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Bonjour. Je m'appelle Sylvie Gamache, je suis directrice générale du Conseil québécois de la musique.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, au nom des membres du Conseil québécois de la musique, le CQM, je tiens d'abord à remercier le Comité permanent du patrimoine canadien pour la tenue de cette rencontre qui nous permet de vous faire part des impacts prévisibles de la disparition du volet Diversité musicale du Fonds de la musique du Canada. Si nous sommes aujourd'hui parmi vous, c'est parce que le CQM représente une grande partie de ceux et celles qui ont appris l'été dernier dans les médias la disparition importante de l'aide de l'État.
En effet, le CQM compte quelque 300 membres, dont une majorité est constituée de membres corporatifs oeuvrant dans les musiques dites de concert, appelées aussi musiques spécialisées. On parle donc d'orchestres, de maisons de disques, de festivals et de petits ensembles musicaux. Plus précisément, le CQM est une association disciplinaire qui met en oeuvre des activités de représentation et de promotion pour les artistes de musique ancienne, classique, jazz, électroacoustique, actuelle et musique du monde. Ce sont donc spécifiquement nos membres qui, depuis l'été dernier, sont devenus extrêmement inquiets à la suite de l'annonce des changements au Fonds de la musique du Canada, changements qui viendront bousculer l'écologie du milieu musical concerné et en fragiliser l'existence même.
Nous nous adressons donc à vous, mesdames et messieurs, en souhaitant que vous et vos collègues qui siégez au gouvernement canadien soyez attentifs à ce que nous allons vous exposer. Nous espérons qu'au cours des prochaines semaines vous assurerez un suivi à ce dossier majeur pour le milieu musical et les nombreux musiciens canadiens durement touchés.
Vous n'êtes pas sans savoir que le 31 juillet dernier, le ministre James Moore, tout en annonçant la bonne nouvelle du renouvellement pour cinq ans du Fonds de la musique du Canada, nous annonçait du même coup des changements majeurs à ce fonds: le retrait du Volet diversité de la musique canadienne, qui comprend les programmes Subventions à l'enregistrement sonore de musique spécialisée et Aide à la distribution de musique spécialisée, tous deux gérés par le Conseil des Arts du Canada. Cette réaffectation des investissements du gouvernement canadien redirigera donc 1,3 million de dollars, somme initialement consacrée à l'essor des musiques spécialisées, vers de nouveaux objectifs. Pourtant cette somme plutôt modeste, injectée au volet Diversité de la musique canadienne, a permis chaque année à une centaine d'artistes et compagnies de disques d'offrir au public un choix plus vaste et plus diversifié d'oeuvres musicales canadiennes.
Le Fonds de la musique canadienne n'a-t-il pas pour fonction première d'aider les artistes canadiens pour que les résidants de l'ensemble du pays continuent d'avoir accès à une culture musicale vivante et diversifiée? Le Conseil des Arts du Canada administrait ces programmes depuis la fin des années 1980 pour le compte du ministère du Patrimoine canadien. Le programme Subventions à l'enregistrement sonore de musique spécialisée visait à soutenir l'enregistrement de musique canadienne spécialisée par des artistes, des ensembles, des groupes, des orchestres, des maisons de disques et des réalisateurs de disques indépendants canadiens. Il visait à favoriser la production d'une grande variété de musique canadienne issue d'une démarche artistique et à faire en sorte qu'elle soit accessible au public.
Le programme d'Aide à la distribution de musique spécialisée venait appuyer la distribution de musique spécialisée par des sociétés de distribution et des maisons de disques appartenant à des intérêts canadiens et contrôlées par des Canadiens tout en permettant aux bénéficiaires d'une subvention de distribuer, commercialiser et vendre de façon efficace des enregistrements de musique canadienne spécialisée qui, malgré leur importance sur le plan culturel, ont malheureusement quelquefois un accès limité aux marchés et aux consommateurs.
Le Conseil des Arts du Canada, qui possède une connaissance approfondie du secteur des musiques spécialisées, gérait avec succès ces deux programmes. Ceux-ci ont soutenu des centaines d'artistes et entreprises canadiennes, dont plusieurs ont d'ailleurs été reconnus pour la qualité de leurs oeuvres. Finalistes et lauréats des prix Juno, Félix et Opus, bon nombre d'entre eux se sont retrouvés en nomination pour nos prestigieux prix de la musique. Ce n'est pas étonnant d'ailleurs, puisque les règles d'attribution du Conseil des Arts du Canada reposent d'abord et avant tout sur la qualité du projet artistique déposé.
Précisons de plus que pour l'instant, aucune autre instance canadienne ne peut accueillir, dans le cadre de ses propres critères d'admissibilité et de son financement, l'ensemble de la clientèle durement touchée par ces coupes de programmes. Tout cela signifie que les musiques de création du pays, du jazz à la musique électroacoustique en passant par les musiques actuelles et les musiques du monde, vont désormais perdre une partie importante de leur financement public.
À l'instar d'autres programmes de soutien gouvernemental, l'aide à l'enregistrement sonore et à sa distribution favorise l'avancement des carrières de nos artistes canadiens. Ceux-ci, on le sait, contribuent significativement à la renommée du Canada à l'échelle internationale. Un tel désengagement laisse croire que le gouvernement fédéral se retire du soutien à la création musicale canadienne, et nous ne pouvons accepter une telle situation, qui met en péril tout un secteur de la diversité musicale de notre pays.
Au nom de la communauté qu'il représente, le Conseil québécois de la musique demande au gouvernement fédéral de reconnaître l'importance de la musique créée, interprétée et diffusée par nos musiciens et du rôle essentiel de ces créateurs dans le paysage culturel canadien. Le CQM lui demande par conséquent d'assurer le soutien aux créateurs et aux maisons d'enregistrement sonore des musiques spécialisées par des programmes adaptés aux réalités spécifiques du milieu de la création et de financer ces programmes à la hauteur du besoin de ce secteur.
Pour rendre le tout un peu plus concret, permettez-moi d'ouvrir devant vous cette valise qui contient en partie le résultat des trois dernières années du soutien à l'enregistrement sonore, programme géré par le Conseil des Arts du Canada. Cette collection importante de disques de répertoires variés est le témoin de la créativité, du labeur et de la qualité du travail de nos musiciens et artistes.
Je cède maintenant la place à mes collègues ici présents, musiciens et directeurs de maisons d'enregistrement sonore. Ils sont directement touchés par cette réaffectation des fonds. Ils sont venus vous faire part des impacts à court et moyen termes des coupures annoncées. Je leur laisse la parole.
Merci.
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Bonjour. Je m'appelle Christophe Papadimitriou. Je suis contrebassiste professionnel depuis 20 ans. Je suis membre de différentes formations de jazz et musiques du monde. J'accompagne également des artistes populaires. En parallèle de ma carrière de musicien, je dirige L'OFF Festival de jazz de Montréal depuis 2006. Je travaille pour la Chapelle historique du Bon-Pasteur, une maison de la culture dédiée à la musique classique et contemporaine. Je suis membre du comité de musique du Conseil des arts de Montréal et je suis vice-président du Conseil québécois de la musique. Je vous remercie de m'accueillir aujourd'hui pour témoigner.
Mes multiples activités dans le milieu musical me permettent de côtoyer une grande diversité d'artistes en musique dite spécialisée et de bien comprendre la réalité du milieu. Mon intervention portera essentiellement sur les conséquences de la coupe du programme Subventions à l'enregistrement sonore de musique spécialisée pour les artistes indépendants. Cette subvention a permis de cofinancer une centaine de projets à travers le Canada en 2008. Elle est essentielle et vitale pour les acteurs de ce milieu. La production d'un enregistrement sonore est une étape clé non seulement dans la dynamique de création d'une oeuvre, mais aussi dans sa diffusion. Elle est à la fois une marque tangible d'une création sonore, un outil promotionnel obligatoire pour la diffusion de spectacles — ici comme à l'étranger — et un document de référence qui s'inscrit dans le patrimoine national.
Il ne faut pas aborder l'enregistrement de musique spécialisée comme les autres genres plus populaires. Je vous cite la définition éloquente qu'en fait le Conseil des Arts du Canada:
On entend par « musique spécialisée » toute production musicale qui n’est pas avant tout conçue pour un marché de masse et dont l’intention ou le contenu met l'accent sur la créativité, l'expression personnelle ou l’expérimentation plutôt que sur les exigences de l'industrie de l'enregistrement sonore courante. Elle est normalement associée au marché parallèle et aux systèmes de distribution alternatifs et son importance dépasse le simple divertissement.
La rentabilité en termes de vente d'albums ici ne peut pas s'appliquer. On parle d'un auditoire spécialisé et donc d'un nombre de ventes plus limité. La rentabilité de ce type de projet se calcule en termes de développement de carrière. Le disque permet d'être diffusé sur les ondes radio, d'obtenir des critiques de médias et avant tout de vendre des concerts. Dans la majorité des cas, le concert est la source de revenu principale des artistes, et sans enregistrement de qualité, les groupes n'ont plus aucun moyen de démarcher les festivals, les diffuseurs canadiens et étrangers ou de participer aux marchés de spectacles.
La moyenne des fonds alloués par le Conseil des Arts du Canada sur ce type de projet est d'environ 7 000 $ par projet. Elle ne peut excéder 60 p. 100 du budget total. L'artiste participe toujours financièrement à ce type d'initiative, mais son statut précaire ne lui permet en aucun cas d'en assumer l'intégralité. De plus, c'est tout un milieu économique qui profite également de ces enregistrements — les studios, les ingénieurs, les graphistes, etc.
Pour conclure, comme je viens de vous l'expliquer, ces sommes sont essentielles à la survie des musiques spécialisées, mais aussi, elles ne peuvent être gérées que par une instance où les critères de sélection sont basés sur l'excellence artistique plutôt que sur les retombées commerciales, et j'ai nommé le Conseil des Arts du Canada.
En conclusion, la suppression du programme Subventions à l'enregistrement sonore de musique spécialisée va avoir des conséquences irrémédiables sur tout un pan musical au Canada. La diversité et la vitalité de nos créateurs est ici en jeu. La qualité et l'excellence ne riment pas obligatoirement avec une rentabilité commerciale, mais avec un savoir-faire et une expertise qui enrichissent précieusement le patrimoine canadien.
Merci.
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Bonjour. Je m'appelle Jean-François Denis et je suis le directeur de la maison de disques empreintes DIGITALes.
Les fiertés d'une ville, d'une région, voire d'un pays que sont ses orchestres symphoniques et ses maisons d'opéra, deux des institutions les plus connues des musiques dites spécialisées, ne peuvent répondre par leur forme propre aux mêmes lois de marché que le spectacle de variétés ou la comédie musicale. Il en va de même pour les autres formes de musique spécialisée que sont les musiques électroacoustiques, actuelles, expérimentales et contemporaines.
Même si pour certains, les musiques semblent être une entité homogène, après tout, toutes les musiques demandent des créateurs, des interprètes. On en fait l'expérience directement en salle ou par les médiums que sont le disque et la radio. On s'informe à son sujet par les journaux et les revues musicales et autres. La pratique des différents genres musicaux est bien différente. Et cette différence de pratique a stimulé le développement de chaînes de transmission, de production, de promotion et de distribution adaptées: à musiques spécialisées, moyens spécialisés.
Grâce à ces solides structures industrielles, la musique de variétés est devenue omniprésente dans notre société. À plusieurs égards, cette industrie peut servir de modèle. À l'instar de la chanson, la chaîne liant le créateur de musique spécialisée aux mélomanes s'est aussi développée à sa façon, avec magazines et revues spécialisés, organismes de concert et festivals, ensembles et interprètes, créateurs et compositeurs, maisons de disques, éditeurs, émissions de radio, etc.
Tout comme son pendant industriel, où chaque maillon, chaque métier complète les autres et est potentiellement aidé par divers programmes de subventions, le vaste secteur des musiques spécialisées possède aussi ses maillons, dont l'existence de chacun est tout autant capitale pour les autres de la chaîne. C'est pourquoi, subitement retirer l'appui aux deux maillons de production que sont l'enregistrement sonore et la distribution à un secteur ne peut être que déstabilisant, sinon catastrophique, tout comme demander à un secteur d'appliquer les modes de fonctionnement d'un autre secteur. Les effets à court, moyen et long termes sont énormes non seulement sur l'accès aux oeuvres — il y aura beaucoup moins d'enregistrements sonores —, mais aussi sur la notoriété de nos musiciens chez nous et à l'international et sur l'entièreté de la discipline qu'est la musique.
En effet, la plupart des musiques dites spécialisées sont enseignées de l'école primaire jusqu'à l'université, pour d'abord favoriser l'appréciation musicale et façonner de futurs auditeurs, pour comprendre ses fonctionnements par l'étude, la recherche et l'analyse, et, bien sûr, pour former des musiciens, créateurs et interprètes de demain. Et c'est par l'audition d'enregistrements sonores que la musique s'apprend et se développe, d'autant plus que certaines formes de musique spécialisée n'existent que par l'enregistrement sonore. L'existence de ces enregistrements, de ces disques, jouent donc plusieurs rôles, dont ceux de donner l'accès aux oeuvres, de permettre l'éducation et le développement des pratiques, de constituer un patrimoine national, des traces audibles de la créativité de nos musiciens, et ce, à travers le monde.
En janvier 2010, ma maison de disques, empreintes DIGITALes, célébrera 20 ans d'édition discographique. Plus de 110 titres — un compositeur par disque — ont été produits et rendus disponibles auprès des publics d'ici et surtout d'ailleurs. Aujourd'hui, j'ai produit 84 disques de 50 compositeurs canadiens, dont Francis Dhomont, Robert Normandeau, Paul Dolden et Gilles Gobeil, et 32 de compositeurs étrangers, originaires de France, de Belgique, du Royaume-Uni, d'Allemagne, de Grèce, de Suède et d'Argentine. De ces 84 disques canadiens, 63 ont reçu une aide, souvent modeste, du programme de production géré depuis plus de 20 ans par le Conseil des Arts du Canada. Ce programme nous aide justement à accomplir notre mission, la mission de ma maison de disques, qui est de rendre disponibles ces musiques uniques.
Combien de ces 63 disques n'auraient pas vu le jour sans cette aide qu'est le programme Subventions à l'enregistrement sonore de musique spécialisée du Conseil des Arts du Canada? Peut-être aucun, en fait, car en août 1989, l'aventure de fonder une maison de disques qui, rétrospectivement, ferait rayonner la créativité canadienne comme empreintes DIGITALes le fait encore aujourd'hui, aurait été absolument irréaliste alors.
Avec le retrait du volet de la diversité musicale, avec la coupe des programmes d'aide à la production et d'aide à la distribution dans notre pays de demain, combien de musiciens en herbe, combien de nouveaux éditeurs discographiques potentiels ne verront plus le jour? Combien d'auditeurs et de mélomanes seront privés d'accès aux oeuvres? À quel point notre culture en devenir dans ce nouveau millénaire ne sera plus aussi vaste, riche et diversifiée que celle dont nous, ici réunis, avons héritée, ce patrimoine auquel nous avons tous pu, jusqu'à ce jour du moins, contribuer de façon si créative, si imagée, si étonnante?
Merci.
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Mesdames et messieurs, je m'appelle Carole Therrien, je suis une Montréalaise portant plusieurs chapeaux à la fois: chanteuse lyrique, classique, baroque, jazz, auteure, compositrice et finalement productrice, gestionnaire et cofondatrice, avec le contrebassiste Alain Bédard, de l'étiquette de jazz contemporain Effendi.
Depuis 10 ans, Effendi compte parmi les étiquettes de jazz les plus importantes au Canada. Elle s'est imposée comme chef de file en accompagnant de plus en plus d'artistes lors de la réalisation de leur projet de disque, de concert ou de tournée. Notre but principal est de faire la promotion du jazz d'ici. Le contenu musical de nos enregistrement comprend plus de 90 p. 100 de musique originale canadienne. Nous coopérons entre autres avec les leaders Rémi Bolduc, François Bourrassa et Michel Donato, pour ne nommer que ceux-là. Nous distribuons également au Canada les enregistrements de plusieurs étiquettes indépendantes du Canada et de l'étranger.
De mai 2000 à ce jour, nos enregistrements ont obtenu de nombreuses nominations à différents concours. De ces nominations, une trentaine de prix ont été remportés. Vous en avez la liste en annexe. Nous travaillons depuis 10 ans à créer du contenu canadien, à faire la promotion de notre musique et de notre culture. Effendi participe au rayonnement de la culture canadienne à l'intérieur du pays et à l'étranger, par l'intermédiaire de la distribution locale, internationale ainsi que par de nombreuses tournées d'artistes, comme au Lincoln Center de New York ou au Blue Note de Milan. Quatre de nos artistes sont en tournée cet automne, trois en tournée européenne et un en tournée canadienne. Nous venons d'ailleurs d'apprendre qu'un de nos artistes, François Bourrassa, a été choisi pour représenter le Canada dans le cadre d'une vitrine au prochain MIDEM.
Abolir des programmes pour en créer d'autres qui n'ont pratiquement aucun rapport entre eux n'est absolument pas pertinent. Nous avons produit quelques enregistrements grâce à l'aide du Conseil des Arts du Canada, une ou deux fois par année, et mis en marché plusieurs enregistrements d'artistes producteurs qui avaient bénéficié du programme Subventions à l'enregistrement sonore de musique spécialisée, mais pas de celui de MUSICACTION ou de FACTOR. Croire que les programmes se recoupent est une erreur, puisque cela aura pour effet de diminuer la quantité de disques présents sur le marché et de créer par le fait même un nivellement de la musique, ce qui n'est pas souhaitable.
Les jurys de FACTOR et de MUSICACTION ne sont pas formés uniquement de pairs, comme le sont ceux du Conseil des Arts du Canada. Il pourrait donc y avoir un manque de connaissance approfondie, à savoir quelle est la qualité musicale d'un projet, et n'y voir que son aspect commercial. Ce n'est pas parce qu'un disque se vend à 20 000 copies qu'il est nécessairement de qualité supérieure. Parfois, les moyens de promotion sont plus grands, tout simplement.
Nous avons la chance d'être des producteurs reconnus chez MUSICACTION. Grâce à cela, nous pouvons y proposer des projets qui ne seraient pas nécessairement acceptés par son jury. Cette aide n'est souvent pas suffisante pour produire un enregistrement. Il est arrivé à quelques occasions que nous ayons obtenu de l'aide du Conseil des Arts du Canada et de MUSICACTION pour un même projet, mais je dirais que ce n'est pas dans la majorité des cas. De plus, cette aide n'a jamais dépassé 70 p. 100 du total. Nous y avons toujours investi temps et argent. À ce propos, l'aide à la distribution spécialisée est essentielle. Le profil de l'amateur de jazz est assez similaire partout dans le monde. Il est habituellement peu enclin à acheter des fichiers de format MP3, qui sont toujours compressés et, par conséquent, de moins bonne qualité par rapport au son original du CD. Il préfère avoir le CD, l'objet physique et la pochette, et prend souvent grand soin d'avoir une bonne chaîne stéréo pour l'écouter. Il y aura donc toujours des détaillants qui vendront des enregistrements sous forme d'objets physiques, et nous aurons toujours besoin d'aide pour en faire la promotion, car ils sont toujours noyés dans la masse des nombreuses sorties hebdomadaires.
Cette abolition de programme va probablement avoir un effet néfaste sur le pouvoir d'attraction des universités et collèges en musique et va réduire l'intérêt et les possibilités d'aller étudier la musique. Qui ira à McGill, pourtant très réputée pour l'enseignement du jazz, si on n'a pas d'accès à des enregistrements plus pointus? À quoi serviraient ces programmes d'enseignement si le rêve de devenir jazzman professionnel n'existait plus? Aujourd'hui, le jazz est enseigné dans les écoles aux niveaux secondaire, collégial, universitaire, au baccalauréat, à la maîtrise et même au doctorat. Ne croyez pas que ces étudiants choisiront la direction du jazz commercial. Au contraire, ils voudront toujours se dépasser, et c'est surtout pour ces derniers qu'est essentiel le programme Subventions à l'enregistrement sonore de musique spécialisée.
Notre compagnie risque, à court terme, de devoir faire plus d'investissements risqués. Il y aura une diminution du nombre d'enregistrements de qualité, et tout cela portera atteinte à la diversité musicale, sans oublier les conséquences désastreuses sur l'ensemble de l'industrie spécialisée et sur le marché de l'emploi relié à ces enregistrements.
Pour arriver à assurer un niveau de revenu substantiel, certaines compagnies n'hésitent pas à proposer des contenus plus populaires ou même étrangers, mais bien souvent non originaux. Pourtant, nous continuons depuis des années, comme d'autres entreprises, à privilégier un contenu original et surtout canadien parce que nous croyons en l'ouverture, la force et l'intérêt de notre culture à l'extérieur mais aussi à l'intérieur de notre pays.
Pour terminer, qu'en est-il du développement des nouveaux consommateurs dans tout cela? Pourquoi nos radios persistent-elles à leur faire écouter les sempiternels enregistrements ou compositeurs américains? Ne devrait-on pas essayer de les aider à avoir accès à un contenu canadien de qualité — pas des jazzmen canadiens qui jouent des standards américains, mais plutôt leur musique, notre musique? Soyons fiers de notre culture, c'est de ça qu'il est question. Mais pour cela, les radios, les diffuseurs et les subventionneurs doivent prendre des risques. Je dis non aux coupes des programmes du Conseil des Arts du Canada et je vous demande de revenir sur votre décision rapidement, s'il vous plaît.
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Je vous remercie d'avoir invité la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec. Je m'appelle Luc Fortin, je suis compositeur, musicien professionnel et président de la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec, une association regroupant plus de 3 100 musiciens professionnels. Nous sommes aussi affiliés à la Fédération américaine des musiciens du Canada et des États-Unis, qui compte plus de 10 000 membres au Canada, et je parle aussi en leur nom.
Au cours de l'été dernier, M. James Moore annonçait que Patrimoine Canadien: « [...] modifiera la structure du Fonds de la musique du Canada de manière à réduire le fardeau administratif et accroître la visibilité de la musique canadienne sur les plateformes numériques et sur les marchés internationaux. » Bien que nous ne puissions qu'approuver de tels objectifs, il est apparu par la suite que cette démarche laissait de côté d'importantes et indispensables composantes de la mosaïque musicale canadienne. En effet, en coupant les vivres au Volet diversité de la musique canadienne, qui comprenait les Subventions à l'enregistrement sonore de musique spécialisée et l'Aide à la distribution de musique spécialisée, on a pour ainsi dire abandonné à eux-mêmes toute une catégorie de musiciens et créateurs qui apportent une contribution essentielle à notre culture.
En effet, comment profiter de nouveaux programmes vous donnant l'accès à une meilleure visibilité et une meilleure distribution sur les plateformes numériques et sur les marchés internationaux si, de l'autre main, on vous retire les fonds nécessaires pour produire ou distribuer physiquement un enregistrement sonore? Il apparaît clairement que les musiciens interprètes et créateurs qui oeuvrent dans les musiques spécialisées sont laissés pour compte. À la base, il y a une iniquité, certains artistes ne pourront avoir accès aussi facilement que les autres aux marchés numériques et internationaux faute d'avoir de nouveaux albums à promouvoir. Ces enregistrements d'oeuvres canadiennes, en plus d'enrichir considérablement une culture diversifiée et vivante, servent aux musiciens de cartes de visite et d'outils de promotion. Ces interprètes et créateurs ne pourront donc participer comme d'autres à la révolution numérique et auront beaucoup de difficulté à exporter leur musique et leurs concerts, étant privés de cet outil indispensable qu'est un enregistrement sonore de qualité professionnelle.
Nous croyons que notre culture canadienne, pour être diversifiée et représentative, doit être soutenue dans toutes ses composantes. Les nombreux musiciens, compositeurs ou ensembles musicaux qui profitaient de l'aide du Volet diversité de la musique canadienne ont apporté une contribution inestimable à notre culture. Au-delà de 100 albums étaient produits ou distribués annuellement grâce au soutien de ce programme, dont le tiers au Québec seulement. Au coeur de cette diversité musicale, il y a des artistes qui innovent, recherchent, découvrent, et il y a là un incroyable bassin de recherche et de développement. Les musiques destinées au « grand public » se sont abreuvées régulièrement à cette source inépuisable de nouvelles sonorités. La culture musicale canadienne est un écosystème complexe et fragile, toutes ses composantes doivent être préservées pour continuer à tenir le rôle qui leur est propre, sinon nous risquons de perdre ce qui fait notre différence et notre force.
Nous demandons donc au ministre du Patrimoine canadien de remettre sur pied sans délai les programmes du Volet diversité de la musique canadienne et de permettre à nouveau à de talentueux créateurs et interprètes de contribuer à enrichir la diversité musicale canadienne.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Bonjour à tous. Je suis très heureux de vous voir ici aujourd'hui, malgré le fait que ce qui nous réunit est plutôt une nouvelle triste qu'une bonne nouvelle.
Chacun d'entre vous est extrêmement impliqué dans le milieu. L'un d'entre vous a-t-il été consulté de quelque façon que ce soit au moment des coupes ou avant l'annonce?
Mme Sylvie Gamache: Non.
M. Christophe Papadimitriou: Non.
M. Pablo Rodriguez: D'accord. C'est aussi le cas de certains de vos collègues de l'extérieur du Québec qui étaient avec nous cette semaine et à qui j'ai posé exactement la même question. Personne du milieu, que ce soit un artiste, un représentant ou un producteur d'artistes, n'a été consulté. Ce qui est particulier, c'est que lorsqu'il y a eu des consultations sur la qualité du programme en général, 98 p. 100 des gens ont dit qu'il fallait le conserver. Or voilà qu'il est coupé.
Comment avez-vous appris la coupe du programme, et pourquoi l'a-t-on faite, selon vous?
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L'élève a dépassé le maître. Je n'ai pas beaucoup de temps pour faire des blagues. J'aimerais mieux vous poser des questions.
Tout d'abord, permettez-moi de faire un commentaire. On a vu que le programme de musique spécialisée est un programme qui a un petit budget, mais qui répondait à un réel besoin. Pour chacun d'entre nous, 1,3 million de dollars, c'est beaucoup d'argent. Pour ce gouvernement, qui fonctionne à coup de milliards de dollars, ce n'est pas le programme le plus important. C'est la même chose pour Patrimoine canadien.
Hier, des artistes et des musiciens ont témoigné et ont vraiment démontré qu'il y avait un besoin. Ils ont dit en avoir besoin, car c'est ce qui leur a permis de lancer leur carrière. Sans, cela, ils seraient encore en train de faire de la musique dans leur chambre à l'aide de leur ordinateur. J'imagine que, dans vos valises et vos sacoches, vous avez beaucoup d'exemples de ce genre d'artistes qui réussissent aujourd'hui à vivre de leur art, mais qui, sans les montants provenant de ce programme, n'auraient pas réussi à poursuivre leur carrière. Ils n'auraient pas eu les moyens de faire connaître leurs talents. Vous dites aussi que le programme de musique spécialisée est une sorte de pépinière pour la musique commerciale. C'est un secteur de recherche et de développement. Vous avez parlé de savoir-faire, de créativité, de recherche et d'expertise. Ce sont tous des mots qui nous font croire que les gens qui font de la musique spécialisée portent vraiment bien leur nom: ils se spécialisent dans le développement de la musique et ils inspirent les gens qui font de la musique plus commerciale.
Je m'excuse si je prends beaucoup de temps, mais je veux vraiment cerner la situation. Bref, c'est un secteur de recherche et de développement. Une étude a été réalisée en 2007, comme on a pu le lire dans Le Devoir de ce matin, qui démontre que ce programme était le plus performant de tous les programmes du Fonds de la musique du Canada. Tout le monde était content. Ça remplissait un besoin immense dans l'écosystème compliqué de la musique, dont parlait M. Fortin. Puis, tout à coup, le 31 juillet, le , ministre conservateur, annonce, une deuxième année de suite, une abolition de programme important pour le développement de la musique, pour l'écosystème compliqué des arts et la culture.
Je sais que la politique n'est pas votre tasse de thé, mais vous êtes Québécois, vous êtes des artistes, vous êtes des citoyens. Ne croyez-vous pas que c'est par idéologie que ce gouvernement a sabré, pour une deuxième année consécutive, là où ça fait mal, c'est-à-dire dans des programmes où il n'y avait pas le mot « divertissement »? Ce gouvernement n'en a que pour le divertissement. Il confond les arts et la culture avec le divertissement. Il y a des mots clés dans le programme en question, car l'on dit qu'il ne s'adresse pas à la masse. Ce n'est pas un programme qui est fait pour la musique populaire. Ne croyez-vous pas que ces deux éléments ne sont pas nécessairement pour le divertissement? Cela n'est pas de la musique populaire. Sont-ce les raisons pour lesquelles ce gouvernement a annoncé cette abolition, le 31 juillet?
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La question est très bonne, et il y a plusieurs façons de l'aborder.
La nouvelle a été subite. Du jour au lendemain, on nous annonce que c'est une coupe totale. Cela ne nous donne pas beaucoup de temps pour nous réorganiser. Je ne sais pas comment se sentent mes collègues ici présents, mais on est plutôt sous l'effet du choc. Après un incendie, que fait-on? On pense à la façon de s'en sortir. Si l'on avait prévu déménager deux ou trois ans d'avance, on aurait peut-être pu s'organiser, mais pour l'instant, c'est impossible. On est en réaction.
On est ici aujourd'hui; on s'est rencontrés. Il y a une collégialité très importante dans le milieu puisqu'on sait tous que la musique est un grand bateau. Les musiques spécialisées, les orchestres symphoniques, les maisons d'opéra, la chanson, le rock, on est tous dans le même bateau. Si le bateau coule, il y a un délai de quelques minutes avant qu'on se retrouve tous à l'eau. Que ce soit nous qui oeuvrons dans le milieu de la musique spécialisée ou ceux qui représentent des musiciens plus commerciaux, tous diront qu'on a besoin les uns des autres. Il y a cette collégialité.
Cela ne répond pas à votre question, qui est très intéressante.
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Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à nos témoins d'être venus ici aujourd'hui.
Le député du Parti libéral, M. Rodriguez, a demandé si quelqu'un avait été consulté. Vous avez tous indiqué que vous n'aviez pas été consultés. À titre d'information, plus de 500 groupes ont été consultés avant le renouvellement du Fonds de la musique du Canada. Ces groupes représentaient bien des gens, depuis des artistes jusqu'aux ministères provinciaux de la Culture à l'échelle du pays. Il y a donc eu de vastes consultations, et des témoins viendront nous parler des consultations qui ont été tenues.
J'imagine qu'avant le renouvellement du Fonds, l'industrie de la musique a connu une période d'incertitude. Certaines des remarques formulées m'ont vraiment surpris. Madame Gamache, vous avez affirmé que le gouvernement fédéral ne semble pas vouloir appuyer l'industrie de la musique. À mon avis, 138 millions de dollars sur cinq ans, c'est un appui considérable. Le Conseil canadien octroie 9 millions sur 30 millions de dollars à l'industrie de la musique spécialisée. Près d'un tiers de leurs investissements en musique est alloué au secteur de la musique spécialisée. Soixante pour cent des gens qui sollicitent les fonds alloués à la diversité musicale reçoivent d'autres fonds attribués dans le cadre de l'enveloppe budgétaire pour le financement de la musique.
Je voudrais seulement vous citer divers groupes, parce que je n'entends pas le même son de cloche. J'imagine que je suis étonné. Mme Lavallée a indiqué qu'à son avis, il s'agit d'une question d'idéologie, mais son idéologie l'a portée à voter contre le plus important budget à l'appui des arts et de la culture de l'histoire de ce pays. Voilà son idéologie. J'en suis étonné.
Lorsque nous regardons ce que certaines personnes ont dit, nous constatons que Pierre Rodrigue, le président de MUSICACTION a dit au ministre:
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En tant que président de MUSICACTION et vice-président d'Astral Média Radio, permettez-moi de vous féliciter, monsieur le ministre, pour la confiance que vous avez dans le Fonds de la musique du Canada. Cette annonce est encore plus essentielle, car elle est faite à un moment où le modèle d'affaire de l'industrie de l'enregistrement sonore est remis en question.
Solange Drouin, directrice générale et vice-présidente de l'ADISQ, a indiqué que les subventions actuelles seraient éliminées au mois d'avril 2010 et qu'elle était très heureuse. Les gens de l'ADISQ étaient impatients de savoir à quoi ressembleraient les nouvelles subventions.
Heather Ostertag, présidente et PDG de FACTOR, a déclaré:
Nous sommes privilégiés parce que le gouvernement actuel fait preuve d'un leadership marqué et qu'il a une vision. Il reconnaît l'importance d'appuyer des modèles d'affaire viables et croit à l'importance de la culture qui contribue à tisser l'identité canadienne.
Duncan McKie, président et PDG de la Canadian Independant Music Association, a affirmé qu'il n'existait pas de financement direct pour le développement de l'aspect numérique dans l'industrie de la musique avant cette année. Il a déclaré que ces initiatives de développement du marché du numérique et du marché international étaient essentielles et que les avantages qui en découleront appuieront de nombreux artistes oeuvrant dans différents genres parce qu'elles créeront des marchés internationaux pour leurs spectacles et leurs produits. Il a affirmé louer les efforts du gouvernement à ce chapitre et souhaite répéter son appui au renouvellement du Fonds de la musique canadienne.
Je sais que notre pays est une démocratie et que les opinions au sein de toute industrie seront aussi diversifiées que celles des Canadiens en général. Le Fonds dispose de 1,4 million de dollars par année et il s'inscrit dans un fonds beaucoup plus petit. Le gouvernement a accru le financement du Fonds de la musique canadienne, du Conseil des Arts du Canada et des arts et des spectacles en général à l'échelle du pays. Ma question comporte deux aspects. D'abord, souscrivez-vous à l'idée qu'il est important de se tourner vers l'avenir et de faire en sorte que les artistes canadiens puissent rayonner à l'échelle internationale et rester à jour dans le domaine des initiatives de développement du marché numérique? Ou peut-être pensez-vous qu'il est plus important de regarder en arrière?
Music BC est une association industrielle sans but lucratif qui se consacre au développement et à la croissance de la musique et des sociétés d'auteurs-compositeurs en Colombie-Britannique. Notre organisme sans but lucratif a pour mandat de faire la promotion de l'esprit, du développement et de la croissance de la communauté musicale de la Colombie-Britannique à l'échelle provinciale, nationale et internationale. Music BC fournit de l'information, des ressources, une tribune ainsi que des occasions de promotion, de financement et de réseautage. Nous comptons plus de 800 membres rémunérés et 4 000 abonnés actifs à notre bulletin électronique hebdomadaire. Nos membres s'intéressent à tous les genres de musique et vont des artistes aux studios, en passant par les maisons de production de musique et le personnel de l'industrie. Music BC est également le bureau affilié à FACTOR, en Colombie-Britannique.
En ce qui concerne mon cheminement, sachez que je suis le directeur général de Music BC et avocat spécialisé en droit de la musique. Je travaille dans ce domaine depuis 20 ans, et j'ai occupé diverses fonctions, d'artiste à avocat en passant par directeur de maison de production. En tant qu'artiste, j'ai été nominé à deux reprises pour les prix Juno et j'ai récolté deux prix de la musique de l'Ouest canadien. Je suis membre du conseil consultatif national de FACTOR et du conseil de direction de CIMA, anciennement CIRPA, la Canadian Independent Music Association. Je suis membre en règle de la SOCAN et de la American Federation of Musicians.
Au nom de Music BC et du conseil de CIMA, je félicite le gouvernement d'avoir renouvelé le fonds de la musique du Canada pendant cinq ans, aux pleins niveaux de financement. Cet engagement envers la stabilité et la croissance de la musique canadienne à l'échelle régionale, nationale et internationale est exactement ce dont notre industrie a besoin. De nombreux représentants de notre secteur ont été consultés concernant la nécessité de renouveler le fonds, et on a pris bonne note de leur message et agi en conséquence. Le renouvellement pendant cinq ans permettra à l'industrie de planifier pour l'avenir afin d'assurer la croissance soutenue de l'industrie musicale.
Le renouvellement du Fonds de la musique du Canada permettra à des fonds tels que FACTOR, MUSICACTION et les programmes visant les initiatives collectives et les entrepreneurs musicaux de conserver leur plein financement. C'est également une bonne nouvelle pour les associations de musique provinciale, qui obtiennent des fonds par l'entremise de FACTOR pour créer les programmes nécessaires pour les musiciens canadiens et le personnel de l'industrie de la musique que nous appuyons.
Le Conseil du Canada et le Programme de diversité de la musique, quant à eux, rendent de grands services à la musique non commerciale depuis des années. Le programme a permis de financer de nombreux enregistrements d'excellente musique canadienne classique, jazz, folk et rurale. Parmi les artistes britanno-colombiens de renommée à en avoir profité, notons le Vancouver Chamber Choir, Veda Hille et le Amanda Tosoff Quartet. Bien que FACTOR appuie un répertoire très varié, le Conseil du Canada a été en mesure de financer des projets additionnels à usage non commercial. Ce financement de l'art pour l'art fait partie intégrante de notre tissu social et enrichit le paysage culturel du Canada.
En outre, l'aide à la distribution offerte dans le cadre du programme a soutenu des organisations telles que le Centre de musique canadienne, qui distribue le répertoire de musique classique de la CBC/Radio-Canada. La réduction des fonds aura d'importantes répercussions négatives sur ces activités.
Quant à savoir ce dont l'industrie de la musique a besoin, sachez qu'elle a été grandement touchée par l'annulation du programme d'exportation culturelle Routes commerciales. Ces compressions, de même que celles effectuées dans le programme des représentants culturels canadiens dans les consulats du Canada partout dans le monde, ont créé un immense vide dans l'industrie de la musique.
Par exemple, avant ces compressions, Music BC avait été en mesure de faire se rencontrer des superviseurs musicaux et des artistes locaux à Los Angeles. En moins d'une semaine, une artiste locale, Kelly Brock, a vu trois de ses chansons figurer dans la série à succès CSI et a obtenu du financement pour l'ensemble de sa tournée cette année-là.
Depuis, des entreprises et des artistes locaux ont fait figurer des dizaines de leurs chansons dans des séries télévisées et des films américains. Voici un autre exemple: les Western Canadian Music Awards permettaient de réunir des acheteurs de partout dans le monde, y compris du Glastonbury Festival et de South by Southwest à Austin. Ce rayonnement international se verrait grandement réduit.
Avant le renouvellement du Fonds de la musique du Canada, l'industrie musicale avait été consultée concernant ses besoins bien précis dans cette nouvelle ère de la musique. Puisque Internet joue un rôle si important dans le développement artistique et la commercialisation, on avait demandé un programme concernant la commercialisation des ventes numériques. En outre, étant donné l'annulation du programme d'exportation Routes commerciales, l'industrie de la musique avait ciblé la nécessité de favoriser la commercialisation de la musique à l'exportation. L'exportation musicale représente 40 p. 100 du chiffre d'affaires des grandes entreprises musicales indépendantes du Canada. Le ministère du Patrimoine canadien a pris bonne note de notre requête et a préparé un programme de commercialisation et de vente numérique et un autre pour l'exportation.
Bien que ces programmes aient été annoncés en même temps que le renouvellement du fonds, les détails les concernant et leur mode de gestion n'ont toujours pas été dévoilés.
Récemment, la presse et certains groupes de lobbyistes ont beaucoup blâmé FACTOR pour la reconduction du programme. Même s'il faut absolument une agence pour gérer les programmes, à ce que je sache, ni FACTOR ni MUSICACTION n'ont demandé à administrer les fonds qui ont été réaffectés. Et si ces deux organisations deviennent les administrateurs des fonds, ce sera à la demande du ministère du Patrimoine canadien.
Il est également très important de noter que l'industrie de la musique n'a jamais demandé la réaffectation des fonds du Conseil des arts du Canada vers ces nouveaux programmes. L'industrie de la musique reconnaît l'importance du travail réalisé par le Conseil des arts du Canada et n'a jamais suggéré que ces programmes soient financés en éliminant le volet de diversité de la musique canadienne. C'est le ministère du Patrimoine canadien qui a pris cette décision, et non pas l'industrie de la musique.
En conclusion, il est malheureux que le ministère du Patrimoine canadien se soit senti obligé de prendre une décision politique pour la création de deux nouveaux programmes aux dépens d'un programme existant. Il aurait été plus facile et probablement plus judicieux d'accroître les fonds globaux pour permettre la création des nouveaux programmes.
De toute façon, il est impératif que le Fonds de la musique du Canada soit mis en oeuvre rapidement. Toute l'industrie attend la mise en oeuvre de ce fonds.
Merci.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité permanent du patrimoine canadien, comme on vient de le dire, je m'appelle Alain Pineau et je suis le directeur général de la Conférence canadienne des arts, ou CCA. Je vous remercie de donner à la CCA l'occasion d'intervenir dans vos travaux concernant l'abolition récente des programmes d'appui à la diversité musicale.
La CCA est la plus vaste et la plus ancienne organisation culturelle du pays. Fondée en 1945, elle regroupe une vaste gamme de membres qui couvre toutes les disciplines culturelles, tous les modes de vie et toutes les régions du pays. La CCA se définit comme le forum national du secteur des arts, de la culture et du patrimoine. Elle fournit de l'information, des analyses, de la recherche et, de temps en temps, des avis sur tous les enjeux politiques qui, au niveau fédéral, affectent le secteur culturel canadien.
[Traduction]
En raison de son vaste mandat et de la perspective élargie dans laquelle il doit adopter ces mesures, le CAC intervient rarement en ce qui touche des questions particulières comme celles à l'étude aujourd'hui. Mais il intervient, et cela semble être le cas en l'occurrence, lorsque des principes fondamentaux sont en jeu en ce qui touche la santé du secteur culturel canadien et le bien-être des centaines de milliers d'artistes, de créateurs et de spécialistes du domaine des arts avec qui il fait affaire.
Le CAC s'est réjoui publiquement du fait que le gouvernement s'est engagé à reconduire le Fonds de la musique du Canada sur une période de cinq ans. Nous sommes heureux de voir que le a reconnu la nécessité d'accroître les fonds disponibles pour le développement du secteur numérique et des marchés internationaux. Ces deux secteurs d'activités profiteront certainement de l'accroissement des fonds qu'ils recevront par le biais de FACTOR et de MUSICACTION.
Toutefois, il est très malheureux que l'injection de fonds, qui est bien nécessaire, se fasse aux dépens de ce que nous considérons être un important investissement stratégique dans la diversité culturelle du Canada. Les programmes qui ont été abolis favorisent le développement de nouvelles formes de musique qui ne sont pas nécessairement viables sur le plan économique immédiatement, voire jamais, mais qui pourraient le devenir un de ces jours.
Pourquoi le CAC demande-t-il au gouvernement de chercher de nouveaux fonds pour conserver ces programmes? D'abord, parce qu'en investissant dans ce qui est considéré comme étant marginal aujourd'hui peut contribuer à façonner la culture de demain. Deuxièmement, parce qu'il est important pour le gouvernement fédéral de contribuer au développement des talents naturels inépuisables et incroyables que nous avons; notamment, dans les diverses communautés culturelles qui façonnent le nouveau tissu de la société canadienne.
Nous croyons qu'une des responsabilités du gouvernement fédéral consiste à investir dans l'expérimentation, qui se traduira par de nouvelles formes de musique créées par des artistes canadiens. Cela correspond au capital de risques ou aux investissements dans la recherche fondamentale dans d'autres secteurs de notre économie.
[Français]
Nous croyons par ailleurs que c'est par l'entremise de modestes programmes comme ceux abolis que le Canada s'acquitte à l'intérieur du pays de l'engagement à l'égard de la diversité culturelle que nos gouvernements successifs ont pris en ratifiant, puis en appuyant sur la scène internationale, la Convention 2005 de l'UNESCO. La diversité culturelle commence ici même, en appuyant une créativité de chez nous, qui trouve ses racines dans la riche diversité de notre population.
Quant à l'argument économique, on vous aura présenté plusieurs exemples de genres musicaux ou de musiciens qui sont passés avec succès des programmes gérés par le Conseil des Arts à ceux de FACTOR et de MUSICACTION quand leur réputation les a menés à une forme de rentabilité commerciale. La musique canadienne de tradition celte en est un exemple, de même que des artistes d'origines culturelles diverses dans des genres comme le gospel, le jazz, la musique expérimentale, pour ne pas parler des petits ensembles de musique classique qui n'ont qu'un modeste catalogue d'oeuvres enregistrées. Par ailleurs, l'argument de la rationalisation administrative ne semble pas s'appliquer ici. En effet, sur la foi des informations incluses dans l'évaluation sommative même, faite en 2007 pour le compte de Patrimoine canadien, il n'existerait qu'une très faible proportion de doublons entre les programmes abolis et ceux de FACTOR et MUSICACTION.
Vous avez eu l'occasion de l'entendre mardi dernier ainsi que plus tôt, de la part des artistes qui sont venus témoigner: la somme relativement modeste de 1,3 million de dollars investie dans l'enregistrement et la distribution de la musique dite spécialisée fait toute la différence du monde pour les artistes, créateurs et petits ensembles, dont plusieurs jouissent d'une excellente notoriété, sans pour autant être commercialement rentables, au sens MUSICACTION du terme.
[Traduction]
Le communiqué annonçant la reconduction du Fonds de la musique du Canada et la disparition du programme soutenant la diversité musicale disait ce qui suit:
Les modèles commerciaux de l'industrie de la musique évoluent. Les entreprises qui misaient principalement sur la vente de disques doivent maintenant diversifier leurs sources de revenus (par exemple, en organisant des concerts ou par les ventes d'articles reliés) et se tourner vers les modèles numériques (dont les magasins en ligne, les abonnements, le téléchargement vers les appareils mobiles et l'écoute en continu) pour promouvoir et vendre des enregistrements musicaux.
[Français]
Nous sommes pleinement d'accord sur cette affirmation, et c'est la raison pour laquelle nous avons invité cette semaine le à trouver au minimum la somme de 1,3 million de dollars nécessaire afin de restaurer les programmes abolis, une priorité que nous considérons tout aussi importante que celle consistant à augmenter les budgets des programmes de FACTOR et MUSICACTION au chapitre du développement des marchés.
[Traduction]
De nombreux artistes procèdent déjà à des activités comme l'enregistrement, la présentation de spectacles, la tournée, la promotion et la distribution de leurs produits grâce au soutien d'Internet, mais ils ne peuvent pas faire passer leur travail au prochain niveau de viabilité économique sans l'appui de programmes comme ceux qui ont été supprimés.
Un enregistrement sert de carte professionnelle pour les créateurs et les ensembles spécialisés. Cela permet de faire la promotion d'une tournée et peut ouvrir la voie à une distribution réussie grâce à Internet. Et maintenant, cette deuxième possibilité ne sera peut-être plus à la portée des artistes et des ensembles. Prenons comme exemple concret la disparition des services de distribution des enregistrements sans but lucratif qui étaient gérés par le Centre de musique canadienne et financés grâce au soutien du ministère du Patrimoine canadien. Grâce à 150 000 $ — je le répète, 150 000 $ —, les services de distribution du Centre de la musique canadienne faisaient en sorte que plus de 1 300 titres produits par quelque 200 petites étiquettes indépendantes canadiennes pouvaient être distribués à l'échelle internationale. En regroupant des catalogues trop petits pour être considérés de façon individuelle par les distributeurs, le Centre de musique canadienne a été en mesure de négocier au nom de ces artistes avec des entreprises comme Nexus ou la Independent Online Distribution Alliance, ce qui a permis à ces artistes canadiens d'avoir accès à 300 services de distribution en ligne et à plus de 2 000 services d'abonnement liés aux bibliothèques publiques. Le programme soutient le développement de marchés pour les formats de niche canadiens qui autrement ne pourraient pas rejoindre leur public.
Le Centre de musique canadienne n'aura d'autre choix que de fermer les services de distribution de ces enregistrements si les fonds ne sont pas disponibles à compter du 1er avril 2010, et c'est dans cinq mois.
Nous estimons que 1,3 million de dollars par année est un investissement public très raisonnable pour faire en sorte que les formes d'expression culturelle canadiennes émergentes et expérimentales puissent tirer profit de l'effet ayant d'importantes répercussions de la nouvelle économie Internet.
[Français]
On argumentera peut-être que, s'il s'agit là d'une priorité si importante, le Conseil des Arts, qui dispose depuis l'an dernier d'un budget accru de 30 millions de dollars par année, devrait s'arranger pour trouver l'argent nécessaire au maintien des programmes éliminés. Le problème est que cette solution facile ignore le fait que les 30 millions de dollars ajoutés au budget annuel du Conseil des Arts sont insuffisants pour répondre aux nombreux besoins identifiés, raison pour laquelle la CCA a fait dans le cadre d'autres forums des représentations pour demander que le budget de base du Conseil des Arts soit porté à 300 millions de dollars d'ici 2014.
Demander au Conseil des Arts de combler la disparition d'un programme du ministère du Patrimoine canadien constituerait de facto une forme de coupe, au moment même où il risque de perdre 9 millions de dollars de son budget dans le cadre de l'exercice de révision stratégique exigé par le gouvernement, sans parler des pertes de revenus de sa fondation qui, comme toutes les autres fondations, a souffert de la crise économique.
[Traduction]
Il faut également noter que l'augmentation de 30 millions de dollars a été partiellement compensée par les compressions de 20 millions de dollars qui ont été faites au cours des trois dernières années — mes collègues ici présents ont déjà évoqué ces compressions — et qui touchent des programmes comme PromArt et Routes commerciales, de sorte que le Conseil des arts subit des pressions supplémentaires en essayant de combler les lacunes.
[Français]
C'est donc pour toutes ces raisons qu'au nom de la CCA, j'invite aujourd'hui votre comité à recommander au ministre de tout faire pour trouver ce qui n'est finalement qu'un montant très modeste pour rétablir des programmes qui appuient la recherche et l'innovation en matière de musique canadienne ainsi que l'exploitation et le développement de la diversité culturelle qui caractérise notre population.
Je vous remercie de l'attention que vous avez accordée à cette présentation. Je suis prêt à répondre à vos questions.
J'ai remarqué que cette année, le fonds musical de 2009 est de 27,6 millions de dollars. C'est environ 10 millions de dollars de plus qu'en 2001 — souvenez-vous, je suis néo-démocrate, pas conservatrice — et quatre millions de dollars de plus qu'en 2005. Cela dit, oui, il y a eu une importante compression de 1,25 million de dollars aux fonds pour la diversité. Vous avez peut-être entendu, lorsque j'ai posé mes questions aux autres témoins, que je suis fortement opposée à ce fonds. Je pense à la façon dont nous allons de l'avant dans le budget 2010, le prochain budget, et le Conseil des Arts du Canada a un engagement de 181 millions de dollars, y compris 25 millions de dollars en nouveau financement.
Si, dans un monde idéal, le Conseil des Arts du Canada recevait, par exemple, deux millions de dollars de plus pour la distribution de musique spécialisée et des subventions pour les enregistrements sonores spécialisés pour ceux qui font des compositions canadiennes contemporaines ainsi que des paroles, de la musique, tout ce que les fonds pour la diversité finançaient auparavant, cela nous permettrait-il de nous sortir de l'impasse dans laquelle nous sommes, ou les artistes les plus créatifs, modernes ou émergents — plus d'une centaine d'entre eux — sont incapables d'obtenir des subventions pour commencer leur carrière?
Pourrait-il s'agir de la meilleure façon d'aller de l'avant? Devrions-nous plutôt rétablir ce montant dans le cadre du Fonds canadien pour la musique de 26,6 millions de dollars? Dans un monde idéal, ce montant devrait-il plutôt venir du Conseil des Arts du Canada, grâce à une augmentation de 1,5 million de dollars, par exemple?
:
Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins d'avoir accepté notre invitation.
Je ne vais pas entrer dans les détails du processus de consultation, étant donné que plus de 500 personnes — des artistes, des groupes et d'autres intervenants — ont été consultés.
Je suis d'accord avec vous pour dire que le renouvellement de cinq ans du Fonds de la musique du Canada donne plus de stabilité non seulement au fonds, mais à l'industrie elle-même. Le programme en question concerne moins d'une centaine de subventions par année dans tout le Canada. La plupart des demandeurs reçoivent des fonds d'autres programmes gouvernementaux, et ces autres programmes sont aujourd'hui plus forts en raison de l'investissement dans le Fonds de la musique du Canada.
Près de la moitié des albums produits grâce au soutien du fonds l'an dernier étaient des albums de musique spécialisée. Lors du dernier exercice financier, le fonds a permis de verser plus d'un million de dollars à la musique classique, 1,7 million au jazz, et plus de trois millions à la musique traditionnelle. Outre le Fonds de la musique du Canada, le Conseil des Arts du Canada a un budget de 30 millions de dollars pour la musique, dont neuf millions pour la musique spécialisée. Les artistes qui le désirent ont donc accès à d'autres sources de financement.
Monsieur D'Eith, pouvez-vous nous parler un peu de l'importance, aujourd'hui, de l'investissement dans les différents genres de musique numérique?
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Si vous lisez les journaux, vous savez sans doute que l'industrie du disque tombe en chute libre depuis les cinq ou six dernières années, à cause des téléchargements numériques et de tout le phénomène Internet. Du côté de la vente au détail, les distributeurs, les détaillants et les maisons de disques font faillite. Les plus grandes maisons de disques se débarrassent de leurs opérations de ventes de gros et redeviennent des compagnies de commercialisation.
Ce qui est intéressant, c'est que les artistes sont désormais responsables de leur propre développement. Pour se faire connaître, les étiquettes et les artistes indépendants peuvent utiliser la musique numérique en ligne, qu'ils peuvent vendre légalement par l'entremise de iTunes, des services d'abonnement ou des téléchargements mobiles partout dans le monde.
C'est un nouveau modèle en plein essor. C'est précisément ce dont a besoin l'industrie de la musique. Elle doit augmenter sa capacité de créer de la musique, des ventes et du marketing numériques. Cela lui permettrait de remplacer toutes les ventes traditionnelles que le secteur a perdues ces cinq ou six dernières années. Il s'agit de plusieurs milliards de dollars en pertes de ventes et de plus de 70 000 mises à pied chez les principales étiquettes d'Amérique du Nord. C'est terrible. Ce financement nous permettrait de reconnaître qu'il faut passer à autre chose et se tourner vers la nouvelle technologie, mais nous avons besoin d'aide.
Nous avons l'impression que la question du fonds de diversité de la musique canadienne nous a opposés à l'industrie numérique et au secteur de l'exportation. Ce serait comparer des pommes et des oranges. Il est honteux qu'on ait dit dans un communiqué de presse que l'on prenait l'argent du programme de diversité de la musique canadienne pour le donner au secteur du numérique et au secteur des exportations. Ce genre de déclaration a dressé l'industrie contre le secteur non traditionnel, et nous ne l'acceptons pas. Nous ne sommes pas en concurrence. Nous accueillons ce secteur non traditionnel. C'est bien malheureux qu'on en soit arrivé là. Cependant, les besoins sont réels, ils sont urgents, et il est essentiel d'aider l'industrie de la musique numérique.
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Ce n'est pas quelque chose que je peux faire en 30 secondes et même si vous me donniez une heure, je ne suis pas certain que je serais prêt à répondre à cette question à brûle-pourpoint.
Ce que je dis, c'est que notre société est culturellement diversifiée. Nous n'avons pas décidé d'établir un creuset. Nous essayons de respecter les diverses traditions et les différents contextes culturels de la mosaïque canadienne qui constituent notre société — qui ressemble encore davantage à une mosaïque qu'à l'époque où un livre a été publié là-dessus dans les années 1950 — et nous estimons qu'il faut investir dans cette multiplicité des genres. Je pense qu'une Autochtone de la Saskatchewan est venue témoigner devant vous mardi dernier et elle vous a montré qu'elle fait quelque chose qui est tout à fait inclassable. C'est ça la créativité.
Je ne suis pas d'accord quand on nous dit que 60 p. 100 des gens... Je ne sais pas d'où vient ce pourcentage, mais qu'est-ce que cela peut bien faire si 60 p. 100 des artistes qui ont reçu des fonds de ce programme qui a été aboli ont également reçu des fonds de la part de FACTOR ou de MUSICACTION? Cela démontre tout simplement que leur produit est passé de l'étape créative à la viabilité économique. C'est comme si on disait que 60 p. 100 des gens qui se présentent à l'hôpital pour une crise cardiaque ont déjà fréquenté l'hôpital auparavant — oui, mais c'était pour quelque chose d'autre. C'est ce que mon collègue vous expliquait, c'était pour différentes raisons. Ce fonds, qui était géré par le Conseil des Arts du Canada, mettait l'accent sur la recherche et le développement, de sorte qu'un même artiste peut se retrouver dans un genre de musique qui devient populaire et viable commercialement. Il y a une différence entre une subvention pour la créativité et un prêt pour un projet commercial. Sauf erreur, c'est la nature même du système.
Nous ne disons pas que FACTOR et MUSICACTION sont de mauvaises organisations parce qu'elles examinent les projets du point de vue d'un investissement et du rendement, car cela fait partie de leur mandat. Ce que nous disons, c'est que le Conseil des Arts du Canada examine les projets d'un autre angle.
Soit dit en passant, on parle de 100 artistes. Le fait est que le taux d'acceptation est de 15 p. 100, si je me souviens bien. Autrement dit, 15 p. 100 des artistes qui ont fait une demande dans le cadre de ce fonds ont reçu une subvention. La concurrence est très élevée, seuls les plus qualifiés obtiennent de l'aide. C'est pour cette raison que je dis que je ferais passer les fonds à deux millions de dollars. Vous êtes des parlementaires, vous savez ce que c'est que de devoir choisir. J'ai déjà participé à un système d'évaluation par des pairs, dans d'autres circonstances, et on se retrouve avec 20 personnes sur les 100 artistes qui ont fait une demande qui méritent vraiment de recevoir des fonds, mais il faut arrêter à la dixième personne parce que les fonds ne nous permettent pas de donner davantage de subventions. Cela ne veut pas dire que les autres ne le méritent pas, mais simplement que leur demande n'a pas été acceptée cette fois-ci.
Il s'agit d'un programme qui met l'accent sur l'excellence, et non pas d'un programme destiné à une petite minorité. C'est un programme pour le développement de l'excellence.