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TRAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON TRANSPORT

LE COMITÉ PERMANENT DES TRANSPORTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 27 mai 1998

• 1831

[Traduction]

Le président (M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.)): Bonsoir à tous. Tout d'abord, mettons un peu d'ordre ici. La première règle à retenir, c'est que, si vous voulez enlever votre veston ou votre cravate, il fait chaud dans la salle, et plus le prix augmente, plus il fait chaud parfois. Alors, sentez-vous à l'aise. Il en va de même pour nos invités.

Nous sommes heureux d'accueillir ce soir des représentants du Consortium Lynx, et de les accueillir après un très court préavis.

Nous vous sommes vraiment très reconnaissants d'avoir accepté de venir nous rencontrer malgré le court préavis. Comme vous le savez, nous préparons un rapport, et nous voudrions parler du sujet qui vous intéresse dans notre rapport. Vous nous permettrez de le faire en étant ici ce soir.

Nous accueillons M. Jean-Paul Gourdeau, directeur du projet et Mme Ann MacDonald, directrice adjointe du projet, qui nous feront un exposé.

Je crois que vous avez des acétates à nous présenter, ou quelque chose de ce genre.

M. Jean-Paul Gourdeau (directeur du projet, Consortium Lynx): Il s'agit d'une vidéo.

Le président: Très bien.

M. Jean-Paul Gourdeau: La vidéo est de sept minutes, puis nous vous ferons un exposé où nous utiliserons des acétates.

Le président: Très bien. Comme je vous l'ai dit au début, notre comité est très souple. Sentez-vous libres de faire comme vous l'entendez. N'ayez pas peur d'innover. Les membres du comité sont très curieux. Je sais qu'ils auront des questions. Ils ont toujours des questions très utiles.

Vous avez la parole.

M. Jean-Paul Gourdeau: Merci. Voulez-vous que nous vous présentions d'abord la vidéo?

Le président: C'est à vous d'en décider.

Mme Ann MacDonald (directrice adjointe du projet, Consortium Lynx): Nous commencerons par la version française de notre vidéo de cinq minutes pour vous donner une vue d'ensemble du projet, puis M. Gourdeau vous fera un exposé d'une vingtaine de minutes. Après quoi nous serons heureux de répondre à vos questions.

Le président: D'accord.

[Note de la rédaction: présentation d'une vidéo]

• 1839

Le président: On me dit qu'il y a une version anglaise de la vidéo. L'interprétation vous a-t-elle suffit?

M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): Parfaitement; les interprètes ont fait un excellent travail.

Le président: Oui, très bien. Ainsi, tout le monde est satisfait? Merci beaucoup. Nous pouvons continuer.

M. Jean-Paul Gourdeau: Merci, monsieur le président.

Nous voulons vous donner un bref aperçu rapide du projet Lynx et de la façon dont il circulerait sur les rails. Le but de notre rencontre d'aujourd'hui est de vous présenter le projet Lynx, un système de train à grande vitesse dans le corridor Toronto-Ottawa- Montréal-Québec.

Comme vous le savez sans doute, ce projet est à l'étude depuis 1989, alors que les gouvernements du Canada, de l'Ontario et du Québec ont formé un groupe de travail chargé d'examiner différentes options pour le transport des voyageurs dans ce corridor. En novembre 1991, les trois gouvernements ont entrepris une étude comparative entre deux technologies possibles pour la réalisation de cet important projet.

• 1840

En 1995, le rapport de l'étude tripartite concluait qu'un système de train rapide à 300 kilomètres-heure ou plus produit des résultats financiers supérieurs à ceux d'un système à vitesse moindre; que le potentiel de clientèle dans le corridor est suffisant pour maintenir un service de train rapide rentable; qu'un projet entièrement pris en charge par le secteur privé ne serait pas viable et ne pourrait être financé; que le secteur public devra sans doute prendre en charge de 70 à 75 p. 100 des coûts; et que le secteur privé doit prendre l'initiative de l'étape suivante.

En réponse à ce défi et après une période de 18 mois consacrée à l'élaboration du projet, l'équipe Lynx a soumis une proposition le 7 mai 1998 aux gouvernements du Canada, de l'Ontario et du Québec en vue d'implanter un système de transport ferroviaire à grande vitesse dans le corridor Toronto-Québec.

En quoi consiste le projet Lynx? Le projet consiste à concevoir, construire, financer, exploiter et maintenir un système de transport ferroviaire à grande vitesse dans le corridor Toronto- Québec sur une distance de 854 kilomètres, dont la vitesse peut atteindre 320 kilomètres-heure et qui pourrait desservir jusqu'à 20 millions de voyageurs par an.

Je vous présente maintenant des acétates afin de vous donner une vue d'ensemble du projet Lynx, de son impact économique et du financement de la construction du système Lynx.

Qui sont les membres de l'équipe Lynx? Ce sont six grandes entreprises bien connues au Canada: SNC-Lavalin de Montréal, entrepreneur d'ingénierie, et AGRA Monenco de Toronto, s'occuperaient de la gestion de la construction et du projet ainsi que des ouvrages civils ainsi que de l'infrastructure des sites propres guidés; Bombardier et GEC Alsthom seraient responsables du matériel roulant, de l'approvisionnement énergétique, des caténaires et sous-stations électriques, des systèmes de signalisation et de communication et de l'intégration des systèmes; AXOR, de Montréal, et Ellis-Don, de Toronto, seraient chargés des ponts, des bâtiments et des structures. Voilà les membres de l'équipe du projet Lynx.

Le corridor, comme je l'ai déjà indiqué, s'étendra sur une distance de 854 kilomètres. Il y aura 10 arrêts ferroviaires.

Pour ce qui est des voyageurs, nous avons mis à jour l'étude sur le potentiel de clientèle qui avait été faite pour le groupe tripartite. Nous avons fait appel aux mêmes experts-conseils, qui sont de réputation internationale. Voici les chiffres qu'ils nous ont donnés après avoir mis à jour l'étude précédente. Pour la première année d'exploitation, 2008, il y aura 11 millions de voyageurs et, pour la vingtième année, soit 2027, il y en aura 16,4 millions. Dès la première année complète d'exploitation du système, nous aurons 31 rames et, à la vingtième année d'exploitation, nous en aurons 43.

Vous pourriez peut-être donner les détails, Ann, puisque vous êtes plus près.

Mme Ann MacDonald: En ce qui concerne le parcours proposé pour le projet Lynx et la durée des trajets, voici les durées optimales auxquelles nous sommes arrivés à partir du temps de fonctionnement.

Le corridor entre Toronto et Québec est de 854 kilomètres. En partant de Toronto, par exemple, vous voyez que le trajet entre Toronto et Montréal est de 2 heures 21 minutes, avec un seul arrêt. Il s'agirait donc du train express qui quitterait Toronto le matin ou je ne sais trop à quel moment de la journée. Le train qui partira de Toronto ne ferait qu'un arrêt, à la route 13, soit à la gare de banlieue près de Dorval. On a pensé qu'il était très important d'avoir une gare là afin d'attirer la clientèle de la partie ouest de l'île de Montréal.

Ainsi, à Toronto, il y aura une gare appelée Toronto est—pour l'instant nous utilisons un nom générique; il reste à trouver un nom plus évocateur à l'étape suivante—et le train qui partira de Toronto s'arrêtera à Kingston, s'arrêtera ensuite à l'actuelle gare d'Ottawa, puis à la route 13, comme je l'ai dit, et enfin à la gare centrale de Montréal. Il sortira ensuite de Montréal en passant par Laval, et il poursuivra sa route au nord de Trois-Rivières—il n'entrerait pas dans la ville comme tel—s'arrêtant à l'Ancienne- Lorette, puis il arrivera à Québec.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est là le corridor que nous avons choisi parmi les divers scénarios qui avaient été examinés dans le cadre de l'étude tripartite.

• 1845

Si on compare avec la durée du trajet aérien entre Québec et Montréal, le Lynx prendrait 1 heure et 11 minutes. Nous n'avons pas vraiment de comparaison exacte, mais de manière générale, il faut plus de 2 heures pour voyager par avion, du moins c'est l'expérience que j'en ai.

De Montréal à Toronto, c'est 2 heures 21 minutes. Il ne faut pas oublier que le train amène les passagers d'un centre-ville à l'autre, de sorte que si on inclut le temps qu'il faut pour se rendre à l'aéroport du centre-ville—prendre un taxi, arriver 45 minutes à l'avance, se rendre à Toronto et arriver bien souvent très tard, malheureusement, et prendre un taxi—nous estimons qu'il faudrait 3 heures 20 minutes. Pour Toronto, à raison de 1 h 40 minutes, nous prévoyons 2 heures 47 minutes. Pour Ottawa- Montréal, le trajet est de 51 minutes, soit 2 heures 30 minutes en tout.

Nous avons évalué les coûts, et nous les indiquons en dollars de 1997. Le prix moyen d'un aller simple Montréal-Toronto en voiture-coach est de 120 $, comparativement à 292 $, en dollars de 1997. Pour la classe affaires, c'est 167 $ contre 355 $.

Quand on fait la comparaison, il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas de temps d'attente à la gare; l'embarquement est immédiat. On prévoit qu'il y aura un train toutes les heures et que, pendant les périodes de pointe, il y aura un train toutes les demi-heures. Le trajet avec le Lynx est direct, de centre-ville à centre-ville, et les trains express sont plus rapides, la fréquence étant d'une heure en temps normal et d'une demi-heure en période de pointe.

Si nous suivons un échéancier raisonnable pour la deuxième phase... d'après l'échéancier que nous avons à l'heure actuelle, pour Toronto-Ottawa, la construction générale débuterait en septembre 2001 et se terminerait en août 2006; pour Ottawa- Montréal, elle irait de janvier 2002 à janvier 2007; et pour Montréal-Québec, elle irait de juin 2002 à décembre 2007.

Si la construction du tronçon Montréal-Québec se terminera plus tard, c'est notamment à cause d'un problème technique. Certains d'entre vous le savent peut-être, mais il y a une couche d'argile d'environ 160 pieds entre Berthierville et Trois-Rivières. Pour stabiliser le sol et faire en sorte qu'il puisse supporter la charge voulue plus tard, nous devons le précharger avec une charge équivalente à celle qu'il devra supporter en fin de compte, et ce pendant une période de deux ans, avec réduction graduelle par la suite. Même si la construction pouvait raisonnablement débuter au même moment, elle se terminerait néanmoins un an plus tard que la construction du tronçon Toronto-Ottawa.

Comme nous l'avons signalé, le programme Lynx comporte quatre phases. La première, celle du projet d'investissement, est maintenant terminée.

Nous estimons qu'il faudrait passer à la deuxième phase. Nous sommes d'avis qu'il y a eu suffisamment d'études et qu'il faut maintenant passer à l'étape de la mise en oeuvre du projet, qui comprend l'étude d'impact environnemental, l'harmonisation de la législation, l'établissement du coût définitif des travaux de construction et, tous les autres éléments ayant été réglés, l'obtention du financement nécessaire, si bien qu'à la fin de la deuxième phase, si tout le monde était d'accord et que l'hypothèse que nous proposons dans notre projet était confirmée on serait prêt à lever la première pelletée de terre.

La troisième phase serait la construction comme telle et la quatrième phase serait, bien entendu, l'exploitation et la maintenance.

Ce que nous proposons pour l'étape de la mise en oeuvre du projet et de l'obtention du financement nécessaire, le tout devant se faire sur une période de 41 mois, c'est un budget de 102 millions de dollars, qui serait partagé également entre le gouvernement et le secteur privé. Les résultats de cette étape du développement du projet seraient... premièrement, l'échéancier, la clientèle, l'évaluation environnementale, la conception préliminaire. Nous proposons donc de commencer vers la fin de 1998 pour que cette phase se termine en 2001.

Pour ce qui est des résultats, comme je l'ai dit, nous mettrons la dernière main au tracé; nous réglerons la question de l'emprise, nous ferons l'étude d'impact écologique, nous passerons par le processus d'information du public, nous obtiendrons les permis, nous déterminerons les prévisions de trafic d'une qualité acceptable aux investisseurs, nous établirons les critères de conception définitifs et nous confirmerons le coût des travaux de construction, nous mettrons sur pied la structure organisationnelle et le cadre réglementaire et nous obtiendrons le financement voulu. Voilà les résultats ou les tâches qui devront être accomplies pour élaborer le projet et l'amener à un point tel que, si toutes les parties sont d'accord, on pourrait lever la première pelletée de terre.

• 1850

Pour ce qui est de l'impact économique du projet Lynx, nous avons fait appel au Conference Board pour faire une étude des retombées économiques. Les principales conclusions qui se dégagent de l'étude sont que, pendant les phases développement du projet et construction, 175 000 emplois seront créés, et qui se traduiront par des recettes fiscales de 1,9 milliard de dollars en impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés pour les gouvernements, et que plus de 9,3 milliards de dollars de PIB seront générés.

Le projet aura aussi des retombées indirectes, en ce sens que chaque emploi direct attribuable à la phase développement et construction entraînera la création de 1,53 emploi de plus, pour un total de 2,53 emplois pendant cette phase, et que le facteur PIB sera de 2,46.

Une fois la phase de la construction terminée, les chiffres qu'on nous donne pour la phase exploitation et maintenance sont les suivants: 325 millions de dollars de PIB par année plus de 6 000 emplois; des impôts annuels sur le capital et sur le revenu d'au moins 41 millions de dollars, dès le début de l'exploitation entière du système, en plus des revenus de location.

Pour ce qui est de l'impact économique global sur le produit intérieur brut, on a fait une ventilation par région ainsi, l'Ontario, pendant la phase construction et développement, aurait 95 680 nouveaux emplois et son PIB serait enrichi de 5 259 000 $; le Québec aurait 61 635 nouveaux emplois et un PIB enrichi de 3 125 000 $; les autres provinces canadiennes auraient 17 841 emplois et un PIB enrichi de 897 millions de dollars.

Une fois la construction terminée, la phase d'exploitation et maintenance entraînerait la création de 2 846 emplois en Ontario et une augmentation du PIB de 167 millions de dollars; au Québec, le nombre d'emplois serait de 3 306 et l'augmentation du PIB serait de 173 millions de dollars; dans les autres provinces, le nombre d'emplois serait de 225 et l'augmentation du PIB de 12 millions de dollars. Voilà la ventilation des chiffres que nous vous avons donnés précédemment.

C'est qu'il est important de signaler en ce qui concerne le mode de financement proposé, c'est qu'on met l'accent sur... Le gouvernement réalisera un rendement financier réel au-delà du coût à long terme du financement. Chaque dollar qui sera investi dans le projet par les gouvernements sera entièrement remboursé, et les dépenses initiales engagées par les gouvernements sont maintenues à un niveau minimum.

Avec des experts indépendants, nous avons élaboré un modèle financier afin d'en arriver à un «scénario de référence», comme nous disons, où nous décrivons un scénario de financement possible, qui se fonde sur l'hypothèse que le projet serait intégralement financé et que les sommes investies par le gouvernement dans la création d'emplois se traduiraient par un rendement constant. Nous nous rendons bien compte, cependant, que le gouvernement pourrait, au cours des discussions, proposer d'autres scénarios de financement; celui que vous voyez ici est soumis à titre de point de départ des discussions.

Ainsi, l'approche générale se fonde sur un système de transport ferroviaire à grande vitesse dont les modalités de construction, de financement, de prise en charge d'exploitation, de maintenance et de transfert seraient fixées dans un accord de concession de 60 ans conclu avec le secteur privé: l'infrastructure et les ouvrages civils appartiendraient au gouvernement, soit 7,5 milliards de dollars en dollars de 1996; les biens d'équipement et de technologie appartiendraient au secteur privé, soit 3,6 milliards de dollars en dollars de 1996.

Vous voyez ici le schéma de propriété en vertu duquel le gouvernement détiendrait la propriété à 100 p. 100 de l'entité publique de financement, qui serait propriétaire de la sous- structure, de l'infrastructure et des ouvrages civils et qui les louerait à l'entité concessionnaire. Le secteur privé détiendrait la propriété à 100 p. 100 de l'entité concessionnaire, qui non seulement possédera les biens d'équipement, mais qui se chargera de concevoir, de construire, d'exploiter et d'entretenir le système Lynx.

L'entité concessionnaire qui appartiendra au secteur privé conservera essentiellement la propriété des biens d'équipement et de technologie, en assurera le financement et collaborera avec le gouvernement au financement du système dans son ensemble. Le gouvernement conservera la propriété à part entière des biens d'infrastructure et des ouvrages civils par l'entremise d'une société d'État et déterminera la façon dont ces biens seront financés par l'entité publique de financement. L'entité concessionnaire sera chargée de la gestion et de la réalisation de la conception, de la construction, de l'exploitation et de la maintenance du système dans son ensemble.

• 1855

Les dépenses engagées par le secteur privé pour les biens d'équipement et de technologie qui lui appartiendront seront recouvrées à même les liquidités du projet, et les dépenses engagées par le gouvernement pour les biens d'infrastructure et les ouvrages civils seront entièrement recouvrés à même les paiements de location qui seront versés à l'entité concessionnaire et qui feront partie des liquidités du projet.

Par conséquent, l'équipe Lynx invite les gouvernements à former un partenariat entre le secteur public et le secteur privé afin de partager les avantages et les risques entre investisseurs privés et publics. Cette approche favorisera la modernisation de des infrastructures de transport du Canada sans nécessiter d'accroissement d'impôts et sans compromettre les autres éléments des programmes de dépenses publiques.

Nous proposons pour l'instant de mettre en place un processus de collaboration et de consultation intense en vue de la signature d'un accord cadre pour que la deuxième phase du projet soit entreprise conjointement, cette phase devant permettre d'apporter des données solides qui seraient assez convaincantes pour qu'il soit possible de gagner la confiance d'investisseurs de l'extérieur.

L'équipe Lynx et les gouvernements devraient se partager également le coût de la deuxième phase du projet estimée à 102 millions de dollars. La phase de développement du projet et la clôture du financement, qui s'étalera sur 41 mois, comprendra, comme je l'ai déjà signalé, des études environnementales, des prévisions de trafic acceptables aux investisseurs, l'établissement des critères de conception, et des coûts définitifs et l'obtention du financement.

Les mégaprojets réalisés à ce jour le sont trop souvent dans des régions éloignées des centres urbains. Nous croyons que ce mégaprojet aura des retombées économiques considérables, car il sera réalisé dans un corridor de 854 kilomètres situé dans une région où la concentration de population est la plus élevée au Canada. De plus, il ranimera l'intérêt pour le transport voyageurs ferroviaire à l'aube de l'an 2000.

Avant de conclure, nous avons un acétate à vous présenter et j'ai une observation à faire. Je sais qu'il est beaucoup question de VIA Rail. Les gens disent: Qu'en est-il au juste? Eh bien, nous considérons que VIA Rail a un problème majeur, du fait qu'elle n'a pas accès à son emprise. Elle doit accorder la priorité au transport de marchandises. Il est difficile d'exploiter un service- voyageurs quand on doit se plier à l'horaire des trains des marchandises. Il ne faut pas oublier non plus que le transport de marchandises, tout comme les gros camions qui circulent sur nos routes... Il ne fait aucun doute que l'infrastructure ne peut pas ainsi être maintenue dans l'état nécessaire pour assurer un service de transport ferroviaire efficace et rapide.

À moins d'avoir bien en main sa propre infrastructure, VIA ne pourra avoir en système efficace. Or, il nous faut viser l'efficacité. Notre infrastructure doit donc nous permettre d'être efficace.

À l'heure actuelle, tout indique que nous pourrons emprunter au secteur privé 7,5 milliards de dollars pour mener à bien notre projet; cette somme devra évidemment être garantie par le gouvernement. Nous devrons évidemment renégocier certains accords, mais tout laisse croire d'après le modèle qu'il faudra aller chercher 1,2 milliard de dollars en dollars de 1996. Je parle ici de la marge brute d'autofinancement. Je ne parle pas ici de 7,5 milliards de dollars, mais seulement de 1,2 milliard de dollars, ce qui est beaucoup moins que ce que le gouvernement investi annuellement dans VIA Rail.

Tout cela correspond à la conclusion de l'étude tripartite. Vous vous rappelez sans doute que, dans le cadre du projet ABB, on laissait entendre que l'on pourrait édifier un système qui se grefferait à l'infrastructure actuelle. Or, lorsque l'étude a été entreprise entre 1991-1993, il a été démontré que peu importe la vitesse du train, qu'il s'agisse de 105, de 200 ou de 300 kilomètres à l'heure, il faudrait une nouvelle infrastructure. Étant donné que les coûts de l'infrastructure varient peu, plus le train ira vite, et plus il y aura de chance que vos revenus soient élevés. Voilà pourquoi l'étude recommandait que l'on opte pour un train de 300 kilomètres à l'heure, ce qui correspondait aux conclusions antérieures.

• 1900

Voilà pourquoi nous invitons les gouvernements à signer un accord cadre. Nous sommes même disposés à injecter les 51 millions de dollars qui sont nécessaires de concert avec les gouvernements pour confirmer que l'hypothèse formulée et les critères proposés peuvent subir le test de l'évaluation par les gouvernements et par les investisseurs.

Le président: Merci beaucoup. Tout cela était très intéressant, mais nous n'en attendions pas moins.

Je ne veux pas vous retenir plus longtemps. Comme je vous l'ai expliqué monsieur Gourdeau, nous formons un comité d'enquête. Quatre députés m'ont déjà signalé leur désir de vous poser des questions. Je commence par M. Morrison, qui sera suivi de MM. Cullen, Fontana, Calder, Bailey et Mercier.

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Merci, monsieur le président.

Monsieur Gourdeau, je vais vous poser la question que tous les membres veulent vous poser. Si le taux de rendement du capital est aussi intéressant que ce que vous voulez bien nous faire croire, et si ce taux de rendement peut se vérifier, pourquoi demandez-vous l'aide du gouvernement pour mettre en place votre infrastructure? Si votre projet est à ce point intéressant, pourquoi ne mettez-vous pas simplement des obligations en circulation?

Si l'on pouvait établir que le taux de rendement atteindra 12 p. 100, comme l'a signalé la presse, j'ai l'impression que vous pourriez vous adresser aux Canadiens. Dans ce cas, pourquoi vous tourner vers le gouvernement?

M. Jean-Paul Gourdeau: En premier lieu, je crois qu'aucune compagnie canadienne n'a les reins assez solides pour assumer à elle seule un tel financement de 7,5 milliards de dollars. D'ailleurs, c'est ce qu'avait conclu l'étude tripartite.

Il ne faut pas oublier que le coût de tous les projets d'infrastructure—qu'il s'agisse d'aéroports, de routes, ou de quais, notamment—a toujours jusqu'à maintenant été assumé complètement par le gouvernement. Ce que nous suggérons, pour notre part, c'est un partage des responsabilités à raison de 63 p. 100 à 37 p. 100, par exemple, ce qui serait beaucoup mieux pour vous.

N'oubliez pas non plus que notre équipe se propose de financer le montant de 3,6 milliards de dollars, ce qui ne représente pas uniquement le coût du matériel roulant mais aussi des télécommunications, ainsi que l'intégration de systèmes. Ce volet à lui seul est considérable, et le projet ne pourrait être financé par un seul investisseur. Je crois que l'on a avancé comme pourcentage 12,4 p. 100.

Nous croyons que ces chiffres peuvent être validés par les gouvernements et par les institutions financières au cours de la deuxième étape.

Aucune entreprise canadienne ne peut... aucune banque ne consentira de prêt aussi important étant donné l'envergure du projet. Aucune compagnie canadienne n'a les reins assez solides pour justifier un tel investissement à elle seule.

M. Lee Morrison: Revenons à la validation: vous avez dit à la toute fin que la dernière étude de faisabilité coûterait 102 millions de dollars, montant qui serait partagé à égalité entre les gouvernements et votre consortium. J'ai entendu dire quelque part que les accords comportaient une clause portant que si l'étude de faisabilité s'avérait négative, vous vous attendiez à ce que les gouvernements paient la note intégralement. Est-ce exact, ou ai-je été mal informé?

M. Jean-Paul Gourdeau: Ce n'est pas tout à fait exact. En effet, nous avons préparé une analyse de rentabilisation. Nous avons élaboré certains critères; nous avons déterminé le taux de rentabilité, les coûts de construction, ainsi qu'un certain nombre d'autres critères.

Si nous réussissons à respecter ces critères, et si nous pouvons prouver que ce que nous avons proposé et les 51millions de dollars que nous avons pariés sont justifiés, après cela, si le gouvernement décide pour des raisons politiques ou autre en dépit de la solidité de notre position, de ne pas donner le feu vert, et bien dans ce cas, effectivement, nous pensons qu'on devrait nous rembourser, mais pas si nous n'atteignons pas nos objectifs.

M. Lee Morrison: Une dernière question.

Vous projetez que vous aurez 11 millions de voyageurs et que ce chiffre passera ensuite à 15,9 millions. À l'heure actuelle, VIA transporte 3,2 millions de voyageurs, et si je me souviens bien, l'étude tripartite parlait de 5,8 millions. Ce sont de gros écarts. Je pense que la projection la plus élevée que j'ai entendue, c'était le CN ou le CP lorsqu'ils ont comparu, était de 7,5 millions.

• 1905

Quelle sorte de méthodologie avez-vous utilisée pour arriver à ces énormes chiffres? Vous n'avez pas vraiment, d'après ce que vous nous avez dit, entrepris de levée de terrain, alors, d'où viennent ces chiffres.

M. Jean-Paul Gourdeau: Nous avons fait appel aux services de la même compagnie qui avait fait les travaux pour l'étude tripartite, c'est-à-dire SYSTRA, une compagnie européenne. On leur a demandé de mettre à jour leur étude pour tenir compte des événements survenus entre 1991 et 1996. D'après leur évaluation, qui est jugée raisonnable, il faut s'attendre à une clientèle de 11,1 millions de voyageurs.

C'est une autre chose qu'on pourra confirmer pendant la deuxième phase, car il est certain que c'est la clé sur le plan des recettes, mais ce sont là les chiffres que nous ont fournis ces experts indépendants.

Le président: Monsieur Cullen.

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président. Merci, monsieur Gourdeau et madame MacDonald.

Pour commencer, sur une note personnelle, je considère qu'à beaucoup d'égards c'est un projet très séduisant. Mais en fin de compte, c'est une affaire de coût et de considérations économiques, et je vais donc insister sur ces aspects-là en me réservant le droit de poser d'autres questions plus tard.

Monsieur Gourdeau, dans votre exposé, vous dites que le rapport de l'étude sur les trains à grande vitesse avait conclu «Que le secteur public devra sans doute prendre en charge de 70 à 75 p. 100 des coûts». À la ligne suivante, vous dites: «Le secteur privé doit prendre l'initiative de l'étape suivante».

Je n'étais pas ici à l'époque. Est-ce que les gouvernements vous ont dit: «Écoutez, 70 à 75 p. 100 c'est trop» ou encore «C'est trop cher, recommencez vos calculs»? Vous a-t-on dit: «Cela semble assez intéressant, mais nous n'aimons pas la proportion investissements publics et privés, il faut repenser cet aspect-là»? Que s'est-il produit à ce moment-là?

M. Jean-Paul Gourdeau: Cette phrase est tirée du rapport de l'étude tripartite. Nous n'avons rien inventé. Ce que vous avez sous les yeux, ce sont exactement les conclusions de l'étude tripartite: pour que ce projet concrétise, il faudra que les gouvernements paient de 70 à 75 p. 100 des coûts. Cela ne veut pas dire que les gouvernements ont accepté ce principe. C'était la conclusion de l'étude tripartite, je tiens à le préciser.

En second lieu, en fin de compte, ils ont dit que si ce projet se réalisait, le secteur privé devrait faire une proposition, déterminer la marche à suivre et expliquer quel genre de partenariat il recherche. C'est précisément ce que nous faisons en soumettant cette proposition.

M. Roy Cullen: Si j'ai bien compris, dans le cadre de la phase II vous proposez un partage moitié-moitié entre le secteur privé et les gouvernements. Peut-être pourriez-vous nous dire un peu plus tard comment la portion des gouvernements se répartit entre le Québec, l'Ontario et le gouvernement fédéral.

Si j'ai bien compris, le secteur public financerait l'infrastructure et en serait propriétaire, et cela représenterait 7,7 milliards de dollars sur 11,4 milliards de dollars, c'est-à-dire environ 65 p. 100. Donc c'est toujours dans le même ordre d'idée. Est-ce que le coût total en capital a diminué? Est-ce que la dernière fois que vous avez fait vos calculs il s'élevait toujours à 11,1 milliards de dollars, ou bien était-ce plus ou moins?

M. Jean-Paul Gourdeau: Pour donner une comparaison, si je me souviens bien, les coûts de construction s'étaient élevés à 8 milliards de dollars.

M. Roy Cullen: À l'exclusion du matériel roulant...

M. Jean-Paul Gourdeau: Sur la base de l'étude tripartite—à l'époque.

M. Roy Cullen: D'accord. Par conséquent, quand vous dites 11,4 milliards de dollars, ce n'est pas très différent des chiffres à l'époque de l'étude tripartite, n'est-ce pas?

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est juste.

M. Roy Cullen: Que se produira-t-il si les gouvernements passent à la phase II et approuvent votre analyse de rentabilisation? Si nous commençons le projet, comment les choses vont-elles se passer? Dans quelle mesure risque-t-on des dépassements de coûts? Il semble que ces mégaprojets coûtent toujours plus cher que prévu. Que ferions-nous alors, et dans quelle mesure cela affecterait-il les bénéfices internes du gouvernement?

M. Jean-Paul Gourdeau: Je vais essayer de vous expliquer. Je n'ai pas le document sous la main mais nous avons effectivement fait une analyse de ces risques. Dans notre plan financier, nous avons prévu, comment dire, des recours dans une telle éventualité. Cela fait partie de notre plan financier qui comprend une certaine marge pour les imprévus.

Il est vrai que certains projets coûtent beaucoup plus cher que prévu. La seule chose que je puisse vous dire, c'est que des firmes comme Bombardier, et en particulier SNC-Lavalin, ont déjà exécuté de tels projets un peu partout dans le monde, et dans l'ensemble, elles ont la réputation de respecter les budgets prévus. C'est leur réputation.

• 1910

M. Roy Cullen: Très bien. Il y a toutes sortes de détails que nous pourrions examiner si nous le voulions, peut-être à une date ultérieure. Je sais que cela représente des volumes, des masses de matériel, et je n'entrerai pas dans ces détails pour l'instant.

Si vous considérez le taux de rentabilité interne—et je sais que Price Waterhouse a fait ces études pour vous, il s'agit de 12,4 p. 100. D'après ces chiffres, il faut attendre 2020 pour que les liquidités deviennent positives et que les fonds commencent à rentrer. Je ne conteste pas les chiffres de Price Waterhouse, je suis sûr qu'ils sont justifiés, mais quand on considère la valeur de l'argent, quand on considère qu'il faut attendre 20, 30 ou 40 ans pour que le taux de rentabilité ait enfin un effet positif sur les liquidités, je ne sais pas si vous pouvez répondre à cette question.

M. Jean-Paul Gourdeau: Il est certain qu'avec ce type de projets les délais sont très longs. Il est certain que pendant les 10 ou 15 premières années les liquidités ne seront pas aussi importantes que prévues, et il suffit de regarder le graphique pour le voir. Toutefois, ces 12,4 p. 100 sont fondés sur la durée du projet, et c'est le chiffre qu'ils ont calculé.

M. Roy Cullen: Jusque vers 2060 ou 2070, quelque chose comme ça?

M. Jean-Paul Gourdeau: Exactement.

M. Roy Cullen: Monsieur le président, je reprendrai peut-être plus tard. Merci.

Le président: Monsieur Fontana.

M. Joe Fontana (London-Nord-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

Moi aussi, j'ai toujours trouvé les trains à grande vitesse extrêmement séduisants, surtout après certaines expériences que nous avons eues. Il est certain que l'idée d'un train de voyageurs à grande vitesse, en particulier dans le corridor, a beaucoup de mérite. Mais j'ai plusieurs questions à poser et j'aimerais qu'on me donne certaines précisions.

Pour commencer, je trouve que la somme de 110 millions de dollars pour la phase I est un peu excessive.

Une voix: La phase II.

M. Joe Fontana: Je suis peut-être naïf, mais étant donné tout le travail qui a déjà fait par des commissions royales, études tripartites, etc., nous ne manquons pas d'études sur les trains à grande vitesse.

J'ai l'impression que vous demandez 50 millions de dollars au gouvernement pour vérifier certains de vos chiffres. Puis-je me permettre de vous donner un conseil—un conseil gratuit? Avant de dépenser 50 millions de dollars de fonds publics vous feriez beaucoup mieux de résoudre votre principal problème, c'est-à-dire déterminer si les gens seront enclins à financer 7,5 milliards de dollars. Je pense qu'il ne faut pas gaspiller 5c. avant de savoir si les gens seraient d'accord pour financer l'ensemble de cette entreprise.

Je vais vous poser une question, et je crois que mon collègue M. Cullen vous en a posé une similaire: vous vous attendez à ce que le gouvernement assume la totalité des risques en ce qui concerne le financement de l'infrastructure. Cela représente 7,5 milliards de dollars, et de votre côté, vous vous chargerez du matériel roulant, de l'exploitation et de tout le reste. Dans ces conditions, que se passera-t-il si, après que nous ayons construit cette infrastructure, le Lynx a disparu? Qu'est-ce que nous ferons avec cette infrastructure de 7,5 milliards de dollars?

Je vous pose donc la question suivante: pourquoi ne pas partager les risques? Vous avez peut-être raison, le gouvernement est peut-être le seul joueur qui puisse offrir des garanties d'un prêt de 7,5 milliards de dollars. Je ne sais pas ce que vous attendez, je ne sais pas non plus si le secteur privé peut en assumer une part, mais pourquoi n'assumez-vous pas une partie du risque sur le plan de l'infrastructure également, au lieu d'intervenir seulement en fin de projet, c'est-à-dire avec le matériel roulant et tout le reste? Vous aurez peut-être une réponse à cette question.

Deuxièmement, par le passé nous avons appris que la majeure partie des voyageurs seront les clients des compagnies aériennes. Il ne faut pas se faire d'illusions. C'est ce qui s'est produit en France, c'est ce qui s'est produit en Grande-Bretagne, et c'est ce qui va se produire ici. Si on considère les prix et la durée des trajets, qui voudra encore monter à bord d'un avion quand les trains à grande vitesse offrent une solution si intéressante?

À votre avis, quelle sera la réaction des compagnies aériennes, d'autant plus qu'on nous accusera de subventionner l'entreprise. D'une façon ou d'une autre, le fait est certain, le gouvernement va subventionner un mode de transport et non pas un autre, alors que depuis un certain temps il cherche à faire disparaître les subventions des ports, des aéroports, etc.

C'est donc une grosse question, une question préoccupante, et j'aimerais savoir quelle sera, à votre avis, la réaction des compagnies aériennes. Elles ne vont certainement pas siffloter de plaisir ni dire que c'est la meilleure chose depuis l'invention du fil à couper le beurre, car du jour au lendemain, vous allez leur enlever la moitié de leurs clients entre Toronto et Montréal. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

• 1915

Deuxièmement, en ce qui concerne...

Le président: Voulez-vous qu'il réponde à ces deux questions?

M. Joe Fontana: Non, je vais poser mes questions d'abord car je veux être certain qu'elles sont posées. Ensuite, il pourra prendre son temps pour y répondre.

Troisièmement, en ce qui concerne...

Le président: Vous avez présidé la séance hier soir, pourquoi ne pas la présider encore ce soir?

Des voix: Oh, oh!

M. Joe Fontana: Troisièmement, en ce qui concerne VIA, je ne suis pas certain d'être d'accord avec vous au sujet de l'accès. En effet, nous avons eu l'occasion d'en discuter en comité, et il est certain que VIA a un rôle à jouer. À votre avis, que va devenir VIA quand vous aurez commencé à rouler? J'aimerais savoir combien de gens pourront bénéficier du service, est-ce que vous aurez des arrêts en cours de route? Dans d'autres pays, on utilise des trains à grande vitesse, mais en plus, un système de transport par rail pour les trajets où il faut faire beaucoup d'arrêts.

Je ne suis pas d'accord avec votre position sur l'accès. Ce comité passe énormément de temps à s'assurer que l'accès existe, même s'il s'agit d'une infrastructure privée. En fin de compte, quel sera le rôle de VIA, et également des compagnies aériennes.

Mais ma principale question, je le répète, porte sur le financement. J'ai besoin qu'on me rassure. Si ce projet est tellement merveilleux, M. Morrison vous a demandé pourquoi vous ne pouvez pas trouver la totalité des fonds dans le secteur privé? Il n'est pas nécessaire que ce soit exclusivement au Canada. Je suis certain qu'il y a beaucoup d'investisseurs dans le monde qui cherchent des occasions de réaliser 12,4 p. 100.

Je vous avouerai que je suis intrigué, mais j'ai tout de même beaucoup de questions au sujet de l'investissement. J'aime beaucoup l'idée d'un train à grande vitesse, et je pense qu'un tel projet a sa place au Canada. Toutefois, il y a beaucoup de travail à faire, et j'aimerais que ce travail soit fait avant que quelqu'un soit forcé de débourser 110 millions de dollars, moitié-moitié, pour avoir ces réponses.

M. Jean-Paul Gourdeau: Je vais essayer de répondre à vos questions.

Premièrement, en ce qui concerne l'infrastructure, effectivement, il est normal que le gouvernement exige une garantie d'exécution du projet, mais souvenez-vous que dans notre proposition nous disons que nous confirmerons le prix et que nous soumettrons un prix ferme. Dès que nous aurons soumis un prix ferme, nous verserons un cautionnement d'exécution, il y aura une clause de dommages-intérêts prédéterminée, et tout cela entrera en jeu avant la garantie d'exécution. Donc ces compagnies devront miser sérieusement. Voilà donc pour une chose: effectivement, nous assumerons les risques en ce qui concerne la construction de l'infrastructure.

Votre deuxième question portait sur les compagnies aériennes. Vous dites que c'est une forme de subvention. Qui a payé les aéroports? Les compagnies aériennes? C'est une infrastructure également.

M. Joe Fontana: Oui, mais maintenant, cela a été remboursé sous forme de frais d'utilisation.

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui, et de notre côté, nous rembourserons sous forme de frais d'utilisation lorsque le projet aura démarré. C'est le même principe.

Il est facile de transférer un aéroport. Avec un avoir qui vaut... Je ne sais pas, prenez l'exemple de Dorval ou de Toronto. Combien cela vaut-il quand c'est une entreprise qui roule depuis 20 ans? À ce moment-là, il est facile d'emprunter. Par contre, si vous commencez à zéro, si vous devez édifier une entreprise, d'une part l'infrastructure et ensuite l'entreprise même, c'est une position assez différente.

Quand vous dites que c'est une subvention, il faut comparer avec quelque chose d'équivalent.

Votre dernière question portait sur les compagnies aériennes. Oui, il ne faut pas se leurrer... Si vous considérez Paris et l'Euro-tunnel, les chiffres ne mentent pas: après sept mois d'exploitation le trafic aérien entre Paris et Londres avait diminué de 50 p. 100. D'un autre côté, il faut se rendre compte que le moyen de transport de base... Et à l'heure actuelle, avec la déréglementation et tout ce qui se passe dans ce secteur, les compagnies aériennes vont continuer à gagner beaucoup d'argent.

Si vous voulez un système intégré, il faut avoir les deux. Un service VIA ou un train grande vitesse, ce mode de transport est excellent pour les trajets de 300 à 400 milles. Au-delà, ce sont les compagnies aériennes qui reprennent. Si vous voulez un système intégré qui fonctionne bien et qui soit efficace, c'est peut-être un aspect à considérer.

M. Joe Fontana: Et VIA?

• 1920

M. Jean-Paul Gourdeau: Nous ne les excluons pas. Au contraire, nous avons eu des discussions avec eux. Ils connaissent notre proposition. Nous en avons discuté. Je pense que les deux seront complémentaires dans de nombreux cas à cause de toutes les lignes secondaires qui viendront se greffer sur le système à grande vitesse. Nous sommes tout à fait disposés à discuter. C'est un élément de l'efficacité du système entre Québec et Toronto.

Le président: Monsieur Calder.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

J'aimerais faire le point rapidement. Ce dont nous parlons, c'est une voie de 854 kilomètres et un train qui circule à 300 kilomètres à l'heure. Il s'agit d'une voie entièrement nouvelle? Est-ce qu'on envisage de racheter certains éléments de la catégorie 1 actuelle?

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est une voie entièrement nouvelle.

M. Murray Calder: D'accord. Autrement dit, vous allez percer une emprise tout à fait nouvelle de Windsor à Montréal. C'est ce que vous proposez.

M. Jean-Paul Gourdeau: Dans toute la mesure du possible, nous voulons utiliser l'emprise actuelle du CP et du CN. Nous l'utiliserons partout où cela est possible.

Quand je dis dans toute la mesure du possible, il y a un gros problème de géométrie. Quand on circule à 320 km à l'heure, la courbe des voies n'est pas la même qu'à 40 km à l'heure. Par conséquent, à certains endroits il va falloir sortir de l'emprise actuelle à cause de la géométrie. La plupart du temps, et en particulier entre Québec et Montréal, nous utiliserons l'emprise existante. C'est le CP de l'autre côté, et je pense que c'est disponible.

Entre Montréal et Saint-Eustache la voie a été modernisée. À l'endroit où on traverse le fleuve, il y a une voie abandonnée que nous utiliserons.

Nous utilisons le plus possible la voie existante, mais nous allons devoir l'adapter pour des raisons de géométrie.

M. Murray Calder: Il est certain qu'à certains endroits vous allez devoir percer une nouvelle emprise car il n'y en a pas à l'heure actuelle.

M. Jean-Paul Gourdeau: Exactement.

M. Murray Calder: D'accord. En ce qui concerne l'infrastructure de 7,5 milliards de dollars dont vous parlez, que se produira-t-il s'il y a des gens qui se trouvent sur le chemin de l'emprise et qui refusent de vendre leur maison? Cela risque de s'éterniser en poursuites devant les tribunaux. Dans quelle mesure ce chiffre de 7,5 milliards de dollars ne va-t-il pas changer?

M. Jean-Paul Gourdeau: Nous pensons que c'est un chiffre très ferme. Nous le jugeons raisonnable. Évidemment, nous sommes prêts à confirmer cela et à donner un chiffre ferme.

M. Murray Calder: Est-ce qu'il y a déjà un endroit au Canada où il est possible de faire des essais avec un TGV?

M. Jean-Paul Gourdeau: Pas vraiment, pour l'instant, parce que le TGV exige une certaine densité de population et une certaine distance pour être concurrentiel. Le tronçon Québec-Montréal- Ottawa-Toronto est probablement le meilleur à cause de la densité de la population et des problèmes de circulation qui existent dans certaines régions. Nous pensons que c'est le meilleur moyen, et c'est la raison pour laquelle on a choisi ce corridor.

M. Murray Calder: Autrement dit, si nous réalisons ce projet, si nous avions cette voie de 854 km et ces trains qui circulent à 300 km à l'heure, ce serait un endroit tout désigné pour mette à l'essai de nouveaux types de trains, n'est-ce pas?

M. Jean-Paul Gourdeau: J'imagine. Cela dépendrait du type de train, mais effectivement, cela pourrait permettre d'autres essais.

M. Murray Calder: Merci, monsieur le président.

Le président: Monsieur Bailey.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Merci, monsieur le président.

J'ai un certain nombre d'observations; je vais les faire d'abord, après quoi vous pourrez peut-être les regrouper et me dire ce que vous en pensez.

Au début de nos discussions, nous parlions de la section centrale, et au départ, nous avions notre petite définition à nous de la section centrale: Windsor-Québec. La proposition que vous nous apportez aujourd'hui porte sur Toronto-Québec, j'aimerais que vous nous expliquiez la raison tout à l'heure.

Vous avez choisi le centre, c'est-à-dire la région la plus peuplée du Canada, et par conséquent, la plus grosse concentration de clientèle, etc. Est-ce que vous avez réfléchi aux possibilités dans d'autres régions du Canada, ou bien n'avez-vous considéré que celle-ci? Voilà pour une question.

• 1925

J'ai lu votre dépliant. De toute évidence, vous avez parlé aux maires des villes, il y a même leur photographie. Vous avez soumis votre proposition aux provinces, à l'Ontario et au Québec. D'après cela, elles ont approuvé, mais est-ce qu'elles en ont profité pour ouvrir leur portefeuille?

Dans votre introduction, vous nous avez dit que les provinces pouvaient s'attendre à des avantages pécuniaires tout comme vous. Avez-vous eu ce genre de discussion?

Pourquoi vous adresser uniquement au gouvernement fédéral pour trouver de l'argent alors que le gouvernement fédéral représente des régions où il n'y a pas le moindre train de voyageur? Étant donné que l'argent serait fourni par tout le Canada, je pense que vous devez absolument vous tourner vers ces deux provinces qui ont environ 75 p. 100 de la population totale du Canada. Si vous réussissiez à les intéresser, vous ne vous heurteriez pas au genre d'opposition que vous risquez de rencontrer ailleurs avec cette proposition.

Dans votre dossier, vous dites que la majeure partie de vos clients seront les clients des compagnies aériennes, mais à cette vitesse-là, il y en aura aussi beaucoup qui abandonneront la route.

Je vous poserai d'autres questions plus tard, mais en attendant, j'aimerais que vous répondiez à celle-ci.

M. Jean-Paul Gourdeau: À propos de Windsor, à tort ou à raison, nous avons décidé qu'il fallait prendre la décision sur la base d'un certain parcours. Nous avons pensé que c'était le plus susceptible... Nous avons donc pris une décision sur, mettons le parcours Québec-Toronto. Windsor n'est pas exclu si le gouvernement et la population souhaitent que nous allions jusque-là, mais pour l'instant, nous avons concentré nos efforts sur la portion Québec- Toronto.

Quant aux autres gouvernements nous avons effectivement soumis notre proposition aux trois gouvernements, le gouvernement fédéral, et les deux gouvernements provinciaux, l'Ontario et le Québec. Elle a été soumise aux trois gouvernements.

Ce n'est pas à nous de décider comment ils partageront. C'est à deux d'en décider entre eux. C'est une affaire tripartite. Les trois gouvernements vont devoir considérer le projet ensemble et décider de la portion de chaque. Nous ne sommes pas au courant, et nous n'avons nullement l'intention de décider pour eux.

M. Roy Bailey: Sera-t-il possible d'avoir un troisième niveau? Il y a deux grandes villes qui sont en cause. Vous avez contacté les paliers fédéral et provinciaux, mais qu'en est-il des municipalités?

M. Jean-Paul Gourdeau: Il faut commencer quelque part, nous avons donc commencé avec les trois gouvernements. Si le gouvernement du Québec souhaite s'adresser aux municipalités, il peut le faire. Cela n'a rien de nouveau, vous savez très bien qu'avec les taxes... de plus en plus les gouvernements provinciaux se déchargent sur les municipalités. Ce n'est pas à nous de décider comment ils s'arrangeront, c'est à eux, mais la proposition a été soumise aux trois gouvernements.

M. Roy Bailey: Merci.

[Français]

Le président: Je vous remercie.

M. Paul Mercier (Terrebonne—Blainville, BQ): Monsieur Gourdeau, j'ai trois questions.

Je suis très favorable au TGV et j'aimerais avoir des arguments pour répondre à ceux qui me diraient que le modèle suédois ABB ou le modèle allemand ICE serait évidemment moins rapide, mais coûterait moins cher. Je vous le dis avec raison, et j'en suis sûr: quand la vitesse augmente, la clientèle augmente aussi, mais pas nécessairement linéairement. Une augmentation de 30 p. 100 de la vitesse provoque une augmentation de clientèle inférieure à 30 p. 100.

Est-ce qu'on peut imaginer un point d'équilibre où l'on aurait des trains moins rapides comme ICE ou ABB et beaucoup moins coûteux, notamment en infrastructure, ce qui pourrait séduire le gouvernement, qui aura la charge des infrastructures? Même si la clientèle était moins nombreuse, ces trains coûteraient beaucoup moins cher et, du point de vue des seuls coûts d'infrastructure, le gouvernement pourrait peut-être les préférer.

M. Jean-Paul Gourdeau: Le seul commentaire que je puisse faire à ce sujet, c'est que la question du TGV a été soulevée en 1989. À l'époque, Bombardier et d'autres compagnies ont voulu faire une offre pour la construction d'un train rapide. La firme ABB est arrivée et a soumis une offre dans laquelle elle affirmait qu'elle était capable de construire un train voyageant de 100 à 150 kilomètres/heure à un coût bien inférieur à celui du TGV puisqu'elle pouvait utiliser les mêmes infrastructures.

• 1930

L'étude tripartite réalisée conjointement par les trois gouvernements de 1991 à 1995 en est venue à des conclusions tout à fait différentes. Elle a conclu qu'il fallait une infrastructure, que son coût était sensiblement le même et que, de ce fait, il était plus économique et plus viable d'avoir un train dont la vitesse pouvait atteindre 300 kilomètres/heures. Plus vous allez vite, mieux c'est, et il est préférable et plus rentable d'avoir un train dont la vitesse atteint 300 kilomètres/heure. Ce n'est pas moi qui le dit, ni le TGV. C'est ce qu'affirme l'étude tripartite qui a déjà été faite.

M. Paul Mercier: Quand je regarde le tracé entre Montréal et Ottawa dans votre très beau document, je constate que vous quittez la rive nord aux environs de Carillon pour passer sur la rive sud. Sur la rive nord, il existe l'emprise du CP que vous auriez pu utiliser. Pour quelle raison changez-vous de rive à Carillon?

M. Jean-Paul Gourdeau: Au début, nous avions examiné les deux possibilités. Pour des raisons économiques, nous avons recommandé que le train traverse la rivière à Carillon puisqu'il y a actuellement un tracé abandonné, disponible, plus droit et qui présente moins de problèmes. Comme nous le disons dans notre document, il s'agit d'une base de discussion. Si les gouvernements veulent faire des modifications, on évaluera le coût d'un différent tracé. Nous croyons que ce serait légèrement plus coûteux si le train voyageait de l'autre côté, et c'est ce qui justifie notre choix.

M. Paul Mercier: Vous desservez L'Ancienne-Lorette, donc l'aéroport de Québec. Ne serait-il pas séduisant que vous desserviez aussi Dorval, Mirabel et Pearson? On parlait de complémentarité entre les réseaux aérien et ferroviaire. Est-ce que cette complémentarité ne serait pas bien desservie si vous passiez par l'un des deux aéroports de Montréal et par celui de Toronto?

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est une possibilité, bien qu'à L'Ancienne-Lorette, la distance qui nous sépare de l'aéroport soit la même que celle entre notre station de la route 13 et l'aéroport de Dorval. Il nous semble moins cher et plus rapide d'avoir recours à une navette de transport léger plutôt qu'à un train à grande vitesse pour se rendre à ces endroits. Cela représenterait des coûts supplémentaires. C'est la même chose à Toronto. Nous nous rendons jusqu'au centre-ville. Par la suite, si les gens le désiraient, nous pourrions certainement continuer jusqu'à l'aéroport. Nous pensons toutefois qu'une navette transport léger entre l'aéroport et Union Station serait moins coûteuse.

M. Paul Mercier: Merci.

M. Jean-Paul Gourdeau: Ce sont tous des sujets qui pourront faire l'objet de discussions.

Le président: Monsieur Rocheleau.

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Félicitations, monsieur Gourdeau, pour votre exposé. J'ai deux types de questions.

Puisque je suis député du comté de Trois-Rivières, vous comprendrez sûrement l'intérêt que je porte à ce dossier. Je vous félicite d'ailleurs parce que d'après ce que vous présentez, le scénario de la rive nord semble être privilégié. Est-ce qu'on peut tenir pour acquis que ce scénario est coulé dans le béton et que si jamais il y a un TGV, il voyagera sur la rive nord? Est-ce que cela sous-entend que le lobby tout à fait légitime de la rive sud est chose du passé ou pourra-t-il y avoir des changements?

Si le train passe par la rive nord, est-ce qu'on peut tenir pour acquis qu'il arrêtera à Trois-Rivières? Si tel est le cas, arrêtera-t-il à la gare actuelle ou si on a prévu d'autres scénarios?

Une voix: Et à quelle heure?

Des voix: Ah, ah!

M. Yves Rocheleau: Et à quel prix? Lorsque vous avez parlez du tronçon, vous avez soulevé un problème d'argile. J'aimerais savoir où est située cette nappe d'argile et quelle est son étendue. Cette question est propre au tronçon.

J'ai deux questions relativement au projet lui-même. Qu'est-ce qui arrivera au bout de 60 ans? Vous avez abordé rapidement cette question. À qui le système appartiendra-t-il? Si j'ai bien compris, vous avez dit que si le projet ne se réalise pas après l'étude de faisabilité, qui aura coûté 102 millions de dollars, soit deux fois 51 millions de dollars, l'entrepreneur privé exigera que le gouvernement le rembourse. Comment justifiez-vous un tel raisonnement?

M. Jean-Paul Gourdeau: Premièrement, comme vous le savez, la rive sud est très encombrée par les trains de marchandise et VIA Rail veut déménager sur la rive nord. Ce n'est pas un secret, et je pense que ses représentants vous l'ont dit. Si on veut avoir une voie économique et non encombrée, la rive nord présente des avantages. C'est pour cela qu'on l'a choisie.

• 1935

Deuxièmement, oui, nous arrêtons à Trois-Rivières. Le trajet que nous avons proposé ne passe pas par la gare, au centre; il passe légèrement au nord.

M. Yves Rocheleau: Un nouveau tracé.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est cela.

Pour ce qui est de la question de la glaise, on l'appelle la glaise de la mer de Champlain. On en trouve à partir d'un peu avant Trois-Rivière jusqu'à l'autre côté de Berthierville. Il y a de la glaise jusqu'à une profondeur de 160 à 170 pieds. Donc, il faut faire quelque chose. On ne peut l'éviter.

M. Yves Rocheleau: Dans la région du lac Saint-Pierre.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est ça. Au bout de 60 ans, le gouvernement sera propriétaire de l'infrastructure. C'est une concession. Donc, s'il la veut, elle sera à lui, à moins qu'il y ait une négociation et un transfert. C'est une nouvelle négociation, mais au bout de 60 ans, l'infrastructure sera à lui. On n'a pas acheté, mais loué.

M. Yves Rocheleau: Je voudrais savoir si, après l'étude de faisabilité...

M. Jean-Paul Gourdeau: Ah, oui. Nous sommes prêts à investir 50 millions de dollars pour l'étude et nous avons établi certains critères et certains principes. Si ces principes sont validés et retenus, nous aurons fait notre travail et le gouvernement devra aller de l'avant avec le projet. Il devra nous rembourser seulement s'il décide de ne pas le réaliser, cela pour des considérations politiques. Cependant, s'il est démontré que les chiffres qu'on a avancés ne tiennent pas, les 50 millions de dollars, ce sera fini pour nous aussi.

M. Yves Rocheleau: Si je comprends bien, s'il est démontré que c'est faisable et intéressant dans l'intérêt public et qu'il n'y a pas de volonté politique d'aller plus loin, vous exigerez d'être remboursés.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est cela, parce qu'à ce moment-là, ce serait hors de notre contrôle.

M. Yves Rocheleau: Mais si on démontrait la non-rentabilité du projet, vous n'exigeriez pas d'être remboursés.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est cela.

M. Yves Rocheleau: D'accord. Autrement dit, s'il y avait une forme d'arbitraire négatif de la part du gouvernement, vous ne voudriez pas payer pour ça.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est cela, parce que ce serait hors de notre contrôle.

Mme Ann MacDonald: Il y a des critères très clairs qui sont établis, auxquels on doit répondre, ainsi que des étapes précises. Chaque fois qu'on répond à un critère avec succès, on continue. Donc, il y a des étapes. On ne passe à travers le tout d'un seul coup.

M. Yves Rocheleau: Comme résidants de la rive nord, pouvons-nous tenir pour acquis qu'il est à peu près impossible que cela se fasse sur la rive sud?

M. Jean-Paul Gourdeau: Je ne dirai jamais: fontaine, je ne boirai pas de ton eau. Je ne peux pas dire que c'est impossible. On ne sait jamais ce qui peut se produire. Étant donné que je ne suis pas devin, je ne peux pas vous dire que c'est impossible. On ne sait jamais ce qui peut se passer.

M. Yves Rocheleau: Mais quelles sont les probabilités?

M. Jean-Paul Gourdeau: Disons que c'est l'endroit logique. C'est tout ce que je peux vous dire en fonction de ce que nous connaissons présentement. Est-ce que cela va changer? Je ne le sais pas.

M. Yves Rocheleau: Merci.

Le président: On peut maintenant passer de la rive nord à la rive sud. Monsieur Drouin.

Des voix: Ah, ah!

M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Disons que mon intérêt pour le TGV a beaucoup diminué.

Des voix: Ah, ah!

M. Claude Drouin: Sérieusement, monsieur Gourdeau, je pense que c'est bien qu'une étude soit payée moitié-moitié. Dans la foulée de ce que mes collègues disaient précédemment, je dirai qu'on devrait y aller à 50-50 pour le projet global. Vous dites que le gouvernement a payé les infrastructures des aéroports, mais on a vu ce que cela a coûté et on est maintenant obligé de s'en retirer. Il ne faut pas répéter les erreurs du passé. Si le projet est viable et qu'il est si rentable, je pense qu'il serait envisageable pour vous de vous y engager, quitte à aller chercher d'autres partenaires s'il y a lieu pour amasser les 50 p. 100 nécessaires, ce qui, dans la population, donnerait encore plus de crédibilité au projet et nous aiderait, nous, membres du gouvernement, à aller de l'avant avec un projet qu'on trouve des plus intéressants et qui, j'en suis convaincu, serait un avantage pour le Canada.

Bien sûr, vous avez fait un scénario, car on fait toujours un scénario, mais normalement, les compagnies cherchent toujours à faire un deuxième scénario.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est pour cela qu'il y a eu certains retards. Les compagnies actuellement concernées prennent un engagement assez ferme. Elles disent deux choses: elles sont prêtes à mettre 51 millions de dollars sur la table, et c'est déjà beaucoup; deuxièmement, elles sont prêtes à financer les 3,6 milliards de dollars. Quand ces compagnies prennent cet engagement, ce n'est pas pour les beaux yeux de la reine. C'est parce qu'elles sont prêtes à prendre cet engagement.

• 1940

Je ne pense pas qu'on puisse aller plus loin à ce stade-là. En fait, j'en suis même convaincu. Il va falloir que le gouvernement se décide. Est-ce qu'on veut avoir un système de transport intégré au Canada ou si on veut avoir simplement deux modes de transport: l'avion et la route, avec l'autobus? Actuellement, le système est fait de telle façon qu'il tue le rail à petit feu, cela depuis environ 20 ans.

Regardez les autres pays du monde. Même les États-Unis, qui ont tué leur chemin de fer vers le début des années 1970 avec Pennsylvania Railroad, alors que tout le monde a fait faillite, ont recommencé. Il y a maintenant un achalandage qui est de beaucoup supérieur à ce qu'il était, et ils ont le train. Pourquoi? Parce qu'ils donnent un service.

Prenons simplement un petit service comme Montréal—Deux-Montagnes. Au début, on se disait qu'on serait chanceux si on avait un achalandage de 25 000 au bout de cinq ans. Un an et demi plus tard, on avait dépassé les 25 000. Quand vous fournissez un service, les gens prennent le train. Alors, est-ce que vous voulez réellement avoir un système de transport intégré? Pour avoir un système de transport intégré, il faut avoir le rail, l'avion et l'automobile. Actuellement, vous en avez en réalité deux.

M. Claude Drouin: Vous parlez d'intégration. Est-ce qu'on ne devrait pas, comme le disait M. Mercier, faire passer le train aux aéroports? À ce moment-là, on aurait une véritable intégration parce qu'il y aurait un carrefour.

M. Jean-Paul Gourdeau: Le train pourrait y passer ou on pourrait faire une navette, qui serait très facile à installer.

M. Claude Drouin: Est-ce que cela fait partie de...

M. Jean-Paul Gourdeau: Cela fera partie des discussions que nous aurons avec les gens concernés.

M. Claude Drouin: Vous ne vous êtes pas arrêtés là-dessus. C'est un point important.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est sûr.

M. Claude Drouin: Merci, monsieur le président.

Le président: Ceci termine le premier tour. Au deuxième tour interviendront M. Cullen, M. Morrison et M. Fontana.

[Traduction]

M. Roy Cullen: Merci, monsieur le président.

Monsieur Gourdeau, pour revenir aux chiffres, les rentrées que vous avez calculées sur la base du taux de rentabilité interne ne sont pas les seules rentrées à considérer. Il y a aussi les impôts sur le revenu et toutes les recettes indirectes du gouvernement, n'est-ce pas? Il n'y a pas seulement ce que rapporte le projet?

M. Jean-Paul Gourdeau: À 12,4 p. 100, vous avez le paiement des concessions, le capital et l'impôt sur le revenu produit directement par le projet. On ne parle seulement que des revenus directs, on ne parle pas des rentrées indirectes.

M. Roy Cullen: Directes, pas indirectes.

M. Jean-Paul Gourdeau: En effet, nous avons trouvé que les rentrées indirectes étaient trop complexes, trop ésotériques.

M. Roy Cullen: D'accord, je pense que c'est une bonne décision.

Des voix: Oh, oh!

M. Roy Cullen: Nous risquons même d'avoir des problèmes avec les rentrées directes. Non, c'est probablement un calcul justifié.

Vous dites que l'allocation des concessions par le gouvernement ou les gouvernements est liée aux liquidités, et dans votre exposé vous avez utilisé le mot «subordonné». Est-ce que c'est un oubli ou avez-vous ajouté plus de détails plus tard?

M. Jean-Paul Gourdeau: Si vous examinez notre exposé, vous verrez qu'il y a une hiérarchie du financement.

M. Roy Cullen: Oui.

M. Jean-Paul Gourdeau: Pour commencer, il faut payer l'impôt sur le revenu et la taxe sur les produits et services. Ensuite, il y a les frais d'exploitation et de maintenance, puis le matériel et le service de la dette technologique. Ensuite, une rentabilité minimum, et quand on arrive au bout, 85 p. 100 du liquide qui reste est transféré aux gouvernements et 15 p. 100 sont versés aux compagnies sous forme de dividendes.

M. Roy Cullen: Autrement dit, les compagnies profiteraient d'un certain taux de rentabilité avant qu'on distribue le reste de l'argent aux gouvernements? C'est bien ça?

M. Jean-Paul Gourdeau: Non, non. La base des 12,7 p. 100 de ce financement public, c'est cet argent plus le capital direct et l'impôt sur le revenu.

M. Roy Cullen: D'accord.

Vous savez que le gouvernement du Canada a un programme qu'on appelle Programme de partenariats technologiques qui a remplacé l'ancien PPIMD, qui était le Programme de productivité de l'industrie du matériel de défense. Ce programme a remplacé les prêts et subventions par des investissements. Pensez-vous que votre cas appartienne plutôt à la catégorie des investissements? Autrement dit, est-ce que les gouvernements peuvent espérer certains avantages? Vous parlez de l'an 2023, et vous dites qu'à ce moment-là le gouvernement aura la possibilité de privatiser. C'est une possibilité. Par contre, si les gouvernements pensent que c'est une bonne affaire, ils voudront peut-être rester dans le coup et toucher les...

• 1945

M. Jean-Paul Gourdeau: Ils peuvent le faire.

M. Roy Cullen: ... leur taux de rendement pourrait en théorie augmenter à 15 ou 20 p. 100.

M. Jean-Paul Gourdeau: À long terme, oui.

M. Roy Cullen: Vous diriez qu'il s'agit alors d'un investissement, non pas d'un prêt, n'est-ce pas?

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est ainsi que je le considère depuis le début, comme un investissement.

M. Roy Cullen: Cela veut dire qu'en l'an 2023—le gouvernement n'est pas obligé de vendre à quelque moment que ce soit.

M. Jean-Paul Gourdeau: Non, seulement s'il le souhaite.

M. Roy Cullen: La phase II—je pense que vous avez répondu à cette question pour ce qui est de la façon dont la tranche de 50 p. 100 des 102 millions de dollars serait répartie entre les gouvernements. Ce qui serait négocié entre les divers paliers de gouvernement, n'est-ce pas?

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui.

M. Roy Cullen: Vous n'avez donc pas de point de vue sur la question.

M. Jean-Paul Gourdeau: Je ne voudrais pas me prononcer sur la question. C'est aux trois paliers de gouvernement de décider quelles seront leurs parts respectives. Ce n'est pas à moi de vous le dire.

M. Roy Cullen: Je n'ai qu'une dernière question.

Mon collègue M. Fontana et moi-même avons abordé la question du rôle de VIA. Nous songeons à un tout nouveau réseau ferroviaire de transport voyageurs et nous avons également songer au TGV ou à ce projet Lynx dans ce contexte. Disons que si les gouvernements décidaient de donner suite à cette proposition, à votre avis, est- ce que VIA aurait un rôle à jouer en tant que service voyageurs de transport ferroviaire normal dans le corridor, ou est-ce que ce projet le ferait tout simplement disparaître?

M. Jean-Paul Gourdeau: VIA ne disparaîtrait pas entièrement. C'est quelque chose qui peut être négocié.

M. Roy Cullen: Oui, mais pourriez-vous nous en parler davantage? On me présente tout à coup une option peu coûteuse et très rapide. Pourquoi diable choisirais-je VIA?

M. Jean-Paul Gourdeau: Je pense que VIA aura toujours—écoutez, toutes les lignes secondaires sont toujours là. N'oubliez pas que VIA n'est pas seulement un service entre Québec et Toronto. VIA est partout au Canada. VIA a toutes les lignes secondaires si bien qu'elle aura toujours un rôle à jouer dans toutes ces régions.

Pour ce qui est du corridor Québec-Toronto, si on veut vraiment avoir un réseau efficace, nous disons que c'est ce qu'il faut faire.

Même si on voulait inclure VIA—permettez-moi de ne pas être d'accord avec M. Fontana—il faut avoir une emprise ferroviaire spécifique pour avoir un réseau efficace.

M. Roy Cullen: En réalité, si le projet se réalise, VIA n'aura aucun rôle à jouer réellement dans le corridor, n'est-ce pas?

M. Jean-Paul Gourdeau: Il ne fait aucun doute que si ce projet est mis à exécution et que tout le monde décide que VIA ne devrait pas participer, ce sera le cas, mais je pense que ce serait regrettable. VIA a des compétences. Je suis certain qu'on pourrait envisager la participation de VIA. C'est quelque chose qui peut être négocié plus tard.

M. Roy Cullen: Donc vous pensez que VIA serait peut-être intéressé à participer au projet?

M. Jean-Paul Gourdeau: Je ne sais pas. C'est à VIA à décider, mais nous disons que nous sommes ouverts à cette possibilité.

Le président: Monsieur Morrison.

M. Lee Morrison: Je croyais avoir compris le taux de rendement de 12,4 p. 100 que vous avez calculé il y a deux minutes, mais maintenant je patauge. Il va falloir que vous m'expliquiez tout cela, monsieur Gourdeau.

Je voudrais savoir exactement quel est ce taux de rendement de 12,4 p. 100 qui est prévu? Est-ce si le gouvernement fait cet investissement? Est-ce que cela comprend les recettes du gouvernement en provenant des impôts directs, ou est-ce le même taux de 12,4 p. 100 qu'un investisseur privé recevrait dans ce cas?

M. Jean-Paul Gourdeau: Le taux de 12,4 p. 100 est le taux de rendement pour la durée du projet avec le paiement de location provenant de l'entité de concession et les recettes directes en capital et en impôts sur le revenu.

La différence lorsque M. Cullen regarde cela, c'est la question du flux de trésorerie. La question des liquidités. Celle-ci varie considérablement, car vous n'avez pas de comptant au cours des 21 premières années environ. L'argent commence à rentrer plus tard. Mais si on combine le tout, le taux de rendement est de 12,4 p. 100. Est-ce clair?

M. Lee Morrison: Ça l'est maintenant. Quel serait le taux de rendement pour un détenteur d'obligations? Si un détenteur d'obligations voulait investir dans ce projet et si vous faisiez appel à l'épargne publique, comme M. Fontana l'a fait internationalement, quel pourrait être le taux de rendement réel?

• 1950

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est une question hypothétique, parce que cela dépendrait de la structure financière du projet dans quatre ou cinq ans. Les détenteurs d'obligations financeront les 7,5 milliards de dollars. Je ne pourrais pas vous dire ce qui se passera dans cinq ans. Si je le pouvais, je serais probablement millionnaire.

M. Lee Morrison: Vous devez avoir fait un calcul quelconque pour en arriver à ce chiffre de 12,4 p. 100.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est le scénario de référence. Nous avons dit qu'il y aurait des rentrées d'argent, des investissements, et un rendement. Cela n'a rien à voir avec les détenteurs d'obligations ou quoi que ce soit.

M. Lee Morrison: Non, mais je ne pense pas que vous ayez compris ma question. Les revenus directs pour le gouvernement, dont nous avons parlé, ne donneraient pas, je crois, un taux de rendement de 12,4 p. 100. N'avez-vous pas prévu un taux réel de rendement, comme scénario de référence?

M. Jean-Paul Gourdeau: Le rendement financier est de 12,4 p. 100. C'est fondé sur une somme de 7,5 milliards de dollars de 1996, somme qu'il faut financer. On prend le montant qu'il en coûte pour se procurer cette somme aujourd'hui et on évalue les revenus. On évalue ce qu'il faudra payer au gouvernement en loyer. On évalue le coût direct en capital et le montant de l'impôt sur le revenu en se fondant sur le régime fiscal actuel. Au moment du remboursement, cela donnera un taux de rendement réel de 12,4 p. 100.

M. Lee Morrison: La valeur actuelle n'a apparemment pas utilisé ce chiffre du tout.

Le président: Monsieur Fontana.

M. Joe Fontana: Merci.

Je voudrais moi aussi parler un peu du financement et je crois comprendre que trois gouvernements pourraient participer à la location. Ce pourrait donc être deux tiers un tiers, parce que les avantages iront à l'Ontario et au Québec. Évidemment, le pays tout entier en bénéficie en raison de gains d'efficacité. Comme vous l'avez dit, un système intégré permettra de réaliser des gains d'efficacité dont bénéficiera le pays tout entier.

Pour ce qui est du financement, est-on d'avis qu'il faudrait que le gouvernement soit le prêteur direct, même si vous en parlez comme d'un investissement? Ou bien le gouvernement peut-il fournir une garantie, c'est-à-dire que les deux gouvernements provinciaux donneraient certaines assurances à l'investisseur? En fin de compte, nous vendons tous du risque. Plus on prend de risques, plus on fait de l'argent, parfois; moins on prend de risques, moins on fait d'argent.

Peut-être avez-vous déjà travaillé dans d'autres pays que le Canada. Peut-être que votre expérience antérieure acquise dans d'autres pays pour ce qui est de cette technologie et de ce modèle se révéleront utiles. Quel est exactement le rôle du gouvernement?

Si vous demandez aux gouvernements de débourser l'argent ou d'emprunter l'argent, au lieu d'être le garant de l'investisseur, je peux vous dire que cela pourrait poser un problème, étant donné les déficits persistants des gouvernements provinciaux et, qui sait, peut-être du gouvernement fédéral.

M. Jean-Paul Gourdeau: Nous considérons que le gouvernement jouerait le rôle de garant. L'argent serait emprunté à des banques privées, à des institutions financières.

M. Joe Fontana: Par conséquent, le risque n'est pas entièrement assumé par le gouvernement. L'investisseur peut aussi assumer une partie de ce risque.

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui.

M. Joe Fontana: Pour revenir au rendement de l'investissement et aux rentrées d'argent, etc., l'accord tripartite parle de la clientèle. Au bout du compte, il ne faut pas se leurrer, l'argent va rentrer s'il y a beaucoup de voyageurs qui prennent le train.

Je veux que vous passiez en revue, à notre intention, vos projections qui vous permettent de dire que ce chiffre pourrait atteindre 15 millions. Si j'inverse la proposition, combien de voyageurs vous faudrait-il pour rentrer dans votre argent et garantir qu'il y aura un rendement sur l'investissement ou qu'on pourra rembourser la dette?

Vous devez savoir combien de gens vous devez transporter dans l'ensemble du système pour pouvoir au moins payer les factures. Vous faut-il, cinq millions de voyageurs, ou 11 millions, ou encore 15 millions? Je me demande si vous pouvez nous montrer des projections qui nous donneraient une idée du scénario.

M. Jean-Paul Gourdeau: Je n'ai pas sous la main tous les détails de l'étude sur la clientèle pour déterminer le seuil de la rentabilité. Je n'ai pas apporté ces documents.

M. Joe Fontana: Mais ils existent?

• 1955

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui, ils existent. Nous avons prévu 11 millions de voyageurs en 2008 et 16 millions en 2022, et ces chiffres sont tirés de l'étude. Nous avons fait une analyse de sensibilité, mais je ne l'ai pas apportée parce que je ne comptais pas présenter tout cela en détail.

M. Joe Fontana: Et ce chiffre de 11 millions, est-ce suffisant pour assurer la rentabilité?

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui. Nous considérons que le projet sera rentable dès le départ. Il sera rentable dès la première année d'exploitation, en 2008.

M. Joe Fontana: D'accord. Quelle part de marché du public voyageur cela représente-t-il et où allez-vous chercher ce public voyageur? Qui sont les 11 millions que vous prévoyez pour 2008? Je pense que certains seront détournés du réseau routier, mais est-ce que vous en obtenez 50 p. 100 du mode aérien, 50 p. 100 de la route, ou quoi?

M. Jean-Paul Gourdeau: Une partie des clients viendront de l'avion, d'autres de l'autobus, d'autres encore prennent déjà le train, et puis il y a aussi une augmentation du public voyageur attribuable au fait que le service étant meilleur, les gens seront plus enclin à l'utiliser.

M. Joe Fontana: Sur l'ensemble du public voyageur, ces 11 millions représentent quel pourcentage, 10 p. 100, 15 p. 100, 20 p. 10?

M. Jean-Paul Gourdeau: Du total? Si je me rappelle bien, c'est 15 p. 100 ou 16 p. 100 du total.

M. Joe Fontana: Et à l'heure actuelle, quelle proportion prennent le train dans ce corridor, 2 p. 100 ou 3 p. 100?

M. Jean-Paul Gourdeau: Je ne sais pas. Deux ou trois millions à l'heure actuelle.

M. Joe Fontana: Oui, actuellement. Vous prévoyez donc avoir quelque 15 p. 100 à 17 p. 100 du public voyageur?

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui.

M. Joe Fontana: Si vous avez ce genre de renseignements sur la clientèle, etc., pourrais-je vous demander de les fournir au comité?

Mme Anne MacDonald: Oui, nous pouvons le faire.

M. Joe Fontana: Deuxièmement, si je peux me permettre, le Lynx est peut-être nouveau, mais il est évident que vos partenaires et votre technologie, nous les avons vus à l'oeuvre en France et en Grande-Bretagne et c'est évidemment une technologie éprouvée puisque cela fonctionne vraiment, moyennant qu'on ait l'emprise du chemin de fer et toute l'infrastructure.

Mais le Canada est quelque peu différent de la France et de la Grande-Bretagne et d'autres endroits où vous avez peut-être travaillé. Il est évident que cette somme de 7,5 milliards de dollars doit tenir compte du fait que nous avons un climat qui n'est pas le même qu'ailleurs dans le monde. Je m'interroge donc sur le coût de cette infrastructure et sur ses frais d'entretien dans un climat aussi variable.

M. Jean-Paul Gourdeau: Nous avons tenu compte de la maintenance et de l'exploitation quand nous avons établi nos rentrées et sorties d'argent à long terme, oui, nous en avons tenu compte.

M. Joe Fontana: Un dernier point. Je pense que si le train nous semble si attrayant, à beaucoup d'entre nous et à l'ensemble des Canadiens, c'est à cause des avantages environnementaux. Si vous avez fait une étude d'impact pour évaluer l'incidence sur l'environnement de retirer un nombre X de voyageurs du réseau routier, du transport aérien, et si vous avez calculé la réduction de consommation de combustible—parce que ce sera électrifié, n'est-ce pas?... Il est certain qu'il y a là d'énormes avantages pour l'environnement. Je voudrais savoir si vous avez fait des études préliminaires pour voir quels seraient les avantages sur le plan de l'environnement, avantages que l'on pourrait quantifier.

M. Jean-Paul Gourdeau: Nous croyons que ce projet est probablement le plus respectueux de l'environnement. Nous disons qu'il y aura une étude d'impact pour évaluer les incidences environnementales et obtenir tous ces détails chiffrés pendant la phase II.

Le président: Monsieur Drouin.

[Français]

M. Claude Drouin: Monsieur Gourdeau, vous ne semblez pas vouloir bouger au niveau du financement, qui serait d'environ 30 et 70 p. 100, si j'ai bien compris. Dans le document qu'on voit ici, vous dites que ce serait réalisé clés en main. Est-ce que cela veut dire que, s'il y a des dépassements de coûts, ils seront entièrement à votre charge, ou seront répartis à 70 et 30 p. 100?

M. Jean-Paul Gourdeau: Non, non, non. Ce qui est prévu, c'est que nous allons établir un coût ferme pour la construction pendant les 41 mois. On va s'entendre. Une fois qu'on aura établi un coût ferme, le groupe d'entreprises qui va réaliser ce projet aura la responsabilité de le faire au coût indiqué. La seule chose qui puisse changer, c'est qu'une fois la construction commencée, le gouvernement décide après un certain temps de changer le plan, par exemple de faire construire une nouvelle route. À ce moment-là, il y aurait un coût additionnel. Donc, les compagnies devront réaliser le projet au coût indiqué, pour un prix ferme.

M. Claude Drouin: Si je comprends bien, la somme de 11,1 milliards de dollars est une projection qui peut diminuer ou augmenter selon ce que vous allez faire dans les 41 mois de l'étude finale, qui sera faite par vous, et le gouvernement sera lié. Sinon, il va devoir vous rembourser 50 millions de dollars.

M. Jean-Paul Gourdeau: Je n'ai pas compris.

• 2000

M. Claude Drouin: Vous êtes en train de dire qu'on travaille avec un objectif de 11,1 milliards de dollars et qu'après les 41 mois, ce chiffre pourra changer. Si ce chiffre s'élevait, par exemple, à 14 ou 15 milliards de dollars—je vous donne des chiffres fictifs—et que le gouvernement disait: «Je recule, car je ne suis plus intéressé», il serait obligé de payer les 50 millions de dollars.

M. Jean-Paul Gourdeau: Non, parce qu'on n'aurait pas atteint nos objectifs.

M. Claude Drouin: D'accord.

M. Jean-Paul Gourdeau: À moins que... Excusez-moi. Je vais vous donner un exemple. Supposons que le gouvernement dise: «Écoutez, vous allez prolonger la route de l'Union Station à Pearson.» À ce moment-là, il y aurait un coût additionnel aux 11 milliards de dollars. Cependant, si le plan ne change pas et que les coûts finissent par s'élever à 14 milliards de dollars, on n'atteindra pas les objectifs et on n'aura pas droit à nos 50 millions de dollars.

M. Claude Drouin: Donc, si après les 41 mois, on demeure à 11,1 milliards de dollars et si, à la fin du contrat, en 2007, on arrive à 12 ou 13 milliards de dollars, c'est le consortium privé qui assumera la différence de la facture.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est un contrat à prix ferme. S'il y a des dépassements de coûts, il faudra négocier et démontrer qu'il y a eu des changements de plan. Autrement, on devra accepter la facture.

M. Claude Drouin: De votre côté, après les 41 mois, vous avez intérêt à ce que le coût monte un peu pour avoir une plus grande marge de manoeuvre. Chez nous, dans la Beauce, c'est un peu ce qu'on fait.

M. Jean-Paul Gourdeau: Pas nécessairement. Pas nécessairement. S'il y a négociation et que les chiffres sont là, on va marcher avec cela.

M. Claude Drouin: Oui, mais c'est vous qui avez l'expertise. Ce n'est pas le gouvernement. Ce seront vos chiffres.

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui, mais je peux vous dire que le gouvernement, comme d'habitude, fera une gestion éclairée. Il va engager des consultants ou d'autres pour l'aider à trouver une meilleure solution.

M. Claude Drouin: Cela, c'est juste depuis 1993. Auparavant...

M. Jean-Paul Gourdeau: Cela va se faire.

M. Claude Drouin: Merci.

Le président: Il ne faut pas oublier que si le groupe dépasse les coûts, le gouvernement pourra se retirer et le groupe paiera la pleine facture. Il n'y a pas d'avantage à ça.

M. Claude Drouin: Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Monsieur Calder.

M. Murray Calder: Monsieur le président, si nous mettons en service ce train, il me semble que nous nous retrouverons avec le problème inverse de celui que nous avons actuellement. VIA doit partager les voies avec le transport plurimodal du fret; or, il y a des trains de ce genre qui roulent à 60 ou 70 milles à l'heure, tandis que les trains de VIA roulent à 85 ou à 90 milles à l'heure.

Or, nous aurions cette voie bonne pour 300 kilomètres heure. VIA pourrait-elle l'emprunter pour y faire rouler un train de voyageurs plus lent? Il me semble que ce serait exactement le même problème que nous avons actuellement. Ou bien cette voie serait-elle réservée exclusivement aux trains qui roulent à 300 kilomètres heure?

M. Jean-Paul Gourdeau: Elle serait réservée aux trains de voyageurs.

M. Murray Calder: Autrement dit, VIA pourrait y faire rouler un train de voyageurs plus lent?

M. Jean-Paul Gourdeau: Cela pourrait être envisagé.

M. Murray Calder: Eh bien, quand on dit «envisagé» et «pourrait», ce sont deux choses différentes.

M. Roy Cullen: Il pourrait circuler à 3 heures du matin.

Des voix: Oh, oh.

M. Jean-Paul Gourdeau: Le transport de marchandises serait exclu, mais les trains de voyageurs, oui, on pourrait l'envisager.

M. Murray Calder: Quand?

M. Jean-Paul Gourdeau: Eh bien, je veux dire... Ce que nous présentons aujourd'hui, c'est une proposition qui peut servir de base pour amorcer la discussion. Nous pensons qu'il faut prendre le temps de bien définir le projet et de s'entendre avec le gouvernement sur ce qu'il y a lieu de faire.

Je ne voudrais pas anticiper aujourd'hui sur les conclusions qu'on tirera à l'issue de cette phase de développement de 41 mois, mais je dirai que c'est un document de discussion et que nous sommes ouverts à diverses possibilités. Ce que nous proposons n'est pas coulé dans le béton. C'est une proposition que l'on fait pour l'étudier et en discuter.

M. Murray Calder: Eh bien, c'est notre travail actuellement, au comité, de scruter le projet à la loupe, parce qu'enfin, il ne faut pas le cacher, 7,5 milliards, ce n'est pas de la petite monnaie. C'est beaucoup d'argent.

M. Jean-Paul Gourdeau: J'en conviens.

M. Murray Calder: Dans ce cas, la question que M. Fontana a soulevée est de savoir si l'on envisage la présence de VIA dans ce corridor. Si nous avons une voie réservée exclusivement au transport de voyageurs, et puisque les deux transporteurs de classe 1 ne veulent vraiment que les trains de VIA circulent sur leurs voies actuellement, parce que cela nuit à leurs trains de marchandises, il serait très logique que VIA emprunte également cette voie, surtout si nous garantissons le prêt et si nous investissons dans le projet.

La question se poserait donc de savoir quand VIA pourrait faire rouler ses trains sur cette voie? Serait-ce aux heures de pointe, ou bien, comme M. Cullen vient de le dire, seulement vers 3 heures du matin? Si c'est seulement à 3 heures du matin, cela ne sert à rien.

M. Jean-Paul Gourdeau: Eh bien, je ne peux pas vous donner de réponse pour l'instant.

Le président: Je pense que la véritable réponse, c'est que si le gouvernement veut que VIA fasse rouler ses trains sur la voie, alors il leur permet de rompre leur engagement et l'étude devra être payée par le gouvernement, que le projet se fasse ou pas. C'est de cela qu'il parlait quand il disait que si nous voulons ajouter quoi que ce soit, nous devrons en payer le prix.

• 2005

Nous amorçons le troisième tour. Messieurs Cullen, Morrison et Fontana.

M. Roy Cullen: Merci, monsieur le président.

Avant de changer de sujet, cela dépend bien sûr de la vitesse à laquelle rouleront les trains de VIA, mais je pense qu'en roulant vers Toronto, ils se feraient dépasser par un TGV aux alentours de Kingston.

Je n'essaie pas de jouer au plus malin. C'est une question importante. Vous n'avez peut-être pas réponse à tout dès ce soir.

J'ai jeté un coup d'oeil sur le taux de rendement interne. Soit dit en passant, puisque nous demandons des renseignements, j'aimerais bien, quand il vous sera commode de le faire, consulter l'analyse financière, voire les rentrées et les sorties de fonds et le calcul du taux de rendement interne. Ce serait très utile.

Le président: Je vais poser la question tout de suite: Cela fait-il partie des quatre chemises?

Mme Ann MacDonald: Oui. Nous en avons une intitulée «Proposition financière». Vous y trouverez tout le dossier financier.

M. Jean-Paul Gourdeau: Tout y est.

Le président: Le greffier l'a.

M. Roy Cullen: Merci.

Voyons l'évolution de la valeur de l'argent. Après 20 ans, l'argent perd de sa valeur. Je croyais comprendre le calcul du taux de rendement interne jusqu'à ce que je vois ce petit tableau, dans votre document. On y dit que le taux de rendement est de 12,4 p. 100, et je croyais qu'il s'agissait du rendement du projet plus les impôts directs. Mais je vois ensuite une autre ligne. On y dit qu'en ajoutant le taux de rendement aux valeurs des concessions, aux immobilisations et à l'impôt sur le revenu, on obtient 17,7 p. 100. D'où vient ce chiffre?

M. Jean-Paul Gourdeau: Je suis désolé. Le rendement financier sur 12,4 p. 100 vient des recettes et du loyer seulement.

M. Roy Cullen: Il s'agit donc du taux de rendement interne du projet.

M. Jean-Paul Gourdeau: Si on ajoute les placements directs en capital et les impôts sur le revenu—J'ai fait une erreur. C'est 17,7 p. 100.

M. Roy Cullen: Bien. C'est utile.

En réponse aux commentaires de mon savant collègue, je ne peux qu'exprimer mon désaccord, même si je ne suis pas certain de son opinion. Je pense que cela serait plus facile à avaler si c'était en fonction de l'investissement gouvernemental, avec le prix de revient impôt compris, plutôt que des prêts et des garanties offertes par le gouvernement. On revient aux anciennes méthodes. Si c'est un investissement, il y a un aspect positif et je pense que c'est plus facile à faire accepter.

Vous avez dit, monsieur, que le gouvernement serait un investisseur et qu'il offrirait des garanties. Je n'ai pas bien compris. Ou bien vous investissez, ou bien vous offrez des garanties, mais certainement pas les deux.

M. Jean-Paul Gourdeau: Eh bien, vous offrez des garanties et vous faites l'achat, parce que vous avez emprunté de l'argent pour payer l'infrastructure. On vous rembourse l'argent que vous avez emprunté sur le marché.

M. Roy Cullen: Disons que le gouvernement fédéral investisse quelques milliards de dollars, compte tenu des avantages et de l'option...

M. Jean-Paul Gourdeau: Non, il n'offre pas d'argent comme investissement. Il emprunte à une institution financière publique l'argent nécessaire pour amasser les 7,5 milliards de dollars. C'est ainsi qu'on procède.

M. Roy Cullen: Mais vous empruntez l'argent et puis...

M. Jean-Paul Gourdeau: Vous obtenez le comptant.

M. Roy Cullen: Il sert au financement de l'infrastructure, n'est-ce pas?

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui.

M. Roy Cullen: Vous avez donc une dette et un investissement. Si le gouvernement investit grâce à ces instruments d'endettement, il devra rembourser sa propre dette, mais il n'aura pas à garantir le projet. Il sera responsable de son propre emprunt.

Si je vais à la banque et que j'emprunte 100 $ pour acheter 10 actions de Inco, je dois rembourser ce prêt, mais je n'ai pas à garantir mon portefeuille en entier.

M. Jean-Paul Gourdeau: Si vous deviez acheter 2 millions d'actions de Inco, vous devriez peut-être offrir des garanties, parce que vous n'auriez pas le comptant nécessaire.

M. Roy Cullen: Pas le gouvernement fédéral, à mon avis.

J'essaie simplement de comprendre que si le gouvernement fédéral fournit des capitaux d'investissement, c'est le risque qu'il prend. Il n'a pas à offrir d'autres garanties pour le projet, sûrement pas.

M. Jean-Paul Gourdeau: Si vous examinez la proposition en détail, vous verrez que nous disons qu'il y aura un investissement en capital de 330 millions de dollars. C'est pour payer l'emprise, le terrain. Ce serait là l'investissement du gouvernement. Le reste serait emprunté à une institution privée.

M. Joe Fontana: La garantie devrait alors...

M. Jean-Paul Gourdeau: Il faudra alors une garantie.

M. Roy Cullen: Au moins, c'est clair.

Le président: Monsieur Morrison.

M. Jean-Paul Gourdeau: Est-ce que...?

• 2010

M. Roy Cullen: Je ne voyais pas la différence entre l'emprise et la facture totale pour l'infrastructure de 7 milliards de dollars.

M. Jean-Paul Gourdeau: L'emprise, c'est le terrain. Il faut avoir le terrain pour y construire l'infrastructure.

M. Roy Cullen: Oui, vous l'avez dit clairement. Je ne me rendais pas compte de cette distinction.

Le président: Monsieur Morrison.

M. Lee Morrison: Merci, monsieur le président.

Monsieur Gourdeau, je sais que l'étude tripartite concluait que d'autres études devaient être faites, mais je me demande quand vous avez commencé à élaborer cette proposition. L'avez-vous fait à la demande de Transports Canada ou de quiconque au gouvernement du Canada? Y a-t-il un lien avec le fait qu'on envisage d'accueillir les Olympiques à Toronto l'année même où ce projet sera prêt?

M. Joe Fontana: Le train arriverait à point nommé, n'est-ce pas?

M. Lee Morrison: Voulez-vous répondre, s'il vous plaît?

Le président: Précisons une chose. Quelqu'un sait-il quand nous avons appris que les Olympiques auraient lieu à Toronto? C'est assez récent, n'est-ce pas?

M. Jean-Paul Gourdeau: Que je sache, ce n'est qu'une coïncidence, puisque nous avons commencé notre travail bien avant.

M. Lee Morrison: Bien. J'ai le reste de la question. Cette proposition a-t-elle été préparée à la demande de quelqu'un?

M. Jean-Paul Gourdeau: Voyez l'étude tripartite. À la dernière ligne de sa conclusion, on dit que l'initiative revient au secteur privé. Certains membres de notre groupe de proposition en ont discuté avec des représentants de Transports Canada et de Transports Québec pour savoir s'ils étaient prêts au moins à recevoir une proposition. On a répondu par l'affirmative et nous nous sommes mis au travail. Les ministères n'ont pris aucun engagement. Ils ont dit qu'ils étudieraient la proposition. Nous avons commencé à travailler au début de 1997.

M. Lee Morrison: C'était donc votre initiative et non la leur.

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui.

Le président: Monsieur Fontana.

M. Joe Fontana: J'aimerais clarifier une chose. J'ai posé une question sur les garanties de prêt. Vous avez dû confondre, Jean- Paul, lorsque vous avez commencé à parler du fait que le gouvernement, s'il devait emprunter lui-même 7,5 milliards de dollars, n'aurait pas à offrir de garantie pour son propre argent, puisqu'il l'a trouvé lui-même. Mais si l'argent vient d'ailleurs, du secteur privé, d'investisseurs privés, et qu'ils veulent qu'on les rassure qu'au bout du compte, les risques seront garantis, ils demanderont une garantie quelconque au gouvernement. Cela les mettrait plus à l'aise.

Je présume que le gouvernement pourrait emprunter de l'argent de son côté, à un taux inférieur à celui qu'il obtiendrait sur le marché; par conséquent, il faudrait se demander si on prend l'argent du gouvernement, à 5,5 p. 100, ou celui du secteur privé, à 7,5 p. 100 ou 8 p. 100, selon les risques associés à l'emprunt. Je comprends cela, et je ne sais pas quelles étaient vos hypothèses.

Vous pourriez peut-être clarifier les choses de nouveau. Pour les 7,5 milliards de dollars, avez-vous présumé qu'il s'agirait d'obligations au tarif du gouvernemental ou un taux d'intérêt comparable à celui que le gouvernement obtient?

M. Jean-Paul Gourdeau: Pour le montant de 7,5 milliards de dollars, si vous regardez bien les données, nous avons présumé que le gouvernement ferait un investissement de 330 millions de dollars. Ce serait là son investissement en argent, pour payer le terrain. Le reste serait emprunté.

Lorsque le gouvernement fait un emprunt, il a toujours une garantie. Que pensez-vous qu'il fait, lorsqu'il émet des obligations? Il emprunterait donc de l'argent aux institutions privées et garantirait le remboursement de cet emprunt, puisque c'est pour son usage propre. Mais il ne s'agirait pas d'argent comptant, plutôt d'argent emprunté aux institutions privées.

M. Joe Fontana: Je n'ai pas vu la structure de votre entreprise, mais présumons que c'est ce que nous faisons. Nous fournissons 330 millions de dollars que nous empruntons directement ou indirectement. Souvenez-vous de ma première question, il y a environ une heure: le risque semble être assumé uniquement par le trésor public, au début du moins, avant même qu'un train circule sur les rails. Avez-vous envisagé, peut-être, une nouvelle entreprise dont feraient partie les gouvernements et le secteur privé? Cette entreprise emprunterait de l'argent au secteur privé, avec l'aide du gouvernement, en tant qu'investisseur ou caution.

• 2015

Je le répète, je n'aime pas beaucoup l'idée de s'adresser au trésor et aux trois gouvernements pour garantir l'emprunt, en plus de trouver l'argent pour vous, de mettre 7,5 milliards de dollars sur la table en assumant tous les risques. Je m'y connais un peu en matière de garanties de bonne exécution mais je ne sais pas si Bombardier ou Lynx pourraient trouver des garanties d'une valeur de 7,5 milliards de dollars. Il faudrait avoir des ressources colossales pour les obtenir.

M. Jean-Paul Gourdeau: Ils ne peuvent pas.

M. Joe Fontana: C'est exact. Vous compliquez un peu les choses.

M. Jean-Paul Gourdeau: Non.

M. Joe Fontana: Nous allons donner 7,5 milliards de dollars. Vous dites que ce montant fera l'objet de garanties de bonne exécution et toutes les autres garanties offertes par le secteur privé qui construit l'infrastructure, avant même qu'un train puisse y circuler. Sans vouloir compliquer les choses...

M. Jean-Paul Gourdeau: Nous mêlons les pommes et les oranges. Nous disons que le coût sera de 7,5 milliards de dollars. Le gouvernement sera propriétaire de cette infrastructure. Comme il s'agit de sa propriété, il offre une garantie, il investit 330 millions de dollars et emprunte 7,5 milliards de dollars.

M. Joe Fontana: Jean-Paul, à quoi sert une infrastructure de 7,5 milliards de dollars s'il n'y a pas de train pour y circuler?

M. Jean-Paul Gourdeau: Pourquoi pas?

M. Joe Fontana: Tout dépend de qui fait quoi. C'est pourquoi on dit—désolé. Continuez...

M. Jean-Paul Gourdeau: Je dis que la somme de 7,5 milliards de dollars est imposante. Nous prendrons le risque. Nous disons que nous allons construire l'infrastructure pour 7,5 milliards de dollars, et s'il y a un dépassement, parce que nous ne le faisons pas correctement, c'est notre responsabilité. C'est là qu'interviennent les garanties de bonne exécution et les dommages- intérêts prédéterminés, afin de garantir que le travail se fera pour la somme prévue. Voilà pour nous. Ce sont deux choses différentes.

M. Joe Fontana: Je crois comprendre, mais étant donné les risques, il vous sera difficile de convaincre non seulement notre comité, mais aussi le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, qui voudront poser la même question.

Au bout du compte, je crois qu'il y a une solution pour trouver l'argent. À ce taux de rendement, il pourrait y avoir beaucoup de gens séduits par l'idée d'obtenir un rendement de 12,4 p. 100 ou 17,5 p. 100. Je doute qu'il y ait encore beaucoup de fonds communs de placement qui offrent ce genre de rendement.

Il semble que ce soit un moyen d'investissement très alléchant, d'après ce que vous avez ici. J'aimerais simplement savoir si vous en avez parlé au public, puisqu'au bout du compte, nous sommes responsables envers les Canadiens, tout comme les gouvernements de l'Ontario et du Québec. Les Canadiens sont des participants, d'une façon ou d'une autre, et ils voudront savoir s'il s'agit ou non d'un bon investissement.

D'après vos chiffres, je crois comprendre qu'il y aurait dès le départ des mouvements positifs de trésorerie et que le risque est réduit au minimum. Mais dites-moi, lorsque vous demandez 7,5 milliards de dollars au gouvernement, s'agit-il de 7,5 milliards de dollars comptant, de 7,5 milliards de dollars d'emprunts ou d'investissements ou voulez-vous simplement garantir vos emprunts de manière à attirer 7 milliards de dollars du secteur privé.

M. Jean-Paul Gourdeau: Voici: nous disons qu'il faut passer à travers cette période de 41 mois et nous avons présenté des chiffres. Nous avons formulé une hypothèse et il revient au gouvernement, à nous-mêmes et aux institutions financières de les prouver. S'ils le sont, ils répondent aux critères et on peut aller de l'avant. Si rien ne marche après 41 mois, nous repartons chacun de notre côté et nous avons perdu 50 millions de dollars.

M. Joe Fontana: Bien. J'ai encore une ou deux questions toutes simples. L'une se rapporte à l'accès. Mon collègue a demandé si c'est VIA ou quelqu'un d'autre... Êtes-vous prêt ou non à donner accès à vos rails à d'autres services voyageurs? Nous comprenons bien que s'il circule un train toutes les heures, il n'y aura peut- être plus de place pour quiconque, circulant à une vitesse inférieure, parce que cela serait trop compliqué. Mais j'ai bien aimé vous entendre dire que vous donneriez accès aux voyageurs...

M. Jean-Paul Gourdeau: J'ai dit que nous étudierions la question.

M. Joe Fontana: Cela pourrait fort bien être l'une des conditions, mais ce n'est pas de cela dont il est question maintenant.

Quant à la fourniture du service proprement dit, vous demandez une garantie de 60 ans sur la concession.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est exact. C'est la durée de vie normale qui a été établie pour les aéroports, entre autres. Nous réclamons une concession de 60 ans.

M. Joe Fontana: Pour arriver à ce chiffre, est-ce que vous vous fondez sur le taux de rendement, pour votre société, ou sur le modèle économique que vous avez présenté ou est-ce parce que c'est la durée de la concession qu'on a prévue pour les aéroports? Est-ce ainsi que vous êtes arrivé à ce chiffre.

• 2020

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est le chiffre que nous utilisons également dans d'autres cas.

M. Joe Fontana: Il y aurait donc deux voies ferrées?

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui.

M. Joe Fontana: Deux voies ferrées dans chaque direction.

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui, deux voies, à l'exception d'un tronçon au début du trajet Québec-Montréal.

M. Joe Fontana: Où il n'y aurait qu'une seule voie?

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est exact.

Le président: Monsieur Cullen.

M. Roy Cullen: Je vous remercie, monsieur le président.

Je ne voudrais pas revenir de nouveau sur cette opposition entre l'investissement et la garantie. Lorsque nous aurons reçu cette information, nous pourrons peut-être... Une simple précision: ce taux interne de rendement est basé sur un investissement de 330 millions de dollars, et non sur les 7 milliards, n'est-ce pas?

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est exact.

M. Roy Cullen: Pour ce taux interne de rendement sur les 330 millions de dollars, est-ce que vous imputez les frais au gouvernement pour une garantie de la dette? Une garantie, cela se paie, car elle comporte un risque.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est inclus dans le taux d'intérêt que vous versez aux bailleurs de fonds. Vous serez remboursés de cette somme. C'est une opération distincte. Quand vous empruntez de l'argent, vous versez des intérêts, et ceux-ci sont calculés sur votre capacité de remboursement, le risque, etc. Il existe un taux d'intérêt, et c'est cela.

M. Roy Cullen: Oui, mais si vous basez le taux interne de rendement sur une mise de fonds de 330 millions de la part du gouvernement, vous n'augmentez pas le taux interne de rendement à cause des garanties. Autrement dit, vous déclarez être propriétaire de ces avoirs mais nous, nous ne le sommes pas. Ce qui est à nous, ce sont les 330 millions de dollars, et nous garantissons la dette sur le solde.

On pourrait voir la question sous un autre angle et dire: si nous garantissons, c'est que nous vous prêtons l'argent, n'est-ce pas? Alors, pourquoi ne pas emprunter auprès du secteur public, à un coût inférieur, et ensuite nous passerions un contrat avec Lynx ou tout autre entrepreneur, ou pour remplir certaines spécifications à un prix fixe. S'il y a dépassement et que c'est aux dépens de la société Lynx, notre taux interne de rendement baisse, n'est-ce pas? Mais ceci a des répercussions sur ce dont nous parlons. Si nous obtenons un taux interne de rendement sur les 330 millions de dollars, mais que nous garantissons le reste, il y a un coût de capital qui y est associé.

M. Jean-Paul Gourdeau: Tout ce que je peux vous répondre, c'est que c'est là votre choix. Nous vous répondrons simplement que si le gouvernement veut faire appel à d'autres mécanismes de financement, il peut le faire.

M. Roy Cullen: Monsieur Fontana, c'est à cela que revenait ma question. On pourrait également envisager de faire financer par le gouvernement les 7 milliards de dollars d'infrastructure, et en être propriétaire, n'est-ce pas?

M. Jean-Paul Gourdeau: Mais le gouvernement en est propriétaire, d'après notre proposition.

M. Roy Cullen: Oui, mais pendant 60 ans. Je vous parle de...

M. Jean-Paul Gourdeau: Non, le gouvernement demeure propriétaire et nous le prenons à bail pour 60 ans. Nous n'en sommes jamais propriétaire.

M. Roy Cullen: Mais si nous en sommes propriétaire et nous avançons 300 millions de dollars, nous garantissons la dette sur les 7 milliards de dollars.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est exact.

M. Roy Cullen: Je vais devoir examiner les chiffres, parce que la garantie sur une dette, ça se paie, vous savez.

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui. Cela est pris en compte dans le loyer de l'argent. Tout cela est intégré.

M. Roy Cullen: Je vois. Peut-être que cela est pris en compte dans le coût total de la somme mais ce ne l'est peut-être pas dans notre taux de rendement interne.

M. Jean-Paul Gourdeau: Pas du tout. Cela est calculé dans le coût que représente l'emprunt.

M. Roy Cullen: Cela pourrait être inférieur.

M. Jean-Paul Gourdeau: Tout cela est intégré.

Excusez-moi. Je perds...

M. Joe Fontana: Eh bien, nous ne connaissons pas le contenu de ces quatre classeurs. Malheureusement, on nous a présenté une brochure très pimpante, et c'est peut-être pour cela que nous avons l'air un peu ignorant, mais je peux vous dire...

M. Jean-Paul Gourdeau: Non, c'est peut-être parce que je suis un piètre communicateur.

M. Joe Fontana: Pas du tout, vous êtes un bon communicateur. Nous ne connaissons tout simplement pas les faits et par conséquent, nous essayons d'obtenir de vous des renseignements.

M. Jean-Paul Gourdeau: Vous avez toutes les brochures. Tout y est.

Le président: Nous avons reçu les quatre classeurs. Il n'y en a pas assez pour tout le monde mais tous les députés peuvent les consulter.

Monsieur Calder.

M. Murray Calder: Eh bien, je crois que la question de M. Cullens porte sur le fait que vous pouvez compter sur 7,5 milliards de dollars pour l'infrastructure, n'est-ce pas?

M. Joe Fontana: Qui est Cullens?

M. Murray Calder: Excusez-moi. M. Cullen. Excusez-moi, Roy, c'est parce qu'il est tard.

La question de Roy—et je ne me trompe pas sur ce nom- là—concerne les 7,5 milliards de dollars. Cela inclut-il le coût que représente l'intérêt, que ce soit 7,5 p. 100, 11,2 p. 100, peu importe.

M. Jean-Paul Gourdeau: Non. Cela n'est pas inclus.

M. Murray Calder: Je vois. Essentiellement...

M. Jean-Paul Gourdeau: Cela représente le coût de la construction.

M. Murray Calder: ... le coût principal.

M. Jean-Paul Gourdeau: C'est cela.

M. Murray Calder: Je vois. Où que ce soit que nous obtenions ce prêt, il représentera 7,5 milliards de dollars auxquels s'ajouteront les intérêts, n'est-ce?

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui, monsieur. Les 7,5 milliards de dollars, dont nous avons parlé, représentent le coût de la construction.

• 2025

Le président: Avant de terminer, je voudrais m'assurer que notre expert-conseil a bien compris car il va écrire un rapport.

Êtes-vous satisfait des renseignements obtenus? Si vous avez des questions...

Des voix: Non, quand nous aurons les documents...

Le président: Vous pouvez également consulter les quatre classeurs.

M. Roy Cullen: J'ai une brève question à poser à la suite de celle de M. Calder.

Le coût du capital, le coût de l'emprunt de 7 milliards de dollars, est-il pris en compte dans le taux de rendement interne de 12,4 p. 100 et dans les 17,7 p. 100?

M. Jean-Paul Gourdeau: Oui.

M. Roy Cullen: Merci de m'avoir donné ces précisions.

Le président: Qui a dit que ce serait tout simple?

Monsieur Mercier.

[Français]

M. Paul Mercier: Monsieur Gourdeau, je ne vois pas très bien comment seraient éventuellement complémentaires VIA et le TGV. Actuellement, VIA a un déficit de 50 ou 60 millions de dollars sur la ligne entre Québec et Toronto, je crois. Que se passerait-il? Est-ce que ce déficit serait assumé par le TGV? Que se passerait-il?

M. Jean-Paul Gourdeau: Si le TGV se construit, ce sera le service principal entre Québec et Toronto. VIA a un rôle à jouer, d'abord avec toutes les feeder lines qu'il va pouvoir utiliser, et il pourra certainement collaborer avec nous. Si vous me demandez ce que sera exactement ce rôle, je ne le sais pas à l'heure actuelle, mais c'est un sujet dont on va discuter.

Le président: Monsieur Gourdeau et madame MacDonald, merci beaucoup. C'était vraiment intéressant. On a encore de la recherche à faire et on a de la documentation. C'est certainement un sujet dont on va beaucoup parler sur la colline. Si vous avez des commentaires de clôture, je vous invite à les faire.

M. Jean-Paul Gourdeau: Non. Je remercie beaucoup le comité.

[Traduction]

J'espère vous avoir donné des éclaircissements. Si vous avez besoin d'autres choses, si vous voulez des précisions ou d'autres renseignements, n'hésitez pas à nous téléphoner. Nous vous avons présenté une proposition détaillée mais s'il y a autre chose que vous souhaitez savoir, n'hésitez pas.

Le président: Merci beaucoup.

La séance est levée.