Messieurs et mesdames les membres du comité, notre fédération vous remercie beaucoup de prendre du temps pour recueillir ses commentaires dans le cadre de vos travaux sur la pêche récréative.
Je m'appelle Michel Baril et je suis biologiste à la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs.
La Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs est une organisation sans but lucratif qui a vu le jour en 1946. Sa mission est de contribuer au développement et à la perpétuation de la chasse et de la pêche sportive comme activités traditionnelles, patrimoniales et sportives.
En somme, ses objectifs sont les suivants: représenter les intérêts des chasseurs et des pêcheurs sportifs; défendre et protéger la pratique des activités de chasse et de pêche, et en faire la promotion afin d'en assurer la pérennité; promouvoir l'adoption de comportements responsables par les chasseurs et les pêcheurs; coopérer avec les autorités publiques à l'établissement de programmes de conservation et d'aménagement des habitats de la faune; coopérer avec les autorités publiques à l'établissement de plans de gestion de la faune qui aident les gouvernements à atteindre leurs objectifs biologiques, sociaux et économiques.
La fédération compte aujourd'hui plus de 200 associations regroupant à leur tour plus de 125 000 membres répartis dans toutes les régions du Québec. Elle peut compter sur l'appui de ses deux filiales, Héritage faune et Sécurité nature, pour atteindre ses objectifs.
Héritage faune est la fondation officielle de la fédération. Elle a été fondée en 1980 et elle a comme mission d'offrir diverses sources de financement qui permettent la réalisation de projets d'aménagement faunique aquatiques et terrestres, de bourses d'études et de programmes de relève, notamment pour la pêche sportive. En 2015, elle participera au financement de 62 projets de relève à la pêche récréative.
Sécurité nature, pour sa part, a été créée en 1995. Elle est le maître d'oeuvre de la fédération en matière d'éducation. Elle assure la diffusion des cours du Programme d'éducation en sécurité et en conservation de la faune — le PESCOF —, et la coordination de 450 moniteurs bénévoles chargés de donner les cours dans toutes les régions du Québec. Elle rédige aussi du matériel éducatif relatif à la conservation et à la mise en valeur de la faune et de ses habitats, ainsi qu'à des activités connexes aux loisirs de plein air. En 2014 seulement, cette filiale a formé 20 000 personnes dans le cadre du Cours canadien de sécurité dans le maniement des armes à feu.
Au cours des dernières années, la fédération s'est impliquée dans de nombreux dossiers concernant le développement et la promotion de la pêche sportive au Québec. Parmi les dossiers importants, il y a celui de la reconnaissance légale des activités de prélèvement. Ainsi, à la fin des années 1990 et au début des années 2000, elle a travaillé de pair avec d'autres organisations pour faire protéger les activités de prélèvement de la faune, dont la pêche sportive.
C'est en 2002 que le gouvernement du Québec a modifié la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune à cette fin. L'article 1.3 de cette loi dit ceci: « Toute personne a le droit de chasser, de pêcher et de piéger, conformément à la loi. » Quant à l'article 1.4, il se lit ainsi: « Nul ne peut sciemment faire obstacle à une personne effectuant légalement une activité visée au premier alinéa de l'article 1.3, y compris une activité préparatoire à celle-ci. »
La fédération s'implique également dans la promotion de la pêche sportive, par exemple lors de la Fête de la pêche, une activité de trois jours qui a lieu en juin, au cours de laquelle les Québécois peuvent pêcher sans permis. Par l'intermédiaire de sa fondation Héritage faune, elle distribue 62 subventions à des affiliés qui se chargent d'organiser des activités de formation de la relève à cette occasion.
La fédération participe également activement à la gestion de la faune au Québec et au Canada. Au niveau québécois, elle participe à la Table nationale de la faune et aux tables régionales de la faune, qui sont constituées en vertu de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Au niveau canadien, elle collabore avec le Service canadien de la faune à la gestion de la sauvagine.
Elle est également membre de la Fédération canadienne de la faune. Elle participe aussi au Comité consultatif sur la chasse et la pêche à la ligne mis sur pied en 2013 par le ministre fédéral de l'Environnement. M. Pierre Latraverse, le président de notre fédération, assume la responsabilité de cette participation.
Je vais maintenant dire quelques mots sur le cadre de gestion de la pêche sportive au Québec.
L'offre de pêche sur les terres du domaine de l'État est assurée par différents types de territoires, à savoir: les zones d'exploitation contrôlées, des territoires qui sont gérés par des conseils d'administration bénévoles; les pourvoiries exploitées par des entreprises privées selon des ententes avec le gouvernement; les réserves fauniques administrées par la Société des établissements de plein air du Québec — la Sépaq —, qui est une société d'État; les territoires libres sans structure d'accueil, qui sont accessibles gratuitement.
Ensemble, ces territoires offrent aux Québécois une foule d'occasions d'aller à la pêche, que ce soit pour des expéditions gratuites de quelques heures ou pour des voyages de plusieurs jours sur des sites des plus enchanteurs. Justement, un des rôles que s'est donné la fédération est de faire valoir l'importance de la pêche comme moteur économique.
Au Québec, comme dans le reste du Canada, la pêche est un important facteur de développement économique. Il se vend chaque année au Québec environ 565 000 permis de pêche. Fait intéressant, il a récemment été démontré que l'impact économique de la pêche est plus important dans les zones les plus populeuses et que les grands centres bénéficient eux aussi des retombées économiques de la pêche sportive.
Lorsqu'on fait une compilation des résultats des études réalisées récemment, dont l'Enquête canadienne sur la nature de 2012, on peut constater qu'il y a environ 735 000 pêcheurs répartis dans toutes les régions de la province. Cinq cent mille d'entre eux feront de la pêche chaque année. Pour ce qui est des autres, ils la pratiqueront au moins une fois aux cinq ans.
En 2012, les pêcheurs dans leur ensemble ont consacré environ 11,8 millions de jours à la pratique de la pêche sportive, ce qui a généré des retombées économiques globales de 1,2 milliard de dollars. Grosso modo, on peut séparer ce montant en deux types de dépenses: les dépenses courantes telles que l'hébergement, l'essence, les permis, la nourriture, et ainsi de suite, et celles en biens durables comme les embarcations, l'équipement, les véhicules, l'équipement de camping, et le reste.
Le doré jaune et l'omble de fontaine sont les espèces les plus recherchées et celles qui engendrent le plus de retombées économiques. Ces deux espèces se placent même devant l'orignal, ce grand gibier recherché par le plus grand nombre de chasseurs. Le doré génère des retombées de 360 millions de dollars alors que pour l'omble de fontaine, ces retombées sont de 340 millions de dollars. À eux seuls, ces deux poissons représentent la moitié des dépenses effectuées par tous les pêcheurs.
Au passage, on peut glisser quelques mots sur la pêche sur glace, une activité hivernale populaire au Québec. Chaque année, les amateurs de pêche blanche dépensent environ 50 millions de dollars pour pêcher certaines espèces d'eau douce, notamment la perchaude, ou encore des espèces marines comme le sébaste.
Au cours des prochaines années, le secteur de la pêche sportive aura à faire face à des défis. On peut parler du problème d'accès aux plans d'eau, qui découle lui-même de deux problèmes: la privatisation, à des fins de développement résidentiel, des terrains qui bordent les lacs et le fait que des municipalités réservent à leurs seuls résidents l'accès aux plans d'eau de leurs territoires. Ces problèmes sont toutefois difficiles à régler, et il en va de la volonté du gouvernement d'améliorer la situation.
La fédération a toutefois réussi à sensibiliser le gouvernement provincial, qui s'est engagé à dresser un portrait de la situation; à vérifier l'aspect juridique de la question et, éventuellement, à produire un guide d'information à l'intention des municipalités. Pour sa part, notre fédération a abordé le problème sous un autre angle en produisant une application Internet, allonspecher.com, une carte interactive qui répertorie plus de 1 600 accès publics aux lacs, aux rivières et au fleuve Saint-Laurent.
Un autre défi qui attend le secteur de la pêche récréative au Québec est la formation d'une relève nombreuse et assidue. Une étude récente réalisée par la Société des établissements de plein air du Québec indique clairement que les nouvelles générations, soit celles des 25-35 ans et des 35-45 ans, à partir desquelles la relève doit être formée, ne voient plus la pêche comme leurs parents. Ces nouvelles générations considèrent plutôt la pêche comme une activité complémentaire à pratiquer lors de vacances ou de séjours en plein air. En conséquence, même si on forme une relève nombreuse, celle-ci ne sera pas toujours aussi assidue que ne l'étaient les générations passées. Cela risque de priver le Québec de nombreux jours de pêche, donc d'un apport économique. Ce déclin devrait se faire sentir d'ici environ cinq ans.
Dans ce cas également, la fédération a pris l'initiative de mettre en ligne un outil dont l'objectif est de mettre en contact des chasseurs, des pêcheurs et des piégeurs. Ce site, Mentorat chasse, pêche, piégeage, donne l'occasion aux membres de la communauté de pêcheurs de communiquer entre eux. En somme, la pêche récréative représente au Québec un moteur économique important, mais aussi une activité recherchée pour la détente et les évasions en plein air. Pour conserver ce plein potentiel, il faudra s'employer à préserver la ressource, qui se porte dans l'ensemble plutôt bien, mais aussi à maintenir l'intérêt des Québécois pour cette activité.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Baril.
Tout d'abord, je tiens à saluer toutes les initiatives prises par votre organisation. Vous avez des projets de réaménagement faunique, vous comptez 125 000 membres, vous avez formé 450 moniteurs bénévoles, et j'en passe.
C'est vraiment impressionnant. Cela concorde d'ailleurs avec d'autres données que vous nous avez fournies. Environ 500 000 personnes, annuellement, retournent pêcher, et les activités de pêche récréative ont des retombées directes de l'ordre de 1,2 milliard de dollars, au Québec seulement. C'est majeur.
Pour toutes ces raisons, j'aimerais me pencher avec vous sur quelques problèmes qui se présentent à nous pour nous assurer de la pérennité de toutes ces activités.
Tout d'abord, parlons du poisson, ou de l'éléphant dans la pièce.
En 2014, le ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques du Québec indiquait que trois fois moins de saumons remontaient les rivières québécoises qu'il y a 30 ans. En 2015, une décision a donc été prise par le gouvernement du Québec: il imposera une remise à l'eau obligatoire à 14 rivières de la Côte-Nord et deux du Bas-Saint-Laurent. C'est le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs qui en a pris la décision.
La Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs et la Fédération québécoise pour le saumon atlantique ont signé conjointement un mémoire en 2013. Ce mémoire porte sur la possibilité que le gouvernement fédéral ajoute certaines populations de saumon atlantique du Québec à la liste des espèces en péril. J'aimerais savoir s'il y a, selon vous, une menace imminente pour le saumon atlantique du Québec. Quelles sont les menaces les plus importantes? Avez-vous des pistes de solution à suggérer qui pourraient empêcher de voir la ressource diminuer dans certaines de nos rivières, voire disparaître?