LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des langues officielles
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 28 septembre 2005
¹ | 1540 |
Le président (M. Pablo Rodriguez (Honoré-Mercier, Lib.)) |
M. Michel Francoeur (avocat général et directeur, Services juridiques, ministère du Patrimoine canadien) |
Le président |
M. Jean-Claude D'Amours (Madawaska—Restigouche, Lib.) |
Le président |
M. Jean-Claude D'Amours |
Le président |
Mme Paule Brunelle (Trois-Rivières, BQ) |
Le président |
M. Guy Lauzon (Stormont—Dundas—South Glengarry, PCC) |
Le président |
L'hon. Raymond Simard (Saint Boniface, Lib.) |
Le président |
M. Andrew Scheer (Regina—Qu'Appelle, PCC) |
Le président |
M. Guy Lauzon |
Mme Paule Brunelle |
Le président |
¹ | 1545 |
Le greffier du comité |
Le président |
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD) |
Le président |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) |
Le président |
L'hon. Don Boudria |
Le président |
Mme Paule Brunelle |
Le président |
Mme Paule Brunelle |
Le président |
Mme Paule Brunelle |
Le président |
Mme Paule Brunelle |
Le président |
Mme Paule Brunelle |
Le président |
M. Yvon Godin |
L'hon. Don Boudria |
M. Yvon Godin |
L'hon. Don Boudria |
M. Yvon Godin |
¹ | 1550 |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
Mme Paule Brunelle |
M. Yvon Godin |
Le président |
L'hon. Don Boudria |
L'hon. Raymond Simard |
L'hon. Don Boudria |
Le président |
L'hon. Raymond Simard |
M. Yvon Godin |
L'hon. Raymond Simard |
Le président |
L'hon. Raymond Simard |
Le président |
M. Yvon Godin |
L'hon. Raymond Simard |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
L'hon. Raymond Simard |
Le président |
M. Yvon Godin |
L'hon. Raymond Simard |
Le président |
¹ | 1555 |
L'hon. Raymond Simard |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
L'hon. Raymond Simard |
M. Yvon Godin |
M. Guy Lauzon |
Le président |
L'hon. Raymond Simard |
M. Yvon Godin |
L'hon. Raymond Simard |
M. Yvon Godin |
L'hon. Raymond Simard |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
M. Guy Lauzon |
Le président |
M. Guy Lauzon |
Le président |
L'hon. Raymond Simard |
M. Marc Godbout (Ottawa—Orléans, Lib.) |
Le président |
L'hon. Raymond Simard |
M. Marc Godbout |
Le président |
M. Marc Godbout |
Le président |
L'hon. Irwin Cotler (ministre de la Justice et procureur général du Canada) |
Le président |
L'hon. Irwin Cotler |
Le président |
L'hon. Irwin Cotler |
Le président |
L'hon. Irwin Cotler |
º | 1600 |
º | 1605 |
º | 1610 |
º | 1615 |
Le président |
M. Guy Lauzon |
L'hon. Irwin Cotler |
Le président |
M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC) |
Le président |
L'hon. Irwin Cotler |
º | 1620 |
Le président |
Mme Paule Brunelle |
L'hon. Irwin Cotler |
Le président |
M. Yvon Godin |
º | 1625 |
Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.) |
M. Yvon Godin |
L'hon. Irwin Cotler |
M. Yvon Godin |
L'hon. Irwin Cotler |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
L'hon. Irwin Cotler |
Le président |
M. Marc Godbout |
Le président |
L'hon. Irwin Cotler |
º | 1630 |
Le président |
L'hon. Irwin Cotler |
Le président |
M. Andrew Scheer |
M. Michel Francoeur |
Le président |
M. Guy Lauzon |
M. Michel Francoeur |
º | 1635 |
Le président |
M. Jean-Claude D'Amours |
M. Michel Francoeur |
º | 1640 |
M. Jean-Claude D'Amours |
M. Michel Francoeur |
Le président |
M. Guy Côté (Portneuf—Jacques-Cartier, BQ) |
º | 1645 |
M. Marc Tremblay (avocat général et directeur, Groupe du droit des langues officielles, ministère de la Justice) |
º | 1650 |
Le président |
M. Marc Tremblay |
Le président |
M. Yvon Godin |
M. Marc Tremblay |
M. Yvon Godin |
M. Marc Tremblay |
M. Yvon Godin |
M. Marc Tremblay |
M. Yvon Godin |
M. Marc Tremblay |
M. Yvon Godin |
M. Marc Tremblay |
º | 1655 |
M. Yvon Godin |
M. Marc Tremblay |
Le président |
M. Pierre Poilievre |
M. Michel Francoeur |
M. Pierre Poilievre |
M. Michel Francoeur |
M. Pierre Poilievre |
M. Michel Francoeur |
M. Pierre Poilievre |
M. Michel Francoeur |
» | 1700 |
M. Pierre Poilievre |
M. Michel Francoeur |
M. Pierre Poilievre |
M. Michel Francoeur |
Le président |
Mme Paule Brunelle |
M. Michel Francoeur |
Mme Paule Brunelle |
M. Michel Francoeur |
Mme Paule Brunelle |
M. Michel Francoeur |
Le président |
Mme Françoise Boivin |
» | 1705 |
M. Michel Francoeur |
Mme Françoise Boivin |
M. Michel Francoeur |
Mme Françoise Boivin |
Le président |
L'hon. Raymond Simard |
Mme Françoise Boivin |
Le président |
» | 1710 |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
L'hon. Raymond Simard |
M. Yvon Godin |
M. Michel Francoeur |
M. Yvon Godin |
M. Michel Francoeur |
M. Yvon Godin |
Le président |
L'hon. Raymond Simard |
M. Yvon Godin |
L'hon. Raymond Simard |
M. Michel Francoeur |
» | 1715 |
Le président |
L'hon. Don Boudria |
Le président |
L'hon. Don Boudria |
Le président |
L'hon. Don Boudria |
Le président |
M. Yvon Godin |
L'hon. Raymond Simard |
L'hon. Don Boudria |
M. Michel Francoeur |
L'hon. Don Boudria |
M. Michel Francoeur |
L'hon. Don Boudria |
M. Michel Francoeur |
L'hon. Don Boudria |
M. Michel Francoeur |
» | 1720 |
L'hon. Don Boudria |
M. Michel Francoeur |
Le président |
L'hon. Don Boudria |
Le président |
CANADA
Comité permanent des langues officielles |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 28 septembre 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1540)
[Français]
Le président (M. Pablo Rodriguez (Honoré-Mercier, Lib.)): Bonjour à tous et bon retour de vacances parlementaires. C'est un plaisir pour moi de vous retrouver. J'espère que vous avez passé une bonne période d'ajournement dans vos comtés respectifs. Je profite de l'occasion pour souhaiter la bienvenue à Mme Paule Brunelle, porte-parole du Bloc québécois en matière de langues officielles, et à M. Guy Côté. Ils se joignent au Comité permanent des langues officielles. Bienvenue encore une fois aux membres du comité qui étaient avec nous lors de la dernière session.
Nous accusons un léger retard, mais M. Cotler est un peu plus en retard que nous, puisqu'il doit déposer un projet de loi. Cela devait avoir lieu après l'hommage rendu à M. Cadman. Il devrait donc être ici dans 15 minutes environ. Des personnes qui travaillent avec M. Cotler sont avec nous, soit MM. Tremblay et Francoeur, du ministère de la Justice et du ministère du Patrimoine canadien, si je ne fais pas erreur.
M. Michel Francoeur (avocat général et directeur, Services juridiques, ministère du Patrimoine canadien): Nous sommes tous les deux du ministère de la Justice, mais je travaille pour ma part aux Services juridiques de Patrimoine canadien.
Le président: Nous avons deux possibilités: commencer avec ces personnes pour les premières 15 minutes ou aborder dès maintenant ce qui était prévu pour la fin de la séance, c'est-à-dire les travaux du comité. Nous pourrions ensuite poursuivre. Je vous laisse délibérer sur ce sujet. J'ai moi-même appris que M. Cotler serait en retard, tout juste avant de me rendre ici.
M. Jean-Claude D'Amours (Madawaska—Restigouche, Lib.): Monsieur le président, pour être en mesure de poursuivre un ordre logique, on devrait commencer par les travaux du comité. De cette façon, la discussion ne sera pas coupée en deux. Lorsqu'on commencera à recevoir les témoins, on procédera vraiment du début à la fin.
Le président: Je suis tout à fait d'accord.
M. Jean-Claude D'Amours: C'est aussi par respect pour les témoins.
Le président: On commence donc par les travaux du comité, qui étaient prévus pour la fin de la séance.
Mme Paule Brunelle (Trois-Rivières, BQ): En ce qui nous concerne, nous préférerions commencer par les témoins.
Le président: D'accord. Voilà qui commence bien.
Et vous, avez-vous quelque chose à dire?
M. Guy Lauzon (Stormont—Dundas—South Glengarry, PCC): Non.
Le président: On a peu de temps, c'est certain.
L'hon. Raymond Simard (Saint Boniface, Lib.): Monsieur le président, normalement, le ministre fait une présentation. Les questions sont souvent basées sur le sujet en question. Il me semble que pour des raisons pratiques, on devrait attendre le ministre. En outre, je ne vois pas quelle pourrait être la contribution de ces gens avant que le ministre ait fait part de sa position sur ce sujet. Il me semble que c'est illogique.
Le président: Vous semblez d'accord sur cette idée, à moins que cela ne vous cause un problème fondamental.
[Traduction]
Êtes-vous d'accord, Andrew?
M. Andrew Scheer (Regina—Qu'Appelle, PCC): Oui.
Le président: Et vous, Guy?
[Français]
M. Guy Lauzon: Oui.
Mme Paule Brunelle: On va en être redevable à Guy.
Le président: D'accord. En termes de travaux futurs, comme vous le savez, le comité avait établi comme priorité l'étude du projet de loi S-3. Avant l'ajournement, nous avons passé beaucoup de temps à l'étudier. Nous avons entendu une quinzaine de témoins répartis sur plusieurs semaines. Les parties ont convenu unanimement que c'était le sujet dont le comité voulait débattre. Il y a aussi des contraintes réelles à cet égard. Nous avons jusqu'au 25 octobre pour amender le projet de loi, sans quoi il sera renvoyé tel quel à la Chambre.
Comme le disait le greffier, il est possible de demander une extension de 30 jours à la Chambre, qui peut pour sa part la refuser. Par contre, il ne serait peut-être pas avisé de demander cette extension, puisque nous sommes tous d'accord pour dire que nous souhaitons adopter ce projet de loi avant la campagne électorale. On ne sait vraiment pas ce qui peut arriver dans les circonstances actuelles.
Pour faire une histoire courte, il reste quatre semaines et deux jours entre maintenant et le 25 octobre, incluant la semaine de relâche. Si on soustrait cette dernière, on parle de trois semaines et deux jours. En gardant la dernière semaine, soit deux périodes, pour l'étude article par article, il reste la présente semaine et la prochaine pour entendre des témoins. C'est suffisant, dans la mesure où nous nous sommes entendus sur la liste des témoins. Si tous les témoins acceptent de venir, ce qui n'est pas garanti, on peut dire qu'il en reste six. Je pense, par exemple, à Benoît Pelletier, ministre du Québec responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes.
¹ (1545)
Le greffier du comité: Il a refusé.
Le président: Il nous reste donc en principe un maximum de cinq témoins à entendre durant les deux prochaines semaines. Nous allons ensuite passer à l'étude article par article. Quelqu'un veut-il ajouter quelque chose à ce sujet? Non?
Bienvenue, monsieur Godin. Il me fait plaisir de vous voir.
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Merci, monsieur le président.
Le président: Oui, monsieur Boudria?
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Je suis substitut. Est-ce que je peux... ?
Le président: Vous avez le droit de prendre la parole.
L'hon. Don Boudria: Merci. Je prononcerai donc un réel plaidoyer à l'intention de mes collègues. J'ai bien sûr un intérêt — pas un conflit d'intérêts, ce n'est pas un intérêt pécuniaire, c'est un intérêt public — à faire adopter ce projet de loi. Je vous rappelle qu'il est à l'ordre du jour depuis quatre ans. Ce n'est pas d'hier.
Monsieur le président, par votre entremise je demande à tous mes collègues de voter pour ou contre ce projet de loi. J'aimerais mieux qu'ils votent en faveur, bien sûr. S'il y a assez de députés qui votent en sa faveur, ce projet de loi sera adopté, mais il ne faudrait pas créer de délai. En effet, l'automne est arrivé. Je ne parle pas seulement de la saison, mais c'est l'automne de cette législature, c'est-à-dire que nous arrivons à la fin de cette législature, qui sera dans deux, trois ou quatre mois. S'il y a un amendement à ce projet de loi — je n'en veux pas —, il devra être renvoyé au Sénat, et il faudra sans doute un peu de temps pour qu'il soit adopté à cet endroit; Dieu sait combien de temps!
Je vous prie donc de ne pas demander de prolongation et de terminer l'étude de ce projet de loi dans le délai prescrits. D'ailleurs, si je pouvais être assez chanceux et assez convaincant, j'aimerais que nous puissions le faire avant cela, de sorte qu'il soit renvoyé à la Chambre des communes pour son adoption à l'étape du rapport et en troisième lecture, afin d'en finir une fois pour toutes.
Entre temps, les tribunaux sont quasiment en train de décider pour nous de l'interprétation de ce projet de loi. Ils l'ont dessinée, à toutes fins pratiques, en partie dans la circonscription de M. Godin, et ils sont en train de le faire dans la région de Penetanguishene, dans le cadre des audiences du Comité d'aide au développement des collectivités locales. Par conséquent, je pense qu'il est temps d'agir.
C'était mon plaidoyer. Merci.
Le président: Merci.
Mme Brunelle.
Mme Paule Brunelle: Mon collègue a mentionné que le comité voyagerait. Est-ce toujours le cas? Si oui, ce serait à quel moment?
Le président: C'est toujours le cas. Cependant, on a toujours dit qu'on voulait le faire après l'étude du projet de loi S-3. En effet, les déplacements sont liés à l'évaluation de l'impact du Plan d’action pour les langues officielles.
Nous irons donc sur le terrain pour examiner vraiment de près, dans les communautés, l'impact du plan d'action. Toutefois nous ne voulions pas faire les deux études en parallèle, parce qu'alors, on s'entrecroise, et cela ne mène à rien. Nous finirons donc l'étude du projet de loi S-3 et par la suite, nous irons rencontrer les communautés.
Mme Paule Brunelle: J'aimerais avoir une petite clarification. Est-ce que le gouvernement a déposé des amendements? C'est ce que je cherchais dans les dossiers. Je me demandais si des amendements avaient effectivement été déposés.
Le président: Il y en a eu, quasi officiellement ou non officiellement, c'est-à-dire que lors d'une rencontre spéciale, nous avons tous, l'un après l'autre, indiqué à peu près quel genre d'amendements nous voulions apporter, sans vraiment les déposer. C'est ma compréhension des choses.
Mme Paule Brunelle: D'accord.
Le président: Par la suite, nous voulions discuter de tout cela. Donc, à l'heure actuelle, nous ne faisons pas l'étude formelle d'amendements comme tels. Néanmoins, nous avons une idée des orientations.
Mme Paule Brunelle: Par conséquent, ces amendements ne feront pas l'objet de discussions?
Le président: C'est-à-dire qu'il y aura des amendements formels lors de l'étude article par article. Nous entendrons également des témoignages.
Mme Paule Brunelle: D'accord.
Le président: Nous sommes encore à l'étape des témoignages.
Monsieur Godin.
M. Yvon Godin: Monsieur le président, le gouvernement a proposé beaucoup d'amendements; c'est un des problèmes. J'inviterais donc mon collègue l'honorable Don Boudria à faire du lobbying auprès du gouvernement afin qu'il retire tous ces amendements, qui peuvent mettre en danger le projet de loi.
L'hon. Don Boudria: Ils n'ont pas encore été déposés officiellement.
M. Yvon Godin: Non. Vous avez beaucoup de travail à faire à cet égard. Qu'ils relaxent! Je ne parle pas de vous, monsieur Boudria.
L'hon. Don Boudria: On s'entend.
M. Yvon Godin: D'accord. Merci bien.
Je m'excuse d'être arrivé un peu en retard. La période des questions orales a été prolongée quelque peu.
J'ai également déposé une motion afin que la ministre du Patrimoine canadien, Mme Frulla, comparaisse d'urgence devant le comité au sujet du lock-out à Radio-Canada.
Depuis l'accession de M. Rabinovitch à la présidence de Radio-Canada, voilà six ans, il y a eu trois lock-out et deux grèves; c'est totalement inacceptable. On n'a pas besoin de cela. C'est pour cette raison que je trouve le sujet bien important.
¹ (1550)
Le président: Monsieur Godin, je vous signale que l'avis de motion requiert 48 heures. Nous pourrions donc en discuter demain.
M. Yvon Godin: À moins qu'il y ait...
Le président: À moins qu'il y ait consentement unanime.
M. Yvon Godin: À moins qu'il y ait consentement unanime, que tout le monde soit d'accord. D'ailleurs, comme je l'ai dit hier, je suis prêt à y travailler le soir.
Le président: Je vais émettre une opinion personnelle. Si on tient vraiment à ce que le projet de loi S-3 soit étudié, discuté et voté, dans un sens ou dans l'autre, j'ai de la difficulté à considérer d'autres sujets, à moins que les membres du comité acceptent de tenir des réunions extraordinaires, c'est-à-dire en dehors des périodes normales. Évidemment, le comité est souverain; il lui revient de décider ce qu'il veut faire.
M. Yvon Godin: Si vous le voulez, je pourrais faire cette proposition lorsque le comité se réunira à huis clos, pour ne pas prendre plus de votre temps.
Le président: On ne prend pas plus de temps. Ce qui arrive, c'est que j'ai été avisé par le ministre, quand on a quitté la Chambre, que dès la fin de l'hommage à M. Cadman, il devait déposer un projet de loi. On n'en a pas été avisé auparavant. Ensuite, il devait s'en venir ici à la course ou en voiture.
M. Yvon Godin: Pour revenir à mon argument, je sais que le comité veut finir l'étude du projet de loi S-3, et moi aussi. Toutefois, Radio-Canada est devenu un enjeu important. Les francophones de ma région ont toutes les raisons du monde d'avoir accès aux nouvelles et au volet culturel.
Le président: Nous sommes tous d'accord sur ce sujet.
M. Yvon Godin: Radio-Canada a un mandat qu'elle ne remplit plus maintenant. On ne peut pas mettre cela de côté et attendre que les deux parties en arrivent à une entente. Il faut qu'ils nous entendent avant que cela arrive. C'est devenu inacceptable.
Le président: Madame Brunelle.
Mme Paule Brunelle: Il me semble très urgent de discuter du lock-out de Radio-Canada. On en entend parler, les gens s'indignent, etc. Il faut vraiment y revenir, c'est une priorité pour nous. Une rencontre ou deux ne vont pas déranger les choses.
M. Yvon Godin: Je suis prêt à travailler le soir également.
Le président: Monsieur Boudria.
L'hon. Don Boudria: Le Comité permanent du patrimoine est saisi de la même question. Je suis allé au comité pour faire un plaidoyer à ce sujet hier.
L'hon. Raymond Simard: C'est la même motion.
L'hon. Don Boudria: Le libellé de la motion est pratiquement le même que celui de la motion dont on discute au Comité permanent du patrimoine. D'ailleurs, ceux qui reçoivent la communication de Radio-Cadenas, qui nous est envoyée par Internet, peuvent lire mon intervention d'hier dans le document d'aujourd'hui. On en a débattu au Comité permanent du patrimoine hier. Le débat ne s'est pas terminé, parce qu'il a fallu ajourner la séance afin d'aller à l'assermentation de Son Excellence. Le comité doit reprendre ses délibérations à ce sujet, si je ne m'abuse, cet après-midi ou demain matin. J'étais membre substitut hier. Il y a donc un autre comité chargé de l'étude de la même question.
Le président: Monsieur Simard.
L'hon. Raymond Simard: Monsieur le président, je suis d'accord avec mon collègue. Par contre, je ne suis pas en désaccord avec M. Godin quand il dit que nous devrions, à un moment donné, convoquer la ministre du Patrimoine canadien au comité pour discuter, par exemple, des trois lock-out qui ont eu lieu en trois, cinq ou six ans.
M. Yvon Godin: En cinq ans.
L'hon. Raymond Simard: Ce n'est évidemment pas acceptable. Je pense qu'à ce moment-ci, si le Comité permanent du patrimoine s'en occupe, on devrait le laisser traiter du sujet. Quant à nous, nous pourrions convoquer la ministre du Patrimoine pour discuter du mandat de Radio-Canada, car les gens de ma région et de la vôtre n'ont aucun service en français en ce moment, et ce n'est pas du tout acceptable. Je pense que nous sommes tous frustrés par cette situation et que nous devrons contribuer à la discussion à long terme. Toutefois, je ne suis pas certain qu'on devrait le faire au cours des prochains jours.
Le président: Peut-on s'entendre à l'effet que ces discussions auraient lieu au cours d'une séance extraordinaire, c'est-à-dire à un moment autre que lors des deux séances prévues?
L'hon. Raymond Simard: Si on accepte de le faire.
Le président: Oui.
M. Yvon Godin: C'est cela, si on accepte de le faire.
L'hon. Raymond Simard: Le Comité permanent du patrimoine l'a déjà fait.
M. Yvon Godin: Je suis bien d'accord. Combien de fois avons-nous formé des sous-comités pour discuter de certaines choses? Je pense qu'il s'agit d'une urgence. Il est inacceptable que les Canadiens n'aient pas accès aux nouvelles. CTV et Global diffusent des nouvelles nationales partout au Canada, mais les francophones du Canada n'ont présentement accès à aucune nouvelle, si ce n'est la condition des routes à Montréal.
Le président: Monsieur Godin, je pense que tout le monde est d'accord avec vous. Je ne veux pas commencer ce débat tout de suite.
M. Yvon Godin: Monsieur le président...
Le président: On est tous d'accord avec vous. Est-ce qu'on veut, oui ou non, tenir une séance extraordinaire sur ce sujet? C'est de cela qu'on veut discuter. On est d'accord avec vous.
Est-ce que quelqu'un est en désaccord avec M. Godin? Non. On est d'accord avec vous. Est-ce qu'on veut le faire dans le cadre d'une séance extraordinaire? Cette semaine, on a une rencontre aujourd'hui et on en aura une autre demain. Peut-on prévoir une rencontre pour discuter de ce sujet en début de semaine?
M. Yvon Godin: Lundi soir, mardi soir prochain?
L'hon. Raymond Simard: Premièrement, est-ce que sa motion a été déposée en bonne et due forme?
Le président: Non. Elle a été déposée hier.
M. Yvon Godin: On peut en discuter demain.
L'hon. Raymond Simard: On en discutera à la réunion de demain.
Le président: On peut en discuter demain.
¹ (1555)
L'hon. Raymond Simard: On en discutera demain.
Le président: Puisque tout le monde en parlait, j'ai compris qu'il y avait consensus pour qu'on en parle.
M. Yvon Godin: Si on prend une décision tout de suite, on pourrait mettre la machine en marche et commencer à préparer la réunion, si vous êtes d'accord.
Le président: L'essentiel de la discussion de M. Simard est fait. On est d'accord pour tenir une séance à ce sujet...
M. Yvon Godin: Oui.
Le président: ... et faire comparaître Mme Frulla.
L'hon. Raymond Simard: Il reste à déterminer quand cela aura lieu.
M. Yvon Godin: C'est cela. On peut attendre demain pour en décider. Si on le fait maintenant, ils pourront s'organiser.
M. Guy Lauzon: Il faut qu'elle soit disponible.
Le président: On pourrait aussi ajouter une heure à la prochaine séance du comité. Est-ce qu'on peut vérifier cela, monsieur le greffier?
Êtes-vous d'accord?
L'hon. Raymond Simard: Il y a un danger à faire comparaître la ministre quand il y a des négociations très sensibles qui se déroulent. Je pense qu'il vaut mieux parler de l'avenir de Radio-Canada que de commencer à inviter des ministres alors qu'il y a une négociation très sensible qui se déroule. En effet, je ne pense pas que les employés de Radio-Canada voudraient qu'on fasse cela.
M. Yvon Godin: Ce sont eux qui me le demandent.
L'hon. Raymond Simard: Ce n'est pas le cas dans ma région, en tout cas.
M. Yvon Godin: Dans la mienne, oui.
L'hon. Raymond Simard: Je pense que les négociations vont bon train; on entend dire qu'elles avancent très bien. Je ne pense pas qu'on devrait mettre cela en péril. En effet, on devrait parler à la ministre du Patrimoine, mais au sujet de l'avenir de Radio-Canada. On devrait lui demander quels sont les plans afin que ce qui se passe maintenant ne se répète pas.
M. Yvon Godin: Je ne suis pas d'accord. Excusez-moi, mais je crois, en tout respect, qu'il est temps que M. Rabinovitch ait un peu de pression. Ce n'est pas acceptable qu'il y ait eu trois lockout et deux grèves à une société d'État qui appartient aux payeurs de taxes. Présentement, on paye pour des gens qui sont en lockout.
Le président: Je pense que nous ne poursuivrons pas ce débat. Le ministre est ici, et sa présence sera très brève, car il avait déjà prévu quitter pour...
M. Yvon Godin: Le ferons-nous lundi soir, alors?
M. Guy Lauzon: Il sera ici une heure.
Le président: Il était censé nous consacrer une heure, mais il a été retenu.
M. Guy Lauzon: Il va rester une heure.
Le président: Peut-il rester? On va le lui demander.
Pouvons-nous conclure notre discussion rapidement?
L'hon. Raymond Simard: On en reparlera à la réunion de demain.
M. Marc Godbout (Ottawa—Orléans, Lib.): Demain.
Le président: On reporte la discussion à la réunion de demain.
L'hon. Raymond Simard: À ce moment-là, on aura reçu la motion en bonne et due forme.
M. Marc Godbout: Ainsi que la mienne, monsieur le président, puisque j'ai déposé une motion similaire.
Le président: Est-ce que vous l'avez déposée hier, ou aujourd'hui?
M. Marc Godbout: Hier.
Le président: Alors, on a deux motions recevables pour demain. Est-ce que cela vous va?
Très rapidement, avant de passer la parole au ministre, je désire vous rappeler que, tel qu'on en avait convenu, après avoir terminé l'audition des cinq témoins sur le projet de loi S-3, on a l'intention d'aller sur le terrain, ce que ce comité n'a jamais fait, afin de terminer notre travail sur le Plan d'action pour langues officielles.
Merci.
Bienvenue parmi nous, monsieur Cotler. Nous sommes très heureux de vous accueillir ici afin de discuter du projet de loi S-3 et de nous informer un peu de la vision de Justice Canada à cet égard. Nous considérons que ce projet de loi est très important pour les communautés vivant en milieu minoritaire, particulièrement les communautés francophones hors Québec.
Avant de vous céder la parole, est-ce que je pourrais savoir combien de temps vous serez parmi nous aujourd'hui?
L'hon. Irwin Cotler (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Lorsque je suis entré ici, on m'a dit qu'il était nécessaire que j'assiste à une réunion du Cabinet à 16 h 30.
Le président: D'accord. Donc, on ne peut pas vous retenir plus d'une demi-heure.
L'hon. Irwin Cotler: Mes officiels seront ici par la suite, mais je devrai aller à la réunion du Cabinet, étant donné qu'elle a commencé à 15 h 30. J'ai pu m'arranger pour m'en absenter jusqu'à 16 h 30, mais c'est tout.
Le président: On va parler vite.
L'hon. Irwin Cotler: Je devais de plus déposer des projets de loi à la Chambre des communes, où j'étais avant de venir ici.
Le président: Parfait.
Voulez-vous faire d'abord une brève présentation sur le sujet?
L'hon. Irwin Cotler: D'accord.
Merci, monsieur le Président et membres du comité. C'est pour moi un plaisir d'être ici de nouveau. Je tiens d'abord à remercier le comité de m'avoir invité à m'exprimer sur le projet de loi S-3, la Loi modifiant la Loi sur les langues officielles (promotion du français et de l'anglais).
J'ai eu l'occasion de souligner toute l'admiration que j'ai envers l'honorable Jean-Robert Gauthier, qui a fait preuve, tout au long de sa carrière, d'une grande détermination et de courage. J'ai eu plusieurs réunions avec lui avant qu'il dépose son projet de loi et après.
Je tiens aussi à rappeler que le gouvernement appuie les objectifs généraux qui ont inspiré l'auteur de ce projet de loi. La dualité linguistique est un élément essentiel du pacte sur lequel a été édifiée la nation canadienne.
Votre comité, peut-on dire, transige avec des droits des plus fondamentaux ancrés dans l'article 133 de la Constitution; constitutionnalisés dans la Charte des droits et libertés; enchâssés dans la Loi sur les langues officielles, expressive d'un principe fondamental à l'égard des droits des minorités; mis en place et avancés par l'action pour les langues officielles; examinés et protégés par des revues parlementaires.
Par exemple, c'est ma quatrième comparution devant un comité parlementaire. J'ai comparu devant le comité du Sénat, et c'est la deuxième fois que je me présente ici; vous vous rappellerez que j'étais venu ici en avril dernier.
º (1600)
[Traduction]
L'une de mes responsabilités de ministre de la Justice est de promouvoir et de protéger la Charte des droits et libertés, et la promotion des droits linguistiques, des droits des minorités linguistiques, est l'un des principes qui a inspiré la Charte des droits. D'ailleurs, notre charte incarne le principe de l'égalité des deux langues officielles du Canada. La Cour suprême du Canada a déclaré dans la célèbre cause R. c. Beaulac :
L'égalité n'a pas un sens plus restreint en matière linguistique. En ce qui concerne les droits existants, l'égalité doit recevoir son sens véritable. (...) il s'agit de l'accès égal à des services de qualité égale pour les membres des collectivités des deux langues officielles du Canada. |
La Cour suprême a aussi affirmé que :
Les droits linguistiques doivent dans tous les cas être interprétés en fonction de leur objet, de façon compatible avec le maintien et l'épanouissement des collectivités des langues officielles au Canada. |
[Français]
Monsieur le président, la magistrature doit être respectée pour le rôle significatif qu'elle joue dans la protection de nos droits, pour la promotion et la protection de notre Constitution.
[Traduction]
Mais il faut aussi comprendre que la portée et la signification précises des droits linguistiques peut encore faire l'objet d'un débat légitime, dans les arènes politiques et juridiques, autant au sein des tribunaux qu'à l'extérieur, au Parlement et sur la place publique, et que le modèle juridictionnel de nos tribunaux n'est pas la seule méthode de résolution des conflits. Nous pouvons aussi suivre le modèle participatif qui comprend le fédéralisme coopératif et la participation de la société civile.
[Français]
Je pense aux entreprises, aux syndicats, aux organismes qui protègent les droits humains.
Comme vous le savez, un débat de cette nature s'est engagé quant à la portée de la partie VII de la Loi sur les langues officielles. En 2004, dans l'affaire du Forum des maires de la Péninsule acadienne, la Cour d'appel fédérale a conclu que l'article 41 de la partie VII de la Loi sur les langues officielles était déclaratoire, c'est-à-dire qu'il ne crée pas de droits et que cette disposition n'est pas justiciable, c'est-à-dire qu'elle ne peut donner ouverture à un recours devant les tribunaux par quelque procédure que ce soit.
La Cour suprême du Canada a accepté d'entendre l'appel logé par le Forum des maires de la Péninsule acadienne. Le mémoire du procureur général du Canada a été déposé en cour au mois d'août, et notre position s'y trouve reflétée.
Vous comprendrez toutefois que le respect que nous devons à la cour et à ses procédures signifie que je ne pourrai pas discuter de ce dossier aujourd'hui. Comme je l'ai dit, c'est maintenant devant la cour.
Ce qui est le plus important — et de temps en temps on oublie de le mentionner —, c'est de nous engager. L'existence de ce débat juridique ne diminue d'aucune façon l'engagement du gouvernement du Canada à favoriser l'épanouissement des collectivités de langue officielle au Canada ou à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne, comme visé par la partie VII de la loi.
D'ailleurs, le cadre d'imputabilité adopté par le gouvernement en 2003 comme partie intégrante du Plan d'action pour les langues officielles a consigné très clairement les responsabilités des ministres et des fonctionnaires à l'égard de la partie VII de la Loi sur les langues officielles, et est venu renforcer les mécanismes déjà en place pour réaliser l'engagement du gouvernement du Canada à l'égard de la dualité linguistique.
Les réalisations du gouvernement dans le contexte de la mise en oeuvre du Plan d'action pour les langues officielles témoignent du sérieux de notre engagement. Par exemple, dans le domaine de la justice, mon ministère a appuyé plus de 50 projets visant à améliorer l'accès à la justice dans les deux langues officielles, et les résultats que nous pourrons rapporter prochainement illustrent le progrès réalisé.
º (1605)
[Traduction]
À ma dernière comparution devant votre comité, j'ai énuméré six initiatives que nous avons prises dans ce dossier pour concrétiser notre engagement.
Le projet de loi S-3 propose de modifier la Loi sur les langues officielles de façon à imposer aux institutions fédérales l'obligation de garantir la mise en oeuvre de l'engagement du gouvernement fédéral décrit à la partie VII de la loi.
Ma collègue, la ministre de Patrimoine canadien, a, lors de son témoignage devant vous le printemps dernier, exprimé ses réserves au sujet du libellé du projet de loi. Je partage ses préoccupations que j'aimerais vous rappeler brièvement.
[Français]
Essentiellement, le projet de loi S-3 remplace une obligation de moyen par une obligation de résultat; remplace des obligations de processus par une obligation de garantie; remplace un engagement de politique non justiciable par un engagement juridique obligatoire. À l'égard d'objectifs très larges et difficiles à évaluer, soit l'égalité du français et de l'anglais dans la société canadienne et l'épanouissement des minorités linguistes, les mots de ce projet de loi ne correspondent pas essentiellement aux mots de la partie VII, où on parle d'épanouissement, d'aspirations, mais pas clairement d'une obligation juridique.
L'atteinte de ces objectifs louables ne saurait se réaliser sans la coopération des provinces et des territoires ainsi que d'autres intervenants de la société civile que j'ai cités : les entreprises, les syndicats et les organismes bénévoles, pour ne nommer que ceux-là. Il faut tenir compte du fait que les domaines prioritaires identifiés par les minorités linguistiques elles-mêmes touchent bien des domaines de compétence provinciale ou partagée : la santé, l'éducation, les services à la petite enfance, la justice, l'immigration, etc.
Il semble donc difficile de concevoir que le gouvernement fédéral puisse accepter seul la responsabilité légale d'assurer et de garantir l'atteinte de résultats précis, alors même qu'il ne détient pas seul les moyens de le faire. Comme l'ont expliqué certains témoins devant ce comité, ce n'est pas tant que le projet de loi, dans sa formulation actuelle, risque de contrevenir au partage des compétences.
En effet, le projet de loi impose a priori des obligations aux institutions fédérales uniquement. Par conséquent, la solution avancée par certains de préciser que la mise en oeuvre de la partie VII respectera le partage des compétences est une solution à un problème qu'on ne connaît pas.
Je ne remets évidemment pas en question le fait que les tribunaux peuvent jouer un rôle important et efficace afin d'assurer le respect des droits linguistiques, ou le droit du législateur de conférer de tels droits linguistiques. La partie VII de la loi, toutefois, a d'abord pour objet d'encadrer l'action du gouvernement fédéral en matière de promotion des langues officielles.
À cet égard, il me semble utile de vous faire part de certains propos des tribunaux qui nous permettent de mieux comprendre la finalité du paragraphe 16(3) de la Charte. Je fais référence à ce paragraphe parce que, comme vous le savez, cette disposition de la Charte et la partie VII de la loi ont beaucoup en commun. Le paragraphe 16(3) de la Charte prévoit que :
La présente charte ne limite pas le pouvoir du Parlement et des législatures de favoriser [...] |
On parle de « promouvoir », de « favoriser » et de « l'épanouissement ». Ce sont les mots utilisés. Ce n'est pas une obligation juridique. On parle ici d'obligation de moyens. Je continue :
[...] de favoriser la progression vers l'égalité de statut ou d'usage du français et de l'anglais. |
Dans son arrêt sur l'Hôpital Montfort, la Cour d'appel de l'Ontario a expliqué comme suit l'origine et la fonction du paragraphe 16(3), et je cite :
L'art. 16(3) n'est pas attributif de droit mais est destiné à prévenir les contestations d'actions gouvernementales qui, en son absence, contreviendraient à l'art. 15 de la Charte ou outrepasseraient les pouvoirs législatifs d'un palier de gouvernement. |
La partie VII de la Loi sur les langues officielles me semble également avoir été conçue dans le même esprit. En effet, comme le paragraphe 16(3) de la Charte, la partie VII de la Loi sur les langues officielles n'est pas attributive de droit.
º (1610)
Également, comme au paragraphe 16(3) de la Charte canadienne des droits et libertés, le véritable objet de la partie VII de la Loi sur les langues officielles est de mettre les politiques et programmes de promotion — et les mots sont très importants, ils sont écrits dans la loi — à l'abri d'arguments de discrimination fondés sur l'article 15 de la Charte.
[Traduction]
Le projet de loi S-3, par conséquent, semble s'éloigner considérablement de l'objet, l'intention et l'idée originale qu'avait le législateur quand il a fait adopter la partie VII de la Loi sur les langues officielles en 1988. Ce qui est en cause ici, ce n'est pas de savoir si, oui ou non, le gouvernement fédéral devrait poursuivre ses efforts en vue de réaliser l'égalité des deux langues officielles, mais bien les efforts en vue d'assurer l'épanouissement des communautés linguistiques minoritaires dans l'esprit du paragraphe 16(3) de la Charte canadienne des droits et libertés et de la partie VII de la Loi sur les langues officielles. C'est très clair. C'est évident. C'est ce à quoi aspire le législateur, c'est l'objectif de la loi et c'est l'engagement qui a été pris.
[Français]
C'est à cela que nous nous engageons, c'est notre but.
[Traduction]
La question est de savoir si on devrait modifier l'équilibre constitutionnel et les principes qui sous-tendent le fédéralisme en imposant de nouveaux devoirs aux institutions fédérales et en élargissant le rôle que jouent les tribunaux. La question est de savoir s'il s'agit d'une obligation de moyens que nous tentons de convertir en une obligation de résultats, s'il s'agit d'une obligation concernant le processus que nous tentons de convertir en une obligation concernant les résultats, s'il s'agit d'un encouragement non justiciable qui semble clair selon l'interprétation simple des termes employés dans la loi, à l'article 41 de la partie VII, que nous voulons convertir en une obligation justiciable que le libellé ne reflète pas et qui n'avait pas été envisagé.
Ce sont-là des questions cruciales, monsieur le président, et le Parlement doit bien comprendre la portée du changement qui est proposé. Nous ne voyons pas d'objection aux buts qu'on tente d'atteindre avec ce changement, mais bien aux moyens employés. Nous ne nous opposons pas aux principaux engagements pris dans ce projet de loi, ni aux intentions et aspirations philosophiques. La question est de savoir si nous pouvons transformer une obligation de moyens en une obligation de résultats, compte tenu du fait que cela s'écarte de la nature, de l'intention et de l'objet de la loi originale, comme en témoigne la partie VII de la loi
Si nous adoptons le projet de loi S-3, le pouvoir d'établir le programme en matière de langues officielles et de déterminer les priorités ne relèvera plus des discussions et négociations fédérales-provinciales ni, et c'est tout aussi important, de la participation volontaire de tous les secteurs de la société canadienne qui tentent d'atteindre des objectifs très louables à l'égard desquels ils se sont engagés. Ce pouvoir incombera dorénavant aux tribunaux qui imposeront des priorités et des solutions.
Par conséquent, nous remplacerions un modèle participatoire, qui peut mettre à contribution les tribunaux, mais pas seulement les tribunaux, par un modèle juridictionnel. Nous imposerions une obligation de résultats alors que, selon le principe et la politique fédéralistes constitutionnels, c'est une obligation de moyens qui était envisagée.
En terminant, monsieur le président, je crois savoir que mon collègue, le ministre des Langues officielles, témoignera devant votre comité sous peu et il sera mieux en mesure de décrire la position du gouvernement sur cette importante mesure législative. Je témoigne aujourd'hui à titre de conseiller juridique du gouvernement et, pour ma part, je répète que, à titre de procureur général, je ne peux commenter les causes dont est encore saisie la Cour suprême du Canada.
Cela dit, dans la mesure où je le pourrai, je serai heureux de répondre à vos questions. Je remercie le comité de m'avoir invité à lui faire part de mes vues.
º (1615)
Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre.
Vous n'avez encore que 12 ou 14 minutes à nous consacrer; par conséquent, il n'y aura qu'une série de questions.
[Français]
Vous pouvez peut-être prendre chacun trois minutes avant le départ du ministre. Ensuite, nous poursuivrons avec MM. Tremblay et Francoeur.
Nous pouvons faire un tour rapide de deux ou trois minutes chacun. Je ferai respecterai de manière très sévère le temps imparti à chacun.
M. Guy Lauzon: Bienvenue, monsieur le ministre.
Croyez-vous qu'il y aura des problèmes de compétences avec les provinces si le projet de loi S-3 entre en vigueur?
L'hon. Irwin Cotler: La question ici est que la loi vise maintenant des sujets et des projets qui font partie de notre champ de compétence. La santé, l'éducation, l'immigration, la justice, par exemple, sont de compétence provinciale ou partagée. La loi peut donc parler d'un plein épanouissement pour ce qui est des sujets de compétence fédérale. Quant aux autres sujets, ceux qui sont soit de compétence partagée ou entièrement de compétence provinciale ou territoriale, il est nécessaire d'adopter un modèle participatif et non éducatif, étant donné que ce dernier constituerait un problème.
Le président: Monsieur Poilievre.
M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC): M. Boudria nous a dit plus tôt qu'on discutait de ce projet de loi depuis quatre ans. Je voudrais bien comprendre la raison pour laquelle le gouvernement ne veut pas le mettre en vigueur. En matière de promotion du bilinguisme, ce gouvernement n'a pas réussi. Par exemple, le gouvernement conservateur y a consacré deux fois plus d'argent que l'actuel gouvernement libéral. Celui-ci a coupé les dépenses relatives aux écoles francophones et aux écoles d'immersion partout au pays.
Ma question est claire. D'une part, est-ce que le gouvernement libéral croit qu'il est vulnérable face à d'éventuelles poursuites et, d'autre part, à combien se chiffre en général, pour les contribuables, le coût d'une poursuite en justice, entre autres les frais d'avocat?
Le président: Répondez en trente secondes, s'il vous plaît.
L'hon. Irwin Cotler: Je ne pense pas que nous soyons vulnérables. Notre intention est d'adopter des projets de loi qui sont de notre domaine, de façon à collaborer avec les provinces et les territoires. Je parle ici de projets et de sujets qui sont de compétence partagée ou provinciale. Je n'envisage pas de problèmes à cet égard.
º (1620)
Le président: Madame Brunelle.
Mme Paule Brunelle: Bonjour, monsieur Cotler.
Dans ce projet de loi, ce qui nous inquiète beaucoup, nous les Québécois, c'est évidemment la question du recours aux tribunaux. Considérant ce qui est arrivé à la Charte de la langue française, à savoir qu'il y a eu de nombreux recours devant les tribunaux et qu'on a alors charcuté cette loi qui vise à protéger notre langue, je m'inquiète de voir qu'il n'y a pas de critères précis. Vous avez déjà abordé cette question sommairement.
Dans ce projet de loi, on demande au gouvernement fédéral d'atteindre des résultats, mais sans critères précis. Il me semble qu'il y a des lacunes. On s'inquiète à l'idée que les anglophones du Québec puissent contester la Charte de la langue française. Est-ce qu'on a raison de le faire?
L'hon. Irwin Cotler: Non, je pense qu'il n'est pas nécessaire d'avoir des inquiétudes à l'égard de la Charte de la langue française et je ne vois pas la contradiction entre les deux.
Le langage utilisé à la partie VII de la Loi sur les langues officielles est très intéressant. En effet, on dit, à l'article 41 :
41. Le gouvernement fédéral s'engage à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et à appuyer leur développement, ainsi qu'à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne. |
On utilise les mots: « s'engage à favoriser l'épanouissement », « appuyer », « promouvoir ». On parle ici d'obligation de moyen, pas d'obligation de résultat.
Quant à la raison pour laquelle le gouvernement fédéral hésite à se lier à l'atteinte de résultat, si on peut dire, c'est parce que, comme je l'ai dit, la partie VII de la Loi sur les langues officielles a de vastes objets: l'égalité du statut du français et de l'anglais, non seulement au sein des institutions fédérales, où il y a un cas patent, mais dans toute la société canadienne, à l'égard de tous les sujets que j'ai cités.
Elle vise aussi le développement et l'épanouissement des minorités linguistiques, soit des concepts dont l'atteinte est difficile, comme vous l'avez dit, à mesurer ou à évaluer. La réalisation de ces vastes objectifs nécessite la participation et la collaboration des autres paliers de gouvernement : provinciaux, territoriaux et municipaux. Elle nécessite aussi la participation de toute la société civile canadienne. C'est pour cette raison que j'ai dit qu'on doit parler d'une approche qui n'est pas seulement un modèle judiciaire.
On peut avoir, dans les domaines touchés, une référence aux tribunaux, mais on doit aussi avoir une approche qui est un modèle participatif, c'est-à-dire qui envisage la participation de tous les paliers du gouvernement et de la société civile.
Le président: Merci.
Merci, madame Brunelle.
Monsieur Godin, vous avez trois minutes.
M. Yvon Godin: Merci. C'est dommage qu'on ne dispose que de trois minutes pour poser des questions à propos d'un projet de loi aussi important.
Si on dit que c'est seulement déclaratoire, et non exécutoire, pourquoi le gouvernement ne change-t-il pas sa manière de travailler? On pourrait commencer à travailler en français. On pourrait écrire les documents en français et on en ferait la traduction au moyen des nouvelles techniques de traduction automatique.
Si le temps me le permet, j'aimerais lire un article publié dans le journal Le Droit du 20 septembre dernier :
Le « Guichet Emplois » du gouvernement fédéral, cette ressource Internet sur laquelle sont affichées plus de 700 000 offres d'emploi par année, présente tout un éventail de traductions pour le moins approximatives. |
« Travailleurs ont exigé pour choisir commandes, exécuter activités d'emballage et d'autres fonctions d'entrepôt. Environnement est se nettoient, coffre-fort et professionnellement fonctionné quart de jour », peut-on lire sur un affichage visant quatre postes de « manœuvre à l'emballage ». |
Vous êtes soudeur ? Le site fédéral « www.jobbank.gc.ca » fait état de deux postes disponibles en Ontario. L'entreprise en question est à la recherche de « candidats avec Cœur de Flux Plat ou MIG préférence donnée ». Les personnes intéressées doivent « être le quart de travail flexible, quoique la compagnie n'a pas de postes alternants ». Plus important encore, les candidats doivent démontrer « la bonne connaissance de soude de symbole, la grande attitude et la volonté d'apprendre ». |
C'est une honte! C'est insultant!
º (1625)
Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.): On l'a déjà dit.
M. Yvon Godin: C'est pour cette raison qu'il doit y avoir une loi aujourd'hui pour faire en sorte que le gouvernement prenne cette situation au sérieux. Or, ici, on dit qu'on va seulement faire la promotion. Ferons-nous la promotion pour les 400 prochaines années? Cela n'a pas d'allure!
Je demande au gouvernement d'afficher les postes en français et d'en faire la traduction automatique vers l'anglais, pour voir ce qu'en penseront les gens de la communauté anglophone. Je pense qu'une loi serait vite adoptée.
L'hon. Irwin Cotler: Alors, vous ne parlez pas seulement de lois sur les livres et les textes, mais également de lois sur le terrain. Je suis d'accord avec vous et c'est pourquoi j'ai dit que lorsqu'on parle de l'importance des lois sur le terrain, on parle de la question d'obligation de moyen et non de l'obligation de résultat. Nous parlons particulièrement des objectifs, des atteintes qui sont expressément dans...
M. Yvon Godin: Est-ce là l'objectif?
L'hon. Irwin Cotler: On parle ici du fait qu'aucun gouvernement ne peut être lié à une obligation de résultat. Quand divers paliers de gouvernement s'engagent, qu'il est question de la participation de sociétés...
M. Yvon Godin: Monsieur le ministre...
Le président: Monsieur Godin, c'est tout le temps dont on dispose. Merci.
M. Yvon Godin: C'est incroyable!
Le président: Monsieur Cotler, je dois vous interrompre également.
On termine avec M. Godbout.
L'hon. Irwin Cotler: Comme je l'ai dit au début, le problème est que je dois me rendre à la réunion du Cabinet à 16 h 30. Mes fonctionnaires sont ici. Ils ont l'avantage d'être sur le terrain de façon quotidienne. Ils peuvent mieux que moi répondre aux questions que vous avez posées, ainsi qu'à d'autres.
Le président: Est-ce qu'on peut passer à une dernière intervention, de façon à finir le tour de table?
Monsieur Godbout, vous avez trois minutes.
M. Marc Godbout: Monsieur le ministre, je suis d'accord avec vous pour dire que la meilleure solution est évidemment l'approche participative. Cependant, dans plusieurs domaines, les communautés ont attendu assez longtemps. L'approche participative n'a jamais été appliquée.
Le Nouveau-Brunswick est allé jusqu'à enchâsser ces garanties dans la Constitution canadienne. Or, en ce moment, il n'est pas question d'une telle mesure. À mon avis, ce qui est demandé ici est modeste. Il s'agit de rendre la loi exécutoire, non pas pour qu'on se retrouve plus souvent en cour, mais plutôt parce que le fait qu'elle soit exécutoire fera que les ministères appliqueront avec un peu plus de fermeté leur approche proactive face aux communautés francophone et acadienne. Les communautés sont épuisées en ce moment. Elles ne peuvent pas constamment se retrouver en cour. La raison pour laquelle la Cour suprême a quand même accepté l'appel est que ce dernier repose sur quelque chose. S'il était totalement clair que la partie VII n'est que déclaratoire, la Cour suprême n'aurait pas accepté l'appel. Nous allons voir quels seront les résultats à cet égard.
J'ai confiance que notre gouvernement posera les gestes qui s'imposent. Toutefois, les gouvernements changent. C'est pourquoi les communautés veulent des garanties. Par exemple, si l'article 23 de la Charte n'avait pas été exécutoire en ce qui a trait à la gestion scolaire, celle-ci n'existerait pas dans nos écoles à l'heure actuelle. Malheureusement, c'est la cour qui a rendu cet article exécutoire.
Il serait intéressant que notre gouvernement revoie le dossier et détermine s'il y a lieu d'accepter le projet de loi S-3 une fois pour toutes, car notre discours va dans ce sens. Maintenant, il faudrait peut-être poser des gestes, de façon à mettre en pratique le discours que nous tenons auprès des communautés francophone et acadienne.
Le président: Merci.
Monsieur le ministre.
L'hon. Irwin Cotler: La partie VII de la Loi sur les langues officielles reconnaît clairement les besoins. Comme je l'ai expliqué déjà, il s'agit d'obligations, mais celles-ci ne sont pas clairement juridiques. Il s'agit de l'obligation d'appuyer les minorités francophones et anglophones.
Pour répondre plus précisément à votre question, je dirai que le gouvernement n'a nullement hésité à se doter d'obligations de résultat et à en confier la surveillance ultime aux tribunaux lorsque l'objet des dispositions était pleinement de son ressort. Lorsqu'on dit « pleinement de son ressort », on peut parler d'un modèle judiciaire, comme je l'ai déjà indiqué. On parle par exemple de communications et de services offerts par les institutions fédérales — je pense que c'est un des sujets que M. Godin a abordés — ainsi que de la langue de travail des fonctionnaires fédéraux.
Le gouvernement voit difficilement comment il peut être imputable relativement à l'atteinte de résultats dans des domaines tels que la santé, l'immigration et l'éducation, qui ne sont pas exclusivement de sa compétence sur le plan constitutionnel. Lorsqu'on parle de niveaux juridiques, c'est le problème. Ces préoccupations ont mené le législateur, en 1988, à conférer un statut particulier à la partie VII et à utiliser le vocabulaire de l'engagement face à l'épanouissement, que ce soit pour encadrer les efforts du gouvernement fédéral ou pour encourager les provinces et les territoires, ainsi que les autres institutions de la société civile canadienne, à participer à la promotion de la dualité linguistique. Ces mêmes préoccupations animent le gouvernement fédéral aujourd'hui.
Comme je l'ai dit déjà, il y a des domaines fédéraux où on peut parler d'obligation de résultat, et il y a en d'autres où on doit parler d'obligation de moyen, et ce, pour les raisons que j'ai précisées.
º (1630)
Le président: Merci.
L'hon. Irwin Cotler: Je remercie le comité.
Le président: Le ministre a décrit longuement et en détail la position de son ministère. Je ne pense pas que nous ayons besoin d'entendre de présentations de la part des autres invités. Je propose plutôt, si cela vous convient, que nous passions à la période de questions et réponses. Est-ce que cela vous va? Nous n'avons pas besoin d'autres éléments d'introduction.
Il nous reste une heure; nous disposerons de cinq minutes chacun pour poser des questions.
[Traduction]
Est-ce que cela vous va? Vous disposerez donc chacun de cinq minutes jusqu'à 16 h 30.
Monsieur Scheer, à vous la parole.
M. Andrew Scheer: J'ai une question simple à poser aux fonctionnaires. Mme Frulla et, aujourd'hui, le ministre de la Justice ont témoigné devant notre comité et il semble que les hauts fonctionnaires du ministère du Patrimoine et de la Justice aient d'importantes réserves à propos du projet de loi S-3. Si le projet de loi était mis aux voix sous sa forme actuelle, recommanderiez-vous au Cabinet ou à votre ministre de voter contre le projet de loi S-3?
M. Michel Francoeur: Comme vous le savez, les conseils et recommandations que nous formulons à l'intention des ministres ou du Cabinet sont confidentiels. Les conseils de nature juridique sont aussi protégés par le secret professionnel qui lie l'avocat et son client. Je peux toutefois vous dire que des motions d'amendement ont été déposées auprès du comité en mai — le 17 mai, je crois — par M. Simard. Ce sont-là les motions qui, jusqu'à présent, ont été débattues et, en quelque sorte, défendues par les représentants du gouvernement.
Pour répondre plus précisément à votre question sur notre recommandation et nos conseils, je ne peux que répéter que cela est confidentiel.
[Français]
Le président: Monsieur Lauzon.
M. Guy Lauzon: Merci.
Êtes-vous au courant des amendements que Mme Frulla a suggérés?
[Traduction]
Vous connaissez les amendements proposés par Mme Frulla?
[Français]
Pensez-vous que les amendements diminuent la portée du projet de loi S-3?
M. Michel Francoeur: En fait, l'objectif des motions d'amendement qui ont été déposées est de faire en sorte que, si des modifications sont apportées à la partie VII, elles soient faites de façon à ce que les engagements ou les responsabilités qui seraient justiciables, c'est-à-dire qui pourraient faire l'objectif d'un recours devant les tribunaux, soient des responsabilités de moyen, et non des responsabilités ou des obligations de résultat.
Lors de nos deux premières comparutions — le 17 et le 30 ou le 31 mai derniers, je crois —, on a clairement indiqué qu'il y a, parmi les préoccupations exprimées par le gouvernement, cette notion d'obligation de résultat qui transparaît dans la facture actuelle du projet de loi S-3. Comme le procureur général, M. Cotler, l'a précisé tout à l'heure, c'est une préoccupation qui nous paraît tout à fait légitime, dans la mesure où les objectifs de la partie VII sont des objectifs très vagues, très larges, à savoir l'épanouissement et le développement des communautés minoritaires et la promotion des langues officielles dans toutes la société canadienne, par opposition aux objectifs des parties I, II, III, IV ou V de la loi, par exemple, qui sont beaucoup plus précis et faciles à identifier, à savoir le service au public, les instruments de travail des fonctionnaires, la langue des lois, la langue des règlements, la langue des institutions qui se retrouvent devant les tribunaux fédéraux.
Par conséquent, il nous apparaît préférable, souhaitable en fait, que si les obligations des institutions fédérales sont justiciables à l'égard d'objectifs aussi larges que l'épanouissement et le développement des communautés, notamment à l'égard de champs de compétence partagée ou de compétence provinciale, les responsabilités des institutions fédérales soient des responsabilités de moyen, et non de résultat.
º (1635)
Le président: Merci.
Monsieur D'Amours.
M. Jean-Claude D'Amours: Merci, monsieur le président.
Je ne veux pas revenir sur ce que le ministre a mentionné plus tôt, car je suis convaincu que vous direz que vous ne voulez pas en discuter. Cependant, le ministre a mentionné que si la loi était exécutoire, lorsque le gouvernement fédéral touche, à certains égards, des domaines tels que la santé, l'éducation et l'immigration, cela pourrait causer des problèmes. Je pense qu'on rencontrerait encore plus d'opposition de la part de nos amis du Bloc. Toutefois, dans les domaines qui relèvent exclusivement du gouvernement fédéral...
J'ai compris que la problématique se situait au niveau de ce que nous ne gérons pas. C'est certain qu'il est difficile d'imposer quelque chose dans un domaine qui ne relève de notre responsabilité. Ce serait comme tenter d'imposer quelque chose, en fin de compte. Ce n'est pas ce qu'on veut faire. On ne veut pas imposer quelque chose aux autres, on veut s'assurer que les minorités, autant la minorité francophone hors Québec que la minorité anglophone au Québec, puissent avoir la même chance que les autres citoyens dans leurs provinces respectives.
Cela veut-il dire qu'il serait acceptable que la loi soit exécutoire dans des domaines dont le gouvernement fédéral a la responsabilité exclusive? C'est ce que j'en déduis, en fin de compte.
M. Michel Francoeur: Dans des domaines comme la santé ou l'éducation, qui sont principalement des champs de compétence provinciale, le partage des compétences stipulé dans la Constitution prévoit que le gouvernement fédéral peut exercer son pouvoir de dépenser. Il peut le faire dans toutes les sphères d'activité. Cela veut dire que, bien que le Parlement ne puisse pas réglementer l'éducation, il peut, en vertu de la Constitution, exercer son pouvoir de dépenser. C'est d'ailleurs ce qu'il fait depuis plusieurs décennies: des paiements de transfert aux provinces sont faits dans le domaine de l'éducation. On s'entend pour dire que la compétence pour réglementer l'éducation est du ressort des provinces. Néanmoins, le fédéral a le pouvoir de faire des paiements de transfert aux provinces dans ce domaine.
D'ailleurs, la partie VII, telle qu'on la connaît aujourd'hui, dans la loi actuelle, régit en très grande partie ce pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral auprès des provinces, des municipalités, des entreprises, des organismes à but non lucratif, des syndicats. Par conséquent, le fait que le fédéral exerce ce pouvoir de dépenser, c'est-à-dire qu'il discute avec les provinces ou d'autres organisations pour transférer des fonds, des subventions, des contributions, des paiements de transfert, est tout à fait légitime. Ce n'est pas nouveau et, en soi, ce n'est pas problématique.
º (1640)
M. Jean-Claude D'Amours: Je comprends cela, mais selon ce que j'ai pu comprendre des propos tenus plus tôt par le ministre, lorsqu'il ne s'agit pas d'un champ de compétence exclusive du fédéral, par exemple l'éducation, c'est un peu plus problématique.
Pourrait-on, dans les champs de compétence exclusive du gouvernement fédéral, rendre la loi exécutoire, sans aucun problème? À ce moment-là, on s'occuperait de nos bebelles, comme on dit, sans empiéter sur le territoire ou sur les responsabilités des autres sphères.
M. Michel Francoeur: Je vous remercie d'avoir précisé votre question.
Lorsqu'il s'agit d'un champ de compétence fédérale, il est clair qu'il n'y a pas d'obligation de collaborer avec les provinces ou d'autres paliers gouvernementaux. Cela dit, le texte actuel du projet de loi S-3 prévoit, par exemple, que la ministre du Patrimoine canadien doit assurer la progression du français et de l'anglais dans la société canadienne. Même si on est dans un champ de compétence purement fédérale, même si les provinces ne sont pas impliquées, on peut intenter un recours contre la ministre du Patrimoine canadien et contre le gouvernement fédéral, alors que l'obligation de la ministre du Patrimoine canadien s'applique à un objectif ou à un résultat aussi vague, aussi large que l'épanouissement et le développement des communautés ou la progression du français et de l'anglais. Il est certain que le niveau de difficulté est moins grand que dans les champs de compétence partagée ou essentiellement de ressort provincial.
Toutefois, l'obligation de résultat que l'on retrouve présentement dans le projet de loi S-3 demeure problématique. Qu'il s'agisse d'atteindre un résultat dans un champ de compétence strictement fédérale ou dans un champ de compétence partagée ou d'abord provinciale, l'atteinte du résultat demeure difficile parce que l'épanouissement et le développement des communautés minoritaires en soi n'est pas un objectif précis et facilement identifiable, contrairement, par exemple, aux autres parties de la loi qui relèvent de champs de compétence strictement fédérale, comme la langue de travail des fonctionnaires dans les institutions fédérales ou les services offerts au public par les institutions fédérales. Cependant, les objectifs et les obligations de résultat dans ces parties de la loi sont clairs et facilement identifiables. Il faut que le public obtienne son service en français.
Le président: Merci, monsieur Francoeur.
Nous poursuivons avec M. Côté.
M. Guy Côté (Portneuf—Jacques-Cartier, BQ): Merci beaucoup. Je me joins aujourd'hui au comité, et j'espère ne pas trop répéter d'arguments ou de commentaires qui ont déjà été formulés au cours des réunions précédentes.
Ce projet de loi qui, il faut le reconnaître, résulte d'une bonne intention nous pose plusieurs problèmes. À notre avis, les implications du projet de loi S-3 peuvent difficilement être uniformes, parce que considérer que la situation linguistique des anglophones au Québec est similaire à celle des francophones hors Québec, c'est nier la réalité. La situation n'est pas du tout la même.
Les anglophones de Montréal — ils sont concentrés là, mais ce pourrait être ailleurs au Québec — ont accès à la très grande majorité des services dans leur langue ainsi qu'à des véhicules de la culture, que ce soit la télévision ou la radio; ils peuvent mener leur vie dans leur langue, ce qui est malheureusement beaucoup plus difficile pour les minorités du reste du Canada.
J'ai écouté les commentaires du ministre ainsi que les vôtres, monsieur Francoeur, et certains d'entre eux me font réagir. Vous donniez l'exemple du ministère du Patrimoine, qui parle d'assurer la progression du français et de l'anglais dans les provinces où ils sont minoritaires.
Ne trouvez-vous pas que, jusqu'à un certain point, favoriser la progression de l'anglais au Québec nuirait à l'autre groupe linguistique du Canada? La situation des Anglais au Québec, dans les contextes canadien et nord-américain, n'est pas vraiment celle d'une minorité. Ils ont tout de même les outils nécessaires pour que leur langue continue de s'épanouir. La situation n'est absolument pas la même.
Le ministre disait plus tôt qu'il ne s'agissait évidemment pas que d'éléments juridiques et que cette promotion devait se faire dans l'ensemble de la société. Je vois difficilement comment le gouvernement fédéral, entre autres par le biais de son pouvoir de dépenser, n'en viendra pas, à un moment ou à un autre, à empiéter sur des champs de compétence québécoise et provinciale. Je n'ai pas encore toutes les réponses à cela, mais il reste que nous éprouvons beaucoup d'inquiétude à ce sujet.
Le ministre disait aussi qu'il n'était probablement pas nécessaire d'inclure dans le projet de loi une mention très claire sur le fait que ce dernier ne cherchait pas à empiéter sur les champs de compétence du Québec et des provinces. Selon lui, ce n'est pas nécessaire, parce que le projet de loi est suffisamment clair. Si, en effet, le projet de loi est très clair sur ce point, pourquoi ne pas faire preuve de prudence et ne pas mentionner tout de suite aux juristes que ce n'est pas le but de ce projet de loi et que ce dernier ne doit pas entraîner des empiétements sur les champs de compétence, et éviter ainsi de possibles contestations juridiques? Pourquoi ne pas le prévoir? Pourquoi ne pas faire acte de prudence?
Voilà les réflexions que cette rencontre suscite en moi. Peut-être pouvez-vous m'éclairer.
º (1645)
M. Marc Tremblay (avocat général et directeur, Groupe du droit des langues officielles, ministère de la Justice): Je peux commencer, et mon collègue complétera la réponse.
D'abord, comme le ministre l'a indiqué, qu'il s'agisse de l'actuel projet de loi ou du projet de loi modifié, celui-ci impose des obligations aux institutions fédérales. Alors, en ce qui a trait au sens juridique de l'expression « champ de compétence », il n'y a pas atteinte aux compétences provinciales.
Donc, a priori, cette porte sur les champs de compétence du fédéral parce qu'elle impose des obligations uniquement aux institutions fédérales. Quant à savoir si les matières qu'elle touche peuvent avoir un effet indirect ou secondaire sur des champs qui sont de compétence partagée ou provinciale — on traite d'éducation, etc. —, la réponse est oui, selon la perception du gouvernement.
De là l'importance de ne pas se lier, dans ce projet de loi, à l'atteinte de résultats précis et continuer plutôt, s'il doit être adopté, de le modifier comme il a été suggéré dans le cadre des discussions antérieures, pour qu'il traite d'obligation de moyen. On revient donc aux discussions qui ont cours avec le Québec, notamment, depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur les langues officielles en 1988.
J'oeuvre dans le domaine des lois linguistiques depuis 10 ans et je peux dire franchement que je n'ai pas beaucoup entendu parler de conflits entre les objectifs de la partie VII et ceux que protège ou que promeut le gouvernement du Québec par la voie de la Charte de la langue française. Tant qu'on aura cette discrétion, je pense que les problèmes d'empiétement, non pas au sens juridique mais au sens « vous nous dites quoi faire et vous venez vous mêler de choses qui sont chez nous », seront réduits.
Autrement, faudrait-il un énoncé spécifique dans une loi fédérale ou dans un texte de loi pour tenir compte de cette réalité? Nous sommes d'avis que non. C'est le second point dont je voudrais traiter.
En effet, les tribunaux nous ont clairement dit que des dispositions d'application nationale peuvent très bien nécessiter que, dans leur application, on fasse preuve de discernement et qu'on tienne compte des réalités sociales, démographiques, culturelles et linguistiques des minorités.
Dans deux dossiers très récents, la Cour suprême du Canada a adopté les positions avancées par le procureur général du Canada et a conclu que dans son interprétation de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, la Cour suprême et les tribunaux devaient tenir compte des réalités très différentes des minorités francophones hors Québec et de la minorité anglophone du Québec. Donc, point n'est besoin de mentionner dans chaque loi que cela se fait.
En effet, examinons les programmes fédéraux. Vous avez entendu la ministre du Patrimoine à ce sujet. Il est clair que la ministre ne posera pas les mêmes actions pour les anglophones au Québec, où, par exemple en matière de télédiffusion, il existe dans un choix de réseaux et un accès à la télévision de langue anglaise, qu'elle pourrait vouloir poser pour les francophones hors Québec, parce que les besoins sont différents...
º (1650)
Le président: Merci, monsieur Tremblay.
M. Marc Tremblay: ...et la loi le permet.
Le président: Je me dois de vous interrompre pour céder la parole à monsieur Godin.
M. Yvon Godin: Je vous remercie, monsieur le président. C'est à souhaiter, si le projet de loi S-3 est adopté, que ce ne soit pas une loi pour Ottawa mais bien pour tout le Canada. Elle sera utile pour aider à changer l'attitude à bien des endroits, sans aller dans les compétences provinciales. C'est clair, et vous le dites. Cela ne me pose pas un gros problème de le préciser deux fois.
Cependant, pour ce qui est des textes que j'ai cités au ministre tout à l'heure, qui viennent d'un site Internet, il s'agit d'une honte et d'une insulte. Il est de la responsabilité du gouvernement de faire la promotion du français ou de l'anglais. Mais dans ce cas, il ne s'agit plus d'une promotion. C'est le plus ridicule qu'on puisse trouver et il s'agit du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences, quant à lui, vient de commencer la même chose. C'est incroyable!
De plus, je crois que le fait que le gouvernement fédéral ait publié sur son site français la liste des emplois disponibles au Canada dans un langage automatisé qui n'a pas de sens constitue une insulte à la province de Québec. Il y a même un article, que je n'ai pas avec moi, dans lequel la traduction référait à un cochon, alors qu'il n'était même pas question d'un cochon dans le texte original.
Le projet de loi S-3 ne pourrait-il pas nous aider à mettre un terme à de telles choses? Je ne vois plus de promotion. J'ai atteint un point où je ne crois plus à la promotion. Il y a un temps pour prendre des décisions, et je pense que nous y sommes. Aurons-nous une loi pour reconnaître les deux langues officielles du pays? C'est le Parlement qui va en décider par le biais d'une mesure législative, et non pas le ministre de la Justice. Ne serait-on pas mieux protégés?
Je parle d'institutions fédérales, je ne parle pas d'aller piétiner dans les champs de compétence des provinces. Je parle de la manière qu'on est traités dans les institutions fédérales.
M. Marc Tremblay: En tant que fonctionnaire, je pense qu'il y a une question d'orientation de politique dans votre question, à laquelle je ne suis pas bien placé pour répondre.
M. Yvon Godin: Je m'excuse, mais il faudrait que vous m'expliquiez cela, parce que j'ai de la difficulté à saisir l'aspect politique. Il ne s'agit ici que d'une question de bon sens.
M. Marc Tremblay: Oui, et c'est peut-être de bon sens que je veux parler. En effet, je veux vous donner quelques précisions sur le contexte de votre question. Ce à quoi vous faites allusion est déjà couvert par la Loi sur les langues officielles. Ce n'est pas couvert par la partie VII, mais ce sont des obligations qui, en effet, découlent de la partie IV de la loi, et pour lesquelles il y a un recours. D'abord, il y a la possibilité de loger des plaintes. Il y a également la possibilité, évidemment, de faire appel...
M. Yvon Godin: Soyez sans inquiétude, ce sera fait.
M. Marc Tremblay: ...aux journaux, de faire appel aux comités parlementaires et de créer des circonstances pour que les institutions fédérales, si elles n'ont pas respecté les obligations que leur impose la loi, apportent les correctifs nécessaires. On a donc un exemple d'un champ où ce sont des obligations précises, et la question qui se pose est la suivante: est-ce qu'on a respecté cette obligation précise?
Vous comprendrez que je ne répondrai pas à cette question aujourd'hui, étant donné que le ministère en question doit d'abord avoir l'occasion de répondre à ces questions, et je pense que ce serait important...
M. Yvon Godin: S'il y répond, c'est à souhaiter qu'il n'y réponde pas en anglais et qu'il fasse traduire sa réponse par un système automatique.
M. Marc Tremblay: Vous pourrez certes poser la question.
Je pense, deuxièmement, que cela démontre le rôle d'un comité.
M. Yvon Godin: Cependant, les communautés demandent que cette partie de la loi soit exécutoire, afin de les aider et, surtout, afin de ne pas devoir aller devant les tribunaux. En effet, elles commençaient à aller devant les tribunaux et à gagner des causes, à avoir la sympathie des juges des alentours.
M. Marc Tremblay: Oui.
Je pense que cela démontre — et c'est un commentaire moins juridique; nous sommes quand même les conseillers juridiques du gouvernement, faut-il le rappeler? — que c'est une chose d'avoir un texte et de fixer des obligations, mais encore faut-il qu'elles se réalisent dans les faits. Le ministre y faisait allusion.
Cela vient donc souligner, si on fait le parallèle entre nos obligations claires et précises et celles qu'on voudrait que le Parlement choisisse de mettre en vigueur, qu'il faut se poser la question à savoir si c'est quelque chose qu'on pourra livrer quand il s'agira de matières aussi vagues, générales, ayant trait à des domaines d'activités sociales, culturelles, économiques, etc., sur lesquelles aucun gouvernement n'a la pleine maîtrise?
Il est parfois aussi difficile de mettre en oeuvre des obligations aussi claires et nettes que de communiquer avec le public dans les deux langues officielles. C'est difficile, on le sait. Chaque année, quelque 1 000 à 2 000 plaintes sont logées auprès du Commissariat aux langues officielles en rapport avec les obligations très claires et précises dont on parle.
º (1655)
M. Yvon Godin: On a un problème, n'est-ce pas? Combien y en a-t-il en anglais, et combien y en a-t-il en français?
M. Marc Tremblay: Je ne pourrais pas vous donner les chiffres exacts, mais il y a une prédominance assez nette des plaintes ayant trait à l'utilisation du français. C'est la langue minoritaire et cela pose des difficultés.
Le président: Merci, monsieur Godin.
Alors, on recommence. Monsieur Poilievre.
M. Pierre Poilievre: Merci.
Je pense que les contribuables devraient avoir le droit de savoir exactement combien coûterait la mise en vigueur des projets de loi que l'on étudie. Je vois dans ce projet de loi que les gens peuvent poursuivre le gouvernement s'ils ne sont pas satisfaits du niveau de promotion existant.
Alors, si, par exemple, la partie VII devenait exécutoire, est-ce que le gouvernement fédéral devrait élaborer un programme pour appuyer financièrement les recours en justice, sur le modèle du Programme de contestation judiciaire du Canada?
M. Michel Francoeur: Votre question consiste à savoir si le gouvernement devrait mettre en place un programme semblable au Programme de contestation judiciaire. C'est exact?
M. Pierre Poilievre: J'aimerais savoir, d'autre part, si le programme actuel s'appliquerait.
M. Michel Francoeur: Le programme actuel vise les actions intentées au sujet de droits linguistiques protégés par la Constitution du Canada ou par différentes lois constitutionnelles. C'est vrai également pour ce qui est des droits à l'égalité. Toutefois, même les recours existant présentement en vertu de la Loi sur les langues officielles, qu'on retrouve au paragraphe 77(1) et qui ne s'appliquent pas présentement à la partie VII, ne sont pas financés dans le cadre du Programme de contestation judiciaire.
Si le recours judiciaire devenait applicable à la partie VII en vertu d'une modification à la loi, le Programme de contestation judiciaire ne pourrait pas venir en aide aux personnes qui intenteraient un tel recours. Pour ce qui est de savoir si le gouvernement pourrait éventuellement envisager d'élargir la portée du Programme de contestation judiciaire, je ne suis pas en mesure de le dire pour le moment.
M. Pierre Poilievre: Le programme actuel ne s'appliquerait donc pas présentement?
M. Michel Francoeur: Il ne s'applique pas à la Loi sur les langues officielles dans son ensemble. Le recours prévu au paragraphe 77(1) n'est pas couvert par le Programme de contestation judiciaire.
[Traduction]
M. Pierre Poilievre: Avez-vous une idée générale de ce que cela coûterait? Est-il possible de prédire ou d'anticiper le nombre de poursuites auxquelles le gouvernement du Canada pourrait faire face et, en extrapolant, ce que les frais de litige pourraient coûter aux contribuables?
[Français]
M. Michel Francoeur: Nous n'avons pas de réponse à cette question pour le moment. Nous ne sommes pas en mesure d'évaluer les coûts que pourrait générer l'adoption du projet de loi S-3 dans sa forme actuelle. Cette partie n'est pas justiciable présentement, mais il est clair qu'à partir du moment où elle le deviendra, si elle le devient, il y aura des coûts additionnels, ne serait-ce qu'en termes de frais judiciaires, de frais d'avocat et de tous les coûts associés à des recours devant les tribunaux.
» (1700)
[Traduction]
M. Pierre Poilievre: Donc, vous n'avez aucune estimation pour l'instant.
[Français]
M. Michel Francoeur: On n'a pas d'estimés sous forme de chiffres...
[Traduction]
M. Pierre Poilievre: D'accord. Vous avez répondu à ma question. J'ajouterai, même si cela me semble évident, qu'on pourrait s'engager sur une voie qui pourrait nous amener à dépenser des sommes considérables en frais judiciaires, des sommes qui pourraient servir à rétablir au niveau où il était sous les conservateurs le financement de l'enseignement en français et les autres formes d'appui du français et du bilinguisme à l'échelle du pays.
Ce n'était qu'une observation et ne vous sentez pas tenu de la commenter.
M. Michel Francoeur: Je ne le ferai pas.
[Français]
Le président: Merci, monsieur Poilievre.
Madame Brunelle.
Mme Paule Brunelle: Pour ce qui est de savoir si le projet de loi S-3 constitue un gain ou un recul pour la majorité francophone du Québec, il est clair pour moi qu'il peut constituer un recul. Je parlerais même d'un recul inquiétant, en ce sens que je peux imaginer des groupes comme Alliance Québec ressurgissant et allant contester devant les tribunaux. On sait que par le passé, ces groupes ont tous été abondamment financés par le gouvernement fédéral. Tout ce processus de judiciarisation des résultats m'inquiète beaucoup. Je me demande si, dans une certaine mesure, le projet de loi S-3 n'utilise pas un bazooka pour tuer un moustique.
On en arrivera à une situation absolument intolérable. On va systématiquement se retrouver en cour dès que les droits linguistiques de quelqu'un n'auront pas été respectés. Cela revient à dire qu'on laisse aux tribunaux plutôt qu'aux politiques le pouvoir de prendre des décisions. Je pense que cela est du ressort du Parlement. Préserver la langue et favoriser la langue française est à mon avis une décision politique. Quoi qu'il en soit, il me semble que cela pourrait donner lieu à des recours qui nous dépasseraient.
Pour ce qui est du dossier de la langue, ce projet de loi laisse-t-il poindre à l'horizon de nombreux recours?
M. Michel Francoeur: À partir du moment où la partie VII deviendrait effectivement justiciable, il est certain qu'il y aurait davantage de recours, comme je le disais plus tôt. Puisqu'elle serait clairement justiciable, le recours prévu au paragraphe 77(1) pourrait être exercé par des citoyens qui jugeraient qu'une institution fédérale n'a pas respecté les responsabilités prévues à la partie VII.
Je ne sais pas si vous souhaitez des précisions supplémentaires, mais une augmentation du nombre de recours judiciaires nous paraît évidente.
Mme Paule Brunelle: Il vous est certainement difficile de prévoir, mais il me semble qu'on ouvre alors une boîte de Pandore et que tous les recours sont constamment possibles. Comme nous le disait le ministre, on oblige quand même à des résultats qui, bien souvent, relèvent d'un autre champ de compétence. À partir de là, on peut donc critiquer constamment. Cet aspect du projet de loi m'inquiète beaucoup.
M. Michel Francoeur: Était-ce un commentaire plutôt qu'une question?
Mme Paule Brunelle: Oui.
M. Michel Francoeur: Merci.
Le président: Peut-être souhaitez-vous répondre par un commentaire?
Merci, madame Brunelle.
Nous poursuivons avec Mme Boivin, qui partagera son temps avec M. Simard.
Mme Françoise Boivin: Je vais tenter d'être concise. Du moins vais-je tenter de trouver une question dans mon commentaire parce que, dans quelques semaines, nous devrons remettre nos recommandations sur un projet de loi qui m'apparaît extrêmement important.
J'ai l'impression de revivre mon passé d'avocate, parce qu'on fait beaucoup d'avocasserie et d'acrobaties avec la terminologie, me semble-t-il.
Il faut revenir à l'objectif visé par le projet de loi S-3. Dans le camp conservateur, on invoque toujours la question financière; or, à mon sens, la question n'est pas de savoir combien vont nous coûter les droits des minorités linguistiques du Canada. C'est un principe fondamental auquel je souscris.
Qu'il s'agisse des francophones hors Québec ou des anglophones du Québec, nos minorités linguistiques ont des droits. J'ai beaucoup de réticences à endosser l'exclusion de toute une minorité seulement sur la base de ce que j'entends de la bouche de ma collègue du Bloc, par exemple.
Je comprends certaines inquiétudes. À mon avis elles ne sont pas fondées, parce qu'il règne une paix linguistique au Québec. Ce n'est pas le projet de loi S-3 qui va la rompre, de grâce! Et je ne suis pas d'accord pour qu'on s'empêche d'accorder des droits ou d'améliorer un projet de loi parce qu'on craint que quelques hurluberlus sortent des boules à mites pour contester. Il faut prendre le projet de loi S-3 pour ce qu'il est. Il fait partie d'un ensemble qui s'appelle la Loi sur les langues officielles.
Voyons les différentes parties de cette loi : « Actes législatifs et autres », « Administration de la justice », « Communications avec le public et prestation des services ».
M. Godin nous a donné un exemple magnifique de la façon dont on communique dans le cadre de prestations de services au gouvernement fédéral : c'est absolument extraordinaire! N'y a-t-il pas de quoi être fier?
Et on continue : « Langue de travail », « Participation des Canadiens d'expression française et d'expression anglaise ». Et voilà qu'on arrive à la partie VII : « Promotion du français et de l'anglais ».
Peut-être ce comité devrait-il être moins « guidoune », se prendre en main, comprendre qu'il manque un élément et que, de toute façon, s'il ne l'ajoute pas lui-même, le tribunal le fera bientôt pour lui. Nous pourrions être un peu plus proactifs et endosser le fait qu'il n'y a rien de mal à rendre la partie VII exécutoire.
En effet, il y a deux problèmes. Messieurs, vous êtes avocats et vous pouvez invoquer des finasseries juridiques; nous pouvons le faire de notre côté aussi. Il reste qu'il y a une modification pour tenter de donner un peu plus de mordant à la partie VII. C'est ainsi que je lis l'amendement proposé par le sénateur Gauthier. De plus, il y a la volonté de rendre exécutoire la partie VII, à l'instar d'autres parties du projet de loi.
À ceux qui craignent que ce ne soit difficile, je répondrai ceci : peu importe le langage qu'on utilisera, il y aura toujours de la place pour des avocats et pour des recours en justice, pour tenter d'établir ce que signifie ceci ou cela.
Ce que nous voulons, au moyen du projet de loi S-3, c'est donner plus de poids aux gestes que le gouvernement fédéral doit poser en matière de promotion. Il y est question de promouvoir la langue en milieu minoritaire et de renforcer le caractère exécutoire de la partie VII. Ce dernier point ne pose pas d'autre problème majeur que celui que les Conservateurs soulèvent : il va falloir budgéter. Si c'est ce qu'il faut pour ne plus entendre des horreurs comme celles que M. Godin nous a lues, alors soyons plus proactifs sur ce plan. Avant de passer à un service, il faut en faire la promotion.
Je vous l'ai peut-être posée lors de votre passage précédent, mais je vais vous poser à nouveau ma seule question, parce qu'il me semble qu'on fait du surplace. Ai-je raison de dire que la Charte de la langue française du Québec a préséance sur la Loi sur les langues officielles dans les champs de compétence du Québec?
» (1705)
M. Michel Francoeur: Pour répondre à votre question concernant la Loi 101, comme le disait mon collègue tout à l'heure, dans l'application de lois constitutionnelles ou de lois qui ont une application nationale, les tribunaux, la Cour suprême du Canada en tête de file, nous ont clairement indiqué qu'il fallait tenir compte de la dynamique propre à chaque province et territoire.
Mme Françoise Boivin: Prenons un exemple précis, car je peux voir l'inquiétude de mes collègues d'en face. Disons qu'on adopte cela et qu'un anglophone de je ne sais où, disons de Gatineau, décide qu'il veut avoir tous les débats municipaux en anglais. Il dépose donc une plainte en vertu du projet de loi S-3. Cela ne serait absolument pas applicable.
M. Michel Francoeur: Non, effectivement. Ce ne serait pas recevable, parce que le projet de loi S-3, qui modifierait la Loi sur les langues officielles et toutes ses parties, ne s'appliquerait pas et imposerait des responsabilités uniquement aux institutions fédérales. Le projet de loi S-3 tel qu'il est présentement rédigé, malgré les préoccupations que le gouvernement fédéral peut avoir à son égard, ne crée pas d'obligations envers les provinces, les municipalités ou toutes les institutions autres que fédérales.
Pour répondre à votre question précisément, je suis d'accord avec vous.
Mme Françoise Boivin: D'accord.
Le président: Merci. C'est de tout le temps dont nous disposons. Nous terminons avec vous, monsieur Godin.
Souhaitez-vous faire un autre tour de table par la suite, ou désirez-vous conclure après l'intervention de M. Godin?
L'hon. Raymond Simard: J'aimerais qu'on fasse un autre tour de table.
Mme Françoise Boivin: Oui, je souhaite faire un autre tour de table. Je me sens cheap.
Le président: Nous ferons un autre tour de table. À ce moment-là, vous aurez peut-être deux minutes.
» (1710)
M. Yvon Godin: Après mon intervention, j'aurai posé suffisamment de questions. Alors, si Raymond veut poser une question, cela ne me dérange pas de lui laisser la chance de le faire.
Le président: Est-ce que cela vous va?
M. Yvon Godin: Des questions et des réponses ne m'énervent pas.
Le président: Excellent.
M. Yvon Godin: Revenons à la réponse que vous avez donnée à Mme Boivin. Là est la question: il s'agit d'institutions fédérales.
Mme Brunelle disait qu'au Québec, par exemple, où la majorité est francophone, on ne voulait pas voir des anglophones dans les cours à cause des lois, etc. Cependant, il s'agit d'institutions fédérales.
Imaginez maintenant que pour nous, la minorité francophone hors Québec, cela se produit ainsi depuis plusieurs années. Nous ne pouvons même pas aller chercher quoi que ce soit, nous ne recevons rien du tout! Ainsi, le projet de loi S-3 nous aidera à protéger les minorités du Canada. Comme vous le savez, ce sont les francophones qui constituent la vraie minorité. C'est là qu'intervient le projet de loi S-3.
Êtes-vous d'accord pour dire que le projet de loi S-3 aiderait à protéger les deux langues officielles des minorités au pays, dans les institutions?
Nous avions reçu Me Doucet de l'Université de Moncton. Celui-ci a été très clair à ce sujet. Il n'était certainement pas en faveur des amendements proposés par le gouvernement. Il disait même qu'il avait peur et qu'il espérait que la Cour suprême soit plus généreuse avec nous que ne le sera le projet de loi modifié.
Par la suite, vous avez dit à Mme Boivin qu'il s'agissait d'institutions fédérales seulement et que la Loi 101, la Charte de la langue française au Québec, etc., tout cela sera pris en considération. C'est ce qui ressort des articles 41, 42 et 43.
L'hon. Raymond Simard: Quelle est votre question exactement?
M. Yvon Godin: Le projet de loi S-3 n'aiderait-il pas à protéger la langue minoritaire au Canada dans les institutions françaises? Pourrait-il non seulement la protéger, mais en faire la promotion et finalement l'amener à une égalité?
C'est ce dont nous avons besoin. Dans le fond, il s'agit de deux peuples reconnus officiellement au pays. Nous sommes reconnus, mais il n'y a pas d'action présentement. Nous reculons. Le ministre Dion a donné 700 millions de dollars pour faire la promotion, et depuis ce temps, nous recevons des choses comme celle-ci.
M. Michel Francoeur: Pour répondre à votre question, à savoir si le projet de loi S-3 aiderait les communautés minoritaires, il est clair que ces dernières auraient un recours judiciaire qui n'existe pas présentement. En tout cas, s'il existe, il n'est pas clairement défini. La preuve en est que l'affaire est devant la Cour suprême du Canada.
Vous connaissez la position du procureur général à ce sujet. À l'intérieur de nos compétences de juristes, nous pouvons évidemment émettre des commentaires sur la portée juridique de la partie VII à l'effet qu'il y a effectivement un recours judiciaire additionnel et que, selon nous, il y a de bonnes chances que le projet de loi S-3, dans sa version actuelle, créera des obligations de résultat qui, de notre point de vue, seront problématiques.
M. Yvon Godin: C'est comme si vous étiez d'accord avec moi, mais vous n'avez pas le mandat de le dire. Je l'apprécie. Merci.
M. Michel Francoeur: Il s'agit là de votre interprétation.
M. Yvon Godin: Merci.
Le président: Merci, monsieur Godin. Vous n'avez pris que trois minutes.
Monsieur Simard, vous pouvez continuer un peu plus longuement sur ce sujet?
L'hon. Raymond Simard: Merci, monsieur Godin.
Premièrement, étant donné que j'ai été élevé et passé toute ma vie dans un milieu minoritaire, je veux seulement clarifier que les communautés ne voudraient pas du tout retourner au règne des conservateurs. Il faut le clarifier dès le départ.
M. Yvon Godin: Cela va peut-être aider.
L'hon. Raymond Simard: Monsieur Francoeur, je ne pense pas qu'on puisse tenir pour acquis que si le projet de loi S-3 était en vigueur, il y aurait un plus grand nombre de poursuites judiciaires. Déjà, plusieurs procès ont lieu en ce moment. Je ne sais pas pour quelle raison vous croyez qu'il y aurait plus de procès. Peut-être que les différents ministères, en effet, s'occuperaient un peu plus de leurs responsabilités et de leurs obligations.
Vous avez indiqué que vous vous attendiez à ce que le gouvernement aille en cour plus souvent qu'à l'habitude. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi, s'il vous plaît?
M. Michel Francoeur: Dans l'état actuel des choses, et cela depuis 1988, plusieurs personnes ou organismes — dont le procureur général du Canada, le gouvernement du Canada et d'autres — étaient et sont toujours d'avis qu'on ne peut pas s'adresser aux tribunaux relativement à la partie VII. Par conséquent, plusieurs organisations, personnes et individus sont d'avis que s'il y a des difficultés au chapitre de la mise en oeuvre de la partie VII, les recours disponibles ne sont pas d'ordre judiciaire mais d'ordre administratif: on s'adresse à la commissaire aux langues officielles. Il y a aussi des recours parlementaires. On peut se présenter devant votre comité, qui a compétence en vertu de la Loi sur les langues officielles. Par conséquent, les tribunaux n'ont pas compétence en la matière.
Pour plusieurs personnes et organisations, les tribunaux ne sont pas pertinents en ce qui a trait à la mise en oeuvre de la partie VII. Cependant, à partir du moment où on dit clairement qu'un recours judiciaire existe, on vient de rendre disponibles de nouveaux recours aux individus et aux organisations relativement à cette partie. On leur dit clairement que non seulement ils ont accès à des recours administratifs auprès de la commissaire aux langues officielles, non seulement ils ont accès à un forum clair — votre comité —, mais en plus, ils peuvent se présenter devant une troisième instance, la Cour fédérale.
Voyons si le passé est garant de l'avenir et prenons l'exemple la Loi sur les langues officielles. Les recours ont été clairement prévus dans la loi à partir de 1988. On ne prétend pas qu'il n'est pas légitime que des poursuites soient intentées, puisque la loi prévoit qu'il existe un recours judiciaire et que les gens peuvent se présenter devant la Cour fédérale eu égard à certaines parties de la loi. Si on compare le nombre de poursuites intentées depuis que cela est clairement prévu dans la loi au nombre de poursuites intentées entre 1969 et 1988 — 1969 étant l'année où la première Loi sur les langues officielles est entrée en vigueur —, il est clair qu'il y a eu beaucoup moins de recours entre 1969 et 1988. En fait, je crois que l'un des facteurs expliquant ce fait était que cela n'était pas clairement prévu dans la loi. Il y a eu des recours, mais il n'y avait pas une expression claire du Parlement à l'effet que la Cour fédérale était un des forums pour exprimer et faire valoir les revendications des citoyens à l'égard de la mise en oeuvre de cette loi.
» (1715)
Le président: Merci, monsieur Simard.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le président, avant que nous votions, j'aimerais savoir si mes collègues voudraient m'accorder deux ou trois minutes afin que je puisse poser une question, même si, je le reconnais, je suis un participant excédentaire. Je ne veux pas empêcher les autres de parler, mais je pourrais le faire à la fin, par exemple.
Le président: Il n'y aura pas de vote aujourd'hui.
L'hon. Don Boudria: Le vote à la Chambre...
Le président: Nous arrivons à la conclusion de nos travaux, conformément à ce qui a été décidé un peu plus tôt. Donc, si vos collègues sont d'accord...
L'hon. Don Boudria: Je ne voudrais pas interférer avec qui que ce soit.
Le président: C'est maintenant ou jamais, s'ils sont d'accord, bien sûr, parce qu'on a fini.
M. Yvon Godin: Nous sommes d'accord.
L'hon. Raymond Simard: Je n'ai pas d'objection.
L'hon. Don Boudria: Merci, monsieur le président.
La façon dont on traite ce dossier me dérange un peu. Je vous invite à réagir à mes propos.
Premièrement, le paragraphe 41(2) proposé ne mentionne que les institutions fédérales. Il est écrit ceci: « Il incombe aux institutions fédérales [...] » On ne parle donc que des institutions fédérales. Je reviendrai à l'article 43 dans quelques minutes.
Vous avez parlé d'assurer un résultat. On peut lire ceci dans le projet de loi: « [...] que soient prises des mesures positives pour assurer la mise en oeuvre de cet engagement. » Il n'est pas mentionné que cet engagement mènera à un résultat particulier. Je crois qu'on extrapole un peu. En fait, on parle de notre engagement et des mesures positives à prendre.
Au paragraphe 43(1), il est encore question de ce que le gouvernement du Canada ferait. Il n'est aucunement question de ce que cela pourrait imposer à un gouvernement provincial, car cela n'est même pas mentionné. D'ailleurs, on se limite au ministère du Patrimoine canadien, on n'inclut même pas les autres ministères.
J'ai essayé d'être clair, mais je voudrais savoir si je comprends bien votre position. Dites-vous qu'il faudrait enlever le mot « assurer » du paragraphe 41(2) et éliminer complètement le paragraphe 43(1)?
M. Michel Francoeur: Dans le cas de l'article 43, le projet de loi S-3 ajoute au paragraphe 43(1) les mots « pour assurer ». Si vous regardez ce qui a été proposé dans les motions d'amendement déposées de façon informelle au début des travaux du comité, vous constaterez qu'il s'agit de retirer le mot « assurer » et de reprendre le terme qui se trouve au paragraphe 43(1) de la version actuelle de la loi, à savoir « favoriser ».
L'hon. Don Boudria: Cela revient à dire qu'on supprime l'amendement relatif à l'article 43.
M. Michel Francoeur: C'est exact.
L'hon. Don Boudria: Et on fait de même pour l'article 41.
M. Michel Francoeur: En effet. Ce qui cause problème, autant au paragraphe 41(2) qu'au paragraphe 43(1), c'est le mot « assurer ».
L'hon. Don Boudria: Même s'il s'agit strictement de compétences fédérales?
M. Michel Francoeur: Comme je le mentionnais tout à l'heure en réponse à une question de M. D'Amours, l'atteinte des résultats cause davantage problème quand il s'agit d'un champ de compétence partagée ou principalement provinciale. Cependant, le problème demeure, même lorsqu'il s'agit de compétence strictement fédérale. Que ce soit en vertu du paragraphe 43(1) ou d'une autre disposition, l'épanouissement, le développement des communautés et la promotion des langues officielles, même dans un domaine où on ne collabore pas avec les provinces ou d'autres organisations, sont des objectifs très difficiles à réaliser.
» (1720)
L'hon. Don Boudria: Le résultat visé est l'épanouissement, ce qui signifie en faire davantage. On ne dit pas que le résultat consistera à rendre 143 000 personnes de plus bilingues. Ce n'est pas quantitatif. Il ne s'agit que d'élargissement, ce n'est que fédéral, et pourtant, vous vous y opposez encore!
M. Michel Francoeur: Comment mesure-t-on l'épanouissement ou le développement d'une communauté minoritaire? C'est précisément en quoi consiste pour nous la difficulté. À partir du moment où une cause sera entendue par une cour de justice, les gens auront tous une façon différente de déterminer si l'épanouissement ou le développement a été réalisé pour une communauté donnée dans des circonstances données. La communauté est-elle épanouie, s'est-elle développée? C'est la préoccupation qu'exprime le gouvernement devant ce comité.
Je reprends l'exemple du député Godin. Comment mesurer le service au public? C'est clair: il est offert en français et en anglais ou il ne l'est pas. Dans le cas des lois qui doivent être adoptées et publiées en français et en anglais, c'est clair également. La loi est en anglais et en français ou elle ne l'est pas. Il en va de même pour les règlements ou pour un juge qui doit parler le français ou l'anglais en vertu d'une disposition linguistique.
Cependant, quand vient le temps de déterminer de façon précise et claire si l'épanouissement d'une communauté a été réalisé, on fait face à une importante difficulté. Comment mesurer l'atteinte de ce résultat, sachant, comme nous l'ont bien dit les tribunaux, que chaque communauté ou province a une dynamique qui lui est propre sur les plans social, culturel et linguistique? Il n'y a pas au pays deux communautés minoritaires identiques. Le niveau d'épanouissement et de développement de chacune varie énormément selon les circonstances, les ressources disponibles et la dynamique historique.
Le président: Merci.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le président, si on avait été à ce point timide, on n'aurait jamais eu de charte.
Le président: Merci à chacun de vous. Je vous remercie d'avoir été présents.
Merci aux membres du comité. Je vous rappelle que nous allons nous réunir demain matin, entre 9 heures et 11 heures. Il y aura deux intervenants, soit le professeur Linda Cardinal et Statistique Canada, tel que demandé par le comité.
Bonne fin d'après-midi.
La séance est levée.