LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des langues officielles
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 24 mars 2005
¿ | 0910 |
Le président (M. Pablo Rodriguez (Honoré-Mercier, Lib.)) |
Mme Michèle Demers (présidente, Institut professionnel de la fonction publique du Canada) |
¿ | 0915 |
¿ | 0920 |
Le président |
¿ | 0925 |
M. Guy Lauzon (Stormont—Dundas—South Glengarry, PCC) |
Mme Michèle Demers |
M. Guy Lauzon |
Mme Michèle Demers |
M. Guy Lauzon |
Mme Michèle Demers |
M. Guy Lauzon |
Mme Michèle Demers |
¿ | 0930 |
M. Guy Lauzon |
Mme Michèle Demers |
M. Guy Lauzon |
Mme Michèle Demers |
M. Guy Lauzon |
Mme Michèle Demers |
M. Guy Lauzon |
Le président |
M. Guy André (Berthier—Maskinongé, BQ) |
Mme Michèle Demers |
M. Guy André |
Mme Michèle Demers |
M. Guy André |
Mme Michèle Demers |
M. Guy André |
Mme Michèle Demers |
¿ | 0935 |
Le président |
M. Peter Julian (Burnaby—New Westminster, NPD) |
Mme Michèle Demers |
M. Peter Julian |
Mme Michèle Demers |
M. Peter Julian |
Mme Michèle Demers |
M. Peter Julian |
Mme Michèle Demers |
M. Peter Julian |
Mme Michèle Demers |
¿ | 0940 |
Le président |
Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.) |
Mme Michèle Demers |
Mme Françoise Boivin |
Mme Michèle Demers |
¿ | 0945 |
Le président |
M. Maurice Vellacott (Saskatoon—Wanuskewin, PCC) |
Mme Michèle Demers |
M. Maurice Vellacott |
Mme Michèle Demers |
M. Maurice Vellacott |
Mme Michèle Demers |
M. Maurice Vellacott |
Mme Michèle Demers |
M. Maurice Vellacott |
¿ | 0950 |
Mme Michèle Demers |
M. Maurice Vellacott |
Mme Michèle Demers |
M. Maurice Vellacott |
Mme Michèle Demers |
M. Maurice Vellacott |
Mme Michèle Demers |
M. Maurice Vellacott |
Mme Michèle Demers |
M. Maurice Vellacott |
Mme Michèle Demers |
M. Maurice Vellacott |
Mme Michèle Demers |
Le président |
M. Marc Godbout (Ottawa—Orléans, Lib.) |
Mme Michèle Demers |
M. Marc Godbout |
Mme Michèle Demers |
M. Marc Godbout |
Mme Michèle Demers |
M. Marc Godbout |
Mme Michèle Demers |
¿ | 0955 |
Le président |
Mme Michèle Demers |
Le président |
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les Patriotes, BQ) |
Mme Michèle Demers |
À | 1000 |
M. Stéphane Bergeron |
Mme Michèle Demers |
M. Stéphane Bergeron |
Mme Michèle Demers |
M. Stéphane Bergeron |
Mme Michèle Demers |
Le président |
M. Peter Julian |
Mme Michèle Demers |
À | 1005 |
M. Peter Julian |
Mme Michèle Demers |
M. Peter Julian |
Mme Michèle Demers |
M. Peter Julian |
Le président |
CANADA
Comité permanent des langues officielles |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 24 mars 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¿ (0910)
[Français]
Le président (M. Pablo Rodriguez (Honoré-Mercier, Lib.)): Bonjour à tous. Welcome.
Dans le cadre de nos travaux portant sur le bilinguisme au sein de la fonction publique, nous avons le plaisir de recevoir ce matin les représentants de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada,
[Traduction]
représenté aujourd'hui par Mme Michèle Demers et M. Robert McIntosh.
[Français]
Je vous souhaite la bienvenue. Je crois que vous souhaitez faire des commentaires d'ouverture. Par la suite, nous aurons une période de questions.
Je veux rappeler aux membres du comité que les témoins doivent nous quitter vers 10 heures. Nous ferons alors une pause d'une minute, puis nous poursuivrons à huis clos pour discuter des travaux du comité, et plus précisément de nos déplacements lorsque nous irons sur le terrain.
Sans plus tarder, je vous cède la parole.
Mme Michèle Demers (présidente, Institut professionnel de la fonction publique du Canada): Monsieur le président, membres du comité, bonjour.
J'aimerais signaler la présence de mon conseiller politique, M. Robert McIntosh. Également, j'aimerais remercier le comité d'avoir invité l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada à comparaître au sujet des langues officielles dans la fonction publique.
L'Institut professionnel de la fonction publique du Canada est un agent négociateur accrédité pour quelque 50 000 professionnels et scientifiques qui sont employés dans la fonction publique fédérale ou des sociétés d'État, ainsi que dans divers champs de compétence provinciaux, notamment au Nouveau-Brunswick, en Ontario et au Manitoba. La très grande majorité de ces employés sont assujettis à la Loi sur les langues officielles et aux politiques et autres pratiques en matière de langues du Conseil du Trésor du Canada.
Le présent mémoire est divisé en trois parties. La partie I est la position de l'Institut professionnel de la fonction publique sur les langues officielles telle qu'elle est affichée sur notre site web. On y trouvera la plupart des questions soulevées par votre comité. La partie II aborde la récente expérience de l'institut concernant la mise en application des politiques linguistiques. La partie III présente quelques observations en guise de conclusion.
L'Institut professionnel de la fonction publique du Canada appuie le principe selon lequel le Canada est un pays bilingue. Les Canadiens et les Canadiennes ont le droit d'être servis dans la langue officielle de leur choix, et les employés de la fonction publique, dans les quatre régions du pays désignées bilingues, ont le droit de travailler dans la langue officielle de leur choix.
L'institut croit au bien-fondé d'un programme efficace de formation linguistique offert à tous les employés dont les aspirations professionnelles pourraient nécessiter qu'ils soient bilingues, peu importe qu'ils habitent et travaillent ou non dans l'une des régions du pays désignées bilingues. La langue ne doit pas constituer un obstacle à la promotion. Tant que les structures d'enseignement au Canada ne favoriseront pas la maîtrise des deux langues par tous les étudiants, la fonction publique fédérale devra continuer à offrir de la formation linguistique. Cette formation doit être offerte dès l'entrée au service de la fonction publique et doit être maintenue et suivie par la suite. Cette initiative nous permettra d'atteindre un jour la situation idéale, où le fait de pouvoir s'exprimer oralement dans les deux langues officielles au sein de la fonction publique sera un mode de vie.
La fonction publique doit donner l'exemple en devenant un milieu favorable qui offre les outils et les ressources nécessaires. Les résultats d'une récente étude sur les attitudes envers l'utilisation des deux langues officielles dans la fonction publique révèlent que 86 p. 100 des répondants acceptent de faire un effort personnel pour encourager le bilinguisme dans leur milieu de travail.
L'acquisition et le maintien de la maîtrise de l'autre langue officielle constituent, à notre avis, une responsabilité partagée.
L'employeur doit surveiller le niveau et la qualité des services bilingues offerts au public. Il doit offrir une formation renouvelée et créer une culture en faveur de services bilingues permanents, et faire de la formation linguistique un élément de la culture. La fonction publique devrait offrir un environnement d'apprentissage qui favorise le perfectionnement professionnel, l'enrichissement et la progression de carrière.
Pour sa part, l'employé doit être proactif dans l'acquisition et le maintien du niveau de compétence linguistique qui garantit des services de qualité au public. Il doit rechercher activement des possibilités d'utilisation et de mise en application des compétences nouvellement acquises, tant au travail que durant son temps libre. L'employé doit également s'employer à promouvoir les langues officielles en exerçant son droit de travailler dans la langue officielle de son choix lorsqu'il travaille dans une région désignée bilingue.
Pour notre part, en tant qu'agent négociateur, nous considérons que l'Institut professionnel de la fonction publique doit surveiller l'utilisation de la politique sur le bilinguisme par l'employeur, voir à élaborer conjointement avec l'employeur une politique renouvelée en matière de bilinguisme et à l'établissement de normes qui permettront de mesurer et d'évaluer la formation et le maintien des compétences. L'institut désire poursuivre le dialogue sur les langues officielles au Conseil national mixte par le biais de consultations syndicales-patronales à l'échelle nationale, régionale et locale.
En ce qui concerne la dotation bilingue impérative et non impérative, nous sommes d'avis que l'employeur ne doit pas remettre en question la nécessité de continuer la dotation bilingue non impérative. Nous soutenons toujours que la dotation bilingue non impérative est nécessaire pour assurer un accès équitable aux divers postes.
Pendant des décennies, le gouvernement fédéral n'a pas appliqué ses propres règles régissant les langues officielles. Il faut donc établir des paramètres et des échéanciers dès maintenant, et mettre en application des règles qui accordent aux employés actuels de la fonction publique du temps pour acquérir une deuxième langue officielle s'ils aspirent à occuper un poste bilingue.
Une planification à long terme est nécessaire pour revoir la répartition de poste unilingues et bilingues impératifs, et bilingues non impératifs.
L'Institut professionnel a des défis importants à relever en matière de langues officielles. Nous devons convaincre l'employeur d'offrir un programme de formation type comportant des outils et des ressources qui permettront aux employés d'atteindre, d'accroître et de maintenir leur capacité bilingue dès le début de leur carrière. Nous devons nous assurer que l'employeur s'engage et incite nos membres à partager la responsabilité d'atteindre, de maintenir et de mettre en pratique de nouvelles compétences linguistiques.
[Traduction]
Pour résumer nos politiques, je dirais d'abord qu'il n'existe actuellement aucun accès universel à l'apprentissage d'une langue seconde, que ce soit au sein de nos systèmes d'éducation publique ou à la fonction publique fédérale. La dotation bilingue non impérative est donc nécessaire afin de garantir l'accès équitable à des postes en fonction du mérite.
¿ (0915)
En ce qui a trait à la prime au bilinguisme, le statu quo, bien que politiquement opportun, n'est pas raisonnable. La prime au bilinguisme doit être plus qu'un paiement symbolique; elle doit véritablement refléter la valeur de cette compétence supplémentaire et du service rendu. Pour ce faire, il faut revoir la prime au bilinguisme désuète de 800 dollars par année qui ne reflète pas la réalité du marché d'aujourd'hui.
L'employeur et l'agent négociateur devraient élaborer conjointement des critères de suivi appropriés pour que les employés aient la possibilité d'acquérir les compétences linguistiques nécessaires et les maintenir.
L'Institut s'oppose vivement à toute tentative unilatérale de l'employeur de changer la prime au bilinguisme ou de prendre en compte les coûts du bilinguisme officiel à la table de négociation.
L'énoncé de politique de l'IPFPC sur les langues officielles est fondé sur l'idée selon laquelle le bilinguisme est important pour le Canada en tant que nation. L'Institut continue d'appuyer l'objectif visant la création et le maintien d'une fonction publique capable d'offrir des services efficaces dans les deux langues officielles et le principe selon lequel dans chaque région bilingue, selon la nécessité d'offrir des services aux Canadiens, chaque employé de la fonction publique a le droit de travailler dans la langue officielle de son choix.
L'Institut croit que les exigences linguistiques de tout poste dans la fonction publique fédérale devraient refléter les exigences linguistiques et les niveaux de compétence associés aux fonctions réelles du poste et déterminés objectivement. Afin d'assurer un équilibre entre le droit des employés des régions bilingues de travailler dans la langue de leur choix et le besoin que le bassin d'employés subalternes et de cadres reflète la composition de la société canadienne, il faut offrir une formation linguistique significative à tous les employés qui désirent s'en prévaloir, et ce dès le début de leur carrière.
Le 14 septembre 2004, l'Institut a envoyé une lettre à 24 ministères et agences pour leur demander de lui faire parvenir des renseignements sur leur programme de formation linguistique. Nous demandions notamment à chacun de ces organismes de préciser le budget affecté à la formation linguistique pour les années financières 2003-2004 et 2004-2005, ainsi que le nombre d'employés qui avaient ou auront accès à cette formation au cours des deux années financières en question. Nous cherchions aussi à savoir quel était le type de formation offerte, c'est-à-dire des cours à plein temps ou temps partiel, le nombre d'heures par semaine ainsi que le nombre de ces employés faisaient partie d'unités de négociation représentées par l'Institut. Nous voulions aussi connaître quelle avait été leur expérience avec l'École de la fonction publique du Canada pour ce qui est de la prestation de cours de formation linguistique. Notre questionnaire comportait, à la fin, un certain nombre de questions sur les plans des ministères et agences pour répondre à leurs objectifs des trois à cinq prochaines années ainsi que sur la façon dont les aspirations professionnelles des employés et leurs plans d'apprentissage personnels étaient pris en compte dans la détermination des besoins de formation linguistique au sein de ces organismes.
Vingt des 24 ministères et agences, énumérés en annexe au mémoire, ont répondu à notre questionnaire. En voici les principaux résultats.
D'abord, il n'y a aucune démarche cohérente d'un ministère à l'autre pour l'élaboration de plans d'action, particulièrement en ce qui a trait à la formation linguistique en vue de mesures de dotation non impérative. Certains ministères y parviennent mieux que d'autres, ce qui laisse entendre le besoin d'une démarche cohérente et systématique, dans l'ensemble de la fonction publique, pour fixer les objectifs en matière de formation linguistique. L'École de la fonction publique du Canada ne suffit pas à la demande dans ce domaine. Certains ministères ont en effet indiqué qu'ils avaient une centaine d'employés sur la liste d'attente de l'École.
« On ne peut vérifier que ce que l'on peut compter » : voilà une des réponses que nous a données un des ministères. Certains ministères ont précisé qu'ils n'avaient pas la capacité nécessaire pour compter le nombre d'employés suivant une formation linguistique, ni déterminer combien d'employés suivaient des cours à temps partiel ou bien après leurs heures de travail.
Le même raisonnement s'applique au suivi des budgets affectés à la formation linguistique. Certains ministères ont des postes budgétaires spécifiquement réservés à la formation linguistique, alors que d'autres se contentent d'inclure les coûts de la formation linguistique dans la rubrique générale « Perfectionnement professionnel ». Le perfectionnement professionnel englobe d'autres expériences d'apprentissage et de formation destinées à maintenir et à améliorer la compétence professionnelle.
D'autres ministères ont précisé que des gestionnaires sont investis individuellement de la souplesse nécessaire pour réaffecter des fonds de leurs budgets à la formation linguistique afin d'en couvrir les coûts. Parmi les ministères qui ont pu nous fournir des chiffres sur les fonds consacrés à la formation linguistique, plusieurs ont indiqué qu'ils disposaient de moins de fonds en 2004-2005 que l'année précédente. Dans certains de ces ministères, les montants étaient nettement inférieurs; toutefois, on a remarqué dans quelques cas que la diminution de ce financement s'expliquait par le fait qu'à l'époque où ils avaient répondu à la lettre de l'Institut, ils n'avaient pas encore reçu l'intégralité des fonds à affecter aux divers postes budgétaires pour l'année financière en cours.
On a relevé un manque de possibilités de formation linguistique à temps partiel, particulièrement en dehors de la région de la capitale nationale et du Québec. À Terre-Neuve et au Labrador, ainsi que dans d'autres provinces, et plus particulièrement dans les régions rurales, aucune installation n'offre des cours de formation linguistique.
Beaucoup ont signalé des méthodes novatrices de formation linguistique offertes dans leurs ministères, lesquelles ont été regroupées par le Secrétariat du Conseil du Trésor et publiées dans « Le recueil de bonnes pratiques - Les langues officielles... c'est une question de respect ». Par exemple, certains ministères offrent l'accès à des modules apprentissage en ligne, à des CD, à des déjeuners de travail où le dialogue en français est au menu, etc. Il semble que ces méthodes novatrices soient élaborées à l'interne, dans chaque ministère. Aucun ministère n'a indiqué que l'École de la fonction publique du Canada faisait preuve d'innovation en ce qui a trait à l'apprentissage des langues.
En plus des tentatives que nous avons faites pour obtenir directement des données auprès des ministères et des agences, nous avons encouragé les membres à nous faire part en ligne de tout problème ou commentaire concernant leur expérience de formation linguistique. Le regroupement de tous ces commentaires a permis d'en arriver à la conclusion suivante.
La désignation de postes bilingues impératifs pour tous les EX fait entrave à l'avancement professionnel dans la communauté des EX pour un grand nombre de professionnels qui ne répondent pas aux exigences linguistiques. Bien que de nombreux professionnels unilingues soient vivement intéressés à apprendre une deuxième langue, l'accès à la formation linguistique est insuffisant, que ce soit à plein temps ou à temps partiel. L'absence de possibilités de formation linguistique s'explique bien souvent par l'absence de fonds, mais aussi parfois par l'absence d'installations.
¿ (0920)
[Français]
En conclusion, la mise en application des politiques sur les langues officielles au travail devrait déboucher sur un environnement positif dans le cadre duquel les employés seraient en mesure de faire le meilleur travail possible.
Un grand nombre de facteurs contribuent au bon moral et au bon rendement. Un de ces facteurs est la mise en application des politiques sur les langues officielles, mais présentement, les modifications qui y sont apportées ont des répercussions néfastes sur les possibilités qui sont offertes aux professionnels afin que leur carrière progresse au sein de la fonction publique. La perspective de promotion et de mobilité professionnelle constitue un facteur critique lorsque les individus décident s'ils veulent ou non poursuivre une carrière dans la fonction publique.
En conséquence, il faut investir davantage dans la formation linguistique, et ce, dès maintenant. L'objectif ici est de garantir aux Canadiens et aux Canadiennes, pour l'avenir, une fonction publique professionnelle et bilingue. Il est tout aussi important de reconnaître qu'il est fortement souhaitable de faire participer les employés et leurs représentants aux divers moyens de promotion du bilinguisme dans le milieu de travail.
Manifestement, quelles que soient les bonnes intentions, aucune mesure prise unilatéralement par le gouvernement, ou indirectement par l'intermédiaire des employeurs de la fonction publique, cherchant à imposer de nouvelles politiques et procédures relatives aux langues officielles ne permettra d'atteindre les objectifs à moins qu'on ne fasse appel à un partenariat avec les employés.
Je vous remercie.
Le président: Merci, madame Demers. Si j'ai bien compris, vous devez partir vers 10 heures.
Est-ce qu'on pourrait convenir de se limiter à cinq minutes plutôt qu'à sept lors du premier tour? Cela nous permettrait peut-être de faire deux tours rapides. Est-ce que le comité y consent?
Merci.
Monsieur Lauzon.
¿ (0925)
M. Guy Lauzon (Stormont—Dundas—South Glengarry, PCC): Merci, monsieur le président.
Bonjour et bienvenue.
Le Plan d'action pour les langues officielles est en vigueur depuis deux ans. Pouvez-vous me dire si vos membres ont fait des progrès en matière de langues officielles au cours de ces deux dernières années?
Mme Michèle Demers: En fait, les politiques révisées en matière de langues officielles ont été annoncées par Mme Robillard en novembre 2003, si je ne m'abuse, pour être mises en application le 1er avril 2004. Cela fait donc à peine un an que ces nouvelles politiques sont en vigueur.
Je ne peux pas confirmer que mes membres ont fait des progrès en termes de compétence dans la deuxième langue parce que la majorité de ceux qui ont soulevé des problèmes relatifs aux langues officielles étaient des personnes qui n'avaient pas accès à la formation linguistique. On nous a dit, que ce soit des membres ou des représentants des ministères eux-mêmes, que la majorité des fonds avait été affectée à la formation d'employés de la catégorie EX, étant donné que ces derniers se devaient de maîtriser les habiletés requises dans la deuxième langue à l'intérieur d'échéances très précises.
Nos membres ne faisant naturellement pas partie de la catégorie EX, ils n'ont pas eu accès à la formation linguistique dans la majorité des cas.
M. Guy Lauzon: Vos membres n'ont pas accès à la formation?
Mme Michèle Demers: Dans la grande majorité des cas, ils n'y ont pas accès, et cela s'explique par la situation dans laquelle se trouvent les ministères. Vous n'êtes pas sans savoir que les ministères sont pris à la gorge en termes de ressources financières. Or, la formation est toujours le premier endroit où on applique des réductions et, dans le cas de la formation linguistique, cela se fait probablement plus vite que dans celui de la formation professionnelle. Ils n'ont pas les fonds requis, que ce soit pour mettre en place des programmes de formation linguistique, libérer les gens pour qu'ils suivent une formation linguistique ou remplacer ceux qui suivent une formation. C'est un cercle vicieux.
Mme Robillard, quand elle avait présenté les politiques révisées, s'était engagée à injecter davantage de fonds à cette fin, et elle avait aussi pris un engagement selon lequel chaque nouvel employé de la fonction publique aurait systématiquement, dans le cadre de son plan de développement de carrière, la possibilité de suivre une formation linguistique. Or, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas la volonté ferme d'injecter des fonds pour rendre cette formation accessible, cela n'arrivera pas. Cette mesure n'a pas été mise en vigueur depuis l'adoption des nouvelles politiques.
M. Guy Lauzon: Un petit nombre de vos membres ont la chance de suivre une formation. J'aimerais savoir ce qu'ils pensent des cours offerts dans le cadre de leur formation.
Mme Michèle Demers: Il y a certains types de cours qui sont plus appropriés que d'autres, qui sont davantage axés sur le travail au jour le jour que les cours de formation plus générale, où on apprend à dire « Paul promène Fido ». Je connais certaines personnes qui ont suivi la formation linguistique et qui s'en sont bien tirées. Quand c'est disponible, cela fonctionne bien.
M. Guy Lauzon: Lorsqu'on est de retour au travail, a-t-on la possibilité de parler sa langue seconde?
Mme Michèle Demers: C'est un domaine qui mérite beaucoup d'attention, à mon avis.
¿ (0930)
M. Guy Lauzon: Il y a là un problème.
Mme Michèle Demers: Il y a là un problème, effectivement, surtout dans des milieux majoritairement unilingues, anglophones ou francophones.
M. Guy Lauzon: Avez-vous des suggestions à nous faire?
Mme Michèle Demers: Des suggestions? Je pense qu'il faut faire des campagnes de sensibilisation. Il faut encourager l'employeur à travailler en partenariat avec les agents négociateurs pour élaborer des méthodes de promotion permettant aux employés de maintenir leurs compétences dans la langue seconde.
M. Guy Lauzon: C'est un très gros défi.
Mme Michèle Demers: C'est un gros défi, effectivement.
M. Guy Lauzon: Merci.
Le président: Merci, monsieur Lauzon.
Monsieur André, s'il vous plaît.
M. Guy André (Berthier—Maskinongé, BQ): Bonjour, madame Demers et monsieur McIntosh. Je suis content que vous soyez ici aujourd'hui. J'ai pris connaissance de votre sortie publique de ce matin.
Mme Michèle Demers: Permettez-moi de faire une mise au point. Nous ne représentons pas 50 professionnels, mais bien 50 000 professionnels.
M. Guy André: J'ai vu que le nombre avait augmenté: une petite différence de 49 000.
Vous dites dans votre Déclaration de principes:
L’IPFP appuie le principe selon lequel les Canadiens ont le droit d’être servisdans la langue officielle de leur choix, et les employés de la fonction publiquedans les quatre régions du pays désignées bilingues ont le droit de travaillerdans la langue officielle de leur choix. |
Comment conciliez-vous ces deux principes ? Est-ce le client qui doit choisir la langue dans laquelle il va interpeller la fonction publique, ou si c'est l'employé qui choisit la langue dans laquelle il va communiquer avec le client?
Mme Michèle Demers: Il faut qu'il y ait un juste équilibre des deux, mais le service à la clientèle...
M. Guy André: Ce sont deux droits qui...
Mme Michèle Demers: Je pense qu'ils sont très compatibles l'un avec l'autre. Un employé qui travaille dans un endroit où les deux langues officielles sont utilisées de façon courante doit servir le public. La raison d'être de la fonction publique est de donner des services au public. Par contre, un employé anglophone qui travaillerait dans la région de Montréal aurait le droit d'être supervisé et évalué dans sa langue maternelle, et pourrait utiliser sa langue dans son travail au quotidien. Cependant, d'après moi, le service au public doit primer.
M. Guy André: Voici un autre élément de votre Déclaration de principes:
La langue ne doit pas constituer un obstacle à la promotion dans la fonction publique fédérale. |
Vous savez que la Loi sur les langues officielles prévoit que certains postes doivent nécessairement être bilingues. On sait également qu'il existe un décret d'exclusion. Certaines personnes peuvent occuper un poste bilingue alors qu'elles ne sont pas bilingues. Elle sont alors incapables de donner le service dans l'autre langue officielle. Selon la façon dont j'interprète cette déclaration, il n'est pas si important d'être bilingue. En réalité, vous dites qu'une personne unilingue ne doit pas être pénalisée dans son avancement. C'est paradoxal.
Mme Michèle Demers: Non, ce n'est pas paradoxal. Notre Déclaration de principes appuie de façon fondamentale le principe de l'égalité des langues officielles dans la fonction publique. Nous disons que, pendant plus de 30 ans, l'employeur n'a pas respecté ses propres règles en matière de langues officielles. Il y a eu un laisser-aller. Les gens se sont fiés au fait qu'ils pouvaient aller en formation linguistique et revenir au bout de deux ans, qu'ils rencontrent ou non les exigences. Ce n'était pas grave parce que, de toute façon, ils pouvaient continuer à faire ce qu'ils avaient à faire.
Tout à coup, aujourd'hui, on change de cap et on dit que les langues officielles doivent être appliquées, que c'est la loi et qu'il faut les mettre en pratique. C'est bien. On n'est pas contre. Cependant, donnez-nous la chance de rattraper le retard. Des gens sont là depuis 25 ans, par exemple, et on a toujours toléré qu'ils ne rencontrent pas les exigences. Donnez-leur la possibilité d'acquérir la langue.
En vous disant cela, je suis très consciente de notre responsabilité partagée en matière d'acquisition d'une deuxième langue et de maintien des habiletés dans une deuxième langue. L'employé a sa responsabilité, mais l'employeur a également la sienne, parce qu'il a fait preuve de laxisme pendant toutes ces années. Il ne peut pas dire, du jour au lendemain, que la fonction publique doit être bilingue et que, peu importe ce qui arrive aux gens qui sont en poste, on va de l'avant.
Nous disons qu'il faut un plan graduel de mise en oeuvre, que ce soit un plan sur trois ans ou sur cinq ans, qu'il faut donner aux gens la possibilité d'acquérir la deuxième langue et qu'il faut faire en sorte que la culture change de façon positive. Il ne faut pas forcer les gens, les mettre en rogne et les rendre réfractaires au bilinguisme.
¿ (0935)
Le président: Merci, monsieur André.
Monsieur Julian, s'il vous plaît.
M. Peter Julian (Burnaby—New Westminster, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président. Merci, madame Demers et monsieur McIntosh, de votre présence aujourd'hui.
Je vais commencer en vous demandant de donner une note au gouvernement. M. Alcock a fait une présentation mardi soir au comité, et nous avons appris que le nombre de postes désignés bilingues dans la fonction publique fédérale qui sont comblés par des personnes bilingues avait diminué depuis 10 ans. Il y a 10 ans, c'était plus de 90 p. 100. Maintenant, c'est environ 85 p. 100.
Vous avez dit ce matin qu'en matière de la formation linguistique, le gouvernement ne faisait pas tous les efforts nécessaires. Quelle note donneriez-vous au gouvernement en ce qui concerne le respect de ses engagements en matière de bilinguisme, de service bilingue et de la capacité des gens à travailler dans la langue de leur choix à la fonction publique: A, B, C, D, E ou F?
Mme Michèle Demers: Voulez-vous dire en termes de résultats concrets?
M. Peter Julian: Oui. Je ne veux pas de promesses, mais des résultats.
Mme Michèle Demers: Franchement, c'est une question embêtante, parce que je n'ai pas vu les statistiques dont vous parlez. Il existe beaucoup de statistiques sur les langues officielles et il y a eu beaucoup d'études sur ce sujet. L'étude à laquelle j'ai fait allusion dans mon mémoire était une étude sur les attitudes face au bilinguisme. L'étude sur les postes actuels comblés de façon appropriée...
M. Peter Julian: Plus simplement, donnez une note d'après votre expérience et celle de vos membres.
Mme Michèle Demers: En ce qui concerne les intentions, je lui donnerais 10 sur 10. Sur la manière d'y arriver, sur la manière d'aller là où il le veut, je ne lui donnerais pas la note de passage. Je lui donnerais 4 sur 10, parce qu'il a tenté d'atteindre ses objectifs, mais de façon très malhabile, à mon avis.
M. Peter Julian: Jusqu'à présent, c'est un échec.
Mme Michèle Demers: C'est exact.
M. Peter Julian: Merci. À mon avis, il est important que le comité sache où on en est présentement, si on veut faire le travail avec un gouvernement minoritaire qui fait face aux défis que vous avez identifiés.
En ce qui concerne la prime au bilinguisme, vous avez dit dans votre présentation qu'un montant de 800 $ n'était pas suffisant. Effectivement, cela n'a pas changé depuis des années. Vous dites que cela devrait faire l'objet des négociations, si j'ai bien compris.
Si cette question de la prime au bilinguisme faisait l'objet des négociations entre votre syndicat et d'autres organisations qui représentent les fonctionnaires, d'une part, et le gouvernement, d'autre part, ne craindriez-vous pas que le gouvernement exerce des pressions afin que cette prime soit abolie ou réduite? On sait que depuis des années, le gouvernement a tendance à vouloir réduire ce qui est accordé aux fonctionnaires, alors qu'ils rendent des services incroyables à notre pays.
Mme Michèle Demers: Vous avez raison de soulever cette question. Oui, cela risque de la mettre en péril. La prime au bilinguisme existe depuis 30 ans. Au moment où elle a été instituée, elle équivalait en moyenne à 10 p. 100 du salaire des employés fédéraux. Aujourd'hui, elle en vaut environ 1, 2 ou 3 p. 100. Le gouvernement devrait mettre en place des incitatifs pour encourager les gens à apprendre une deuxième langue, et ça, c'est un moyen. Ce moyen existait à l'époque, et il a fonctionné jusqu'à un certain point pendant des années; à présent, c'est désuet et le montant est insignifiant. Ce n'est plus un incitatif. Le gouvernement devrait considérer cela. La prime au bilinguisme est une politique du Conseil national mixte. C'est à ce forum que ça se négocie. Cela ne se négocie pas groupe par groupe à la table de négociation, pour chacun des syndicats et chacun des groupes de la fonction publique. Cela se négocie de façon centrale. Entendons-nous, cela s'est négocié il y a je ne sais combien d'années.
¿ (0940)
Le président: Merci, monsieur Julian. On poursuit avec Mme Boivin.
Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.): Merci. Bonjour et félicitations. Je trouve toujours intéressant de voir des femmes à la tête d'organismes comme le vôtre. C'est très stimulant pour les autres femmes.
Cela étant dit, je suis d'accord avec vous: on ne tiendra pas de grands débats ici. Même du côté du gouvernement, on vous dira que les membres du comité ne sont pas nécessairement satisfaits—je vais parler en mon nom—de ce qu'on peut mettre comme argent, comme viande autour de l'os.
Vous avez mis le doigt sur ce qui me dérange le plus depuis le début de ces audiences sur le bilinguisme dans la fonction publique: vous avez parlé du changement de culture, et cela m'interpelle. Je représente Gatineau, un comté qui n'est pas loin d'ici, où vivent plusieurs de vos membres ou des membres de l'Alliance de la fonction publique du Canada. Lorsque je parle à des gens sur le terrain, j'entends dire constamment que ce sont de beaux principes, mais qu'ils se vivent difficilement de l'intérieur. En tant que francophone vivant dans une province où les francophones sont majoritaires, on n'a pas tout à fait conscience de ce que les minorités vivent. On le sent davantage en venant ici, au Parlement, et je dois dire que mes yeux se sont ouverts sur bien des choses.
Comment peut-on changer cette culture? J'ai du mal à accepter votre deuxième constat. Cela revient à ce que M. André disait. Dire que la langue ne doit pas constituer un obstacle à la promotion dans la fonction publique fédérale est fort. Je comprends et j'endosse tous les reproches que vous faites au gouvernement, mais je vous en fais un à mon tour. N'est-ce pas nuire à l'importance du bilinguisme que de dire une chose comme celle-là? S'il s'agissait d'un scientifique, personne ne lui dirait que le fait qu'il soit un spécialiste dans son domaine ne compte pas pour sa promotion. Si le bilinguisme est important dans la fonction publique fédérale, je ne comprends pas que votre institut dise que la langue ne doit pas constituer un obstacle, même si on a toléré certaines choses dans le passé.
On a un plan d'action. On fait un virage. On l'accepte ou on ne l'accepte pas. Quand je vois des francophones, même au niveau des cadres supérieurs, qui ne travaillent qu'en anglais, je trouve ça dérangeant. Il y a un problème. Comment concilier tout cela? Comment peut-on changer la culture quand on ne reconnaît même pas que le bilinguisme est fondamental?
Mme Michèle Demers: Je suis entièrement d'accord avec vous: le bilinguisme est fondamental. Par contre, la culture ne se change pas du jour au lendemain. Il n'y a pas de couperet qui puisse faire en sorte que, du jour au lendemain, on ait une culture bilingue. Cela ne fonctionne pas ainsi. Si on veut que les gens croient au bilinguisme, si on veut les convaincre, il faut les y amener de façon positive.
Mme Françoise Boivin: Cela fait 35 ans, madame Demers. On fêtait les 35 ans de la Loi sur les langues officielles. Je trouve qu'on est très gentils et qu'on marche tous sur la pointe des pieds. On a si peur que les gens... On devrait être fiers. Je suis fière d'être bilingue et d'être capable d'aller partout au Canada. Pourquoi verrait-on cela comme un couperet? Si on disait aujourd'hui que dès demain on annonce des postes... Vous, vous prônez presque la dotation non impérative des postes bilingues. J'ai du mal à l'accepter. Je répète que j'accepte tous les reproches qu'on peut faire au gouvernement. Il nous appartient de voir à vous procurer les outils nécessaires. Mais quel message envoie-t-on à nos employés si on dit que la dotation impérative des postes bilingues n'est pas importante et qu'on va avancer tranquillement? Vous me trouverez peut-être impatiente, mais 35 ans, c'est presque la durée de ma vie. Je trouve que c'est long.
Mme Michèle Demers: Je suis tout aussi impatiente que vous. À mon avis, cependant, quand on considère la situation de façon tout à fait objective, on en conclut qu'il ne s'agit pas de 35 ans, mais d'un an et demi. Depuis un an et demi, on considère ce virage avec sérieux. Tout ce que je veux dire, c'est: faisons les choses comme il le faut, mettons-y les ressources nécessaires, allons de l'avant et faisons la promotion de ces mesures, mais pas de façon unilatérale, sans offrir d'occasions aux gens.
Il peut y avoir beaucoup de dotation bilingue impérative dans la fonction publique, mais il faut que cela soit bien dosé, qu'il y ait un équilibre. Supposons, par exemple, que dans un bureau offrant un service au public, 10 employés sur 20 soient bilingues et en mesure d'offrir le service dans les deux langues officielles. On pourrait faire preuve de flexibilité dans un tel cas, et permettre aux 10 employés d'atteindre leurs objectifs en matière de bilinguisme. En traitant avec sérieux le principe selon lequel les employés qui intègrent la fonction publique fédérale doivent avoir accès à un plan de développement incluant les langues officielles, on pourra atteindre les objectifs visés.
¿ (0945)
Le président: Merci, madame Boivin. C'est tout le temps que nous avons.
Nous passons maintenant au deuxième et dernier tour, qui devrait durer jusque vers 10 h 5 ou 10 h 10. Nous ferons ensuite une pause d'une minute avant de nous pencher sur les travaux futurs du comité.
Monsieur Vellacott.
[Traduction]
M. Maurice Vellacott (Saskatoon—Wanuskewin, PCC): Michèle, Robert, je vous remercie d'être ici.
Dans votre document, vous parlez des quatre régions du pays désignées bilingues. Peut-être pourriez-vous me les décrire car sur la carte que j'ai sous les yeux, j'en vois six. Il est possible que certaines aient été regroupées.
Je vois la région bilingue du nord de l'Ontario, celle de l'est de l'Ontario, la région de la capitale nationale, la région bilingue de Montréal, d'autres régions bilingues du Québec et la province du Nouveau-Brunswick.
Certaines régions ont-elles été rassemblées pour former les quatre régions désignées dont vous parlez?
Mme Michèle Demers: Oui.
M. Maurice Vellacott: Pourriez-vous les nommer précisément?
Mme Michèle Demers: Je dirais que ce sont la région de Montréal, le Nouveau-Brunswick, les régions bilingues de l'Ontario et les autres régions bilingues du Québec.
M. Maurice Vellacott: Et la région de la capitale nationale serait...
Mme Michèle Demers: Oui, il faut l'ajouter.
M. Maurice Vellacott: Ce qui fait un total de cinq, à moins que vous ne la considériez comme une partie de l'Ontario.
Mme Michèle Demers: Dans les documents officiels, ce sont toujours celles que l'on indique comme étant les quatre régions du pays désignées bilingues.
M. Maurice Vellacott: D'accord.
Pour revenir sur ce qu'a dit M. André—et je crois que Françoise en a parlé aussi—, il semble y avoir une contradiction dans vos propos, et j'ai un peu de mal à comprendre. Si les personnes ont le droit de travailler dans la langue officielle de leur choix, cela s'applique-t-il seulement à l'aspect lié à la supervision? Vous y avez fait allusion, mais j'aimerais avoir des précisions.
La population a le droit d'être servie dans la langue de son choix, mais les employés travaillent aussi dans la langue de leur choix. Donc, voit-on cela sous l'angle du client et des services à la population ou uniquement sous celui de la supervision?
¿ (0950)
Mme Michèle Demers: Non, comme je l'ai dit, je crois, à M. Julian, la responsabilité première consiste à offrir des services à la population dans la langue officielle de son choix dans ces régions désignées bilingues. Mais cela n'empêche pas un employé de s'exprimer dans la langue officielle de son choix, ou dans sa langue maternelle, lors d'une réunion ou d'une discussion avec son superviseur. Il doit y avoir un juste équilibre dans le milieu de travail, mais en ce qui concerne les services à la population, il est évident que chaque Canadien a le droit d'être servi dans la langue officielle de son choix dans ces régions désignées bilingues.
En fait, c'est souvent ce qui arrive dans cette ville. Pendant une réunion, la conversation se déroule tantôt en français, tantôt en anglais puisque les gens s'expriment dans la langue officielle de leur choix.
M. Maurice Vellacott: Est-ce à dire qu'en toutes circonstances, pour offrir un service dans la langue choisie par le client, ce sont toujours les mêmes qui devront répondre aux demandes?
Mme Michèle Demers: Pas nécessairement.
M. Maurice Vellacott: Se peut-il alors, lorsqu'il y a une demande en anglais, qu'un employé soit la personne-ressource ou celle désignée pour répondre, et que le même principe s'applique pour le français? Procède-t-on parfois de cette façon?
Mme Michèle Demers: Il devrait y avoir un juste équilibre entre les postes d'employés qualifiés francophones et anglophones. Si certaines personnes peuvent servir la population dans les deux langues, il faudrait les récompenser. Cela dit, il faut aussi faire preuve de flexibilité pour permettre aux unilingues d'apprendre l'autre langue officielle et se conformer aux exigences linguistiques grâce à une formation et à des mécanismes mis en place par l'employeur.
M. Maurice Vellacott: Donc, vous dites qu'il est possible de servir la population dans la langue de son choix, mais pas nécessairement par l'entremise d'un seul et même employé.
Mme Michèle Demers: Absolument.
M. Maurice Vellacott: Mais votre but reste-t-il de rendre cet employé bilingue?
Mme Michèle Demers: Bien sûr.
M. Maurice Vellacott: Avec insistance? Ou vous ne faites que...
Mme Michèle Demers: Dans les régions bilingues, ce devrait être un objectif à atteindre.
M. Maurice Vellacott: C'est vrai, mais en bout de ligne, compte tenu de ce qui se passe depuis plusieurs décennies, il y a de toute évidence un point de vue selon lequel nous pouvons donner une place aux personnes unilingues, qu'elles soient francophones ou anglophones, et continuer à les engager pour ensuite les répartir selon la demande et les besoins de la population.
Mme Michèle Demers: Les emplois au sein de la fonction publique fédérale doivent être objectivement octroyés selon les exigences du poste. Cela veut dire qu'il est impossible de décider arbitrairement que tous les postes d'un bureau en particulier seront bilingues impératifs. Il doit y avoir une évaluation des besoins et une désignation appropriée, fondée sur les exigences de l'emploi.
Il est donc possible que tous les postes ne soient pas nécessairement bilingues, mais je crois que c'est quelque chose que nous devrions tout de même chercher à atteindre : parvenir à avoir dans les régions désignées bilingues des employés qui maîtrisent parfaitement les deux langues officielles.
[Français]
Le président: Thank you, Mr. Vellacott.
On poursuit avec M. Godbout.
M. Marc Godbout (Ottawa—Orléans, Lib.): C'est à mon tour de vous féliciter pour votre nouveau poste. C'est tout un défi, j'en suis certain.
J'aimerais savoir quel est approximativement le pourcentage de vos employés qui sont bilingues à l'heure actuelle.
Mme Michèle Demers: Je n'en ai aucune idée. Nous n'avons pas ce genre de données. Par contre, je peux vous dire qu'ici, dans la région de la capitale nationale, nos employés sont probablement assez nombreux à être bilingues. De plus, il m'arrive fréquemment de rencontrer des francophones dans des régions unilingues anglophones.
M. Marc Godbout: Vous est-il impossible de nous fournir ces chiffres? Cela pourrait être intéressant.
Mme Michèle Demers: Je ne sais pas comment ce serait possible. Vous devriez en faire la demande à nos employeurs. Il serait probablement plus facile pour eux que pour nous de procéder à cette analyse. Dans notre cas, il faudrait que nous effectuions un sondage volontaire ou une autre initiative du genre. Or, on sait dans quelle proportion les gens répondent à ces sondages. Bref, je ne suis pas en mesure de répondre à cette question.
M. Marc Godbout: Éventuellement, il pourrait être intéressant d'examiner ces données.
Mme Michèle Demers: Oui.
M. Marc Godbout: Je veux être certain de comprendre la distinction entre ce qui est impératif et ce qui ne l'est pas.
Vous semblez encourager—et corrigez-moi si je fais erreur—un recours passablement facile à la dotation non impérative quand il s'agit de postes désignés bilingues. Certains considèrent cela comme un problème. Il se pourrait que cet usage s'avère trop fréquent. En fait, on se retrouve dans une situation où l'on a l'impression que la fonction publique est bilingue, alors qu'elle ne l'est peut-être pas vraiment.
Pourriez-vous approfondir un peu la question? J'aimerais savoir si nous avons bien compris votre position à ce sujet.
Mme Michèle Demers: Je disais tout à l'heure que, pendant de nombreuses années, on n'avait pas vraiment prêté attention à la question des langues officielles, ou bien qu'on l'avait fait un peu n'importe comment. Ce n'est que très récemment qu'on a commencé à dire avec un peu de sérieux et de volonté politique qu'on allait se fixer des buts et qu'on allait les atteindre.
Il faut être intelligent dans la façon d'atteindre ces buts. On veut tous la même chose. On veut tous que la culture et l'attitude face au bilinguisme changent et deviennent une façon de vivre. En Europe, les gens parlent trois, quatre ou cinq langues. C'est une richesse incroyable que de parler plus d'une langue. On en est conscients. Cependant, il y a encore de la résistance et des difficultés à surmonter. Pour faire en sorte que les gens veuillent y parvenir, parce qu'il y a un échéancier et un intérêt, il faut s'y prendre de façon graduelle et intelligente.
Alors, on recommande de faire un programme de formation qui réponde aux besoins et qui permette aux gens d'acquérir la deuxième langue officielle. On dit qu'il faut leur donner une part de responsabilité pour apprendre la deuxième langue officielle et maintenir cette connaissance, et aussi leur donner un peu de temps. Il faut faire un plan d'action.
La ministre Robillard, quand elle a annoncé ses nouvelles politiques, a dit qu'il fallait que les EX-5 soient bilingues à partir d'avril 2005 et que les EX-3 le soient à partir d'avril 2007. Voilà un plan.
Pourquoi donnez-vous cette possibilité aux EX et non à ceux qui vont devenir des EX dans l'avenir? C'est la relève. Ce sont des gens qui ont acquis de l'expérience et qui vont aspirer à de tels postes. Nous vous disons d'investir des fonds. À l'heure actuelle, il y a beaucoup d'initiatives au gouvernement fédéral, beaucoup de beaux projets et de grosses réorganisations, mais les gens doivent les faire en tenant compte des limites budgétaires. Les ministères doivent économiser 11 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années. De plus, ils doivent fournir de la formation linguistique, et le gouvernement n'injecte pas plus de fonds. Cela n'arrivera pas s'il n'y a pas de fonds. C'est une question de coûts.
¿ (0955)
Le président: Merci, monsieur Godbout.
Mme Michèle Demers: Je pense que je parle trop.
Le président: Ils peuvent vous interrompre.
Monsieur Bergeron, c'est à vous.
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les Patriotes, BQ): Merci, monsieur le président.
Je vous écoute parler, et cela me rappelle une chanson qui était très populaire durant mon enfance au Québec, dont le refrain disait que tout le monde voulait aller au ciel, mais que personne ne voulait mourir. Depuis 35 ans, le gouvernement fédéral ne semble pas avoir fait les efforts nécessaires pour atteindre les objectifs qu'il s'était fixés. Vous l'avez souligné pour ce qui est de la formation. D'ailleurs, je mentionne au passage que vous demandez davantage de formation, mais que vous ne semblez pas avoir les statistiques et les données qui vous permettraient d'identifier le nombre de vos employés qui auraient besoin d'une formation.
Je vais plus loin. Le gouvernement fédéral a probablement fait preuve de laxisme et de laisser-aller par rapport à la Loi sur les langues officielles au cours des 35 dernières années. Cependant, je pense que vous faites preuve d'un peu de candeur et de pensée magique en imaginant que, si on faisait en sorte que le bilinguisme ne constitue pas un obstacle à la promotion des employés, on finirait par y arriver.
On se retrouve dans cette situation 35 ans plus tard, ce qui amène les communautés francophones et acadienne du Canada à exercer des pressions sur le gouvernement pour qu'il rende exécutoire la partie VII de la Loi sur les langues officielles. En effet, 35 ans plus tard, on a l'impression que c'est en grande partie un échec. On se retrouve dans la situation où de 60 à 70 p. 100 des postes désignés bilingues au ministère de la Défense nationale sont détenus par des unilingues anglophones.
Quand un poste est désigné bilingue, à mon sens, la dotation doit être impérative. Si on offre un poste de comptable, on ne va pas embaucher un mécanicien sur la promesse qu'il deviendra comptable un jour. Si on offre un poste d'ingénieur, on ne va pas embaucher une coiffeuse sur la promesse qu'elle deviendra un jour ingénieur. Cela ne fonctionne pas ainsi. Si le poste est bilingue, on ne peut pas embaucher les gens en leur faisant promettre qu'ils deviendront bilingues. À un moment donné, il faut que le gouvernement offre de la formation et qu'il fasse beaucoup plus d'efforts, mais il faut surtout que les employés aient assez d'ouverture d'esprit pour dire qu'un poste désigné bilingue est réellement un poste désigné bilingue.
Mme Michèle Demers: J'entends ce que vous dites. Je défends les intérêts des membres de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada. En tant que représentante de ces professionnels, je vous dis une chose: si vous voulez qu'un poste soit désigné bilingue impératif, indiquez-le, mais donnez un préavis. Indiquez que ce poste sera bilingue dans trois ans et qu'il faudra satisfaire aux exigences linguistiques pour poser sa candidature à ce poste. Fournissez aux gens les outils qu'il leur faut pour satisfaire aux exigences linguistiques, et laissez aussi une part de responsabilité aux individus. Quand le poste sera désigné bilingue, à ce moment-là, il sera bilingue pour toujours. Mais ne faites pas cela de façon à vous mettre à dos les employés de la fonction publique et à déclarer la guerre à ceux qui sont unilingues. Ces derniers vous diront que c'est discriminatoire, qu'on n'a plus le droit de travailler dans son pays dans la langue de son choix, qu'on impose des barrières qui font en sorte qu'on ne peut plus avoir de promotion ou qu'on ne peut plus accéder à certains postes. Mettez en place des conditions gagnantes—vous devez connaître cette expression—et assurez-vous que cela se fasse, mais que cela se fasse avec un plan. C'est tout ce que je vous dis.
À (1000)
M. Stéphane Bergeron: Moi, je dis que le bilinguisme tel que vous le voyez est peut-être un obstacle à la promotion dans la fonction publique, mais que ce n'est certainement pas un obstacle à la possibilité de travailler dans la langue de son choix. Si on est francophone ou anglophone et qu'on a la chance d'être bilingue, on est évidemment capable de travailler dans la langue de son choix. C'est simplement qu'on est apte à travailler également dans l'autre langue officielle, si cela est nécessaire. Alors, je ne comprends pas cette idée selon laquelle on ne peut pas travailler dans la langue de son choix si on est bilingue. Ce n'est pas un argument. Dans mon esprit, cela ne constitue pas un argument.
Mme Michèle Demers: C'est votre opinion.
M. Stéphane Bergeron: Que vous ne partagez manifestement pas.
Mme Michèle Demers: Voilà.
M. Stéphane Bergeron: Selon vous, quand on est bilingue, on ne peut pas travailler dans la langue de son choix.
Mme Michèle Demers: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. Je vous dis que, si vous mettez en place des postes où le bilinguisme est impératif, vous devez le faire de façon intelligente. C'est tout ce que je vous dis. On n'est pas contre les langues officielles. On n'est pas contre le fait de devoir fournir des services dans les deux langues officielles. On est contre la mise en oeuvre de cela de la façon dont certains ministères—pas tous—le font, à savoir de façon unilatérale. D'autres le font de façon plus intelligente, avec un plan de deux, trois ou quatre ans. Ils disent par exemple que, dans tel secteur, ils auront tant de postes qui seront désignés bilingues impératifs d'ici un an ou deux, que d'ici trois ans, telle autre catégorie de postes sera bilingue, et ainsi de suite.
Cependant, malgré ces beaux plans, il manque toujours les outils de formation et les fonds pour financer la formation linguistique.
Le président: Merci beaucoup.
La dernière intervention sera celle de M. Julian.
M. Peter Julian: Merci beaucoup, monsieur le président.
D'habitude, quand on parle d'un certaine nombre de francophones, on pense à une population qui est stable ou parfois à une population qui diminue. Cependant, dans ma province, la Colombie-Britannique, il y a une croissance de la population francophone. On est maintenant la quatrième province francophone au pays, juste après le Québec, l'Ontario et le Nouveau-Brunswick. On a 65 000 francophones. Certaines régions, dont celle de Whistler, ont maintenant un pourcentage de francophones qui fait en sorte qu'il serait important d'avoir des services bilingues.
Je remarque que vous dites, dans votre présentation, que « les exigences linguistiques de tout poste dansla fonction publique fédérale devraient refléter les exigences linguistiquesidentifiées objectivement. » Pour ce qui est des régions où la population francophone augmente, ou de certaines régions où il y a une population anglophone qui augmente, quels critères devraient être appliqués pour offrir à ces nouvelles régions la capacité de fournir des services dans les deux langues?
Mme Michèle Demers: Je vous avoue en toute candeur que je ne suis pas certaine de la réponse que je vais vous donner, mais je pense que le fait de déclarer une région bilingue est basé sur un pourcentage de la population qui est étudié de façon statistique. Je ne connais pas ce pourcentage. J'imagine que, s'il y a un bassin suffisant, il pourrait y avoir une volonté d'offrir des services bilingues, mais je ne veux pas m'avancer sur un territoire que je ne connais pas bien.
À (1005)
M. Peter Julian: Vous avez parlé de la note de 4 sur 10 que vous aviez accordée. Elle est appropriée, à mon avis.
Quelles seraient les deux ou trois priorités qu'il faudrait absolument mettre en application pour que cette note de 4 sur 10 se rapproche de 10 sur 10?
Mme Michèle Demers: À mon avis, un programme extensif devrait être mis sur pied en matière de formation.
M. Peter Julian: Ce serait la première des priorités?
Mme Michèle Demers: En effet. On parle ici d'une formation axée sur le travail et les besoins en milieu de travail. La deuxième priorité serait le financement, au niveau des ministères et des agences, qui permettrait de répondre aux exigences. La troisième priorité consisterait à développer un partenariat avec les syndicats en vue d'élaborer un projet conjoint.
La nouvelle Loi sur la modernisation de la fonction publique parle de co-développement et de codétermination. Dans ce contexte, il pourrait être fascinant d'établir avec l'employeur un plan d'action et de mise en oeuvre des nouvelles politiques en matière de langues officielles dans la fonction publique fédérale.
M. Peter Julian: Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Julian.
Merci, madame Demers.
Thank you, Mr. McIntosh.
Nous allons faire une pause de deux minutes, puis nous discuterons à huis clos des travaux du comité.
[La séance se poursuit à huis clos.]