LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des langues officielles
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 1 février 2005
¿ | 0905 |
Le président (M. Pablo Rodriguez (Honoré-Mercier, Lib.)) |
M. James Mitchell (partenaire, Sussex Circle Inc.) |
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD) |
Le président |
Le greffier du comité (M. Marc-Olivier Girard) |
Le président |
M. James Mitchell |
¿ | 0910 |
Le président |
M. Guy Lauzon (Stormont—Dundas—South Glengarry, PCC) |
M. James Mitchell |
M. Guy Lauzon |
M. James Mitchell |
M. Guy Lauzon |
M. James Mitchell |
¿ | 0915 |
M. Guy Lauzon |
M. James Mitchell |
M. Guy Lauzon |
M. James Mitchell |
M. Guy Lauzon |
M. James Mitchell |
M. Guy Lauzon |
M. James Mitchell |
M. Guy Lauzon |
M. James Mitchell |
M. Guy Lauzon |
M. James Mitchell |
Le président |
¿ | 0920 |
M. Guy André (Berthier—Maskinongé, BQ) |
M. James Mitchell |
¿ | 0925 |
Le président |
M. Yvon Godin |
M. James Mitchell |
¿ | 0930 |
M. Yvon Godin |
M. James Mitchell |
M. Yvon Godin |
M. James Mitchell |
M. Yvon Godin |
M. James Mitchell |
M. Yvon Godin |
M. James Mitchell |
M. Yvon Godin |
M. James Mitchell |
¿ | 0935 |
Le président |
M. James Mitchell |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Marc Godbout (Ottawa—Orléans, Lib.) |
M. James Mitchell |
M. Marc Godbout |
M. James Mitchell |
M. Marc Godbout |
M. James Mitchell |
¿ | 0940 |
Le président |
M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC) |
M. James Mitchell |
M. Pierre Poilievre |
¿ | 0945 |
M. James Mitchell |
M. Pierre Poilievre |
M. James Mitchell |
M. Pierre Poilievre |
M. James Mitchell |
Le président |
L'hon. Raymond Simard (Saint Boniface, Lib.) |
M. James Mitchell |
¿ | 0950 |
L'hon. Raymond Simard |
M. James Mitchell |
L'hon. Raymond Simard |
Le président |
M. Guy André |
¿ | 0955 |
M. James Mitchell |
Le président |
M. Yvon Godin |
M. James Mitchell |
M. Yvon Godin |
M. James Mitchell |
À | 1000 |
M. Yvon Godin |
M. James Mitchell |
M. Yvon Godin |
M. James Mitchell |
M. Yvon Godin |
M. James Mitchell |
M. Yvon Godin |
Le président |
CANADA
Comité permanent des langues officielles |
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l |
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l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 1 février 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¿ (0905)
[Français]
Le président (M. Pablo Rodriguez (Honoré-Mercier, Lib.)): Bonjour à tous.
[Traduction]
Bienvenue à cette première réunion.
[Français]
C'est un plaisir de vous revoir. Je vous souhaite une bonne année. Comme nous sommes en février, c'est sans doute la dernière fois que je le fais. Je souhaite également au comité des travaux fructueux.
Vous pouvez constater que la réunion d'aujourd'hui se divise en deux parties. Pendant la première partie, nous entendrons un témoin. La deuxième partie se déroulera à huis clos, alors que nous discuterons des travaux du comité et, plus spécifiquement, de la possibilité de voyager dans tout le pays pour vérifier l'application du Plan d'action pour les langues officielles.
Tout d'abord, je tiens à remercier M. Mitchell d'être ici présent. M. Mitchell a réalisé une étude portant sur le bilinguisme dans la fonction publique. Je demanderais aux membres du comité de faire porter leurs questions non pas sur ses opinions personnelles, mais principalement sur les résultats de l'étude qu'il a réalisée, dont vous avez un sommaire. M. Mitchell fera une très brève présentation.
[Traduction]
Il parlera environ deux minutes puis nous pourrons passer aux questions. Nous disposons d'une heure seulement pour cette première partie.
[Français]
Monsieur Mitchell.
M. James Mitchell (partenaire, Sussex Circle Inc.): Merci, monsieur le président. Je vais d'abord dire quelques mots pour me présenter.
Je suis un ancien fonctionnaire. Je viens de l'Ouest canadien. Je suis né en Colombie-Britannique et j'ai grandi en Saskatchewan. Je vis à Ottawa depuis 27 ans.
[Traduction]
J'ai travaillé 16 ans dans la fonction publique que j'ai quitté il y a dix ans pour créer un cabinet de consultation qui donne des conseils en matière de politique et d'organisation au gouvernement. L'étude que vous avez sous les yeux, qui, je crois, vous a incité à m'inviter à témoigner, est typique des travaux que notre cabinet effectue pour le gouvernement. Il s'agit d'un document de réflexion sur la formation linguistique.
[Français]
Monsieur le président, permettez-moi d'apporter une petite correction à ce que vous avez dit au début de la réunion. Mon document ne porte pas sur les langues officielles dans la fonction publique, mais bien sur la formation linguistique dans la fonction publique.
[Traduction]
Vous avez le document. Il est long et je ne suis pas sûr que tous les membres ont eu la chance de le lire. J'ai pensé prendre une minute pour résumer les principaux messages de ce document. Je vais vous lire un extrait du document, monsieur le président, de sorte que tous les membres, ainsi que les interprètes, sont en possession du texte.
[Français]
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Excusez-moi. Nous n'avons pas ce document.
Le président: Vous ne l'avez pas?
Le greffier du comité (M. Marc-Olivier Girard): Il avait été envoyé à vos bureaux au mois de janvier, mais j'en ai apporté un ou deux exemplaires au cas où vous en auriez besoin.
Le président: On l'a envoyé directement à vos bureaux. S'il y en a qui le souhaitent, on pourra le leur donner. De toute façon, cela ne changerait rien, parce que je ne pense pas que vous auriez le temps de le lire ce matin.
M. James Mitchell: Monsieur le président, j'ai rédigé un rapport, un vision document, pour les gens de l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada et de l'École de la fonction publique du Canada. C'est un document dans lequel j'expose mes idées, lesquelles sont fondées sur 20 entrevues que j'ai réalisées avec des hauts fonctionnaires et des gens impliqués dans la formation linguistique à l'extérieur du gouvernement.
[Traduction]
C'est donc le document qui vous a incité à m'inviter à comparaître ce matin et,selon le greffier, il a été distribué.
Les principaux messages, que je voudrais vous présenter rapidement, sont les suivants. L'engagement du Canada en matière de dualité linguistique est trop important pour devenir l'otage de notre approche actuelle en matière de langue de travail et de notre système actuel de formation linguistique. Ce système est coûteux, inefficace et rigide. Il ne permet pas aux gens d'atteindre réellement un niveau de bilinguisme fonctionnel ni de s'impliquer personnellement de façon suivie dans la maîtrise de leur seconde langue officielle. Un trop grand nombre de ceux qui abandonnent la formation linguistique perdent rapidement le niveau de maîtrise qu'ils avaient acquis. Ils sont trop nombreux à éprouver de l'amertume envers la langue seconde à la suite de mois de formation linguistique aboutissant à des échecs répétés au test.
Je recommande une nouvelle approche à la formation linguistique fondée sur les caractéristiques suivantes :
¿ (0910)
[Français]
un équilibre plus équitable entre les responsabilités de l’employeur et celles de l’employé;une plus grande souplesse dans la façon d'aborder la formation et les tests; un engagement plus énergique des personnes et des institutions envers la réalité des deuxlangues officielles dans la fonction publique du Canada; une intégration plus poussée de la formation linguistique à l’apprentissage et auperfectionnement professionnel; finalement, un engagement politique envers les implications pratiques de la dualité linguistique dans lafonction publique du Canada et un leadership efficace des cadres supérieurs pour concrétiser cetengagement dans le milieu de travail et en matière de service au public.
[Traduction]
Monsieur le président, voilà les principaux messages de mon rapport. Il y a beaucoup de matière dans ces 29 pages. Je serai très heureux de répondre aux questions des membres du comité sur n'importe quel élément de mon rapport.
Le président: Merci, monsieur Mitchell.
Avant de commencer, j'aimerais dire quelque chose.
[Français]
J'avais oublié de mentionner que notre greffière, Mme Marie-Louise Paradis, avait pris sa retraite. C'est la raison pour laquelle elle n'est pas avec nous aujourd'hui. Je tenais à la remercier, au nom du comité, pour l'excellent travail qu'elle a réalisé l'automne dernier.
Je tiens à vous présenter M. Marc-Olivier Girard, notre nouveau greffier. Il est nouveau pour nous, mais il n'est pas nouveau à titre de greffier ni même en matière de langues officielles, puisqu'il a travaillé pour d'autres comités. Je suis bien heureux qu'il travaille avec nous, car j'avais entendu d'excellentes choses à son sujet. Je lui souhaite la bienvenue. Je voulais tout simplement ouvrir cette petite parenthèse, que je referme à l'instant. Nous allons maintenant passer aux questions.
Monsieur Lauzon, allez-y.
M. Guy Lauzon (Stormont—Dundas—South Glengarry, PCC): Merci. Bonne et heureuse année à tous les membres du comité, et bienvenue à M. Mitchell.
[Traduction]
Monsieur Mitchell, je crois que ce texte est un résumé de votre document intitulé Vers une nouvelle vision. Dans ce document vous dites—ou plutôt certaines de vos constatations indiquent—que le taux de réussite au test d'interaction orale en français langue seconde au niveau C a diminué considérablement entre 2001 et 2002-2003. En effet, il est passé de 54 p. 100 à 38 p. 100. Avez-vous pu déterminer ce qui s'est passé en si peu de temps?
M. James Mitchell: Monsieur Lauzon, pour obtenir l'avis d'un vrai professionnel il faudrait que vous interrogiez les responsables des tests de langue de la Commission de la fonction publique ou d'ailleurs au gouvernement que vous convoquerez à comparaître devant votre comité.
Mais, d'après ce que j'ai cru comprendre, cette baisse du taux de réussite est en partie attribuable au fait que de nombreux étudiants qui ont passé le test récemment étaient parmi les moins aptes à réussir, pour une raison ou une autre. Peut-être qu'ils étaient déjà trop avancés dans leur carrière. Ils arrivent à la mi-cinquantaine sans avoir vraiment atteint un niveau de bilinguisme fonctionnel, pour diverses raisons, certaines personnelles, d'autres professionnelles, de sorte qu'ils étaient parmi ceux qui avaient le moins de chance de réussir au test. C'est ce que j'ai entendu dire.
M. Guy Lauzon: Peut-être qu'ils étaient les moins motivés?
M. James Mitchell: Certains d'entre eux auraient été les moins motivés, mais bon nombre d'entre eux auraient été très motivés mais à une étape de leur vie où ils n'étaient pas en mesure d'apprendre une langue seconde aussi rapidement que s'ils avaient eu 30 ou 35 ans.
M. Guy Lauzon: Je réfléchissais en venant ici. Comme vous, j'ai été fonctionnaire pendant 22 ans et j'ai eu de la difficulté avec les tests de langue, la formation linguistique, les postes de remplacement et ce genre de choses. Je me suis souvent poser une question—ce n'est peut-être pas une question raisonnable : est-il plus difficile pour un adulte que pour un jeune d'apprendre une langue seconde?
M. James Mitchell: Monsieur Lauzon, je ne suis pas expert en la matière, mais d'après ce qu'on m'a dit, il est plus difficile pour un adulte que pour un enfant ou une jeune personne d'apprendre une langue seconde. Et si on veut apprendre une deuxième ou une troisième langue, il vaut mieux le faire quand on est jeune.
Je ne prétends certainement pas être un expert en ce qui concerne l'apprentissage d'une langue, la formation linguistique ou les tests de langue. On m'a tout simplement demandé d'examiner ce problème. Je suis également quelqu'un qui croit fermement aux deux langues officielles et à leur importance au sein du gouvernement. C'est pour cette raison que j'ai examiné la question également.
¿ (0915)
M. Guy Lauzon: Dans votre résumé, vous avez mentionné qu'il y avait beaucoup d'amertume; c'est, je crois, le terme que vous avez utilisé. Les fonctionnaires, après leur formation linguistique, avaient un sentiment d'amertume. Est-ce le terme que vous avez utilisé?
M. James Mitchell: Oui.
M. Guy Lauzon: Ils sont nombreux à « éprouver de l'amertume envers la langue seconde à la suite de mois de formation linguistique aboutissant à des échecs répétés au test ». Pouvez-vous nous en parler davantage?
M. James Mitchell: Je pense que tout le monde sait, certainement à Ottawa et peut-être ailleurs dans la fonction publique, que bon nombre des fonctionnaires qui ont passé des mois en formation linguistique et qui ont échoué à plusieurs reprises les tests ont perdu leur enthousiasme initial pour apprendre une langue seconde, dans la plupart des cas le français, et éprouvent de l'amertume face à toute cette expérience car ils n'arrivent pas à réussir le test. Je pense que c'est ce sentiment de frustration devant des échecs répétés au test qui a, entre autre motiver le principe qui a inspiré ce document, c'est-à-dire que l'on repense la formation linguistique.
M. Guy Lauzon: Ceux qui avaient réussi le test et qui sont retournés en milieu de travail, devaient je crois le repasser tous les deux ans. À une époque il était possible d'être exempté du test, mais je ne sais pas exactement quelles sont les règles à l'heure actuelle. Y a-t-il un test pour faire un suivi si vous n'avez pas été exempté? Faut-il passer le test tous les deux ans à l'heure actuelle?
M. James Mitchell: Monsieur Lauzon, je ne sais pas exactement quelles sont les règles à l'heure actuelle. Je pense que c'est plutôt tous les cinq ans au lieu de tous les deux ans, et il y a toujours une exemption. Il est toujours possible d'être exempté. Si les examinateurs déterminent qu'une personne est parfaitement bilingue, ils ne se donneront pas la peine de lui faire passer le test à nouveau.
M. Guy Lauzon: Quel est le taux de réussite lors de l'examen subséquent après deux ans, ou cinq ans?
M. James Mitchell: En toute honnêteté, je ne peux pas vous le dire, monsieur Lauzon. Je ne le sais pas. Je ne suis pas un expert.
M. Guy Lauzon: L'une des craintes que l'on avait toujours concerne la rétention. Lorsqu'on n'utilise pas une langue, on la perd, et j'en suis moi-même la preuve.
M. James Mitchell: Je conviens avec vous que la rétention pose un problème, et j'en traite dans cette étude. Franchement, comme nous ne sommes pas encore rendus au point où on utilise les deux langues pleinement et correctement, du moins à Ottawa, il n'est pas facile pour ceux qui ont appris une langue seconde de garder leur niveau de compétence.
Mais ce n'est pas seulement une question de milieu de travail. Il y a de nombreuses causes que j'essaie d'expliquer dans ce rapport.
M. Guy Lauzon: Avez-vous proposé des solutions pour freiner cette baisse du taux de succès qui est déjà passé de 54 à 38 p. 100? Pouvez-vous nous proposer des moyens d'enrayer cette tendance et peut-être de l'inverser?
M. James Mitchell: Pour bien répondre à votre question il faut considérer plusieurs aspects. Je le répète, je pense que dans une certaine mesure il s'agissait d'une aberration statistique en raison du groupe de fonctionnaires qui avaient suivi la formation et passé un test pendant cette période. C'est la première chose. Deuxièmement, et ce qui est plus important, comment créer un système qui permettra à un plus grand nombre de fonctionnaires de mieux apprendre et de mieux réussir au test et, chose encore plus importante, d'acquérir, d'utiliser et de rester compétent dans l'autre langue officielle? C'est la grande question.
Dans mon rapport, j'ai formulé des suggestions qui touchent à de nombreuses choses, comme le milieu de travail, la sensibilisation des fonctionnaires à leur obligation de maintenir leur compétence dans la langue officielle acquise en cours d'emploi. Troisièmement, de manière générale, le leadership joue un rôle dans la fonction publique et le gouvernement afin d'inculquer l'importance de pouvoir utiliser les deux langues officielles et de reconnaître la réalité de la dualité linguistique et la nécessité fondamentale de respecter les deux langues officielles. Il y a plusieurs facteurs qui aideraient un plus grand nombre d'employés à acquérir, utiliser et maintenir les compétences linguistiques.
[Français]
Le président: Merci.Merci, monsieur Lauzon.
Monsieur André, vous avez la parole.
¿ (0920)
M. Guy André (Berthier—Maskinongé, BQ): Dans un premier temps, je voudrais souhaiter une bonne année à tous les membres du comité ainsi qu'à M. Mitchell.
J'ai lu votre document et j'aimerais vous poser quelques questions. Trente-cinq ans après l'adoption de la Loi sur les langues officielles, malgré les nombreuses initiatives du gouvernement fédéral, le français n'est toujours pas une langue de travail au sein du gouvernement. Selon votre document, l'objectif, soit que les deux langues soient parlées au sein des institutions fédérales, ne semble pas avoir été atteint. Je dirais même qu'il y a régression, étant donné les résultats des tests. En effet, vous notez qu'il y a eu une certaine baisse dans les résultats des tests entre 2001 et 2003.
Vous signalez également que les gens ne considèrent pas que l'acquisition de compétences en français est essentielle à leur perfectionnement. Vous dites que les gens acquièrent une deuxième langue, qui est souvent le français, non pas parce qu'il s'agit pour eux d'une valeur fondamentale, mais tout simplement parce qu'ils doivent réussir un test. Leur objectif est de réussir un test et pas nécessairement d'apprendre la langue pour mieux la connaître, etc. Donc, il s'agit d'un problème de mentalité et de valeurs.
Vous parlez également d'un engagement politique plus rigoureux de la part du gouvernement à améliorer l'usage du français comme langue de travail. Vous parlez également du rôle du secteur privé dans la formation linguistique. Vous dites aussi que l'employeur et l'employé devraient avoir de plus amples responsabilités en matière de mise en oeuvre des principes des langues officielles.
Dans un premier temps, comment le gouvernement peut-il encourager davantage l'application des principes des langues officielles dans les institutions et faire en sorte que les langues officielles deviennent davantage des valeurs? Prenons l'exemple d'un anglophone qui travaille dans une institution fédérale et qui désire apprendre le français autant pour son épanouissement personnel que pour réussir un test. Pourquoi faites-vous allusion au rôle du secteur privé dans ce document? Mettez-vous en doute la capacité de l'État à offrir de bons services? Quelle est la place du secteur privé dans la formation linguistique? Pourquoi le secteur privé serait-il plus efficace dans la mise en oeuvre des principes des langues officielles?
M. James Mitchell: Je voudrais répondre aux deux éléments de votre question, monsieur André. Comment le gouvernement peut-il améliorer la situation, renforcer l'importance des langues officielles et améliorer la compétence des fonctionnaires? Tout d'abord, cela exige un engagement de sa part envers l'importance des langues officielles au pays et dans le fonctionnement de la fonction publique. Deuxièmement, le gouvernement doit renforcer par ses attitudes et ses opérations la présence du français en milieu de travail. Troisièmement, le gouvernement doit donner aux employés davantage de possibilités et d'outils pour acquérir et utiliser le français. Il faut offrir aux employés plus d'occasions d'apprendre, d'acquérir et de conserver leur langue seconde. Quatrièmement, il faut renforcer la responsabilité des cadres supérieurs envers les langues officielles, parce que, d'après mon expérience, la présence de personnes occupant des postes supérieurs qui soient vraiment bilingues et qui utilisent les deux langues officielles dans les réunions, en milieu de travail et dans les négociations est primordiale. Je parle de la présence de personnes vraiment bilingues. De telles personnes doivent non seulement avoir réussi un test, mais aussi posséder une véritable compétence dans les deux langues. Cela signifie que le gouvernement peut faire beaucoup de choses pour renforcer son engagement envers les deux langues officielles.
La deuxième partie de votre question touche le rôle du secteur privé dans la formation linguistique. Dans mon rapport, je dis deux choses: le gouvernement fédéral a encore un rôle important, voire primordial, à jouer dans la formation linguistique, parce que sans ses efforts, sans ses capacités centrales pour la recherche, la création de normes, les tests et le nouveau matériel, it won't happen. Il y a beaucoup de firmes privées à Ottawa, Montréal, Calgary, Vancouver et Toronto qui sont extrêmement compétentes en formation linguistique. Elles sont très fières de leurs capacités, de leur succès et de la qualité de leurs professeurs. Selon moi, il est presque impossible que le gouvernement fédéral puisse faire toute la formation, car c'est trop coûteux. C'est une perte de ressources et d'énergie de sa part.
Mon rapport recommande que le gouvernement reconnaisse son rôle clé et collabore avec le secteur privé, qu'il reconnaisse les capacités du secteur privé et l'importance de son rôle dans la formation linguistique des fonctionnaires et aussi comme une industrie au Canada, parce que le Canada est parmi les experts mondiaux de la formation linguistique. C'est une industrie très importante et souvent négligée par les gouvernements provinciaux et fédéral. Voilà quelques suggestions.
¿ (0925)
Le président: Merci, monsieur André. C'est tout le temps que nous avions.
Monsieur Godin.
M. Yvon Godin: Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous. Bonjour, monsieur Mitchell.
Je ne suis pas d'accord avec vous lorsque vous dites que nous sommes des experts dans l'apprentissage, alors qu'il y a des pays où les gens apprennent six langues et s'entendent mieux que nous ne le faisons au Canada, nous qui n'en avons que deux. En ce moment, le succès est plutôt mitigé puisqu'on dit: « ...le niveau « C » est en baisse constante depuis 2000-2001, passant de 54 p. 100 à 38,7 p. 100 ». Il y a un problème. J'aimerais que vous me donniez votre opinion à ce sujet.
Je crois que le gouvernement n'a peut-être pas prouvé au cours des dernières années qu'il était vraiment sérieux au chapitre du bilinguisme. Les gens se disent alors qu'ils n'ont pas vraiment besoin d'offrir le service si ce n'est pas ce que leurs patrons veulent vraiment .
Prenons l'exemple de la Défense nationale, où 60 p. 100 des employés sont unilingues anglais. Déjà là, on se demande si le gouvernement est vraiment sérieux.
M. James Mitchell: Monsieur le président, selon moi, le gouvernement actuel--tout comme l'était le gouvernement précédent--est très sérieux au chapitre des langues officielles. C'est parce qu'il prend au sérieux ses responsabilités sur le plan de la formation linguistique qu'il a commandé cette étude, cette initiative de formation linguistique. Il a mis sur pied le fameux plan Dion, qui portait sur les langues officielles. Il a consacré 200 ou 300 millions de dollars aux langues officielles il y a deux ou trois ans.
Selon moi, le gouvernement est sérieux, mais l'amélioration de la formation linguistique, de l'apprentissage, des attitudes des fonctionnaires et de la réalité du milieu du travail se fait par étapes.
¿ (0930)
M. Yvon Godin: C'est pour cela que je parle de l'attitude des fonctionnaires et de celle du gouvernement. Ce dernier a consacré 700 millions de dollars aux langues officielles par le biais de ce que l'on appelle le plan Dion. Toutefois, au même moment, quand des communautés francophones s'adressent aux tribunaux à cause d'un manque au niveau des services et gagnent leur cause, le gouvernement fédéral va en appel, prétextant que ces communautés ont tort même si elles ont eu gain de cause en cour.
D'un côté, on dit vouloir le bilinguisme au Canada; on dit que le pays est bilingue et qu'il faut respecter les deux langues. De l'autre, on dit aux communautés et aux municipalités de s'adresser aux tribunaux si elles ne sont pas d'accord sur la façon dont le gouvernement gère le dossier et on va en appel sous prétexte que ce n'est pas ce que cela veut dire. Il y a un manque de sérieux quelque part. C'est bien beau, toutes ces études, mais pendant ce temps, les années passent.
M. James Mitchell: Je vous répondrai brièvement. Dans mon rapport, il n'est pas question de la situation des communautés de langue minoritaire, mais j'y affirme que nous n'avons pas encore atteint notre objectif d'être une société ayant deux véritables langues officielles. C'est évident, et il s'agit d'une de mes conclusions. Nous n'avons pas atteint nos objectifs, mais ces objectifs existent.
M. Yvon Godin: Monsieur le président, je ne veux pas tout mêler. Je ne parle pas de choses que les communautés minoritaires veulent obtenir. Je parle de services du gouvernement fédéral qui n'étaient pas fournis dans certaines régions. C'est pourquoi les communautés se sont adressées à la cour. Par la suite, le gouvernement fédéral s'est adressé à la cour d'appel pour se battre contre les communautés et dire qu'elles avaient tort. Ne trouvez-vous pas que c'est un mauvais exemple à donner? Ce sont des faits.
M. James Mitchell: Monsieur Godin, je ne représente pas le gouvernement, je suis simplement un consultant, un rédacteur.
M. Yvon Godin: Quelle est la différence entre l'étude du groupe de travail de l'École de la fonction publique ou de l’Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada et votre étude? Pouvez-vous nous expliquer ce qui différencie les deux études?
M. James Mitchell: Je vais vous expliquer quelles sont leurs responsabilités respectives. Le premier groupe, celui des langues officielles, travaille à l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada, une petite agence qui relève du président du Conseil du Trésor. L'École de la fonction publique est une petite agence qui est chargée de la formation des cadres de la fonction publique. L'une est responsable de la politique des langues officielles et l'autre, de la formation linguistique.
M. Yvon Godin: Des études ont été faites par la fonction publique et vous avez aussi fait une étude. Qu'est-ce qui les différencie? Dites-vous la même chose?
M. James Mitchell: Mon étude a pour but de leur fournir des suggestions pour leur travail. Ils ont commandé cette étude pour obtenir ces suggestions. C'est vraiment un document de réflexion. Il ne s'agit pas de la politique du gouvernement mais d'une contribution à leur travail.
M. Yvon Godin: Qu'y a-t-il de différent dans votre étude?
M. James Mitchell: Mon étude est simplement une contribution au travail qu'ils font en tant que fonctionnaires. Ils pourraient peut-être se présenter devant votre comité. Je ne vous parle pas en leur nom; je vous parle seulement de mon étude. Celle-ci présente mes idées; c'est ce que j'ai écrit en me fondant sur mes entrevues. Ce sont mes opinions. Je crois aux langues officielles et à la dualité linguistique du Canada.
Je note dans mon rapport que nous n'avons pas atteint nos objectifs. Ce sont des faits, c'est la réalité. Mon étude présente des idées pour améliorer la situation, pour renforcer l'importance des langues officielles et pour appuyer les fonctionnaires dans leurs efforts en vue d'acquérir une compétence réelle dans la deuxième langue officielle.
¿ (0935)
Le président: Merci, monsieur Godin.
M. James Mitchell: Je m'excuse si mon français n'est pas clair.
M. Yvon Godin: Excusez-moi si mon anglais n'est pas parfait.
Le président: Monsieur Godbout, allez-y.
M. Marc Godbout (Ottawa—Orléans, Lib.): Merci, monsieur le président.
C'est à mon tour de souhaiter une bonne année à tout le monde, comme le veut la tradition.
Bienvenue, monsieur Mitchell. Quel était votre mandat exact quand on vous a chargé de faire votre étude?
M. James Mitchell: Mon mandat était de consulter une vingtaine de cadres supérieurs impliqués dans les langues officielles ou la formation linguistique dans la fonction publique, ainsi que d'autres experts du secteur privé, dont quelques directeurs de petites entreprises de formation linguistique. À partir de ces consultations, je devais présenter mes idées sur une nouvelle vision de la formation linguistique au Canada. Ils voulaient que je leur fournisse un rapport basé sur des expériences et sur différents points de vue, mais ils souhaitaient aussi avoir mes idées, étant donné que c'est le genre de travail que je fais pour les ministères et agences du gouvernement. Il s'agit donc d'un document de réflexion, d'une contribution au travail qu'ils doivent effectuer dans le cadre de leurs responsabilités, dans leurs agences respectives.
M. Marc Godbout: Est-ce que ce sont eux qui ont recommandé un échantillon d'une vingtaine de cadres supérieurs? Je vous avoue que cet échantillon me semble un peu mince. Cette idée est-elle venue de la Commission de la fonction publique? Il faudrait peut-être qu'on ait une idée de l'ampleur de l'étude. S'agit-il d'une étude de 10 000 $ ou de plus de 100 000 $?
Il faut tout de même vérifier l'aspect scientifique de la recherche. On vous a simplement demandé d'aller interviewer quelques personnes et de revenir avec vos idées. Je respecte cela. Cependant, je voudrais savoir de quel genre d'étude il s'agit. S'agit-il vraiment d'une étude de recherche?
M. James Mitchell: Non, monsieur. Vous avez entièrement raison. Ce n'est pas une étude de recherche, ni une étude scientifique, ni un sondage d'opinions de toute une gamme de fonctionnaires. Ce n'est pas cela du tout. Il s'agit plutôt, comme le titre l'indique, d'une proposition cohérente qui donne aux lecteurs une vision de la formation linguistique dans la fonction publique pour l'avenir. Ce sont les idées d'une seule personne, moi-même.
M. Marc Godbout: Comme vous l'avez dit vous-même--et je vous ai trouvé très honnête--, vous n'êtes pas un expert en formation linguistique. Avez-vous quand même consulté des recherches un peu plus scientifiques qui faisaient l'analyse des différents programmes de formation linguistique et de leur efficacité? Entre autres, vous recommandez qu'on considère le secteur privé. Personnellement, je n'y vois pas d'objection. Cependant, vous ne mentionnez à peu près rien du secteur parapublic, c'est-à-dire les collèges communautaires et les universités canadiennes, qui font des affaires en or au niveau international dans la formation linguistique. Si vous n'avez pas pu le faire, croyez-vous qu'il serait bon de faire une bonne étude des différents programmes de formation linguistique, gouvernementaux, paragouvernementaux et privés, pour déterminer où nous pourrions en avoir pour notre argent en matière de formation linguistique?
M. James Mitchell: Je suis entièrement d'accord sur ce que vous suggérez. Je mentionne à deux ou trois endroits dans le document que les secteurs parapublic, privé et fédéral ont vraiment un rôle à jouer. La compétence des collèges en cette matière s'accroît, et au gouvernement, les gens en sont bien conscients. Je dis dans mon rapport que le gouvernement doit concentrer ses efforts sur le travail clé dont lui seul peut s'acquitter et consentir aux secteurs privé et parapublic un champ d'activité plus vaste. Je crois qu'en répartissant les efforts de cette façon, nous pourrons fonctionner de façon plus efficace et moins coûteuse tout en répondant davantage aux besoins des étudiants. Nous pouvons ainsi appuyer un secteur de notre économie qui est fort important.
Je me rappelle le point que M. Godin ou un autre membre du comité a soulevé. Selon mes informations, nous sommes vraiment des experts de la formation linguistique, et non de l'apprentissage des langues. Tout le monde, y compris les experts de Formation linguistique Canada, m'a dit que nos outils, nos recherches et nos approches étaient les plus innovateurs du monde. On nous a mentionné que nous pouvions exporter nos systèmes, même si du côté de l'apprentissage, nous n'obtenions pas toujours de très bons résultats. Par contre, nous excellons en matière de formation.
Je m'excuse, monsieur le président: ma réponse était trop longue. Il reste que je suis entièrement d'accord pour ce qui est du secteur parapublic et des collèges.
¿ (0940)
Le président: Merci.
Merci, monsieur Godbout; c'est tout le temps dont nous disposions.
[Traduction]
Nous allons entreprendre l'avant-dernière série de questions, d'une durée de cinq minutes chacune.
Monsieur Poilievre.
[Français]
M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC): Merci, monsieur le président, et merci à notre témoin d'être parmi nous aujourd'hui.
Premièrement, je voudrais savoir si, d'après vous, les exigences en matière d'examens linguistiques devraient être réduites ou accrues.
M. James Mitchell: C'est une bonne question. Il n'y a pas de consensus parmi les personnes que j'ai questionnées à ce sujet. Il y a deux facteurs: les exigences et nos attentes. Nos attentes sont-elles trop élevées ou trop faibles?
Ensuite, nos tests arrivent-ils à mesurer adéquatement le niveau de compétence? Ce sont là deux questions différentes. Je crois qu'il y a consensus parmi les personnes questionnées, à savoir que les tests actuels ne sont pas nécessairement la meilleure façon d'évaluer la compétence. Selon leurs dires, ils ajustent présentement les tests et le système de tests.
Monsieur Poilievre, vous avez aussi soulevé la question suivante: nos attentes sont-elles trop élevées ou trop faibles? Je crois en tout ce qui s'appelle true functional bilingualism. Ce niveau de bilinguisme est peut-être plus élevé que le mien, mais il est plus faible que celui de bien des députés et autres personnes vraiment bilingues qui se trouvent à Ottawa. Il s'agit donc d'un échelon plus élevé que le mien, mais on ne parle pas nécessairement de perfection. C'est ce que je recherche, en l'occurrence une attente qui répondra aux besoins des employés et du grand public et qui améliorera nos services à l'égard de ce dernier. Cependant, il n'y a pas de consensus sur cette question.
M. Pierre Poilievre: En répondant à ma question, vous en avez posé une autre: est-ce que les attentes sont trop élevées? J'aimerais que vous y répondiez.
¿ (0945)
M. James Mitchell: Selon moi, il faut attendre davantage des fonctionnaires. Il ne faut cependant pas s'attendre à ce qu'ils soient parfaitement bilingues.
M. Pierre Poilievre: Devrions-nous réduire ou augmenter les exigences, ou le nombre de postes qui exigent le bilinguisme? Est-ce qu'il devrait y avoir plus de postes pour lesquels le bilinguisme est essentiel?
M. James Mitchell: Comme je le dis dans mon rapport, c'est une question qu'on doit étudier. C'est très important dans les régions du Canada où on utilise très peu la deuxième langue. C'est le cas en Colombie-Britannique et à Terre-Neuve, notamment, où il n'y a pas beaucoup de francophones, ou dans les régions du Québec où il n'y a pas beaucoup d'anglophones. Il est possible que trop de postes de cadres supérieurs soient classés bilingues impératifs, mais je ne le sais pas. Je n'ai pas étudié cette question en détail et je ne suis pas un expert. Je ne pense pas avoir la compétence nécessaire pour faire une telle étude, mais c'est une chose qu'on doit examiner.
M. Pierre Poilievre: Monsieur Mitchell, notre défi est d'atteindre l'équilibre. Je représente un comté d'Ottawa où il y a beaucoup de fonctionnaires unilingues anglophones. Ils veulent travailler dans la fonction publique et ils respectent le principe du bilinguisme. Selon eux, il ne peut y avoir aucun compromis quand il s'agit du bilinguisme, mais ils ne veulent pas être empêchés de travailler dans la fonction publique et d'apporter ainsi une vraie contribution à leur pays. Selon vous, comment peut-on atteindre cet équilibre?
M. James Mitchell: Il faut que tous les fonctionnaires sachent, au début de leur carrière, quelles sont les attentes de l'organisme envers ses employés. Par exemple, si on veut devenir cadre supérieur, il faut devenir bilingue. À mon avis, il faut responsabiliser les individus quant à leur carrière.
Le président: Merci.
Monsieur Simard, s'il vous plaît.
L'hon. Raymond Simard (Saint Boniface, Lib.): Merci, monsieur le président. Monsieur Mitchell, soyez le bienvenu.
Je veux revenir sur la question de l'échantillon. Vous n'avez interviewé que 20 hauts fonctionnaires, et je trouve que cela peut poser des problèmes en ce sens que vos résultats ne nous permettent peut-être pas de voir les choses dans leur vraie perspective. Aujourd'hui, des centaines de milliers de jeunes fréquentent ou ont fréquenté des écoles d'immersion. Si vous aviez inclus dans votre échantillon certains de ces jeunes qui entrent au gouvernement aujourd'hui et qui sont souvent parfaitement bilingues, cela aurait pu en changer considérablement les résultats. Avez-vous pensé à cela? Est-ce que votre mandat était spécifiquement d'aller voir ce qui se passait au niveau des hauts fonctionnaires?
M. James Mitchell: Je veux simplement vous dire, monsieur Simard, que je n'ai pas fait un travail de recherche. Je n'ai pas sondé des milliers ou des centaines de milliers de personnes. Il s'agissait plutôt d'un travail de réflexion fondé sur les points de vue et les perspectives de hauts fonctionnaires et d'autres personnes, notamment du secteur privé. Ce n'est pas une expression de leurs points de vue. Il s'agit de mon point de vue.
Deuxièmement, je suis tout à fait d'accord avec vous: il y a des milliers de jeunes Canadiens dans tout le pays qui sont parfaitement ou fonctionnellement bilingues et qui ont de grandes possibilités dans la fonction publique du Canada. C'est une source d'espoir pour moi. Je suis tout à fait d'accord avec vous à ce sujet. Ces jeunes représentent l'avenir de la fonction publique, et cette étude était axée non seulement sur les problèmes de 2005 ou de 2004, mais surtout sur l'avenir de la fonction publique.
¿ (0950)
L'hon. Raymond Simard: Tout à l'heure, on a parlé des hauts fonctionnaires de 50 à 55 ans, qui pourraient être un peu moins motivés. Ce n'est pas vous qui avez dit cela, mais on a parlé d'une motivation moindre. C'est peut-être la réalité. Une personne en fin de carrière n'est pas forcément motivée à apprendre une deuxième langue ou à se pousser dans ce sens. Pour que vous ayez des résultats plus précis, il aurait fallu que votre échantillon comprenne des gens à tous les niveaux, me semble-t-il.
J'ai de la difficulté à me fier à vos résultats. En effet, vous avez communiqué avec des gens qui ont tous un peu les mêmes préoccupations, qui sont en fin de carrière et qui sont moins motivés que les jeunes. Pouvez-vous répondre à cela, s'il vous plaît?
M. James Mitchell: Monsieur Simard, j'espère que vous n'avez pas l'impression que ce document présente les plaintes et les points de vue de vieux fonctionnaires dans la cinquantaine. J'ai essayé—je ne sais pas si j'ai réussi—de créer une vision pour l'avenir, pour une fonction publique qui respecte entièrement les deux langues officielles à tous les niveaux, dans le milieu de travail, dans les services au public. C'était vraiment mon intention. Si je n'ai pas réussi, c'est à vous d'en juger.
Je suis d'accord sur votre prémisse.
L'hon. Raymond Simard: Je suis très heureux que vous disiez que, si les gens de la fonction publique veulent accéder à des postes élevés, ils doivent devenir bilingues. Je ne pense pas qu'on doive faire de compromis à ce sujet. J'apprécie beaucoup votre commentaire à cet égard. Merci.
Le président: Merci, monsieur Simard.
On revient à M. André.
M. Guy André: Merci.
Bien sûr, je pense que le gouvernement doit être plus rigoureux dans l'application de la Loi sur les langues officielles. Quand on regarde un peu ce qui se passe à Air Canada, au ministère de la Défense nationale ou à la GRC, qu'on a vue sur la Colline du Parlement récemment, il semble évident que certaines personnes ne parlent pas les deux langues. C'est un constat. Par conséquent, si le gouvernement était plus rigoureux pour faire en sorte que les gens acquièrent les deux langues, cela pourrait améliorer la situation.
Si je suis un informaticien, par exemple, je dois forcément connaître un système informatique. Si c'est un emploi dans lequel je dois utiliser les deux langues, je devrais automatiquement connaître le système informatique et les deux langues. Je crois que ce serait cela que d'être rigoureux. Si on est rigoureux dans l'application des deux langues, il faut que ce soit une exigence de l'emploi. Je ne suis pas sûr que ce soit toujours respecté. C'est un commentaire.
En ce qui a trait aux valeurs, je suis plutôt d'accord avec M. Simard. Pour que les anglophones puissent aimer le français et vouloir connaître cette langue, il faudrait commencer par l'éducation. Si je pose ma candidature à un poste où je doive apprendre l'anglais pour passer un test, si cela ne correspond pas à mes principes et à mes valeurs, c'est plus difficile. L'éducation et les valeurs se développent à la petite enfance et à l'adolescence. C'est tout le système d'éducation qui peut être touché.
Je reviens à ma question. Je lisais les statistiques. On dit que
le pourcentage d’anglophones qui ont réussi avec succès le test d’interaction orale enfrançais langue seconde pour obtenir le niveau « C » est en baisse constante depuis 2000-2001,passant de 54 p. 100 à 38,7 p. 100 en 2002-2003. À l’inverse, 81,9 p. 100 des francophones ontréussi du premier coup le test d’interaction orale en anglais pour l’obtention du même niveau. |
Comment expliquez-vous ce phénomène, à savoir que les francophones adhèrent plus facilement à l'utilisation de la langue anglaise ou, en tout cas, réussissent mieux les tests?
¿ (0955)
M. James Mitchell: C'est une bonne question. Selon moi, il y a deux raisons majeures qui expliquent la différence entre le succès des francophones et celui des anglophones. D'abord, dès le départ, les francophones reconnaissent que s'ils veulent poursuivre une carrière au sein de la fonction publique, particulièrement chez les cadres supérieurs, ils doivent être bilingues.
Ensuite, la plupart des francophones travaillent dans un milieu où il y a beaucoup d'anglais. Ils bénéficient aussi de la télévision, entre autres. Il y a plus de sources de renforcement linguistique pour les francophones qui améliorent leur anglais. Ils sont favorisés par l'environnement et, de plus, leur attitude est très favorable à l'anglais. Mais les francophones disent aussi que s'ils reconnaissent l'anglais, ils veulent également que le français soit reconnu. Ils veulent qu'on respecte leur langue maternelle. Je suis d'accord sur cela.
Par contre, la situation est différente pour les anglophones. S'ils viennent de Saskatchewan ou de Vancouver, ils n'ont pas beaucoup côtoyé le français comme langue seconde. Lorsqu'ils arrivent dans la fonction publique, ils ne sont pas conscients de la réalité des deux langues officielles. Ils n'acceptent pas non plus facilement la nécessité d'apprendre une deuxième langue et de l'utiliser. Il faut donc considérer l'environnement, l'attitude personnelle ainsi que l'expérience personnelle.
Monsieur le président, on parle souvent des écarts. On est déçu que le taux de réussite ait baissé. Selon moi, on a fait beaucoup de progrès au cours des 30 dernières années. La différence est incroyable. De plus, l'attitude des anglophones envers le français est généralement très positive. Dans la fonction publique à Ottawa, les anglophones respectent le français. Ils sont tout à fait conscients de l'existence des deux langues officielles. Ils savent que les cadres supérieurs doivent être bilingues. Ils savent également qu'il doit y avoir plus de français dans le milieu de travail. Il y a beaucoup plus de fonctionnaires bilingues qu'il y a 30 ans. Cependant, en tant que société, nous n'avons pas encore atteint nos objectifs.
Le président: Monsieur Godin, voulez-vous conclure?
M. Yvon Godin: Merci, monsieur le président.
La fonction publique a-t-elle réagi à votre étude?
M. James Mitchell: Je crois que la réaction est positive. En tout cas, je n'ai pas reçu de critiques jusqu'à présent. Les gens qui ont lu le rapport ont réagi positivement.
M. Yvon Godin: Vous dites que vous n'avez pas eu de critiques, mais avez-vous eu la chance de présenter votre étude à la fonction publique?
M. James Mitchell: Oui, j'ai été invité à présenter mes idées et mes conclusions devant différents comités dans différents ministères, à des groupes de hauts fonctionnaires ainsi qu'au comité chargé de l'amélioration des langues officielles au sein des ministères.
À (1000)
M. Yvon Godin: Tout à l'heure, vous avez parlé d'attitude et de bénéfices. Vous avez dit que les francophones avaient plus accès à la télévision anglaise et qu'ils avaient accès également à la communauté anglophone. À mon avis, ici, à Ottawa, les anglophones ont accès à la télévision en français et à la communauté francophone puisqu'ils habitent près de Gatineau. En fait, vous avez mis le doigt dessus. Soyons honnêtes au sujet des exigences pour travailler au gouvernement fédéral: si on ne parle pas anglais, on ne sera pas embauché; mais si on parle anglais et qu'on ne parle pas français, on aura la chance de l'apprendre plus tard, et ça va prendre du temps.
M. James Mitchell: J'espère qu'à l'avenir, nous aurons une fonction publique dans laquelle tous les fonctionnaires reconnaîtront et respecteront les deux langues officielles et où toutes les personnes occupant des postes bilingues utiliseront et maîtriseront leur langue seconde. Je veux que les fonctionnaires et les gens d'Ottawa connaissent aussi bien le côté québécois que le côté ontarien. Je veux que les gens d'Ottawa connaissent aussi bien les restaurants de Hull et de la Haute-Gatineau que ceux d'Ottawa et du comté de Renfrew.
M. Yvon Godin: Je parle de l'attitude du gouvernement. Comme je l'ai dit à plusieurs séances du comité, vous ne trouverez pas un seul sous-ministre qui ne parle pas l'anglais au gouvernement du Canada. Par contre, vous y trouverez des sous-ministres qui ne parlent pas le français. C'est encore une question d'attitude. Comme vous l'avez dit clairement, le francophone qui veut obtenir un emploi dans la fonction publique doit apprendre les deux langues officielles, sinon il ne l'obtiendra pas, tandis que l'anglophone n'a pas besoin de le faire. Donc, l'attitude du gouvernement doit changer. Je répète que le gouvernement n'est pas sérieux.
Cela devrait peut-être faire partie de votre étude. Vous devriez aller voir plus loin et rencontrer d'autres personnes. M. Simard a parlé d'un échantillon de 20 cadres supérieurs. Ces gens avaient peut-être déjà une idée préconçue. Avez-vous l'intention d'interviewer d'autres personnes qui ont l'intention d'accéder à postes supérieurs pour voir quelle est leur attitude, pour voir s'ils diront qu'ils n'ont pas vraiment besoin d'apprendre l'autre langue?
M. James Mitchell: Monsieur Godin, je n'ai pas de telle données car je n'ai pas fait de recherche à ce sujet, et je ne suis probablement pas la personne la mieux placée pour faire une telle recherche, mais mon opinion personnelle est que les jeunes n'ont pas cette attitude.
M. Yvon Godin: Je suis d'accord avec vous là-dessus.
M. James Mitchell: Je pense que les jeunes sont plus engagés envers les deux langues officielles. Comme je le disais, il y a des choses à faire, des étapes à franchir, car nous n'avons pas encore atteint le but, mais je pense qu'il y a de l'espoir chez les jeunes.
M. Yvon Godin: Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Vous avez terminé, monsieur Godin?
[Traduction]
Merci beaucoup, monsieur Mitchell.
[Français]
Nous avons terminé la première partie de notre réunion. Merci beaucoup de nous avoir fait part de votre étude et de votre réflexion, et d'avoir répondu à nos questions.
Je vais suspendre la séance pour deux minutes, puis nous discuterons à huis clos des travaux futurs du comité.
[La séance se poursuit à huis clos.]