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Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, mesdames et messieurs les membres du personnel du comité, bonjour.
Je m'appelle André Bureau; je suis le président du conseil d'administration d'Astral Media. M'accompagnent aujourd'hui John Riley, président d'Astral Télé Réseaux, et Pierre Roy, président des Chaînes Télé Astral.
J'aimerais d'abord remercier le comité de nous avoir invités à participer à cet examen de l'industrie de la télévision, un secteur économique important au Canada et un pilier de l'identité canadienne.
Astral Media est très fière d'être devenue une entreprise médiatique pancanadienne; nous exploitons aujourd'hui 18 chaînes de télévision spécialisée et payante, deux petites stations de télévision affiliées à la CBC ainsi que 82 stations de radio dans l'ensemble du pays. L'un des éléments distinctifs d'Astral Media est qu'elle est une entreprise entièrement bilingue, qui possède des propriétés dans les marchés anglophone et francophone.
Il existe un équilibre « réglementaire » délicat entre les différents joueurs dans l'industrie de la télédiffusion. Jusqu'à maintenant, le comité a entendu les représentants de la télévision généraliste et des entreprises de distribution de radiodiffusion, les EDR. Vous n'avez toutefois pas entendu ceux du secteur de la télévision spécialisée et payante. Nous aimerions profiter de l'occasion pour brosser un tableau de ce secteur et de certains défis particuliers que la conjoncture actuelle comporte. Nous espérons compléter ainsi l'information fournie au comité aujourd'hui.
Avec des revenus de 2,9 milliards de dollars en 2008, la télévision spécialisée et payante est le secteur de l'industrie télévisuelle canadienne qui connaît la croissance la plus rapide. Il y a plus de 180 chaînes canadiennes de télévision spécialisée et payante qui sont offertes maintenant au Canada. Ces chaînes attirent actuellement 42 p. 100 de l'auditoire francophone et 38 p. 100 de l'auditoire anglophone. Ce secteur représente près de 5 500 emplois directs et verse plus de 406 millions de dollars en salaires annuellement.
Le secteur de la télévision spécialisée et payante contribue de manière importante à la création d'émissions canadiennes. En 2008, l'ensemble de ce secteur a investi 1,1 milliard de dollars dans des émissions canadiennes. Mentionnons aussi que 90 p. 100 du financement des télédiffuseurs pour la production de films canadiens provient des chaînes de télévision payante.
Pour placer les choses dans leur contexte, rappelons que la télévision spécialisée et payante a fait son apparition au Canada en raison du développement de la câblodistribution et du fait que les EDR avaient besoin de nouvelles sources exclusives de contenu à offrir à leurs clients et qu'elles devaient justifier les frais qu'elles facturaient pour leurs services. Les politiques de télédiffusion de l'époque favorisaient le développement d'un secteur canadien de télévision spécialisée et payante plutôt que la simple importation au Canada de services étrangers existants, c'est-à-dire américains.
Une vingtaine d'années plus tard, on constate la présence d'un secteur solide, en croissance, qui offre aux Canadiens une diversité de contenus, incluant plusieurs genres d'émissions auxquelles la télévision généraliste n'offre pas une large diffusion, dont les émissions pour enfants et les documentaires. De plus, c'est la télévision spécialisée et payante qui attire le plus large auditoire pour les émissions canadiennes, 55 p. 100 de toutes les émissions canadiennes regardées à la télévision le sont à la télévision spécialisée et payante.
Depuis l'arrivée de la télévision spécialisée et payante, la répartition de l'auditoire a beaucoup changé. Pourquoi? Parce que les Canadiens apprécient nos émissions. Notre secteur s'est développé en offrant aux Canadiens les émissions qu'ils voulaient ou recherchaient. Aussi, ce faisant, la télévision spécialisée et payante est devenue un pivot florissant de l'activité économique, et elle est considérée comme un succès inégalé au niveau international. Elle a permis à des télédiffuseurs canadiens de développer des entreprises rentables, qui emploient des milliers de personnes et qui contribuent de manière importante au produit intérieur brut.
Bien que le secteur de la télévision spécialisée et payante soit rentable et qu'il connaisse une croissance stable, il a aussi ses propres difficultés. Au cours de la présente audience, certains télédiffuseurs généralistes ont laissé entendre que les chaînes spécialisées bénéficient d'un avantage inéquitable, en raison des frais d'abonnement auxquels elles ont accès. Nous aimerions mettre les membres du comité en garde: il ne faudrait pas se pencher sur une règle en particulier sans tenir compte de l'ensemble de la réglementation, laquelle assure un équilibre soigneusement établi entre les diverses composantes du secteur télévisuel. Par exemple, les revenus publicitaires de la télévision généraliste proviennent de sources nationales et locales, alors que la télévision spécialisée ne tire de revenus publicitaires que de sources nationales. Les services de télévision payante — qui comptent pour plus de 50 p. 100 des revenus de télévision d'Astral — n'ont qu'une seule source de revenu, soit les abonnements. La télévision généraliste de langue anglaise bénéficie de la substitution de signaux identiques, ce qui n'est pas le cas pour la télévision spécialisée et payante. La télévision généraliste n'est pas obligée d'engager des dépenses pour offrir des émissions canadiennes, alors que c'est le cas pour la télévision spécialisée et payante. La télévision généraliste bénéficie également de la distribution obligatoire dans le service de base de la câblodistribution et de la radiodiffusion directe à domicile par satellite, ce qui n'est pas le cas pour la télévision spécialisée et payante. En fait, les chaînes de télévision spécialisée et payante n'exercent aucun contrôle sur la manière dont elles sont offertes aux consommateurs. Ce sont les EDR qui définissent les forfaits et qui établissent les prix de détail pour les abonnés.
Il est aussi important de souligner que, depuis 1983, soit depuis 26 ans, la grande majorité des chaînes spécialisées d'Astral n'ont bénéficié d'aucune augmentation de leur tarif de gros, malgré les nombreuses augmentations imposées par les EDR à leurs abonnés.
Avec le phénomène de la consolidation dans les secteurs de la télédiffusion et des télécommunications, les EDR sont aussi devenues de plus en plus intégrées: elles comptent maintenant des chaînes spécialisées, des chaînes généralistes et des services de vidéo sur demande; elles fournissent également les nouvelles plates-formes de consommation de contenu que sont les services de téléphonie mobile et d'Internet. Cette situation comporte des défis pour les chaînes spécialisées et payantes puisque, dans certains cas, les EDR sont devenues aussi des concurrentes. De plus, les forfaits proposés aux abonnés, qui comprennent divers services reliés à la fois à Internet, à la téléphonie et à la télévision, ne sont plus nécessairement axés sur nous.
[Français]
Les dynamiques du marché québécois sont manifestement très différentes du marché canadien de langue anglaise. Premièrement, il est important de rappeler que le Québec est un petit marché qui génère moins de revenus en termes absolus, des revenus qui servent évidemment à financer la création d'émissions. Toutefois, la demande pour des émissions originales d'ici n'en est pas moins grande. Bien au contraire, l'auditoire des émissions conçues et produites localement est fidèle et nombreux.
Les investissements des télédiffuseurs dans la programmation originale sont importants dans ce marché — qu'il s'agisse des investissements d'Astral ou des autres télédiffuseurs. Au cours de l'exercice 2008, les chaînes de télévision spécialisée et payante de langue française d'Astral ont investi plus de 85 millions de dollars en contenu canadien. Étant donné que nous travaillons presque exclusivement avec des producteurs indépendants, une grande partie de ces sommes ont été investies dans le secteur de la production indépendante au Québec. Cela accroît par le fait même les retombées des dollars que nous investissons sur le développement culturel du pays.
Dans le marché québécois, la relation avec les EDR est un défi. En effet, avec sa filiale Vidéotron, Quebecor représente 60 p. 100 des abonnés des entreprises de distribution. Quebecor est aussi la principale télévision généraliste privée, avec sa filiale TVA, et elle exploite un nombre important de services de télévision spécialisée et de vidéo sur demande. C'est pourquoi Astral s'inquiète beaucoup du fait que Quebecor laisse entendre que, si une redevance de distribution est introduite pour la télévision généraliste, les entreprises de distribution devraient avoir le plein pouvoir discrétionnaire de décider d'où proviendraient les fonds destinés à payer les télévisions généralistes, dont sa filiale TVA.
En effet, Quebecor a maintes fois déclaré que si elle devait négocier une redevance de distribution pour les télévisions généralistes, ce montant serait déduit des tarifs versés aux chaînes spécialisées, dans le cadre d'un « soi-disant » rééquilibrage du système. Le 20 avril 2009, Quebecor a réitéré cette position devant votre comité.
Du point de vue économique, il est insensé de permettre à une entreprise de distribution de détourner de l'argent d'un secteur sain et en pleine croissance pour le donner à un secteur plus précaire.
L'industrie télévisuelle canadienne s'est graduellement développée grâce à un équilibre en termes de bénéfices, de droits et d'obligations des différents joueurs. Il est fort possible que nous ayons atteint un point où il est nécessaire de repenser les règles du système. Toutefois, durant 40 ans, nous avons eu le souci constant de maintenir cet équilibre; nous devrions donc agir avec prudence afin d'assurer que les changements proposés soient considérés dans leur ensemble et d'éviter ainsi des conséquences qui n'étaient pas souhaitées.
[Traduction]
Le comité a reçu des renseignements contradictoires sur l'état de la télévision généraliste. Certains parlent de difficultés cycliques, d'autres, de difficultés structurelles. Si les difficultés sont cycliques, des solutions à court terme pourraient s'imposer. Toutefois, si les difficultés sont structurelles, il faudra un examen en profondeur du système. Grâce à son expertise ainsi qu'aux outils et aux renseignements dont il dispose, le CRTC reste l'organisme le mieux placé pour procéder à cet examen structurel.
Nous pensons donc que le comité pourrait recommander les mesures suivantes afin de réduire la pression qui s'exerce actuellement sur la télévision généraliste: premièrement, faire du règlement de la question des droits de licence de la partie II une priorité gouvernementale. Cela représente plusieurs centaines de millions de dollars. Deuxièmement, se pencher sur la question inquiétante de la transition au mode numérique. Il est essentiel d'appuyer des solutions hybrides qui tiennent compte des difficultés particulières que comporte le passage au numérique pour les stations de télévision desservant de petits marchés. Comme cela a été le cas dans d'autres pays, le gouvernement devrait collaborer avec l'industrie afin de trouver des solutions constructives pour l'aider à surmonter les difficultés financières particulières que cause cette transition.
D'autres mesures réglementaires pourraient être prises immédiatement, comme l'indemnisation pour les signaux éloignés, le fonds d'amélioration de la programmation et le droit pour les stations locales d'être diffusées dans leurs marchés locaux, des mesures sur lesquelles se penche actuellement le CRTC avec toutes les balises nécessaires.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, merci de nous avoir accordé la possibilité de comparaître aujourd'hui. Nous serons ravis de répondre à vos questions.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, mesdames et messieurs, je m'appelle John Cassaday, je suis président-directeur général de Corus Entertainment. Je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui.
Avant de commencer, j'aimerais présenter l'équipe qui m'accompagne aujourd'hui. Michael Harris est vice-président-directeur général de CHEX-TV à Peterborough et CHEX-TV-2, qui dessert Oshawa, en Ontario. Sylvie Courtemanche est notre vice-présidente aux relations gouvernementales et Gary Maavara est notre avocat général.
Corus Entertainment est une des plus grandes entreprises média du Canada, qui diffuse à l'échelle locale à la fois à la radio et à la télévision. Nous avons 52 stations de radio et nous sommes le plus grand exploitant canadien de stations aux formules d'actualité ou d'actualité-émissions parlées, sur les marchés anglophone et francophone. À titre d'exemple, ces stations comprennent CJOY à Guelph et CFPL AM980 à London, qui desservent votre circonscription de Perth-Wellington. Les stations de télévision qui diffusent par ondes hertziennes desservent les circonscriptions de deux membres du Cabinet et d'un membre du Comité du patrimoine, M. Del Mastro.
Chacune de nos stations représente une source importante de nouvelles locales et de renseignements sur la collectivité. Nous sommes une composante importante des collectivités locales et nous desservons nos auditoires, les entreprises locales et les gouvernements.
Dans les situations d'urgence locales, comme lors des inondations du Manitoba de cette année ou celles de Peterborough en 2004, nous sommes la source d'information d'urgence la plus fiable. La situation de la grippe nous inquiète tous. Corus dispose depuis quelque temps déjà d'une stratégie en cas de pandémie de grippe et nous fonctionnons actuellement au niveau de préparation 5, conformément à l'échelle établie par l'OMS. Nous faisons cela pour pouvoir continuer à travailler et à informer le public en temps opportun et de façon précise.
Nos stations fournissent également une contribution importante aux organismes de charité locaux tels que Centraide, la Société du timbre de Pâques, les hôpitaux locaux et bien d'autres, par le biais d'émissions spéciales comme les téléthons, mais aussi en offrant de la publicité et de la couverture gratuite pour les événements qu'ils organisent.
Nos stations participent activement à la vie des collectivités dans lesquelles elles se trouvent. Nos émissions d'actualité locales diffusées à l'heure du souper attirent presque la moitié des gens qui regardent la télévision à cette heure-là.
Ces stations de télévision locales ont des partenariats avec la SRC depuis 54 ans. Nous distribuons à notre auditoire le service de nouvelles nationales de la société d'État auquel nous ajoutons un élément important de nouvelles locales, d'affaires publiques et d'autres émissions d'intérêt communautaire.
Si la SRC mettait un terme à cette relation, notre auditoire serait sans doute obligé de capter les signaux en provenance de Toronto et d'Ottawa, qui ne comportent pas ou peu de nouvelles locales. Nous avons été rassurés d'entendre M. Lacroix affirmer la semaine dernière devant le comité que la SRC était prête à maintenir ses relations avec ses filiales, même si les conditions de ces relations ne nous ont pas encore été précisées. Nous sommes impatients d'en parler avec les responsables de la société.
Pour les petites entreprises locales, nous sommes un partenaire publicitaire crucial. Nous créons et distribuons la publicité qui les aide à concurrencer les grandes multinationales qui desservent également leurs marchés. Sans cette relation, ces entreprises auraient plus de difficulté à atteindre leur clientèle.
Corus exploite également plus d'une douzaine de services de télévision spécialisée et payante. Il est un chef de file dans les émissions pour enfants, grâce aux chaînes telles que Treehouse, YTV et Teletoon. Nous offrons également une programmation pour les femmes, au moyen de W Network, de Viva, et de Cosmopolitan Television.
Nous sommes propriétaires de Nelvana, un des premiers producteurs mondiaux d'émissions d'animation pour enfants. Corus a investi plus d'un milliard de dollars dans la production d'émissions canadiennes et nous sommes fiers que nos réseaux de télévision payante et spécialisée offrent les meilleures dramatiques canadiennes, et ce, dans des proportions que nul autre joueur de notre secteur peut égaler.
Ces dernières années, nous cherchons des façons nouvelles et innovatrices de tirer profit de ces nouveaux marchés axés sur la technologie. Notre objectif est d'utiliser diverses plateformes numériques pour livrer directement notre contenu aux téléspectateurs, non seulement au Canada, mais partout dans le monde. Corus fournit du contenu canadien à des canaux multiplateformes, comme KidsCo, en Europe, en Asie et en Afrique, et qubo aux États-Unis, où nous sommes investisseurs en actions.
Corus est également la plus grande maison d'édition de livres pour enfants du Canada.
En conséquence de tout cela, notre production et nos livres sont vendus dans plus de 160 pays, dans plus de 40 langues.
Dans ce contexte, nous comparaissons devant le comité en tant qu'entreprise qui joue des rôles divers dans l'économie canadienne. Corus est une entreprise canadienne particulière. Nous sommes un radiodiffuseur ici et dans le monde, mais nous sommes également un producteur important de contenu, sous de nombreuses formes.
L'objectif principal de votre audience, c'est d'étudier la télédiffusion locale. Mais la télédiffusion locale n'est plus seule. Les marchés de la télévision et des autres médias sont devenus extrêmement complexes. Les compagnies comme Corus qui exploitent les chaînes de télévision locales ont d'autres types d'exploitations qu'ils essaient de faire fonctionner dans ces marchés. Dans ce contexte, Corus estime que la question principale doit être: Comment les politiques du gouvernement peuvent-elles permettre à l'industrie télévisuelle canadienne d'avoir la force et la souplesse qui lui permettront de rester pertinente pour les téléspectateurs, les abonnés et les annonceurs canadiens, alors que nous entrons dans l'ère numérique?
Nous venons ici aujourd'hui avec des pistes de solutions et espérons que nous pourrons vous aider dans ce processus. Corus a confiance en son avenir. La télévision n'est pas finie, mais nous croyons que le gouvernement devrait fournir des orientations politiques stratégiques aux organismes de réglementation tels que le CRTC et la Commission du droit d'auteur du Canada. Lors de nos récentes comparutions devant ces organismes et ministères, nous avons demandé que les politiques et la réglementation soient fondées sur ce que nous appelons les Corus Big Six, les six grands principes de Corus. Nous allons vous les énumérer un par un, après quoi nous vous ferons part de nos recommandations précises.
D'abord, nous recommandons que le gouvernement reconnaisse les avantages qu'il y a à favoriser un secteur canadien florissant et concurrentiel à l'échelle internationale. Il faut reconnaître explicitement que nous évoluons dans un marché mondial, même au niveau de la télédiffusion locale. Évidemment, cela a toujours été le cas pour la télédiffusion traditionnelle. Nos politiques sont fondées sur les réalités de nos petits marchés, qui évoluent en parallèle avec un énorme marché. Les médias numériques augmentent encore ce défi. Aujourd'hui, notre marché voisin, c'est le monde entier, même dans des petites collectivités comme Peterborough ou Timmins. Les organismes de réglementation et le gouvernement devraient harmoniser les politiques et les règles nationales de façon que nous puissions avoir un système vraiment canadien et concurrentiel au niveau mondial. Nous ne pouvons plus protéger notre marché national. Les barrières que nous avons construites pour protéger les médias canadiens peuvent devenir un piège si nous ne prenons pas conscience de ce changement.
Deuxièmement, nous vous encourageons à augmenter les chances de réussite du secteur des médias canadiens en encourageant la création d'entreprises plus grandes et plus fortes. Corus est un joueur important dans le marché canadien, mais, à l'échelle internationale, nous sommes tout petits. Google a dépensé environ 1,5 milliard de dollars américains en R-D en 2007. Ce montant est supérieur aux recettes de tout le secteur de la radio au Canada l'année dernière. Il faut donc reconnaître que ce problème à l'échelle planétaire est encore plus grave dans le numérique qu'il ne l'a été dans la télédiffusion traditionnelle. Cela mine notre capacité de participer pleinement au monde des nouveaux médias. Corus doit investir dans la télédiffusion numérique, ce qui implique des tours et de l'équipement numérique. Mais, pour participer aux marchés numériques, nous devons également nous attaquer à la question fondamentale de la gestion de ces droits numériques. Il faut investir massivement dans la technologie pour assurer le suivi et la protection de nos droits, et il faut également former nos employés pour qu'ils puissent utiliser cette technologie.
Troisièmement, nous devons concevoir une stratégie canadienne pour la production de contenu canadien. Comme cela a été le cas pour d'autres secteurs, nous devons regarder notre milieu d'un point de vue stratégique. Il s'agit de décider des priorités à adopter pour le système. Par exemple, il faut songer à adopter en priorité une politique qui favorise la création de contenu canadien de haute qualité par tous les producteurs canadiens, y compris ceux qui sont associés aux diffuseurs canadiens.
Quatrièmement, nous devons reconnaître que c'est la réussite des entreprises privées qui permettra un secteur culturel plus fort au Canada, et non pas le système actuel des tarifs, conditions et frais progressifs.
Cinquièmement, il faut permettre aux Canadiens de faire leurs expériences. Il est essentiel de reconnaître ce principe dans le monde des médias numériques. Par leur nature même, les initiatives de médias numériques sont risquées, les plans d'affaires sont incertains et la réussite s'obtient par tâtonnement. Dans ce genre d'environnement dynamique, nous devons pouvoir faire nos expériences. La réglementation des activités de médias numériques, même si elle est bien intentionnée, ne fera que miner notre capacité de participer à ces nouveaux marchés.
Sixièmement, il faut reconnaître que notre petit marché exige un soutien continu du gouvernement par le biais de la recherche, du développement et du respect de la propriété intellectuelle. Dans le contexte de cette perspective stratégique, nous avons plusieurs recommandations tactiques précises, ou solutions, dont nous aimerions vous parler aujourd'hui.
D'abord, notre investissement dans les technologies de gestion des droits numériques et dans leur application devrait être couvert par le crédit pour dépenses en programmation canadienne.
Deuxièmement, nos dépenses en immobilisations, pour les tours et les autres technologies de radiodiffusion numérique, devraient être couvertes par la déduction accélérée pour amortissement ainsi que le financement du gouvernement.
Troisièmement, le comité devrait recommander l'élimination des quotas artificiels qui exigent aux radiodiffuseurs d'acquérir de gros pourcentages de leur programmation de producteurs indépendants. Les entreprises médiatiques du Canada devraient au moins ne pas être confrontées à des obstacles à la création et à la distribution de contenu canadien de haute qualité, celui dont on parle dans la Loi sur la radiodiffusion. Nous pouvons créer un secteur de production viable, au profit des téléspectateurs, des écrivains, des interprètes et de l'économie canadienne.
Quatrièmement, nous recommandons l'abolition et le remboursement des frais du CRTC assujettis à la partie II, ce qui serait une mesure positive qui profiterait aux radiodiffuseurs locaux et aux autres joueurs du secteur.
Cinquièmement, nous recommandons un assouplissement de l'interdiction de la publicité des produits pharmaceutiques. Les Canadiens reçoivent toute une pléthore de messages comme ceux-ci sur les chaînes étrangères. En permettant cette publicité au Canada, nous créerions une autre source de revenu, estimée à 400 millions de dollars, mais nous pourrions également assujettir ces messages au droit canadien et aux normes canadiennes du secteur pharmaceutique.
Sixièmement, nous recommandons un crédit d'impôt temporaire d'un à trois ans sur la publicité pour 10 p. 100 de la publicité canadienne. Cela permettrait de stimuler l'économie de façon générale et donnerait un sérieux coup de main aux radiodiffuseurs locaux.
Septièmement, nous encourageons CBC/Radio-Canada à maintenir leurs ententes avec les filiales locales. De cette façon, CBC/Radio-Canada restera proche des contribuables canadiens au niveau local.
Huitièmement, la vente de publicité télévisuelle locale devrait continuer à concerner les radiodiffuseurs privés. La proposition visant à permettre aux entreprises de télécommunications de vendre des publicités canadiennes locales aux chaînes étrangères aurait une incidence considérable sur les radiodiffuseurs locaux, à la fois à la radio et à la télévision.
Neuvièmement, le comité connaît l'engagement des stations locales envers leurs communautés et les organismes de charité au Canada. Les radiodiffuseurs devraient pouvoir déduire les dons de temps d'antenne en tant que dons de bienfaisance en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu.
Voilà certaines des choses que le comité pourrait recommander au gouvernement afin que les radiodiffuseurs canadiens restent concurrentiels et pertinents.
Au sujet des tarifs de distribution, tout changement exigera une analyse approfondie et des discussions de tous les éléments du système, comme mon collègue, M. Bureau, l'a dit. Les négociations d'un régime de tarif devraient se faire dans ce contexte également. Ce n'est pas quelque chose qui peut être imposé et décidé en vase clos.
Pour conclure, nous félicitons le ministre du Patrimoine canadien pour son engagement au Fonds des médias du Canada. Ce financement, et les modifications au programme nous permettront de continuer à raconter des histoires canadiennes dans le nouvel environnement numérique.
Monsieur le président, membres du Comité du patrimoine, c'étaient nos remarques liminaires. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.
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Bonjour, monsieur le président.
[Français]
Honorables membres du comité, mesdames, messieurs, je m'appelle Michel Roy. Je suis le président du conseil de Téléfilm Canada et je suis accompagné aujourd'hui de notre directeur général, M. Wayne Clarkson.
Tout d'abord, permettez-moi de remercier le comité de nous donner l'occasion de comparaître devant vous pour partager les opinions de Téléfilm au sujet de votre étude sur l'évolution de l'avenir de la télévision.
Nous croyons que vous avez abordé un processus d'analyse très important pour l'avenir du système télévisuel canadien. La viabilité de la télévision locale contribue largement à la stabilité et à la santé de l'ensemble du système de télédiffusion et profite à tous les intervenants de l'industrie dans toutes les communautés du pays.
En tant qu'investisseur, au nom du gouvernement canadien, dans la création de contenu canadien produit de manière indépendante, Téléfilm Canada a un intérêt direct dans le maintien d'un système de télédiffusion solide. Le rôle de Téléfilm Canada, comme vous le savez, est de promouvoir la création de contenu canadien, quelle que soit la plateforme. À titre d'administrateur de programmes de développement culturel dont la valeur atteint près de 400 millions de dollars par année, Téléfilm est l'instrument financier privilégié du gouvernement pour encourager et appuyer les producteurs, les distributeurs, les auteurs, les réalisateurs et autres créateurs du secteur privé de l'industrie audiovisuelle canadienne. Par exemple, nous gérons le Fonds du long métrage du Canada, le Fonds des nouveaux médias du Canada et le Fonds canadien de télévision. Nous gérons le Fonds des nouveaux médias moyennant une entente avec Patrimoine Canadien, tandis que nous avons une entente avec le Fonds canadien de télévision pour gérer leur fonds et, comme vous le savez, on a déjà annoncé que ces deux fonds seraient éventuellement fusionnés pour ne former qu'un seul fonds, à compter d'avril prochain, qui porterait le nom de Fonds des médias du Canada. L'ampleur et la nature de nos responsabilités exigent une gouvernance exemplaire, et je me suis donné comme mission personnelle, au cours de la première année de mon mandat à titre de président du conseil, de solidifier et de stabiliser la gouvernance d'entreprise. Nous avons maintenant un conseil d'administration solide et chevronné qui veille à ce que les fonds publics et privés que nous administrons soient gérés avec une efficience et une efficacité optimales.
Il y a quelques semaines à peine, M. Clarkson et moi-même, en présence des membres de ce conseil d'administration, avons rencontré l'industrie à Montréal et dans tout le pays, dans le cadre d'une webdiffusion en direct. Nous avons réitéré notre engagement de travailler avec tous nos partenaires pour que le contenu canadien de haute qualité continue de rejoindre ses divers auditoires sur la plateforme de leur choix.
À notre avis, les éléments qui ont jusqu'à maintenant contribué à la prospérité de l'industrie audiovisuelle et à la création d'oeuvres couronnées de prix résultaient de partenariats fructueux entre des Canadiens talentueux, des producteurs et des télédiffuseurs indépendants et des organismes gouvernementaux de financement. Ces partenariats aident les producteurs de contenu canadien à obtenir le financement nécessaire à la production d'oeuvres que les auditoires apprécient. Comme vous le savez, le financement du contenu canadien demeure l'un des plus grands défis pour cette industrie. Or, les télédiffuseurs occupent une place essentielle parmi les nombreux joueurs qui contribuent au financement du contenu canadien.
La télévision offre davantage d'occasions de travail aux créateurs de talents et assure une main-d'oeuvre créative hautement qualifiée aux secteurs connexes tel que le long métrage. Les producteurs, les auteurs et les réalisateurs traversent constamment et avec succès la frontière poreuse entre le cinéma et la télévision. Au cours de leur carrière, des artistes populaires comme Paul Gross, Patrick Huard et Sarah Polley sont apparus sur le grand comme sur le petit écran, ce qui leur a assuré un statut de star auprès d'auditoires différents.
Plusieurs scénaristes et réalisateurs se sont fait les dents à la télévision. Benoît Guichard, le scénariste de Nitro, a débuté dans des vidéos musicales. Avant de faire Bordeline, Lyne Charlebois a réalisé de nombreuses émissions pour la télévision, incluant la série à succès Nos étés.
La télévision canadienne — incluant la télévision conventionnelle CBC/Radio-Canada, la télévision payante et les vidéos sur demande — s'est avérée une plateforme essentielle pour soutenir notre industrie cinématographique nationale, grâce en grande partie aux exigences réglementaires sur le contenu canadien.
[Traduction]
Il ne fait aucun doute que la télévision conventionnelle se heurte à des défis. L'évolution des technologies audiovisuelles a profondément changé la manière dont les Canadiens communiquent, s'expriment et interagissent à travers différents médias. Un observateur a décrit ainsi les changements qui surviennent « tout est en train de sortir de contenants ».
Le modèle de rentabilité de la télévision conventionnelle a changé considérablement avec l'expansion des choix de plates-formes et cette fragmentation entraîne une érosion continue des recettes publicitaires et des revenus des télédiffuseurs. De nouveaux modèles d'affaires sont maintenant requis pour mouvoir ces contenants.
Ironiquement, cette période de grands bouleversements pour la télévision canadienne offre aussi de grandes opportunités aux producteurs de contenu canadien, comme le démontre la popularité d'une dramatique canadienne telle que Flashpoint, coproduite par Anne-Marie Latraverse et Bill Mustos avec les États-Unis. Dernièrement, Roger Frappier de Maxfilms, un producteur de longue date, et Karine Martin de MediaBiz, ont conclu une entente avec le producteur allemand Eva pour la production de 12 téléfilms à suspense.
Pour préserver la capacité de produire une programmation canadienne de grande qualité que les Canadiens voudront regarder, les producteurs canadiens doivent avoir accès à des ressources financières internationales. L'une des principales priorités du conseil d'administration de Téléfilm Canada est précisément d'aider les producteurs à attirer plus de financement international et d'assurer la croissance continue du secteur audiovisuel canadien.
Le système de télédiffusion canadien et son utilisation des différentes technologies audiovisuelles doivent rester pertinents dans un environnement numérique mondial. Les innovations des nouvelles technologies ont déjà provoqué des changements fondamentaux dans les modes de consommation du contenu. Les bouleversements qui résultent de l'exploitation des plates-formes numériques seront encore plus profonds.
À cet égard, avec la création du Fonds des médias du Canada, le ministre Moore a pris une très sage décision en décrétant que le fonds devrait appuyer la production de contenu canadien pour toutes les plates-formes, incluant les médias numériques interactifs. Il existe, sans aucun doute, une continuité entre les médias traditionnels et les nouveaux médias — appuyer les deux, c'est adopter un nouvel environnement.
[Français]
Téléfilm espère que le dialogue amorcé par votre comité au moyen de cette révision ne perdra pas de vue l'importance du maintien d'un fort contenu canadien dans le paysage audiovisuel. Un environnement sain garantira que les jeunes Canadiens talentueux continueront de trouver du travail et des occasions de production dans leurs communautés respectives. Nous avons constaté à maintes et maintes reprises que les histoires fascinantes ancrées dans les diverses communautés constituent les divertissements les plus mémorables.
[Traduction]
Pour conclure, monsieur le président, nous comprenons que la télédiffusion engendre des recettes pour un certain nombre de joueurs, dont chacun joue un rôle dans le système et veut recevoir la part de ces recettes qui lui revient. Quoi qu'il en soit, et compte tenu de l'incidence culturelle considérable de la télévision sur la population canadienne, Téléfilm considère qu'il faut prendre toutes les mesures nécessaires pour conserver au sein du système de radiodiffusion canadien une part importante de contenu canadien.
[Français]
Merci de votre attention. Il nous fera plaisir de répondre à vos questions.
Nous sommes à la page 3.
Notre système de radiodiffusion offre des centaines de choix, dont la majorité est constituée de choix canadiens. Il est clairement le préféré des Canadiens. Aujourd'hui, nous avons plus de choix par habitant que les gens vivant aux États-Unis, au Royaume-Uni, en France et en Australie. Malgré cette fragmentation, les chaînes canadiennes obtiennent 70 p. 100 des cotes d'écoute de la télévision au Canada. En ce qui concerne les services de langue française, ce taux monte à plus de 95 p. 100.
La télévision privée a consacré 385 millions de dollars, l'an dernier, à la programmation produite à l'échelle locale. Ces chiffres impressionnants ont permis d'offrir des services aux collectivités partout au pays. Au cours des 10 dernières années, la télévision privée conventionnelle a consacré plus de 90 millions de dollars à une multitude d'initiatives liées à la programmation canadienne, au perfectionnement des compétences et à d'autres initiatives, grâce aux avantages tangibles découlant des transactions de propriété. Un autre montant de 51 millions de dollars a été consacré au sous-titrage codé et à la vidéodescription.
Finalement, en 2007-2008, les radiodiffuseurs privés ont consacré 314 millions de dollars et 230 000 heures aux collectivités qu'ils desservent, par le biais de dons, de temps bénévole et de messages d'intérêt public. C'est probablement l'aspect que vous et vos électeurs voyez le plus: des radiothons ou dîners et activités en vue de réunir des fonds. Les radiodiffuseurs privés établissent un lien avec leurs collectivités en leur apportant un soutien substantiel et irremplaçable.
[Traduction]
Je vais passer à la page 6.
Vos audiences sont axées sur la télévision locale. Pour la télévision conventionnelle privée, il y a longtemps que le marché de la publicité locale stagne. Au fil du temps, la part de la publicité nationale dans le modèle d'affaires des télévisions privées conventionnelles a continué d'augmenter. Ce sont les augmentations des recettes de publicité nationale qui permettent aux stations privées de télévision conventionnelle d'augmenter l'argent qu'elles consacrent à la programmation canadienne, y compris la programmation locale.
S'agit-il seulement d'un autre cycle d'affaires? La publicité, dont provient l'essentiel des recettes de la télévision privée, a graduellement délaissé la télévision conventionnelle au cours des 15 dernières années. Cette lente érosion de la part du marché de publicité ne sera pas compensée dans le prochain cycle d'affaires. Le Canada ne constitue d'ailleurs pas une exception à cet égard: aux États-Unis, l'érosion de la part de la télévision conventionnelle dans le marché publicitaire est encore plus marquée.
Où vont les recettes publicitaires? Avec la fragmentation du marché publicitaire au fil du temps, ces recettes vont aux télévisions spécialisées et à Internet.
Je passe à présent à la page 8, pour m'attacher à la publicité à l'échelle locale. Vous vous souviendrez que toutes les recettes publicitaires de la télévision locale stagnent depuis 15 ans. En matière de part du marché publicitaire, plus cela va, moins la part de la télévision dans le marché publicitaire au niveau local est importante. D'autres médias et d'autres supports publicitaires, comme Internet, capturent une plus grande part des recettes publicitaires au niveau local. On ne peut pas considérer qu'il s'agit d'une petite anomalie passagère du cycle économique.
De plus, le coût d'autres types de programmation canadienne appuyée par la politique et la réglementation publiques augmente plus rapidement que les recettes de la télévision conventionnelle. Par exemple, au cours des cinq dernières années, le coût des dramatiques de langue anglaise ont augmenté d'environ 11 p. 100 par an, tandis que les recettes de la télévision conventionnelle augmentaient, elles, de moins de 1 p. 100. Il en va de même pour les coûts de production des variétés et des arts de la scène de langue française, qui ont augmenté d'environ 15 p. 100 par an. Les coûts de production augmentant plus vite que les recettes, la télévision privée conventionnelle est en but à une pression de plus.
Les 21 stations de télévision privée les plus importantes, qui ont engrangé de modestes profits de 4,8 p. 100 en 2008, ont étayé les pertes de 78 stations plus petites qui, prises ensemble, ont eu l'an dernier une marge de profit négative de 13 p. 100. Les plus grosses sociétés, qui détiennent à la fois de grandes et de petites stations, avancent qu'elles ne peuvent pas continuer à interfinancer des stations qui perdent de l'argent. Quant aux plus petites sociétés, qui exploitent souvent de plus petites stations, elles sont dans une position précaire.
La fragmentation des auditoires, le déclin de la part du marché publicitaire et l'augmentation des frais de programmation constituent certains des éléments de la transformation structurelle de la télévision locale. Le passage au numérique et les coûts de 327 millions de dollars que cela entraîne pour le secteur privé rendent la transformation encore plus épineuse dans les 12 mois qui viennent.
Pierre-Louis, voudriez-vous continuer?
Nous avons cinq recommandations pour le comité. Premièrement, fournir un soutien à la programmation locale. Le CRTC continue de discuter de la structure et du montant du Fonds pour l'amélioration de la programmation locale ou FAPL. Certaines parties ont recommandé une augmentation du montant, en vertu du déclin des recettes et du modèle d'affaires intenable des télévisions radiodiffusées locales. Avec la proposition actuelle du CRTC, selon laquelle le FAPL toucherait 1 p. 100 des recettes des entreprises de distribution de radiodiffusion, les EDR, le FAPL ne suffirait pas à résoudre à lui seul les pressions que subissent les télévisions locales. Mais il apporterait des fonds nécessaires, notamment pour les stations qui desservent moins d'un million d'auditeurs, afin de stimuler la programmation locale, notamment les nouvelles. L'ACR est donc en faveur d'un fonds qui aidera ces stations.
Notre deuxième recommandation porte sur la distribution des signaux. Les diffuseurs privés ont besoin de tous les signaux locaux acheminés par VTH, ainsi que d'une compensation quand ces signaux sont distribués hors de leur marché local. Les diffuseurs, grands et petits, y voient un élément essentiel du cadre de politiques. Les diffuseurs et les députés ont demandé à ce que les stations de télévision locale soient distribuées dans leur marché local. Le gouvernement et le CRTC devraient exiger la remédiation à la distribution pour toutes les stations locales, à Medicine Hat comme à Rouyn ou à Rivière-du-Loup.
La distribution de signaux éloignés constitue, d'autre part, un manque à gagner pour les stations locales. L'ACR estime à 70 millions de dollars les recettes publicitaires perdues en 2005-2006 seulement, du fait de la distribution de signaux canadiens éloignés par le secteur des télédiffuseurs. Or, les EDR ont octroyé aux diffuseurs 10 millions de dollars pour compenser cette perte, ce qui n'est manifestement pas une proportion acceptable. C'est pourquoi les diffuseurs ont demandé le droit d'exercer un contrôle sur la distribution de leurs signaux hors de leur marché.
Notre troisième recommandation porte sur la conversion à la télévision numérique. Le gouvernement a fixé, comme le sait le comité, la date du 31 août 2011 comme limite du passage de l'analogue au numérique pour les signaux de télévision. Les diffuseurs demandent la collaboration de l'industrie pour mettre en place un modèle hybride. Un modèle hybride diminuerait beaucoup le coût de la conversion. Il serait approprié de demander un financement de la conversion à un transmetteur numérique pour les diffuseurs, vu que la conversion est exigée par le gouvernement. Selon le modèle choisi, ce soutien financier serait quantifié. Il est aussi important que la campagne d'information des consommateurs visant à informer les téléspectateurs du changement soit menée et appuyée par le gouvernement.
Notre quatrième recommandation porte sur les droits de licence de la partie II. Les diffuseurs, les distributeurs et le CRTC ont tous recommandé l'élimination du régime de droits de licence de la partie II. Ces droits se chiffrent à 100 millions de dollars par an, montant que les diffuseurs contestent comme étant une taxe illégale qui nuit à leur bénéfice net et va au Trésor, sans être réinvesti dans le système de radiodiffusion. Votre comité devrait recommander une abolition immédiate du régime de la partie II.
Dernière recommandation: le rajustement du financement de CBC/Radio-Canada. Nos membres appuient pleinement CBC/Radio-Canada comme composante clé du système de diffusion canadien. Il est essentiel de veiller à donner à CBC/Radio-Canada un mandat et une structure de financement clairs. Nos membres estiment que le temps est venu d'envisager de changer la façon inappropriée dont CBC/Radio-Canada s'appuie sur des recettes de publicité commerciale et sur des crédits gouvernementaux. L'approche quasi commerciale met le télédiffuseur public en compétition directe avec le secteur privé, ces décisions de programmation obéissant à la nécessité d'élargir au maximum son audience, afin d'engendrer des recettes publicitaires. Si l'on changeait la capacité de la Société Radio-Canada à faire appel à des recettes publicitaires, il faudrait bien entendu lui accorder des crédits parlementaires plus importants.
[Français]
Monsieur le président, membres du comité, dans l'ensemble, les radiodiffuseurs privés sont d'avis qu'il faut passer à l'action, tant dans le domaine des politiques que dans celui de la réglementation, afin de faire face aux défis qu'affronte la télévision locale.
Pour terminer, l'ACR n'a pas pris position sur la question du tarif de distribution ou fee-for-carriage. Les entreprises membres de l'organisation ou de l'association ont abordé cet enjeu individuellement avec vous. Il nous fera plaisir, par ailleurs, de répondre à vos questions.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs du comité, si nous sommes ici aujourd’hui devant vous, c’est pour vous rappeler que la Loi sur la radiodiffusion a prévu que le système canadien était composé de trois éléments : le public, le privé et le communautaire. Nous sommes des représentants de ce tiers secteur qu’est le communautaire.
Les télévisions que nous représentons sont des entités sans but lucratif mises en place par les membres de leurs communautés. Elles sont des joueurs médiatiques qui offrent, à leur manière et à la mesure des faibles moyens financiers qui leur sont dévolus, de l’information locale. Les télévisions communautaires autonomes — appelées TVC — font partie de la diversité des voix en information. Elles ont maintenant besoin d’être mieux soutenues financièrement.
Les TVC accueillent de nombreux bénévoles qu'elles forment à maintes tâches, soit quant aux aspects techniques de la production, à l'animation ou en tant que membres d'un conseil d'administration. La télévision communautaire se veut un média à la portée de tous, accessible et proche de ses gens. Ce média est nécessaire au développement économique, social et culturel de son milieu.
Le budget total annuel d’une TVC est très variable. Selon nos dernières données, il se chiffrait entre 30 000 $ et 400 000 $. Les principales sources de financement des TVC sont les suivantes, mais pas nécessairement dans cet ordre : les activités d’autofinancement, les campagnes de recrutement de membres, la publicité du gouvernement du Québec, le programme de soutien au fonctionnement des médias communautaires du gouvernement du Québec, la vente de commandites de prestige locales et les contributions de câblodistributeurs. Nous reviendrons sur cette dernière source un peu plus loin.
Vous le savez sans doute, l’élément communautaire n’a pas connu que des heures de gloire. Loin de là! Après la première révision du Règlement sur la distribution de radiodiffusion, en 1998, des collectivités canadiennes ont perdu l’accès à leur canal communautaire, devenu un avantage concurrentiel pour les entreprises de câble qui devaient dorénavant concurrencer les nouveaux venus, telles les entreprises de distribution par satellite. C’était le droit des citoyens et citoyennes à un espace à la télévision qui était remis en question.
En 2000 et en 2001, à la suite de pressions des TVC, de la fédération et de plusieurs autres intervenants, le CRTC lançait une révision de la Politique relative au canal communautaire. Le résultat de cette révision fut la publication du Cadre stratégique pour les médias communautaires, le 10 octobre 2002, sous l'Avis public de radiodiffusion CRTC 2002-61. Dans cette nouvelle politique, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes — le CRTC — reconnaissait enfin l’apport des TVC autonomes dans le système canadien de radiodiffusion et inscrivait formellement ces dernières dans le nouveau cadre stratégique comme des entreprises favorisant l’accès des communautés à la programmation communautaire. Les TVC autonomes du Québec pouvaient qualifier cette reconnaissance de gain historique sans précédent.
Outre la reconnaissance des TVC autonomes, le cadre stratégique a mis en place des balises d’exploitation du canal communautaire lorsqu’il est maintenu par des entreprises de câble. Toutefois, cette reconnaissance n'a pas obligé pour autant les cablôdistributeurs à financer les TVC pour la programmation locale et d'accès qu'elles produisent. Pourtant, si un câblodistributeur décide de maintenir un canal communautaire, il peut, grâce aux dispositions de l’article 29 du Règlement sur la distribution de radiodiffusion, déduire une partie du pourcentage de ses revenus bruts devant aller à la programmation canadienne, ou la totalité, pour financer la programmation communautaire. Or, plusieurs câblodistributeurs préfèrent garder l’argent pour leurs propres équipes de production, et rien ou très peu va aux TVC autonomes.
Nous remarquons que puisqu’il n’y a pas d’obligation de financement, cette contribution est inégale d’un câblodistributeur à un autre, d’une TVC à une autre, et beaucoup d’entre elles ne reçoivent absolument rien. Il faut trouver une manière adéquate de financer les télévisions communautaires locales et indépendantes. Nous croyons que la solution passe par la création d’un fonds dédié à la programmation communautaire locale et d’accès.
Mon collègue M. Gérald Gauthier, de la Fédération des télévisions communautaires autonomes du Québec, va continuer.
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Il semble donc évident à plusieurs que la création d’un fonds dédié à la programmation communautaire locale et d’accès permettrait de résoudre les problèmes de sous-financement que connaissent les groupes qui produisent ces programmations. C’est aussi l’avis de la fédération. De plus, si un tel fonds était doté d’un volet de financement aux infrastructures, nul doute qu’on observerait un intérêt accru de diverses organisations locales pour l’obtention d’une licence d’entreprise de programmation de télévision communautaire axée sur la communauté, qu'elle soit de faible puissance ou numérique.
Récemment, le CRTC a annoncé la création du Fonds pour l’amélioration de la programmation locale (FAPL). Quelles ont été pour nous la surprise et la stupéfaction de la mise en place d’un tel fonds qui doit d’abord servir aux télédiffuseurs locaux privés! Nous avons pourtant reconnu dans ce fonds l’essence même de ce que nous revendiquions depuis plus de huit années, mais qui servira à d’autres.
Même si le CRTC a indiqué qu’il analysera la pertinence d’ouvrir le fonds aux producteurs communautaires, nous pouvons d’ores et déjà affirmer qu’il ne sera pas à même de répondre adéquatement aux besoins des télédiffuseurs privés. Le montant de 60 millions de dollars est celui que nous estimions nécessaire pour la production communautaire indépendante au Canada. Comment 60 millions de dollars pourront-ils être suffisants pour satisfaire à la fois les besoins financiers des télédiffuseurs privés et des producteurs communautaires? Même en considérant que le fonds obtiendrait le double du financement prévu, il demeure que sa structure engendrerait des querelles permanentes entre les télédiffuseurs privés et les producteurs communautaires. La quadrature du cercle sera impossible à trouver s’il n’y a pas la création d’un deuxième fonds.
Depuis 2002, les télévisions communautaires ont la possibilité de présenter des messages de commandite assortis d'une présentation visuelle animée maximale de 15 secondes. Or, ces types de publicité ne permettent pas de montrer la marchandise ni les prix. Ce principe restrictif prive les TVC de revenus intéressants des commerçants locaux qui voudraient s’annoncer à la télévision à un prix abordable. C'est pourquoi la fédération revendique auprès du CRTC un assouplissement de 12 minutes de publicité conventionnelle, commerciale et locale.
Les TVC autonomes ont besoin de nouvelles sources de revenus afin d’améliorer l’offre de programmation locale et d’accès, en nombre et en qualité. Cependant, elles ont aussi un urgent besoin de nouvelles sources de financement pour suivre l’évolution technologique qui nous oblige à nous adapter à ce passage qu’est celui vers le numérique et la haute définition.
La fédération favorise un financement par la publicité parce qu’en raison de la structure sans but lucratif des TVC, les revenus qui en découleraient seraient affectés entièrement à la programmation locale et d’accès et aux mises à niveau technologiques nécessaires à la production en numérique.
Le canal communautaire, en tant qu’outil de communication et d’information de proximité, devrait pouvoir favoriser le développement local et contribuer à la diminution des fuites commerciales. Pour ce faire, nous aimerions que vous recommandiez au CRTC de revoir les dispositions du paragraphe 27(1) du règlement qui restreignent le type de messages publicitaires pouvant être distribués sur le canal communautaire.
Le CRTC a observé que les différentes instances qu’il a mises en place depuis près de trois ans ont fait réagir les artisans de la télévision communautaire de partout au pays et particulièrement ceux du Québec. Les instances portant sur la diversité des voix, le Fonds canadien de télévision et sur la révision réglementaire de la distribution de radiodiffusion ont catalysé encore plus les inquiétudes du milieu de la télévision communautaire. C'est pourquoi l’organisme de surveillance a d’ores et déjà annoncé qu’il y aura un examen spécifique portant sur la diffusion communautaire, à l’automne 2009.
Cette révision doit devenir le fer de lance d’une consolidation de l’élément communautaire tel que reconnu dans la Loi sur la radiodiffusion. Il ne faudrait pas qu’au terme de l’exercice, on observe un affaiblissement de la radiodiffusion communautaire télévisuelle. Le Comité permanent du Patrimoine canadien doit prendre une part active au débat en envoyant un message clair aux citoyens canadiens à l'effet qu'il défendra le maintien et la consolidation d’un système de radiodiffusion communautaire fort.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs, je veux d'abord vous remercier de votre aimable invitation à venir partager avec vous idées et préoccupations concernant l'avenir de la télévision au Canada et les conséquences de nos décisions futures pour nos concitoyens.
Comme le temps nous est compté, je n'aborderai pas ici tous les sujets qui nous ont été soumis, mais je suis disponible, dans la mesure de mes connaissances, pour répondre à vos questions.
Je voudrais aussi, un peu comme mon collègue, attirer votre attention sur ces télévisions qu'on oublie souvent dans nos débats sur l'avenir des grands systèmes et qui jouent un rôle essentiel pour assurer la diversité tant auprès des jeunes que des communautés locales, les télévisions éducatives.
Créées par les provinces et financées en totalité ou en très grande partie par celles-ci, les télévisions éducatives sont expressément mentionnées dans la Loi sur la radiodiffusion comme une composante essentielle et distincte du système de radiodiffusion. Au nombre de cinq, elles sont regroupées dans l'Association des télédiffuseurs éducatifs du Canada. Ce sont Knowledge en Colombie-Britannique, SCN en Saskatchewan, Télé-Québec au Québec, TVO et TFO en Ontario.
Dans toutes les discussions que vous avez entendues ici, elles ont été mises de côté ou ignorées. Ce sont des télévisions publiques, mais ce n'est pas CBC/Radio-Canada, la télévision publique nationale. Bien qu'elles soient régies par les lois fédérales et obtiennent leur licence du CRTC, leur mandat est provincial. Elles font partie des télévisions conventionnelles, mais ne sont membres d'aucun grand groupe intégré qui domine l'industrie. Elles ont des mandats spécifiques et ciblés, sont distribuées par voie hertzienne ou sur le câble, mais ne font pas partie des chaînes spécialisées et, par conséquent, n'ont pas accès aux économies d'échelle et aux redevances. Elles s'adressent prioritairement aux populations de leur région et souvent ne sont pas distribuées à l'extérieur de leur province, mais elles ne sont pas considérées comme des télévisions locales, parce qu'elles ne font pas de nouvelles ou parce que leur zone de rayonnement dépasse un million d'habitants.
Or, ces télévisions, il est important de le souligner, contribuent davantage à la diversité que nombre de télévisions dites locales, puisque la totalité de leur programmation, et non seulement les bulletins d'information, s'adressent à une population définie régionalement. Ce sont les seules, à l'exception de CBC/Radio-Canada, à offrir gratuitement aux enfants et à leurs parents une abondance d'émissions pour enfants sans violence et orientées vers leur développement et leur épanouissement. Ce sont les seules à avoir pour mandat le reflet régional que ces télévisions s'efforcent de remplir à la mesure de leurs ressources en mettant l'accent sur la production et la diffusion de documentaires, séries et émissions d'affaires publiques qui visent à refléter leur région et à faire connaître les résidents d'une même province les uns aux autres.
Pour Télé-Québec, la situation peut sembler différente, puisque les chaînes francophones s'adressent prioritairement à un public québécois. Mais la loi de Télé-Québec lui demande explicitement de refléter les réalités régionales et la diversité de la société québécoise. Elle s'implique dans les régions par la production d'émissions d'affaires publiques, capsules promotionnelles d'activités culturelles, la production et diffusion de séries documentaires, dramatiques, variétés et la présence d'interlocuteurs dans toutes les régions. Avec ses neuf bureaux situés en région, elle est engagée dans plus de 250 partenariats. Enfin, son association avec Canal Savoir amène à l'écran nombre d'activités d'enseignement supérieur et d'organismes éducatifs et culturels en région.
Quels sont les enjeux importants pour les télévisions éducatives? Comme l'ensemble des télédiffuseurs qui se sont présentés devant vous, les télévisions éducatives doivent maintenir un niveau de ressources adéquat pour remplir leur mandat et élargir leurs produits sur de nouvelles plateformes, compte tenu de l'importance que prennent les nouvelles technologies auprès de leur public et particulièrement auprès des jeunes qui composent une large partie de leur clientèle. Or, contrairement à d'autres télévisions, elles ne peuvent s'appuyer sur des sources auxiliaires de revenu, et les gouvernements provinciaux, dont elles dépendent, sont lourdement touchés par la crise économique. Il est donc important que les télévisions éducatives ne soient pas exclues des programmes qui pourraient être mis en place pour venir en aide à l'industrie car, il faut bien le rappeler, il n'y a pas que CBC/Radio-Canada du côté public et la télévision privée de l'autre. Ni l'une ni l'autre ne remplit le rôle de télévision éducative.
Il importe aussi que l'on tienne compte des particularités des télévisions éducatives lors de l'élaboration des nouvelles règles d'attribution du nouveau fonds de télévision, le Fonds des médias du Canada, comme on l'appelle maintenant.
L'importance qu'on semble mettre sur les succès d'auditoires ne tient compte ni du mandat ni de la zone de rayonnement des télévisions éducatives, dont certaines ne disposent pas de véritables mesures d'auditoires. Les télévisions éducatives ont des émissions ciblées vers des publics particuliers, sont distribuées majoritairement sur le territoire d'une province et ne recherchent pas nécessairement des succès commerciaux. C'est pour ces mêmes raisons qu'elles apportent une contribution inestimable à la diversité de l'offre télévisuelle et qu'elles sont appréciées d'un nombre de plus en plus croissant de citoyens.
C'est pourquoi les télévisions éducatives considèrent prioritaire: que le ministre du Patrimoine canadien exige — parce qu'il peut le faire — que le conseil d'administration du nouveau Fonds canadien des médias reconnaisse le caractère spécifique des télévisions éducatives, et en tienne compte dans ses politiques; qu'une enveloppe protégée soit dédiée à la production d'émissions pour enfants qui constituent une clientèle non commerciale et prioritaire pour tous les Canadiens; qu'une clarification soit apportée à la définition et aux critères visant à encadrer la production des documentaires; que des mécanismes pour protéger et valoriser la production régionale soient maintenus; et enfin, comme le souhaite l'ensemble de l'industrie, que les changements envisagés soient implantés de façon graduelle afin de permettre une transition harmonieuse, tant de la part des producteurs que des télédiffuseurs.
Un dernier enjeu de l'avenir des télévisions éducatives concerne la distribution. Avec le passage au numérique, les obligations restreintes faites aux distributeurs par satellite et les hypothèses envisagées d'une stratégie hybride de passage au numérique dans les régions plus éloignées, il devient de plus en plus nécessaire de s'assurer: que les télévisions éducatives soient distribuées de façon obligatoire, sur toutes les plateformes disponibles, dans leurs provinces d'origine; qu'elles puissent être partout au pays si elles le souhaitent selon les modalités négociées; que les chaînes éducatives francophones puissent être accessibles partout au pays compte tenu de l'offre limitée des produits francophones pour ces communautés au pays; que le signal HD des télévisions canadiennes soit distribué de façon prioritaire par satellite, partout au pays. Il est anormal que notre signal HD ne puisse être disponible par satellite faute de capacité, alors que les distributeurs privilégient les chaînes américaines.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie de m'avoir permis de vous rappeler l'existence et la contribution des télévisions éducatives à la diversité de l'offre télévisuelle et au bien-être de nos concitoyens.
Je suis disposée à répondre à vos questions.
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Les chiffres en disent aussi long sur notre performance et notre impact. TVCogeco, la chaîne de télévision communautaire de Cogeco, dessert I'Ontario et Ie Québec. Nous exploitons 36 chaînes de télévision locales et desservons des communautés allant de Windsor à Cornwall, de North Bay à Niagara, de Trois-Rivières à Gaspé et de Baie-Comeau à Sherbrooke.
Nous formons des partenariats avec près de 700 bénévoles dans les principales communautés pour créer notre programmation locale. Ces personnes, à la fois enthousiastes et ayant un grand sens civique, ont de 15 à 73 ans et offrent leur temps et leur talent comme producteurs, techniciens, rédacteurs et même animateurs devant la caméra. Nombre d'entre eux ont développé leurs compétences dans Ie cadre de notre programme de formation et, au cours de la dernière année, ils ont consacré près de 60 000 heures, sans rémunération, à la création d'émissions de contenu local.
Au cours du dernier exercice financier, nous avons créé 12 130 heures de contenu entièrement local, original et canadien, touchant notamment les affaires publiques, les sports, les arts et la culture, les événements communautaires et les nouvelles locales. De plus, seulement en Ontario, 43 721 avis publics gratuits ont été affichés par des groupes et des organismes locaux sur notre chaîne et notre site Web pour informer leurs communautés des activités et des événements locaux.
Les téléspectateurs aiment ce qu'ils voient. Selon nos sondages annuels, 490 814 téléspectateurs regardent TVCogeco, soit une moyenne de 44 p. 100 de tous les foyers desservis. Notre sondage mené en 2008 par Environics sur la satisfaction de la clientèle a révélé qu'en moyenne 90 p. 100 de tous les répondants croient que nous offrons un service utile à la communauté et que 88 p. 100 estiment que la chaîne offre un produit général de qualité. En comparaison, une récente étude Pollara au sujet du réseau anglais de Radio-Canada (CBC) a montré que 40 p. 100 des répondants regardent cette chaîne toutes les semaines.
Nos téléspectateurs sont plus susceptibles de regarder les nouvelles communautaires locales, la couverture d'un événement, les émissions de nature politique et les affaires courantes, y compris les réunions des conseils municipaux. Les demandes de diffusion des parties de hockey locales font presque I'unanimité.
Nos magazines d'actualités sont très populaires. Par exemple, I'émission la plus visionnée au Québec est Autrement Vu. On y présente des activités, des ressources, des personnalités et des sujets de débat locaux deux fois par semaine. En Ontario, nous présentons une émission au format similaire intitulée The Source. Un des récents segments sur la région de Burlington-Oakville a alerté les téléspectateurs au sujet d'une opération porte à porte frauduleuse supposément pour économiser de I'énergie dans leur voisinage. On leur a par la suite montré comment se retirer du réseau de distribution d'électricité. Nos chaînes plus importantes mettent à jour Ie magazine Source quotidiennement.
Nous sommes toujours ouverts à I'innovation. Comme Ie changement fait partie de notre quotidien, nous savons que nous avons besoin de nous réinventer. Lorsque les défis se présentent, nous trouvons une nouvelle solution. Lors de notre dernière présentation, nous avons montré notre flexibilité en indiquant comment la chaîne de North Bay couvre maintenant les nouvelles qui font les manchettes chaque jour en plus de présenter un contenu communautaire traditionnel. Nous avons lancé notre journal de nouvelles d'une demi-heure lorsque Ie télédiffuseur affilié local a décidé de réduire sa couverture régionale. Selon notre sondage de 2008, 92 p. 100 des téléspectateurs ont indiqué que la chaîne offrait un service utile. Au cours de la prochaine année, nous prévoyons télécharger les faits saillants des nouvelles de North Bay sur notre site Web.
Toutefois, le montant des frais pour la couverture des nouvelles locales est bien plus supérieur au montant accordé dans Ie règlement. Comme nous I'avons déjà dit, nous pourrions faire plus si nous avions accès à nos propres ressources locales.
Notre engagement dans les campagnes de financement témoigne aussi du degré de notre participation à la vie de la communauté. Beaucoup d'organismes caritatifs importants dépendent de notre partenariat pour faire la promotion de leurs activités et poursuivre leur rôle de soutien essentiel. TVCogeco a aidé des groupes de service, des organismes et des établissements à amasser près de 4 millions de dollars au cours de la dernière année grâce à des téléthons, des ventes aux enchères et d'autres activités et promotions.
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J'essaierai d'être précis et très clair. Si je vous interromps pour laisser la parole à quelqu'un d'autre, n'allez pas me juger impoli.
Je vais vous poser une question sur la façon dont vous avez résumé votre exposé. Je n'essaie pas de vous acculer, mais voici comment je juge ce que vous venez de décrire.
Vous fournissez un événement communautaire — l'aspect communautaire constituant le troisième pilier de la Loi sur la radiodiffusion —, mais mettez-vous l'accent sur l'aspect communautaire par le biais de téléthons, de collectes de fonds et de couvertures communautaires ou remplissez-vous le vide laissé par le télédiffuseur régional qui a quitté la ville? Vous insistez beaucoup sur la couverture des élections, les nouvelles, etc., mais est-ce que cela restera votre priorité dans un avenir proche, pendant que nous nous efforçons de mettre en place des politiques et de parler de recettes?
Dans le volet communautaire, on nous a donné de très bons exemples intelligents de ce qui se fait comme diffuseur communautaire. Pouvez-vous me donner un exemple de ce que vous faites en ce moment dans la télévision communautaire? Je pense que, des deux côtés, on a des raisons qui se défendent très bien. C'est un pilier de la Loi sur la radiodiffusion que l'on oublie.
Les recettes semblent constituer un problème énorme. Il s'y ajoute le mandat que vous avez de la province. Maintenant que l'on passe au numérique, il me semble que vous allez vous heurter à des difficultés majeures, en tant que réseau éducatif, pour faire passer le message. Beaucoup de gens qui reçoivent les signaux analogues vont être oubliés. Votre programmation pour la nation — pas seulement votre exemple précis — va être perdue.
Je m'adresse à présent à l'ACR. Vous êtes en difficulté à cause des vagues que provoquent les frais de distribution. On l'a constaté à plusieurs reprises dans les témoignages devant notre comité et le CRTC se penche sur la question. C'est une espèce de franchissement du Rubicon avant d'atteindre le prochain modèle d'affaires pour la télévision. Pour résumer, nous envisageons un nouveau modèle de revenu et considérons que c'est une des choses les plus importantes. Avec la prolifération de la technologie, on constate le déclin graduel des anciens régimes, qui avaient été établis pour créer un revenu.
Vous parlez des parties prenantes au FAPL et des types de modèles où le financement est accordé par le gouvernement, avec certaines exigences dans certains marchés. S'y attachent toutes sortes de règlements. Vous aimez cela et vous y avez un pourcentage, mais ce qu'on envisage suffira-t-il? Pensez-vous qu'il conviendrait d'aller plus loin, au-delà des questions de réglementation? En d'autres mots, et ma question s'adresse plus particulièrement aux gens qui sont intervenus tout à l'heure, est-ce que tout devrait être permis? Devrait-on cesser d'exiger un abonnement de base au câble et devrait-on les laisser faire ce qu'ils veulent? Les partisans des frais de distribution devraient-ils conclure leurs propres ententes avec les EDR? Vous dites que vous voulez une distribution obligatoire. Est-ce bien le cas?
Je vais vous laisser répondre en vous priant de me pardonner, vu que je dispose en tout de cinq minutes.
J'aimerais aussi avoir des commentaires sur le passage au numérique. C'est un problème majeur à l'heure actuelle aux États-Unis. Le président Obama a identifié ce passage comme l'une des cinq questions qu'il importe de traiter tout de suite et nous comptons avoir effectué la transition d'ici 2013. Sommes-nous prêts? Pour que vous soyez prêts, qu'attendez-vous du gouvernement?
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Merci de me recevoir aujourd'hui. Mon nom est Jean LaRose et je suis le directeur général d'APTN.
Cette année marque le 10e anniversaire d'APTN. Il y a 10 ans, il était difficile d'imaginer qu'un réseau national autochtone puisse offrir une couverture en direct des Jeux olympiques à la grandeur du Canada, et ce, à raison de 10 heures par jour, en haute définition, aussi bien en anglais qu'en français et jusque dans huit langues autochtones. Avec les Jeux olympiques de Vancouver de 2010, c'est maintenant une réalité.
Notre préparation en vue des Jeux olympiques est un défi que nous prenons plaisir à relever. Nous formons des annonceurs sportifs dans les langues autochtones. Nous trouvons des nouvelles façons de commenter les épreuves sportives dans nos langues.
[Traduction]
Nous formons les techniciens, construisons des plateaux et oeuvrons derrière la caméra. Nous travaillons en partenariat avec d'autres diffuseurs hôtes, afin de proposer aux Canadiens une couverture complète des Jeux. Celle-ci reflétera l'ensemble du Canada, comme personne ne l'aurait fait auparavant.
Au cours de vos réunions, vous entendez beaucoup parler des déficiences du système de radiodiffusion. Je peux toutefois vous dire qu'APTN est une histoire à succès.
APTN est un réseau national. Nous nous efforçons d'y représenter tous les peuples autochtones: premières nations, Inuits et Métis. De plus, nous servons de trait d'union entre les Autochtones et l'ensemble de la population canadienne. Nous exploitons trois signaux régionaux distincts qui sont orientés vers l'ouest, l'est et le nord du pays, en plus de notre signal à haute définition.
J'ai remis au comité une trousse d'information sur APTN et sa programmation.
[Français]
En l'espace de 10 ans, nous avons beaucoup accompli. APTN prouve que, grâce à la Loi sur la radiodiffusion et au CRTC, le système canadien de radiodiffusion est fort et contribue au mieux-être des Canadiens.
Permettez-moi maintenant d'aborder les thèmes sur lesquels le comité se penche.
[Traduction]
APTN n'offre pas de programmation locale, du moins pas dans le sens de ce qui se discute ici. Dans bien des cas, par contre, notre programmation a des racines régionales et locales, et elle porte sur une région particulière ou un groupe autochtone de cette région.
De tous nos signaux régionaux, le service que nous dispensons dans le Nord se distingue le plus. À l'aide de ce signal, nous diffusons chaque semaine 40,5 heures d'émissions proprement nordiques. Cette programmation est habituellement offerte en inuktitut ou dans d'autres langues autochtones parlées dans les collectivités nordiques. Voilà une autre façon de concevoir la programmation locale. De notre point de vue, une programmation aux couleurs du Nunavut et du Nunavik est locale, même si les collectivités à qui elle s'adresse s'étendent sur une région qui forme un large pourcentage de la superficie du Canada.
APTN accorde des licences à de telles émissions en puisant dans ses revenus généraux. Ces revenus proviennent des droits d'adhésion des entreprises de distribution de radiodiffusion du Sud du Canada et de la vente de publicité. Pour ces émissions, le gouvernement du Canada verse des fonds additionnels aux sociétés de radiodiffusion du Nord, par l'entremise de son Programme de radiodiffusion autochtone dans le Nord. Le financement accordé aux sociétés en vertu du programme stagne depuis des années. Par conséquent, les sociétés n'ont pas été en mesure de suivre les progrès technologiques et la hausse des coûts de production.
[Français]
Avec les sociétés, nous travaillons au renforcement de leurs aptitudes techniques et de leurs capacités de production, et il en résultera de nouvelles émissions destinées aux jeunes de la région ainsi qu'aux autres jeunes Autochtones du Canada.
Pour produire ces émissions, nous faisons appel à d'autres moyens de générer des revenus. En plus de la programmation locale du Nord, APTN diffuse régulièrement des émissions qui concernent d'autres collectivités autochtones des quatre coins du Canada. La totalité de notre programmation provient maintenant de producteurs autochtones ou de maisons de production qui sont la propriété d'Autochtones ou qui relèvent de leur contrôle.
[Traduction]
Par le passé, APTN a dit craindre que le tarif de distribution proposé ne perturbe le système de radiodiffusion. Ces craintes se fondaient sur deux facteurs principaux.
Tout d'abord, un tarif de distribution pourrait augmenter substantiellement le coût du service de base, qui équivaut déjà à plus de 300 $ par an pour de nombreux abonnés. Par conséquent, la capacité de payer constitue une difficulté. Ne vous faites pas d'illusion: les EDR auront vite fait de refiler ces frais aux consommateurs sous forme de taxe.
En second lieu, nous craignons les répercussions sur l'ensemble du système canadien de radiodiffusion, si l'accès à celui-ci coûte plus cher aux Canadiens, surtout qu'en ce moment, tout le système doit rivaliser avec le secteur non réglementé des nouveaux médias. L'augmentation du coût d'accès pourrait détourner les Canadiens du système de radiodiffusion, au moment même où leur participation enthousiaste est des plus nécessaires.
[Français]
Si les décideurs optent pour les frais de distribution, il faudrait porter une attention directe à l'accessibilité du service de base et à la façon de faire des nouveaux frais une solution gagnante pour les consommateurs. Dans le passé, APTN a proposé un forfait de base entièrement canadien qui soit plus petit et imposé par le CRTC, de sorte que la programmation canadienne reste abordable et accessible à tous les Canadiens.
Cette approche, ajoutée à une sélection de canaux numériques davantage orientés vers le consommateur plutôt que le forfait à volonté qui est maintenant si populaire et si coûteux, pourrait offrir une piste de solution.
Pour ce qui est de l'élimination graduelle de la technologie analogique, APTN a de l'avance sur l'industrie. Il y a quatre ans, nous avons conclu qu'il serait financièrement illogique de poursuivre l'entretien et la mise à niveau de notre réseau de postes émetteurs terrestres dans le Nord.
[Traduction]
Du même coup, nous savons qu'APTN offre depuis toujours un service par la voie des ondes dans le Nord et joue un rôle important dans la préservation des langues autochtones. La distribution d'APTN à tous les résidents du Nord sera maintenue. Avec l'aide du ministère du Patrimoine canadien, nous avons mis au point une approche innovatrice. Nous avons conclu des ententes avec un service de radiodiffusion directe par satellite, Bell ExpressVu, et avec des câblodistributeurs locaux dans les collectivités branchées au câble pour veiller à ce que tous les résidents raccordés à des émetteurs analogiques continuent d'accéder aux services offerts par APTN dans le Nord sans frais grâce à leurs services de satellite ou de câblodistribution. Nous instaurons graduellement ce programme dans les petites collectivités du Nord, car il permet aux résidents de cette région d'accéder gratuitement à APTN Nord. Aucun résident n'a besoin de se procurer un niveau supérieur de service auprès d'un distributeur pour continuer de recevoir APTN. Je ne sais pas si un programme comparable conviendrait aux radiodiffuseurs dans les régions du Sud, mais le programme nous réussit bien.
Depuis longtemps, le gouvernement du Canada soutient directement la radiodiffusion autochtone.
[Français]
Le Programme d'accès des Autochtones du Nord à la radiodiffusion soutient les sociétés de radiodiffusion du Nord. Comme je l'ai dit plus tôt, les fonds qui proviennent de cette initiative stagnent depuis maintenant environ 15 ans. Le programme a financé les dépenses en infrastructure permettant la transmission d'APTN Nord dans tout le Nord et il a permis à APTN d'amorcer sa transition depuis son réseau analogique par la voie des ondes.
D'ici mars 2010, l'élimination progressive de ce programme concorde avec celle de notre infrastructure analogique. Il n'y a toujours aucun programme similaire dans le Sud pour les Autochtones. APTN ne reçoit directement aucuns fonds du gouvernement pour soutenir ses opérations ou son mandat national. Nous obtenons des droits de licence et des capitaux par l'entremise du Fonds des médias du Canada, lequel soutient la programmation indépendante en général, mais ne se concentre pas sur la programmation locale en tant que telle.
[Traduction]
Pour le moment, il est difficile de dire si les changements annoncés récemment au Fonds des médias du Canada nuiront à la programmation autochtone, particulièrement aux émissions régionales, ou s'ils lui seront profitables. Le tout se jouera en bonne partie dans le détail. En ce moment, je dirais tout simplement que l'un des objectifs avoués du fonds est de récompenser les émissions qui, pour citer le document d'information de Patrimoine canadien, « ont démontré leurs capacités à obtenir le succès populaire et à offrir un bon rendement du capital investi, ou qui ont le potentiel de le faire ».
Je tiens juste à souligner que l'auditoire d'Iqaluit n'est pas le même que celui du Grand Toronto. Le rendement potentiel de ces auditoires n'est de toute évidence en rien comparable. Nous voulons réellement savoir si les auditoires plus restreints d'Iqaluit, de Thompson ou même de Regina et de Winnipeg, par exemple, exerceront le même poids que l'auditoire torontois sur les décisions financières.
Nous nous préoccupons en outre de l'importance donnée aux émissions à succès, qui pourraient ne pas entraîner le genre d'innovation et de prise de risque qui sont nécessaires à la programmation. De plus, ce qui est un succès pour les téléspectateurs autochtones pourrait ne pas en être un pour les autres groupes au Canada. Est-ce que cela en fera un succès moindre?
Pour ce qui est du nouveau Fonds d'amélioration de la programmation locale du CRTC, APTN n'y sera pas admissible. Ce fonds n'arrivera vraisemblablement pas à soutenir la programmation autochtone locale. Je ne critique pas le fonds, je signale tout simplement qu'il ne visait pas à soutenir la programmation autochtone locale et qu'il ne le fera pas.
Je remercie le comité de m'avoir accordé du temps. J'espère ne pas avoir dépassé les 10 minutes qui m'étaient allouées. Je suis prêt à répondre à vos questions.
:
Monsieur le président, membres du comité et membres du personnel, je m'appelle Chuck Allard et je suis PDG d'Allarco Entertainment. Aujourd'hui m'accompagnent Malcolm Knox, président et chef des opérations de Super Channel, et Richard Paradis, notre représentant d'affaires et de liaison avec le gouvernement.
Tous les trois avons oeuvré dans l'industrie de la télévision et de la télévision payante pendant plus de 30 ans. Nous tenons à remercier le comité de nous permettre d'assister à cette réunion et de nous donner l'occasion de présenter notre point de vue et nos observations sur l'évolution de l'industrie de la télévision au Canada face aux énormes difficultés économiques et réglementaires dans une industrie qui est régie par une Loi sur la radiodiffusion vieillissante promulguée en 1991.
Nous désirons nous attaquer aujourd'hui à la question principale qu'étudie votre comité actuellement, et vous faire part de quelques réflexions sur la difficulté que peut présenter, comme nous en avons fait l'expérience tout récemment, le lancement d'un nouveau service de télévision payante de langue anglaise, Super Channel, dans les limites de la réglementation actuelle et compte tenu de la consolidation de l'industrie, principalement dans le domaine de la distribution de radiodiffusion.
Nous avons tous constaté que l'industrie de la télévision du Canada a subi des changements extrêmes au cours des 30 dernières années, pour passer de 10 à plus de 200 canaux, dans un monde où nous avons tout d'abord constaté une fragmentation importante et ensuite, au cours des 10 dernières années, une consolidation et une concentration importantes. Les télédiffuseurs traditionnels, qui sont à la source de notre système de radiodiffusion, sont aux prises avec de graves difficultés financières pour plusieurs raisons, y compris l'immense essor des services de télévision spécialisée, qui retiennent une part de plus en plus grande de téléspectateurs, mais s'arrachent aussi les revenus de publicité. En outre, de tels radiodiffuseurs conventionnels doivent maintenant faire concurrence pour les budgets de publicité avec Internet, dont la part de recettes de publicité a augmenté de façon significative au cours des dernières années.
Nous croyons que votre comité devrait recommander la mise en place de frais d'abonnement raisonnables pour les radiodiffuseurs traditionnels canadiens, de façon à assurer que le système réglementaire est équitable pour tous les télédiffuseurs, qu'ils offrent des services spécialisés ou des services traditionnels. Nous croyons également que le coût de tels frais d'abonnement sera complètement assumé par les entreprises de distribution de radiodiffusion, les EDR, qui ont eu le culot de se présenter devant vous pour s'opposer avec véhémence à de tels frais et suggérer que ces frais soient transmis aux consommateurs.
Nous sommes profondément convaincus que les EDR ont retiré des bénéfices financiers suffisants pendant plusieurs décennies de la vente de leurs forfaits de services de base, qui comprenaient des services de télévision traditionnelle depuis le début, et pour lesquels les EDR ne paient rien. De tels frais d'abonnement devraient être imposés par les télédiffuseurs traditionnels pour assurer la production d'un contenu canadien et une programmation locale qui dépassent les engagements déjà pris quant au contenu canadien. Jamais ne devraient-ils être utilisés pour subventionner le coût de plus en plus élevé de l'acquisition d'une programmation américaine dans une guerre du plus offrant.
Relativement à la position des EDR, nous croyons que la présence de représentants de Rogers et de Shaw devant vous il y a deux semaines est très éloquente. Ma relation avec les EDR remonte à quelques temps déjà, et je peux vous assurer, à titre d'agent principal d'une licence de service de télévision payante de l'Ouest, que nous nous sommes opposés vigoureusement, il y a environ 15 ans, à l'octroi de licences de télévision à la carte et par la suite, de vidéo-sur-demande, aux EDR, particulièrement les EDR terrestres, à cause des conflits évidents que nous pouvions entrevoir dans la concurrence entre les EDR et les radiodiffuseurs existants, leur donnant une préférence et un avantage indus par rapport aux autres services de programmation indépendants.
Malheureusement, nos objections ont été rejetées à l'époque et on connaît la suite: les EDR ou la société qui contrôle les EDR possèdent et contrôlent maintenant les entités de radiodiffusion qui profitent souvent d'une distribution interne prioritaire et de possibilités de mise en marché additionnelle, ainsi que d'autres avantages tangibles. Malgré tout cela, il est supposé y avoir des « murs de Chine » pour donner l'illusion qu'il n'y a pas de conflits et que les EDR sont équitables pour tout le monde.
Le 12 février 2009, nous avons envoyé au président de votre comité et à quelques membres un exemplaire de la lettre envoyée au ministre du Patrimoine demandant des changements indispensables à la Loi sur la radiodiffusion pour imposer un régime réglementaire plus rigoureux. Pourquoi avons-nous besoin de tels changements? Parce que nous sommes un exemple vivant de la désuétude de la réglementation actuelle, qui a permis aux EDR, avec le temps, d'exercer un pouvoir excessif sur notre système de radiodiffusion.
:
Le secteur de distribution de radiodiffusion rejoint plus de 90 p. 100 des ménages canadiens. Or, six EDR — Rogers, Shaw, Bell TV, Star Choice, Vidéotron et Cogeco — contrôlent l'accès à plus de 91 p. 100 des abonnés au câble et à la radiodiffusion directe. Bref, ce petit nombre d'EDR a le pouvoir de vie ou de mort sur les nouveaux services comme le nôtre, et sur les services existants également. Depuis déjà de nombreuses années, quelques-unes des plus grandes EDR manifestent du mépris pour notre système réglementaire, même si c'est lui qui leur a permis de devenir si prospères.
Si nous venons devant ce comité aujourd'hui, c'est tout d'abord pour dénoncer le mépris des deux plus grandes EDR terrestres, Rogers et Shaw, qui ont, dans notre cas, fait fi de façon préjudiciable des conditions de licence et des attentes du CRTC. Ensuite, nous voulons également vous faire part des dommages intentionnels ainsi causés à un nouvel acteur dans le système canadien de radiodiffusion.
Les conditions de la licence qui nous a été octroyée le 18 mai 2006 stipulent clairement qu'une distribution comparable à celle des services régionaux actuels de télévision payante serait offerte à Super Channel. Le conseil a poursuivi en ajoutant que sans de telles conditions, il ne serait pas raisonnable de s'attendre à ce que le nouveau service Allarco respecte son plan d'affaires, y compris ses engagements relativement aux dépenses et à l'exposition de la programmation canadienne. Depuis notre lancement en novembre 2007, Allarco a subi un traitement injuste de la part de Rogers et de Shaw, qui contrôlent plus de 40 p. 100 des abonnés du câble et de la diffusion directe au Canada.
Depuis l'envoi de notre lettre du 12 février 2009 au ministre, nous avons dû déposer une plainte de préférence indue contre ces grandes EDR terrestres parce que ces dernières n'avaient pas respecté les modalités et les attentes de notre licence du CRTC. Pour déterminer concrètement comment notre service était vendu par les deux grandes EDR, nous avons effectué une enquête téléphonique indépendante sur la façon dont les représentants du service à la clientèle — les RSC — de Rogers et de Shaw traitaient les services que nous offrions au cours des mois de janvier, février et mars 2009. Les résultats ont été scandaleux, même si nous dépensions des centaines de milliers de dollars en publicité auprès de Rogers et Shaw, pour des annonces disponibles aux États-Unis, des annonces à la radio et des envois postaux directs.
Dans le cas de Rogers, parmi les 320 appels passés aux RSC par l'entremise des centres d'appels, 97 p. 100 n'étaient dirigés qu'au service régional de télévision payante, soit TMN. Lorsque l'appelant demandait s'il y avait d'autres services de films, le service de vidéo-sur-demande de Rogers a été mentionné 24 p. 100 du temps, et Super Channel, seulement 10 p. 100. La plupart du temps, notre service était présenté de façon négative et incorrecte par les RSC, confirmant l'avantage indu de leur propre service de vidéo-sur-demande et du service régional de télévision payante, TMN. Qu'en est-il du principe d'équité?
Dans le cas de Shaw, les résultats ont été également scandaleux.
Pour vous donner une idée de l'effet néfaste qu'une telle préférence indue a eu sur notre plan d'entreprise, qui nous a coûté des dizaines de millions de dollars, un autre fournisseur satellitaire, qui a procédé à notre lancement en novembre, a atteint et dépassé un taux de pénétration de 7,5 p. 100 de sa clientèle de langue anglaise abonnée au numérique. Une autre petite entreprise provinciale de télécommunication a récemment atteint un taux de 11 p. 100. Rogers se contente d'un taux de pénétration d'un tiers de pourcent.
:
Nous avons indiqué au ministre dans notre lettre que nous étions tout à fait en faveur de la demande par le président du CRTC d’imposer immédiatement des sanctions pécuniaires administratives en vertu de la Loi sur la radiodiffusion. Je crois comprendre que le président du conseil a discuté de cette question avec vous lors d’une séance antérieure, qui s’est tenue en mai 2008.
Nous proposons également la mise en place de recours civils pour ces licences dont les conditions n’ont pas été respectées, y compris des dommages et intérêts et des dommages et intérêts futurs à la suite d’une inconduite délibérée des EDR. Aux États-Unis et en Grande-Bretagne, le FCC et OFCOM, deux organismes nationaux de réglementation de la radiodiffusion et des télécommunications, ont de larges pouvoirs pour imposer des amendes aux sociétés qui ne respectent pas la lettre, l’intention ou les attentes de la réglementation ou des conditions de licence. Ce n’est pas le cas du CRTC qui devrait jouir de tels pouvoirs en vertu de la législation existante sur la radiodiffusion. Votre comité et le Parlement doivent apporter les changements indispensables dans la Loi sur la radiodiffusion pour donner au CRTC plus de pouvoir pour traiter avec les grands groupes de distribution de radiodiffusion qui ont été intégrés de façon extrêmement verticale et qui refusent de respecter la réglementation et les conditions de licence actuelles.
Nous comprenons très bien que votre comité se préoccupe actuellement de la survie des stations locales et des nouvelles locales au sein de notre système de radiodiffusion. Toutefois, nous encourageons le comité à regarder au-delà de ce problème immédiat parce que ce n’est que la pointe d’un iceberg imminent.
La consolidation récente de la propriété des secteurs canadiens de radiodiffusion et de distribution a conféré un pouvoir de vie ou de mort sur notre système de radiodiffusion non pas aux législateurs, mais à quelques titans de l’entreprise privée: Rogers, Shaw et Quebecor. Ces trois grandes EDR ont amplement bénéficié de la réglementation passée qui a favorisé leur développement dans l’intérêt de fortifier le système canadien de radiodiffusion. Cette situation privilégiée a favorisé la croissance de ces entreprises au point où elles sont aujourd’hui et elle découle directement de la contribution des services traditionnels, spécialisés et de télévision payante indépendants qui sont maintenant relégués au second plan par les EDR, favorisant la croissance de leurs entreprises comme les services de téléphone locaux, la publicité, l’offre d’Internet et de services sans fil.
Cela nous a été confirmé lorsque nous avons rencontré le directeur général de Rogers le 12 février 2009, qui nous a dit que leurs principales activités étaient le téléphone, Internet, les services cellulaires et les services de radiodiffusion, dans cet ordre. Autrement dit, la radiodiffusion se situe maintenant au bas de ses priorités. Permettez-moi de rappeler au comité les paroles importantes que plusieurs personnalités canadiennes ont prononcées par le passé: tout est dans le contenu. Nous croyons sincèrement que nous sommes à un tournant quant à l’orientation future du système de radiodiffusion. Il incombe au comité et aux parlementaires de s’assurer que le contenu canadien puisse continuer de se développer et surtout, de passer la barrière des EDR pour joindre les Canadiens.
Les changements proposés à la Loi sur la radiodiffusion devraient, premièrement, donner au CRTC le pouvoir d'imposer des amendes aux EDR qui ne respectent pas les conditions de licence ou les règles du CRTC et d'accorder un dédommagement aux radiodiffuseurs qui ont subi des pertes financières en raison des écarts de conduite des EDR; deuxièmement, accorder au CRTC le pouvoir d'adresser une directive claire à une EDR en vue de corriger immédiatement un cas de non-observation concernant toute question allant à l'encontre de l'esprit ou de la lettre de la Loi sur la radiodiffusion; troisièmement, déterminer clairement les fonctions de chaque élément du système de radiodiffusion, avec une insistance spéciale sur le rôle clé que les EDR doivent jouer dans la priorité à accorder aux services de programmation canadiens et à la promotion de ces services; offrir d'autres services comme Internet, la téléphonie locale ou les services sans fil ne devrait en aucune manière se faire d'une manière commerciale nuisible aux services de programmation de radiodiffusion canadienne; et quatrièmement, veiller à ce que les services de programmation aient le droit d'avoir accès à leurs abonnés par l'intermédiaire des EDR en vue de faire la promotion de leurs services et de les commercialiser, et de rendre possible la communication dans les deux sens avec chaque abonné.
Ainsi se termine notre présentation verbale et nous serons heureux de répondre à toutes vos questions.
Merci, monsieur le président.
:
Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité.
Je m'appelle Rick Arnish et je suis le président du Jim Pattison Broadcast Group dont le siège social est à Kamloops en Colombie-Britannique.
Je travaille dans ce secteur extraordinaire depuis plus de 40 ans et notre propriétaire, M. Pattison, travaille dans la radiodiffusion depuis 44 ans. Le groupe comprend trois stations de télévision traditionnelle, toutes sur un petit marché, à Medecine Hat, en Alberta, et à Prince George et Kamloops, en Colombie-Britannique. Notre groupe comprend également 29 stations de radio FM, toutes situées dans de petits marchés, sauf dans le cas de Vancouver et dans les deux provinces les plus à l'ouest du pays.
En ce qui concerne la télévision, CFJC TV de Kamloops a été l'une des premières stations de petits marchés au pays. Elle a pris l'antenne le 8 avril 1957 avec un émetteur de 100 watts, offrant ainsi leur propre station de télévision à 16 000 habitants.
Un radiodiffuseur de proximité, c'est ce que nous sommes. Nous sommes toujours un chef de file dans le domaine des actualités, de l'information et du service public. Nous sommes aussi le véhicule de la diversité des voix sur nos marchés pour nos auditeurs et nos téléspectateurs.
Je suis heureux de pouvoir m'adresser aux membres du Comité permanent du patrimoine canadien au moment où la télévision traditionnelle est à la croisée des chemins. Survivra-t-elle au XXIe siècle?
Je viens de dire que nous ne possédons que trois stations de télévision de petits marchés. Peut-être vous demandez-vous pourquoi notre groupe n'a pas augmenté le nombre de stations de télévision qu'il possède proportionnellement à celui des stations de radio, surtout au cours des 12 dernières années. En vérité, nous avons souvent eu l'occasion de nous porter acquéreur d'installations télévisuelles, mais nous avons choisi de ne pas le faire parce que j'ai des inquiétudes au sujet de l'avenir de la télévision traditionnelle dans l'avenir.
Dès 2005, lors d'interviews et devant des groupes de l'ACR, je disais ne pas être convaincu qu'il y aura encore des stations de télévision de petits marchés d'ici à 2015. Il y a quatre ans à peine, la situation était assez bonne et certains de mes collègues radiodiffuseurs roulaient les yeux quand ils m'entendaient. Aujourd'hui, à cause de la concurrence et des difficultés économiques, eux et beaucoup d'autres s'interrogent aussi sur la survie du modèle traditionnel en place depuis plus de 50 ans. Le système tel que nous le connaissons aujourd'hui est cassé.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, pendant ces délibérations j'ai entendu les témoins affirmer que les pressions financières actuelles sur les radiodiffuseurs de proximité sont de nature cyclique, que les recettes publicitaires dont nous dépendons reviendront au galop et que tout va baigner dans l'huile. Croyez-moi: je ne suis pas de cet avis.
Dans le Canada rural, la vraie station de télévision traditionnelle de petits marchés fait l'objet d'immenses pressions financières et concurrentielles. Cela a commencé il y a un certain nombre d'années — on peut remonter jusqu'à 1997 — lorsque le marché de la publicité pour les stations traditionnelles de petits et moyens marchés a viré vers les services spécialisés offerts par les EDR. Dès le début, les chaînes spécialisées touchaient non seulement les frais d'abonnement, mais pouvaient aussi augmenter le nombre de publicités horaires à vendre et diffuser. D'où venait le gros de ces recettes de publicité nationale? Des stations de petits marchés comme les nôtres.
Autre source d'inquiétude, beaucoup d'entre elles ont adopté une grille horaire plus proche de celle de la télévision traditionnelle que d'un service spécialisé, ce qui a évidemment des effets sur les véritables stations traditionnelles de petits marchés. Le problème systémique est qu'il n'y a tout simplement pas suffisamment de recettes à répartir même quand l'économie est forte, mais encore moins lorsqu'elle est faible.
N'eut été du Fonds pour la programmation locale sur les petites marchés des stations à radiodiffusion directe à domicile, auxquels les 19 stations traditionnelles indépendantes ont accès, beaucoup sinon toutes ces stations auraient disparu. Je remercie le CRTC pour ce fonds, puisqu'il a servi de bouée de sauvetage pour nos stations à Kamloops, qui ensemble produisent 47 heures par semaine de programmation locale primée.
Pour ce qui est du tarif de distribution, même si nous ne refuserions pas les redevances auxquelles nous avons droit, il s'agit d'une question qui concerne en fait les grands radiodiffuseurs. Les grandes compagnies en profiteraient à hauteur de plusieurs millions de dollars par rapport à des milliers de dollars dans le cas de nos stations. Les vraies stations indépendantes de petits marchés ont catégoriquement affirmé qu'elles ne renonceraient pas aux Fonds pour la programmation locale dans les petits marchés en contrepartie d'un tarif de distribution. Ce serait la catastrophe financière pour toutes les stations.
Le Fonds pour l'amélioration de la programmation locale, créé par le CRTC à l'intention des EDR, est une autre initiative qui aidera sûrement la survie à long terme de nos trois stations, tant que l'aide ne dépendra pas d'une augmentation des actualités locales, de l'information ou de l'interaction de proximité. Le nouveau fonds fera beaucoup pour assurer que CFJC TV à Kamloops continue d'offrir 18,5 heures par semaine de vraies émissions locales ainsi que plus de 14,5 heures par semaine sur CKPG-TV à Prince George et 14 heures par semaine sur CHAT TV à Medecine Hat.
Le financement servirait aussi à favoriser les dépenses en capital permettant la transmission numérique virtuelle pour nos stations, étant donné que la demande pour ce genre de service croît, même dans nos petits marchés.
Vous nous avez également demandé comment le gouvernement fédéral pourrait aborder la question de la radiodiffusion locale. Avec beaucoup de respect, je vais faire des observations sur la Loi sur la radiodiffusion et la réglementation actuelle du CRTC. En ce qui concerne les stations de télévision traditionnelles locales indépendantes dans les petits marchés, s'il y a un moment pour effectuer la déréglementation, c'est bien maintenant.
Une façon de contribuer à recréer les auditoires et les recettes dans les petits marchés du pays est de n'avoir aucune réglementation, sauf une exigence minimale de reflet local d'environ sept heures par semaine. À part cela, dans tous les petits marchés de moins de 300 000 habitants, il ne devrait y avoir aucune obligation réglementaire, même celles relatives au contenu canadien, qui veut que 50 p. 100 de notre programmation aux heures de grande écoute soit canadienne et de 60 p. 100 pendant la semaine de radiodiffusion. Cela permettrait aux petits marchés de rivaliser avec les signaux régionaux canadiens et américains distants, ainsi qu'avec les services étrangers, les services spécialisés et à péage, qui ont grandement nui à l'écoute et aux recettes de nos stations.
Aujourd'hui, nous vivons vraiment dans un univers à 500 chaînes, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité; c'est pour nous une question de survie. Les compagnies de câble dans les petits marchés sont actuellement libres de toute réglementation, et d'autres changements s'annoncent peut-être pour les grands câblodistributeurs; dans ce cas, pourquoi ne pas opérer un changement majeur dans le cas de la télévision traditionnelle dans les petits marchés?
Il y a longtemps, il y a eu un tollé parce que le CRTC a déréglementé la radio FM au pays. Beaucoup d'esprits chagrins ont dit que cela allait faire du mal à la radio. Eh bien, nous savons tous que le secteur de la radio a prospéré et continuera son essor bien au-delà du XXIe siècle. J'ai une grande confiance dans la radio canadienne.
J'affirme donc que c'est au tour de la télévision traditionnelle canadienne de petits marchés, qu'il faut agir sur-le-champ et non pas dans six mois ou un an, sans quoi beaucoup d'entre nous auront cessé d'exister. Ne craignez pas que la déréglementation des petits marchés nuise à la programmation canadienne et au reflet local, parce que toutes ces petites stations continueront d'être le miroir de leur marché comme elles savent le faire, c'est-à-dire au moyen d'un grand nombre d'heures hebdomadaires d'actualités, d'information et de divertissement de proximité. Évidemment, nous nous attendrions au maintien des règles actuelles concernant la distribution prioritaire et la substitution simultanée pour nos stations dans les marchés où nous avons une licence de station locale.
Une autre façon dont le gouvernement pourrait nous aider, nous et d'autres stations de petits marchés, serait de modifier la Loi sur la radiodiffusion pour obliger tous les distributeurs d'EDR par satellite, comme leur vis-à-vis du câble, à distribuer tous les services de télévision traditionnels canadiens de petits marchés. Dans tous les petits marchés du pays, entre 30 et 40 p. 100 de l'écoute se fait par radiodiffusion directe à domicile par satellite et si le signal local n'est pas distribué, cela a des effets considérables sur l'auditoire et les recettes. Ils en ont la capacité et l'auront encore plus dans un proche avenir. Il est temps de corriger le modèle de radiodiffusion directe à domicile par satellite.
Un autre moyen par lequel le gouvernement pourrait venir en aide au secteur traditionnel est l'élimination des droits de licence en vertu de la partie II que nous versons tous et qui aboutissent dans les recettes générales. Il s'agit là d'un coût supplémentaire qui, s'il était éliminé, viendrait s'ajouter aux possibilités qui s'offrent à vous de sauver les stations de télévision des petites villes. Tout ce dont on a besoin, ce sont les outils nécessaires pour faire le travail comme il faut et nous ne laisserons tomber ni les Canadiens que nous desservons ni vous. Nous sommes véritablement les yeux et les oreilles des villes et villages où nous sommes ancrés.
Pour conclure, la perte de la radiodiffusion locale et du reflet local conçus autour de la diversité des voies dans notre pays serait une catastrophe. Les Canadiens ont besoin de se voir refléter, eux-mêmes et leurs communautés, par leur station de télévision; ils le veulent et ils le souhaitent. Je pense que dans l'ensemble, le secteur traditionnel fait un excellent travail. En l'absence de stations comme les nôtres à Kamloops, Prince George et Medicine Hat et de nos autres collègues dans les petits marchés, qui couvriraient l'actualité quotidienne sur le marché? Je parle du temps qu'il fait, des fermetures d'école, des inondations et des incendies, des tornades, des fêtes locales, des sports, des spectacles, des commerces qui s'adressent à nos téléspectateurs, leurs clients potentiels, ainsi que les dons de charité pour des centaines de causes louables. Nous sommes de véritables miroirs de ce qui se passe dans les villes et villages que nous desservons fièrement grâce à notre licence.
Mesdames et messieurs les membres du comité permanent, vous avez l'occasion d'entrer dans l'histoire en apportant les changements nécessaires pour assurer la survie et la pérennité de la véritable télévision traditionnelle dans les petits marchés canadiens.
Merci de l'occasion que vous me donnez de comparaître devant vous ce soir. Je serai heureux de répondre à vos questions.
:
Le modèle d'entreprise de la télévision traditionnelle est rompu. M. Fecan de CTVglobemedia et M. Vinner de Canwest vous ont exposé les grandes lignes de la situation lorsqu'ils ont comparu et nous sommes d'accord avec leurs points de vue.
Comme nous avons peu de temps, je limiterai notre présentation à l'expérience et aux points de vue de NTV.
La crise dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui couvait depuis des années. Les canaux spécialisés, CBC/SRC, les EDR par câble et par satellite ont tous plusieurs sources de revenus mensuels durables, tandis qu'un télédiffuseur privé n'a qu'une seule source de revenus — la publicité — et ces revenus sont liés directement à la cote d'écoute.
Aujourd'hui, nous aimerions souligner quelques causes profondes qui ont été présentes pendant bien des années. Ce sont la surréglementation, la fragmentation des auditoires, l'absence de frais de diffusion et un radiodiffuseur public subventionné agissant comme s'il était un radiodiffuseur du secteur privé. Nous aimerions également présenter notre point de vue sur l'utilisation du Fonds de développement culturel, les frais de diffusion, le Fonds pour l'amélioration de la programmation locale ou FAPL, la transition vers la télévision numérique et le rôle du gouvernement fédéral.
S'agissant de la surréglementation, l'organisme de réglementation a accordé trop de licences, ce qui a causé la fragmentation à cause de la prolifération des canaux spécialisés et des signaux étrangers avec une compensation minimale pour les préjudices que ces signaux ont causés aux recettes des stations conventionnelles. Nous croyons qu'il y a aujourd'hui beaucoup trop de réglementation. Nous croyons qu'il est temps de réformer et d'atténuer la réglementation régissant l'industrie de la radiodiffusion.
Les exigences sur le contenu canadien sont un très bon exemple de surréglementation. Lorsque le CRTC a établi les quotas sur le contenu canadien pour la journée de radiodiffusion des radiodiffuseurs privés et ensuite, les a élargis pour inclure la programmation prioritaire aux heures de grande écoute, l'équilibre des télédiffuseurs traditionnels privés s'est rompu. La vente de publicité est notre seule et unique source de revenus et elle est dictée directement par les cotes d'écoute. Bonne cote égale rendement élevé; mauvaise cote égale rendement faible ou pas de rendement.
Les radiodiffuseurs vous diront tous, et ils l'ont déjà mentionné au CRTC, que la présentation en ondes de la plupart des émissions de divertissement canadiennes n'apporte pas les niveaux d'écoute suffisants pour produire des recettes qui permettent de financer leurs opérations. Lorsqu'on leur demande, les Canadiens disent qu'ils veulent des émissions canadiennes, mais les cotes nous disent qu'ils ne les regardent pas.
Mentionnons comme deuxième exemple de surréglementation, particulière à NTV, la durée de notre journée de radiodiffusion et la période de radiodiffusion en soirée. Pendant des décennies, le CRTC a accordé à NTV une prolongation de sa journée de radiodiffusion de jusqu'à 1,5 heure pour les bulletins de nouvelles à cause de notre fuseau horaire unique lorsqu'on le compare à l'heure normale de l'Est. Toutefois, au moment de renouveler la dernière licence de NTV, le CRTC a décidé que cette prolongation n'était plus acceptable et a forcé un changement. Il en a résulté une période de jour normale et une période de soirée plus longue que normale; ainsi, NTV a perdu une heure chaque jour de possibilités de diffusion simultanée, tout en lui imposant de diffuser un contenu canadien pendant 3,5 heures par semaine de plus dans la période de soirée que toute autre station au Canada.
La NTV croit que le CRTC doit immédiatement faire ce qui suit.
Il doit réduire les exigences relatives au contenu canadien à des niveaux qui soient plus raisonnables et moins restrictifs.
Il doit rendre les émissions canadiennes plus responsables, en utilisant une échelle basée sur les cotes qui accordent des crédits pour les quotas du contenu canadien d'une station pouvant atteindre 200 p. 100 au prorata. Nous utilisons ce mécanisme pour la publicité; pourquoi ne pas l'utiliser pour la programmation. Par exemple, NTV dépense des millions de dollars pour produire l'émission télévisée cotée numéro un de la province, la NTV Evening News Hour, pourtant, elle reçoit le même crédit de contenu canadien qu'une reprise d'Inspecteur Gadget.
Le CRTC devrait établir un quota de base normalisé et raisonnable pour le contenu canadien local et des mesures d'encouragement au quota de contenu canadien positifs de 150 p. 100 aux stations dont la performance est supérieure en ce qui concerne la production d'émissions locales.
Il devrait lever les restrictions sur certaines publicités, particulièrement les médicaments pharmaceutiques, mettant ainsi en place de nouvelles possibilités de publicité nationale.
Il devrait éliminer les frais de permis de la partie II, sans exigence de paiement rétroactif.
Il devrait cesser de recevoir les demandes de tous nouveaux services, pour retourner bien au-delà de la stabilité. Lorsque 170 nouvelles stations possèdent une licence, le marché est saturé.
S'agissant de la fragmentation des auditoires, les activités des EDR causent la fragmentation des auditoires des radiodiffuseurs locaux en mettant en place de nombreux signaux additionnels, y compris des réseaux et des stations des États-Unis mettant en ondes la même programmation dans nos marchés que celle dont nous avons acheté les droits de diffusion. Nous croyons que le Canada est le seul pays au monde où le vol transfrontalier de signaux ou le piratage est légalisé. Les réseaux canadiens ne diffusent pas sur les EDR américaines.
En outre, il est inacceptable qu'une EDR prenne tout simplement le signal d'un radiodiffuseur en direct, vende ce signal à ses abonnés et ne paie rien au diffuseur original du signal. Nous croyons également que l'activité de radiodiffusion prévue dans la Loi sur la radiodiffusion consistait à fournir un signal à l'utilisateur public, soit le public, et non pas à une entité intermédiaire qui profite financièrement de l'utilisation de ce signal sans payer quoi que ce soit; ce n'est qu'une autre forme de piratage. Permettez-moi d'ajouter que lorsque la chaussure est sur l'autre pied, les EDR par câble et par satellite crient haut et fort quand il est question du piratage de leurs signaux et des signaux transfrontaliers.
Plus tôt durant ces délibérations, Mme Bell de Canwest a fait remarquer qu'en 1971, durant les premières auditions sur la câblodiffusion, le CRTC a suggéré que toute entité devait payer ce qu'elle utilise dans le cadre de ses activités. Cela correspond à notre point de vue. En 1975, le CRTC a accordé à MTV des frais d'abonné au câble de 25 ¢ par ménage et les a révoqués rapidement, sans audition. Depuis lors, nous avons demandé à maintes reprises au conseil des frais d'abonné au câble local ou des frais de diffusion. Nous croyons que les frais de diffusion constituent une façon juste et équitable de compenser les radiodiffuseurs pour les préjudices que les EDR causent aux auditoires locaux. Les signaux locaux sont importants pour les abonnés locaux qui croient qu'ils paient déjà ces signaux.
Dans une étude récente du groupe de travail DTV qui a été présentée récemment au CRTC, parmi les 840 personnes qui ne recevaient que la télévision traditionnelle radiodiffusée et qui ont participé à un sondage dans cinq centres à l'échelle du Canada, 78 p. 100 ont déclaré qu'elles paieraient des frais d'abonné de 10 $ par mois pour recevoir les signaux locaux. Cela indique que nos signaux sont importants pour le public et que ce dernier est disposé à payer pour les recevoir. Nous croyons également que les questions relatives aux frais de diffusion et aux signaux à distance sont reliées. Il y a également eu une certaine controverse relativement aux droits traditionnels des radiodiffuseurs si un régime de frais de diffusion était mis en place. Voici ce que nous proposons à cet égard.
Dans le cadre d'un régime de frais de diffusion, les signaux éloignés devraient être une question d'industrie à industrie. Ils sont considérés comme préjudiciables au marché local de chaque radiodiffuseur et pourtant, ils représentent une grande valeur pour le public qui programme et bénéficie d'une diversité de voix, puisque les points de vue de chaque coin du pays constituent des éléments cruciaux de notre démocratie. Les signaux éloignés sont également des composantes clés de l'offre de service de chaque EDR. Mais d'après ce que nous avons vu et lu jusqu'à présent, en bout de ligne, le processus de médiation du CRTC ou l'intervention gouvernementale pourrait s'avérer nécessaire pour régler cette question.
Si chaque diffuseur recevait des frais d'abonné suffisants provenant des activités des EDR qui fournissent le service dans son marché, cela aiderait certainement à compenser le préjudice causé par les signaux éloignés. En outre, il semble, à la lumière de l'information qui a été rendue publique récemment, que les EDR par câble et par satellite sont en bonne santé financière et qu'elles jouissent de marges de profit substantielles. Elles ont obtenu des augmentations substantielles des taux au cours des cinq ou six dernières années et elles sont autorisées à vendre de la publicité dans nos marchés, ce qui érode notre seule source de revenus, mais elles ne nous paient rien pour l'utilisation de notre signal. Si des frais de diffusion s'appliquent à l'échelle locale, nous ne voyons pas pourquoi ces EDR imposeraient d'autres augmentations au public. À notre avis, les EDR ont profité de la situation pour établir leur infrastructure. Il est temps qu'elles paient ce qu'elles prennent et utilisent.
Nous croyons qu'il existe une concurrence injuste de la part de la télévision de la CBC/SRC subventionnée qui exploite notre marché, sans relation entre ses recettes et ses dépenses d'exploitation ou ses coûts en capital. La CBC/SRC avec des poches très profondes, qui peut réduire la valeur de nos taux publicitaires et acheter des émissions américaines populaires comme Wheel of Fortune et Jeopardy, émissions que NTV a diffusées pendant 25 ans, jusqu'à l'an dernier, et qu'elle a rendu populaires dans ce marché. Maintenant, ces programmes sont utilisés par la CBC/SRC pour gagner des cotes contre nous. Si la CBC/SRC était subventionnée à 100 p. 100, et ne faisait pas concurrence au secteur privé pour obtenir une part de la publicité, des possibilités de publicités locales et nationales accrues s'ensuivraient pour les radiodiffuseurs privés. Une entité subventionnée ne devrait pas être autorisée à faire concurrence à l'industrie privée.
Le mandat de la CBC/SRC en vertu de la Loi sur la radiodiffusion devrait par conséquent être changé pour que la société offre un contenu canadien à 100 p. 100 sans publicité. Grâce à ce contenu canadien de 100 p. 100 de la CBC/SRC, le secteur privé pourrait être soulagé de ce fardeau d'avoir à respecter des quotas réglementaires de contenu canadien imposés par le CRTC. La vente de publicité a engagé la CBC/SRC sur une voie qui, d'après elle, exige qu'elle dépense des montants énormes pour acheter des émissions américaines et les premières de films qui coûtent cher, ce qui fait augmenter encore plus le coût des émissions américaines, car les soumissionnaires parmi les diffuseurs canadiens de droits nationaux incluent la CBC/SRC, qui utilise les deniers publics.
La CBC/SRC a annoncé récemment que 60 p. 100 de ses dépenses étaient salariales. Cela nous indique que la société est en sureffectif ou que les salaires sont trop élevés. À l'échelle locale, nous estimons qu'elle a trois fois plus d'employés que nous et ne produit que cinq heures de bulletin de nouvelles locales tandis que nous en produisons 13,5 heures chaque semaine.
De plus, des dépenses sont liées à la vente de publicité. La CBC/SRC maintient des gestionnaires des ventes, un personnel de vente salarié, tandis que le secteur privé fonctionne habituellement dans un système de commission sur les ventes et doit maintenir des services de facturation, de trafic et de crédit, des installations et un personnel de production commerciale. En bout de ligne, on pourrait très bien découvrir que l'activité liée directement ou indirectement à la vente de publicité par la CBC/SRC coûte plus cher qu'elle ne rapporte. Nous croyons que cela est particulièrement vrai dans le marché de Terre-Neuve-et-Labrador.
S'agissant du Fonds de développement culturel, à notre point de vue, la CBC/SRC et le secteur de production indépendante doivent explorer des productions canadiennes plus avant-gardistes, tandis que le secteur privé devrait se concentrer sur des productions qui sont économiquement viables et des productions de qualité où l'accent est mis sur la création d'une programmation canadienne de grande écoute pour diffusion par le secteur privé. Nous croyons que le diffuseur privé est plus à même de gérer cette création parce qu'il comprend ce qui fonctionne. Il doit y avoir un élément commercial responsable lié à la création de la programmation canadienne.
La Loi sur la radiodiffusion crée l'attente selon laquelle la programmation canadienne doit être montrée à la télévision et, même si la plupart des Canadiens croient que nous devrions offrir une programmation canadienne, les cotes d'écoute révèlent coup sur coup que peu d'entre eux regardent ces émissions. La plupart des émissions canadiennes donnent des résultats très médiocres comparativement à la programmation étrangère. Il devrait donc être évident que les Canadiens ne sont pas satisfaits de la qualité de la plupart des émissions canadiennes. Toutefois, le secteur privé doit réaliser des profits sur chaque heure de sa journée de radiodiffusion. Pour ce faire, il a besoin de cotes élevées ou, en termes plus clairs, d'émissions que les gens regardent.
Le Fonds pour l'amélioration de la programmation locale est un moyen d'aider les petites stations privées à maintenir une programmation locale. Nous savons que ce fonds est de 60 millions de dollars; nous avons appris que 72 stations seraient probablement admissibles au fonds. Nous savons également que la formule proposée est basée sur les dépenses passées de chaque station relativement à la programmation locale. Si nous divisons le fonds par le nombre de stations, nous obtenons 833 000 $ par station. Toutefois, il a été déterminé que la CBC/SRC se qualifierait dans des marchés de moins de un million de téléspectateurs où elle exploite des stations.
Nous maintenons que si la CBC/SRC a accès à ce fonds, grâce à ses économies d'échelle subventionnées, elle s'accaparera la part du lion de ce fonds. Si la part du lion de ce fonds va à la CBC/SRC, ses ressources accrues feront intensifier la course pour les dollars de publicité liés aux nouvelles. Si les cotes de la CBC/SRC augmentent à la suite de ces ressources accrues, cela se traduira par des réductions de personnel et des mises à pied dans le secteur privé, faisant ainsi disparaître les avantages du fonds pour les radiodiffuseurs privés. Au lieu d'être utile, ce fonds ne deviendra qu'une autre source de revenu pour la CBC/SRC, maintenant un dédoublement de services déséquilibré; nous ne croyons pas que cela devrait être l'objectif principal de ce fonds. Nous maintenons que la CBC/SRC ne devrait pas avoir accès à ce fonds s'il est destiné à offrir des bénéfices aux radiodiffuseurs locaux.
En outre, l'argent que le secteur privé tire de ce fonds devrait servir exclusivement à l'obtention et à la production de nouvelles de première qualité.
À notre avis, la transition vers la télévision numérique n'est pas une question de qualité ou de TVHD. Elle...
Je m'appelle Stanley James, et je suis le président du conseil d'administration de Northern Native Broadcasting, Yukon. Je suis accompagné de Sophie Green, qui est notre directrice générale. Au nom de Northern Native Broadcasting, Yukon, je tiens à remercier le président et les membres du comité permanent de leur invitation à comparaître pour parler de l'évolution de l'industrie de la télévision au Canada et de son impact sur les communautés locales.
Northern Native Broadcasting, Yukon, est financée par l'entremise de la Direction du programme des Autochtones de Patrimoine canadien. Le financement que nous recevons est demeuré à peu près inchangé depuis la mise sur pied de cette initiative. Dans les années 1980, ce financement a même diminué.
Si l'on fait droit à notre demande, nous recevons un peu plus de 1 million de dollars chaque année en vertu d'une entente aux termes de laquelle nous devons produire et distribuer une programmation de radio et de télévision. Ce sont les besoins de notre auditoire des premières nations du Yukon qui déterminent notre mandat. Un financement statique entraîne nécessairement une diminution du financement, puisque le coût de la vie et les frais d'exploitation des entreprises augmentent constamment chaque année. Les changements apportés aux normes de l'industrie, surtout en ce qui concerne la radio numérique et la haute définition, ont des effets immédiats sur notre entreprise. Nous avons dû mettre à pied des employés et fermer notre unité de production de télévision analogique, ce qui a privé sept personnes de leur emploi.
Au financement offert par Patrimoine Canada sont venus s'ajouter les revenus de la publicité, mais compte tenu du ralentissement économique actuel, ces revenus ont diminué plus rapidement pour nous que pour d'autres dans l'industrie. Compte tenu de la diminution de leur budget de publicité, les entreprises ne voient pas comme un bon investissement la publicité faite auprès de l'auditoire autochtone des communautés éloignées du Nord.
De plus, nous avons été touchés par les nouveaux médias, les changements dans les habitudes d'écoute, la fragmentation de l'auditoire et la convergence. Nous n'avons pas toujours eu le financement nécessaire pour répondre aux besoins d'une population jeune en croissance rapide qui ne voit pas le monde comme nos ancêtres. Nous devons être en mesure de produire des émissions qui intéressent la jeunesse d'aujourd'hui, de livrer notre programmation par les médias d'aujourd'hui. À titre de réseau de communications, nous devons être en mesure de continuer à jouer un rôle essentiel dans le maintien de la langue, de la culture et des coutumes des peuples autochtones.
Nous croyons que le gouvernement fédéral doit continuer d'aider les diffuseurs autochtones locaux et leur accorder une aide financière au titre des coûts de la transmission numérique. C'est ce que nous avons dit également en juin 2003 au Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes, lorsque ce comité a tenu des audiences sur le deuxième siècle de radiodiffusion au Canada. Il faudrait renforcer l'objectif du Fonds de développement culturel pour assurer la survie de la diffusion locale et établir son mandat en consultation avec les diffuseurs locaux. Souvent, les sociétés à but non lucratif comme Northern Native Broadcasting, Yukon, ne sont pas admissibles aux contributions en raison de leur statut d'organisme à but non lucratif, selon les règles des accords de contribution. Northern Native Broadcasting, Yukon, ne peut pas se prévaloir d'un régime de frais de diffusion, car ce n'est pas une entreprise de diffusion, mais plutôt de production télévisuelle. Cela signifie également que nous ne pourrons pas nous prévaloir du fonds pour l'amélioration de la programmation locale du CRTC.
Pour la communauté autochtone, la perte de la diffusion locale ou de la production locale de contenu pourrait avoir des conséquences graves. Au Yukon, les deux groupes linguistiques autochtones sont divisés en huit dialectes; il est donc très avantageux pour nous de pouvoir entendre notre langue dans autant de médias que possible. La langue autochtone du Yukon n'a eu de version écrite qu'il y a 10 ans seulement. Notre population ne représente qu'une fraction de la population du Yukon — soit environ 6 000 personnes de souche des premières nations, sur une population totale d'environ 30 000 personnes, au Yukon. Dans ce territoire, le rôle de la diffusion locale autochtone est essentiel au maintien de la diversité linguistique et de la population autochtone au Canada.
Pour conclure, permettez-moi de dire à quel point nous apprécions cette occasion que vous nous donnez de venir vous parler de l'évolution de l'industrie de la télévision au Canada et de son impact sur les communautés locales. Sophie et moi essaierons de répondre à vos questions.
Merci.