:
La séance est ouverte. Nous en sommes à la 72
e réunion du Comité permanent des finances. Conformément au paragraphe 108(2), nous poursuivons notre étude sur l'impact des bas prix du pétrole sur l'économie canadienne.
Nous aurons deux tables rondes ici ce matin.
Pour la première, nous entendrons les témoignages de cinq personnes, en commençant par M. Rhys Mendes, qui est sous-chef à la Banque du Canada. Bienvenue au comité. Nous entendrons ensuite M. Jeff Walker, vice-président de l'Association canadienne des automobilistes. Bienvenue. Ensuite, il y aura M. Jayson Myers, président et chef de la direction des Manufacturiers et exportateurs du Canada. Bienvenue à nouveau parmi nous. Nous entendrons également M. Mark Nantais, président de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules. Bienvenue également, Mark.
Nous devrions aussi entendre le témoignage de Jim Stanford, d'Unifor, mais nous éprouvons quelques difficultés avec la vidéoconférence. Nous espérons que tout rentrera dans l'ordre d'ici une minute ou deux.
Vous disposerez chacun d'au plus cinq minutes pour votre déclaration préliminaire.
Nous commencerons par vous, monsieur Mendes.
:
Merci. Monsieur le président, distingués membres du comité, bonjour. Au nom de la Banque du Canada, je vous remercie de cette occasion que vous nous offrez d'exposer notre analyse de l'incidence de la baisse des prix du pétrole sur l'économie canadienne en général et sur le secteur manufacturier en particulier.
Je dois souligner que notre analyse porte sur l'économie canadienne dans son ensemble. La baisse rapide des prix du pétrole aura des effets à la fois positifs et négatifs sur différents secteurs de l'économie canadienne. Pour mesurer l'incidence globale, nous avons utilisé un outil de modélisation que nous avons conçu de façon à prendre en compte les divers canaux et effets de débordement. Nous nous sommes également appuyés sur des enquêtes et de nombreuses rencontres avec des entreprises et des associations de gens d'affaires. En définitive, le recul marqué du prix du pétrole observé depuis juin 2014 a des conséquences indéniablement négatives pour l'économie canadienne. Ainsi qu'il est indiqué dans notre Rapport sur la politique monétaire paru en janvier dernier, l'incidence négative de la baisse des prix du pétrole se fera sentir en grande partie au premier semestre de 2015.
La baisse des prix de l'énergie entraînera une perte de revenu global. En effet, en dépit d'une progression de 2,4 % du PIB réel au quatrième trimestre de 2014, les revenus réels de la population canadienne ont diminué. Cette situation s'explique par le recul du prix mondial d'un produit d'exportation important, ce qui se traduit par une perte du pouvoir d'achat des Canadiens. Parallèlement à cet effet négatif sur les termes de l'échange, on s'attend à ce que les investissements fixes des entreprises soient plus faibles. En 2015, on prévoit une baisse d'à peu près un tiers des investissements des entreprises dans le secteur pétrolier et gazier, qui concentre environ un tiers des investissements totaux des entreprises. Les répercussions du choc des prix pétroliers se feront sentir partout au pays.
Les principaux canaux de transmission sont celui de l'effet sur le revenu global, qui s'exerce par l'entremise d'une perte du pouvoir d'achat, et celui des effets sur la chaîne d'approvisionnement, comme près du tiers des biens et services achetés par le secteur des sables bitumineux de l'Alberta provient des autres provinces.
Certains facteurs positifs font partiellement contrepoids. Bien que la situation de la population canadienne soit globalement moins favorable, la baisse des prix du pétrole laisse davantage d'argent dans les poches des consommateurs. Ces derniers peuvent dépenser le revenu disponible supplémentaire ou l'épargner. Leur décision aura des effets sur la croissance économique. En outre, l'abaissement des coûts de production des sociétés qui utilisent le pétrole comme intrant pourrait entraîner une hausse des profits, de la production et des investissements dans les secteurs de l'économie non dépendants du pétrole.
N'oublions pas que le repli actuel des prix du pétrole s'explique surtout par l'abondance de l'offre à l'échelle mondiale, comme l'a souligné mon collègue, le sous-gouverneur Tim Lane, dans un récent discours. La diminution des prix du pétrole attribuable à des facteurs d'offre stimule l'activité économique des États-Unis, principal partenaire commercial du Canada, ce qui favorisera nos exportations si notre secteur des exportations se comporte comme par le passé.
Il existe un autre canal à travers lequel la baisse des prix pétroliers influera sur le Canada. Comme notre pays est un exportateur net de pétrole, la valeur du dollar canadien a tendance à être intimement liée au mouvement des prix de l'or noir. De 2002 à 2008, les prix du pétrole et le dollar canadien affichaient une tendance générale à la hausse. Comme vous vous le rappelez sans doute, en 2008, quand le pétrole s'échangeait à bien plus de 100 $ le baril, le dollar canadien se situait presque à parité avec la devise américaine. Aujourd'hui, étant donné la chute marquée des prix du pétrole, notre dollar se situe autour des 80 ¢ américains. La baisse du huard rend la production du Canada plus concurrentielle, ce qui devrait stimuler davantage les exportations et, en fin de compte, les investissements. En somme, comme mentionné dans notre Rapport sur la politique monétaire de janvier, on s'attend à ce que le secteur manufacturier profite de la demande plus vigoureuse aux États-Unis, des coûts d'expédition moins élevés et du niveau plus faible du dollar canadien.
Au moment d'évaluer la capacité du secteur manufacturier canadien à tirer parti de la baisse des prix du pétrole et de la dépréciation du dollar, nous devons tenir compte de l'historique de la situation. Au Canada, les défis sur le plan de la compétitivité, ainsi que la longue période de faible demande américaine, ont contraint de nombreux exportateurs de biens non énergétiques à se départir du capital superflu et à supprimer des emplois, ou à mettre la clé sous la porte pour de bon. La reconstruction de la capacité de production perdue ne se fera pas du jour au lendemain. Cela fait longtemps que la banque dit qu'il faut que la demande se déplace vers les exportations et les investissements des entreprises pour que l'économie canadienne renoue avec une croissance durable. L'expansion des exportations canadiennes hors énergie a gagné en vigueur ces derniers trimestres, ce qui donne à penser que le déplacement de la demande est en cours.
En terminant, permettez-moi de souligner que notre plus récente enquête sur les perspectives des entreprises a fait ressortir que les intentions d'embauche et les plans d'investissement étaient robustes chez les fabricants. Une majorité d'entreprises ont déclaré que leurs projets d'investissement avaient pour but d'accroître la production. Dans l'ensemble, ce sont là des signes positifs qui portent à croire que le processus de reconstruction est enclenché.
Voilà qui conclut ma déclaration préliminaire. J'ai hâte d'en discuter.
:
Merci de me permettre d'être ici aujourd'hui. C'est très apprécié.
L'Association canadienne des automobilistes est un organisme qui représente 6,1 millions de Canadiens. Nous sommes très actifs dans le domaine de la consommation. Nous nous efforçons de nous tenir au courant des enjeux qui touchent les consommateurs canadiens, en particulier dans les domaines qui nous concernent, comme les véhicules et les prix de l'essence. Ces derniers mois, nous avons fait faire des enquêtes auprès des consommateurs au sujet de la fluctuation des prix de l'essence. Les résultats de notre plus récente enquête, publiés en janvier dernier, sont très intéressants.
Tout d'abord, il faut dire que les gens portent attention. Ils sont attentifs à la baisse des prix de l'essence et aux changements plus généraux liés à cette baisse. Ils constatent que l'essence coûte moins cher. Ils ne songent pas nécessairement au prix du pétrole. En général, les Canadiens voient la situation du point de vue du consommateur, du moins en ce moment. Ils surveillent les prix et adoptent des comportements qui défient parfois la logique sur le plan économique. Nous avons constaté que les gens portent davantage attention. Ils conduisent plus loin pour acheter de l'essence vendue moins cher. Certains comportements ne sont pas toujours sensés sur le plan économique, mais les gens sont heureux ainsi. C'est ce que nous avons observé.
Quant à la façon dont les gens perçoivent la situation dans son ensemble, nous constatons qu'il y a l'Alberta, puis le reste du pays. Les Albertains interrogés disent qu'ils sont inquiets de l'aspect macro-économique de la situation. Est-ce que cela va avoir un impact économique important à long terme? Environ les deux tiers des Albertains pensent que cela va avoir un effet important. Le tiers restant, environ, est d'avis que cela va avoir un important effet négatif sur le plan macro-économique à long terme.
Selon les résultats obtenus, la plupart des Canadiens croient qu'il s'agit d'une situation à court terme, que ça ne durera pas très longtemps. Nous leur avons demandé dans combien de temps, à leur avis, les prix vont remonter. Les prix vont-ils remonter, ou rester bas? Les gens disent que ça va durer de trois à six mois. Ils s'attendent à ce que les prix remontent, peut-être pas jusqu'aux anciens niveaux, mais ils ne devraient pas rester aussi bas qu'en ce moment. Comme ils ne considèrent pas qu'il s'agit d'une situation à long terme — et je ne crois pas que ceux qui m'entourent aujourd'hui le croient non plus —, il existe un écart entre leur perception de la situation macro-économique à long terme. Nous croyons qu'avec le temps, de plus en plus de Canadiens partageront l'avis des Albertains.
Permettez-moi d'ajouter quelques derniers points à ce sujet. En ce moment, on constate qu'en général, les gens apprécient la situation économique actuelle, comme Jason l'a fait remarquer. Sauf en Alberta, ils ne constatent pas de changements dans le prix des maisons ou de pertes d'emplois. On a parlé de l'emploi en Ontario et dans d'autres régions manufacturières du pays. Les gens ne constatent pas de changement, et ne ressentent donc aucune inquiétude. En ce moment, on considère qu'il s'agit d'un problème micro-économique partout sauf en Alberta, où on voit la situation comme un problème macro-économique. On verra si l'opinion des gens évoluera avec le temps lorsqu'ils comprendront qu'il pourrait s'agir d'un problème à plus long terme.
:
Je vous remercie, monsieur le président.
[Traduction]
J'ai préparé et distribué un document dans lequel on analyse, de notre point de vue, l'incidence de la baisse des prix du pétrole sur le secteur manufacturier. Je ne vais pas entrer dans les détails sur ce point, vous pourrez jeter un coup d'oeil vous-mêmes. La seule chose que je pourrais probablement prédire avec exactitude, c'est que si vous prenez un groupe d'économistes et que vous leur demandez leur opinion au sujet de l'incidence des prix du pétrole sur l'économie, vous obtiendrez au moins autant d'opinions différentes, sinon plus, qu'il y aura d'économistes présents.
Permettez-moi de me concentrer sur certains sujets clés. Il y a d'abord la corrélation entre le dollar américain et le prix du pétrole. Il est important de comprendre que le baril de pétrole se transige en dollars américains, et que si la valeur du dollar américain augmente par rapport aux autres devises, le prix du pétrole aura naturellement tendance à baisser sans que l'offre et la demande n'aient d'incidence sur cette baisse. Il s'agit là d'une corrélation extrêmement forte. Dans les faits, si on compare le dollar américain à d'autres devises sur le plan de l'ensemble des transactions liées au pétrole, on constate que la valeur du dollar américain a chuté de 25 %. Cela représente un peu plus de la moitié de la baisse du prix du pétrole depuis septembre dernier.
Il s'agit ici de la force du dollar américain en ce moment, ce qui indique que d'autres économies paraissent faibles ou en déclin, et alimente l'autre moitié de l'équation concernant l'offre et la demande de pétrole. La baisse de la demande mondiale de pétrole, jumelée à une surproduction ininterrompue, entraîne également une baisse des prix du pétrole.
C'est important car cette baisse du prix du pétrole a une incidence négative nette sur le secteur manufacturier canadien. Je suis d'accord avec Rhys sur ce point. Toutefois, c'est et ce sera contrebalancé par la reprise de l'économie américaine et par la faiblesse du dollar canadien par rapport au dollar américain. Rhys a mentionné l'incidence de la baisse des prix du pétrole sur l'activité économique dans l'Ouest canadien. Cela a évidemment des répercussions sur l'ensemble du secteur manufacturier au pays. Nous estimons que cette incidence est de l'ordre de 12 milliards de dollars par année. Ce n'est pas uniquement dû à une réduction de la demande en produits manufacturés et en équipement pour des nouveaux projets pétroliers dans l'Ouest canadien. Il existe également, partout dans la chaîne d'approvisionnement, une pression considérable de la part des grands exploitants pétroliers et des sociétés d'approvisionnement pour que les fabricants réduisent leurs prix. Il ne s'agit pas seulement d'une simple question de perte de production, mais aussi d'une importante influence visant à tirer les prix vers le bas.
Ce qui contrebalance l'incidence du prix du pétrole est bien entendu le fait que, dans une certaine mesure, certains secteurs vont bénéficier de la baisse du coût de la matière première. Dans le secteur des produits pétroliers, par exemple, le prix des produits pétrochimiques et des plastiques baisse en parallèle avec celui du pétrole, quoique pas aussi rapidement, mais cela a néanmoins un effet positif sur les fabricants qui utilisent ces matières premières.
Dans l'ensemble toutefois, il ne faut pas exagérer l'incidence de la baisse des prix du pétrole sur les coûts de l'énergie. Ces coûts représentent 0,3 % des coûts totaux de d'exploitation des fabricants. L'incidence est donc minime. L'avantage le plus important sera au chapitre de l'amélioration du pouvoir d'achat. Pas celui des consommateurs canadiens, car ils devront dépenser beaucoup plus s'ils vont aux États-Unis ou pour acheter des produits importés, mais bien celui des consommateurs américains. En effet, le principal avantage réside dans la faiblesse de notre dollar et une plus forte reprise économique aux États-Unis.
En terminant, je dirai qu'il ne faut pas tenir pour acquis la baisse du prix du pétrole, la reprise économique aux États-Unis et la faiblesse de notre dollar. Personne ne sera concurrentiel à moins de continuer d'investir dans la nouvelle technologie, les nouveaux produits et de meilleures compétences. La concurrence est féroce, et la valeur des devises chute également ailleurs dans le monde, alors rien n'est gagné d'avance pour les manufacturiers canadiens.
:
Merci beaucoup, monsieur le président, et bonjour à tous.
L'Association canadienne des constructeurs de véhicules s'attend à ce que la baisse des prix du pétrole ait un effet mixte sur le secteur automobile au chapitre des achats des consommateurs et des activités manufacturières. Si vous deviez retenir quatre points au sujet de mon exposé d'aujourd'hui, ce serait les suivants:
Premièrement, les constructeurs automobiles envisagent le long terme pour prendre des décisions d'investissement et pour conclure des contrats avec des fournisseurs et des services de transport.
Deuxièmement, le prix du pétrole peut avoir une incidence sur les constructeurs automobiles au chapitre des ventes de véhicules et de la production.
Troisièmement, les répercussions de la baisse du prix du pétrole sont variées, pas immédiates, et la réaction du marché au chapitre de la demande pour certains types de véhicules peut avoir un effet négatif sur la production, selon les types de véhicules construits dans nos usines.
Quatrièmement, il peut être trompeur de laisser entendre que la faiblesse du dollar canadien nous rendra plus concurrentiels. Il ne s'agit pas nécessairement d'un facteur qui influence l'attitude d'une entreprise en matière de compétitivité.
Avant la baisse des prix du pétrole, le Canada avait connu deux années records consécutives au chapitre des ventes de véhicules neufs, et les prévisions pour 2015 permettent d'envisager une autre année record, avec une hausse des ventes de véhicules neufs de l'ordre de 2 a 4 %. Depuis la baisse des prix du pétrole, les ventes globales de véhicules neufs continuent d'augmenter de 2 à 3 % par rapport à l'an dernier.
Nous commençons toutefois à constater des différences régionales dans les ventes. Par exemple, en Alberta, les ventes de véhicules neufs ont diminué en janvier 2015 par rapport à l'année précédente, alors qu'elles continuent d'augmenter ailleurs au pays. Jusqu'à présent, la baisse des prix du pétrole a fait augmenter les ventes de camionnettes et de véhicules multisegments en Amérique du Nord, alors que la demande a légèrement diminué pour certains segments de voitures. Nous croyons donc que la baisse des prix du pétrole et la faiblesse du dollar canadien vont entraîner une légère diminution de la production de certains modèles de voitures au Canada.
Comme je l'ai dit, les décisions d'investissement sont prises en fonction du long terme, et même si la baisse de la valeur du dollar canadien et des prix de l'énergie devrait être bénéfique pour certains intrants, il faudra continuer de mesurer le coût relatif de fabrication au Canada par rapport au coût relatif de fabrication dans d'autres pays qui bénéficieront eux aussi d'une baisse des prix de l'énergie et de la valeur de leur devise nationale.
En théorie, les usines de fabrication de véhicules devraient bénéficier à court terme de la baisse récente des prix du pétrole tant sur le plan du coût des opérations que de celui du transport. C'est conditionnel au fait que toute baisse du prix du pétrole est transférée au fabricant ou au consommateur sous la forme d'une réduction du prix de l'énergie. Cette réduction des coûts n'est pas immédiate, pas plus qu'elle n'est absolue.
Lorsqu'on examine la compétitivité à plus long terme et les facteurs qui pèsent dans les décisions d'investissement, on constate que les variations des prix du pétrole et des devises représentent des incidences à court terme et qu'elles ne constituent probablement pas des facteurs essentiels dans le processus décisionnel des fabricants, pas plus qu'elles ne garantissent une compétitivité accrue.
En ce qui concerne les constructeurs de véhicules, la baisse du prix du pétrole met en lumière l'importance accrue des exportations et des investissements non liés à l'énergie afin d'appuyer l'économie canadienne, et par conséquent l'importance encore plus grande d'avoir la bonne combinaison de politiques afin d'appuyer la compétitivité de l'industrie de la construction de véhicules et le secteur manufacturier dans son ensemble.
Les exportations du secteur automobile canadien s'élèvent à environ 64 milliards de dollars par année. Environ 85 % des véhicules que nous construisons au Canada sont exportés aux États-Unis. On prévoit que les économies accrues dues à la baisse des prix du pétrole permettront d'accroître le revenu disponible des particuliers dans ce pays et que cela aura un effet positif sur l'économie américaine, et par conséquent sur la demande pour les produits que nous exportons là-bas.
Nous ne pouvons examiner ces questions séparément. Malgré les récentes annonces d'investissements, il est impératif de continuer d'évaluer l'ensemble des facteurs qui influent sur les décisions d'investissement à plus long terme. Il demeure essentiel pour le Canada de disposer de stratégies d'appui à l'investissement qui sont concurrentielles sur le plan international afin d'assurer le réinvestissement dans l'empreinte automobile actuelle au Canada.
Pour pouvoir faire face aux changements en matière d'investissement automobile dans d'autres pays concurrents, le gouvernement devrait par exemple se pencher sur le Fonds d'innovation pour le secteur de l'automobile dans le contexte des incitatifs que des pays concurrents offrent afin d'attirer ces nouveaux investissements. Il devrait aussi se pencher sur la possibilité, pour les grandes entreprises, d'échanger des crédits d'impôts inutilisés pour la recherche scientifique et le développement expérimental contre un financement direct lorsqu'il s'agit de nouveaux projets de recherche et développement. Cela améliorerait les choses.
En terminant, monsieur le président, permettez-moi de dire que l'étude du comité sur l'impact des bas prix du pétrole sur l'économie est un exercice qui en vaut la peine. Le message que j'aimerais vous transmettre aujourd'hui est que dans le contexte hautement concurrentiel des décisions d'investissement dans le domaine automobile à l'échelle internationale, il existe des facteurs sur lesquels le gouvernement a plus d'emprise que le prix du pétrole et qui pourraient avoir une incidence positive plus importante.
Merci beaucoup, monsieur le président. Je serais heureux de répondre aux questions que pourraient avoir les membres du comité.
Comme vous le savez, l'industrie automobile est sortie très blessée des années sombres qu'étaient 2008 et 2009. Il est vrai que nous avons pris des décisions très difficiles qui se sont soldées par la perte d'environ 40 000 emplois dans l'industrie automobile. Nous avons éliminé la capacité non utilisée. Nous sommes devenus beaucoup plus productifs. Nous en sommes ressortis plus forts, oui, mais c'était très douloureux.
D'autres pays ont également passé par cette phase — et je vais parler de la relativité de ce qui se passe — et, maintenant, ils reconnaissent également la valeur de l'industrie automobile et des emplois indirects, au ratio de 9 pour 1, raison pour laquelle ils cherchent si activement à obtenir de nouveaux investissements.
Oui, nous en sommes ressortis plus forts, mais nous devrons redoubler d'efforts si nous voulons garder les mandats de production au Canada. Il n'y a plus rien de statique dans ce monde. La concurrence pour les investissements est plus féroce que jamais. Je suis un vieux de la vieille et j'ai vu plusieurs cycles économiques, mais je n'ai jamais vu de ralentissement aussi prononcé que celui de 2008 et 2009. Nous risquons de perdre davantage si nous ne redoublons pas d'efforts.
:
D'accord. Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m'appelle Jim Stanford, je suis économiste pour Unifor, la plus grande organisation syndicale du secteur privé au Canada. Nous représentons plus de 20 secteurs de l'économie canadienne à tous les niveaux de la chaîne de production à valeur ajoutée, soit des matières premières à la transformation, de la fabrication aux transports en passant par les services. La fluctuation des cours du pétrole touche chacun des secteurs que nous représentons différemment.
Vous m'excuserez si je répète ce que d'autres témoins ont dit plus tôt, et je vous invite à consulter le mémoire qu'a préparé Unifor pour ses membres afin de les informer des diverses incidences de la baisse des cours du pétrole. On peut le trouver sur notre page web, et je pense qu'il a été distribué aux membres du comité ce matin.
Il va sans dire que la chute de moitié des cours du pétrole est un choc important pour la macroéconomie canadienne. À mon avis — j'ai d'ailleurs exercé les fonctions d'économiste en énergie pendant quelques années avant de me joindre au mouvement syndical —, il est probable que les cours se stabilisent ou baissent encore davantage au moyen terme. Je ne prévois aucun changement rapide des forces mondiales qui ont amené les cours du pétrole à chuter.
Qui plus est, on ne sait toujours pas avec certitude que les cours actuels sont bas comparativement aux normes historiques. D'ailleurs, ils équivalent plus ou moins à la moyenne en dollars indexés sur 40 ans, ce qui nous porte à croire que les taux étaient élevés ces dernières années et que les cours actuels sont normaux. Je pense que toute mesure que nous prenons devrait reposer sur l'hypothèse selon laquelle les cours du pétrole demeureront stables ou baisseront encore davantage pendant un certain temps.
Comme le comité l'a entendu au cours de ses audiences, la chute des cours a divers effets économiques contradictoires. La production de pétrole ne sera pas affectée dans les premiers temps. D'ailleurs, la production canadienne continuera d'augmenter à moyen terme. Nous constatons un repli important des investissements dans les nouveaux projets d'exploration, de développement et de construction dans le secteur pétrolier. Comme ce secteur représentait 30% des dépenses en capital fixes au Canada avant la chute, c'est un problème économique majeur aux répercussions diverses pour le Canada.
L'effet sur le PIB sera discret. L'extraction continuera de s'intensifier, l'investissement diminuera et d'autres secteurs jouiront de certains avantages, comme les dépenses de consommation, les avantages propres aux secteurs énergivores, surtout le secteur des transports et, à un moindre degré, comme vient de l'affirmer M. Myers, le secteur manufacturier lui-même.
L'impact de la chute des cours du pétrole sur la demande aux États-Unis, le principal acheteur de nos exportations, est timidement positif, ce qui sera une bonne chose pour notre économie. Les manufacturières qui fournissent des intrants au secteur pétrolier et gazier essuieront quelques pertes, mais elles représentent une part relativement faible de l'ensemble des activités manufacturières au Canada.
Il va sans dire que l'avantage le plus considérable sera la baisse du dollar canadien, qui est maintenant à parité avec la devise américaine sur le plan du pouvoir d'achat.
Je souligne que la valeur actuelle du dollar n'est pas faible. Le dollar est en fait à son niveau idéal compte tenu des prix à la consommation relatifs au Canada et ailleurs.
Le faible cours du dollar comporte d'importants avantages, autant dans l'immédiat qu'à plus long terme, pour la demande nette de produits et de services canadiens dans tous les secteurs marchands, pas juste la manufacture mais aussi le tourisme et les services exportables.
Il aide même les secteurs du pétrole et des ressources à composer avec la situation en absorbant une partie du choc causé par la chute des cours mondiaux. Certains avantages se manifestent déjà. Par exemple, les exportations canadiennes de pièces automobiles ont augmenté de 15 % l'année dernière, signe très encourageant dans un secteur qui vient de passer par une bien rude décennie.
Mais les avantages du faible cours du dollar sont assortis de certaines réserves.
Tout d'abord, le dollar canadien n'a pas chuté sur tous les fronts. La valeur du dollar comparativement à celle de l'euro, principal concurrent dans les marchés de la fabrication, a augmenté de 15 % au cours de la dernière année. Relativement à la valeur du peso mexicain — le Mexique étant bien entendu notre source la plus importante de produits automobiles —, celle du dollar n'a pas changé. Notre devise s'est appréciée comparativement au yen japonais dans la dernière année.
Bien que le faible cours du dollar soit avantageux, ce n'est clairement pas une panacée pour tous les problèmes du secteur de la fabrication. En partie à cause de la perte importante de capacité que nous avons subie dans la dernière décennie, il est difficile pour le secteur de tirer profit des avantages découlant de la faiblesse du dollar.
Ensuite, les sociétés ne savent pas combien de temps la valeur du dollar restera basse. Je pense qu'il est important dans ce dossier que le gouvernement et la Banque du Canada affirment qu'à leur avis, à long terme, la valeur du dollar ne devrait pas dépasser de beaucoup la parité de pouvoir d'achat; autrement, cela viendrait mitiger l'impact positif de la faiblesse du dollar sur les investissements.
J'insiste sur la nécessité pressante d'adopter des stratégies économiques solides, permanentes et proactives pour venir en aide aux secteurs stratégiques comme l'automobile, l'aérospatiale et le matériel de télécommunications et aussi aux services exportables comme les médias numériques, où travaillent beaucoup de membres d'Unifor. Cela devrait faire partie du plan d'intervention.
Je pense que la difficulté la plus épineuse causée par la chute des cours du pétrole pour la macroéconomie canadienne sera les retombées de la réduction des investissements dans le pétrole; en réponse à ce problème, le gouvernement doit favoriser dynamiquement l'accroissement des investissements, autant privés que publics, dans d'autres secteurs économiques. Par « public », je veux parler de dépenses en infrastructures. Par « privé », je parle des partenariats avec l'industrie en vue de stimuler les investissements dans les secteurs clés comme ceux dont j'ai parlé.
Je m'en tiendrais à cela, monsieur le président, et il me fera plaisir de répondre aux questions des membres du comité. Merci beaucoup.
:
Oui. Il y aura à la fois des effets positifs et des effets négatifs sur le PIB global et le niveau d'emploi global au sein de l'économie canadienne, selon le secteur ou la région du pays.
Les répercussions négatives de la baisse du prix du pétrole sur l'emploi se feront surtout sentir dans les secteurs de l'exploration pétrolière, de l'exploitation pétrolière et de la construction. C'est dans ces secteurs qu'il y aura des pertes d'emploi immédiates, non seulement en Alberta, mais aussi dans d'autres régions productrices de pétrole, car les entreprises réduiront de façon draconienne les nouvelles dépenses dans l'exploration et l'exploitation ainsi que les investissements.
Par ailleurs, la baisse du prix du pétrole aura des répercussions positives sur d'autres secteurs qui profitent de la diminution du prix du pétrole, de l'augmentation des dépenses des consommateurs, de la faiblesse du dollar et de l'augmentation de la demande de notre partenaire commercial, les États-Unis. Puisque ces avantages seront répartis à plus grande échelle que les désavantages qui touchent le secteur de l'exploration pétrolière, ils risquent de passer inaperçus. Cela dit, sur une base nette, je m'attends à ce que la baisse du prix du pétrole ait très peu de répercussions sur la situation de l'emploi dans l'ensemble.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie tous nos témoins d'être ici.
Monsieur Mendes, au cours des 10 dernières années, la valeur du dollar canadien par rapport à la devise américaine a beaucoup suivi les différents prix du baril de pétrole sur les marchés mondiaux. Il est très intéressant de voir qu'il avait atteint un sommet le 7 novembre 2007, soit 1,10 $; il était très élevé. En 2009, à la suite de la chute spectaculaire des prix du pétrole et en raison de la crise qui avait cours, le dollar canadien était descendu à 76 ¢ par rapport au dollar américain, pour ensuite remonter en suivant passablement la remontée des prix du baril de pétrole.
Selon vous, cette fluctuation du taux du dollar canadien par rapport à la devise américaine est-elle liée à la force de la devise américaine ou aux prix mondiaux du baril de pétrole? Ces deux facteurs ont-ils un effet à peu près équivalents sur la devise canadienne?
:
Bien entendu, je pense qu'il s'agit désormais d'une préoccupation importante. La crainte, selon moi légitime, que la valeur du dollar remonte en flèche si jamais le prix du pétrole devait augmenter, limite en effet les répercussions positives de la faiblesse actuelle du dollar sur les décisions en matière d'investissement.
Cela dit, je suis en désaccord avec M. Mendes sur certains points.
Tout d'abord, je suis en désaccord avec lui en ce qui concerne le mécanisme de transmission des prix qui relie le prix du pétrole à la valeur du dollar canadien. Pourquoi ces deux variables vont-elles de pair? Ce n'est pas parce que les étrangers ont besoin d'acheter des dollars canadiens pour acheter notre pétrole.
Comme vous l'avez constaté, y compris en consultant les recherches menées par la Banque du Canada elle-même, la demande nette de produits fabriqués au Canada, que ce soit dans le secteur de l'énergie ou dans d'autres secteurs, a diminué pendant le boom pétrolier, et nous sommes passés d'un excédent commercial à un déficit courant considérable et chronique. Si on tient compte de tout ce que le Canada fabrique, les étrangers ont acheté moins de produits fabriqués ici, même lorsque le prix du pétrole était élevé. Cela veut donc dire que la demande relative à notre dollar, qui découle de l'achat de nos produits, n'est pas attribuable au prix du pétrole.
Je pense que le mécanisme de transmission des prix est plutôt lié aux actifs financiers et à la demande d'actifs canadiens liés au secteur de l'énergie de la part des investisseurs étrangers lorsque le prix du pétrole et d'autres produits est élevé. Grâce au mouvement des investissements de portefeuille et des investissements directs, ce mécanisme a fait augmenter la valeur du dollar, même si le rendement net de nos exportations s'est grandement détérioré.
À mon avis, la Banque du Canada et le gouvernement du Canada peuvent tous deux jouer un rôle et contribuer à rompre ce lien, car notre dollar est considéré comme une pétromonnaie, même si le Canada n'est pas, de façon générale, une pétroéconomie. Selon la façon dont on mesure le tout, l'extraction pétrolière ne représente peut-être que 5 % de notre PIB.
Je crois que la Banque du Canada, qui a décidé de ne pas intervenir sur le marché des changes, doit revoir sa position. D'autres banques centrales ailleurs dans le monde sont intervenues de façon plutôt efficace. De toute évidence, la Banque du Canada a la capacité d'intervenir lorsqu'il y a surévaluation. En fait, sa capacité d'intervention est illimitée; elle peut même intervenir indirectement, en publiant des énoncés de position. Je constate que le gouverneur Poloz et d'autres personnes ont indiqué qu'il n'est peut-être plus approprié de se chercher presque exclusivement à ramener l'inflation au taux cible. Nous avons appris à nos dépens que la Banque du Canada doit également surveiller de près d'autres aspects, y compris le dollar.
Le gouvernement fédéral pourrait également jouer un rôle en réglementant l'afflux de capitaux étrangers qui découle du prix très élevé du pétrole, plus particulièrement en mettant en place un mécanisme plus strict d'examen des investissements étrangers directs dans le secteur pétrolier lorsque le prix du pétrole augmente en flèche. Je pense qu'il s'agissait d'un aspect essentiel du mécanisme de transmission des prix menant à un cours élevé du dollar.
Quoi qu'il en soit, c'est un plaisir de vous voir, monsieur Stanford. Nous avons entendu de nombreux témoignages, et je dois dire que je suis tout à fait d'accord avec votre excellente déclaration liminaire. Bien qu'il existe divers points de vue, je suis d'accord avec presque tout ce que vous avez dit. Cela m'apparaît encourageant, car il faut miser sur la coopération, comme le montrent plusieurs témoignages dont celui-ci, et comme le désirent le gouvernement et les gens de tous les côtés. Il est révolu le temps où l'on dressait les groupes les uns contre les autres.
L'un des témoins a mentionné — je crois que c'était vous, monsieur Myers — que les universités et les collèges doivent travailler de concert avec l'industrie. Peut-être suis-je trop optimiste, mais c'est ce qui se produira au Canada, selon moi. C'est ce que désirent un nombre croissant de gens. Je vous félicite pour votre témoignage.
J'aimerais lancer une petite pique, Jim, si vous me le permettez. À mon avis, l'une des principales erreurs que nous avons commises dans le secteur automobile dans les années 1980 et 1990 c'est que, pendant que le dollar était bas, nous avons fait pression sur les constructeurs automobiles et exigé des taux plus élevés. J'espère que le syndicat en est conscient. D'après votre témoignage, vous reconnaissez le rôle important que joue la faiblesse du dollar et l'avantage dont nous bénéficions. J'espère que nous ne gaspillerons pas ces chances comme nous l'avons fait la dernière fois. Vos propos m'apparaissent encourageants.
J'aimerais aussi revenir, monsieur Walker, sur la possibilité de réexaminer le prix du pétrole, comme vous l'avez mentionné. Je dois dire que cela a déjà été fait à plusieurs reprises; j'aimerais aussi rappeler l'existence du Bureau de la concurrence. Quand ce sujet a été examiné en comité, tous les côtés étaient représentés. Je sais que, dans chaque cas, les membres des comités ont semblé satisfaits des explications.
Jayson, je suis aussi heureux que vous ayez souligné qu'ils utiliseraient cet argent pour faire des investissements. Il faut rappeler que cette décision relève des entreprises. Je doute que nous voulions en arriver à un point où les gouvernements dicteraient leur comportement aux entreprises. La coopération est essentielle.
Voilà pour mon petit discours. C'est tout ce que j'avais à dire. Je constate qu'il existe un certain consensus.
Jayson — et peut-être vous aussi, Mark — peut-être pourriez-vous nous parler de ce qui s'est produit dans le secteur automobile et des effets positifs que cela a eus sur... Je me souviens qu'en 2006, certains disaient qu'il fallait établir un pont, viser l'harmonisation, qu'on avait besoin de tout ce que vous mentionnez. Pourriez-vous nous dire comment tout cela a renforcé notre position dans le secteur automobile? Je vous laisse décider qui répondra en premier.
:
Je peux commencer, Jayson.
Si toutes ces choses ne s'étaient pas produites et n'avaient pas continué, je suis convaincu que les récents investissements n'auraient jamais eu lieu. C'est très clair.
J'ai déjà mentionné qu'il fallait améliorer notre performance. Il faut utiliser les moyens à notre disposition, certes, mais sans oublier que d'autres administrations offrent des mesures incitatives vraiment impressionnantes. Je ne pense pas que nous ayons les moyens d'investir des sommes comparables, mais nous devons être conscients de ce phénomène et nous efforcer de créer les meilleures mesures incitatives possible.
Les excellentes nouvelles que nous avons reçues au cours des trois derniers mois ne se reproduiront peut-être pas pendant les trois prochaines années, mais nous sommes maintenant dans un autre cycle d'investissement. La réglementation aura une incidence importante, qu'elle porte sur les gaz à effet de serre ou d'autres sujets. Le monde des véhicules à moteur connaîtra probablement les progrès technologiques les plus marqués de toute notre histoire. Comme Jay l'a mentionné, ces progrès ont une incidence sur notre capacité de produire ces véhicules et sur la technologie utilisée dans les usines. La production automobile sera profondément transformée.
Comme je l'ai déjà dit, il est absolument essentiel de pouvoir maintenir nos efforts tout en regardant, entre autres choses, si le fonds d'investissement pour le secteur automobile sera permanent, car nous avons besoin de certitude au chapitre des investissements à long terme. Il faut examiner le crédit d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental, voir comment tirer le meilleur parti possible des crédits non utilisés, et revoir les déductions pour amortissement accéléré. Tous ces éléments sont utiles et nécessaires non seulement à l'industrie automobile, mais à l'ensemble du secteur manufacturier.
Notre pouvoir de production a beaucoup augmenté depuis la fin de la récession. Nous fonctionnons actuellement à plein régime. Pour aller de l'avant, il faudra regarder tous ces autres éléments.
:
Je me concentrerai sur trois points importants.
Premièrement, il faut obtenir de nouveaux investissements destinés au montage, car c'est le fondement de la chaîne d'approvisionnement automobile. Comme une grande partie du montage a été transférée au Mexique et dans les États du Sud, le Canada a perdu de fortes possibilités de croissance. Un nouvel investissement est donc essentiel.
Deuxièmement, l'industrie automobile connaît des changements technologiques importants en raison des exigences réglementaires concernant les émissions de gaz à effet de serre, la conduite, l'allégement des véhicules, les véhicules intelligents et ainsi de suite. Il faut voir notamment à ce que l'industrie des pièces d'automobiles s'adapte à cette évolution technologique. Les investissements destinés à la recherche, au développement et aux nouvelles technologies sont donc d'une importance capitale.
Troisièmement, de toute évidence, l'industrie canadienne des pièces d'automobiles et du montage évolue dans un contexte international. Le commerce est extrêmement important, tout comme la coopération en matière de réglementation et les recours commerciaux permettant de faire respecter efficacement les règles et les ententes commerciales, sans oublier la nouvelle possibilité.
:
Je remercie tous les témoins qui sont avec nous aujourd'hui.
J'aimerais d'abord souligner que l'un des principaux défis de tout gouvernement, c'est de savoir réagir aux événements. La chute du prix du pétrole à l'échelle mondiale figure, bien entendu, parmi les événements imprévus.
Dans un premier temps, j'aimerais demander à M. Myers dans quelle mesure le bilan économique de notre gouvernement a tempéré les effets de la baisse imprévue du cours du pétrole. Rappelons qu'à notre arrivée au pouvoir, nous avons grandement réduit la dette du Canada et que le Canada sera le premier pays du G7 à équilibrer son budget. De plus, nous avons créé 1,2 million d'emplois depuis le creux de la récession, et notre ratio dette-PIB net est le plus bas du G7.
Quelle est l'importance de ces facteurs en regard de la situation actuelle? Ont-ils permis de limiter les répercussions négatives qu'auraient pu avoir les faibles prix du pétrole?
Dans la mesure où nos plans fiscaux et nos stratégies économiques étaient fondés sur l'hypothèse voulant que le prix du pétrole était élevé et continuait d'aller dans ce sens, que nous deviendrions une superpuissance énergétique et que ce secteur ferait progresser l'ensemble de notre économie, je crois qu'il s'agissait d'une erreur. Maintenant, en réalité, il y a bien sûr beaucoup d'autres choses qui ont été faites, donc, comme pays, nous n'avons jamais mis tous nos oeufs dans le même panier et misé uniquement sur le secteur pétrolier, et ce n'est pas non plus ce que nous aurions dû faire.
Je pense que dans nos propos, et même, dans une certaine mesure, dans notre politique, nous mettons beaucoup trop l'accent sur un secteur et nous sous-estimons l'importance de diversifier notre économie et d'optimiser les liens avec ce secteur des ressources naturelles, qui ont une valeur ajoutée. Nous avons gaspillé des occasions très importantes, car nous ne nous sommes pas servi de la croissance dans le secteur des ressources pour augmenter la demande en ce qui concerne les produits fabriqués au Canada, les services canadiens et d'autres intrants, de manière à obtenir de meilleurs résultats.
Un bon exemple est le traitement que nous avons réservé à l'industrie du raffinage du pétrole. Le graphique qui figure dans les documents que vous avez reçus indique que la véritable part du PIB attribuable au raffinage a diminué de plus de 10 % depuis 2002. En fait, nous devrions d'abord nous efforcer d'accroître la valeur ajoutée de notre ressource, au lieu de simplement croire qu'à elle seule, l'extraction sauvera la situation.
:
Merci, monsieur Stanford.
J'ai du temps pour une question et je veux ajouter un commentaire à ce que M. Myers a dit.
Tout d'abord, j'ai pensé que votre argument selon lequel une baisse du prix du pétrole se traduira par une très petite réduction des coûts énergétiques était fort intéressant et je voulais le souligner.
Ensuite, dans votre exposé, vous avez dit:
La dépréciation rapide du dollar canadien a entraîné une augmentation du coût du matériel, des pièces et de l’équipement importés pour les fabricants canadiens. [...] de nombreuses entreprises doivent assumer à court terme le coût plus élevé des intrants sans toutefois bénéficier de recettes compensatoires.
Je voulais que vous développiez cette idée et, peut-être, que vous nous disiez si les entreprises et le secteur manufacturier canadiens en ont profité, lorsque le dollar était presque à parité, pour moderniser leur équipement. Vous avez parlé d'investir dans le perfectionnement professionnel, l'équipement et de nouveaux produits. Les entreprises ont-elles investi dans du nouvel équipement? Vous pourriez peut-être ensuite enchaîner avec un problème plus général, dont nous entendons beaucoup parler, à savoir le fait que les entreprises sont assises sur un magot, pour utiliser une expression familière.
Pourriez-vous en parler?
:
Je pense que cela s'explique par les répercussions sur les liquidités. À l'heure actuelle, à court terme, les entreprises qui doivent assumer des coûts élevés pour les stocks et les matériaux et qui ne peuvent pas tirer profit de la baisse du dollar dans l'immédiat voient leurs liquidités et leur encaisse d'exploitation diminuer. À la longue, elles peuvent s'en tirer parce qu'en vendant leurs produits alors que le dollar est faible, elles engrangent plus de dollars canadiens. Il y a donc un effet compensatoire.
Il est très difficile pour n'importe quelle entreprise — et pour l'État — de faire des prévisions sur les prix ou les monnaies. C'est une profession lugubre. Je me rappelle, il y a quelques années, que certains économistes — je ne veux pas dire « certains d'entre nous » — avaient prédit que le prix du pétrole atteindrait 200 $ le baril. C'est très difficile pour n'importe qui... surtout lorsque des contrats à long terme sont conclus. La volatilité des prix et des monnaies a une incidence réelle, habituellement négative, sur les liquidités, jusqu'à ce que des correctifs puissent être apportés.
En réponse à votre commentaire principal, nous entendons beaucoup parler d'entreprises qui sont assises sur un magot et, en fait, ces sommes figurent dans leurs bilans. C'est comme de dire que vous avez plus d'argent dans votre REER. Vous n'allez pas, ni ne devriez, nécessairement dépenser cet argent tout de suite.
Ce qui détermine les investissements, c'est l'encaisse liée à l'exploitation, qui correspond habituellement aux bénéfices après impôts plus amortissements. C'est la raison pour laquelle la déduction pour amortissement accéléré est si importante; elle détermine les liquidités qui déterminent les investissements. À l'heure actuelle, et, en réalité, depuis 2011, nous voyons les fabricants faire des investissements record dans la machinerie et l'équipement, habituellement dans de nouvelles technologies productives. Ces investissements résultent en grande partie de la disposition sur l'amortissement accéléré en vigueur depuis 2007.
L'encaisse d'exploitation détermine les investissements. Donc, toute variation des prix et de la valeur des monnaies contribue aussi à l'instabilité de ces liquidités. Je pense qu'il est très important de continuer à encourager l'utilisation productive et l'investissement productif de cet argent plutôt que la simple distribution des dividendes.
:
Je déclare la séance ouverte.
Nous poursuivons notre étude sur l'impact des bas prix du pétrole sur l'économie canadienne.
Chers collègues, je crois comprendre qu'il y aura un vote à la Chambre dans une heure. Je ne sais donc pas exactement comment nous allons procéder. Nous ferons tout ce que nous pourrons faire avant le vote et nous verrons après si nous pourrons revenir.
Tout d'abord, nous accueillons le président de l'Association des fabricants de pièces d'automobile, M. Flavio Volpe. Bienvenue.
Du Congrès du travail du Canada, nous accueillons l'économiste principale, Mme Angella MacEwen. Nous sommes heureux de vous revoir.
Nous accueillons la vice-présidente exécutive de l'Association des produits forestiers du Canada, Mme Catherine Cobden. Heureux de vous revoir au comité.
Nous accueillons le président de l'Association canadienne des producteurs d'acier, M. Ron Watkins. Bienvenue.
Nous accueillons, de Fort McMurray, la mairesse de la municipalité régionale de Wood Buffalo, Mme Melissa Blake.
Melissa, m'entendez-vous bien?
:
Bonjour, monsieur le président et honorables membres du comité. Je suis heureux d'être des vôtres aujourd'hui. J'aimerais vous remercier de l'occasion que vous me donnez de vous faire part de notre point de vue sur l'effet de la fluctuation du prix du pétrole et des taux de change qui en découlent sur le secteur de la fabrication de pièces d'automobile.
Pour commencer, j'aimerais vous présenter l'Association des fabricants de pièces d'automobile. L'AFPA est l'association nationale du Canada qui représente les fabricants de pièces, d'équipement, d'outils et de fournitures et les fournisseurs de services pour l'industrie automobile dans le monde. L'association a été fondée en 1952 et ses membres représentent 90 % de la production indépendante de pièces au Canada. En 2013, les expéditions de pièces d'automobile ont dépassé 25 milliards de dollars et cette industrie employait plus de 80 000 personnes.
On a fait grand cas du déclin appréciable de la valeur au comptant du pétrole ces derniers mois et de l'effet de ce déclin sur la valeur de la monnaie canadienne, surtout par comparaison au dollar américain. Même si cela désavantage ceux qui importent des produits finis américains, on s'entend généralement pour dire que les exportateurs canadiens sont avantagés à court terme. Le secteur de l'automobile est le plus gros exportateur du secteur manufacturier canadien et le sous-secteur de la fabrication de pièces d'automobile est celui qui crée le plus d'emplois et est le plus diversifié. Au Canada, quelque 500 entreprises indépendantes fabriquent des pièces pour des usines de montage d'équipementiers ici et à l'étranger.
Les fabricants de pièces doivent composer avec la gestion et la manipulation du risque de change et exportent, il va sans dire, des produits finis. Nous sommes ici aujourd'hui pour contribuer à l'analyse de votre comité parce que nous croyons que les avantages découlant du taux de change Canada-États-Unis actuel ne sont ni permanents ni structurels dans le secteur de la fabrication de pièces d'automobile. De plus, dans une optique de planification à long terme, plus les perspectives quant à la valeur de la monnaie demeureront longtemps pessimistes plus les modélisateurs prévisionnels des équipementiers risquent de planifier de manière à profiter de l'avantage qu'il y a à acheter au Canada sans tenir compte de la montée parallèle des coûts des intrants en dollars américains.
La plupart des fabricants de pièces ont des marges bénéficiaires avant intérêts, impôts et amortissements allant de 8 % à 12 % et des marges brutes de 15 % à 20 %. Les principaux intrants d'une usine nord-américaine typique de fabrication lourde ou d'un fournisseur de systèmes seraient des matériaux bruts comme l'acier ou la résine, les composants provenant de sous-traitants, la main-d'oeuvre directe et les frais généraux.
Bien que le pourcentage du coût des ventes que représentent les matériaux bruts et les sous-traitants puisse varier selon la nature du produit fabriqué, on peut dire en général qu'il est probablement de 50 %. Pour la plupart des fournisseurs, la monnaie sous-jacente aux coûts des principaux intrants est essentiellement le dollar américain. Si la chute du prix du pétrole réduit le coût de certaines résines non spécialisées sur le marché, le coût des résines complexes utilisées dans les applications à valeur ajoutée est relativement peu touché.
Pour un fournisseur canadien en activité au Canada, la main-d'oeuvre directe, bien entendu, est libellée en monnaie canadienne. Dans le secteur des pièces automobiles, cela représente environ 10 % du coût des ventes, ce qui est relativement peu par comparaison à ce qu'il en est pour les matériaux bruts et ce qui, je précise, représente un plus petit pourcentage des coûts que ce qu'il en est pour les monteurs d'ensemble.
Les frais généraux des usines sont en monnaie canadienne et en devises. Les coûts assumés en monnaie canadienne sont l'électricité, la main-d'oeuvre indirecte et les services locaux. Toutefois, le coût de presque toutes les machines lourdes et spécialisées et de l'équipement auxiliaire est fondé sur le dollar américain ou l'euro. Ces coûts représentent habituellement 15 % à 20 % du coût des ventes, dont environ la moitié est en monnaie canadienne.
Si nous considérons qu'il s'agit là de la ventilation typique des coûts pour un fournisseur de pièces d'automobile au volume, un fournisseur aurait un contenu en dollars américains représentant 50 % à 65 % du coût des ventes. En ce qui concerne les bénéfices, la monnaie de transaction diffère en général d'un équipementier à l'autre, mais, pour la plupart des fabricants, la majeure partie du pourcentage du chiffre d'affaires est en dollars américains. Toutefois, durant la période récente de surévaluation de la monnaie canadienne, soit les cinq à dix dernières années, on a vu un nombre croissant d'équipementiers commencer à fixer les prix directement en dollars canadiens au moment du sourçage. Ces usines ne bénéficient pas du tout de la dévaluation du dollar canadien.
Même si les programmes dont le prix est fixé en dollars américains sont avantagés à court et moyen terme, une partie des gains diminuerait au moment de la planification de gestion et de l'indexation des prix d'achat de leurs clients. Un grand nombre de fournisseurs qui ont plusieurs établissements et clients ont adopté des programmes de couverture pour réduire leurs risques, mais il est difficile de prévoir si ces mécanismes fonctionneront, car les flux de trésorerie générés par n'importe quel programme de produits sont basés sur des estimations de volumes futurs. L'expérience montre qu'ils fluctuent de façon appréciable.
Je vous épargne le reste sur le risque multijuridictionnel. Je dirai seulement qu'un grand nombre de compagnies canadiennes ont des usines aux États-Unis et exploitent des usines au Mexique.
Leurs usines canadiennes s'en tirent mieux que leurs usines américaines, mais, bien entendu, comme nous sommes en concurrence avec des usines mexicaines, je dois dire que le dollar canadien et le peso ont évolué au même rythme et il y a beaucoup d'autres dynamiques qui entrent en jeu. Le change n'en est pas un.
:
J'aimerais remercier le comité d'entreprendre cette étude. Nous pensons qu'elle est très importante. Merci d'avoir invité le Congrès du travail du Canada.
Je suis ici au nom des 3,3 millions de membres du Congrès du travail du Canada. Nous regroupons des travailleurs de presque tous les secteurs de l'économie canadienne, dans toutes les professions et toutes les régions du Canada. C'est de ce point de vue que je vais parler.
Le CTC estime depuis longtemps que le Canada dépend trop des exportations de ressources non transformées ou semi-transformées, ce qui a un effet négatif sur la productivité. Nous avons entendu Jim Stanford, plus tôt, parler de la nécessité de faire le lien entre ce que nous tirons du sol et ce que nous vendons.
Comme conséquence de la mondialisation et d'accords commerciaux défavorables, d'un dollar élevé et d'une récession dévastatrice, le secteur manufacturier en Ontario, plus particulièrement, a subi des pertes dévastatrices au cours de la dernière décennie.
Au sortir de la récession, les investissements des entreprises du secteur manufacturier et d'autres secteurs ont beaucoup tardé à rebondir. Le Rapport sur la politique monétaire d'octobre 2014 de la Banque du Canada laisse penser que ce retard est attribuable à une perte semi-permanente de capacité dans plusieurs secteurs exportateurs du secteur manufacturier et que nous ne devrions pas nous attendre à voir une amélioration des investissements et de l'embauche dans les entreprises avant qu'il soit clair que l'économie canadienne est plus solide.
C'était avant l'effondrement du prix du pétrole. Habituellement, dans le secteur manufacturier, lorsqu'il y a effondrement du prix du pétrole, le dollar baisse et c'est mieux pour les exportations, mais la situation actuelle indique que nous n'avons pas nécessairement la capacité de faire en sorte que les secteurs exportateurs et manufacturiers reprennent du poil de la bête et fassent progresser l'économie. Dans ce contexte, le Congrès du travail du Canada est d'avis que le faible prix du pétrole aura un impact négatif net sur l'économie canadienne puisque le dollar ne sera pas assez fort pour encourager les entreprises à faire de nouveaux investissements.
Nous avons aussi signalé plusieurs fois que les allégements fiscaux consentis aux entreprises n'ont pas encouragé les entreprises à faire de nouveaux investissements. Si nous regardons les données sur le PIB pour le quatrième trimestre de 2014, il est clair qu'il y avait des faiblesses dans l'économie, avant même que les répercussions du prix du pétrole se fassent pleinement sentir. Ces faiblesses comprennent la dépendance soutenue à l'égard des dépenses à la consommation pour stimuler la croissance économique. Durant ce trimestre, elles ont progressé de 2 % en pourcentage annualisé. Durant ce trimestre, nous avons vu une diminution des investissements dans la machinerie et l'équipement, une chute des exportations de produits à 0,5 % sur une base annualisée et une croissance tributaire d'une accumulation des stocks.
Une des répercussions de la chute du prix du pétrole à laquelle nous pouvions nous attendre est la réduction des investissements par les entreprises du secteur privé et les organismes du secteur public, comme la province de l'Alberta et d'autres provinces pétrolières durement touchées. Nous voyons une contraction de la production potentielle, qui mènera à une augmentation du chômage.
Pour compenser ce manque d'investissements dans l'économie canadienne et pour réagir aux autres répercussions négatives qu'aura la chute du prix du pétrole sur l'économie canadienne, le Congrès du travail du Canada réclame un grand programme d'investissements publics pour créer de bons emplois, pour promouvoir nos objectifs environnementaux, pour encourager de nouveaux investissements du secteur privé et pour augmenter la productivité globale.
En octobre 2014, le Fonds monétaire international a laissé entendre que le moment était propice, pour le Canada, pour faire des investissements dont il a grand besoin dans les infrastructures. J'ai déjà parlé de ces investissements lors d'un témoignage au comité. Les besoins en infrastructure clairement définis pourraient être financés par emprunt sans augmenter nos ratios de la dette au PIB puisque les types d'investissements publics dans les infrastructures que nous demandons augmenteront la croissance à court et à long terme.
En encourageant l'investissement dans la production à valeur ajoutée dans des secteurs clés et en misant sur des initiatives de compétences et d'emplois verts, nous rehausserons l'innovation et la productivité de la main-d'oeuvre. Ces initiatives nécessiteront aussi des stratégies dynamiques de la part du gouvernement dans les domaines du commerce, du développement sectoriel et des approvisionnements au Canada. La solution pour arriver à une composition sectorielle plus souhaitable et à une augmentation de la production et de l'emploi réside dans une politique de développement sectoriel visant à promouvoir l'investissement, la production, l'emploi et les exportations dans divers secteurs économiques.
Merci.
:
Merci beaucoup. Je suis heureuse d'être ici.
Je me nomme Catherine Cobden. Je suis vice-présidente exécutive de l'Association des produits forestiers du Canada.
D'entrée de jeu, j'aimerais vous rappeler que les ressources forestières du Canada comptent parmi les plus importantes et les mieux gérées au monde. Notre présence considérable dans le secteur manufacturier se traduit en 235 000 excellents emplois qui stimulent l'économie rurale.
La récente baisse du prix du pétrole a été bénéfique pour notre industrie. Les coûts de fabrication ont diminué et le taux de change a favorisé nos échanges avec les États-Unis, notre principal marché.
Nos perspectives se sont améliorées comparativement à l'an dernier. La reprise économique fait son chemin aux États-Unis. Par exemple, le marché américain de l'habitation a franchi la barre du million, un seuil important. La relance économique est toutefois plus lente qu'on l'avait anticipé et espéré.
Nos exportations ont connu une hausse d'environ 10 % au cours de la dernière année. Nous entrevoyons également un important potentiel de croissance à long terme pour la plupart de nos produits forestiers, tels que la pâte, le bois, le papier hygiénique, les bioproduits, etc.
Je dois souligner combien la dernière décennie a été difficile. Nous avons perdu la moitié de notre marché mondial. Nul besoin de vous rappeler ce qui s'est passé. Vous connaissez tous l'histoire. Nous l'avons racontée à maintes reprises au présent comité.
Bien que les exportations augmentent graduellement — chose dont nous nous réjouissons —, il nous faut quand même regagner le terrain perdu pour occuper notre juste place à titre de fournisseur mondial et répondre à la demande croissante dans le monde. J'espère que ce sera le Canada qui satisfera à celle-ci, et non le Brésil, par exemple.
Le secteur ne cesse de se transformer et d'innover, et ce, en grande partie grâce à ses partenariats avec les gouvernements. Nous avons réorganisé nos processus et affichons maintenant les meilleurs niveaux de productivité au pays. Nous avons étendu nos marchés. Nous sommes fiers d'être les plus importants exportateurs canadiens vers la Chine. Nous avons raffermi notre position de leader en matière de rendement environnemental. D'après un sondage global récemment mené auprès de nos clients, les pratiques forestières canadiennes sont perçues comme les meilleures au monde. Le comité sait sans doute que nous avons investi dans de nouveaux produits et technologies afin de bonifier la valeur des produits forestiers offerts par le Canada.
À l'avenir, nous devons toutefois éviter de tenir quoi que ce soit pour acquis. N'oublions pas que les avantages présentés par la faiblesse des prix du pétrole ne dureront pas. Il est important de reconnaître que toutes les monnaies du globe sont en baisse par rapport au dollar américain et que certains de nos plus importants concurrents jouissent d'un taux de change beaucoup plus favorable que le nôtre. J'ai apporté un objet — que je laisserai au comité —, qui indique comment se compare au dollar canadien la monnaie de pays concurrents.
Comme il est question de croissance à l'échelle mondiale, il faut bien sûr souligner les investissements majeurs que font nos concurrents, comme le Brésil, la Finlande et la Suède. Ils se préparent à profiter de cette croissance et nous devons réagir.
Comment? Eh bien, je propose de redoubler d'efforts et de poursuivre sur notre lancée. Nous nous sommes concentrés sur la transformation et l'innovation, et avons construit un solide partenariat. Nos forces sont considérables: une bonne réputation mondiale en matière d'environnement, une qualité de fibre de premier ordre, des accords commerciaux et une expertise en innovation. Notre industrie forestière est dotée d'un système d'innovation sans pareil. Il faut miser sur ces avantages et reconnaître que nos adversaires sur la scène mondiale sont non seulement des industries, mais aussi des nations.
La baisse du dollar et du prix du pétrole ne doit pas nous rendre complaisants. Je rappelle au comité nos discussions concernant la nécessité de maintenir nos partenariats en matière d'innovation, de marchés, d'accords commerciaux et de soutien à la transformation, qui stimuleront les progrès du secteur. Nous pouvons relever les défis ensemble, afin d'exploiter notre potentiel, créer de bons emplois et prospérer.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous. Je suis heureux d'avoir l'occasion de comparaître aujourd'hui.
Mon nom est Ron Watkins. Je suis le président de l'Association canadienne des producteurs d'acier, un groupe dont les expéditions annuelles varient entre 12 et 14 milliards de dollars et qui emploie quelque 18 000 personnes au Canada. Nous exploitons des aciéries depuis l'Alberta jusqu'au Québec. Avec les autres joueurs de l'industrie de l'acier, nous formons une véritable force économique au pays.
La séance d'aujourd'hui porte sur l'impact de la chute des prix du pétrole sur le secteur manufacturier. De multiples perspectives vous ont été présentées par de nombreux spécialistes, y compris les témoins de ce matin. Je vais vous donner celle de l'industrie canadienne de l'acier.
Premièrement, pour ce qui est de l'impact potentiel sur nos coûts de production, nous entrevoyons, tout au plus, de modestes avantages nets. Nos méthodes de production reposent essentiellement sur le gaz naturel et l'électricité. Le coût de cette dernière demeure relativement élevé au Canada. Une baisse des prix du pétrole pourrait entraîner une réduction des coûts de transport, quoiqu'il faille tenir compte des frais répercutés par les expéditeurs. Cela reste à voir.
Point essentiel à retenir: sur le plan énergétique, la situation du Canada n'est pas unique. Les pays concurrents vivent eux aussi une baisse des coûts de l'énergie. Les écarts relatifs des coûts énergétiques n'ont donc pas bougé autant que les coûts absolus. Je crois que nous avons entendu des observations semblables au sujet des variations des taux de change dans le monde, et notamment en Amérique du Nord.
Deuxièmement, en ce qui a trait aux répercussions potentielles de la baisse du prix du pétrole sur nos clients, et en particulier nos clients du secteur manufacturier, une myriade de facteurs entrent en jeu dans différents secteurs, comme l'ont déjà souligné plusieurs témoins aujourd'hui. Les répercussions connexes sur les taux de change favorisent certainement les exportations, mais elles peuvent aussi faire augmenter le coût des intrants. Structurellement, l'assise manufacturière canadienne — principale cliente de notre industrie — vit depuis quelques années une érosion que ne pourront pas renverser aisément ou rapidement des variations à court terme du coût des intrants. Les usines qui ont fermé leurs portes ne seront pas rouvertes ni remplacées.
Des conditions économiques favorables à moyen terme et des politiques publiques avantageuses sont nécessaires aux investissements dans le secteur manufacturier. Voilà pourquoi nous militons depuis toujours pour des politiques profabrication dans toute une gamme de domaines de politiques. Cela inclut la prolongation à long terme de la déduction pour amortissement accéléré — nous remercions le comité de son appui à cet égard — et des taux d'imposition concurrentiels. C'est aussi pourquoi nous insistons pour de solides lois en matière de recours commerciaux, qui permettront d'assurer une concurrence loyale au sein de notre marché et de contrer les dommages causés par les importations sous-évaluées ou subventionnées, comme l'a démontré le Tribunal canadien du commerce extérieur dans de récents règlements.
Troisièmement, ce qui est très important pour nous, une baisse des dépenses en capital dans le secteur des ressources aura un impact négatif direct sur la demande de produits de l'acier. Pour nous, l'énergie représente beaucoup plus qu'un facteur de coût. En effet, le secteur de l'énergie est un important consommateur d'une grande variété de produits de l'acier, comme les matériaux de construction, les structures préfabriquées, l'équipement de forage, les usines de transformation, les installations d'entreposage et, bien entendu, les pipelines et les wagons qui servent à transporter les produits pétroliers et gaziers canadiens vers les marchés intérieurs et étrangers.
La mairesse Blake est en meilleure position que moi pour témoigner de la quantité d'acier qui transite à travers sa localité. J'ai hâte d'entendre son témoignage.
La relation entre les secteurs de l'acier et de l'énergie s'incarne dans les chaînes d'approvisionnement qui s'étendent d'un bout à l'autre du pays et qui prennent leur source dans l'extraction du minerai de fer au Québec ou dans le recyclage de l'acier provenant de sources diverses. Ces matières sont transformées en acier dans différentes provinces, pour ensuite servir à la fabrication de tuyaux, de tubes ou d'autres produits d'acier servant à l'exploration, au développement, à la transformation et au transport des ressources pétrolières et gazières.
Ce faisant, nous fournissons directement et indirectement des emplois industriels bien rémunérés à des milliers de gens. Quand le secteur de l'énergie prospère, les possibilités d'emploi abondent. L'inverse peut aussi se produire, comme nous l'avons vu récemment avec les centaines de mises à pied dans notre secteur. À cet égard, la baisse du prix du pétrole nuit directement au secteur manufacturier canadien et, partant, à ses fournisseurs.
En résumé, la baisse du prix du pétrole n'est nullement une panacée pour l'expansion du secteur manufacturier canadien. Ce n'est certainement pas le cas pour notre industrie, en raison notamment de l'impact sur la demande en provenance du secteur énergétique. Il faut tenir compte des perspectives à moyen terme relatives aux coûts énergétiques et à d'autres facteurs structurels qui orientent ultimement les décisions en matière d'investissements.
Enfin, il demeure important que des politiques gouvernementales touchant toute une gamme de facteurs contribuent à créer des conditions d'investissements qui renforceront les principales chaînes d'approvisionnement que nous servons, y compris le secteur énergétique.
En conclusion, monsieur le président, notre industrie estime qu'il faut cesser de présenter aux Canadiens cette fausse dichotomie qui oppose les secteurs énergétique et manufacturier et — pire encore — l'Ouest et l'Est du pays. Les deux secteurs s'intègrent l'un à l'autre par des chaînes d'approvisionnement qui s'étendent d'un bout à l'autre du Canada. De façon plus générale, nous continuons d'encourager le comité à se concentrer sur les politiques structurelles favorables aux investissements et à la production dans chacune des chaînes d'approvisionnement que nous servons.
Merci beaucoup, monsieur le président.
:
Bonjour et merci au président et aux membres du comité de cette invitation à présenter notre point de vue sur ce problème mondial. Mon témoignage sera sans doute bien différent de ceux entendus jusqu'à présent.
La municipalité régionale de Wood Buffalo regroupe 10 communautés réparties sur 66 000 kilomètres carrés dans le Nord-Est albertain. Nous comptons cinq Premières Nations, plusieurs résidents métis et des gens de nombreuses nationalités. Il se parle plus de 156 langues dans les foyers de notre population scolaire.
Le recensement de 2012 a dénombré une population de 77 000 personnes à laquelle s'ajoutent 39 000 travailleurs invités qui habitent sur le site de leurs projets. Originaires de toutes les régions du Canada, ils viennent travailler dans les sables bitumineux et ramènent chez eux leur chèque de paie; ils portent notre population à environ 116 000 personnes. Nous sommes scolarisés et le revenu moyen des ménages est de 190 000 $ par année. Le taux de chômage est de 3,8 % et on constate pourtant un écart salarial appréciable. L'âge moyen est de 32 ans et un peu plus de la moitié de nos citoyens ont moins de 35 ans. Au cours des cinq dernières années, notre hôpital local a vu naître de 1 100 à 1 400 bébés chaque année.
Mesdames et messieurs du comité, quand je dis que nous sommes déjà passés par là, je veux dire que nous avons déjà vu ce scénario sous diverses formes. Lorsque notre région subit un ralentissement, nous trouvons le moyen d'en profiter.
Au milieu de 2008, nous avons marqué la première pause depuis la ruée vers de nouveaux projets de développement des sables bitumineux, une dizaine d'années auparavant. Nous avons eu l'occasion de reprendre notre souffle, d'ébaucher des plans, de nous préparer pour la suite — et la suite, ce fut une reprise en accéléré.
Encore aujourd'hui, des projets d'exploitation de sables bitumineux évalués à 21 milliards de dollars sont déjà approuvés, dont 4 milliards sont engagés dans la réalisation de diverses constructions, et les projets qui font l'objet d'une demande d'exploitation représentent un autre montant de 26,5 milliards de dollars. Or, ces dépenses en capital sont faibles comparativement aux montants que les compagnies affecteront aux coûts de fonctionnement pendant la durée de vie de chacun des projets. Chaque année, cette valeur combinée augmente par rapport aux 5,3 milliards de dollars qu'elle représentait en 2012.
Et, pourtant, les gens travaillent et mènent une vie normale, vont chez le médecin, accompagnent leurs enfants à des activités sportives et culturelles, entre autres. Les gens font toujours leur marché, ils vont au restaurant et voyagent, mais ils sont peut-être plus prudents avec les gros achats, comme les voitures, camions et véhicules récréatifs.
Les affaires fluctuent et les entreprises qui dépendent de l'industrie subissent des contraintes accrues. Elles doivent faire plus avec moins. Nous avons vu quelques mises à pied, mais les entreprises continuent d'embaucher.
Le secteur sans but lucratif doit depuis longtemps faire plus avec moins, mais il subit des pressions encore plus fortes. Le recours à notre banque d'alimentation a augmenté de 75 % en janvier par rapport à janvier 2014, et les chiffres enregistrés en février sont pires. Heureusement, notre collectivité sait faire preuve de compassion et nous pourrons relever les défis.
Mon conseil a approuvé le budget de 2015 en sachant que nous n'aurions pas besoin d'augmenter les taxes. Pour assurer une gestion prudente des finances, ce qui est nécessaire en des temps d'instabilité économique, nous réexaminerons dans quatre mois nos projets d'immobilisations et nos dépenses discrétionnaires. Notre économie locale et les entrepreneurs qui y oeuvrent ont besoin de projets publics qui font l'objet d'appels d'offres. Dans des périodes comme celles-là, c'est ainsi que nous protégeons les emplois des gens. Les investissements du Canada dans l'infrastructure nous aident à poursuivre nos projets et à maintenir les emplois dans nos collectivités.
En fait, notre collectivité est encore en train de se remettre de l'augmentation de sa population, qui a plus que doublé depuis l'an 2000. Il nous reste encore du travail à accomplir à ce chapitre, tout comme il faut contenir l'inflation, remanier les attentes et améliorer l'efficacité de l'industrie. Selon mon expérience, il est très difficile de prédire le prix du pétrole, que ce soit à la hausse ou à la baisse. Sur le plan du développement communautaire, les remontées rapides peuvent se révéler encore plus difficiles à gérer que ce que nous vivons en ce moment.
Bien que nous traversions une période difficile, notre communauté demeure très confiante. Nous optons pour une vision à long terme et sommes optimistes quant à une reprise éventuelle qui viendra à nouveau modifier nos perspectives et activités économiques.
En guise de conclusion, je crois que les besoins en énergie seront toujours présents. J'estime que les sables bitumineux contribueront de façon importante à satisfaire la demande mondiale. Je sais que l'humanité doit s'adapter et innover dans un monde sans cesse en évolution et que nous devons nous serrer les coudes pour que notre chez-nous, notre collectivité, notre peuple survive, s'épanouisse et prospère — pour notre bien et celui du pays.
Nous avons vécu par le passé des périodes économiques éprouvantes et nous en sommes sortis plus forts qu'avant. Je suis convaincue que nous serons encore plus forts cette fois-ci. Croyez-moi, vous devez le voir de vos propres yeux pour le croire.
Je vous remercie de cette invitation. J'ai hâte de répondre à vos questions.
Je passe maintenant à Mme MacEwen pour un instant. Entre autres choses, ce que nous entendons ce n'est pas tant que le pétrole à 50 $ et le dollar à 80 ¢, environ, sont la nouvelle norme, mais que ces valeurs marquent beaucoup plus un retour à la normale étant donné que la moyenne sur 40 ans pour le pétrole tourne autour ce ce prix et que le huard est peut-être plus proche de sa vraie valeur sur le marché mondial. Il a pris de la valeur par rapport à d'autres monnaies et non seulement le dollar américain.
Une chose qui me préoccupe et qui a motivé en partie cette étude c'est que, par le passé, lors des chutes précédentes du prix du pétrole, le dollar a aussi chuté et le secteur manufacturier a pris du mieux, de sorte que l'impact net dans toute l'économie canadienne a peut-être été défavorable dans certaines collectivités, comme celle de Mme Blake qui a pris la parole avant. Pourtant, d'autres s'en sont mieux portées. Mais, nous entendons de certains intervenants du secteur manufacturier que ce n'est peut-être pas le cas, qu'il y a peut-être une dimension structurelle là où les emplois manufacturiers ne reviennent pas en dépit de la vigueur de l'économie américaine et de la baisse du dollar canadien. Est-ce une chose à laquelle votre syndicat a réfléchi?
Premièrement, est-ce que j'interprète bien la situation? Deuxièmement, y a-t-il un facteur structurel dans le secteur manufacturier, dans lequel nous ne voyons pas le retour des emplois à valeur ajoutée et y a-t-il quelque chose que nous pourrions faire?
:
À vrai dire, nous avons un membre de là-bas.
C'est une très bonne question et je vais juste ajouter quelques points à ce que, je pense, toutes les industries ont fait. Elle ont dû accroître la productivité et l'efficience de leurs activités. Cela a certainement été difficile pour nous. Notre secteur est très exposé au commerce international. Nous sommes en concurrence non seulement avec les États-Unis, mais aussi avec des pays d'Asie et d'Europe, sans compter la concurrence sur notre propre marché. Nous n'avons donc d'autre choix que d'améliorer notre productivité et d'être concurrentiels.
Un des changements intéressants qui s'est opéré dans notre industrie au fil du temps — je travaille pour l'association depuis huit ou neuf ans — c'est que nos niveaux d'emploi ont baissé, mais pas nos niveaux de production. Il y a donc eu accroissement de la productivité. Une des choses qui a été instructives pour nous vient de la nature transnationale de nos entreprises, dans un certain sens. Les entreprises s'adaptent aux meilleures pratiques de leurs organisations mondiales. Je peux vous dire que certaines de nos pratiques sont adoptées par des filiales d'autres pays.
Nous y travaillons beaucoup. Nous avons réalisé une grande amélioration. Il faut toujours en faire plus et la politique publique a aussi un rôle à jouer dans ce domaine, comme vous le savez. Cela reste toujours une question très importante pour nous.
Chers collègues, je vais maintenant faire le point. Il reste environ 21 minutes avant le vote. La greffière a retenu un autobus pour les membres qui doivent aller voter.
Je vais rester ici. Je me suis entendu avec M. Cullen pour un pairage. Si d'autres veulent procéder à un pairage, ils peuvent le faire, mais si vous tenez à voter, un autobus est à votre disposition.
Avant que je passe à M. Brison, puis-je obtenir une approbation du budget pour cette étude?
Des voix: D'accord.
Le président: C'est formidable. Merci.
Nous passons maintenant à M. Brison.
:
Je vais m'adresser à vous, madame Blake. Je vous remercie beaucoup de participer à notre réunion par vidéoconférence.
Je ne veux pas lancer de polémique, mais je dois dire qu'à l'époque, quand votre ancien député fédéral, Brian Jean, s'était exprimé sur le développement à la vitesse grand V des sables bitumineux, il avait parlé des problèmes liés aux infrastructures. Vous nous en avez d'ailleurs fait part. Je trouve que votre attitude positive est la bonne. Cependant, le défi est énorme, que ce soit en ce qui concerne les infrastructures routières ou celles liées aux services à la population.
M. Jean se demandait quelle décision il fallait prendre par rapport aux services hospitaliers dans votre coin de pays. Il indiquait clairement que la gestion de la production des sables bitumineux n'était pas un enjeu du palier fédéral, mais du palier provincial.
Est-ce que vous êtes d'accord sur son point de vue?
Monsieur Watkins, je suis député de Beauport—Limoilou, qui est l'une des cinq circonscriptions urbaines de la ville de Québec. Dans notre belle ville, il se tient des débats importants, entre autres sur les infrastructures. Un projet de tramway a été mis sur la glace pour un certain temps. Comme le disait Mme MacEwen, il faut envisager de soutenir un programme d'infrastructures suffisant pour relever les défis auxquels font face nos municipalités et le transport interurbain.
Étant donné le climat d'austérité actuel, peu importe les paliers de gouvernement, ce projet a été ramené à un projet de moindre ampleur et moins coûteux. Par contre, des experts protestent en disant que, au contraire, c'est le temps d'investir dans des infrastructures vraiment structurantes et plus lourdes, mais surtout beaucoup plus efficaces en termes de transport de personnes et de fluidité du trafic.
Si l'on considère l'impact que cela peut avoir sur votre secteur, devrait-on soutenir beaucoup plus activement les infrastructures à différents niveaux? Il pourrait aussi être question de transport interurbain avec un train rapide.
Je vais m'adresser à Mme Cobden pendant quelques instants.
C'est une belle réussite. Notre illustre président, M. Rajotte, et moi avons siégé au comité de l'industrie, et nous avons dû traverser cette période éprouvante. La conjoncture était vraiment difficile. Je me souviens que nous avons tous eu du mal à déterminer ce que nous devrions faire.
Je m'adresse maintenant à M. Watkins. Quelqu'un a demandé si d'autres administrations ont pris d'autres mesures pour aider le secteur forestier. Fait intéressant, la Suède a pris des mesures. Ce pays a commencé à reconnaître qu'il y a des forêts boréales partout sur la planète, et il va commencer la production dans cette industrie.
Vous avez accompli des choses merveilleuses. C'est formidable de voir cela. Encore une fois, ce fut très difficile de voir des scieries être incapables de survivre et fermer leurs portes parce qu'elles n'étaient pas efficaces, mais vous avez accompli des choses merveilleuses. Je vais vous demander à tous les deux s'il y a autre chose que l'industrie forestière... Je vais poser la question aux gens de l'industrie sidérurgique, car vous vous trouvez dans la même situation. Chose intéressante, même si de belles occasions vous ont été offertes lorsque la valeur du dollar était élevée, vous ne les avez pas saisies. Je ne vous critique pas; je veux plutôt dire que lorsque les investissements ont été faits et que vous avez eu la possibilité de faire des investissements, vous ne les avez pas faits. Je suis tout simplement curieux. Est-ce que l'industrie forestière prend certaines mesures, à part accomplir un excellent travail dans les scieries, par exemple, ou êtes-vous en train de déterminer si les Canadiens ne pourraient pas devenir des chefs de file dans certains domaines?
Monsieur Watkins, je vais vous poser la même question.
:
Tout d'abord, je dois dire que je suis très heureuse de pouvoir parler de certaines réussites, compte tenu de ce que nous avons dû surmonter au cours de la dernière décennie. C'est fantastique.
Vous avez tout à fait raison: nous sommes en train d'explorer les possibilités. Nous avons lancé l'initiative Vision2020, qui était très ambitieuse. Nous voulons ajouter 20 milliards de dollars aux 57 milliards de dollars dont nous disposons à l'heure actuelle. Pour ce faire, nous allons nous assurer d'extraire la plus grande valeur possible, de manière durable, pour fabriquer des produits qui seront utilisés partout dans le monde. Le processus est déjà en cours, et jusqu'à maintenant, nous avons marqué d'excellents progrès. Je pense par exemple au programme Investissements dans la transformation de l’industrie forestière et au Programme d'écologisation des pâtes et papiers.
Pour revenir sur ce que vous avez dit, c'est-à-dire ce que la Suède, la Finlande, le Brésil et la Russie font, ces pays se préparent déjà à saisir les nouvelles possibilités qui découleront de la croissance à venir. Nous devons donc poursuivre nos efforts.
:
Ce charbon très polluant vient d'ici. En effet, nous fournissons la grande majorité du charbon anthraciteux qui est utilisé.
J'aimerais maintenant m'adresser de nouveau à la mairesse Blake pendant quelques instants. Madame, cela m'a peut-être échappé, car j'ai dû sortir pour un appel téléphonique, mais je pense que dans votre exposé, vous avez mentionné qu'il a fallu prendre une pause. C'était pendant la crise de 2008, lorsque les activités ont été mises en veilleuse pendant un certain temps, car jusqu'à ce moment, le développement avait été extrêmement rapide et il fallait essayer de suivre le rythme.
Quelles sont les possibilités qui s'offrent à une collectivité comme la vôtre à l'heure actuelle en matière d'infrastructure, étant donné que les taux d'intérêt sont très bas et que les pressions exercées sur le bassin de main-d'oeuvre sont peut-être moins élevées, comme Mme MacEwen et d'autres personnes l'ont mentionné? Est-ce là l'occasion, pour le gouvernement fédéral, d'assumer certaines responsabilités et de travailler avec des collectivités comme la vôtre?
:
J'estime que c'est un excellent point de vue. Lorsque j'ai parlé plus tôt de l'ampleur des projets que nous avons menés, le temps mort qu'il y a eu en 2008 nous a en fait aidés à nous rattraper un peu, mais nous sommes tout de même désavantagés. Dans certains cas, des projets d'immobilisations pour lesquels des fonds ont été engagés n'ont même pas encore commencé.
Lorsqu'on examine la situation dans son ensemble afin de déterminer comment le gouvernement fédéral pourrait participer, un autre projet en particulier nous vient à l'esprit. À l'heure actuelle, nous accordons énormément d'attention à une route en particulier, la route 63, car le volume de circulation y est tel que la route ne suffit plus du tout à la demande. C'est aussi la seule route qui mène à l'extérieur de la collectivité, jusqu'aux usines d'exploitation des sables bitumineux, mais elle dessert toutes les collectivités de la région. C'est aussi par cette route qu'on transporte les modules d'acier, de même que des produits dangereux en provenance de la collectivité et à destination de celle-ci. Je suis très inquiète qu'une seule route soit utilisée à cette fin.
Lorsque nous pensons à cette industrie et aux possibilités qui s'offrent à nous, nous savons qu'une voie de contournement serait une très bonne chose pour l'industrie, mais nous savons aussi que le coût d'un tel projet est très élevé et que la municipalité ne pourrait pas l'assumer à elle seule. Nous cherchons donc à faire participer l'industrie et la province, mais il s'agit aussi d'une autre occasion, pour le gouvernement du Canada, de se dire qu'il est tout à fait logique de participer à ce projet et d'ainsi tracer la voie vers l'avenir. Je crois que ce projet nous offrira aussi des possibilités de diversification économique qui vont au-delà des sables bitumineux.
:
Les déficits ont toujours posé problème. En effet, le gouvernement actuel a enregistré des déficits successifs à l'échelle nationale, mais maintenant, selon le ministre des Finances, nous sommes en bonne voie d'équilibrer... Or, à l'échelle du Canada, nous accusons — je cherche tout simplement les chiffres — un déficit en matière d'infrastructure totalisant des dizaines de milliards de dollars, et à cause de cela, des municipalités comme la vôtre ne sont pas en mesure de régler les problèmes auxquels elles se heurtent. La Chambre de commerce de la région de Toronto ainsi que des groupes de Fort McMurray, de Vancouver, d'Halifax et d'autres villes reconnaissent que l'infrastructure, plus particulièrement en ce qui concerne la congestion... Lorsque je songe à la route 63, je ne peux que penser aux dangers qui guettent les travailleurs qui se dirigent vers le sud, vers Edmonton. Je me demande pourquoi, compte tenu de ces circonstances, le gouvernement ne voit-il pas là une occasion d'aider le Canada à passer à l'étape suivante.
Je vais maintenant m'adresser à Mme MacEwen pendant quelques instants. Il y a un lien implicite — je fais un parallèle avec le témoignage de Mme Cobden et celui de M. Watkins — entre l'augmentation de la productivité et de l'efficience au sein d'une industrie, quelle qu'elle soit, et la diminution de la participation au marché du travail. Y a-t-il un lien explicite? Je viens d'un secteur forestier du nord de la Colombie-Britannique. Nous avons vu plusieurs scieries annoncer presque en même temps des investissements très importants — de 10, 20 ou 30 millions de dollars —, pour ensuite apprendre quelques semaines plus tard que des employés seraient mis à pied parce que la scierie avait gagné en efficacité. S'il en est ainsi, c'est simplement parce qu'il faut moins de personnes pour produire le même volume ou même, dans certains cas, un volume plus élevé.
Je vais m'adresser à Mme Cobden pendant quelques secondes, puis je m'adresserai ensuite à vous, madame MacEwen.
Combien de Canadiens travaillaient dans l'industrie forestière il y a 15 ans?
:
D'accord. Je remercie grandement la mairesse de ses éclaircissements.
Monsieur Volpe, j'aimerais parler de votre intervention. Je pense qu'elle était très bonne.
L'un des objectifs de cette audience est de montrer la complexité de la relation entre le prix du pétrole et le dollar canadien. De plus, en tant que décideurs, nous ne pouvons pas simplement dire que, si le dollar canadien perd de sa valeur, cela avantage les fabricants et que tout va bien. Vous l'avez très bien expliqué. Dans votre mémoire, vous avez dit que: « Les frais généraux sont une combinaison de coûts canadiens et étrangers. Les coûts canadiens incluent l'électricité, la main-d'oeuvre indirecte et les services locaux. Toutefois, presque la totalité de l'équipement spécialisé, de la machinerie lourde et du matériel auxiliaire sont en devise américaine ou européenne. »
Pouvez-vous expliquer au comité — et d'autres pourraient vouloir se prononcer sur ce sujet — les répercussions pour les entreprises de votre secteur de la baisse du dollar, sans vous contenter de parler des avantages pour les fabricants et les exportateurs, car la situation est bien plus complexe que cela?
Je pense qu'une distinction doit être faite entre les industries primaires et secondaires du secteur manufacturier. C'est une chose de vendre, en dollars canadiens, des produits des industries primaires sur le marché. C'en est une autre d'assembler des sous-produits et des intrants provenant des États-Unis, de l'Europe, de l'Asie et de l'Amérique du Sud, comme on le fait dans les industries secondaires. Ce qui entre dans le produit est vraiment complexe.
Dans mon secteur, nous ne faisons pas affaire avec des revendeurs, mais plutôt avec quelques dizaines de monteurs d'ensemble. Leur empreinte est partout dans le monde. On en trouve notamment dans trois pays de ce continent. Nos transactions, tant pour les intrants que les extrants, se font en toutes sortes de devises différentes. Les modélistes, les futuristes et les planificateurs de programmes font partie, pour nous, des membres les plus importants des équipes de nos clients. Ils ne s'inquiètent pas du prix du pétrole à court terme.
:
Merci, monsieur le président.
Il est très important de comprendre cette relation. J'ai tenté de l'expliquer plus tôt. Je sais que vous parlez de l'entreprise Tenaris dans votre circonscription, mais les produits qu'elle fournit sont fabriqués avec de l'acier d'ailleurs. Nous croyons que les effets sur la chaîne d'approvisionnement partout au pays sont très importants, car ils montrent que les secteurs manufacturier et énergétique ne sont pas seulement compatibles, mais qu'ils sont interdépendants.
Comme je l'ai expliqué plus tôt, les tuyaux à Nisku ou dans le sol à Wood Buffalo peuvent être retracés jusqu'à une mine de fer au Québec comme point de départ, puis à une aciérie en Ontario ou au Québec, ou à Regina ou à Calgary, comme point de traitement, et ainsi de suite.
Ce n'est pas juste que le matériel se déplace. Il y a une valeur ajoutée pour chacune de ces étapes. Il s'agit d'une chaîne à valeur ajoutée dans l'ensemble du pays où nous intégrons l'acier canadien dans le secteur pétrolier et gazier. C'est pourquoi nous tenons tant à cette exploitation. Nous soutenons tout autant les tentatives visant à stimuler les investissements dans le GNL en Colombie-Britannique. Il faut beaucoup d'acier, pas seulement dans les ports, mais aussi dans les champs de gaz, ainsi que pour transporter le gaz au port. Il s'agit de relations essentielles.
Ce qui a réellement changé dans notre industrie au fil des années est leur importance proportionnelle pour notre production.
Initialement, l'industrie reposait en grande partie sur le secteur de l'automobile et la construction. Le secteur énergétique, tout comme le secteur de l'automobile dans une certaine mesure, est un des utilisateurs finals de nos produits de l'acier. C'est une définition au sens large de l'énergie. Il s'agit de relations très importantes.
L'élément clé de votre question est que cela ne se produit pas seulement en Alberta. Une grande partie de ce qui se passe en Alberta entraîne des répercussions dans les provinces à l'est d'elle.