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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent du patrimoine canadien


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 2 juin 2005




¿ 0910
V         Le vice-président (M. Gary Schellenberger (Perth—Wellington, PCC))
V         Mme Suzanne Laverdière (directrice générale, Affaires institutionnelles et planification stratégique / Télévision française, Société Radio-Canada)

¿ 0915

¿ 0920

¿ 0925
V         La présidente (Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.))
V         M. Gary Schellenberger
V         Mme Suzanne Laverdière
V         M. Gary Schellenberger

¿ 0930
V         Mme Suzanne Laverdière

¿ 0935
V         La présidente
V         M. Maka Kotto (Saint-Lambert, BQ)
V         Mme Suzanne Laverdière
V         M. Maka Kotto
V         Mme Suzanne Laverdière

¿ 0940
V         La présidente
V         M. Charlie Angus (Timmins—Baie James, NPD)
V         Mme Suzanne Laverdière
V         M. Charlie Angus
V         Mme Suzanne Laverdière

¿ 0945
V         M. Charlie Angus
V         Mme Suzanne Laverdière

¿ 0950
V         La présidente
V         M. David Smith (Pontiac, Lib.)
V         Mme Suzanne Laverdière

¿ 0955
V         M. David Smith
V         Mme Suzanne Laverdière
V         M. David Smith
V         La présidente
V         Mme Bev Oda (Durham, PCC)

À 1000
V         Mme Suzanne Laverdière
V         Mme Bev Oda
V         Mme Suzanne Laverdière
V         Mme Bev Oda
V         Mme Suzanne Laverdière

À 1005
V         Mme Bev Oda
V         Mme Suzanne Laverdière
V         Mme Bev Oda
V         Mme Suzanne Laverdière
V         Mme Bev Oda
V         La présidente
V         M. Marc Lemay (Abitibi—Témiscamingue, BQ)
V         Mme Suzanne Laverdière

À 1010
V         M. Marc Lemay
V         Mme Suzanne Laverdière

À 1015
V         M. Marc Lemay
V         Mme Suzanne Laverdière
V         M. Marc Lemay
V         La présidente
V         M. Mario Silva (Davenport, Lib.)
V         Mme Suzanne Laverdière
V         La présidente
V         Mme Bev Oda

À 1020
V         Mme Suzanne Laverdière
V         Mme Bev Oda
V         Mme Suzanne Laverdière
V         Mme Bev Oda
V         Mme Suzanne Laverdière
V         Mme Bev Oda
V         Mme Suzanne Laverdière
V         Mme Bev Oda
V         Mme Suzanne Laverdière
V         Mme Bev Oda

À 1025
V         La présidente
V         Mme Suzanne Laverdière
V         La présidente
V         Mme Suzanne Laverdière

À 1030
V         La présidente
V         Mme Suzanne Laverdière
V         La présidente
V         M. Gary Schellenberger
V         La présidente
V         M. Marc Lemay
V         Mme Suzanne Laverdière
V         M. Marc Lemay
V         Mme Suzanne Laverdière
V         M. Marc Lemay
V         Mme Suzanne Laverdière
V         M. Marc Lemay
V         Mme Suzanne Laverdière
V         M. Marc Lemay
V         Mme Suzanne Laverdière
V         M. Marc Lemay
V         La présidente

À 1035
V         Mme Susan Kadis (Thornhill, Lib.)
V         Mme Suzanne Laverdière
V         La présidente
V         M. Maka Kotto
V         Mme Suzanne Laverdière

À 1040
V         M. Maka Kotto
V         Mme Suzanne Laverdière
V         M. Maka Kotto
V         Mme Suzanne Laverdière
V         La présidente
V         M. David Smith
V         Mme Suzanne Laverdière
V         La présidente

À 1045
V         Mme Suzanne Laverdière
V         La présidente










CANADA

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 041 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 2 juin 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¿  +(0910)  

[Traduction]

+

    Le vice-président (M. Gary Schellenberger (Perth—Wellington, PCC)): On nous a appelés il y a un moment pour nous dire que Mme Catterall n'était pas disponible car elle est un peu en retard.

    Aujourd'hui, je suis un peu en avance, et je suis désolé d'avoir raté la réunion de l'autre jour.

    Nous ferions aussi bien de commencer tout de suite. Je souhaite la bienvenue à Mme Suzanne Laverdière, de la SRC. Bienvenue, madame. Vous pouvez commencer votre exposé.

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière (directrice générale, Affaires institutionnelles et planification stratégique / Télévision française, Société Radio-Canada): Merci beaucoup. Si vous me le permettez, je vais m'exprimer en français. Mesdames, messieurs, bonjour. Merci de me recevoir aujourd'hui.

    Tout d'abord, permettez-moi de vous présenter les salutations de M. Daniel Gourd, vice-président principal de la télévision française de Radio-Canada, qui ne pouvait être avec vous aujourd'hui et qui m'a demandé de le représenter.

    Je suis particulièrement heureuse d'avoir l'occasion de vous parler du rôle joué au cours des six dernières années par la télévision de Radio-Canada dans le succès du long métrage canadien de langue française, car nous y avons été étroitement associés.

    Pendant vos consultations auprès des principaux acteurs de l'industrie cinématographique, plusieurs d'entre vous ont dit que le Canada possédait deux marchés du long métrage, deux marchés distincts aux réalités très différentes.

    Comme vous le savez, le cinéma produit au Québec a connu un essor particulièrement remarquable au cours des dernières années. Laissez-moi vous rappeler les résultats de l'année 2004. Les films produits au Québec ont atteint 21,2 p. 100 des recettes totales du Québec. La part des films canadiens de langue anglaise a été de 1,6 p. 100 au Canada anglais. Toutes origines linguistiques confondues, la part des films canadiens sur l'ensemble du territoire atteignait 4,5 p. 100. À titre de comparaison, la part de marché des films australiens dans leur pays était de 1,3 p. 100. À l'autre extrémité, celle des films français sur leur territoire était de 38,4 p. 100. Comme on peut le constater, le cinéma québécois se porte bien, très bien même. Il est aimé du public et salué par la critique, ici comme à l'étranger.

    Comment expliquer alors cette différence entre les résultats des deux marchés canadiens? Certains diront que la langue protège le public francophone. Or, c'est oublier qu'au Québec, les cinéphiles sont exposés aux mêmes films américains, disposant des mêmes budgets promotionnels énormes que dans le reste du Canada et ce, en version originale anglaise et en version française au même moment. D'ailleurs, la croissance de la part de marché du cinéma québécois n'a pas influencé celle du cinéma américain. Elle est venue plutôt diminuer la part du cinéma autre qu'américain, comme c'est aussi le cas dans la plupart des pays qui ont vu progresser leur cinéma national.

    Parlons maintenant du modèle québécois.

    La différence entre les deux marchés canadiens vient de l'approche. Si le marché francophone est maintenant prêt à accueillir son cinéma, c'est que l'ensemble de l'industrie — scénaristes, réalisateurs, comédiens, producteurs, distributeurs et télédiffuseurs — a travaillé à son développement avec une même vision claire que je résumerai ainsi: offrir un cinéma identitaire aux valeurs culturelles fortes qui rejoint le public en lui racontant des histoires qui le touchent, le divertissent et le font réfléchir.

    La télévision de Radio-Canada partage complètement cette vision car, comme vous le savez, nous avons entrepris, il y a un peu plus de deux ans, notre repositionnement en misant sur les attributs d'ouverture, d'innovation, de crédibilité, de passion et de rassemblement pour nous mettre au service du public d'abord et avant tout.

    Autre phénomène spécifique au Québec: l'expression culturelle repose sur un système de vedettariat très dynamique, où des gens de grand talent savent faire preuve d'une réelle polyvalence devant comme derrière la caméra, au grand comme au petit écran. Ce système de vedettariat, qui n'a pas d'équivalent au Canada anglais, est attribuable à l'étroitesse du marché et à la faible mobilité des talents hors du Québec, sauf en de rares exceptions. Il n'est pas étonnant que, dans cet environnement, le cinéma et la télévision soient devenus des alliés naturels et s'enrichissent mutuellement de leurs succès respectifs.

    D'ailleurs, en 2004, les 10 films québécois les plus populaires ont tous bénéficié du soutien d'un télédiffuseur. La télévision de Radio-Canada s'est associée à six d'entre eux: Camping sauvage, Elles étaient cinq, Le papillon bleu, Le dernier tunnel, Monica la Mitraille et Ma vie en cinémascope. TQS a soutenu Les aimants et Nouvelle-France. TVA a été le partenaire de Elvis Gratton XXX et du film dérivé de la série télévisée Dans une galaxie près de chez vous.

    Passons au rôle de la télévision de Radio-Canada.

    En avril 1999, la télévision de Radio-Canada a annoncé la mise en place d'un programme de soutien au cinéma doté d'une enveloppe de 20 millions de dollars sur cinq ans. Nous avons ensuite réuni les représentants des associations professionnelles, des scénaristes, des comédiens, des réalisateurs, des producteurs et des distributeurs au sein d'un comité consultatif, pour nous conseiller sur nos stratégies d'intervention. De concert avec l'industrie, la télévision de Radio-Canada a élaboré un mode d'intervention parfaitement approprié à sa personnalité et à ses compétences, en concentrant ses efforts autour de quatre axes d'intervention: l'aide au développement — c'est-à-dire l'aide à l'écriture des scénarios —, l'aide à la production, à la promotion et à la diffusion du cinéma d'ici.

    En ce qui a trait à l'aide au développement, l'industrie dans son ensemble a compris l'importance cruciale de cette étape qui était autrefois négligée et beaucoup trop centrée sur l'intention du créateur plutôt que sur les attentes du public. Radio-Canada a joint ses efforts à ceux de nombreux organismes qui, aujourd'hui, soutiennent financièrement le développement de projets et de scénarios. Nous avons regroupé sous une même direction l'accueil et le suivi des projets d'émissions dramatiques et des longs métrages. Cette équipe est souvent appelée à mettre à profit son expertise reconnue dans l'examen des projets à l'étape du scénario, parfois même avant que des distributeurs n'y soient associés. Forte de sa longue tradition en production de séries dramatiques de haut niveau, notamment des séries lourdes à budget élevé, Radio-Canada contribue ainsi à la découverte et au développement de scénarios prometteurs, qu'ils émanent d'auteurs chevronnés ou de nouveaux scénaristes.

¿  +-(0915)  

    Radio-Canada prolonge son appui à la scénarisation en commanditant des prix du scénario dans divers festivals canadiens, dont plusieurs se déroulent en région.

    Parlons maintenant de l'aide à la production.

    Près des trois quarts de notre programme d'aide au cinéma canadien de langue française est investi directement dans le développement de scénarios, la production et l'acquisition de nouveaux films. Notre intervention est caractérisée par trois aspects très importants qui sont, à notre sens, trois éléments importants du renouveau du cinéma canadien de langue française que partagent tous les intervenants de l'industrie, c'est-à-dire la qualité du scénario, la prise de risques et la diversité des genres cinématographiques.

    Au cours des six dernières années, Radio-Canada a contribué à la production d'une soixantaine de longs métrages et au développement d'une quarantaine de scénarios, en donnant une grande place à la relève notamment.

    Nous nous sommes associés à une très grande variété de projets, allant de la comédie populaire au film d'auteur, à la plupart des succès du box-office québécois des dernières années, comme Les Boys III, Nuit de noces, Séraphin, un homme et son péché, La grande séduction, Les invasions barbares, Le dernier tunnel, Camping sauvage, Ma vie en cinémascope et Le survenant, à des films pour la jeunesse comme La mystérieuse mademoiselle C, L'incomparable mademoiselle C, Daniel et les superdogs, à des films d'auteur plus personnels et à des premières oeuvres de cinéastes de la relève comme Mariages, La moitié gauche du frigo, L'ange de goudron, Le goût des jeunes filles, CQ2, Littoral, Les États-Unis d'Albert, Gaz bar blues, La vie avec mon père et Mémoires affectives, pour n'en nommer que quelques-uns.

    Notre soutien aux formes diverses de l'expression cinématographique cadre, selon nous, parfaitement avec le mandat à la fois généraliste et culturel du diffuseur public national.

    En ce qui a trait à l'aide à la promotion, le succès du cinéma québécois des dernières années n'est pas étranger aux investissements considérables qui ont été faits au niveau de la promotion. Prenant exemple sur le modèle américain, les producteurs et les distributeurs des films québécois déploient des stratégies promotionnelles percutantes au moment de la sortie d'un film en salle.

    La télévision de Radio-Canada joue un rôle clé à ce titre. Nous y consacrons près du quart de notre investissement, sous formes diverses. Au moment de la sortie des films en salle, l'effort promotionnel se déploie sur toutes les composantes du réseau français: télévision, radio, RDI et Internet. Nous apportons également un appui promotionnel hors antenne en créant diverses activités dans plusieurs festivals grand public et événements cinématographiques destinés aux professionnels.

    Notre télévision diffuse la Soirée des Jutra, qui récompense les oeuvres et les artisans du cinéma québécois. Nous présentons régulièrement des documentaires sur les coulisses de la production des films marquants afin d'attirer l'attention du public avant leur sortie en salle, comme par exemple le making of du tournage du film Aurore, que je vous invite à regarder le dimanche 3 juillet 2005 à 20 heures.

    Tout récemment, nous avons tenté une nouvelle expérience en collaboration avec le distributeur Alliance Atlantis Vivafilm et Téléfilm Canada: soutenir la sortie en salle, en Ontario, du plus récent succès du cinéma québécois, Le Survenant. Nos stations régionales de radio et de télévision ont appuyé l'effort promotionnel dans les villes de Sudbury, North Bay, Cornwall, Timmins, Kapuskasing et Hearst, où le film a été présenté.

    Nous répétons actuellement l'expérience avec beaucoup de succès à Moncton et à Bathurst, au Nouveau-Brunswick, avec le film Mémoires affectives, le grand gagnant du dernier Gala des Jutra et du Gala des Prix Génie. Nous sommes évidemment très fiers de participer à ces initiatives, qui permettent au public francophone et à notre cinéma d'élargir leurs horizons. D'autres actions seront annoncées prochainement.

    Au sujet de la diffusion, on peut presque affirmer que Radio-Canada tient désormais le rôle de diffuseur officiel du cinéma canadien en langue française, en permettant à tous les Canadiens d'avoir accès à notre cinéma, et plus spécialement au million de francophones vivant en milieu minoritaire qui n'ont pas toujours accès aux films canadiens en français.

    Le nombre de films canadiens diffusés à la télévision française a presque doublé au cours des cinq dernières années, passant de 38 titres diffusés en 2000-2001 à 60 titres en 2004-2005. Au cours de la présente saison de télévision, une proportion importante des grands films programmés en heure de grande écoute le samedi soir est consacrée à notre cinéma.

¿  +-(0920)  

    Enfin, à titre d'actionnaire de TV5 Monde, Radio-Canada contribue par ce biais au rayonnement international du cinéma canadien francophone.

    La télévision de Radio-Canada est un partenaire incontournable. Radio-Canada est le seul diffuseur à s'engager d'une manière systématique dans notre cinéma. La cohérence et la constance des interventions de Radio-Canada au cours des six dernières années en ont fait un allié précieux pour tous ses partenaires.

    Permettez-moi d'ailleurs de citer l’Association des producteurs de films et de télévision du Québec qui, dans le mémoire qu'elle vous a présenté, écrivait:

Ce diffuseur [Radio-Canada] est donc devenu un partenaire essentiel pour le développement, la production, la promotion et la diffusion de longs métrages québécois, et ce, sans qu’il n’y ait eu d’obligation au départ. Il faut souligner la vision et l’excellence de cette initiative et trouver des incitatifs afin que d’autres diffuseurs suivent cet exemple. Il faut surtout éviter de réduire le budget de cet organisme.

    Ces dernières années ont vu naître des oeuvres qui ont fortement marqué notre imaginaire et qui ont contribué à façonner notre culture et nos valeurs collectives. La télévision française est très fière d'y avoir été directement associée. C'est pourquoi, devant tant de succès, il nous apparaissait absolument essentiel de poursuivre cette initiative qui est au coeur de notre mandat. Notre appui au cinéma canadien contribue directement à affirmer le rôle central et rassembleur que doit jouer un diffuseur public national.

    La télévision de Radio-Canada a annoncé, en avril 2004, le renouvellement de son engagement dans le cinéma canadien de langue française avec un nouvel investissement de 12 millions de dollars sur trois ans.

    La télévision de Radio-Canada continue par ailleurs à intervenir activement dans toutes les discussions portant sur le renouvellement et la consolidation des différentes formes d'aide à la production cinématographique. Dans la mesure où elle continuera d'en avoir les moyens, Radio-Canada s'engage à jouer ce rôle déterminant et spécifique qui lui revient.

    Je vous remercie de votre attention et je suis prête à répondre à vos questions.

¿  +-(0925)  

+-

    La présidente (Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.)): Merci beaucoup, madame.

    Monsieur Schellenberger, vous commencez?

[Traduction]

+-

    M. Gary Schellenberger: Merci.

    Merci pour cet exposé.

    Nous avons parcouru le pays pour entendre divers témoins et interroger des gens sur le secteur du long métrage. Nous avons remarqué qu'on avait l'intention d'accroître la présence des films canadiens ou d'amener le public des longs métrages canadiens au cinéma à 5 p. 100. Je sais que nous en étions à 4,6 p. 100 et qu'il s'agissait pour l'essentiel de films français.

    Vous dites :

Nous avons ensuite réuni les représentants des associations professionnelles des scénaristes, des comédiens, des réalisateurs, des producteurs et des distributeurs au sein d'un comité consultatif pour nous conseiller sur nos stratégies d'intervention.

    Est-ce que CBC et Radio-Canada ont eu une approche différente concernant les longs métrages? On dirait que le côté français a bien réussi alors que pour une raison quelconque, ce n'est pas le cas pour les longs métrages en anglais.

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Je ne me permettrai pas de parler au nom de CBC, puisque M. Richard Stursberg doit venir vous rencontrer au cours des prochaines semaines. Je peux simplement vous dire que les réalités linguistiques et culturelles des milieux francophone et anglophone étant différentes, il est évident que la façon de travailler sur chacun des territoires est complètement différente pour répondre aux besoins et aux attentes de chacun des marchés.

    Richard viendra donc vous expliquer comment CBC travaille sur le marché anglophone pour soutenir le cinéma canadien.

[Traduction]

+-

    M. Gary Schellenberger: Je dois dire une chose. J'ai toujours été de ceux qui estiment qu'il faut faire participer les intervenants, lorsqu'il y a une politique, s'il y a un problème. Je crois que l'on peut faire venir tous les intervenants et les faire asseoir autour de la table. J'ai été de ceux qui disaient : « Faites venir tout le monde dans la salle avec le comité et fermez les portes jusqu'à ce que l'on arrive à une politique qui convienne à tous, et c'est seulement à ce moment-là que vous pourrez sortir. »

    Je pense que c'est ce que nous devrons donc demander à la Division anglaise de la télévision de radio-Canada. Nous avons cherché ce catalyseur et lorsque je vois ceci…

    Je crois que c'est ce qu'a fait la partie française de Radio-Canada. C'est une des choses que nous recherchons. Pourquoi cela s'est-il produit? C'est la première fois que l'on m'en parle ainsi. J'espère que nous allons pouvoir vérifier.

    Il y avait autre chose ici : « Les producteurs et distributeurs des films québécois déploient des stratégies promotionnelles percutantes au moment de la sortie d'un film en salle. » Nous avons aussi entendu cela au cours de nos déplacements, on nous a dit que certains des distributeurs ne font pas des efforts très convaincus lors de la sortie du film. Nous savons tous que si l'on regarde le journal local du samedi, on va tout savoir sur les films qui vont sortir aux États-Unis et partout. Je n'ai pas l'impression que tous les fonds de promotion aient été dépensés. C'est quelque chose que l'on nous a dit aussi.

    De quoi s'agit-il lorsque les producteurs ou les distributeurs de films québécois parlent de « stratégies promotionnelles percutantes »? Est-ce d'abord de l'argent, ou encore une fois, y a-t-il quelque chose que les Anglais pourraient reprendre?

¿  +-(0930)  

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Je peux vous dire que la stratégie mise en place au Québec et la stratégie mise en place à Radio-Canada font l'envie de beaucoup de pays. J'ai souvent l'occasion d'aller en Europe. Je travaille avec la France, la Belgique et la Suisse. Je vous dirai que la Belgique et la Suisse ont des problèmes énormes par rapport à leur cinéma national. Le fait que l'ensemble des partenaires sur le territoire canadien — distributeurs, producteurs, scénaristes, comédiens, réalisateurs et télédiffuseurs — travaillent ensemble assure une force beaucoup plus grande que si chacun travaillait de façon individuelle.

    Dans le passé, c'est ce qui se produisait. On faisait un film et on cherchait ensuite un distributeur. Lorsque le distributeur avait le film, il regardait le casting et demandait pourquoi on avait pris tels acteurs et pourquoi on avait réalisé le film de telle façon. Il pouvait dire que le film était beaucoup trop long, qu'il fallait le remonter ou le couper. Bref, comme il n'avait pas été partie prenante, il se retrouvait avec une oeuvre dont il avait de la difficulté à faire la mise en marché. Il faisait une mise en marché très rapide en se disant qu'il allait faire ce qu'il pouvait avec les revenus de ce film et qu'il passerait au suivant.

    La force du cinéma québécois, selon moi, vient de deux choses. Le premier élément est la qualité des scénarios, la qualité des histoires qui sont racontées. La deuxième chose est la promotion. En ce qui a trait à la promotion, je vais vous expliquer plus précisément comment nous travaillons avec les distributeurs et les producteurs.

    Dès que nous savons qu'un film ira en tournage, c'est-à-dire que son financement est complété, nous organisons une rencontre du producteur, du réalisateur, du distributeur et des gens de Radio-Canada, tant des services programmes, comme les émissions de variétés, que des ventes de temps commercial, des communications, de RDI ou du site Internet. Nous faisons une rencontre et nous discutons, avant même le tournage, de la mise en marché du film, du moment où ce sera fait, du public auquel le film s'adresse. Comment pouvons-nous commencer à en parler dès maintenant? Pouvons-nous avoir des entrevues avec les principaux artisans pendant le tournage? Pouvons-nous faire des rappels pendant le montage? Nous préparons la sortie du film.

    Au Canada, contrairement aux gens de France, par exemple, qui sont très jaloux de nous, nous avons la possibilité de diffuser la bande-annonce des films sur les écrans de télévision. Cet élément est interdit en France. On dit que le cinéma va vampiriser la télévision, compte tenu du fait qu'il y a beaucoup de cinéma américain en France. Bref, revenons chez nous.

    Nous avons donc la possibilité de présenter la bande-annonce du film pendant le temps publicitaire, et nous assurons une campagne de mise en marché double: nous faisons une mise en marché longtemps avant la sortie du film en salle, puis ensuite, comme nous savons à quel public le film est destiné, nos gens du service commercial et les responsables de la mise en marché du distributeur ciblent les émissions dont le public est intéressé à voir le film. Il y a donc un double impact: il y a un impact de longue durée, et on est certain que le public intéressé par tel sujet ou tel cinéaste va voir le film.

    Dans le cadre de notre soutien, nous accordons une bonification énorme. Lorsque 30 secondes sont achetées par le distributeur, nous pouvons donner trois, quatre ou cinq fois plus, selon la valeur globale du film. Plus un film est destiné à un large public, plus la bonification que nous donnons est importante, puisque nous pouvons rejoindre le public non seulement le soir mais pendant toute la journée.

    Donc, la promotion est complètement orchestrée dès la mise en chantier du film et se poursuit jusqu'à la sortie commerciale. Par exemple, le film Idole instantanée prend l'affiche en fin de semaine. La campagne de presse est commencée. Le prochain film sera Aurore, qui sortira le 8 juillet; nous présenterons le making of le 3 juillet. Vous allez voir qu'on va parler d'Aurore pendant les prochaines semaines aussi.

¿  +-(0935)  

[Traduction]

+-

    La présidente: Merci.

    Monsieur Schellengerger, je dois maintenant passer le micro à M. Kotto.

[Français]

+-

    M. Maka Kotto (Saint-Lambert, BQ): Merci, madame la présidente.

    Bonjour, Suzanne. Nous nous connaissons depuis plusieurs années déjà.

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Depuis au moins 15 ans.

+-

    M. Maka Kotto: Voilà. Je peux témoigner de son professionnalisme, de sa passion et de son sérieux. L'exposé qu'elle nous a présenté est d'une beauté rationnelle, je dirais. Étant moi-même un ancien du milieu du cinéma, je peux témoigner de la véracité de tous les détails de cet exposé.

    Je ne ferai pas plus de commentaires. Je dirai tout simplement que le programme de soutien et de promotion du cinéma incarné par la télévision française de Radio-Canada devrait servir de modèle à d'autres télévisons publiques, en l'occurrence au volet anglophone, qui devrait soutenir un cinéma qui, à mon point de vue, se trouve dans un vacuum. Ailleurs, on n'a pas accès à tous les ingrédients qui sous-tendent les succès de Radio-Canada dans son soutien et sa promotion du cinéma francophone au Québec.

    D'autre part, je dirais qu'il s'agit également d'un laboratoire qui pourrait sous-tendre des pistes de réflexion dans le cadre de la recherche que nous faisons nous-même ici, depuis que nous sillonnons le Canada pour glaner des informations, consulter, etc. C'est un microlaboratoire riche d'information qui, s'il avait plus de moyens, ferait encore mieux. S'il avait plus de moyens, il irait encore plus loin, à l'instar du Québec, dont la part de marché est actuellement de 21 p. 100. Je pense que le Québec pourrait atteindre 30 p. 100 plus rapidement que le reste du Canada. Qu'en pensez-vous?

    Ma deuxième question a trait au volume des dramatiques. Selon certaines informations que nous sommes parvenus à obtenir, n'y a-t-il pas là un risque de stagnation du développement de la relève? C'est un de nos soucis en ce moment. Merci.

+-

    Mme Suzanne Laverdière: La quantité de dramatiques présentées à Radio-Canada n'a pas diminué. C'est peut-être le cas dans l'ensemble de l'industrie, mais pas à Radio-Canada. Par contre, moins de dramatiques sont produites à l'interne: ces projets ont été repris par les producteurs indépendants. Le volume global demeure donc le même. En fait, cinq nouvelles dramatiques ont pris l'antenne au mois de janvier, ce qui est considérable. Bref, le volume est constant, voire un peu plus élevé.

    Mises à part la promotion et la qualité du scénario, je crois que la réussite du cinéma francophone vient du succès que nous connaissons depuis des années dans le domaine de la fiction télévisuelle, en d'autres mots la dramatique. À mon avis, dans aucun pays le cinéma ne peut être fort si la fiction télévisuelle n'est pas forte elle aussi. Je crois qu'à la télévision, cette dernière doit être très solide pour permettre à des scénaristes et à des réalisateurs de prendre des risques à l'égard de certains auteurs, à des comédiens, voire à des producteurs, d'apprendre à faire de la fiction pour éventuellement s'attaquer au cinéma. La fiction télévisuelle permet de créer des vedettes et de développer des scénaristes, des réalisateurs ainsi que des comédiens. En outre, elle donne au public l'occasion de s'identifier à des personnages. Je dirais également que la télévision, à cause du nombre de fictions qu'elle présente, nous permet de toucher à des sujets très variés; on peut ainsi tâter le terrain avant de se tourner vers le cinéma, qui demande beaucoup plus de moyens.

    Maka, vous avez parlé d'argent, mais il reste qu'à l'heure actuelle, le grand défi du milieu cinématographique québécois consiste à pouvoir continuer de financer autant de films qu'il ne le fait actuellement. Il est fantastique de constater que présentement, au moins un film sort chaque mois. Le film Le Survenant, qui se classe encore parmi les 10 premiers, commence à peine à décliner que le film C.r.a.z.y. arrive, puis Idole instantanée. Il y a ensuite un léger déclin. Pour qu'il s'agisse d'un véritable déclin, on parle d'environ cinq semaines. Voilà que paraît ensuite Aurore. Cet automne, il y aura L'Audition, et ainsi de suite. En tout temps, un film québécois est à l'affiche. En fait, il y en a toujours plusieurs en même temps: pendant qu'un film progresse, un autre décline légèrement, et ça continue ainsi.

    Par contre, les films coûtent cher. Les coûts de production n'ont pas diminué au cours des dernières années: au contraire, ils ont augmenté. Quand on veut faire des films qui touchent des sujets particuliers, qui nécessitent certains effets ou un casting plus important — des films d'époque, par exemple —, le budget de production doit être plus élevé. Si le financement reste le même et que les budgets augmentent, c'est mathématique: il se tournera moins de films. Pour ma part, j'ai une inquiétude. Nous sommes maintenant au mois de juin, et depuis le mois de janvier, en vertu des décisions qui ont été rendues en matière de financement par les deux partenaires nécessaires, soit Téléfilm et la SODEC, seulement six longs métrages sont entrés en production. C'est peu. Or, si on n'arrive pas à financer un nombre important de projets au cours des prochains mois, lors de la sortie l'année prochaine, aucun film ne paraîtra pendant certaines périodes.

    Le public nous suit, mais il peut aussi nous être infidèle. Il peut nous oublier. Ma crainte est que si pendant un, deux ou trois mois, aucun film ne prend l'affiche, le public se tournera vers d'autres films. Comme moi, vous savez qu'il risque de s'agir de cinéma américain. Il est donc vraiment important d'assurer une régularité à la production et à la sortie des films pour faire en sorte de maintenir le goût et l'intérêt du public.

¿  +-(0940)  

[Traduction]

+-

    La présidente: Merci.

    Monsieur Angus.

+-

    M. Charlie Angus (Timmins—Baie James, NPD): Merci, madame la présidente.

    Je voudrais tout d'abord avoir un éclaircissement. Vous avez dit que les 21 p. 100 du marché québécois que vous avez maintenant ne sont pas pris sur les films basés à Hollywood ou aux États-Unis. Cela vient de la part des films autres qu'américains. Serait-ce la même chose pour le Canada anglais? Aurions-nous 25 p. 100 du marché des films non hollywoodiens au Canada anglais ou est-ce que ce marché est propre au Québec?

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Cette situation prévaut dans tous les pays dont la langue n'est pas l'anglais. Je veux dire par là que le phénomène est le même, que ce soit en France ou au Québec. Lorsque le marché du cinéma national est en croissance, ce n'est pas la part de marché du cinéma américain qui décroît mais celle de l'ensemble des autres cinématographies.

    Par exemple, sur le territoire du Québec, il y a quatre ans, la part de marché du cinéma français, en l'occurrence originaire de la France, était de 15 p. 100. Elle est présentement de 2 p. 100. Il est tout à fait clair que la croissance de la part de marché du cinéma québécois s'est faite au détriment du cinéma étranger, voire du cinéma de la France.

[Traduction]

+-

    M. Charlie Angus: En ce qui concerne la question sur la participation et le développement cinématographique, vous avez dit que vous projetiez des bandes-annonces. Les bandes-annonces et, particulièrement pour le cinéma canadien anglais, le manque de visibilité des bandes-annonces a été un gros problème pour nous. Est-ce que vous faites cela comme un service public? Touchez-vous une part? Quel est l'intérêt pour Radio-Canada de présenter des bandes-annonces à la télé?

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Nous avons découvert un phénomène promotionnel avec les années: plus on parlera d'un film au moment de sa sortie en salle, plus ce film aura du succès lorsqu'on le diffusera sur nos ondes.

    Je vous en donne un exemple concret: Les Boys. Il y a eu Les Boys I, Les Boys II et Les Boys III. Chacun de ces films a fait des recettes tournant autour de 6 millions de dollars. Chiffrons le prix du billet à six dollars à des fins de comparaison; cela signifie qu'un million de Québécois ont vu en salle chacun des films de la série Les Boys.

    Lorsqu'on a diffusé le film à notre antenne, malgré le fait qu'il avait été en salle commerciale, qu'il avait été diffusé à la télévision payante, qu'il avait été disponible à la vidéo sur demande et qu'il était sorti en DVD et en VHS, les parts de marché, les cotes d'écoute ont été de 1,6 million d'auditeurs pour le premier et de 1,8 million pour le troisième; 1,8 million de téléspectateurs ont donc vu Les Boys III alors qu'un million de personnes l'avaient vu en salle.

    Ce phénomène est constant. On assure de la visibilité, une notoriété, en fait, car la promotion qu'on fait à notre antenne contribue à la notoriété d'un film. Plus cette notoriété sera importante, plus les gens voudront regarder le film au moment de sa diffusion.

    C'est si vrai qu'à quelques occasions, Radio-Canada a acquis des droits de films sur les marchés étrangers, alors que des distributeurs ne les avaient pas sortis en salle. Ces films n'ont jamais eu de succès à notre antenne. Pourquoi? Parce que le public ne les connaissait pas.

    La notoriété vient donc de la connaissance que nous avons d'une oeuvre, de la promotion qu'on peut en faire, de la presse écrite, des critiques, du fait d'avoir vu des vedettes et des prix qu'elles ont gagnés, etc.

    Cet élément est donc extrêmement important et fait en sorte que, malgré le fait qu'on n'ait pas d'obligation, on voit derrière tout cela une façon d'aider le développement de notre cinéma. Comme télédiffuseur, nous pouvons alors avoir une programmation beaucoup plus riche qui, au moment de sa diffusion, aura un impact important.

¿  +-(0945)  

[Traduction]

+-

    M. Charlie Angus: Comme j'ai posé la question abruptement sans la situer en disant quelque chose, je devrais préciser que je trouve que votre exposé a été très instructif. Je trouve que c'est une source d'inspiration, mais c'est en même temps très frustrant. Je sais que vous êtes là pour parler de Radio-Canada français, mais le service français fait partie de la grande société Radio-Canada. Vous nous racontez l'histoire d'une réussite et pourtant la CBC a fait un très mauvais travail au Canada anglais, en essayant de faire ce que vous avez si bien réussi à faire dans le marché québécois. Je comprends que vous n'êtes pas là pour parler de la CBC dans son ensemble, mais je dois néanmoins vous demander si c'est une culture particulière à Radio-Canada qui rend cela possible, ou si c'est le financement, ou est-ce une combinaison des deux? C'est la réponse que j'aimerais avoir aujourd'hui.

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: La décision de soutenir le cinéma est venue de M. Daniel Gourd, notre vice-président, qui était directeur des programmes à l'époque. J'étais directrice générale du cinéma et de la télévision à la SODEC, et il m'a embauchée pour que je m'occupe des productions indépendantes; devant mon expérience en cinéma, il m'a aussi demandé de développer un programme de soutien, puisqu'il croyait au cinéma canadien.

    Cela tient vraiment au goût, à l'intérêt et à la volonté d'individus à Radio-Canada; c'est ce qui fait qu'aujourd'hui nous avons le succès que nous connaissons et que nous travaillons avec l'ensemble de l'industrie. Le cinéma est un autre média en soi. Par contre, comme je vous le disais, il est important pour nous que le cinéma et la fiction s'entremêlent. Il est important de faire circuler les talents sur un petit marché comme le nôtre. Cela tient à la détermination d'individus.

    Lorsque je suis arrivée, en 1999, je me suis entourée d'experts en analyse de scénario pour constituer une équipe forte et, du coup, consolider notre engagement à développer l'industrie, favoriser la relève et développer de nouveaux talents.

    Vous savez ce qui se produit en ce moment? Très souvent, des jeunes viennent nous proposer un projet de cinéma; on se met à parler avec eux, et ils nous soumettent finalement un projet de télévision. Parfois, les jeunes nous proposent un court métrage et on découvre qu'ils ont des projets d'émissions dans leurs tiroirs. Il s'agit de s'ouvrir à la création et de ne pas se cantonner dans un cadre extrêmement rigide. Tous peuvent bénéficier de la création, des échanges, des contacts, et de l'expérience de chacun. Encore une fois, cette décision de soutenir le cinéma est individuelle, mais Radio-Canada en retire des bénéfices dans tous les champs d'activité, et particulièrement dans celui de la fiction.

¿  +-(0950)  

[Traduction]

+-

    La présidente: Monsieur Angus, je suis désolée, mais c'est maintenant M. Smith qui va poser ses questions.

[Français]

+-

    M. David Smith (Pontiac, Lib.): Madame Laverdière, merci beaucoup d'être ici ce matin. En tant que Québécois, je suis très fier des résultats obtenus par Radio-Canada, de votre équipe et de tout ce que vous avez réussi.

    Ma famille et moi-même sommes des cinéphiles et nous avons hâte que le prochain film sorte pour aller le voir. Vous faites un travail extraordinaire.

    Je sais que la question du financement est une partie du nerf de la guerre. Lorsque j'étais dans le milieu des affaires, j'essayais de faire plus de revenus et d'avoir le moins de dépenses possible afin de pouvoir investir ailleurs. On peut lire dans votre brochure que vous avez fait traduire certains films en anglais pour le marché anglophone. Pourriez-vous nous parler de certains des films qui ont été traduits en anglais, des résultats qu'ils obtiennent, nous dire à quel point ils arrivent à pénétrer le marché anglophone au Canada, par exemple?

+-

    Mme Suzanne Laverdière: D'abord, c'est le sous-titrage que nous présentons, pas le doublage. Le film est présenté en français, avec des sous-titres en anglais. Pourquoi? C'est par respect pour le créateur et pour la version originale. Que ce soit Les invasions barbares, La grande séduction ou, plus récemment, Le Survenant ou Mémoires affectives, ces films ont été présentés avec des sous-titres.

    Il est évident que ce n'est pas facile de pénétrer le marché du Canada anglais pour les films de langue française, comme les films venant de France, de Belgique ou de Suisse, ou même pour les films de langue autre que l'anglais. Le plus souvent, le succès de nos films — prenons le cas des films Les invasions barbares et La grande séduction — est un succès mondial. Malgré leur rayonnement international énorme, comme ces films ont été tournés en français, cela reste du cinéma d'art et d'essai. C'est ce qu'il faut comprendre aussi.

    Lorsque des films comme Les invasions barbares, avec cinq millions de dollars de recettes au box-office au Québec, et La grande séduction, avec sept millions de dollars de recettes au box-office, ont un rayonnement à l'échelle internationale, ils entrent dans le créneau du cinéma d'art et d'essai, du cinéma d'auteur pointu, puisqu'ils se retrouvent dans le petit pourcentage des cinématographies autres que nationale et américaine. Ils deviennent donc des éléments culturels très pointus. Par exemple, il est actuellement plus facile pour nous de percer sur le territoire européen qu'au Canada anglais.

    Par contre, les deux expériences récentes que nous venons de faire avec le Le Survenant et Mémoires affectives ont été extrêmement concluantes. L'une des erreurs qui ont été commises dans le passé a été de sortir le film dans les grands centres. On s'est donc dit qu'il fallait d'abord rejoindre les francophones, en présentant les films sous-titrés en anglais, en élargissant la promotion pour que les anglophones puissent venir voir les films, et en misant d'abord sur l'Ontario. En Ontario, le box-office a atteint environ 30 000 $ après deux semaines, ce qui est énorme pour un film qui est sorti en deux copies seulement et qui s'est promené de ville en ville.

    En ce qui a trait au film Mémoires affectives, on a eu un choc quand on a appris les résultats du film le week-end dernier au Nouveau-Brunswick. Le film avait fait 9 000 $ de recettes après trois jours de projection, avec une copie dans deux villes. Cela correspond à un bon week-end à Montréal dans une grande salle. Au Nouveau-Brunswick, on a fait la même chose en trois jours. Actuellement, les distributeurs et les propriétaires de salles dans ces régions découvrent l'intérêt du public.

    Lorsque j'étais à la SODEC, en 1995 et 1996, quand on sortait de Montréal, les propriétaires de salles au Québec nous disaient qu'ils ne voulaient pas du cinéma québécois parce que, pour eux, cela ne fonctionnait pas. Ils préféraient présenter du cinéma américain.

    Il y a eu par la suite toute une synergie, tout un travail qui a été fait avec les distributeurs et les producteurs pour faire des sorties en salle, pour rencontrer les vedettes, pour les amener sur le terrain. Aujourd'hui, 60 p. 100 des revenus d'un film viennent de l'extérieur de Montréal alors qu'auparavant, c'était peut-être 1 p. 100 des revenus du film.

    Actuellement, les propriétaires de salles en région, hors Québec, et les distributeurs commencent à découvrir qu'il y a possiblement là un bassin de distribution qui va faire en sorte qu'on va pouvoir élargir les parts de marché du cinéma québécois et conquérir de nouveaux publics.

    Dans mon allocution, je disais que d'autres initiatives allaient bientôt venir. On espère pouvoir sortir Aurore dans la région de Winnipeg. On voudrait — on croise les doigts et on va travailler très fort avec Téléfilm Canada et la compagnie Alliance Atlantis Vivafilm — sortir Maurice Richard sur l'ensemble du territoire canadien, puisque Maurice Richard est une idole pour l'ensemble des francophones, puisqu'il s'agit de hockey, etc.

    Avec les résultats qu'on obtient actuellement, je suis à peu près certaine que, dans quelques années, une partie importante des revenus générés par la distribution en salle va provenir des marchés francophones de l'extérieur du Québec. Je crois que l'on va pouvoir aussi, de cette façon, percer auprès de cinéphiles anglophones avec le film de langue française.

¿  +-(0955)  

    Toutefois, il faut d'abord que les artistes se déplacent et que les réalisateurs rencontrent la presse. Roy Dupuis s'est rendu à Moncton, et je peux vous dire qu'il a eu beaucoup de succès. La même chose s'est produite quand Jean-Nicolas Verrault a fait le tour des villes ontariennes. Les jeunes filles étaient en très grand nombre dans la salle, mais elles étaient venues avec leurs copains. C'est avec le bouche-à-oreille que cela s'est fait dans les régions du Québec. Ces initiatives, dont les résultats ont été concluants, me donnent beaucoup d'espoir. Comme je vous le disais, il s'agit du même phénomène qui s'est produit au Québec il y a quelques années, quand on a décidé de sortir les films de Montréal et de Québec.

+-

    M. David Smith: Envisagez-vous, par le biais de nouvelles technologies comme le e-cinéma, d'offrir certains films, que ce soit à partir de votre site Internet ou d'une banque de films qui serait disponible? Par exemple, quelqu'un d'un autre pays pourrait vouloir télécharger certains de ces films.

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Ce sont les distributeurs et non Radio-Canada qui détiennent les droits de commercialisation des films. Pour cette raison, nous n'avons pas le droit de vendre ces derniers. Par contre, nous pouvons en faire la promotion à l'antenne et hors antenne et les télédiffuser. Ce dont vous parlez relève du plan d'affaires des distributeurs.

    En ce qui a trait au e-cinéma, nous ne sommes pas engagés dans cette voie, mais nous restons très attentifs aux démarches entreprises dans ce domaine, notamment par Daniel Langlois et par l'ONF. En outre, un événement dirigé par Sheila de la Varende, qui travaille avec Daniel Langlois, aura lieu au mois de septembre. Ce marché de distribution de cinéma numérique sera rattaché au Festival du nouveau cinéma de l'Équipe Spectra. Nous suivrons cela de très près. En effet, ce sera non seulement une façon d'élargir la diffusion des films mais aussi une occasion d'avancer sur le plan technologique.

    Parce que nous ne pouvons pas commercialiser les films, nous ne faisons pas partie de cette démarche. Cependant, il est certain que nous pourrions offrir notre appui sur le plan promotionnel, même s'il ne s'agit pas ici de décider de mettre de l'équipement à un endroit ou à un autre.

+-

    M. David Smith: À votre avis, si on vous demandait...

[Traduction]

+-

    La présidente: Monsieur Smith, je regrette, je dois passer la parole à un autre membre du comité.

    Madame Oda.

+-

    Mme Bev Oda (Durham, PCC): Merci, madame la présidente.

    Merci d'être venue aujourd'hui.

    D'après ce que je vois, on reconnaît ici que Radio-Canada joue un rôle essentiel dans le cinéma en français, à toutes les étapes du développement. Vous investissez dans le développement, dans l'élaboration des scénarios, etc., et vous êtes aussi radiodiffuseur. De plus, vous avez aussi une participation financière dans certains projets. Ils vous appartiennent donc en partie.

    Il me semble que votre rôle dans les films en langue française est fondamental, et je m'inquiète un peu—d'une façon générale—lorsque l'examine l'investissement. Je sais que les investissements que vous avez effectués dans ce domaine sont limités par votre financement. Vous avez investi une moyenne de 4 millions de dollars par an depuis 1999. Vous avez récemment engagé 12 millions de dollars pour les trois prochaines années, ce qui nous donne toujours une moyenne de 4 millions de dollars. Lorsque vous avez le même montant investi sur une période de huit ans, il y a en fait une diminution; ne serait-ce qu'avec l'inflation, il y a une diminution.

    Je m'inquiète en fait de votre capacité à non seulement maintenir le rôle que vous jouez mais aussi à l'accroître, parce qu'il est fondamental, je crois, pour l'industrie cinématographique au Québec. Avez-vous des commentaires sur votre capacité à réattribuer les fonds ou à en trouver afin de ne pas réduire votre engagement ou votre concentration dans ce domaine?

À  +-(1000)  

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Oui. La moyenne est de quatre millions de dollars par année. Toutefois, il faut admettre qu'en dollars constants, sur une période très longue, il y a une diminution. Or, ce serait vraiment triste, pour nous d'abord, à Radio-Canada, de même que pour l'industrie si, pour des raisons financières, il nous était impossible de poursuivre notre engagement à l'égard du cinéma canadien.

    Malheureusement, nous ne pouvons pas générer de fonds à cette fin puisque nos activités ne sont pas à but lucratif: elles sont reliées à la promotion et au soutien à l'écriture de scénarios. Vous savez probablement qu'un scénario dont on a financé l'écriture ne se rend pas automatiquement à l'étape de la production. Certains projets ne se réalisent jamais, dans certains cas parce qu'ils sont abandonnés par les auteurs. Il y a là de l'argent qui se perd.

    Ce qui sera déterminant pour nous sera le fait d'accéder au Fonds canadien de télévision. Si nous ne pouvons pas obtenir de financement direct pour le cinéma, qui est un des éléments de notre programmation, il faudra trouver une façon d'appuyer l'ensemble de notre programmation. De cette façon, il sera possible de réaffecter des sommes à l'interne et de continuer par le fait même à soutenir le cinéma.

    Le financement provenant du Fonds canadien de télévision est pour nous un facteur essentiel, en ce sens qu'il peut nous permettre de financer des émissions jeunesse, des dramatiques et d'autres types d'émissions. Les démarches que nous effectuons actuellement auprès du Fonds canadien de télévision dans le but d'obtenir un financement stable sont absolument déterminantes. Il est essentiel que nous obtenions au moins 45 p. 100 de l'enveloppe destinée aux projets de CBC et de Radio-Canada — je parle ici de l'ensemble du fonds—, pour que du côté français, nous puissions dégager des sommes.

[Traduction]

+-

    Mme Bev Oda: Vous m'avez donné exactement la réponse que je voulais entendre au sujet du Fonds de télévision. Vous dites que c'est 25 p. 100 de l'enveloppe de CBC/Radio-Canada.

    Est-ce que c'est le niveau actuel de l'enveloppe de CBC?

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: On parle ici de 45 p. 100.

[Traduction]

+-

    Mme Bev Oda: Est-ce 45 p. 100 de l'enveloppe de CBC/Radio-Canada? Oui?

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Je dis que 45 p. 100 de l'enveloppe francophone du Fonds canadien de télévision devrait être allouée à Radio-Canada. Par le passé, on nous attribuait 50 p. 100 du fonds total. Ce que je vous dis maintenant, c'est qu'il nous faudrait obtenir au moins 45 p. 100.

À  +-(1005)  

[Traduction]

+-

    Mme Bev Oda: Je veux être sûre de bien comprendre. Sur l'ensemble du Fonds de télévision, combien représente l'enveloppe de CBC, en incluant Radio-Canada et CBC anglais? Avez-vous une idée? Le savez-vous?

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Pour ce qui est de la section française, on parle d'environ 38 p. 100.

    Il faut se rappeler que pendant la période où le Fonds canadien de la télévision a été créé et ce, jusqu'en 2000, Radio-Canada bénéficiait de 50 p. 100 de l'enveloppe francophone. On nous a ensuite retiré l'exclusivité de celle-ci. Nous étions donc dorénavant en concurrence avec l'ensemble des émissions présentées par des diffuseurs francophones. Notre accès au fonds a varié pour se situer finalement aux alentours de 38 ou 40 p. 100.

    On a parlé plus tôt avec Maka Kotto de l'importance de la dramatique, pierre angulaire de toute programmation. Or, pour que notre stabilité soit assurée, il faut que cette proportion soit de 45 p. 100. Idéalement, il nous faudrait revenir à 50 p. 100. Néanmoins, avec 45 p. 100, nous pourrions continuer à accomplir le travail que nous faisons actuellement.

[Traduction]

+-

    Mme Bev Oda: J'ai encore deux questions. Je veux être sûre de pouvoir les poser pendant le temps qui me reste.

    Je vois dans votre exposé que vous avez participé au développement des scénarios de 60 films en six ans. Vous devez toujours investir dans un nombre de scripts plus grand que ce que vous allez avoir comme films à diffuser à Radio-Canada en fin de compte. Savez-vous quelle est la proportion ou la moyenne? Nous avons entendu dire dans un autre témoignage que les grands studios vont devoir investir dans des centaines de scénarios avant de pouvoir entreprendre un ou deux projets. D'après votre expérience quel est l'historique de la situation en ce qui concerne ces investissements?

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Oui, tout à fait.

    En effet, le développement des scénarios a varié d'année en année. Lorsque le programme a démarré, nous avons surtout investi dans l'écriture des projets étant donné qu'il faut souvent deux ans, parfois même trois ans pour développer des projets. La production s'est accentuée par la suite.

    Le nombre de scénarios développés a pu varier, d'année en année, entre 7 et 15 par année. Du côté de la production, Radio-Canada a financé de 6 à 17 longs métrages par année. En 1999, Radio-Canada a soutenu le développement de 15 longs métrages, et en 2004, de 7 longs métrages. En production, c'est l'inverse: on a financé la production de 6 projets en 1999 et de 17 projets en 2003; cela prend de deux à trois ans. Certains scénaristes abandonnent des projets et reviennent parfois quelques années plus tard. En fait, un projet sur deux passe à l'étape de la production sur une période très longue.

[Traduction]

+-

    Mme Bev Oda: Parfait. Merci.

    J'ai une dernière question.

+-

    La présidente: Je regrette, il ne vous reste plus de temps.

    C'est maintenant à M. Lemay.

[Français]

+-

    M. Marc Lemay (Abitibi—Témiscamingue, BQ): J'ai trouvé votre présentation très intéressante, madame Laverdière.

    Je vais utiliser le mot à la mode au Québec: convergence; non pas la convergence à la TVA mais la convergence à la Radio-Canada. Disons que je m'appelle Stéphane Bourguignon et que j'ai une idée d'émission dont le titre serait La vie d'un couple à l'âge de 30 ans et que ce couple existe depuis cinq ans. Je vous rencontre et je commence à développer cette idée. Dois-je comprendre que, m'appelant Stéphane Bourguignon ou Avard, peu importe, mon idée pourrait, avec vos conseils, se transformer en un projet de dramatique et devenir même un film?

    Quel est le droit de regard de Radio-Canada, donc de votre équipe, dans la mise en oeuvre de mon projet? À partir du moment où l'idée est acceptée et où la question du financement est réglée, quel est votre droit de regard jusqu'à la diffusion sur les écrans?

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Les relations que nous avons nouées au fil des ans avec les scénaristes, les réalisateurs et les producteurs sont extrêmement étroites. Comme je le disais tout à l'heure, ces mêmes intervenants travaillent avec nous en télévision. Notre intervention se fait donc de façon extrêmement ouverte. Quand nous décidons de financer un projet, nous devenons de véritables partenaires et nous mettons l'expertise dont nous disposons au service du projet et de ceux qui le font. Nous analysons le scénario, nous nous assoyons avec le scénariste, le réalisateur et le producteur. Nous discutons en profondeur du scénario. Nous commentons. Nous sommes le premier public. Il faut comprendre que Radio-Canada est le premier public extérieur à l'équipe de création qui porte un regard sur le scénario.

    Un scénariste, un réalisateur et un producteur peuvent travailler depuis plusieurs années au développement d'un projet, mais ils le font entre eux. Ils font lire leur scénario à leur ami, à leur femme, à quelqu'un du bureau, mais il n'y a pas de regard critique, de regard extérieur qui s'y pose.

    Radio-Canada porte un regard en tant que personne ou en tant qu'organisme extérieur à ce groupe, mais en plus, son rôle est de faire des émissions de télé qui vont rejoindre un public. Dans les commentaires que nous faisons sur le scénario, nous faisons toujours valoir le point suivant: s'il y a des choses difficiles à comprendre pour nous, qui sommes habitués à lire des scénarios, imaginons ce que ce sera pour le public. Il ne comprendra pas. Par conséquent, nous commentons le scénario, nous discutons avec ceux qui l'écrivent et nous en relisons plusieurs versions que nous bonifions par nos commentaires. Cela se fait dans un contexte d'échanges. Nous travaillons de la même façon dans le cas des séries dramatiques. Généralement, comme la confiance s'est installée entre les groupes de création et nous, nos commentaires sont écoutés. Je ne dis pas qu'ils sont tous acceptés, mais ils sont écoutés par les créateurs.

    C'est ce que nous faisons jusqu'à l'étape de la production.

    Une fois le scénario écrit, nous discutons avec le réalisateur, le producteur et le distributeur du choix des acteurs, du casting. Pourquoi? Parce que nous avons une vision très, très large de tous les projets cinématographiques qui se feront au cours de l'année et d'un grand nombre de séries télé. C'est nous qui pouvons dire au producteur que tel acteur serait extraordinaire dans ce rôle, mais qu'il sera dans telle ou telle série, ou dans tel ou tel film, et que sa surexposition nuira peut-être à son projet.  Il s'agit d'informer et de discuter.

    Comme vous le savez, nous avons un service de casting à Radio-Canada. Les réalisateurs utilisent souvent les services de notre agent de casting pour découvrir de nouveaux comédiens, puisque nous tenons des auditions avec un grand nombre d'acteurs. Bref, nous travaillons aussi en étroite collaboration.

    Une fois le film tourné, il y a toutes les étapes du montage: les premier et deuxième montages de l'image, puis son montage final, et ensuite le montage du son. On procède au montage de l'image avant de faire le montage sonore. À chaque étape, nous sommes invités à visionner, encore une fois avec l'équipe de création, et à commenter les images que nous voyons. Là encore, par nos questions et nos commentaires, nous donnons un input pour enrichir l'oeuvre, toujours dans un contexte de transparence, de dialogue et de respect des créateurs.

À  +-(1010)  

+-

    M. Marc Lemay: Ensuite on arrive à la mise en ondes.

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Puis à la commercialisation en salle, vidéo, etc., puis à la diffusion à Radio-Canada.

À  +-(1015)  

+-

    M. Marc Lemay: Si par malheur — ce que je ne souhaite bien évidemment pas — vous disparaissiez, que se passerait-il pour le cinéma québécois et canadien?

+-

    Mme Suzanne Laverdière: J'ai espoir que d'autres partenaires continueront à soutenir le cinéma avec autant de vigueur. Je vais vous parler d'un phénomène nouveau, que je trouve très rassurant: lorsque Radio-Canada a commencé à soutenir le cinéma, en 1999, aucun long métrage canadien francophone n'avait une visibilité importante auprès des chaînes privées. Aujourd'hui, comme je le disais tout à l'heure, sur les 10 succès de l'année 2004 — je parle des grands succès de l'année —, six films ont été soutenus par Radio-Canada, deux par TQS et deux par TVA. Je souhaite que tous les télédiffuseurs soutiennent le cinéma.

    Il est évident que chacun des télédiffuseurs choisira des films qui correspondent à ses orientations de programme. Il est évident que les choix de TVA ou de TQS seront très différents de ceux de Radio-Canada, et que Radio-Canada a un soutien beaucoup plus large, comme je vous le disais tout à l'heure, allant du film très populaire jusqu'au film d'auteur. Néanmoins, je pense que la démonstration est faite aujourd'hui de l'importance du long métrage, non seulement pour le développement d'une identité culturelle, mais également du point de vue du programme, pour les télédiffuseurs.

+-

    M. Marc Lemay: Merci.

[Traduction]

+-

    La présidente: Monsieur Silva.

[Français]

+-

    M. Mario Silva (Davenport, Lib.): Merci, madame la présidente.

    Notre comité a tenu plusieurs réunions, et beaucoup de témoins nous ont parlé de la qualité des scénarios, surtout du côté des films en anglais. J'ai trouvé intéressant que cet élément soit votre première priorité pour le développement de films. Quel travail entendez-vous faire pour développer cet élément important dans le marché du film français au Canada?

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Comme je l'expliquais dans ma dernière réponse, un scénariste peut venir nous voir avec une idée. Un scénariste peut venir nous voir avec un synopsis, c'est-à-dire un résumé de l'histoire du film. On peut venir nous voir avec une première version de scénario. On peut venir nous voir avec une écriture beaucoup plus avancée. Pour soutenir le développement des projets, nous sommes ouverts à toutes les idées, à tous les types de film, à des projets qui proviennent de scénaristes chevronnés tout comme de quelqu'un qui en est à ses premières armes. L'ouverture dont nous faisons preuve en lisant tous ces projets, en rencontrant l'auteur, en discutant avec lui est le point de départ.

    Ensuite, selon le niveau d'avancement de l'écriture, nous allons vers une première version du scénario ou une version finale du scénario ou un peaufinage du scénario. Il y a toujours une progression qui se fait pour arriver au scénario le plus impeccable possible. Un bon scénario peut donner un mauvais film pour des raisons diverses, mais un mauvais scénario ne donnera jamais un grand film.

    Au point de départ, nous essayons de nous donner toutes les chances possibles et de faire en sorte que le film soit un film de très grande qualité. Nous y mettons donc l'argent et le temps nécessaires, c'est-à-dire le temps de commenter, de rencontrer le scénariste, de discuter avec lui pour faire en sorte que le scénario se bonifie étape après étape.

    Ce travail se fait également avec le producteur. Comme nous voulons que ce film se fasse, il faut qu'un producteur soit affecté au projet pour s'assurer qu'au terme de l'écriture, il y ait quelqu'un qui se batte pour monter le financement du projet. C'est donc un trio, et il y a parfois même une quatrième personne qui arrive puisque, de plus en plus, les réalisateurs s'impliquent dans l'écriture, non pas pour écrire avec le scénariste, mais pour s'assurer que ce qui est écrit peut se tourner ou parfois pour trouver des images qui font en sorte qu'on puisse alléger les dialogues du scénario, parce qu'on peut donner visuellement de l'information qu'on n'est pas obligé de décrire par des paroles.

    C'est donc un groupe de travail qui, étape après étape, enrichit le projet pour faire en sorte qu'au moment de déposer les demandes de financement de ces films, le scénario est achevé. Vous avez raison de dire que le succès de notre cinéma vient de scénarios très forts et aussi de la promotion. Selon moi, ce sont les deux aspects principaux: un scénario fort, et ensuite des moyens de rejoindre le public.

[Traduction]

+-

    La présidente: Madame Oda.

+-

    Mme Bev Oda: Merci encore.

    Je voudrais vous parler un peu de la diffusion des longs métrages à Radio-Canada. Vous avez dit dans votre exposé qu'en 2000-2001, vous aviez diffusé 38 longs métrages, et que ce nombre est passé à 60 pour 2004-2005. Je me demande combien de ceux-ci sont dûs à l'absence des parties de hockey de la LNH. Quel serait le nombre normal de longs métrages diffusés par Radio-Canada s'il y avait du hockey?

À  +-(1020)  

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Je peux vous dire qu'il y avait du hockey à Radio-Canada. Le hockey s'est arrêté il n'y a pas très longtemps. Donc, au cours de la dernière année de référence que je vous donne, il y avait toujours du hockey. Cela n'a rien à voir.

[Traduction]

+-

    Mme Bev Oda: Vous avez donc diffusé 60 longs métrages à Radio-Canada et aucun pendant la période réservée au hockey dans le programme?

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Je vous dis que les 60 titres ont été présentés à Radio-Canada dans différentes cases horaires. Une petite partie de ces titres ont été diffusés dans la case horaire du hockey. Toutefois, ils ont été diffusés en majorité dans d'autres cases horaires. Revenons à ce que je crois que vous voulez que je dise. Il serait faux de dire que la croissance du nombre de longs métrages à notre antenne est liée au fait qu'il n'y ait pas de hockey.

[Traduction]

+-

    Mme Bev Oda: En fait, j'essayais d'estimer le chiffre ou d'avoir une moyenne pour l'année prochaine, qu'il y ait du hockey ou pas. Est-ce que Radio-Canada diffuserait environ 60 titres? C'est exact?

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Absolument. Il faut se rappeler que très souvent, à l'époque où nous présentions du hockey, nous diffusions des longs métrages canadiens le dimanche soir. Cela a donc été déplacé du dimanche au samedi.

[Traduction]

+-

    Mme Bev Oda: Je ne voulais pas partir de l'hypothèse que ce nombre allait être maintenu. Je voulais être sûre de bien comprendre l'impact du hockey ou de l'absence de hockey.

    Sur ces 60 titres, combien y en aurait-il auxquels Radio-Canada a contribué ou dans lesquels la Société a une participation financière? Je peux poser la question autrement, sur ce nombre, à combien du secteur de production indépendant venez-vous d'octroyer une licence? Je ne veux pas de chiffre exact, juste une proportion. J'aimerais avoir une idée du nombre de films auxquels Radio-Canada participe activement, du nombre qui ont simplement une licence, et savoir dans quelle mesure vous travaillez avec le secteur indépendant au Québec.

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: J'ai ici la liste de ces 60 titres. Environ 40 p. 100 de ces films ont été appuyés par Radio-Canada. Il faut comprendre qu'il s'écoule beaucoup de temps entre le moment où Radio-Canada initie un projet et le moment où nous avons le droit de le diffuser.

[Traduction]

+-

    Mme Bev Oda: Je ne dis pas que c'est bien ou pas, je voudrais simplement savoir quelle est la proportion.

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Il y en a déjà 40. C'était en 2004 et le programme a commencé en 1999. Plus le temps va passer, plus nous aurons des droits sur des films. Par exemple, Radio-Canada n'a toujours pas le droit de télédiffuser Séraphin, un homme et son péché, qui est un énorme succès, parce que sa diffusion par le biais d'autres plateformes n'est pas terminée. En 2004, on a donc eu accès aux films qui ont bénéficié d'un appui en 1999, en 2000 et 2001, et ils représentent environ 40 p. 100.

[Traduction]

+-

    Mme Bev Oda: Je sais que nous avons eu beaucoup de discussions au sujet du rôle actif que vous jouez dans le développement et pour mener les projets jusqu'au bout, mais je pense que Radio-Canada est également très importante pour le secteur indépendant au Québec dans le domaine des longs métrages. Donc la proportion est d'environ 40-60. Est-ce exact?

    Merci.

À  +-(1025)  

+-

    La présidente: Votre présidente va utiliser le temps alloué pour les questions des Libéraux, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.

    Je pense que le cinéma français est extrêmement important pour la préservation et l'épanouissement de la langue française dans tout le Canada. Je voulais approfondir un peu avec vous la question de la diffusion ou de la projection des films français hors Québec et savoir quelle est la proportion des ventes en dehors du Québec pour les films français.

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Comme je vous le disais un peu plus tôt, très peu de films canadiens de langue française ont été diffusés jusqu'ici à l'extérieur du Québec. Il y a eu Séraphin, un homme et son péché, Le Survenant et maintenant Mémoires affectives. On peut compter sur les doigts d'une main les films qui ont atteint le marché des minorités francophones hors Québec au cours des dernières années. Le classement au box-office n'est pas très élevé jusqu'à maintenant, sauf en ce qui a trait aux derniers résultats que je vous ai donnés. On peut voir une croissance en Ontario et au Nouveau-Brunswick. Toutefois, il est évident que le pourcentage que représentent ces revenus par rapport à l'ensemble des revenus d'exploitation est, encore une fois, minime. Prenons le cas du Survenant. Au Québec, 90 copies ont été utilisées et à l'extérieur du Québec, deux copies seulement circulent. On ne peut pas comparer les deux situations.

[Traduction]

+-

    La présidente: Par conséquent, le rôle que joue Radio-Canada est très important. Dans ces conditions, combien de films français sont-ils vus en dehors du Québec à Radio-Canada?

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Combien de films sont vus à Radio-Canada à l'extérieur du Québec? Je peux vous dire que les 60 films qui ont été diffusés à notre antenne l'ont été dans l'ensemble du pays et j'ose espérer que les francophones hors Québec ont regardé ces films.

À  +-(1030)  

[Traduction]

+-

    La présidente: L'autre chose que je voulais vous demander est celle-ci. Dans le texte français de votre mémoire, on peut lire :

[Français]

Nous sommes évidemment très fiers de participer à ces initiatives qui permettent aux publics francophones et à notre cinéma d'élargir leurs horizons.

[Traduction]

    Dans la version anglaise, on dit que vous êtes « proud to be part of these initiatives that give French-speaking audiences and Quebec film.... »

    Ce qui m'intéresse c'est que jusqu'ici nous n'avons entendu aucun témoignage au sujet de films réalisés en français hors Québec, ou basés sur l'expérience de francophones au Canada, ailleurs qu'au Québec. Je me demande si vous pourriez nous parler de cela, parce qu'il est important, je crois, dans les films anglais que toutes les régions puissent jouer un rôle et raconter leurs histoires, et de la même façon, et peut-être encore plus important, dans les films français pour les minorités francophones qui peuvent avoir des difficultés particulières pour conserver leur langue et leur culture et leur identité.

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Le taux d'appui du cinéma francophone hors Québec par Radio-Canada est de 100 p. 100. Je veux vous dire que depuis 1999, nous n'avons reçu que trois projets de longs métrages provenant de scénaristes ou de réalisateurs hors Québec. Ces trois films étaient d'excellente qualité, et c'est la raison pour laquelle nous les avons appuyés.

    Très peu de scénaristes hors Québec écrivent des longs métrages, tout comme il y a très peu de réalisateurs hors Québec ainsi que très peu de producteurs. Nous voulons développer des talents et c'est ce que nous faisons. Pour la quatrième année consécutive, nous avons organisé, de concert avec l'ONF et Téléfilm Canada, des concours d'écriture de courts métrages. Nous avons décidé de commencer par le court métrage. Ensuite on passera à la fiction pour la télévision et finalement au cinéma. Nous faisons affaire avec des scénaristes qui en sont à leurs premières armes, ou avec des gens qui viennent du documentaire ou encore du milieu du théâtre. Nous avons donc, pour la quatrième année consécutive, un mécanisme de développement de scénarios.

    Actuellement, nous tournons deux dramatiques. Notre objectif est de produire deux dramatiques par année au cours des prochaines années. Nous espérons ainsi trouver des scénaristes qui passeront au médium du cinéma. Nous nous chargeons d'en assurer l'encadrement en collaboration avec l'école de cinéma l'INIS pour que toutes les étapes du projet soient vraiment bien articulées et que l'on puisse éventuellement dénicher des talents.

[Traduction]

+-

    La présidente: Je comprends la difficulté. Au Canada, si l'on veut travailler dans le cinéma anglais, on va à Montréal ou à Toronto ou à Vancouver. Je suis sûre que si l'on veut travailler sur des films français où que l'on soit dans le pays, on veut aller à Montréal parce que c'est là que se trouve le talent, que se trouve l'énergie. Donc je comprends les problèmes. Je veux aussi savoir s'il y a des façons de régler le problème que nous pourrions proposer, et donc j'aimerais entendre parler des initiatives qui sont prises.

    Un tout petit commentaire sans rapport au sujet des sous-titres : je les déteste. Je ne regarde pas le film; je regarde les sous-titres.

    Monsieur Schellenberger, avez-vous quelque chose à ajouter?

+-

    M. Gary Schellenberger: Non, ça va, merci.

+-

    La présidente: Avez-vous autre chose, monsieur Lemay?

[Français]

+-

    M. Marc Lemay: J'aimerais justement poser une question là-dessus, et Mme la présidente me tend la perche. On veut que notre cinéma québécois soit écouté par nos amis de l'autre côté, mais le sous-titrage, c'est nul! Excusez-moi, j'exprime mon opinion. Quand j'écoute un film en allemand, je l'écoute en allemand, mais lorsqu'il est sous-titré en anglais... J'assiste à plusieurs festivals de cinéma. Pourquoi se limite-t-on au sous-titrage? Cela coûte-t-il trop cher?

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Non, pas du tout. S'il est difficile pour vous de voir un film sous-titré, c'est probablement parce que vous maîtrisez les deux langues. Le problème, lorsqu'on s'adresse à un public unilingue anglophone, c'est qu'il voit davantage de difficultés dans un doublage où la bouche et le texte ne sont pas tout à fait synchronisés. Il est plus facile pour un public unilingue de lire des sous-titres que de passer son temps à critiquer.

+-

    M. Marc Lemay: Excusez-moi de vous interrompre. Bien souvent, dans les films américains que les francophones écoutent, le texte et la bouche ne sont pas synchronisés. Je me dis que c'est un petit problème, madame, parce que je m'imagine en train de regarder Le Survenant et ne pas voir Jean-Nicolas Verrault — on sait que toutes les femmes le trouvent beau — ou Roy Dupuis. Je me demandais simplement s'il n'y avait pas moyen de...

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Ce serait formidable, mais jusqu'à maintenant, toutes les expériences démontrent que chaque fois qu'un film est doublé, il a moins de succès que lorsqu'il est sous-titré. C'est vrai pour le Canada anglais et pour les États-Unis. Beaucoup d'expériences ont été faites. Cela ne fonctionne pas. Il y a une résistance aux versions doublées au Canada anglais et aux États-Unis.

+-

    M. Marc Lemay: Pourquoi font-ils faire des versions, du doublage! Le Canada et la France se battent pour que les versions américaines soient doublées au...

+-

    Mme Suzanne Laverdière: On parle de télévision, surtout de télévision. Ce dont vous parlez touche beaucoup la télévision et la distribution sur le territoire québécois. Les querelles actuelles concernent les films américains doublés en français en France, alors qu'on voudrait qu'ils soient doublés en français au Québec. Cependant, je ne crois pas qu'il y ait beaucoup de querelles pour des films diffusés au Canada anglais. Je n'ai jamais entendu parler de problèmes de doublage au Canada anglais.

+-

    M. Marc Lemay: Je me posais la question parce que cela m'intéressait. J'imagine mes collègues de l'autre côté. Avez-vous des études à ce sujet?

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Toutes les expériences faites n'ont jamais fonctionné. Même Les invasions barbares a été distribué sous-titré en anglais au Canada comme aux États-Unis.

+-

    M. Marc Lemay: Cela répond à une de nos questions parce que dans notre étude... J'insiste parce que, quand nous sommes allés à Toronto et ailleurs, on nous a dit que les versions n'étaient pas doublées en anglais. Vous prétendez que le sous-titrage est mieux que le doublage.

+-

    Mme Suzanne Laverdière: À moins qu'au cours des derniers mois les choses n'aient changé, historiquement, les versions doublées n'ont jamais fonctionné à l'extérieur du Québec.

+-

    M. Marc Lemay: C'est très intéressant. Merci.

[Traduction]

+-

    La présidente: Madame Kadis, aviez-vous une question à poser?

À  +-(1035)  

+-

    Mme Susan Kadis (Thornhill, Lib.): Excusez-moi, j'ai manqué une partie de la réunion. J'ai dû aller rencontrer des étudiants.

    Je crois que l'on a déjà abordé cette question. De façon générale—j'espère que je ne répète pas ce qui a déjà été dit—est-ce plutôt une question d'argent ou de philosophie qui pourrait expliquer que vous réussissiez mieux que du côté anglais? Autrement dit, je comprends l'intégration, la mise en marché, et le taux de réussite. Est-ce davantage dû au financement? Recevez-vous davantage de fonds que les Anglais et les utilisez-vous de façon différente?

[Français]

+-

    Mme Suzanne Laverdière: J'aimerais tant que nous recevions beaucoup plus d'argent que le cinéma de langue anglaise, mais la répartition financière pour le cinéma est comparable à celle de la télévision: un tiers pour les francophones, deux tiers pour les anglophones.

    Notre succès vient de la philosophie, de la vision, de l'approche et de la cohérence de toutes les démarches. Nous voulons que nos films aient du succès, nous allons collectivement — quand je dis « nous », je parle de l'ensemble du milieu cinématographique — dans la même direction et chacun contribue à sa façon à atteindre cet objectif. Ce n'est pas du tout une question d'argent, c'est une question de philosophie. Si nous avions plus d'argent, comme je le disais un peu plus tôt, il servirait à consolider nos succès, parce que si nous n'arrivons pas à maintenir une présence constante sur nos écrans, on retombera à ce que nous avons connu auparavant. Le grand défi est d'assurer une sortie de film sur une base régulière et d'assurer la production d'une masse critique suffisante pour que le public se souvienne de nous à chacun des films que nous sortons. En ce moment, une quinzaine de films en français prennent l'affiche chaque année. Cela inclut les petits films tout comme les films plus importants. Si cette masse diminuait à sept ou huit, ce serait catastrophique. Il faut donc la maintenir à une bonne quinzaine de films chaque année.

+-

    La présidente: Monsieur Kotto.

+-

    M. Maka Kotto: Merci, madame la présidente.

    Je connais les efforts ou les initiatives embryonnaires de la télévision de Radio-Canada sur le plan de l'expression de la diversité. Je sais que vous y travaillez. Est-ce que c'était une préoccupation par le passé, quand vous vous engagiez à soutenir des films, du scénario jusqu'à la diffusion? Est-ce que cela a toujours été une préoccupation au départ, ou est-ce un phénomène récent inspiré de je ne sais quoi?

    Je sais que, sur le plan des émissions d'information, par exemple, c'est quelque chose qui passe bien, qui est bien noté, parce qu'il s'agit d'une télévision publique qui a aussi la responsabilité d'éduquer, donc de sensibiliser à la diversité culturelle, d'une part, et également à la variété de tout ce qui peut exister dans la société.

    Je ne veux pas parler comme un anthropologue, mais j'aimerais savoir quelle est la place des femmes, surtout des femmes de plus de 40 ans, dans les films que vous soutenez Généralement, on les met  à la poubelle  — excusez l'expression — dès qu'elles dépassent un stade d'âge précis.

    J'aimerais savoir où se situe cette diversité dans vos préoccupations.

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Dans le domaine du cinéma, je crois qu'il ne faut pas fonctionner avec des quotas. C'est la chose la plus importante.

    C'est dans les discussions que nous avons avec les réalisateurs et les scénaristes dans le but de favoriser l'émergence de nouveaux projets que nous sollicitons différentes personnes, que ce soit des femmes plus jeunes ou plus vieilles ou que ce soit des gens des communautés ethnoculturelles. Prenons Le goût des jeunes filles, par exemple: Dany Laferrière souhaitait depuis longtemps adapter certains de ses livres. Le hasard a fait que plusieurs de ses livres ont été adaptés sur une période très courte. C'était important pour nous, parce que Dany Laferrière est un auteur important du Québec et parce qu'il reflète une réalité différente de celle que nous avons généralement. Refléter la diversité ethnoculturelle canadienne est donc une préoccupation pour Radio-Canada.

    Par contre, nous recevons très peu de projets. Dans un cadre beaucoup plus large, nous sommes en train d'élaborer un plan d'action, qui devrait être prêt vers le mois de décembre, pour justement faire en sorte que la diversité culturelle se reflète dans l'ensemble de la programmation de Radio-Canada et même dans sa gestion. Dans l'ensemble des émissions, le cinéma fait évidemment partie des secteurs programmes auxquels nous allons nous attaquer.

    Ce n'est pas un refus de notre part. Il faut trouver des façons de trouver des créateurs et des projets pour que cette diversité puisse se refléter à notre antenne. Dans le cas du cinéma, la réponse est semblable à celle que je donnais tout à l'heure à propos des francophones hors Québec: si on n'a pas de projets, on ne peut pas apporter le soutien qu'on souhaiterait.

    C'est donc lors de nos démarches et de nos rencontres que nous pouvons solliciter davantage la représentation des différentes communautés, pour que notre cinéma, tout comme notre télévision, reflète la diversité canadienne.

À  +-(1040)  

+-

    M. Maka Kotto: Est-ce que avez quelques idées d'incitatifs en ce sens qui pourraient être écrites?

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Oui, cela peut aller jusque-là. Absolument.

    Il faut trouver des moyens de démontrer aux différentes communautés que Radio-Canada est intéressée à recevoir des projets. C'est ce que les gens doivent comprendre. Si on ne reçoit pas de projets, c'est probablement parce que les gens pensent que nous ne voulons pas avoir de projets de ce type.

    Il faut donc renverser la vapeur et faire comprendre que nous sommes intéressés. Cela pourrait se faire par des incitatifs comme PICLO, qui a été a créé pour les francophones hors Québec. Cela peut prendre différentes formes.

+-

    M. Maka Kotto: D'accord, mais vous connaissez le retard que connaissent les gens issus des communautés culturelles par rapport à cette industrie. Comme ils n'étaient pas été représentés dès le départ, les talents ou les vocations ne se sont pas manifestés chez eux. Néanmoins, il existe des auteurs québécois de souche française, des Caucasiens qui, à l'instar de Gil Courtemanche, par exemple, ont une sensibilité universelle et ont écrit sur l'autre, qui est différent.

    Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de faire davantage de sensibilisation dans ce bassin de Caucasiens québécois francophones, en attendant qu'il y ait réellement des vocations qui émergent des communautés culturelles?

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Effectivement.

    L'adaptation d'Un dimanche à la piscine à Kigali, de Courtemanche, est actuellement en tournage avec le soutien de Radio-Canada. C'est un projet que nous soutenons depuis au moins quatre ans, depuis l'étape de l'écriture. Nous allons même jusqu'à favoriser des collaborations internationales, puisqu'il s'agit d'une histoire qui se déroule au Rwanda. Nous faisons appel à des partenaires étrangers pour produire cette oeuvre extrêmement importante. Nous faisons souvent ces ponts entre la production canadienne et la production étrangère.

    Nous sommes donc sensibles à ces réalités. À partir du moment où il y a des oeuvres comme celle-là, extrêmement importantes sur le plan humain et pour notre identité culturelle, nous les soutenons de façon très forte et essayons même d'aider à leur financement international. Je suis ravie qu'Un dimanche à la piscine à Kigali soit enfin en tournage. Tout va bien actuellement, semble-t-il.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Kotto.

[Traduction]

    Monsieur Smith.

[Français]

+-

    M. David Smith: J'ai simplement une brève question. Tout à l'heure, madame la présidente, vous avez posé une question. Vous avez parlé des Boys, qui sont passés à Radio-Canada, avec 1,6 million de téléspectateurs pour le premier film et 1,8 million pour le deuxième. Vous avez mesuré les cotes d'écoute. Sur les 1,6 million de personnes qui ont visionné l'émission à Radio-Canada à ce moment-là, savez-vous combien de Québécois et combien de non-Québécois il y avait ? Cela se mesure-t-il de cette façon? Est-il possible de connaître cette information?

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Il faudrait faire des recherches assez poussées. Malheureusement, je n'ai pas ces informations.

+-

    La présidente: Merci.

    Madame Laverdière, au nom du comité, merci de votre présentation, de vos réponses à nos questions et de votre dévouement évident au sujet qui nous intéresse.

À  -(1045)  

+-

    Mme Suzanne Laverdière: Merci beaucoup.

[Traduction]

-

    La présidente: Nous allons avoir une discussion, courte ou longue, de notre ébauche de rapport intérimaire, notre pré-pré-pré-rapport.

    De combien de temps disposez-vous? Avez-vous un autre comité?

    Notre greffier tient absolument à ce que je contacte aussi le bureau de notre whip, parce que pour l'instant, nous n'avons pas l'accord de la Chambre pour notre voyage la semaine prochaine. La motion n'a pas encore été présentée à la Chambre.

    Faisons une pause de cinq minutes. Je vais faire cet appel, et ensuite, nous reprendrons pour examiner notre ébauche de rapport.

    [La séance se poursuit à huis clos]