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Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs. Bonjour et merci de me donner l'occasion d'être parmi vous aujourd'hui. Il semble que ce soit une séance historique.
Comme vous l'avez dit, monsieur le président, je suis accompagné aujourd'hui de Janice Tranberg, qui est notre vice-présidente pour l'Ouest du Canada, et elle vient de Saskatoon, de notre bureau de l'innovation de l'Université de la Saskatchewan, et elle dirige également notre secteur de la biotechnologie végétale.
En tant que président de CropLife Canada, l'association commerciale qui représente les concepteurs, les manufacturiers et les distributeurs de technologies en sciences végétales, y compris la biotechnologie végétale, je suis toujours heureux de parler de la place qu'occupe notre industrie dans l'avenir du Canada.
Tous, petits et grands, concepteurs de biotechnologies agricoles, de même que les distributeurs et les fabricants de ces produits, jouent un rôle important dans le secteur agricole canadien. Et comme les gouvernements cherchent à maintenir ou à attirer les investissements de ces compagnies, il est important de comprendre ce qui oriente leurs décisions.
Notre industrie est hautement scientifique et contribue de façon importante à la recherche à l'échelle internationale. Chaque nouveau caractère biotechnologique requiert environ 10 ans de recherches et coûte entre 100 et 150 millions de dollars avant d'être offert sur le marché.
Avec plus de 5 milliards de dollars dépensés annuellement à l'échelle mondiale, notre industrie compte pour le tiers des investissements mondiaux en recherche et développement dans le secteur de l'agriculture. Cela représente environ 11 p. 100 des ventes et place notre industrie dans la même ligue que les compagnies pharmaceutiques en ce qui a trait aux montants réinvestis en R-D, ce qui constitue un témoignage clair de notre engagement envers l'innovation.
Comme vous êtes à étudier l'avenir de la biotechnologie en agriculture au Canada, permettez-moi d'être clair, sans équivoque, au sujet de ce que notre industrie recherchera au moment de se livrer au même exercice. Notre industrie s'interrogera à savoir si le Canada a tenu son engagement concernant une réglementation fondée sur la science. Sans un système réglementaire rigoureux, basé sur la science, notre industrie sera incapable d'investir dans ce pays au même niveau que par le passé, particulièrement lorsqu'il existe d'autres occasions d'investir dans des pays où les critères de réussite sont clairs et prévisibles. Là où les biotechnologies végétales sont soutenues, elles offrent des avantages sur trois plans très importants: elles profitent aux producteurs, elles profitent à l'environnement et elles profitent aux consommateurs.
Comme vous pouvez vous l'imaginer, les biotechnologies auraient été boudées si elles n'avaient pas offert des avantages économiques à leurs clients, les producteurs agricoles canadiens.
Différentes études nous indiquent que mondialement, en 2007, l'avantage économique net à la ferme des cultures biotechnologiques représentait 10,1 milliards de dollars US. La valeur économique directe et indirecte du canola GM est de 300 millions de dollars canadiens par année. Les biotechnologies ont diminué de 17,2 % l'impact environnemental et les coûts associés à l'utilisation des herbicides et des insecticides sur la période allant de 1996 à 2007.
Il n'est donc pas surprenant de voir les producteurs agricoles canadiens s'associer à leurs fournisseurs de semences pour manifester leur appui envers les biotechnologies. Présentement, dans le canola, les producteurs canadiens optent à 90 p. 100 pour les semences OGM; dans le cas du maïs, c'est à 85 p. 100 et à 65 p. 100 dans le soya. Mondialement, les producteurs agricoles canadiens occupent le cinquième rang quant aux superficies ensemencées avec ces technologies.
À l'heure actuelle, une grande partie de la recherche vise à trouver des façons d'améliorer et de protéger l'environnement, ainsi que de s'adapter à un environnement qui change continuellement. Dans les années qui viennent, nous nous attendons à voir de nouveaux caractères qui offriront la tolérance à la sécheresse et à d'autres stress comme le froid et le sel, une nouvelle résistance à la maladie, une meilleure utilisation de l'azote, de même que toute une gamme d'aliments plus favorables à la santé.
La perspective de nouvelles cultures tolérantes à la sécheresse est particulièrement intéressante compte tenu de la demande élevée en eau de l'agriculture, car les Nations Unies estiment qu'en 2030, un pays sur cinq connaîtra des pénuries d'eau. Nous avons besoin de variétés résistantes à la sécheresse avant ce moment-là si nous voulons relever les défis de la sécurité alimentaire qu'un tel manque d'eau causerait.
Une personne sur six est déjà sous-alimentée. Qu'arrivera-t-il si un pays sur cinq cesse d'avoir assez d'eau pour cultiver sa nourriture?
Les cultures tolérantes à la sécheresse peuvent mettre en marche des mécanismes naturels de défense plus tôt au cours du stade de manque d'eau, d'où leur potentiel pour jouer un rôle important auprès des producteurs canadiens et ceux des pays en voie de développement.
Le maïs et le canola qui utilisent mieux l'azote feront aussi leur apparition. La réduction de la quantité d'intrants requis permet aux producteurs d'économiser temps et argent. De toute évidence, voilà deux choses qu'ils aiment vraiment.
En améliorant la capacité des cultures à utiliser l'azote, nous réduisons les montants d'argent que les producteurs consacrent aux fertilisants et la quantité de carburant utilisé pour les appliquer, tout en accroissant leur profitabilité. Selon nous, et j'oserais dire que c'est un point de vue que beaucoup de producteurs et de consommateurs partagent, ce sont là des innovations qui valent la peine d'être recherchées.
Dans ce cas, posons-nous la question suivante: quelle vision le Canada a-t-il de l'avenir de son agriculture et comment compte-t-il assurer la compétitivité de ses producteurs? Notre pays désire-t-il qu'on investisse ici, en innovation et en biotechnologie agricole? Si oui, qu'est-ce qui doit être fait pour attirer l'investissement et, ultimement, commercialiser ces nouvelles technologies ici au Canada?
Comme je l'ai dit plus tôt, d'abord et avant tout, il faut des règles fondées sur la science. Un cadre réglementaire prévisible, fondé sur les faits scientifiques, est essentiel. En tant qu'industrie, nous acceptons que la technologie soit, et qu'elle doit être, hautement réglementée pour assurer la sécurité du public et la protection de l'environnement. Toutefois, nous croyons que cela doit reposer sur une base scientifique. Pas sur des sondages, ni sur des anecdotes personnelles, mais solidement basé sur une science examinée par les pairs.
Deuxièmement, le Canada doit assumer un rôle de leadership dans la modernisation de la réglementation mondiale. Surtout, cela signifie que le Canada doit concevoir et adopter une politique au sujet de la présence d'une quantité infime de cultures génétiquement modifiées et puis d'inciter les autres pays à faire de même. En réalité, la technologie de détection est devenue si incroyablement précise qu'il est possible de détecter un grain de lin parmi 10 000. Comme vous l'avez entendu, entre autres, de la part d'autres personnes venues témoigner dans le cadre de cette étude, la tolérance zéro n'est tout simplement pas réaliste, et la présence de quantités infimes et sécuritaires de cultures GM approuvées ne devrait pas nuire au mouvement des produits de base autour du monde.
Par manque de temps, je ne peux pas aborder d'autres secteurs importants de la réglementation et des politiques, dont un énoncé de politique clair sur les produits industriels fabriqués à partir des plantes, l'accord commercial entre le Canada et l'Union européenne, les autorisations asynchrones, les protocoles de retrait de produits et les échéanciers d'une réglementation efficace.
Aussi, d'autres éléments sont étroitement reliés à la réglementation et à la capacité du Canada d'attirer l'innovation. Signalons, entre autres, un financement approprié, la formation et l'allocation des ressources humaines dans les agences de réglementation et les ministères, de même que l'alignement continu de ce pays avec les pays industriels qui ont les mêmes orientations. Les innovations en biotechnologie végétale s'accélèrent, et le nombre de demandes d'approbation augmentera lui aussi. Le Canada doit se préparer pour un accroissement marqué des activités sur ce front.
Je vous explique. Là où, au cours des dix dernières années, à l'échelle mondiale, 33 demandes d'approbation ont été soumises pour des biotechnologies, nous nous attendons à ce qu'il y en ait 125 au cours des cinq prochaines années seulement. Et près de la moitié d'entre elles proviendront de l'Asie.
Mesdames et messieurs, voilà la nouvelle concurrence. Ce sont les pays comme la Chine qui investissent 1 p. 100 de leur PIB en recherche, dont une grande partie est dédiée à la biotechnologie agricole. Si vous croyez qu'il y a un problème aujourd'hui concernant les politiques de faible présence et un accès rapide pour nos agriculteurs aux outils, attendez que cette concurrence commence à se faire sentir.
Pour affronter ce genre de volume, une efficience accrue et une bonne performance de la part du système de réglementation sont essentielles, tant à l'interne qu'entre les ministères et les agences. C'est ce qu'il faut pour que le retard d'un ministère n'alourdisse pas la performance globale du gouvernement.
Le Canada peut partiellement aider à diminuer cette pression par une synchronisation accrue des approbations, en utilisant des approches communes à l'évaluation du risque et des révisions mixtes pour éviter les problèmes commerciaux liés aux approbations asynchrones de plantes porteuses de caractères nouveaux et présentes en quantité minime. De même, le Canada peut reconnaître les décisions réglementaires des autres pays, particulièrement ceux d'Amérique du Nord, pendant qu'il évalue lui-même ses risques. Et il peut essayer de conclure des accords réglementaires bilatéraux ou multilatéraux pour accroître la prévisibilité et l'efficience.
Notre industrie est enthousiaste quant à l'avenir des innovations en agriculture. Depuis des décennies, nos innovations ont contribué à nourrir le monde d'ici et de partout sur la planète en offrant aux producteurs les outils qui aident à produire plus de nourriture sur moins de terre. Nous attirons quelques-uns des meilleurs cerveaux en recherche et en affaire. De plus, il existe une chose que nous partageons tous, et c'est notre fierté dans les solutions que nous générons pour affronter les défis d'aujourd'hui et ceux qui surviendront à l'avenir.
Nos gouvernements fédéral et provinciaux doivent parler de l'approche réglementaire de façon à renforcer la confiance du public. Une façon commune de penser partout au Canada et la volonté de défendre la légitimité de politiques fondées sur la science sont absolument essentielles pour attirer l'investissement et pousser plus loin l'innovation.
Nous croyons que la biotechnologie peut jouer un rôle central et transformationnel pour l'avenir du Canada et la compétitivité des agriculteurs canadiens. Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, nous espérons que vous arriverez à la même conclusion en étudiant plus à fond ce sujet. Nous vous demandons de vous joindre à nous pour aider la croissance au Canada.
Merci, monsieur le président.
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Merci monsieur le président.
Merci aux membres du comité de m'avoir invitée aujourd'hui au nom du Réseau canadien d'action sur les biotechnologies pour vous parler de la question du génie génétique.
Il est important de regarder ce que nous avons appris à propos du génie génétique au cours de nos 15 années d'expérience avec cette technologie dans les domaines des aliments et de l'agriculture au Canada.
Je travaille à Ottawa en tant que coordonnatrice pour le Réseau canadien d'action sur les biotechnologies, le RCAB. Notre réseau est une coalition de 18 organismes de partout au Canada qui ont des préoccupations et des expériences diverses en matière de génie génétique. Cela comprend des organismes de développement international tels que Inter Pares et USC Canada. Il y a aussi des associations d'agriculteurs comme la Saskatchewan Organic Directorate, l'Ecological Farmers' Association of Ontario et l'Union paysanne. Notre réseau comprend également des coalitions de groupes locaux comme la Society for a G.E. Free B.C. et la Prince Edward Island Coalition for a GMO-Free Province.
Ce qui nous rassemble, ce sont des préoccupations concernant les effets du génie génétique, que ces effets soient économiques, sociaux ou environnementaux, et le déficit démocratique concernant la prise de décisions au sujet de cette technologie.
Notre réseau existe depuis trois ans. Dans mon rôle de dirigeante de notre petit secrétariat ici à Ottawa, je fais des recherches et je participe à des activités de communication, comme mon témoignage ici aujourd'hui.
Je mène des recherches et je fais campagne sur les questions de génie génétique depuis 15 ans. Par exemple, mardi, Gord Surgeoner a parlé d'un conseil qui rassemblait divers intervenants. Il parlait du Comité consultatif canadien de la biotechnologie. J'ai participé aux travaux de ce comité lorsque j'étais au Sierra Club du Canada. Ce comité n'existe plus.
J'étais ici lors de la première séance de mardi, et j'ai compris que le comité était ouvert aux recommandations, ou en demandait explicitement. J'ai cru observer une certaine ouverture face à de nombreuses questions concernant l'industrie de la biotechnologie. Nous espérons que c'est le cas, car nous croyons qu'il y a de très nombreux enjeux essentiels, comme ceux soulevés par le projet de loi C-474. Je vais vous faire part de notre analyse de ce que devrait faire le Canada, de nos positions et de ce qui s'en vient l'année prochaine.
Je crois que le débat sur le projet de loi C-474 a été l'un des éléments déclencheurs de ces audiences, et nous croyons qu'il est très pertinent que les préoccupations des agriculteurs au sujet des conséquences des biotechnologies mènent à une étude sur le génie génétique.
Soyons clairs, je parle de génie génétique tel que défini par l'ACIA, c'est-à-dire la technologie de l'ADN recombinant. Voilà ce dont nous parlons lorsque nous parlons de biotechnologie. Voilà l'enjeu, et c'est là que se trouve en grande partie la controverse.
Le RCAB dit qu'il y a des problèmes fondamentaux en ce qui concerne le génie génétique et la façon dont le gouvernement canadien aborde cette technologie, y compris notre réglementation.
Je vais parler de certaines de nos préoccupations en utilisant l'exemple de trois situations auxquelles le Canada fait face, soit l'arrivée possible de trois produits génétiquement modifiés: la luzerne, le porc et le saumon.
Dans le court mémoire que le RCAB a soumis au comité, nous nous penchons sur ces trois cas, ainsi que sur la question du blé génétiquement modifié, qui illustre d'après nous la nécessité d'évaluer les conséquences négatives possibles du recours au génie génétique sur le marché d'exportation. Ces exemples soulignent également d'autres grands enjeux et de possibles impacts négatifs.
Pour commencer, le RCAB souhaite manifester son appui au projet de loi C-474 et recommande que les préoccupations sociales et économiques soient intégrées dans la réglementation sur le génie génétique.
Le RCAB veut également rappeler au comité qu'en 2001, tel que demandé par les ministres de l'Agriculture, de l'Environnement et de la Santé, le comité d'experts sur l'avenir de la biotechnologie alimentaire de la Société royale du Canada a publié 58 recommandations pour une réforme de la réglementation. Le RCAB aimerait que le gouvernement mette en oeuvre toutes ces recommandations.
Je vais maintenant parler brièvement des trois organismes génétiquement modifiés auxquels nous avons affaire immédiatement. Les trois présentent des menaces économiques et environnementales importantes, et amènent ou amèneront de fortes perturbations sociales. La luzerne, le porc et le saumon feront certainement l'objet d'une contestation sociale.
Voici l'avenir immédiat du génie génétique. L'un ou l'autre de ces trois produits pourrait être présent sur le marché l'an prochain ou même cette année. Chacun est approuvé par un processus qui n'est accessible ni à la population, ni aux scientifiques indépendants. Chacun de ces produits fait face à une intense opposition pour des raisons différentes. Ces trois organismes GM exemplifient trois préoccupations centrales que nous aimerions soulever.
Premièrement, la contamination est une réalité et a des conséquences négatives nombreuses sur les plans social, économique et environnemental.
Deuxièmement, on réalise en ce moment dans les universités des travaux de recherche sur les OGM grâce à des fonds de l'industrie ou du gouvernement, mais sans mandat public.
Enfin, les processus décisionnels du gouvernement sont tenus secrets et excluent toute participation du public, et se fondent uniquement sur la recherche scientifique privée. Ces processus hautement secrets pourraient permettre la commercialisation du premier aliment génétiquement modifié d'origine animale au monde.
Revenons au premier enjeu, la contamination, dont le comité a déjà discuté en profondeur, et nous verrons qu'elle a de nombreuses conséquences sociales, économiques et environnementales et que l'illusion de la coexistence se dissipera si la luzerne GM arrive. Par coexistence, je veux dire la capacité des cultures ou de l'agriculture biologique et non génétiquement modifiée de cohabiter avec les cultures génétiquement modifiées. La luzerne contaminera le reste. C'est une certitude, étant donné les caractéristiques de la luzerne qui est une culture vivace dont la pollinisation est assurée par les abeilles. Les témoins du secteur de la culture fourragère vous en ont déjà parlé. La contamination se produit, et les agriculteurs ont toujours su que ce serait le cas. La contamination a été prédite et est prévisible, mais il n'y a toujours pas de politiques ou de mécanismes réglementaires en place pour s'en occuper.
La luzerne nous démontre comment certaines applications du génie génétique peuvent constituer une menace claire pour certains agriculteurs, mais ces agriculteurs ne sont pas en mesure de communiquer effectivement avec le gouvernement. On ne consulte pas les agriculteurs au sujet des conséquences qu'ils prévoient.
Comme le comité l'a entendu en juin, les agriculteurs de fourrage traditionnel sont convaincus que la luzerne GM ruinera leurs entreprises. Et comme le comité l'a entendu de l'industrie des cultures biologiques, la luzerne GM est une menace claire et immédiate à l'avenir du système agricole et alimentaire entier en Amérique du Nord.
Pour résumer, nous croyons que la question de la luzerne GM souligne de façon claire le besoin d'inclure des considérations sociales et économiques dans le processus décisionnel.
Deuxièmement, comme je l'ai déjà mentionné, il se fait de la recherche sur les OGM dans les universités grâce à des fonds de l'industrie ou du gouvernement, mais sans mandat public. On pourrait examiner l'exemple d'« Enviropig ». Le Canada sera bientôt à l'origine du porc GM, le porc GM de marque commerciale Enviropig.
Le Canada pourrait être le premier pays à approuver le porc GM pour la consommation humaine. L'Université de Guelph a présenté une demande à Santé Canada en avril 2009, et c'est tout ce que nous savons car c'est le seul renseignement que l'université a diffusé à la population. Environnement Canada a déjà approuvé sa reproduction en milieu fermé.
Enviropig a été conçu par des chercheurs canadiens, grâce à des fonds publics, à l'Université de Guelph. Il a été conçu avec des fonds publics mais, d'après nous, sans mandat public. Tout comme pour le lin GM Triffid, une université est prête à commercialiser un produit dont les consommateurs et même les agriculteurs ne veulent pas. Alors nous nous demandons où est la surveillance publique dans ce processus.
Le projet Enviropig a été conçu il y a plus de dix ans et s'est poursuivi en vertu de deux présomptions que nous savons maintenant fausses: premièrement, que ce produit était une solution écologique et serait perçu comme tel; deuxièmement, que les consommateurs accepteraient les aliments GM lorsque ce produit serait prêt pour le marché.
Le Canada a urgemment besoin d'évaluer l'acceptation sociale et les conséquences environnementales d'Enviropig. Notre système réglementaire actuel ne permet pas au gouvernement d'examiner ces questions. Concrètement, elles ne font pas partie de la réglementation. Santé Canada pourrait approuver le porc GM pour consommation humaine au Canada demain. Le chaos que causera probablement cette décision sur le marché national et international du porc et des produits du porc canadiens n'a aucune importance, selon la réglementation actuelle.
Cela nous ramène à la question des conséquences négatives pour les marchés d'exportation, le problème souligné par le , le problème central de l'approbation de cultures GM, sans égard aux conséquences économiques et sociales connues, prévues ou possibles. La commercialisation possible d'Enviropig nous rappelle de façon brutale qu'il n'y a pas d'étiquetage obligatoire des aliments GM au Canada. Ce qui se produira en réalité, c'est que les consommateurs éviteront le porc et les produits de porc pour éviter de consommer du porc GM.
Enfin, d'après nous, les processus décisionnels du gouvernement sont tenus secrets et excluent toute participation publique. Ces processus se fondent uniquement sur la recherche scientifique que réalise le secteur privé et qui lui appartient, même si ces décisions peuvent avoir des conséquences très graves.
Je veux parler du saumon modifié génétiquement, parce qu'il représente certains problèmes très précis qui touchent également à d'autres organismes génétiquement modifiés. Le Canada s'apprête à devenir la source d'oeufs de saumon GM pour le reste du monde.
Les documents publiés par la U.S. Food and Drug Administration ont révélé qu'AquaBounty, une entreprise américaine, prévoit produire tous ses oeufs de saumon GM à l'Île-du-Prince-Édouard pour les envoyer ensuite au Panama afin de les cultiver et les transformer, puis finalement les expédier sur le marché américain.
J'ai, comme d'autres, appelé Santé Canada pour demander des renseignements à propos d'une évaluation possible des risques, et Environnement Canada refuse même de nous dire si une telle évaluation des risques est en cours. C'est parce qu'Environnement Canada est maintenant responsable de la réglementation des animaux GM, y compris le poisson.
En conclusion, le gouvernement a investi dans l'industrie de la biotechnologie en tant que moteur économique, en tant qu'activité économique utile. Mais d'après nous, le génie génétique détruira les éleveurs de porc et les producteurs de céréales biologiques au Canada.
Nous croyons qu'il est urgent que le gouvernement agisse pour résoudre ces problèmes qui sont en train de devenir une crise, une crise qui coûtera à nos agriculteurs leurs cultures et leur certification biologique. Elle coûtera aux éleveurs de porc leurs marchés, tant national qu'international.
C'est une crise qui deviendra une crise de confiance des consommateurs envers le système alimentaire et notre démocratie. Dans le cas du saumon GM, c'est une crise qui pourrait mener à la disparition d'espèces et une crise mondiale de protection des espèces.
Malheureusement, il ne s'agit pas pour nous d'exagération. Ce sont des évaluations des risques, et le gouvernement n'a pas entre les mains les outils pour poser ces questions ou y répondre.
Nous recommandons que le gouvernement impose un moratoire sur l'approbation de tous nouveaux organismes génétiquement modifiés jusqu'à qu'il y ait un vaste débat démocratique, ainsi qu'un changement fondamental de notre façon d'aborder cette technologie.
Merci.
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Merci pour votre remarque et votre question.
Vous avez soulevé à juste titre la tragédie dans le monde que représente le milliard de personnes qui subissent la malnutrition et la faim. Je pense que la plupart des gens estiment que les choses ne vont pas aussi bien que nous l'aurions voulu, lorsqu'ils tentent de comprendre cette tragédie et de déterminer comment le monde résoudra ce problème, qui remonte à loin et qui persiste — et je pense que les objectifs de développement du millénaire cherchaient à réduire ce taux de moitié d'ici 2015. Mais je pense qu'il n'est pas exagéré de dire que nombre de pays du monde, de gouvernements et d'organismes de réglementation les régissant reconnaissent que nous allons probablement avoir besoin de tous les outils possibles, qui devront être utilisés de façon responsable, pour régler ce problème, de même que celui de l'eau, etc.
Je pense que c'est ce phénomène que l'on constate à l'échelle mondiale maintenant, compte tenu des nombreux pays en développement qui prennent le train en marche. À l'heure actuelle, quelque 25 pays ont des cultures génétiquement modifiées sur environ 330 millions d'acres, dont 90 p. 100 sont des pays en développement.
En ce qui concerne l'Europe, je devrais dire, avant d'aborder cette question et celle de la dépendance à la technologie — je devrais y revenir aussi... Tout est une question de choix. C'est une question de choix pour le consommateur et pour l'agriculteur. Parce que je travaille dans l'industrie des sciences végétales, bien des gens estiment que je suis d'une façon ou d'une autre contre les produits biologiques. Ce n'est pas le cas. Si les agriculteurs décident de faire pousser des produits biologiques, et si les consommateurs décident de les acheter, ils ont tout à fait le droit de le faire, et la décision leur appartient, mais il faut que cette décision se fonde sur des faits quant aux avantages et aux risques.
Pour ce qui est de l'affirmation selon laquelle les agriculteurs deviennent dépendants des technologies que nous créons, je dirais qu'on sous-estime gravement l'intelligence de l'agriculteur moyen. Ce sont des gens très astucieux qui n'opteraient pas pour ces technologies, comme ils le font au Canada, si elles ne présentaient pas des avantages économiques.
Les agriculteurs sont de bons intendants de nos terres. Voilà leur raison d'être, en quelque sorte, parce que s'ils ne gèrent pas bien nos terres et l'environnement, de même que l'air, ils disparaîtront. De dire que cela relève de la tech... que les agriculteurs ne sont pas suffisamment intelligents pour s'en rendre compte signifie à mon avis qu'on les sous-estime gravement.
Au chapitre de l'Europe et des niveaux de tolérance, encore une fois...
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À mon avis, monsieur Atamanenko, c'est exactement ce que font les organismes réglementaires. Ils sont au fait de toutes les études et savent quels travaux sont en cours.
J'aimerais revenir sur vos commentaires précédents au sujet du secteur des biotechnologies qui se porte bien au Canada. Vous avez raison, il se porte bien parce que nous disposons de règlements efficaces, fondés sur des faits scientifiques solides et prévisibles, qui favorisent l'investissement.
Certains affirment que c'est notre industrie qui était contre ce projet de loi. Qui a témoigné devant ce comité? Pratiquement tous les groupes d'agriculteurs qui ont témoigné devant ce comité étaient contre le projet de loi. Ce n'est donc pas seulement l'industrie. Les Western Canadian Wheat Growers, le Conseil du Canola, la Canola Growers Association, les Grain Farmers of Ontario, le Conseil de fabrication des produits à la consommation et d'aliments, l'industrie des semences: tous ces intervenants ont la même opinion du projet de loi.
C'était aussi le cas pour les universitaires qui sont venus témoigner devant le comité. Le Dr Phillips, de l'Université de la Saskatchewan, s'est présenté devant ce comité et a dit que si le projet de loi avait été en place — ce n'est pas moi qui le dis, c'est ce chercheur universitaire — les 3,3 milliards de dollars investis dans le canola, qui font que l'industrie se porte bien au Canada, auraient été en danger.
J'ai une dernière remarque à faire, parce qu'elle est pertinente pour le travail futur de ce comité. Mon collègue ici a mentionné que la définition qu'ils utilisent pour la biotechnologie des plantes est celle de l'ACIA, que j'accepte totalement. Mais je pense que vous allez constater qu'à l'échelle du Canada, dans le domaine de la sélection des plantes, le rôle de la biotechnologie et de la génomique évolue et prend de l'ampleur, un peu comme l'ont fait les technologies informatiques.
Prenons un exemple. Il y a 10 ou 15 ans, créer une paire de bases d'ADN coûtait 3 millions de dollars. Aujourd'hui, vous pouvez le faire pour 100 $. Depuis le milieu des années 1990, nous sommes passés de la sélection des plantes à la science transgénique, à la mutagénèse irradiée, à la mutagénèse créée par produits chimiques, à la sélection à l'aide de marqueurs. Je pense que votre comité entendra de plus en plus parler de la bio-informatique, parce que nous générons des tonnes de données maintenant. Je siège au conseil de Génome Canada...
J'aimerais revenir sur l'observation liée à la santé, la sécurité et l'environnement formulée dans une discussion précédente — je pense que c'est M. Valeriote qui en a parlé — et aux similarités dans ces domaines. Nous avons des opinions opposées, mais je pense qu'il y a beaucoup de points communs autour de la table.
D'abord et avant tout, nous voulons tous nous assurer que les technologies, qu'il s'agisse de médicaments ou de plantes génétiquement modifiées, sont utilisées adéquatement, de façon responsable, et qu'elles ne mettent pas en jeu la santé du public ou de l'environnement. Je pense qu'il y a beaucoup de points communs ici.
De plus, je pense que tout le monde s'entend que si ces produits sont vendus aux agriculteurs, ils doivent être efficaces et ne doivent pas être un remède de charlatan, si vous voyez ce que je veux dire. Ils doivent être efficaces.
Un nombre phénoménal d'agriculteurs ont adopté le maïs, le soya et le canola. C'était probablement considéré comme une technologie révolutionnaire à la fin des années 1920, lorsque la technologie du maïs hybride a été commercialisée. Nombre de personnes l'ont adoptée, et cette fois-ci, on a probablement dépassé ce nombre.
Il y a aussi certains nouveaux caractères dont nous avons parlé qui se profilent dans ce secteur. Je viens de l'Ouest canadien et je continue de pratiquer l'agriculture là-bas. Nonobstant l'énorme inondation que nous avons eue cette année qui a ruiné des millions d'acres, j'exploite des terres au milieu du triangle de Palliser. Je vous assure, la plupart des années, j'adorerais avoir des plantes qui tolèrent la sécheresse, parce que le temps est en général extrêmement sec. Cette technologie pourrait donc présenter d'importants avantages au Canada et ailleurs dans le monde.
Lorsque vous parlez de points communs, encore une fois, si les changements climatiques nous frappent, et les agriculteurs doivent composer avec le climat tous les jours, c'est ce qu'on appelle la météo, eh bien, dans un certain degré, cette technologie fait partie intégrante de la réponse au changement climatique, bien qu'elle ne soit pas la panacée.
Ceux qui ont assisté à notre conférence il y a quelques semaines auront entendu le Dr Skole, de l'Université du Michigan. Au chapitre des changements climatiques, il a dit que si vous êtes producteur de blé dans l'Ouest canadien, vous aurez besoin de deux outils: les pratiques agricoles et la génomique. À son avis, ce sont les deux outils qui sont cruciaux.
Un dernier commentaire en ce qui concerne les points communs, la sûreté, l'environnement, etc. Lucy a fait allusion aux travaux qu'elle a faits au sein du Comité consultatif canadien sur les biotechnologies, par le biais d'une des organisations membres. Ils ont passé deux ans à étudier les produits alimentaires issus de la biotechnologie. Voilà l'une des conclusions que l'on trouve dans le rapport du Comité consultatif canadien sur les biotechnologies:
Nous avons conclu qu'aucun fait scientifique ne laisse croire que les plantes et les aliments génétiquement modifiés qui se trouvent actuellement sur le marché posent plus de risques pour l'environnement ou la santé que les autres aliments.
En fait, le comité affirme aussi qu'il est possible que ces plantes et aliments « aient fait l'objet d'un examen réglementaire plus minutieux que leurs homologues conventionnels ».
Je voulais seulement mentionner ce point.
En ce qui concerne les autres produits, Janice, vouliez-vous...
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Merci, monsieur le président.
Merci. Excusez mon retard; j'ai lu les mémoires où j'ai trouvé quantité de renseignements. Comme l'a dit Frank, il y a deux solitudes. Notre souci est de jeter un pont entre les deux. Quant à nous, qui croire? C'est aussi simple que cela.
Lucy, on a parlé du saumon de l'Île-du-Prince-Édouard et je vous demanderais de vous reporter à ce que la FDA aux États-Unis affirme sur ce produit.
Je vous dirai que le canola non-GM est une denrée qui nous inquiète au plus haut point à l'Île-du-Prince-Édouard. Si le canola GM était introduit dans notre région, nous perdrions complètement le marché japonais. Le marché japonais pour le canola non-GM et de nombreuses autres cultures non-GM et biologiques est énorme pour nous. Le marché japonais est un marché de choix, important pour nous. Il faut dire que nous perdrions ce marché car nos clients procèdent à des enquêtes pour vérifier s'il y a des cultures GM qui pourraient contaminer le canola.
Quant au saumon de l'Île-du-Prince-Édouard, la FDA a terminé son analyse portant sur AquaAdvantage Salmon aux États-Unis, le 20 septembre... Permettez-moi de citer ce que dit ce rapport. La FDA conclut que les aliments tirés du saumon triploïde de AquaBounty Technologies « sont tout aussi salubres que les aliments tirés du saumon conventionnel » et que « on peut avoir une certitude raisonnable qu'il n'y a aucun risque à consommer ces aliments ». On ajoute qu'on devrait procéder à une autre étude sur l'allergénicité du poisson diploïde et la soumettre à une évaluation. On ajoute qu'il semble que les mesures de confinement semblent adéquates à l'Île-du-Prince-Édouard comme au Panama.
Je disais cela pour mémoire afin que l'on sache qu'il y a deux côtés à la médaille.
Fort des délibérations que nous avons tenues sur le projet de loi , je m'inquiète de deux aspects: la situation évolue trop rapidement sans que l'on puisse compter sur un examen adéquat de la part des pairs, sans qu'il y ait transparence aux mesures de protection pour le blé et la luzerne.
Vous avez raison, si la luzerne était contaminée, nous aurions de graves difficultés sur nombre de nos marchés biologiques. Il s'agit de la culture originale pour la production biologique et il ne semble pas y avoir beaucoup d'études non seulement sur le plan de la salubrité et de la santé mais sur l'environnement, l'impact économique et l'impact sur la biodiversité.
Voici donc la question que je vous pose à tous. Il y a le pour et le contre pour ce qui est de l'industrie biotechnologique — beaucoup de positif mais également certains risques. Comment donc s'y prendre? Quel système doit-on mettre en place? Je suis d'accord avec Frank: le Comité consultatif canadien sur la biotechnologie serait extrêmement important. Mais comment concevoir un système qui inspirerait une confiance raisonnable de part et d'autre en ce qui concerne les mesures nécessaires appliquées afin que le citoyen moyen les accepte tout comme les décideurs qui interviennent dans le processus politique?
Lorne.