avons assumé un rôle de leadership dans le cadre des efforts internationaux déployés par le Groupe d'action financière, le Groupe Egmont des unités internationales du renseignement financier et d'autres organisations, afin de faciliter la lutte contre le financement du terrorisme partout dans le monde.
[Traduction]
Le succès du régime canadien de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme dépend du dévouement de toutes les parties concernées — des entreprises aux premières lignes du système financier canadien aux procureurs qui font condamner les criminels qui recyclent des fonds et financent le terrorisme. Ensemble, nous produisons d'importants résultats pour les Canadiens.
Merci, monsieur le président.