FEWO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la condition féminine
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 26 octobre 2016
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte.
Je tiens à signaler que nous sommes sur les terres traditionnelles des Premières Nations algonquines.
Nous accueillons, aujourd’hui, Tracy O’Hearn, directrice générale, Pauktuutit Inuit Women of Canada. Je vous souhaite la bienvenue. Nous sommes impatients d’entendre votre exposé. Vous avez la parole pour 10 minutes.
Merci beaucoup. J’ignorais que j’allais être la seule à témoigner aujourd’hui. J’ai donc préparé un bref exposé afin d’avoir beaucoup de temps pour échanger avec vous.
J’aimerais d’abord vous transmettre les salutations de notre présidente, Rebecca Kudloo. Elle tient à remercier la présidente, les vice-présidentes et les membres du comité de nous avoir invités. Elle habite à Baker Lake, au Nunavut, et était dans l’impossibilité de venir ici aujourd’hui. Elle m’a donc demandé de la remplacer. Aussi, je suis accompagnée de ma collègue, Rose Mary Cooper.
Nous aimerions d’abord allumer une chandelle afin de rappeler à tous la raison pour laquelle nous sommes ici et pour qui nous sommes ici. Comme vous le savez tous, nous avons perdu très récemment Annie Pootoogook, à Ottawa. Peu importe les circonstances ou les causes de son décès, elle vivait dans des conditions très difficiles, comme un trop grand nombre de femmes. Souvent, les raisons pour lesquelles elles se retrouvent dans ces conditions sont hors de leur contrôle immédiat. Ma collègue, Rose Mary, allumera une chandelle pour Annie. Pendant ce temps, nous pourrions prendre un moment pour nous remémorer Annie et les femmes, trop nombreuses, que nous avons perdues.
[Le comité observe un moment de silence.]
Merci.
Il s’agit d’une des chandelles utilisées dans le cadre de diverses cérémonies et activités de souvenir lors des rencontres préalables à la consultation que nous avons organisées et menant à l’enquête nationale sur les femmes disparues et assassinées. Nous avons passé quatre jours remplis d’émotion.
Je serais surprise que vous connaissiez tous Pauktuutit. Je connais certains d’entre vous, car nous avons déjà travaillé ensemble. Pauktuutit est une organisation nationale qui représente les intérêts de toutes les femmes inuites au Canada. L’organisation ne fait pas partie de l’Association des femmes autochtones du Canada et est également distincte d’Inuit Tapiriit Kanatami. Elle a été créée en 1984, soit il y a 32 ans, à l’initiative d’Inuit Tapirisat du Canada qui, à l’époque, participait très activement aux négociations des revendications territoriales régionales et à leur mise en oeuvre et s’est vue confier un mandat très vaste. Inuit Tapirisat du Canada était consciente du large éventail de problèmes sociaux et de santé, des questions prioritaires qu’il fallait examiner. Consciente aussi du rôle traditionnel et valorisé des femmes, l’organisation a demandé la création de Pauktuutit et que celle-ci se voit confier un mandat distinct et unique. Nous sommes très fiers de pouvoir continuer, 32 ans plus tard, à exprimer l’esprit et l’intention des fondateurs de l’organisation.
Lors de notre rencontre plus tôt, cet après-midi, nous avons examiné la portée de votre étude. Afin de garder notre exposé assez bref, nous avons préparé des commentaires qui portent principalement sur les priorités relatives à cette étude sur la violence envers les jeunes femmes et filles.
Nous avons entrepris des travaux préliminaires sur la cyberviolence, notamment en ce qui a trait à la traite de personnes et au trafic illégal des femmes, principalement les filles inuites — et aussi les garçons —, et sur les vulnérabilités propres à ces groupes. Nous étions au courant de tout cela depuis un certain temps, mais les priorités du gouvernement changent souvent. Par conséquent, nous aurons peut-être d’autres occasions d’étudier ces questions.
Il y a trois ou quatre ans, nous avons organisé un atelier dans le cadre de notre assemblée générale annuelle. Il s’agit de la seule fois dans l’année où nous pouvons réunir des femmes inuites de toutes les régions afin de parler des priorités et des résolutions passées et d’établir l’orientation de l’organisation. Au début, nous avons reçu un peu de fonds. Nous devions aussi réfléchir à la façon d’aborder ces problèmes. Une grande partie de nos activités se déroulent en Inuktitut et l’Inuktitut comprend de nombreux dialectes qui diffèrent parfois d’une communauté à l’autre. Dans le cadre de la planification de cet atelier, nous devions réfléchir à la façon d’introduire ces sujets. Il n’existe aucun concept en Inuktitut pour expliquer la traite ou le trafic de personnes. Beaucoup de gens associent le trafic aux voitures et aux villes.
Je vais vous donner un exemple de la façon dont nous travaillons. Nous devions trouver un point de départ. Nous avons demandé conseil sur la façon d’aborder ces questions à l’échelle nationale afin de ne pas effrayer les gens. Nous ne voulions pas donner l’impression qu’un bras allait sortir de l’écran d’ordinateur pour attraper leurs enfants, mais plutôt les sensibiliser à ces problèmes.
Certaines vulnérabilités sont uniques.
Le passage du Nord-Ouest est libre de glace. Des navires de croisière remplis de riches touristes s’arrêtent dans des communautés éloignées qui étaient auparavant, je ne veux pas dire déconnectées de la réalité, mais elles n’étaient pas habituées à accueillir de tels visiteurs.
Nous devons aussi composer avec la mise en valeur de nos ressources et l’exploitation et l’extraction minière, en plus des main-d’oeuvre transitoires composées principalement d’homme. Nous avons mené quelques travaux sur les conséquences de l’exploitation minière sur la vie sociale et la santé des femmes inuites. Nous avons tout examiné, du racisme aux agressions sexuelles dans le milieu de travail que sont les mines de Baker Lake.
Pour revenir à la cyberviolence et aux vulnérabilités uniques associées à l’exploitation des femmes et filles, nous assistons à des choses que nous n’avions pas prévues, comme l’ouverture du passage du Nord-Ouest.
Nous n’avons pu mener qu’un seul petit projet sur la traite de personnes et le trafic illégal des femmes. Les priorités du gouvernement ont changé. Nous n’avons pas pu en faire davantage, mais d’autres projets seraient certainement nécessaires.
Nous n’utilisons pas le terme « hypersexualisation » que vous utilisez dans le cadre de cette étude, mais, comme je l’ai dit, l’exploitation des filles, des jeunes filles et des garçons inuits, ainsi que les vulnérabilités propres à ces groupes de personnes sont source de nombreuses préoccupations.
Nous savons que les communautés dans le nord présentent le plus haut taux de violence au pays. Je ne vais pas vous fournir toutes sortes de statistiques; elles sont déjà disponibles.
Ces communautés vivent une crise du logement depuis des décennies. Divers ordres de gouvernement se sont soit déchargés de leurs responsabilités dans ce dossier ou tentent de composer avec de nombreuses nouvelles priorités. C’est le cas, notamment, du gouvernement du Nunavut.
Ma collègue et moi avons vu trop souvent les conséquences de l’hypersexualisation: des jeunes filles qui vivent dans des logements surpeuplés où il y a de la violence et peu de nourriture. La sécurité alimentaire est un énorme problème dans le nord. Des enfants ne mangent pas à leur faim. Ce ne sont que quelques exemples des vulnérabilités qui leur sont propres. Elles se font attaquer par des travailleurs réguliers, mais, comme nous le savons, il existe aussi des prédateurs ingénieux dans le monde qui s’attaquent à ce genre de victimes vulnérables.
Concernant l’hypersexualisation, nos travaux et nos priorités, nous remarquons, malheureusement, une augmentation de la sexualisation des très jeunes filles qui voient la sexualité comme une monnaie d’échange contre un logement sécuritaire ou de la nourriture. Trop souvent, les prédateurs utilisent la drogue ou l’alcool pour les attirer. Donc, oui, nous connaissons bien le problème.
Au sujet de la culture du viol…
Je suis désolée. Il ne me reste qu’une minute?
Je peux vous fournir quelques exemples par rapport à la portée de cette étude.
Vous nous demandez de formuler des recommandations sur ce que peut faire le gouvernement fédéral en matière d’égalité pour les femmes inuites du Canada. Le gouvernement doit consulter les femmes inuites par l’entremise de Pauktuutit. Comme je l’ai souligné, nous ne sommes pas représentées par l’AFAC ou une autre organisation. Le Forum fédéral, provincial, territorial et autochtone tiendra une réunion cet après-midi, mais nous n’y serons pas représentés. J’ignorais qu’il y aurait cette réunion, car nous n’y avons pas été invités. Je l’ai appris d’un collègue qui s’y rendait.
J’aimerais beaucoup avoir l’occasion de parler davantage de l’égalité réelle. Que ce soit pour parler de cette question ou de toute autre question, nous continuons de chercher des occasions de travailler sérieusement avec le gouvernement fédéral. Nous n’avons pas obtenu ce que nous voulions un an après les dernières élections.
Je tiens à vous remercier d’avoir pris le temps de m’écouter. J’ignore comment le temps a pu s’écouler si rapidement. Je suis impatiente de répondre à vos questions.
Merci.
Excellent. Les membres auront certainement l’occasion de vous interroger en profondeur sur ces questions. Nous allons donc amorcer notre première série de questions. Monsieur Fraser, vous avez la parole.
Merci beaucoup, madame O’Hearn, d’avoir accepté notre invitation. Je vous suis très reconnaissant d’avoir accepté de nous partager vos connaissances et votre expérience.
Vous dites que le logement est l’une des nombreuses priorités en ce qui concerne les femmes inuites, et peut-être même les régions du nord en général. Je n’arrive pas à saisir la portée du problème auquel vous êtes confrontés, si l’on tient compte de la géographie et du coût des infrastructures dans le nord qui sont, selon ce que j’ai pu comprendre, beaucoup plus élevés que dans le reste du pays.
Pourriez-vous nous parler un peu plus des investissements que vous recommandez afin de vraiment aider les communautés autochtones dans le nord en ce qui a trait aux logements ou aux refuges temporaires, ou même aux services de soutien pour les femmes victimes de violence fondée sur le sexe?
C’est large, comme question. Je sais que nos collègues d’Inuit Tapiriit Kanatami travaillent à l’organisation d’un forum national sur le logement en partenariat avec les organisations régionales de revendications territoriales. Ils agissent, en quelque sorte, à titre de modérateurs en matière d’infrastructures physiques.
Concernant notre participation à ce forum, nous reviendrons à nos principales préoccupations. Je suis heureuse que vous ayez parlé des besoins des victimes de violence. Nous avons soulevé de nombreuses fois la nécessité d’avoir des refuges sécuritaires. Il y a 53 communautés inuites au-delà de la terre des Inuits — dans le delta de Beaufort, au Nunavut, dans le Québec arctique et au Nunatsiavut. Seulement environ 15 de ces communautés disposent d’un refuge sécuritaire pour les femmes, ce qui signifie que plus de 70 % de ces communautés n’en ont pas. Cela entraîne plusieurs problèmes.
Au cours de l’exercice actuel, nous espérons collaborer avec AANC afin de recueillir des éléments d’information sur les besoins réels. Nous venons tout juste de trouver un expert-conseil très qualifié en matière de recherche avec qui nous espérons travailler. Nous avons besoin de données. J’aimerais bien vous formuler des recommandations précises fondées sur des données, mais je ne peux pas. Il n’existe aucune maison de seconde étape.
Votre question est vraiment très complexe et large. Il n’y a pas de solution miracle. La saison de la construction est courte. Tout dépend de la saison des livraisons, si les matériaux de construction arrivent à temps.
Nous avons fait tout le travail possible, selon notre expérience, concernant les besoins, alors toute l’aide que nous pourrions recevoir pour recueillir ces éléments d’information sera la bienvenue. Je ne veux pas parler d’une « analyse de rentabilisation » dans ce dossier. C’est la meilleure réponse que je peux vous donner aujourd’hui.
J’aimerais poursuivre sur le même sujet. Je comprends que c’est une question très large, mais, à la fin de cette étude, nous devrons formuler des recommandations au gouvernement. Si seulement 15 de ces 53 communautés inuites disposent d’un refuge sécuritaire, j’imagine qu’il y a des écarts au niveau des services de soutien qui y sont offerts.
Ai-je raison de présumer que vous aimeriez que chacune de ces 53 communautés ait un refuge sécuritaire et puisse offrir des services de soutien?
Je ne saurais vous répondre oui ou non. Les refuges sont des solutions temporaires, une mesure d’urgence d’après violence.
Nous espérons pouvoir recueillir des données en matière d’investissement et de prévention, mais tout cela ne ferait que réduire les coûts financiers associés aux évacuations médicales ou à la réadaptation hors territoire, notamment.
Chaque année, je soulève une question stratégique que le comité, à mon avis, devrait souligner dans ses recommandations, soit que le gouvernement fédéral, par l’entremise d’AANC, finance la construction de refuges sur les réserves seulement. Ils sont nombreux à penser qu’il s’agit d’une responsabilité fiduciaire du gouvernement, et non d’une décision fondée sur la politique — si l’on considère la responsabilité fiduciaire du gouvernement en vertu de la Constitution. Les communautés inuites n’ont pas accès aux fonds du gouvernement destinés spécifiquement aux refuges dans les communautés autochtones.
On parle de 40 millions de dollars par année. Le gouvernement actuel a décidé de doubler cette somme, offrant maintenant 80 millions de dollars par année, mais comme je l’ai dit très récemment, c’est deux fois rien pour les communautés inuites. Le gouvernement fédéral dira que les refuges sont la responsabilité des gouvernements provinciaux et territoriaux. Peut-être, mais si l’on prend, par exemple, le gouvernement du Nunavut et tous les problèmes sérieux avec lesquels il doit composer chaque jour, nous savons que les refuges ne font pas partie des priorités. Par conséquent, rien n’est fait.
Il pourrait s’agir d’une recommandation très importante du comité — que les communautés inuites jouissent d’un accès équitable aux fonds du gouvernement fédéral pour les refuges dans les communautés autochtones. Je vous remercie beaucoup pour cette question.
Il ne me reste plus qu’une minute. J’aimerais passer la journée à discuter avec vous pour en apprendre davantage sur toutes sortes de sujets. J’espère que nous pourrons aborder le système de justice pour les victimes, mais puisqu’il ne reste plus qu’une minute à mon intervention, pourriez-vous nous dire quelle est la principale priorité ou quelles sont quelques-unes des principales priorités en matière de prévention où le gouvernement fédéral pourrait aider? Cela nous serait très utile. Je suis conscient que c’est difficile, mais nous manquons de temps.
Oui. Les Inuits ne vivent en communauté que depuis deux générations. La transition d’une économie traditionnelle à une économie basée sur les salaires a été laborieuse. Le parc de logement n’a pas suivi la croissance de la population au pays. Donc, dans ce contexte, nous avons besoin de beaucoup d’aide pour bâtir la capacité des communautés.
De façon générale, on ne retrouve dans ces communautés aucune organisation de la société civile ou organisation sans but lucratif que d’autres ailleurs au pays tiennent pour acquis, même pour l’élaboration de propositions en vue d’obtenir des fonds. C’est donc un domaine où il y a des écarts à combler. Il y a aussi le développement humain et le renforcement de la capacité, entre autres. Je sais que ce sont de vastes sujets et des recommandations larges, mais nous devons trouver des points de départ.
J’aimerais être plus précise.
Si vous voulez nous visiter dans nos locaux, vous êtes les bienvenues quand vous le voudrez. Nous serons heureux de vous accueillir.
Merci, madame O’Hearn. C’est un plaisir de vous accueillir au comité.
Je remarque que votre organisation a fait des efforts pour solliciter la participation des hommes et des garçons dans la lutte contre la violence faite aux femmes. Pourriez-vous nous parler un peu plus de vos efforts dans ce domaine et nous faire part de vos observations?
Avec plaisir. Il en est question dans mes notes, mais je n'ai pas eu le temps d'en traiter.
Lorsque l'ancien gouvernement était au pouvoir, nous avons réalisé avec l'aide de Condition féminine Canada un projet de deux ans visant précisément à mobiliser les hommes et les garçons inuits. Nous avons pris différentes mesures dans le cadre de ce projet. Nous avons effectué une analyse comparative entre les sexes qui a mis en évidence les impacts différents pour les hommes et les femmes du fait que ces dernières se tirent mieux d'affaire au sein de l'économie basée sur les salaires. En effet, elles parviennent plus facilement à trouver un emploi à temps plein, ce qui a entraîné une transformation radicale des rôles traditionnels.
Les hommes autrefois valorisés pour leur rôle de chasseurs et de pourvoyeurs voient progressivement ce rôle leur échapper et se sentent dépréciés. Voilà qui illustre fort bien à mon avis ce qui distingue la culture inuite en même temps que l'évolution considérable qu'elle a connue. C'est un exemple des questions à régler dans nos efforts pour inciter les hommes et les garçons à faire partie de la solution.
Nous nous intéressons toujours aux deux côtés de l'équation, car tout problème a une solution. Malheureusement, même si le gouvernement précédent s'était engagé à nous fournir ce financement, voilà près d'un an maintenant que nous tentons de faire valider une proposition par Condition féminine Canada aux fins de la phase deux du projet. Quand je vous dis que nous n'avons pas obtenu les résultats escomptés avec le nouveau gouvernement jusqu'à maintenant, cette situation en est l'illustration parfaite. Malgré tous les efforts que nous avons déployés, il nous a été impossible d'aller de l'avant. Nous sommes pourtant tout à fait prêtes.
Merci.
Vos commentaires sont très intéressants. Sans vouloir vous faire dire ce que vous n'avez pas dit, êtes-vous en train de laisser entendre que de nombreux hommes au sein de ces communautés vivent en quelque sorte une crise d'identité en raison de ces transformations qui les touchent d'une manière toute particulière?
Voilà qui est intéressant.
Nous avons déjà discuté en comité des impacts sur les hommes et les garçons des idées fausses qui sont véhiculées par la culture populaire et notamment par la pornographie et qui peuvent mener à certains comportements violents.
Pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez et nous indiquer quelles initiatives stratégiques pourraient être lancées pour contrer ces idées fausses et négatives véhiculées par certains médias relativement à la violence?
Sans vouloir m'égarer dans les grandes théories et sombrer dans l'abstraction au point d'en devenir vague, je vous dirais que les Inuits sont sédentarisés depuis deux générations seulement. On leur a imposé des systèmes d'éducation et de religion qui leur sont étrangers. Nous pourrions parler de patriarcat ou de colonisation. Il y a bien des manières de décrire la situation. Toutes ces choses leur ont été imposées. Les mécanismes traditionnels de justice ont été dévalorisés et remplacés. C'est le portrait d'ensemble que nous devons considérer.
Pour ce qui est des recommandations stratégiques que je pourrais vous faire, je pense que nous avons déjà un bon point de départ avec le rapport « Appels à l'action » de la Commission de vérité et réconciliation ainsi qu'avec le travail de la Commission royale sur les peuples autochtones. On peut y trouver une orientation claire et de nombreuses recommandations. Tout ce qui manque, c'est la volonté politique d'agir véritablement.
J'aimerais bien pouvoir vous proposer mes propres solutions et recommandations stratégiques, mais c'est malheureusement impossible.
Je comprends. Vos commentaires sont intéressants. J'aimerais fouiller davantage ce lien entre les médias et la colonisation. Nous savons que les différentes formes de violence véhiculées par les médias peuvent avoir un impact partout au pays, mais vous sembliez vouloir laisser entendre que cet impact pouvait être d'une autre nature dans le contexte plus récent de cet historique de colonisation. Pouvez-vous nous en dire plus long à ce sujet? Est-ce que l'impact est plus marqué? Est-il moins senti? Comment évalueriez-vous cet impact dans la communauté inuite, par exemple, comparativement à ce qui est ressenti ailleurs?
Je ne crois pas pouvoir vous fournir une réponse qui serait fondée sur des données probantes. Voilà plus de 20 ans que je travaille au sein de cette organisation, et je peux vous dire que la pornographie a très rapidement été ciblée parmi les enjeux prioritaires pour les collectivités. C'était à une époque où Internet n'existait pas encore. C'était avant les vols réguliers, les projets d'extraction minière et d'exploitation des ressources, et l'arrivée des travailleurs de passage. La pornographie était pourtant déjà considérée comme problématique. Il était question sans doute à ce moment-là d'exemplaires de Playboy. Si nous considérons ce qu'il est advenu depuis de la pornographie au sein de notre société et la nature incroyablement violente qu'elle revêt maintenant, de même que les enseignements tirés de l'expérience d'autres groupes quant à la normalisation et à la désensibilisation qui résulte de ce phénomène, on doit conclure qu'il y a effectivement des répercussions. Nous n'avons pas eu nous-mêmes l'occasion de mener des recherches à ce sujet. Étant donné la multitude de questions urgentes que nous devons régler, les membres de notre organisation n'ont pas jugé bon d'en faire une de nos grandes priorités. Il faut toutefois considérer que la facilité d'accès à l'Internet que nous tenons pour acquise ici n'est pas toujours au rendez-vous. Il n'y a pas de fibre optique, et les téléchargements peuvent être très lents, ce qui n'est pas nécessairement une mauvaise chose quand on pense à la pornographie qui est diffusée. Je ne sais même pas vraiment ce qui est accessible maintenant. Je pense qu'il serait bon de se pencher sur la question.
Les mécanismes de justice réparatrice peuvent avoir leur importance dans ce contexte. Selon vous, que pourrions-nous apprendre de l'expérience des Inuits et des autres peuples des Premières Nations qui ont recours à des mécanismes semblables depuis longtemps? Peut-être pourriez-vous répondre lorsque quelqu'un d'autre vous posera une question.
[Français]
[Traduction]
J'ai entendu parler de votre plan stratégique pour la prévention de la violence chez les Inuits et la guérison. J'aimerais que vous nous disiez un mot des éléments qui distinguent la communauté inuite à cet égard. Bien souvent, nous ne tenons pas suffisamment compte des caractéristiques spécifiques des différentes communautés. Pouvez-vous nous indiquer ce qui distingue votre plan visant la communauté inuite?
Nous avons ciblé trois secteurs d'intervention prioritaires. Nous intervenons d'abord au niveau des services, ce qui comprend les refuges et les services destinés aux femmes. Dans le contexte de l'exploitation sexuelle des enfants, je dois mentionner nos recommandations en faveur de services communautaires pour les enfants qui sont victimes ou témoins de la violence et pour les adultes qui ont subi des abus sexuels durant leur enfance. Il faut également intervenir auprès des enfants actuellement victimes d'abus semblables. Il faut aussi offrir du counseling aux agresseurs et, encore une fois, mobiliser les hommes et les garçons. Nous avons également besoin de centres de guérison.
Notre deuxième secteur d'intervention est celui de l'éducation, de la formation, de la sensibilisation et du renforcement des capacités. Il faut notamment déployer des efforts incessants pour rejoindre les gens, les sensibiliser aux fins de la prévention de la violence et les éduquer. Comme je l'ai déjà indiqué, le renforcement des capacités des différentes collectivités est une autre composante. Par ailleurs, nous devons disposer de ressources en quantité équitable et suffisante pour la mise en oeuvre d'une stratégie durable de prévention de la violence misant notamment sur des interventions et des mesures ciblées auprès des jeunes.
Nous savons que plus de 50 % des Inuits sont âgés de 25 ans et moins. Il va de soi que cette conjoncture démographique tout à fait unique a des répercussions sur les politiques publiques actuelles et à venir ainsi que sur les problèmes prioritaires auxquels il faut s'attaquer dès maintenant pour éviter qu'ils ne s'aggravent de façon exponentielle.
Le troisième secteur d'intervention s'inscrivant dans notre plan stratégique est celui du logement. Nous devons toutefois reconnaître que la construction des infrastructures physiques n'est pas de notre ressort et relève d'autres instances.
Ce sont les trois principaux secteurs dans lesquels nous jugeons nécessaire d'agir.
Mes autres questions portent sur les travailleurs miniers et les Inuits qui sont victimes de violence ou d'exploitation sexuelle. Je sais que ces travailleurs essaient souvent de recruter, si je puis dire, des femmes aux fins de la prostitution ou de leur offrir de l'argent en échange de services sexuels. Il s'agit dans bien des cas de femmes de la communauté qui ont été embauchées pour faire le ménage ou travailler à la cuisine. Comment pouvons-nous nous attaquer à ce problème qui touche les femmes inuites qui sont vraiment ciblées par cette forme d'exploitation sexuelle? Pourrions-nous en faire davantage, dès la construction de la mine, pour empêcher ces mauvaises habitudes de s'enraciner? Quelles mesures de prévention pourrions-nous prendre aux différentes étapes du processus?
Nous pouvons certainement le faire. Vous trouverez sur notre site Web le rapport qualitatif et quantitatif produit à l'issue d'un projet mené en collaboration avec l'Université de la Colombie-Britannique. Cette étude portait sur la situation dans le secteur minier à Baker Lake. Notre rapport accessible en ligne renferme des recommandations assez précises pouvant aller de la négociation d'ententes sur les répercussions et les avantages avec les Inuits jusqu'aux mesures à prendre pour cerner sans tarder les problèmes sociaux et de santé dans le but de les atténuer et d'accroître les ressources qui y sont consacrées. Nous avons envisagé toutes les possibilités, de la négociation initiale d'une entente sur les répercussions et les avantages jusqu'à une plus grande sensibilisation des femmes inuites quant à leurs droits en tant que personnes et que travailleuses. Le gouvernement du Nunavut vient d'ailleurs tout juste de nous contacter à ce sujet. Le territoire entend mettre à jour ses lois en matière de droits de la personne, ce qui est formidable, en y intégrant différents enjeux liés à l'orientation sexuelle.
Nous avons formulé un certain nombre de recommandations. N'hésitez surtout pas à communiquer avec nous si vous n'arrivez pas à trouver le rapport sur notre site Web; nous pourrons alors en discuter davantage.
Avez-vous une idée du nombre d'agressions qui peuvent être signalées dans le secteur minier, ou est-ce que l'on n'a pas plutôt tendance à envoyer le travailleur coupable ailleurs pour étouffer l'histoire sans que la police soit mise au courant?
Je crois que nous avons reçu 25 000 $ de la Fondation canadienne des femmes, et le hasard a voulu que l'Université de la Colombie-Britannique obtienne une subvention du même montant. J'estime que notre collaboration a permis de produire d'excellents résultats compte tenu des faibles investissements consentis. La question que vous soulevez n'était pas vraiment visée par notre étude. Il y aurait toutefois certainement lieu de s'y intéresser.
Puisqu'il est question d'argent, votre présidente a déclaré en juin 2016 qu'elle devait toujours se débrouiller avec un portefeuille vide pour le financement de vos programmes. Est-ce que la situation s'est améliorée depuis?
Non, pas du tout. Je suis désolée de devoir vous dire qu'il nous semble beaucoup plus difficile de travailler avec le gouvernement actuel qu'avec celui qui l'a précédé.
Pauktuutit doit miser beaucoup trop sur du financement annuel basé sur des projets. Il nous faut à chaque fois soumettre une proposition satisfaisant aux priorités et aux critères établis par le gouvernement. Nous sommes devenus des experts dans la rédaction de propositions. À titre d'exemple, le ministère des Affaires indiennes et du Nord a défini pour 2015 et 2016 six priorités thématiques devant guider les propositions soumises. Même s'il ne nous était pas possible de présenter une demande dans certains cas, nous avions tout au moins une meilleure idée du type de projets à soumettre pour appuyer le développement économique ou la réforme des politiques sociales. C'est pour nous l'occasion de progresser dans nos efforts pour prévenir la violence. Lors du dernier mandat du gouvernement précédent, nous savions que le ministère disposait d'une enveloppe globale d'environ 20 millions de dollars pour un large éventail de projets, certains visant uniquement l'éducation des Premières Nations dans les réserves, ce qui fait...
Il n'y a pas encore eu de demande de propositions depuis le début du présent exercice. J'ai dû faire des pieds et des mains pour qu'on me donne une indication des projets qui pourraient être financés. Comme je l'ai mentionné, nous avons dû passer une partie de l'année à négocier avec Condition féminine Canada pour obtenir le financement que le gouvernement précédent s'était engagé à nous fournir au titre de l'une de nos propositions.
Merci pour votre exposé et votre dévouement. En ma qualité de membre du caucus libéral autochtone, j'apprécie vraiment tous les efforts que vous déployez dans ce dossier. Je suis également membre du Comité des ressources naturelles. Je suis un ardent défenseur de l'expansion de l'industrie minière ainsi que de certaines ententes sur les répercussions et les avantages. Je vais me faire un devoir de mettre le Comité des ressources naturelles au fait de vos commentaires pour voir comment il sera possible d'intégrer quelques-unes de vos recommandations, surtout concernant les répercussions sociales. Un grand merci d'avoir soulevé ces questions.
Je veux aussi vous remercier de nous avoir fait part de vos préoccupations concernant les consultations et quelques-unes des constatations qui en sont ressorties. Je vous suis reconnaissant d'avoir pris le temps de nous souligner ces éléments. Nous serons ainsi mieux à même de dégager certaines pistes de solution.
J'ai une question concernant le financement que vous recevez actuellement de Condition féminine Canada. Quelle est la portée de votre mandat et quels sont les services que vous devez offrir grâce à ce financement?
Je crois que le seul financement que nous recevons de Condition féminine Canada nous provient du gouvernement précédent. Nous sommes dans la deuxième année d'un projet de deux ans portant sur le mentorat.
Je ne peux malheureusement vous fournir tous les détails, car je ne suis pas la gestionnaire de ce projet.
L'initiative s'inscrit dans la suite logique des efforts déployés dans le cadre d'un projet précédent pour encourager les femmes inuites à se lancer en affaires et les appuyer en ce sens. Lors de la réalisation de ce projet il y a quelques années, de nombreuses femmes se sont dites intéressées à obtenir du mentorat. Il y a un besoin en la matière. C'est une expérience qui peut être très intimidante et faire peur à n'importe quelle femme. Il n'est pas facile de lire tous ces formulaires et de savoir où trouver des investisseurs.
Nous avons essayé de cerner tout l'éventail des besoins de ces femmes en matière d'information. Le mentorat est ressorti très clairement de cet exercice. En outre, de nombreuses femmes inuites qui ont connu un certain succès en affaires sont désireuses d'offrir du mentorat pour en appuyer d'autres de telle sorte qu'elles puissent toutes progresser de concert.
Disons que le moment était très propice pour la demande de propositions de Condition féminine Canada qui voulait financer des projets facilitant le mentorat par les femmes. Le processus était ouvert à toutes les organisations du pays et notre projet a été retenu. Nous avons conçu un modèle que nous souhaiterions mettre à l'essai dans le but d'assurer un jumelage adéquat entre la mentore et la mentorée. Nous nous ferons un plaisir de vous transmettre de plus amples renseignements à ce sujet.
C'est donc à ce projet que se résume notre relation actuelle de financement avec Condition féminine Canada.
Votre organisme a aussi un plan d'action visant à répondre aux besoins des enfants inuits victimes d'abus sexuels.
Pouvez-vous nous donner un peu plus d'explications sur quelques-unes des recommandations pouvant guider notre examen de la situation de ces familles dans le contexte de la protection des enfants et du système judiciaire? Vous avez formulé certaines recommandations portant sur ces aspects.
C'est une autre question fort complexe.
Depuis un certain nombre d'années, il nous est impossible d'accomplir un véritable travail de fond dans le dossier des abus sexuels à l'égard des enfants. Nous ne disposons pas de preuves valables relativement aux incidents qui se produisent. Pour bien des raisons, il est toujours très difficile d'obtenir des preuves semblables. Nous sommes au fait de nombreux problèmes touchant la protection de l'enfance et particulièrement des enfants se retrouvant dans une famille d'accueil. Nous savons aussi, sans que cela soit établi par des éléments probants, que peu de cas sont signalés, et ce, pour de multiples raisons.
Quelqu'un m'a déjà dit que les abus sexuels touchaient tous les enfants sans exception, directement ou indirectement. C'est une pensée que je garde sans cesse à l'esprit. Les communautés inuites n'ont pas toujours accès à ces services que nous tenons ici pour acquis. Pour éviter que les enfants soient victimisés de nouveau, on hésite quelque peu à intervenir et à inciter les gens à signaler les incidents en l'absence des mesures de soutien nécessaires.
Votre question au sujet du système de justice pénale est cruciale. Il y a vraiment lieu de se pencher sur cet aspect. Dans le cadre de notre mandat, nous nous intéressons de plus près à la prévention, à la protection des enfants, au traitement des délinquants et à la sensibilisation. Il faut rompre le silence. C'est un grand tabou. Il y a tellement de préjugés et de crainte d'aborder ces questions. Dans ce contexte, différentes possibilités doivent être envisagées pour cibler les interventions. Dans la mesure du possible, nous collaborons avec le ministère de la Justice du Nunavut.
C'est la réponse la plus précise que je puisse vous donner en ajoutant que nous avons encore vraiment beaucoup de pain sur la planche.
Vous n'êtes certainement pas le premier témoin à nous parler du manque de données; c'est un problème généralisé. Nous devons trouver des moyens de recueillir les données dont nous avons besoin.
Pouvez-vous suggérer au Comité des pratiques qui ont fait leur preuve dans le contexte de vos efforts pour sensibiliser les Inuits au problème de la violence familiale dans le but de l'enrayer? Quelles seraient vos recommandations à ce chapitre?
Je ne pourrais pas vous dire qu'une pratique est plus efficace qu'une autre, car nous ne les avons pas évaluées sur une longue période. Je peux toutefois vous parler de quelques pratiques qui semblent prometteuses d'après ce que nous avons pu constater. Nous sommes très efficaces dans les communications. L'information doit être communiquée dans un langage accessible et compréhensible, que ce soit en inuktitut ou en anglais. Nous avons beaucoup de succès, car les gens reconnaissent notre logo. Ceci dit en tout respect, ils vont plus facilement lire notre publication qu'une autre de Justice Canada. Nous pouvons certainement vous parler de pratiques prometteuses quant à nos efforts de communication et de partenariat.
J'aimerais ajouter que nous serions heureuses de rencontrer le caucus autochtone au moment qui lui conviendra.
Un peu comme le disait Sean, je pourrais passer trois ou quatre jours avec vous pour essayer d'obtenir toute l'information qui m'intéresse. Je vais débuter par des éléments très fondamentaux, si vous n'avez pas d'objection.
L'exercice devient notamment difficile du fait que la plupart des députés représentent des circonscriptions urbaines ou des districts ruraux qui n'ont rien à voir avec le Nunavut. Il nous faut reconnaître que c'est du Nunavut que nous parlons ici.
Pouvez-vous me dire d'abord et avant tout quelle est la population d'une localité comme Baker Lake?
J'aimerais que nous nous intéressions à un endroit en particulier, celui que vous connaissez le mieux, de telle sorte que vous puissiez nous indiquer qu'est-ce qui y est accessible ou non.
J'aimerais par exemple savoir combien il y a d'écoles dans la collectivité. Y en a-t-il une seule? Y a-t-il séparation entre le primaire et le secondaire? Nous parlons sans cesse de l'importance de l'éducation, mais il faut reconnaître que l'éducation accessible à Ottawa est très différente de celle qui est offerte aux enfants de cette région du pays.
Si vous voulez bien m'aider, j'essaierai de faire ressortir les éléments clés. Je m'intéresse notamment à des facteurs comme la superficie desservie. Quelle est la superficie de la région desservie par un hôpital ou par un corps de police? Combien y retrouve-t-on d'écoles ou d'hôpitaux?
Vous avez dit qu'il n'y avait pas de refuges, mais j'aimerais savoir si des services de counselling sont accessibles à ces gens-là.
Pour y voir plus clair, nous devons notamment reconnaître que la situation n'est pas la même que celle que nous connaissons, ou que celle que je connais moi-même dans le sud-ouest de l'Ontario. C'est très différent.
En discutant avec Garnett, vous avez indiqué qu'il n'y avait pas d'accès haute vitesse à Internet ou de fibre optique. Certains d'entre nous arrivent difficilement à se rendre compte que vous n'avez pas accès à ces choses qui nous apparaissent aussi fondamentales. Pouvez-vous m'en dire plus long à ce sujet?
Je vous pose une dernière question avant de vous laisser le reste de mon temps pour répondre. Est-ce que la plupart des personnes, des enfants disons, qui subissent des abus sont victimes de leurs proches? Avez-vous un pourcentage à nous donner? S'agit-il de 80 %, 90 % ou 100 %? Quel serait normalement le processus à suivre pour signaler un tel incident?
Je vous laisse répondre.
Merci beaucoup. Je vais faire de mon mieux.
C'est vraiment dommage que Rebecca Kudloo ne puisse pas être ici aujourd'hui. Elle travaille en éducation pour le gouvernement du Nunavut. Elle est essentiellement présidente bénévole et aurait une excellente compétence en la matière.
Il y a quatre régions dans l'Inuit Nunangat. Il y a quatre ententes sur les revendications territoriales globales. Celle du Nunavut en est une.
Dans l'Arctique de l'Ouest, il y a cinq communautés inuites, et celle d'Inuvik est la plus grande. On est en train de construire une route d'Inuvik à Tuktoyaktuk, ce qui est super. Il y a la région des Inuvialuit.
Le Nunavut est une autre région, la plus grande et la plus connue. Il y a 26 communautés différentes au Nunavut. Au Nunavik, dans l'Arctique québécois, il y a 14 villages nordiques au nord du 55e parallèle. On les appelle « villages nordiques » selon la définition proposée dans le recensement.
Au Nunatsiavut, nous avons tous été mis en alerte par la situation autour de Muskrat Falls. Sur la côte nord-ouest du Labrador, qui correspond au Nunatsiavut, il y a cinq communautés qui font partie de la région visée par les revendications territoriales.
Elles sont toutes différentes. Chacune a son centre régional. Il y a Inuvik, dans l'Ouest. Au Nunavut, il y a trois régions: celle de Kitikmeot, qui correspond à l'Arctique de l'Ouest; celle de Kivalliq, où vit notre présidente, de Baker Lake, de Rankin Inlet, du nord du Manitoba; et il y a celle de Baffin, de Qikiqtani. Il y a 13 communautés qui vivent dans la région de Baffin.
Je crois qu'il y a un hôpital à Rankin Inlet depuis quelques années. Toutes les régions sont très différentes les unes des autres. Je ne fais pas confiance à ma mémoire. Il y a un hôpital à Inuvik. Il y en a un à Iqaluit. Il y en a deux au Nunavik. Il y en a un sur la côte de la baie d'Ungava et un sur celle de la baie d'Hudson, mais aucun au Nunatsiavut. L'hôpital le plus proche se trouve à Happy Valley — Goose Bay.
Ce sont des villages seulement accessibles par avion. Il n'y a pas de routes, à l'exception de celle en construction entre Inuvik et Tuk. Les autres villages sont reliés par voie aérienne. Quand la violence cause des blessures physiques qui nécessitent des soins de santé, il faut une évacuation médicale à Iqaluit ou souvent à Ottawa, depuis la région de Baffin vers un établissement du Sud.
Tous les villages ont un centre de santé. Dans beaucoup de ces centres, il n'y a que des infirmières. Il y a beaucoup de problèmes de rétention et de recrutement de ressources humaines en santé.
Pour ce qui est des écoles, il y a une école dans chaque village. Certaines offrent de l'éducation jusqu'à la 12e année.
Je suis désolée, c'est tout le temps que vous aviez.
Nous allons accorder les cinq dernières minutes à Mme Vandenbeld.
Je vous remercie beaucoup d'être ici aujourd'hui, et je vous remercie tout particulièrement d'avoir allumé une bougie pour Annie. Je sais que cela a vraiment secoué notre communauté locale et même l'ensemble du pays. Je vous remercie vraiment de votre honnêteté et de tout ce que vous nous dites aujourd'hui. Je pense que vous nous donnez beaucoup de matière à réflexion.
Vous avez mentionné une chose, et vous n'avez pas eu la chance de creuser véritablement la question de la justice traditionnelle. Vous avez dit qu'il n'y avait aucun enfant qui n'était pas touché d'une manière ou d'une autre. C'est très troublant. Nous avons entendu sur d'autres tribunes qu'il y a plus d'enfants autochtones confiés à des familles d'accueil aujourd'hui qu'il y en avait au moment de la rafle des années 1960. À quel point les gens hésitent-ils à signaler la violence sexuelle à la maison par peur de briser la famille?
De quel genre de programmes pourrions-nous nous doter pour assurer davantage la sécurité et la protection, comme on en parle pour les campus et d'autres contextes où il y a des systèmes de justice alternative? Comment faire pour mettre ce genre de programme sur pied? Comment le gouvernement fédéral peut-il contribuer à ce que les enfants sentent qu'il y a des mécanismes sûrs et confidentiels pour signaler les cas de violence à la maison?
Il y a des experts qui s'y connaissent beaucoup mieux que moi, et je vous encourage à leur parler.
Les gens ne veulent pas briser la famille. Depuis deux générations, mais assez récemment, cette réticence s'observe en raison de la perte du pourvoyeur comme pouvait l'être un chasseur, donc il y a effectivement la peur de briser la famille en raison de la perte de moyens de subsistance pour survivre.
Vous avez mentionné que la justice traditionnelle était dévalorisée. Que voulez-vous dire par là? Comment pouvons-nous réintégrer ce modèle de justice dans le système de protection de l'enfance?
Je pense que nous parlons là de deux univers très différents. Avant de vivre dans des villages, ces populations étaient nomades et vivaient en groupes beaucoup plus petits et bien plus dépendants les uns des autres. On dit qu'il y avait plus d'égalité entre les sexes à l'époque, par nécessité. Il y avait de la violence, mais ces cas étaient gérés. En 2016, quand on pense à la honte ou à la rumeur comme outil de contrôle social, comme forme de justice, cela semble totalement décalé, mais c'étaient des outils très efficaces à l'époque, parce que les gens dépendaient les uns des autres pour leur survie. Lorsqu'une personne était ridiculisée et même menacée exclusion, c'était assez grave. Personne ne militerait pour le retour à la danse du tambour pour régler les conflits, mais cela faisait partie des moyens utilisés, et c'était efficace parce que les chefs étaient respectés.
C'est un domaine d'étude très vaste, et vous pourriez sûrement rencontrer des experts en la matière. Je pense à une femme bien connue, qui est notre amie et collègue, elle s'appelle Yvonne Niego. Elle est Inuk. Elle a récemment pris sa retraite du détachement V de la GRC, à Iqaluit, et est maintenant haute fonctionnaire au sein du ministère de la Justice du gouvernement du Nunavut. J'ai parlé avec Yvonne au cours de la dernière année environ pour lui demander où en était le protocole d'intervention ou de réponse dans les communautés. Elle m'a répondu: « En théorie, il y a un policier, un travailleur social et une infirmière. » En théorie, ce devrait être la réponse immédiate. Ces postes sont peut-être comblés, peut-être pas. Peut-être que ces personnes s'entendent bien et se parlent, mais peut-être pas. Il y a la théorie, puis il y a la pratique et l'écart entre les deux semble causer bien des lacunes.
Vous posez une question très compliquée. Je pense que le mieux que je puisse faire, c'est de vous recommander des spécialistes comme Yvonne Niego et beaucoup d'autres.
Je vous remercie.
Vous avez également mentionné, parmi les inconvénients, qu'il y a des communautés autrefois isolées qui sont désormais exposées aux populations de passage qui commencent à apparaître dans ces régions en raison de l'exploitation minière, de la présence de bateaux de croisière et de toute une économie externe. Évidemment, cela place certaines femmes et filles dans des situations de plus grande vulnérabilité.
Pouvez-vous nous dire s'il y a des choses que nous pouvons faire pour assurer la sécurité des femmes et des filles des communautés qui connaissent un fort afflux de personnes venues de l'extérieur?
Je vais vous donner l'exemple de Baker Lake. La mine se trouve à l'extérieur du village, à environ deux heures de route de Baker Lake, si je ne me trompe pas. Les travailleurs qui arrivent par avion n'atterrissent même pas à Iqaluit. Ils vont directement à Mary River, Pond Inlet. Ils ne restent pas à Pond Inlet. Ils arrivent à la mine, puis en repartent directement pour se rendre dans un centre du Sud, donc je crois qu'ils ne descendent même pas de l'avion à Iqaluit.
Je suis désolée, c'est tout le temps que vous aviez.
Nous allons entreprendre une dernière série de questions de cinq minutes avec Mme Vecchio.
C'est à mon tour de nouveau. Merci beaucoup.
J'aimerais reprendre ma série de questions précédentes. Anita vous a posé des questions similaires sur le protocole. Vous avez dit qu'il devait y avoir un policier, une infirmière et des choses du genre... Si tous travaillent ensemble et sont au diapason, c'est très bien. Mais il faut reconnaître que ce n'est pas nécessairement toujours le cas.
Reprenons un peu les statistiques. Je sais qu'il y en a beaucoup, mais vous avez dit que tous les membres de votre communauté étaient touchés d'une manière ou d'une autre par une forme de violence. Dans le cas des enfants, pouvez-vous nous donner un pourcentage des cas où elle vient d'un parent ou d'une personne qui vit dans la même maison? Connaissez-vous les statistiques à ce sujet?
C'est probablement une partie du problème aussi. Vous n'avez tout simplement pas les moyens de compiler des données.
Pour ce qui est des programmes de sensibilisation, je vous félicite de faire ce que vous pouvez avec les moyens à votre disposition pour aider les hommes et les jeunes garçons. Quel genre de mesures sont prises dans les écoles pour aider les enfants et les jeunes adultes à savoir ce qui est bien et ce qui est mal, en quoi consiste la violence sexuelle ou la violence tout court, comment ils peuvent dénoncer la situation, quelles sont leurs options et comment ils peuvent arrêter ce cycle?
Je vais vous donner un exemple du Nunavik. La Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik a été créée par l'accord sur les revendications territoriales. Elle a une entente de service assez compliquée avec le Québec, et le gouvernement fédéral aussi, si je ne me trompe pas. D'une manière ou d'une autre, elle arrive à faire ce qu'elle fait extraordinairement bien. Elle a conçu son propre programme de bons et de mauvais touchers, qui est offert dans les écoles par divers intervenants, dont des conseillers inuits traditionnels, des aînés et des modèles respectés. Elle a créé ses propres ressources, et je sais que son personnel serait ravi de vous en parler.
Nous avons créé des ressources. Il y a notamment The Hidden Face, une adaptation que nous avons faite de deux DVD produits au Groenland. Ils ont pris notre DVD, ont offert de la formation à leurs travailleurs et l'ont intégré à leur trousse d'outils. Je ne peux pas vous dire comment ils s'en servent sur le terrain, dans les écoles, mais je pense que c'est un excellent exemple. Le degré d'activité et de sensibilisation diffère d'une région à l'autre, et elles ont d'autres priorités aussi.
Je trouve que c'est absolument fascinant, en ce sens que c'est très difficile d'entendre ce genre de statistique, ce genre de discussion. Nous nous rendons compte de notre chance. Ce n'est pas tout le monde qui a accès aux meilleures possibilités dont vous parlez.
Si on parle d'emploi, quelle serait la principale source d'emplois dans ces régions? Vous avez nommé l'exploitation minière.
Avez-vous une idée du revenu moyen d'une famille?
Absolument. Nous pourrons faire un suivi. Je sais que ces statistiques sont facilement accessibles. Il y a des profils des communautés qui présentent aussi le revenu moyen des Inuits. Le revenu moyen de la population générale peut être trompeur parce que les travailleurs de passage fortement rémunérés faussent les statistiques.
À Iqaluit, le principal moteur de l'économie, c'est le gouvernement. Le gouvernement territorial y a ses bureaux. Le gouvernement fédéral y est présent.
Il y a aussi les soins de santé. Il y a deux villages qui ont très peu de choses, ils ont un bureau de hameau, un petit hôtel de ville local, un poste de soins infirmiers, un magasin et souvent pas grand-chose d'autre, il y a donc un énorme fossé de différences.
Pour changer totalement de sujet, nous avons parlé du trafic dans le passage du Nord-Ouest. Vous avez terminé la phase 1. Jusqu'à maintenant, à la phase 1 de l'étude, sur quoi vous êtes-vous penchés? Quels sujets voudriez-vous examiner à la phase 2 si elle a lieu? Qu'avez-vous fait à la phase 1 et que voudriez-vous faire à la phase 2? Que pourrions-nous mesurer? Que reste-t-il à faire?
Vous pourrez m'appeler.
Des voix: Oh, oh!
Mme Tracy O'Hearn: Je m'excuse, je veux vraiment respecter le temps que vous me consacrez...
Oh! tout à fait. Tracy, vous vous en êtes incroyablement bien tirée. Nous avions prévu recevoir un autre témoin, qui n'a pas pu venir. Vous étiez seule pour subir l'interrogatoire de cette foule enthousiaste, et vous vous en êtes exceptionnellement bien tirée.
S'il y a des choses que vous souhaitez ajouter, toutefois, je vous invite à nous faire parvenir l'information par la greffière.
Nous devons continuer. Je vais suspendre la séance pour vous laisser partir, après quoi nous reprendrons nos délibérations pour nous pencher sur les travaux du Comité.
[La séance se poursuit à huis clos.]
[La séance publique reprend.]
[La séance publique reprend.]
Reprenons nos travaux.
Nous devons examiner la motion du PROC, sauf que le (g) du PROC ne correspond pas au (g) que nous avons, donc il y a Mme Harder qui veut faire un commentaire.
Je serais curieuse de savoir si on peut nous lire le (g) du PROC, pour que nous sachions ce qui manque.
Je peux vous l'expliquer.
[Français]
La motion sur le huis clos qui a été adoptée par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre énumère les raisons pour lesquelles on peut aller à huis clos. L'élément g) de la motion dit qu'on peut avoir recours au huis clos « pour mener une enquête conformément au Code de conduite pour les députés de la Chambre des communes: harcèlement sexuel ».
La raison pour laquelle cet élément a été enlevé de notre motion, c'est que seul le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a l'autorité de mener des enquêtes relativement à une infraction au Code de conduite pour les députés de la Chambre des communes: harcèlement sexuel.
Comme le Comité permanent de la condition féminine n'a pas le mandat de faire ces enquêtes, cet élément de la motion adoptée initialement par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a été retiré de la motion que nous allons débattre. La raison du retrait de cet élément de la motion est simple: cela ne s'applique pas à notre comité, nous n'avons pas l'autorité de le faire.
[Traduction]
Je ne comprends pas. En gros, vous nous dites que nous fonctionnons selon les règles du PROC en ce moment, mais que le PROC est plus inclusif que nous devons l'être, donc...
Non, elle explique que l'élément qui manque ici et qui figure dans la motion du PROC concerne les enquêtes sur le harcèlement, qui relèvent du PROC et pas de nous...
Je comprends, mais en ce moment, selon les règles en vigueur, nous suivons les règles du PROC, n'est-ce pas? Non?
Je siège au PROC. Habituellement, la tradition, c'est que quand le PROC adopte des motions, les autres comités les envisagent par la suite, parce que le PROC est considéré un peu comme un comité directeur pour ce genre de choses. La motion que vous voyez ici est le résultat de mois de négociations entre les partis pour convenir du bon libellé. Je sais que la greffière et diverses autres personnes ont été consultées pour que le libellé soit conforme aux intentions. Il a fait l'objet d'une longue discussion au PROC.
Ma question à Mme Moore, c'était que s'ils enlevaient quelque chose... Ce n'est plus la même motion. Il semble que le seul élément qui a été supprimé concerne une responsabilité exclusive du PROC, soit tout ce qui est lié au Code de conduite pour les députés, au harcèlement sexuel ou au privilège. Ces questions sont automatiquement renvoyées au PROC. Comme notre comité n'examine pas ce genre de questions, cette disposition ne serait pas nécessaire. Le reste de la motion serait le même, mais il revient au Comité de décider si nous voulons adopter la même motion que le PROC ou non. Pour ma part, je suis pour.
Très bien.
Nous devons nous prononcer sur la motion. Elle est identique à celle du PROC, à l'exception de la disposition que vous avez mentionnée.
(La motion est adoptée. [Voir le Procès-verbal])
La présidente: Ce sont les conditions selon lesquelles nous siégerons à huis clos à partir de maintenant.
Je crois que c'est tout pour les travaux du Comité aujourd'hui.
Est-ce que quelqu'un a d'autres questions à nous soumettre aujourd'hui?
Monsieur Fraser.
Ce n'est rien de nouveau. Je veux simplement m'assurer de bien comprendre notre plan d'action, nos plans. Nous étudierons tous entre nous les propositions faites jusqu'ici et nous nous réunirons avec nos propres caucus. Le comité de direction élaborera un plan d'action à sa prochaine réunion, lequel sera soumis au comité plénier pour discussion.
Est-ce bien cela?
En partie. Voici ce que je voudrais: une fois que vos partis auront déterminé quelles motions ils souhaitent nous soumettre, j'aimerais que vous les transmettiez à la greffière pour que nous puissions savoir combien il y en a. Nous pourrons ensuite prendre le temps d'en débattre lors d'une autre discussion sur les travaux du Comité et décider lesquelles nous voulons examiner et dans quel ordre.
[Français]
[Traduction]
Oui. Je me disais que si nous les recevions d'ici lundi prochain, nous pourrions nous réserver du temps pour en discuter mercredi, compte tenu de l'avis de motion.
Est-ce que cela vous convient?
Ce serait donc fantastique si nous pouvions les recevoir d'ici lundi prochain.
Aux fins de la discussion, j'aimerais vérifier si je me rappelle bien ce que nous avons dit. Il me semble avoir entendu qu'il y a quatre sujets potentiels différents. Il y aurait premièrement la participation des femmes à l'économie en général; deuxièmement, une étude sur les réfugiés; troisièmement, la question de la pornographie dans les médias et de ses liens avec la violence; quatrièmement, la Loi sur le divorce. Ce sont les quatre possibilités qui ont été évoquées. Est-ce que j'oublie quelque chose?
Oui, et j'ajouterais que ce sont les quatre thèmes dont nous avons entendu parler aujourd'hui. Cela ne veut pas dire qu'il ne peut pas y en avoir d'autres qui ressortiront de votre examen.
C'est bon? Fantastique.
À la prochaine séance, nous recevrons des représentants du New Leaf Program du comté de Pictou, de Babely Shades, de la Collectivité ingénieuse de la Péninsule acadienne, ainsi que Manon Bergeron et Sandrine Ricci, de l'Université du Québec à Montréal.
Je vous remercie. J'ai bien hâte de voter.
La séance est levée.
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