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La séance est ouverte. Nous en sommes à la 75
e séance du Comité permanent des finances. Selon notre ordre du jour, conformément à l’article 108(2) du règlement, nous étudions le financement des activités terroristes au Canada et à l’étranger.
Je remercie les témoins d’être ici avec nous à Ottawa ou de témoigner à partir du Maryland et du Royaume-Uni.
Nous entendrons d’abord Daniel Therrien, commissaire à la protection de la vie privée du Canada. Bienvenue à nouveau au comité.
Mme Christine Duhaime témoignera à titre personnel. Bienvenue au comité et merci d’être venue.
M. Paul Kennedy témoignera lui aussi à titre personnel. Bienvenue à nouveau au comité.
M. Christian Leuprech est doyen associé et professeur agrégé au Collège militaire royal du Canada.
Par vidéoconférence de Pasadena, au Maryland, nous entendrons M. Amit Kumar. Merci, monsieur Kumar, d’être avec nous ce matin.
Du Royaume-Uni, nous entendrons M. Bill Tupman, également professeur. Merci beaucoup d’être avec nous à partir du Royaume-Uni.
Chacun de vous aura cinq minutes pour faire une déclaration, puis les membres poseront leurs questions.
[Français]
Nous allons commencer par M. Therrien.
Vous avez la parole.
:
Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui.
Le sujet de votre étude, à savoir le système canadien de lutte contre le financement du terrorisme, arrive assurément à point nommé.
Comme vous le savez, à la lumière du projet de loi et d'autres activités législatives récentes, les règles entourant la cueillette et le partage de renseignements personnels par et entre nos forces policières et agences de renseignements a fait l'objet de nombreux débats l'an dernier. En effet, la communication de l'information est un aspect important de la lutte contre le terrorisme. Elle peut cependant également présenter des risques du point de vue de la protection de la vie privée.
Agissant en vertu de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, le CANAFE est un organisme qui joue un rôle important dans la collecte et la communication des renseignements et avec lequel le commissariat a eu de nombreux échanges au cours des dernières années.
Comme je l'ai exposé dans mon récent mémoire sur le projet de loi , dans un État de droit, il ne devrait pas revenir aux organismes de sécurité nationale de déterminer les limites de leur pouvoir. De façon générale, la loi devrait établir deux choses: premièrement, des normes claires et raisonnables pour régir la communication, la collecte, l'utilisation et la conservation des renseignements personnels; et, deuxièmement, la conformité à ces normes devrait faire l'objet de mécanismes d'examen indépendants et efficaces, y compris par les tribunaux.
Dans le présent cas, les normes juridiques sont établies en vertu de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et les règlements afférents. À mon avis, elles sont présentement raisonnables en ce qu'elles visent les personnes et les organisations soupçonnées de criminalité ou de terrorisme, ou de transactions d'une valeur importante. Par contre, cela pourrait changer en vertu du projet de loi où des modifications envisagées exigeraient la communication de transferts électroniques sans égard au montant de la transaction.
En matière d'examen, le commissariat a le mandat d'effectuer tous les deux ans des vérifications au sujet des mesures de protection propres au traitement des renseignements personnels du CANAFE, conformément à l'article 72 de sa loi constituante. Nous évaluons également les activités du centre en fonction des articles 4 et 8 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, selon notre pouvoir d'effectuer des vérifications en vertu de l'article 37 de cette loi.
[Traduction]
Si les lois et règlements actuellement en vigueur établissent des normes raisonnables, nous avons trouvé lors de nos vérifications que les pratiques de collecte et de conservation des renseignements personnels outrepassaient ces normes, ce qui pose problème. Nous avons trouvé que certains des renseignements personnels communiqués au CANAFE portaient sur des activités qui n’entraînaient pas de motifs raisonnables de soupçonner un quelconque recyclage des produits de la criminalité ou un financement d’activités terroristes, et que le CANAFE conservait des données qui ne relèvent pas de son mandat. Cela représente un risque incontestable d’atteinte à la vie privée puisque des renseignements personnels qui n’auraient jamais dû être fournis au CANAFE sont susceptibles d’être utilisés ou communiqués.
Pour aborder ce problème, nous avons préparé des lignes directrices en consultation avec le CANAFE, et les avons fournies aux organisations du secteur privée afin de réduire le risque de communication excessive à l’encontre du droit à la vie privée. En outre, un pouvoir explicite, en vertu du paragraphe 54(2) de la LRPCFAT, édicté par le projet de loi , a récemment été octroyé au CANAFE pour que le Centre puisse détruire des renseignements qui ne sont pas en lien avec des soupçons de blanchiment d’argent ou de financement d’activités terroristes. Malgré ces initiatives, le risque de communication et de collecte excessives demeure, et nous prêterons une attention particulière à la question lors de notre prochaine vérification bisannuelle.
Ce risque ne fera qu’augmenter si le seuil de déclaration pour les transferts de fonds électroniques est réduit à zéro, possibilité évoquée par ce comité et ailleurs, et si le projet de loi , qui permettrait encore plus de communications de renseignements, est adopté sans modification.
Enfin, je dirai quelques mots sur l’examen.
Même si le Commissariat a l’obligation de procéder à des vérifications du CANAFE, nous ne pouvons traiter que des questions de protection de vie privée. Le CANAFE ne dispose d’aucun organisme de surveillance qui serait chargé d’examiner ses activités pour veiller à ce qu’elles demeurent raisonnables et nécessaires.
J’aimerais conclure en rappelant au Comité que l’absence de surveillance propre au CANAFE est une question qui a été soulevée par le commissaire O’Connor et qu’elle demeure un sérieux problème.
Merci. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
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Bonjour et merci. Je ferai quelques brèves observations avant de répondre avec plaisir à vos questions.
Je commencerai là où le sous-ministre s’est arrêté lorsqu’il a témoigné devant vous il y a quelques jours, à propos du GAFI. Comme il vous l’a indiqué, le GAFI est l’organisme qui établit les politiques que des pays du monde entier mettent en œuvre dans leurs lois nationales pour lutter contre le blanchiment de capitaux. Il y a deux autres piliers, dont un qu’il a évoqué, soit la lutte contre le financement des activités terroristes, et les lois sur les sanctions. J’attire votre attention sur ces deux aspects, parce c’est le régime que nous examinons quand il est question de financement des activités terroristes et plus particulièrement des deux autres piliers, à savoir les lois sur les sanctions, ou plutôt l’évitement des sanctions quand on ne les applique pas, et le financement des activités terroristes. Ce sont les trois piliers de la conformité à partir desquels nous déterminons si des crimes financiers ont été commis.
Le GAFI a élaboré une politique assez exhaustive pour le premier pilier, la lutte contre le blanchiment des capitaux. Il y a des problèmes concernant sa capacité de fournir un leadership, une orientation et des politiques au sujet des deux autres piliers, soit la lutte contre le financement des activités terroristes et les lois sur les sanctions. Je ne sais pas pourquoi il en est ainsi, mais il semble assez évident que la lutte contre le financement des activités terroristes et l’application des sanctions posent problème chez nous et ailleurs dans le monde. J’irais jusqu’à dire que ces deux régimes, ces deux piliers, sont brisés et que nous devons trouver des solutions pour corriger la situation. La réalité est qu’il n’y aurait pas de groupe État islamique actuellement ni d’autres activités terroristes de l’ampleur de celles qui se multiplient actuellement si nos lois contre le financement des activités terroristes et nos lois sur les sanctions étaient appliquées dans le monde entier.
J’aimerais dire quelques mots sur le financement numérique des activités terroristes, car je crois qu’il joue un rôle dans l’un des problèmes auxquels nous sommes confrontés actuellement: le fait que nos lois sur la lutte contre le terrorisme ont un coup de retard. Le financement des activités terroristes n’est pas statique. L’un des problèmes du GAFI est que, pour une raison que j’ignore, il n’a pas évolué aussi vite que le financement des activités terroristes. L’un des problèmes que pose le financement numérique est que des groupes comme le groupe État islamique exploitent assez agilement les médias sociaux. Non seulement se financent-ils grâce à cette plateforme, mais ils s’en servent aussi pour diffuser leur propagande. Plus ils répandent leur propagande et montrent des actes horribles, plus ils obtiennent dans le monde entier du financement pour leurs activités. C’est un cercle vicieux et il donc est assez important de comprendre et combattre rapidement le financement numérique.
Par exemple, le groupe État islamique utilise beaucoup Twitter, mais aussi d’autres plateformes comme JustPaste.it et Ask.fm. Parfois, quand nous interrogeons les policiers et des responsables de la lutte contre le terrorisme à propos de ces sites des médias sociaux, ils ne savent même pas de quoi nous parlons. Je pense qu’il est important de comprendre ce qu’est Ask.fm, comment il fonctionne, ce qu’est JustPaste.it, et comment des organisations comme Daesh s’en servent pour financer leurs activités terroristes dans notre pays et ailleurs.
Je le signale pour faire ressortir que Daesh est actif depuis maintenant deux ans dans le terrorisme numérique et le financement numérique des activités terroristes, pourtant, nous n’avons pas encore dans notre pays de stratégie sur le terrorisme numérique et encore moins de stratégie de lutte contre le terrorisme numérique.
Je parlerai brièvement de l’exécution, parce que c’est une importante pièce du casse-tête pour les entités déclarantes et l’exécution de la loi dans ce pays.
Depuis quelques années, l’exécution dans le monde a suivi la même voie que le GAFI. J’entends par là que nous sommes assez forts en ce qui concerne l’application et l’exécution des lois sur la lutte contre le blanchiment de capitaux, mais beaucoup moins en ce qui concerne la lutte contre le financement des activités terroristes et les sanctions. Dans notre pays, il nous arrive rarement de mener des enquêtes ou d’effectuer des vérifications de conformité et d’intenter des poursuites pour faire appliquer les sanctions ou les mesures de lutte contre le financement des activités terroristes. Les États-Unis, en revanche ont un régime de sanctions extrêmement solide et ils l’appliquent rigoureusement. Rien ne nous empêche de faire la même chose chez nous.
En ce qui concerne les solutions, je dirai que, d’après mon expérience, il y a un grand besoin de dialogue entre le secteur public et le secteur privé. Je ne cesse d’entendre les deux côtés que je représente affirmer que l’échange de renseignements est insuffisant. Ils veulent tous les deux savoir ce que fait l’autre. Ils veulent tous les deux plus d’information. Ils sont tous les deux foncièrement intéressés à lutter contre le terrorisme par tous les moyens à leur disposition, mais ils ne dialoguent pas. Ils n’ont pas les outils. Ils ne communiquent pas.
Je suggère que le Canada joue un rôle de leadership dans la lutte contre le financement des activités terroristes et dans les sanctions, et qu’il envisage de créer une espèce de centre d’excellence pour réunir toutes les parties et faire en sorte qu’ils puissent avoir le dialogue dont ils affirment avoir besoin afin de lutter contre le financement des activités terroristes au Canada et à l’étranger.
Merci.
Je suis d’accord avec le principe que l’accès à de l’argent est nécessaire pour pouvoir mener des activités criminelles et terroristes. Bloquer cet accès réduira le danger pour la société. Il faut des efforts continus pour renforcer et moderniser les lois afin de tenir compte des nouvelles technologies et des nouvelles pratiques financières.
Je crois cependant que la capacité du gouvernement d’offrir des services d’exécution est loin d’être à la hauteur de la qualité des lois qui ont été ou peuvent être proposées. Telle qu’elle est constituée actuellement, la GRC est un service de police municipal, provincial et fédéral. Elle soit répondre aux multiples demandes d’une foule de maîtres politiques. Environ les deux tiers de ses agents exécutent des fonctions policières qui ne sont pas fédérales. C’est un service de police assuré par des dizaines de milliers de policiers au Canada, qui ne devrait pas être assuré par notre police fédérale.
Le gouvernement fédéral assume environ 30 % du coût des services de police de la GRC à tous les niveaux. Cet engagement détourne la GRC de son rôle de police fédérale, mais il provoque aussi la mise en place d’un modèle de recrutement et de perfectionnement mal adapté à une force policière qui doit mener à bien des enquêtes sur un nouveau type d’actes criminels. Ces activités criminelles comprennent le terrorisme et ont une portée interprovinciale, nationale et internationale. Les criminels emploient des technologies d’avant-garde et sont appuyés par des avocats et des comptables.
Depuis 2000, le gouvernement a investi des centaines de millions de dollars dans une initiative visant à lutter contre le blanchiment d’argent, le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Quels sont nos résultats? Le CANAFE reçoit et analyse 25 millions de déclarations d’opérations par année et fournit des renseignements financiers exploitables pour faciliter les enquêtes sur le blanchiment d’argent, le financement d’activités terroristes et les menaces à la sécurité nationale. De 2010 à 2014, il a communiqué 2 961 cas de renseignements financiers exploitables. D’après leurs rapports annuels au Conseil du Trésor, l’ARC et l’ASFC ont saisi ou perçu des dizaines de millions de dollars d’arriérés d’impôt établis.
Par contre, à part les mesures qu’elle a prises dans la lutte antidrogue, au cœur de son mandat depuis de nombreuses décennies, la GRC semble très peu active dans la lutte contre le financement des activités terroristes ou d’autres aspects que la lutte antidrogue. Je n’ai trouvé que deux références à des enquêtes sur des allégations d’activités terroristes, dont une liée à une infiltration.
Comme l’exige la Loi sur les infractions en matière de sécurité, la GRC est chargée d’enquêter sur les activités terroristes. L’écart entre le grave préjudice public causé par le financement des activités terroristes, les sommes élevées investies par le gouvernement dans le programme d’enquêtes, les efforts admirables du CANAFE, et le faible suivi des enquêtes par la GRC devrait inquiéter tous les membres.
Le Parlement pourra donner un sens à des mesures législatives telles que celles sur la prévention du financement du terrorisme par la GRC, uniquement si la GRC se consacre à son rôle de police fédérale et recrute des agents qui possèdent les compétences essentielles pour lutter contre le nouveau type de comportement criminel qui menace la société canadienne ou forme ses agents pour qu’ils acquièrent ces compétences. Le gouvernement devrait réaffecter la subvention fédérale de 30 % à l’appui des services de police à contrat vers les activités fédérales de la GRC afin de lui permettre de mieux assurer son rôle de police fédérale.
Merci.
:
Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous ce matin.
[Traduction]
Je parlerai d’abord du contexte, puis des problèmes et des mesures à prendre.
Faisons d’abord la distinction entre le financement des activités terroristes et le blanchiment d’argent. Le défi, en ce qui concerne le financement des activités terroristes, c’est qu’une grande partie de ce financement est légal, mais utilisé à des fins illicites. J’ai ici plusieurs documents, que je n’ai pas présentés parce qu’ils ne sont pas traduits, mais je serais ravi de les remettre aux membres. L’un d’eux est une étude empirique qui décrit certains réseaux afin de montrer que les réseaux de financement et de recrutement sont très différents et exigent donc des stratégies différentes. Nous sommes un pays diversifié, diverses forces dans le monde ont donc très envie de tenter d’obtenir de l’argent au Canada. Tout cela est bien documenté. C’est un problème de longue date qui remonte aussi loin que l’IRA, mais aussi aux Sikhs et aux Tamouls.
Nous avons un organisme de suivi des opérations financières, un organisme du renseignement financier, qui fait un travail phénoménal à tous points de vue, mais il est extrêmement difficile d’obtenir de l’information de cet organisme. Parlez-en aux autres organismes en ville et vous verrez. Essayer d’obtenir quelque chose du CANAFE est presque une tâche insurmontable. Nous avons l’obligation, en vertu des résolutions 1373 et 1624 du Conseil de sécurité des Nations Unies, ainsi que des résolutions 2178 et 2195, adoptées en 2014, d’aller beaucoup plus loin dans la lutte contre le financement des activités terroristes. Je rappelle au comité que ce sont des résolutions du chapitre 7, qui sont donc exécutoires pour tous les membres des Nations Unies.
Le problème est donc l’échange de renseignements du CANAFE et la coordination. J’ai ici un article sur une étude empirique qui démontre qu’il existe au Canada des sympathies, faibles mais notables, à l’égard du financement d’organisations terroristes. Il s’agit d’une étude évaluée par des pairs.
Comme on l’a fait remarquer, il y a une grande différence entre ce qui se passe empiriquement au Canada et les condamnations. En ce qui concerne les condamnations extraterritoriales, il n’y en a pas, que je sache, pour blanchiment d’argent. Il n’y en a pas, que je sache, pour évasion fiscale. Il n’y a qu’un cas, à ma connaissance, au sujet du financement des activités terroristes. Il remonte à 2010. C’était un peu comme enlever un bonbon à un bébé, alors je ne le considère pas vraiment comme un grand exploit.
Nous savons à quoi ressemblent les réseaux du Hezbollah, mais il semble que nous avons beaucoup de mal à les combattre. Nous savons que la GRC n’a pas les compétences nécessaires pour effectuer des enquêtes financières complexes. Comme on vient de l’indiquer, développer les compétences professionnelles et les capacités de poursuites constitue un grand défi. Nous pouvons surveiller ce qui se passe pour obtenir de l’information financière, mais nous avons beaucoup de mal à exploiter cette information. Changer les lois ne donnera pas grand-chose si nous ne changeons pas les capacités.
Les organisations terroristes se transforment sans cesse. J’ai présenté au comité un bref paragraphe sur l’Afrique du Nord et de l’Ouest. Il montre comment les organisations changent constamment de nom. Nous avons beaucoup de mal à tenir nos listes à jour, parce que ces organisations se divisent et changent de nom, alors nous faisons du rattrapage perpétuel. Il nous faut des années pour faire les mises à jour. À ma connaissance, le Canada n’a pas considéré les talibans comme une entité terroriste avant 2012.
Il y a des liens entre le crime organisé et le terrorisme. J’ai présenté à ce sujet un document de quatre pages qui n’entre pas dans les détails. C’est un peu plus ténu et difficile à prouver empiriquement, mais il y a des preuves. Je les indique dans le mémoire. Il y a le risque d’extorsion, comme nous l’avons vu dans les communautés tamoules. Il y a des flux d’exportation qui appuient intrinsèquement des organisations extrémistes violentes. Je l’ai documenté dans un article évalué par des pairs au sujet de réseaux terroristes établis au Canada et aux États-Unis. La plupart d’entre eux n’essaient pas de nous faire du mal dans notre pays; ils essaient plutôt d’exporter toutes sortes de choses dans le reste du monde. Nous avons l’obligation de nous assurer de faire notre part, de ne pas appuyer par inadvertance des activités terroristes ailleurs que chez nous.
Il y a le grand problème du microfinancement. Des gens essaient d’obtenir quelques milliers de dollars pour payer leur billet d’avion et aller à l’étranger. Le financement des activités terroristes change constamment de visage. Mais le financement des activités terroristes, en ce qui concerne Daesh, est désormais soit parrainé entièrement par l’État, soit autofinancé. Il n’y a pas beaucoup de levées de fonds directes chez nous, sauf peut-être pour pouvoir aller à l’étranger.
Que faut-il faire? Nous devons réfléchir au régime des listes et rendre le nôtre beaucoup plus efficace. J’ai des propositions précises à cet égard.
Nous devons peut-être envisager de créer des listes de personnes à l’étranger, mais le problème, c’est que même les terroristes vont chez le dentiste. Le simple fait de transférer de l’argent à une personne à l’étranger dont le nom figure sur la liste ne suffit certainement pas pour démontrer que l’argent servira à des fins terroristes.
Nous devons apprendre beaucoup plus de nos alliés. Le Royaume-Uni a un système qui lui permet essentiellement de fouiller tous les passagers d’un avion. Au Canada, l’ASFC n’a aucun mandat sur les vols au départ. Les activités de la GRC sont uniquement terrestres et la GRC n’a pas de chiens renifleurs pour l’argent. Là encore, il y a des problèmes de coordination.
Je pense que nous devons abolir le seuil des transferts électroniques de fonds. Je peux vous démontrer mathématiquement que ces seuils n’ont aucun sens, parce qu’ils accroissent considérablement le nombre de faux positifs. Il faudrait qu’ils soient fixés à la discrétion du ministre ou par le CANAFE, au lieu de choisir un seuil arbitraire de tant de milliers de dollars.
Que faut-il examiner? En résumé, il faut examiner les lacunes dans notre propre gouvernement. Nous devons examiner les motivations et pourquoi nous ne sommes pas plus motivés à intenter des poursuites dans notre pays. Nous devons examiner les méthodologies, et en particulier tirer des leçons de celles qui sont appliquées chez un grand nombre de nos alliés. En plus de l’exemple du Royaume-Uni, je peux vous donner une douzaine d’autres exemples de mesures que prennent d’autres pays.
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Merci à vous monsieur le président, ainsi qu’aux membres du comité, de m’avoir invité à discuter du financement des activités terroristes au Canada et à l’étranger. Dans le temps qui m’est imparti aujourd’hui, je ferai ressortir quelques grandes menaces auxquels sont confrontés le Canada et le reste du monde à l’égard du financement des activités terroristes. Je décrirai quelques mesures que peut prendre le gouvernement du Canada, en collaboration avec ses partenaires internationaux, pour réduire ces menaces.
Au moment où la poussée de Daesh ne se dément pas et qu’Al-Qaïda et ses organisations affiliées dans le monde font preuve d’une vigueur renouvelée, les menaces que présente le financement des activités terroristes se multiplient. Daesh nage dans l’argent et il ne fait plus aucun doute que cette organisation compte sur des méthodes criminelles et sur les dons de personnes riches pour financer ses activités. En même temps, l’activité accrue d’organisations affiliées à Al-Qaïda comme Boko Haram et AQAP, ainsi que Lashkar-e-Taïba et les talibans, toutes bien financées grâce à leur exploitation de sources de financement criminelles et à l’abus d’organismes de bienfaisance, inquiète grandement les citoyens démocratiques du Canada et la communauté internationale.
Un facteur clé qui permet à ces organisations terroristes de se développer est leur capacité de recycler le produit de leurs activités criminelles pour qu’il serve les fins et les objectifs du financement des activités terroristes. Souvent de concert avec des organisations criminelles, ou par eux-mêmes, ces groupes terroristes ont pu raffiner le blanchiment de l’argent de manière à séparer les sources de leurs revenus de leur but ultime, soit perpétrer des actes terroristes, établir et administrer de nouveaux groupes affiliés et de nouvelles cellules, et recruter, entraîner et radicaliser des terroristes en ligne.
Une tendance alarmante est la nature planétaire du mouvement des fonds terroristes, qui a non seulement tendance à abuser du système financier international, mais aussi à rendre très difficile le suivi de ces fonds ainsi que les poursuites et la condamnation de ceux qui commettent les actes abominables que sont l’exécution, le financement et la facilitation d’activités terroristes que nous détestons tant dans le monde civilisé.
Étant donné la tâche et la mission apparemment impossibles d’endiguer le mouvement des fonds terroristes et l’utilisation de ces fonds pour perpétrer des attentats terroristes, que peuvent faire le Canada et la communauté mondiale pour atténuer la menace du financement des activités terroristes?
Premièrement, il importe de reconnaître que les terroristes réussissent à faire circuler des gens, de l’argent, du matériel et des messages dans le monde entier. Il faudrait donc que la communauté des nations élargisse la portée du soutien matériel, de manière à inclure les personnes, le matériel et les messages, afin de pouvoir faire des choix plus informés et plus efficaces en matière d’outils, de sanctions, d’enquêtes, d’application de la loi, de réglementation et de sensibilisation dans le cadre de la lutte contre le financement des activités terroristes.
Deuxièmement, étant donné la libre circulation de l’argent, des personnes, du matériel et des messages à l’ère de l’Internet, Daesh, Al-Qaïda et leurs acolytes ne limitent pas leurs théâtres des opérations et leurs activités de financement à l’Iraq, à la Syrie et au Moyen-Orient en général, mais ils étendent aussi leur portée à l’Afrique du Nord, l’Afrique de l’Ouest, l’Asie du Sud, l’Europe, etc. Les attentats inspirés par Daesh à Paris, à Ottawa et en Oklahoma le démontrent bien. Tout comme l’attentat haineux du citoyen français Mehdi Nemmouche à Bruxelles, en Belgique, et les activités d’entraînement combinées de Boko Haram, Al-Qaïda et Daesh en Mauritanie. Les combattants terroristes étrangers peuvent commettre leurs actes terroristes ailleurs que dans leur pays d’origine. Par conséquent, la stratégie de lutte contre le financement des activités terroristes ne devrait pas se limiter à l’Iraq, à la Syrie et à leurs voisins immédiats, comme le fait la communauté internationale depuis un an environ.
Troisièmement, étant donné la grave radicalisation en ligne et la menace de recrutement que présente Daesh, il est impératif de travailler avec les médias sociaux afin de supprimer les vidéos incendiaires et les sites Internet qui montrent à des personnes influençables comment fabriquer des bombes, radicalisent leur pensée et leurs croyances et adulent les auteurs d’actes terroristes atroces. Les efforts actuels en vue d’adopter des lois en ce sens au Canada sont un pas dans la bonne direction. Évidemment, on peut espérer que ces mesures législatives équilibreront le besoin de sécurité avec le droit à la liberté d’expression et de protection de la vie privée des citoyens.
Quatrièmement, même si l’on a beaucoup discuté ces dernières années du fonctionnement et de l’efficacité du CANAFE — dont le rendement s’est considérablement amélioré sur tous les plans — il n’a pas été beaucoup question du besoin criant d’échanger de l’information entre les forces policières et le CANAFE. Cet échange bilatéral d’information renforcerait l’efficacité du CANAFE et la qualité de ses produits de renseignement financier.
Cinquièmement, même si les sanctions ciblées des Nations Unies contre les régimes d’Al-Qaïda et des talibans jouent un rôle utile pour pointer du doigt, faire honte et dissuader et même si les initiatives de renforcement des capacités du régime de la résolution 1373 du Conseil de sécurité des Nations Unies ont été très louangées, l’efficacité de leur mise en œuvre et leur capacité d’endiguer le financement des activités terroristes n’ont pas encore été évaluées. Le gouvernement du Canada, qui est engagé activement dans le financement et la facilitation des programmes de lutte contre le financement des activités terroristes et d’aide au renforcement des capacités anti-terroristes des Nations Unies et de ses agences, pourrait demander à l’équipe de surveillance d’Al-Qaïda et des talibans et à la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme de le renseigner sur l’efficacité de la mise en œuvre des résolutions 1267 et 1373.
J’espère que ces réflexions et ces recommandations aideront le comité dans son examen du financement des activités terroristes au Canada et à l’étranger.
En terminant, je vous remercie de cette possibilité de discuter de cet enjeu. Je répondrai avec plaisir à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
D’abord, si vous voulez un exposé plus long, vous pouvez voir sur YouTube une vidéo qui présente un exposé de 40 minutes, blagues incluses, que j’ai donné lors d’une série de conférences en Australie il y a quelques années, sur le financement des activités terroristes. Mais je vais vous épargner aujourd’hui les blagues et les 40 minutes. Pour faciliter le travail des interprètes, je vais essayer de présenter brièvement six ou sept points.
Premièrement, mon intérêt actuel est le chevauchement de plus en plus marqué entre le terrorisme et le crime organisé. Ils sont engagés dans des activités très semblables, ce sont des réseaux plutôt que des pyramides wébériennes, qui fonctionnent surtout en cellules.
Deuxièmement, nous devons nous rappeler que la plupart des opérations terroristes sont désormais autofinancées. La cellule trouve son financement pour une opération donnée. Il y a du financement de démarrage pour ce que nous pourrions appeler les activités spectaculaires et pour la mise sur pied d’une organisation de recrutement. Si nous voulons parler du financement des activités terroristes, nous devons reconnaître ces différences.
Troisièmement, des États financent des activités terroristes. Il fut un temps où il semblait que nous avions affaires à des organisations qui n’étaient pas des acteurs étatiques. Les choses ont changé depuis cinq ans, et de plus en plus, les grandes organisations sont financées par des États. Je ne les nommerai pas parce que je ne sais pas si je suis visé par les règles de Chatham House, mais ils sont assez bien connus et si vous voulez mettre un terme au financement des activités terroristes, vous devez vous attaquer au problème des États.
Quatrièmement, pour reprendre les propos d’un autre témoin, il y a maintenant une série de nouvelles technologies. Les médias sociaux constituent une de ces technologies, mais nous devons aussi nous rappeler qu’il y a d’autres moyens de paiement, comme le bitcoin, et toutes sortes de substituts de l’argent utilisés dans des jeux, comme Second Life. Les services de sécurité accordent beaucoup d’attention aux mauvais endroits. Pas besoin de se concentrer sur les médias sociaux généraux. Les méchants sont désormais passés à Tor; ils sont maintenant dans le Web profond, là où traînent les pédophiles et toutes sortes de dissidents. Nous devons savoir beaucoup mieux comment examiner ce qui se passe dans ce monde.
Cinquièmement, une fois de plus, nous avons vu depuis cinq ans une montée des comptables terroristes. Cela peut paraître une contradiction dans les termes. Les comptables sont censés être des gens terriblement ennuyants et très honnêtes, mais ils jouent maintenant un rôle très important dans l’évaluation des entreprises aux fins de l’évasion fiscale ou de l’extorsion payée à une organisation terroriste. Nous devons nous rappeler que les banques ne sont pas seules à prêter de l’argent, les cabinets de comptables et d’avocats peuvent le faire eux aussi. Nous devons accorder plus d’attention aux comptables.
Sixièmement, et je me fais encore une fois l’écho d’un autre témoin, ce qui importe le plus, ce sont des enquêteurs mieux formés. Nous avons assez de lois. Nous n’avons pas besoin d’autres lois; nous avons besoin d’un plus grand nombre d’enquêteurs compétents pour obtenir des preuves et intenter des poursuites. L’une des grandes traces que vous devez suivre est qui s’occupe des dossiers sur les opérations douteuses? Est-ce qu’on en fait quelque chose? Ces dossiers sont-ils vraiment analysés ou font-ils simplement s’empiler dans un ordinateur quelque part?
Septièmement, nous devrions nous rappeler que l’objectif de la lutte contre le financement des activités terroristes est le même que pour toute les formes de lutte contre le terrorisme. Il s’agit de réduire le nombre de terroristes.
Si nous utilisons des instruments tranchants qui frappent des cibles non terroristes et des spectateurs, nous ferons monter le nombre de terroristes.
Enfin, le groupe État islamique. Depuis qu’il s’est emparé de Mosoul, il a accès à des fonds énormes et n’a pas vraiment besoin de trouver du financement ailleurs, mais il peut aussi vendre du pétrole. Nous devons savoir où va ce pétrole, nous devons le suivre, et nous devons nous assurer que l’argent ne leur revient pas.
Voilà. Merci beaucoup de m’avoir écouté. Je serai heureux de répondre aux questions.
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Des chiffres précis sont difficiles à trouver, mais il y a un bon rapport britannique et un bon rapport australien, que je peux vous transmettre.
En principe, Daesh est davantage un phénomène de personnes dans la région et d’autofinancement que d’expansion à l’étranger, mais le problème, c’est qu’en se concentrant sur Daesh, par exemple, nous oublions toutes les activités en Afrique du Nord que je vous ai décrites.
À cet égard, je tiens à souligner ce que fait le ministère des Affaires étrangères, en particulier, dans le cadre du programme d’aide au renforcement des capacités anti-terroristes et du programme visant à renforcer les capacités de lutte contre la criminalité, qui est actif surtout dans les Caraïbes. Je pense que ce sont des mesures très importantes pour nous assurer que ce phénomène ne se répand pas et que nous renforçons les capacités.
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C’est le problème. Quand j’ai examiné les dossiers, il n’y avait rien, sauf un petit cas relié au Hamas.
J’ai également dirigé l’initiative concernant les organismes de bienfaisance. Elle a fonctionné parce que nous ne voulions pas que le gouvernement finance les terroristes au moyen des reçus pour fins d’impôt. Un grand nombre des institutions où il y avait de la violence au Canada étaient des organismes de bienfaisance... cela a disparu, donc l’initiative a fonctionné.
Les saisies de produits de la criminalité depuis 2000 par la GRC représentent environ 243 millions de dollars. Cela fait environ 17 millions de dollars par année. Cela se compare à nos saisies relatives à la lutte antidrogue.
Il me semble que tout se rapporte au trafic de la drogue. Les données nécessaires pour faire ces saisies découlent d’une enquête sur la drogue, alors il ne faut pas une analyse approfondie comme pour les données qu’on obtient du CANAFE. Je suppose que si vous examiniez les 2 900 cas depuis quatre ans au CANAFE, vous auriez les chiffres, parce que les données indiqueront les chiffres, ainsi que ce qui a eu des suites à la GRC.
Mais je dirais que c’est presque rien. Ils n’ont pas les compétences nécessaires.
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C’est une question piège.
Je pense que le gouvernement doit jouer un rôle de leadership, prendre les rênes, et jouer un rôle beaucoup plus actif pour s’assurer que le secteur privé peut jouer le rôle qu’il doit jouer, ce qui, au Canada, consiste à collecter de l’information et à la communiquer au CANAFE, puis, le CANAFE joue son rôle en évaluant l’information et en la communiquant aux forces de l’ordre.
Permettez-moi de vous donner un exemple de ce qui me paraît être important dans les activités du CANAFE, pour savoir si nous avons ou non les ressources et comment le secteur privé peut jouer un rôle. Quand le CANAFE a témoigné devant vous, une affirmation de Gérald Cossette que j’ai trouvé plutôt révélatrice était qu’au cours de la dernière année, ils ont déterminé qu’il y a eu des menaces à la sécurité nationale ou des incidents liés au financement des activités terroristes incidents plus d’une fois par jour ouvrable. Autrement dit, il a envoyé, ou plutôt le CANAFE a envoyé, 234 rapports dans l’une de ces deux catégories.
Il ne semble pas y avoir suffisamment de ressources policières pour s’occuper d’un rapport sur le financement des activités terroristes par jour au Canada. C’était l’an dernier. Où en sont ces 234 rapports sur des menaces à la sécurité nationale et/ou le financement des activités terroristes? Personne n’a demandé à quelle étape on en est ni ce qui est advenu de ces rapports. Mais je pense qu’il faut se poser cette question au gouvernement fédéral. Où en sont ces rapports? Quel est le nombre de rapports en 2015? Quel rôle joueront les agences policières fédérales pour le déterminer?
En ce qui concerne le secteur privé, le représentant du CANAFE a déclaré également qu’en travaillant avec certaines banques, ils ont pu déterminer beaucoup plus rapidement qu’il y avait eu une hausse des transferts de fonds électroniques vers les villes frontalières de la Turquie, ce qui implique évidemment Daesh. Ce groupe va chercher les fonds qui lui sont virés par Western Union, par exemple, ou par d’autres entreprises de services monétaires.
Ce dialogue qu’ils ont pu établir très rapidement sur un mécanisme de blanchiment de l’argent et de financement des activités terroristes, soit que les villes frontalières financent Daesh, est très important. Cette information devrait être communiquée aux petites entités déclarantes, soit les entreprises de services monétaires, qui sont le plus à risque et ont tendance à être les moins conformes, afin qu’elles l’intègrent dans leurs programmes de conformité et jouent leur rôle dans la lutte contre le financement des activités terroristes.
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L’information à laquelle j’ai fait allusion a été révélée au cours des vérifications que nous effectuons tous les deux ans. Essentiellement, les problèmes sont liés aux critères discrétionnaires appliqués par les institutions financières pour fournir des renseignements au CANAFE, autrement dit, signaler une opération qui semble douteuse.
Il incombe à l’institution financière de déterminer si une opération est douteuse. L’institution est bien placée pour le faire. Mais au cours de nos vérifications, nous avons constaté que certaines opérations ont été signalées au CANAFE pour des raisons comme l’origine ethnique ou la destination ou encore parce que l’âge semblait incompatible avec le montant en cause.
À mon avis, le risque est qu’en collectant des quantités énormes de renseignements, puis en tentant de leur donner un sens, on applique des critères dont certains pourraient être discriminatoires. C’est un problème.
Il y a apparemment une proposition sur la table afin d’éliminer le seuil financier et d’exiger la déclaration au CANAFE des opérations de zéro à 10 000 $. Je ne dis pas qu’un seuil financier est nécessaire, mais si on le supprime, le risque d’obtenir des renseignements sur les citoyens qui n’ont rien à se reprocher, surtout dans le contexte de votre question sur les protocoles.
Ou bien il y a des normes objectives sur les situations où les institutions financières communiquent des renseignements au CANAFE, ou alors si l’on supprime un seuil monétaire — et alors il n’y a plus de seuil et plus de critère objectif — il faudrait des critères objectifs, afin que lorsque le CANAFE examine les banques de données qui contiennent tous ces renseignements, il s’intéresse à ceux qui participent à des activités criminelles ou terroristes plutôt qu’à des citoyens qui n’ont rien à se reprocher.
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Merci à tous nos témoins de ce matin. J’apprécie beaucoup les témoignages que nous avons entendus. J’aimerais commencer avec M. Kumar.
Soit dit en passant, je pense que nous avons reçu deux recommandations succinctes et claires de la part des témoins avec qui nous discutons par téléconférence, et ce n’est pas toujours facile, alors je l’apprécie beaucoup.
Professeur Kumar, vous avez indiqué comment la situation a changé. Je renvoie à votre article d’opinion publié le 24 septembre, dans lequel vous déclarez qu’autrefois c’était Al-Qaïda et que maintenant c’est Daesh. Nous avons affaire à un autre monde. Auriez-vous l’obligeance de nous expliquer, dans cette perspective… Nous sommes un comité. Nous devons faire une recommandation et présenter un rapport. Quelles sont vos principales recommandations à notre comité, monsieur, dans ce contexte d’une planète en évolution?
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J’ai indiqué cinq recommandations et je ne les reprendrai pas dans l’ordre chronologique de ma déclaration. J’y vais plutôt de mémoire. D’abord, on a toujours reproché au CANAFE de ne pas communiquer assez de renseignements aux forces policières, mais dans le monde des unités du renseignement financier, à moins que le CANAFE obtienne des forces policières les renseignements liés à la lutte contre le terrorisme, il ne peut pas renseigner et éduquer la communauté financière ou les institutions financières sur ce qu’il faut chercher dans une déclaration d’opération douteuse.
Qu’est-ce qu’une opération douteuse? Il faut intégrer les renseignements des forces policières sur la lutte contre le terrorisme et les renseignements financiers collectés par le CANAFE auprès des institutions financières afin d’éliminer le problème des déclarations défensives d’opérations douteuses, la réglementation excessive, ou les inexactitudes, parce que les institutions financières ont grandement besoin d’instructions du gouvernement. Voilà une recommandation que j’aimerais faire.
Puis, il y a le fait que le Canada participe activement aux Nations Unies et au financement d’un grand nombre de programmes des Nations Unies et présente des demandes à l’équipe de surveillance d’Al-Qaïda et à la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme des Nations Unies pour obtenir des évaluations des incidences et de l’efficacité de la mise en œuvre. Où vont les deniers des contribuables? Il faut rendre des comptes à ce sujet. Il n’y a eu aucune étude des incidences ou de l’efficacité de la mise en œuvre.
J’aimerais faire deux principales recommandations. Je me suis aussi demandé si la portée du soutien matériel dans le projet de loi de manière à inclure… Les États-Unis, par exemple, ont donné une portée très large à la définition du soutien matériel. Cela comprend tout ce qui a de la valeur pour une organisation terroriste, aussi bien les messages, que l’argent, le matériel ou les personnes, et tout ce qui pourrait servir à une organisation terroriste. Je recommanderais d’élargir la portée du soutien matériel.
Puis, je dirais que vous devriez travailler avec les médias sociaux pour faire disparaître les vidéos, comme celles sur YouTube, qui fournissent aux terroristes une foule de renseignements sur ce qu’ils peuvent faire. Il faut une disposition en ce sens. Je me réjouis que le projet de loi commence à parler de supprimer les vidéos, mais il faut évidemment protéger la vie privée et la liberté d’expression.
Voilà, en gros, mes principales recommandations. Il y a aussi le fait que des terroristes étrangers, comme Mehdi Nemmouche et d’autres, même à Ottawa, montrent bien que l’Iraq et la Syrie ne sont pas les deux seules régions visées. Le phénomène Daesh est global et planétaire. Les personnes, le matériel, les messages et l’argent pourraient donc venir de n’importe que pays, transiter dans n’importe quel pays et permettre de perpétrer des actes terroristes dans un pays tiers.
Je vous remercie.
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Vous avez déjà entendu mes observations sur ce que nous faisons à l’étranger pour renforcer les capacités, en particulier ce qui se fait aux Affaires étrangères et à la Défense nationale, ce qui est très important.
Comme l’a indiqué M. Kennedy, les compétences à la GRC... Voilà une organisation que nous devons repenser complètement. Nous devons nous demander comment offrir les services de police fédéraux dans ce pays, repenser la structure organisationnelle actuelle et les programmes de perfectionnement professionnel. Accepter comme compétences minimales à l’entrée un diplôme d’études secondaires et l’absence de casier judiciaire et affecter ensuite des gens du Nord à Toronto pour mener des enquêtes de cols blancs, afin de les récompenser, ce n’est pas la bonne façon de fournir des services de police fédéraux dans notre pays. Aucune autre démocratie occidentale ne fournit des services de police fédéraux comme nous le faisons, en se mêlant de tout, depuis les services locaux… Je pense que nous devons repenser complètement tout cela.
En ce qui concerne la question de M. Brison sur le CANAFE, l’une des difficultés que présentent les déclarations d’opérations douteuses est qu’il n’y a aucune manière cohérente de faire ces déclarations. Quand les banques font des déclarations, elles peuvent essentiellement y indiquer ce qu’elles veulent. Lors de l’exploration des données, par exemple, il est extrêmement difficile de dégager des profils et des tendances, parce que si les données ne sont pas déclarées de manière cohérente, on ne peut pas effectuer une analyse cohérente des tendances.
Je crois que nous devons examiner notre régime de listes pour les organisations et les personnes.
Le président veut que le ralentisse, alors je le ferai.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie également les témoins d'être ici parmi nous aujourd'hui.
Le financement du terrorisme se répartit en deux axes pour ce qui est de la présente étude, soit l'axe international et l'axe national. En ce qui a trait à l'axe international, je vais revenir sur les propos de M. Therrien concernant le CANAFE.
Depuis l'adoption de la réglementation concernant les rapports de télévirement de 10 000 $ et plus, le CANAFE a reçu deux millions de ces rapports. Il devrait en recevoir 10 millions cette année. Il est certain que si l'on réduit la limite des transactions devant être déclarées au CANAFE, il va y avoir énormément d'informations.
Comment peut-on s'assurer que ce cumul de renseignements ne se fera pas au détriment de la vie privée des gens?
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Merci beaucoup de votre réponse.
J'aimerais revenir à M. Tupman et parler de l'autofinancement.
Vous savez que nous, comme parlementaires canadiens, avons été victimes d'un présumé attentat d'inspiration terroriste qui a été financé assez facilement. La personne a pris un fusil, qui appartenait peut-être à son grand-père, je l'ignore, et est arrivée au Parlement. L'autre attaque menée par des gens inspirés par le terrorisme dont nous avons été victimes est celle de quelqu'un qui a pris son propre véhicule et qui a frappé une personne.
La question du financement est importante car on ne veut pas financer les terroristes. Ce n'est toutefois pas le seule dimension importante, si on considère comment se fait la radicalisation et le peu de moyens qui sont nécessaires pour commettre un acte terroriste.
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J’ai passé les deux dernières années à dialoguer avec le secteur privé surtout et avec les forces policières, pour savoir ce qu’ils pensaient de certains problèmes touchant non seulement à la lutte contre le financement des activités terroristes et aux sanctions, mais aussi au blanchiment de l’argent. Je pense que les groupes à qui j’ai parlé partout au pays s’entendent sur le fait que nous avons besoin d’une espèce de partenariat public-privé, que ce qui a été fait jusqu’ici n’a pas fonctionné ni à l’échelle mondiale ni à l’échelle nationale, pour une raison qu’ils ignorent, et qu’ils veulent participer à la solution.
À mon avis, cette solution pourrait consister à établir un centre de lutte contre la criminalité financière où les deux parties chercheraient des solutions, examineraient des problèmes comme le terrorisme numérique, qui est nouveau, et auquel personne ne s’intéresse vraiment. Le Canada pourrait prendre les devants et faire des suggestions.
Il y a aussi un énorme besoin de développer au pays des compétences dans la lutte contre le terrorisme, et les lois sur les sanctions tout particulièrement. Nous nous tournons vers les États-Unis pour trouver ce genre de compétences et nous les importons. Nous payons pour assister à des colloques d’un bout à l’autre du pays, alors que, croyez-le ou non, nous avons chez nous des gens assez compétents pour enseigner aux États-Unis.
Il me paraît plus logique de décider de garder ces compétences au Canada, de les élargir et de les exporter. Si nous avions une espèce de centre national de lutte contre la criminalité, qui regroupait les compétences du pays, nous pourrons organiser des colloques, donner une formation aux banques, jouer un rôle de leadership, et garder tout cela chez nous.
Je pense que c’est une solution. On dirait que c’est une solution que souhaitent tous ceux à qui j’ai parlé.
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Je dirais que le lien est ténu, parce que nous ne comprenons pas exactement les relations empiriques, et que c’est un domaine auquel le gouvernement devrait accorder beaucoup plus d’attention, surtout la recherche, parce qu’il est très difficile de faire de la recherche dans ce domaine et que les coûts irrécupérables sont très élevés.
Nous savons, par exemple, que la vente de cigarettes de contrebande a été liée partout, depuis l’Europe de l’Est jusqu’à Daesh, et aux États-Unis, au financement du Hezbollah. Je décris le mécanisme en détail dans mon rapport et j’ai aussi quelques articles sur ce sujet. Mais les liens ne sont pas très clairs, parce qu’il semble que le financement et le crime organisé fonctionnent de manière assez indépendante des éléments terroristes et que les réseaux eux-mêmes sont un peu différents.
Cela semble faire ressortir la difficulté de reconnaître que la lutte contre le crime organisé a des répercussions concrètes sur la sécurité publique et la sécurité nationale. Je rappelle au comité que le groupe de travail régional de Cornwall, par exemple, a été créé en 1990, et que 25 ans plus tard, nous en sommes toujours au même point.
Nous devons nous demander sérieusement pourquoi nous finançons des groupes de travail, lorsque, par exemple, ils ne semblent pas nous donner finalement les résultats attendus. Est-ce un problème institutionnel, un problème législatif, un problème sociologique, ou avons-nous nous tout simplement adopté la mauvaise stratégie?
Je pense que nous pourrions faire beaucoup plus, au Canada et en matière de renforcement des capacités internationales, pour que la lutte contre le crime organisé contribue à la sécurité publique en général et à la lutte contre le financement des activités terroristes en particulier.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de leur disponibilité alors que nous ne disposons que de peu de temps pour les interroger.
Madame Duhaime, si j'ai bien compris votre présentation, vous avez dit que le GAFI ne se serait pas suffisamment tenu à jour et qu'il était en retard d'au moins un coup, particulièrement pour ce qui est des nouvelles plateformes de financement numérique. Il est peut-être même en retard de deux ou trois coups, qui sait.
Visiblement, les organisations canadiennes se fient énormément au GAFI pour lutter contre le financement du terrorisme. Selon vous, cette confiance ou ces espoirs sont-ils fondés? Le Canada peut-il agir concrètement pour soutenir le GAFI afin qu'il puisse se mettre à jour?
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Ma réponse sera forcément quelque peu complexe parce que je ne sais pas réellement ce qui se passe derrière la scène au GAFI, ni pourquoi, par exemple, il n'est pas aussi efficace qu'il devrait l'être. Il s'est certainement montré efficace dans sa lutte contre le blanchiment d'argent, mais dans son action de contre-terrorisme, il a, pour ainsi dire, complètement manqué la cible en matière de sanctions.
Nous sommes certes un solide défenseur du GAFI et nous l'applaudissons, comme il le mérite sans doute, pour ce qu'il fait. Je crois qu'une certaine révision de sa mission est nécessaire. Par exemple, vous aurez remarqué, je pense, que les États-Unis et l'Arabie saoudite dirigent un groupe distinct, dont le GAFI est membre, qui s'est réuni à Rome la semaine dernière pour traiter uniquement du financement du contre-terrorisme. Cela laisse penser, il me semble, qu'il y a peut-être une petite perte de confiance dans le GAFI. Si non, pourquoi ne pas aller simplement au GAFI, puisqu'ils en sont tous membres, et tenir leur réunion au sein du GAFI?
C'est peut-être une indication que le GAFI… Celui qui le dirige sur une base annuelle devrait demeurer en fonction pour une période beaucoup plus longue afin de pouvoir accomplir beaucoup plus et de façon beaucoup plus approfondie. Soit que nous consacrions davantage de ressources au GAFI, soit que nous l'amputions de sa composante de financement du terrorisme pour aboutir à un GAFI distinct ou à un organe différent, beaucoup plus spécialisé, qui ne s'occuperait que du financement du terrorisme.
L'une de ces deux solutions devra s'imposer. Vous savez, 10 années se sont écoulées et nous n'avons pas encore résolu le problème du financement du contre-terrorisme. Il est peut-être temps de trouver une autre solution.
Monsieur Leuprecht, si je ne m'abuse, vous avez dit que le seuil de 10 000 $ entraînait trop de faux positifs.
Dans la 14 e recommandation formulée dans le cadre d'une étude sur le financement du terrorisme, le comité de révision du Sénat a justement indiqué qu'il ne fallait pas nécessairement exclure ce seuil pour examiner les transactions financières et qu'on pourrait se fonder davantage sur la cueillette stratégique de renseignements ainsi que sur l'analyse et le signalement fondés sur le risque.
Iriez-vous jusqu'à suggérer de traquer le financement du terrorisme au moyen de l'analyse et du signalement fondés sur le risque? Sinon, trouvez-vous que le seuil de 10 000 $ demeure valable pour l'ensemble des transactions?
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Si vous le permettez, je vais vous répondre en anglais de façon à être plus précis.
[Traduction]
Dans une optique d'exploration de données, il est intrinsèquement important de travailler à partir de bonnes évaluations fondées sur le risque, solidement factuelles. Il y a trop d'investigations qui sont entreprises sur la foi de l'expérience, voire de l'intuition, de telle ou telle personne, et trop peu à partir de modèles de risque réel.
Comme M. Brison l'a signalé, il y a toujours le danger de donner l'impression de cibler des communautés ethniques. Ce dont nous avons réellement besoin, ce sont de solides modèles guidés par les données, nous permettant de montrer que nous ne ciblons pas telle personne en raison de sa religion, de son appartenance ou des lieux qu'elle a visités, mais bien parce que nous appliquons un modèle fondé sur le risque, qui s'est avéré efficace.
Je serais heureux de partager avec vous certaines de nos publications, notamment une qui est sur le point de paraître sur la modélisation fondée sur le risque au sein de Services correctionnels Canada, à partir du vaste ensemble de données détenu par cet organisme.
Une partie du défi concerne non simplement la modélisation fondée sur le risque, mais aussi le fait que certains de nos organismes soient davantage axés sur la recherche que d'autres, si bien que les cultures de recherche varient et qu'il faut avoir des ministères et organismes guidés par cette recherche, plutôt que par induction, selon les intuitions des gens.
Il y a toute la question de la culture institutionnelle qui est distincte de la capacité effective d'élaborer les modèles appropriés. À l'heure actuelle, nous ne disposons pas, par exemple, d'un très bon mécanisme pour communiquer les données entre chercheurs, chose que le Royaume-Uni et les États-Unis font beaucoup mieux que nous.
Cela ne veut pas dire que les analystes gouvernementaux ne font pas du bon travail, mais qu'il y a, intrinsèquement, certaines choses que nous pouvons faire dans le milieu universitaire, grâce à nos algorithmes et méthodes, qui sont probablement quelque peu plus avancées.
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Nous savons que dans les régions où opèrent les ramifications d'Al-Qaïda et le groupe État islamique, l'un des moyens par lesquels ils financent leurs opérations est de demander un pourcentage du chiffre d'affaires des entreprises présentes dans ces régions et qu'ils envoient des équipes de comptables dans les entreprises et établissent quel est leur chiffre d'affaires annuel. Cette façon de procéder semble remonter à l'époque de la présence d'Al-Qaïda en Afghanistan, après qu'un Égyptien s'est enfuit en emportant 10 millions de dollars du fonds central. À partir de ce moment, ils font de la vérification et de la comptabilité et ont mis sur pied une équipe qui, avec l'expansion de l'organisation, se déplace pour examiner les finances des autres branches de l'organisation et estimer leurs revenus. Ainsi, les mouvements qui ont adhéré à Al-Qaïda, que ce soit au Yémen, au Mali ou ailleurs, sont censés remettre des sommes d'argent à l'organisation centrale. Ces sommes sont vérifiées et comptabilisées. Ces comptables examineront également les entreprises ayant des activités dans la région.
Ce que je cherche à dire, c'est que la relation entre le crime organisé et les organisations terroristes d'au-dessus d'une certaine taille doit être comprise de la même façon qu'on peut considérer parfois le crime organisé comme étant simplement une autre entreprise. C'est simplement une entreprise illicite, et on s'attend à ce qu'elle paie une part de son chiffre d'affaires sous forme de taxe à la révolution — appelez-la comme vous voulez —, comme le font les entreprises légitimes.
Je me permets de mentionner, au cas où cela vous intéresserait, que nous venons, mes collègues et moi, de publier un numéro spécial de la revue Global Crime qui contient des études de cas, dans différents pays, de l'interface entre le crime organisé et le terrorisme. Nous avons fait pas mal de travail sur cette question et avons encouragé d'autres à en faire.
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Merci, monsieur le président.
Je mentionne à l'intention de nos invités que je suis ici aujourd'hui à titre de suppléant, si bien que mes questions pourraient être quelque peu plus élémentaires que celles de mes collègues.
L'une des choses qui me frappe est… comment ils suivent la piste de l'argent par des moyens comptables et des déclarations; l'autre chose, c'est les banques et les transactions.
Je me demandais s'il y a un centre du renseignement financier, doté d'une expertise comptable judiciaire et d'un cadre pour la production de rapports pour les banques à l'échelle internationale, afin de savoir, par exemple, si une transaction, même par carte de crédit, est faite au profit de tel individu qui, étant une personne suspecte, déclencherait un signal d'alerte, ou quelque chose du genre. Y a-t-il moyen de mettre en place un cadre qui permettrait de pister et de mieux coincer ces gens qui financent le terrorisme sur le plan international?
Monsieur Kennedy, voulez-vous répondre en premier?
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Eh bien! nous venons de changer tout notre système opérationnel. Nous avons créé la National Crime Agency, qui a adopté une approche de partenariat, une approche pour regrouper en partenariats les universités, le secteur privé et d'autres organismes. Il y a tout un ensemble de nouvelles idées qui émergent.
L'une des choses qui nous inquiète — je ne me souviens pas si c'est vous ou l'un de vos collègues qui a posé la question —, c'est d'être condamnés à toujours faire du rattrapage. Nous commençons à voir la nécessité de penser 15 ans à l'avance. Nous cherchons à savoir ce qui se profile au-delà de l'horizon, à penser l'impensable. Ce sont les genres d'efforts qui se font.
Je pense que vous entendriez sensiblement les mêmes reproches que ceux formulés par vos collègues, à savoir que nous n'étudions pas les rapports d'activité suspecte comme il se doit, que nous ne faisons pas les rapprochements nécessaires. Nous sentons vivement le besoin de former les agents de conformité dans les banques et les entreprises à mieux dépister les transactions, pour qu'ils cessent de nous envoyer n'importe quoi, mais qu'ils nous signalent les transactions authentiquement suspectes.
Il y a beaucoup de choses qui se passent, mais c'est un projet en chantier. Je ne peux pas, ici et maintenant, dire quelles sont les meilleures pratiques. Nous sommes insatisfaits de ce que nous avons accompli jusqu'à présent et nous sommes en train de repenser notre façon de faire.
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Oh! que oui. C'est justement ce dont je me plains.
Comme je suis devant un comité des finances, je suppose que vous avez une compréhension des questions financières. Admettons que vous établissez une entreprise pour créer un produit et que vous considérez toute cette information comme les ingrédients qui entrent dans le produit, qu'on apporte au cuisinier, mais que celui-ci laisse tomber au sol. Ils ne seront pas utilisés. Pour produire quelque chose, il faut avoir une personne qui connaît les ingrédients, qui les apprécie à leur juste valeur et qui sait comment les assembler pour obtenir un produit.
Nous investissons de l'argent dans un système, mais sans en voir le produit. Il nous faut des enquêteurs qui savent quoi faire de cette information et comment enquêter utilement et des procureurs qui savent mener une poursuite à terme. Nous parlons ici d'activités criminelles d'un genre très différent, et elles nécessitent des ensembles de compétences très différentes. Tous, nous gaspillons nos efforts faute d'avoir en bout de ligne des gens capables de transformer cette information en quelque chose de concret.
Je ne vois rien de concret. Cela m'indique qu'il y a quelque chose qui cloche.
Monsieur Leuprecht, juste à la fin de votre réponse, vous avez parlé du manque de confiance des banques centrales dans les organismes du renseignement ou la gouvernance. Vous avez dit espérer ou penser que les banques centrales possédaient une grande quantité d'information et la capacité de la partager avec d'autres banques centrales et qu'elles demeuraient ainsi, selon votre expression, je crois, au-devant de la situation.
Je veux revenir sur cette question de confiance. Pensez-vous vraiment ce que vous avez dit, que les banques centrales, d'après les faits que vous avez recueillis, n'ont pas une grande confiance dans le partage de cette information avec d'autres organismes et autorités?
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Depuis les années 1950, nous nous trouvons dans un cadre de contrats gouvernementaux avec diverses provinces pour fournir des services policiers aux niveaux municipal et fédéral. Lorsqu'il s'agit d'une petite communauté, la formule est différente. Elle peut représenter jusqu'à 30 % dans les cas où le gouvernement fédéral subventionne les services policiers provinciaux qui y sont fournis. Ordinairement, les services policiers provinciaux comptent pour environ 10 %. Cette situation s'explique historiquement, entre autres, par le fait que les provinces de l'Ouest n'étaient pas densément peuplées.
De nos jours, nous nous trouvons dans une situation où la GRC a un effectif d'environ 7 000 agents en Colombie-Britannique. Nous avons des provinces, appelons-les l'Alberta — abstraction faite de la petite anomalie dans le cours du pétrole, mais il va remonter —, la Colombie-Britannique, la Saskatchewan et le Manitoba, qui bénéficient de ces services policiers, la Saskatchewan au premier rang. Ces services étaient financés au moyen de revenus fiscaux nationaux par le truchement de cette formule de 10 % et de 30 %. Le financement provenait, disons, de l'Ontario et du Québec, qui sont dotés de leurs propres forces policières municipales et provinciales. La GRC n'exerce pas ce rôle dans ces provinces, si bien que leurs contribuables se trouvent à financer leur force de police locale, leurs services policiers provinciaux et la GRC à l'échelle fédérale, et ils subventionnent les services policiers dans ces autres provinces. Voilà la structure actuelle.
Ce que je cherche à dire, c'est que les deux tiers des ressources de la GRC sont consacrés à ces types de services policiers, et vous en avez pris connaissance, que ce soit dans le Nord ou dans les petites communautés, et que ces compétences ne peuvent être mises à contribution par le gouvernement fédéral aux fins d'application des lois fédérales. Ainsi, il y a une modeste part des ressources totales qui servent aux services policiers fédéraux.
Des pressions se font aussi sentir fréquemment pour réaffecter les ressources fédérales afin de mieux remplir ces contrats. En matière de terrorisme, vous avez vu récemment que la GRC a dû réaffecter à la lutte contre le terrorisme des ressources consacrées au crime organisé, parce qu'elle déplace ses pièces derrière l'écran. En ce qui concerne la déclaration du Conseil du Trésor relative aux ressources accordées pour le problème du financement du terrorisme — et j'ai fait la dernière présentation au Conseil du Trésor —, ces fonds seront désormais mis en commun avec d'autres ressources fédérales, sous une nouvelle forme, et feront partie des activités fédérales de répression des crimes graves et du crime organisé. Ces ressources seront retirées de leurs créneaux pour être fondues dans la masse, de façon à offrir la capacité d'y puiser davantage.
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Je pense que nous en sommes à ce point-là et que nous y sommes parce que la criminalité a changé.
Soit dit en passant, j'ai aussi présidé le Comité national de coordination sur le crime organisé pendant cinq années et le Forum sur la criminalité Canada–États-Unis, pour cinq années également, et il était manifeste que le type de criminalité avec lequel la société actuellement aux prises a changé sous l'effet de la mondialisation et de la technologie. Il fait appel à un ensemble de compétences tout à fait différentes chez les agents de police. Il s'agit maintenant d'une criminalité patiente, complexe, sophistiquée. Oui, nous devrions envisager cette possibilité, faute de quoi nous adopterons des lois en s'attendant qu'elles seront appliquées, et elles ne le seront pas. Ces 7 000 agents de la GRC en Colombie-Britannique sont comptables au ministre provincial. C'est le cas dans chacune des provinces où la GRC est présente : c'est devant cette personne et cette autorité qu'elle est responsable. Voilà une pression extrême.
Les contrats de services policiers comptent les pour deux tiers du budget. Si nous ne retirons pas de ce champ d'activités, nous ne serons pas en mesure de lutter contre les nouveaux types de crimes sophistiqués auxquels le pays est confronté.
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Je pense qu'il s'agit d'un problème structurel complexe. Il y a le modèle simple — un patron, une tâche —, par opposition à une structure multitâches comme c'est le cas à la GRC. C'est manifestement une question de choix de compétences et de recrutement ciblé.
Mon ami ici a fait mention du CST. Il serait évidemment un rival mondial en raison de sa capacité de collecte de données et de savoir-faire postérieur à la collecte. Nous avons nos points forts, mais lui, il est spécialisé, d'où son expertise.
La GRC est un organisme multitâches et c'est la raison, je pense de son échec. Il a des gens qui sont des comptables et ainsi de suite, qui sont compétents pour enquêter sur les délits commerciaux, mais nous leur demandons, à pied levé, de cesser de s'occuper de tel délit commercial pour s'occuper plutôt de tel crime sophistiqué ailleurs. Nous n'avons pas assez de gens, nous n'avons pas assez de gens avec les compétences voulues et nous ne leur donnons pas la capacité de concerter leurs efforts sur les tâches qui leur sont confiées.
Vous ne trouverez jamais, je crois, quelque renseignement provenant du Canada permettant d'identifier quelqu'un qui manipule le TIOL, avec ses taux et ses milliers de milliards de dollars. Nous ne regardons pas là. Si nous ne regardons pas, nous ne verrons pas. Nous avons besoin de gens qui possèdent les compétences voulues, avec une optique précise, qui sont spécialisés, qui ont recours à d'autres partenaires également, mais qui traquent le type de criminalité que nous ne traquons pas à l'heure actuelle.
J'avais fait préparer une présentation, avec des Américains et des Canadiens, il y a une dizaine d'années, en 2004 — cela montre combien elle date —, qui portait sur le vol d'identité et diverses fraudes sur l'Internet. Nous parlions alors de dizaines de milliards de dollars. C'était à l'époque. Dieu sait aujourd'hui ce qui se passe dans ce domaine particulier des fraudes et des vols électroniques.
Nous ne regardons pas de ce côté et nous n'avons pas les compétences pour voir ce qui s'y passe. Si nous n'avons pas les yeux pour voir un problème, jamais nous n'enquêterons. Nous devrons nous contenter de deviner ce qui se passe. Les services du renseignement nous disent... nous lisons les rapports du renseignement, mais personne n'y donne suite. Pourquoi alors nous donner cette information si nous n'allons pas agir en conséquence? S'il y a risque de délit, nous devons nous organiser pour le contrer.
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De toute évidence, les options sont multiples. Au plus fort du trafic de la cocaïne par les Colombiens, ceux-ci étaient évidemment désireux de trouver des moyens de sortir leur argent parce qu'ils étaient assis sur des tonnes de dollars qui ne servaient à rien. Ils se sont mis à la recherche de moyens de transfert d'argent qu'offraient les nouvelles technologies.
Si votre argent provient d'activités illégales et que vous ne l'avez pas déclaré à des fins d'impôt, ou encore si vous êtes un oligarque russe, vous chercherez quelque moyen pour le sortir du pays et le mettre à l'abri. Cela est vrai également pour le narcotrafiquant, comme d'ailleurs pour le terroriste.
Comme mes collègues l'ont signalé, il y a un chevauchement du crime organisé — que ce soit le trafic de drogues ou d'autres activités — et du terrorisme. Ils sont les premiers à adopter les nouvelles technologies et à les utiliser pour cacher leurs fonds à différentes fins. Alors, oui, les leçons apprises dans une situation s'appliquent à l'autre, puisque ce sont ces méthodes que les gens utilisent.
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Il a été créé, semble-t-il, par le service du renseignement naval des États-Unis à titre d'expérience spéciale. Il a été utilisé comme moyen pour les dissidents de demeurer en contact entre eux dans l'Ouest et pour leur permettre d'éviter les contrôles imposés par leur gouvernement.
Comme beaucoup d'autres réalisations, il a été conçu à l'origine comme un outil du renseignement et un moyen d'interaction informative qui répondait aux désirs des pays occidentaux de changer le monde. Peu à peu, les abus sont apparus.
Si vous voulez y avoir accès, vous devrez vous procurer le logiciel approprié. Le problème, c'est que vous pourrez utiliser le navigateur, mais que vous ne saurez pas où trouver les sites à moins que quelqu'un ne vous dise où ils sont.
Si vous décidez de vous y aventurer, vous devrez être très, très prudent parce qu'il y a énormément de sites de pédophilie. C'est là qu'ils se sont terrés.
Je peux vous faire parvenir le logiciel, ainsi que diverses autres choses, mais je ne peux pas vous dire où aller.
Je vous conseillerais de demander...
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Je vous remercie, monsieur, d'avoir posé cette excellente question. Nous sommes aux prises avec cette question jour et nuit.
L'EIIL tire son origine d'Al-Qaïda en Iraq. EIIL est, en fait, le nouveau nom d'Al-Qaïda en Iraq.
Nous avons eu des problèmes avec le financement d'Al-Qaïda. Il va sans dire que les États-Unis, le Canada et tous leurs partenaires internationaux ont attaqué la centrale Al-Qaïda et cherchaient à la couper de ses ressources financières, avec un certain succès d'ailleurs. Mais cela a eu pour résultat de susciter le morcellement d'Al-Qaïda en filiales, cellules, petits groupes et ainsi de suite, qui étaient, dans une large mesure, autosuffisants. Nous étions sur le point de venir à bout de ce problème quand est apparu l'EIIL, jadis appelé Al-Qaïda en Iraq.
L'évolution des relations financières et logistiques parmi les affiliés d'Al-Qaïda, en grande partie grâce à la technologie, à YouTube et aux médias sociaux, tend à une intensification de l'interaction entre les affiliés. Nos mesures de sanctions ciblées, si elles ont mené à un certain succès contre la centrale Al-Qaïda, sont difficiles à appliquer à l'encontre de ses affiliés et de l'EIIL, qui est une sorte d'affilié d'Al-Qaïda, mais qui entretient des relations étendues avec bon nombre des affiliés.
C'est pourquoi Boko Haram s'est aligné sur l'EIIL, ainsi qu'une branche de Tehreek-e-Taliban au Pakistan et en Afghanistan. L'EIIL est, d'une certaine façon, le nouvel Al-Qaïda, bien que mes recherches et mon impression de cette organisation terroriste montrent qu'ils ne diffèrent pas tellement. C'est simplement que l'EIIL, évoluant au fil du temps, a adopté, selon l'expression d'un des témoins, un paradigme de financement davantage axé sur les revenus externes.
Un point que je tiens à mentionner et à porter à l'attention du comité est le virage qu'on constate, tant au GAFI qu'au niveau national, et même aux Nations Unies, en faveur de l'application fondée sur le risque des mesures visant à contrer le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, et aussi la nouvelle importance accordée à leur efficacité.
Je pense que Mme Duhaime a bien raison de dire que nous n'avons pas assez de poursuites ni de condamnations. Ce qui devra réellement se produire... Les banques ont aussi, de leur côté, besoin d'information provenant du gouvernement. Ça ne peut pas être un sens unique où toute l'information va du secteur financier vers le gouvernement.
Comme je l'ai déjà mentionné, l'une de mes recommandations préconise un mouvement bidirectionnel de l'information parce que les banques, si elles sont mieux informées, sont plus en mesure de distinguer ce qui est suspect de ce qui ne l'est pas. Suivant la modélisation fondée sur le risque, les banques connaissent leurs vulnérabilités et le gouvernement connaît les menaces, et le risque est fonction des vulnérabilités, des menaces et des conséquences. Si les secteurs public et privé travaillent ensemble, les risques pourront être, je dirais, comparés aux vulnérabilités. Nous pourrons alors procéder à la schématisation du risque, de la vulnérabilité et de la menace. Il en résulterait un effort fondé sur le risque, mieux informé et mieux ciblé.
Merci de votre attention.
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Merci, monsieur le président.
Plusieurs couches de criminalités s'additionnent. Il y a le crime organisé, il y a l'évasion fiscale et, maintenant, on en ajoute une autre , soit celle de la lutte contre le financement du terrorisme.
J'ai retenu quelques propositions que vous avez soumises. Ce sont des recommandations qui sont très pertinentes. Il y a, par exemple, la création d'un comité de surveillance du CANAFE et la création d'un centre d'excellence relativement à tout ce qui touche la technologie et le transfert d'argent sur des plateformes technologiques concernant les grilles d'analyse et ainsi de suite.
Selon moi, la proposition la plus osée est celle de M. Kennedy, qui propose en fait une réforme complète des services policiers canadiens. Est-ce bien un peu ce que vous nous demandez de faire?
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Oui, certainement. Il y a un bon mot, de Will Rogers, je crois, qui dit que vous êtes peut-être sur la bonne voie, mais que si vous ne bougez pas, vous vous ferez passer sur le corps.
Nous avons hérité d'un modèle des années 1950 avec la GRC dans les provinces de l'Ouest. À l'époque, ces provinces de l'Ouest n'étaient pas densément peuplées et n'étaient pas nécessairement prospères. L'Ontario et certainement le Québec ont leurs propres services policiers. Il faut se demander pourquoi, dans une province prospère comme la Colombie-Britannique, nous avons, encore de nos jours, 7 000 agents de la GRC pour effectuer ce genre de travail. Certains des malheureux problèmes de la GRC résultent du piètre financement qui lui est accordé.
En tant que président de la commission qui examine les plaintes à l'endroit de la GRC, j'ai eu à m'occuper d'un cas de fusillade qui s'est soldé par un décès. Je suis sûr, monsieur Cullen, que vous connaissez bien l'affaire Ian Bush. Lorsque l'agent est arrivé au poste de police, où il n'y avait personne, pas un chat. L'agent avait arrêté un homme et lui parlait. Pour prendre sa déposition, il a dû sortir un magnétoscope à cassette, l'installer et l'activer, ce qui n'avait pas été fait. Cet appareil ne pointait que dans une direction.
Dans une autre localité, à Burnaby, en Colombie-Britannique, quand vous entrez dans le poste de police, il y a des caméras détectrices de mouvement, la télévision en circuit fermé, qui enregistre tout ce qui se passe. Il y a une fusillade, puis une longue enquête pour établir le fil des événements. Pourquoi? Parce que, dans ce poste de police, non seulement le personnel n'est pas assez nombreux, mais les ressources financières sont aussi insuffisantes et la technologie de pointe est absente. Nous aurons probablement d'autres incidents de fusillade dans les endroits où l'équipement approprié fait défaut.
En de nombreux endroits, la GRC est attaquée dans sa réputation. Ses ressources sont réaffectées à la criminalité visible, c'est-à-dire les crimes perpétrés sur la voie publique qui préoccupent les gens. Le policier que vous avez embauché et formé pour ce genre de travail, n'est pas un policier que vous employez pour la lutte contre la criminalité sophistiquée dont je parlais.
Pourquoi avoir la GRC à Edmonton, à Calgary et dans les autres villes qui ont leurs propres services policiers municipaux. Il faut la sortir de là. Il ne faut pas la disperser. Établissons une force de police nationale qui s'occuperait des crimes complexes que nous n'arrivons pas à réprimer. Cela peut se faire. Cela a été fait et il faut que ça se fasse davantage. Nous devons sauver la GRC d'elle-même, parce qu'elle a embrassé un modèle dans lequel, à mon avis, elle se consume.
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Merci beaucoup de votre question. C'est une très bonne question.
Je proposerais, au fond, deux comités qui mériteraient votre attention. Le premier est le Comité 1267, chargé des sanctions contre Al-Qaïda, ainsi que le Comité 1988 qui lui est apparenté et qui s'occupe des talibans, et le deuxième est la Direction exécutive du Comité 1373.
Le Canada, en raison des fonds, des compétences et du soutien actif qu'il apporte aux efforts de contre-terrorisme des Nations Unies, se doit de poser des questions. Les Canadiens et leurs représentants, de même que le gouvernement du Canada, sont vraiment en droit de recevoir des réponses de la part des Nations Unies en ce qui concerne deux paramètres.
Qu'en est-il du paramètre des répercussions? Quelles répercussions ont eu les mesures prises en vertu des résolutions 1373 et 1267 pour ce qui est de juguler ou de contrôler le financement du terrorisme? Voilà pour le premier.
Le deuxième s'adresse à l'Équipe de surveillance de l’application de la résolution 1267, c'est-à-dire des mesures contre Al-Qaïda et les talibans, ainsi qu'à la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme, pour obtenir de l'information sur l'efficacité de la mise en œuvre de ces mesures. L'efficacité de la mise en œuvre et les répercussions des mesures sont très importantes. Compte tenu des deniers publics considérables qu'ils ont dépensés à cette fin, les Canadiens de même que leurs représentants et leur gouvernement méritent des réponses.
Voilà les deux comités et les deux questions à poser à chacun.
Merci de votre attention.
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Je serais heureuse de faire ce suivi.
Au Canada, notre régime de sanctions est une bête à part, mais c'est quand même ce que nous faisons entrer dans nos analyses des crimes financiers avec les banques, sélectionnées en vue de la vérification des transactions. Parce qu'il est, faute d'un meilleur mot, une petite bête à part, il ne fait pas l'objet d'un examen approfondi en matière de conformité comme les organismes d'application de la loi, et les poursuites ne sont pas nombreuses.
Mais heureusement, nos lois prévoyant sanctions sont un outil réellement efficace et elles prévoient également un système de listage des genres d'entités, comme cela se fait pour les organisations terroristes. Si nous en venions à les appliquer un peu plus efficacement, nous constaterions, je le dis franchement, un recul du financement du terrorisme et du blanchiment d'argent.