Bienvenue à la 13e séance du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes. Conformément aux ordres de renvoi du mardi 24 mars et du samedi 11 avril, le Comité se réunit pour entendre des témoignages concernant la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19.
La réunion d'aujourd'hui se déroule entièrement par vidéoconférence et elle sera diffusée sur le site Web de la Chambre des communes.
Comme la dernière fois, la webdiffusion montrera toujours la personne qui parle plutôt que l'ensemble du Comité.
Afin de faciliter le travail de nos interprètes et d'assurer la bonne tenue de la réunion, je vais énoncer quelques règles à suivre.
L'interprétation de cette vidéoconférence sera très semblable à celle qui se fait dans le cadre d'une réunion normale. Vous avez le choix, en bas de votre écran, entre la transmission du parquet ou les versions anglaise ou française. Quand je dis « en bas de l'écran », c'est pour les gens qui utilisent un ordinateur personnel. Pour ceux qui utilisent un iPad ou autre chose, ce sera légèrement différent.
Avant de parler, veuillez attendre que je mentionne votre nom. Lorsque vous êtes prêt à prendre la parole, vous pouvez soit cliquer sur l'icône du microphone pour activer votre micro soit garder le doigt sur la barre d'espacement lorsque vous parlez. Lorsque vous relâchez la barre, votre micro se fermera.
Je vous rappelle également que tous les membres et les témoins devraient transmettre leurs commentaires par l'intermédiaire du président. Les membres qui ont besoin de demander la parole alors que ce n'est pas à leur tour de poser des questions doivent activer leur micro et déclarer qu'ils invoquent le Règlement.
Si un membre souhaite intervenir en réponse à un rappel au Règlement soulevé par un autre membre, il devrait utiliser la fonction « lever la main ». Ce faisant, il signalera au président qu'il désire prendre la parole. Pour ce faire, prière de cliquer sur « participants » au bas de l'écran. Lorsque la liste apparaît, vous verrez à côté de votre nom que vous pouvez cliquer sur la mention « lever la main ».
Lorsque vous prenez la parole, parlez lentement et clairement, et lorsque vous ne parlez pas, assurez-vous que votre micro est éteint. Je vous encourage fortement à utiliser un casque d'écoute. Si votre casque est muni d'un micro pendant, assurez-vous qu'il ne frotte pas contre votre chemise pendant votre temps de parole.
En cas de difficultés techniques — par exemple, si vous avez du mal à entendre l'interprétation ou vous êtes déconnectés par accident —, prière d'en informer immédiatement le président ou la greffière et l'équipe technique tâchera de régler le problème. Veuillez noter que nous devrons peut-être suspendre les travaux à ce moment-là, puisque nous devons nous assurer que tous les membres peuvent participer pleinement.
Avant de commencer, est-ce que toutes les personnes qui utilisent un ordinateur pourraient cliquer sur le côté droit supérieur de leur écran pour s'assurer qu'ils ont une vue d'ensemble? De cette façon, vous devriez être en mesure de voir tous les participants dans une grille. Ainsi, tous les participants à la vidéoconférence pourront se voir.
Pendant cette réunion, nous allons appliquer aux déclarations préliminaires et à la période des questions les mêmes règles que dans le cadre des réunions normales. Chaque témoin aura 10 minutes pour faire sa déclaration préliminaire avant que nous passions aux questions.
Je veux souhaiter la bienvenue aux témoins. Nous accueillons la Dre Joanne Liu, qui comparaît à titre personnel...
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Bonjour. Aujourd'hui, j'aimerais me faire l'écho de ce que j'ai déjà écrit dans The Globe and Mail sur mon obsession qui consiste à éviter le scénario le plus pessimiste pour le Canada dans la lutte contre la pandémie de la COVID-19.
Je crois qu'en ce moment, nous retenons tous notre souffle en espérant que notre stratégie fondée sur l'éloignement physique nous permettra d'aplanir la courbe. À cela s'ajoute le fait que nous avons mis notre système de soins de santé en attente afin d'être prêts à gérer une augmentation massive du nombre de patients atteints de la COVID-19. Il faut également affronter cette pandémie tout en composant avec une pénurie de ressources médicales.
Aujourd'hui, mon message principal — et je vous fournirai quelques exemples —, c'est qu'il faut vraiment se préparer pour le scénario le plus pessimiste, mais il faut également prévenir ce qui peut être évité.
En ce qui concerne le système et les établissements de soins de santé, je tiens mordicus à recommander qu'on réserve des établissements médicaux ou des sections d'établissements médicaux et du personnel spécialisé pour les patients atteints de la COVID-19. On a prouvé à maintes reprises que les déplacements de personnel entre les patients atteints de la COVID-19 et ceux qui ne sont pas atteints de cette maladie pouvaient contribuer à augmenter le nombre de patients infectés. De plus, il est évident que des gens qui travaillent de près avec un certain type de patients deviennent de plus en plus compétents dans la prestation de ces soins. S'il y a un patient atteint de la COVID-19 dans cet environnement fermé, il ira seulement dans les sections où se trouvent d'autres patients atteints de la maladie. Il faudrait aussi réserver des endroits pour obtenir une radiographie, par exemple. Ainsi, un patient non atteint de la COVID-19 ne devrait pas croiser un patient atteint de cette maladie. De cette façon, nous veillons à ce que notre système de soins de santé ne devienne pas un vecteur de la COVID-19. De plus, cela pourrait également permettre de réduire la quantité d'équipement de protection personnelle dont nous pourrions avoir besoin.
J'aimerais maintenant attirer votre attention sur certaines circonstances spéciales. Il s'agit des communautés vulnérables. Les résidences pour personnes âgées ont déjà fait les manchettes, mais il faut également parler des centres d'hébergement et des Premières Nations. À mon avis, il est essentiel d'envisager de mettre en œuvre des stratégies de protection radicales pour protéger les populations vulnérables. C'est ce que nous appelons l'isolement dans l'autre direction.
Nous isolons donc les malades, mais aussi les personnes vulnérables. Nous devrions éviter de faire ce qui a été fait au Québec, c'est-à-dire le double échec consistant à isoler les personnes âgées sans leur fournir les soins adéquats. Nous devons absolument éviter cela.
Une autre mesure qui doit être mise en œuvre le plus rapidement possible consiste à tester régulièrement les fournisseurs de soins qui travaillent avec ces communautés vulnérables. Nous savons qu'il y a un nombre croissant de personnes asymptomatiques; elles deviennent ce que nous appelons des « super agents de propagation » qui infectent d'autres personnes. En résumé, nous voulons éviter d'introduire la COVID-19 dans les communautés vulnérables. Nous ne voulons pas la propager dans les Premières Nations, dans les résidences pour personnes âgées ou dans les centres d'hébergement.
J'aimerais également soulever un point qui concerne le personnel des soins de santé — et je suis certaine que les intervenants de la communauté de la santé mentale le mentionneront aussi. C'est un point obligatoire pour moi. Je l'ai constaté dans le cas du virus Ebola. Je l'ai constaté aussi dans le cas du choléra. Je le constate maintenant dans le cas de la COVID-19, dans mon hôpital. Nous devons protéger nos travailleurs de la santé, nos travailleurs de première ligne, sur les plans physique et mental. Ils représentent notre dernière ligne de défense contre cette pandémie.
Mesdames et messieurs les députés, j'attire votre attention sur ce point, car je dirais que ce n'est pas du tout civilisé lorsque la personne responsable de mon service d'urgence me demande d'utiliser l'équipement de protection personnelle avec parcimonie. C'est extrêmement stressant. Je comprends pourquoi nous devons faire attention lorsque nous utilisons cet équipement, mais si vous voulez que nous nous occupions des patients, je vous implore de vous occuper de nous et de nous protéger.
Il est important que vous fassiez tout en votre pouvoir pour nous protéger physiquement et mentalement. Nous devrions avoir accès à un service d'assistance téléphonique pour discuter de la situation et pour communiquer avec des comités d'éthique qui nous aideront à prendre des décisions difficiles au sujet de patients qui sont branchés sur un respirateur. Il se peut qu'ils souhaitent retirer le respirateur ou cesser les soins. Nous devons avoir accès à du soutien et à du counselling psychologiques en tout temps. Aucun travailleur ne devrait subir de pression parce qu'il ne se sent pas à l'aise de travailler dans un environnement où se trouvent des patients atteints de la COVID-19.
Encore une fois, compte tenu de la propagation croissante dans la communauté, je crois toujours que nous devrions envisager de tester nos travailleurs de première ligne régulièrement aussitôt que nous aurons suffisamment de tests, parce qu'il y a des porteurs asymptomatiques.
Enfin, le dernier point d'ordre général que j'aimerais soulever concerne les patients qui ne sont pas atteints de COVID-19. En effet, la vie continue même si nous sommes aux prises avec la COVID-19. Ce serait une catastrophe et une tragédie si des problèmes médicaux facilement traitables et évitables devenaient mortels. Nous savons qu'en ce moment, un patient qui subit une crise cardiaque décède à la maison ou une personne qui souffre d'un accident vasculaire cérébral reste seule avec sa maladie ou son trouble de santé. Il est important que nous évitions dès maintenant de reléguer au second plan les patients qui ne sont pas atteints de la COVID-19, car la vie continue. Nous devons planifier la reprise graduelle des activités de notre système de soins de santé. C'est extrêmement important. On ne peut pas indéfiniment suspendre les activités de l'ensemble du système de santé, car les gens commenceront à mourir de maladies facilement traitables.
À titre de travailleuse humanitaire, je ne peux pas passer sous silence la question plus générale de la position du Canada dans le cadre de la réponse mondiale à cette maladie. Je sais que nous nous occupons des cas que nous avons ici, mais nous savons également que la seule façon de remporter la lutte contre la COVID-19 consiste à la remporter dans chaque pays. Je vous exhorte donc à réfléchir à la façon dont le Canada appuiera la réponse des pays à revenu faible ou moyen dans leur réponse à la COVID-19, étant donné que nous sommes tous interreliés et qu'il faut rétablir la santé de chaque pays individuel pour rétablir celle de l'ensemble des pays.
Donc, étant donné que le gouvernement du Canada a investi 300 millions de dollars — ou qu'il s'est engagé à investir 300 millions de dollars — dans la recherche et développement, je vous encourage fortement à veiller à prendre toutes les mesures de protection nécessaires, c'est-à-dire que le vaccin, le traitement ou les tests qui seront mis au point seront du domaine public et que les Canadiens, au même titre que les autres, auront accès à ces nouvelles découvertes — et qu'elles seront aussi abordables et accessibles à tous.
Merci beaucoup.
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Je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de comparaître aujourd'hui. Je suis très heureuse d'être ici.
À titre de cheffe de la direction de l'Association canadienne pour la santé mentale, j'ai l'honneur de représenter 86 sections et directions générales qui fournissent des services et des programmes directement aux personnes qui souffrent de problèmes et de troubles de santé mentale. Chaque année, notre vaste réseau de plus de 5 000 employés et 10 000 bénévoles fournit des services et des programmes de santé mentale à plus d'un million de Canadiens. Nous sommes présents dans plus de 330 collectivités dans toutes les provinces et dans le territoire du Yukon. Ces temps-ci, les téléphones sonnent sans arrêt dans les centres de l'Association canadienne pour la santé mentale d'un bout à l'autre du pays. J'aimerais donc vous parler de l'impact de la pandémie de la COVID-19 sur la santé mentale et vous proposer quelques solutions.
Nous félicitons le gouvernement fédéral de sa réponse pangouvernementale rapide face à cette pandémie qui se propage de plus en plus rapidement. Nous le félicitons également de son engagement à fournir du soutien en matière de santé mentale aux Canadiens pendant cette période sans précédent, notamment le nouveau soutien en matière de santé mentale et de consommation de substances récemment annoncé qu'on a appelé Espace mieux-être Canada. Je suis très heureuse que ce soutien soit annoncé aujourd'hui.
Maintenant plus que jamais, nous devons veiller à ce que notre système de soins de santé mentale soit équipé pour répondre aux besoins des Canadiens. Nous observons déjà l'émergence potentielle de troubles de santé mentale « post-pandémiques » dans la foulée de la COVID-19. La semaine dernière, CBC a signalé une augmentation de la demande de services de l'Association canadienne pour la santé mentale en Nouvelle-Écosse. Ce centre reçoit habituellement 25 appels par jour, mais il reçoit maintenant 700 demandes de soutien en matière de santé mentale chaque jour. Ces demandes proviennent surtout de gens qui n'ont aucun antécédent de trouble de santé mentale.
Les Canadiens sont très inquiets. Ils craignent de contracter la maladie. Ils sont inquiets pour leurs familles et leurs amis. Ils craignent de perdre leur emploi et leur capacité de joindre les deux bouts. Les personnes qui souffrent de troubles de santé mentale graves et de toxicomanie sont particulièrement vulnérables. Un grand nombre des clients de l'Association canadienne pour la santé mentale sont confrontés à l'instabilité en matière de logement et vivent dans des situations dans lesquelles il est très difficile de pratiquer l'éloignement physique et le contrôle de l'infection. Dans de nombreuses collectivités, les programmes, les services et les traitements dont ils ont besoin ont été interrompus. Ils courent donc un risque élevé d'être infectés, de souffrir de solitude, d'avoir des symptômes aigus et de faire une rechute.
Les peuples autochtones sont peut-être la population la plus vulnérable du Canada. En effet, de nombreux membres de cette communauté souffrent de graves troubles de santé mentale qui découlent des effets de la colonisation. De plus, cette population a le plus haut taux de suicide chez les jeunes au pays. Les adultes plus âgés ont un réseau social restreint et un accès limité à la technologie, ce qui réduit leur possibilité d'établir des liens. Nous craignons que ces problèmes soient seulement amplifiés par les conditions liées à la pandémie.
Nos travailleurs du système de soins de santé et nos travailleurs de première ligne sont aussi à risque de souffrir de troubles de santé mentale, comme Dre Liu l'a expliqué de manière poignante. Comme vous l'avez entendu, les défis et les besoins urgents auxquels ils sont confrontés chaque jour au travail génèrent de la crainte, de la frustration et de l'anxiété. Les conséquences sérieuses du fardeau substantiel assumé par ces travailleurs émergent en Chine, en Italie et aux États-Unis. Une étude récente révèle que des travailleurs du système de soins de santé qui ont traité des patients atteints de la COVID-19 en Chine affirment présenter des symptômes de dépression, d'anxiété, d'insomnie et de détresse. En Italie, au moins deux membres du personnel infirmier de première ligne se sont suicidés. Des travailleurs de la santé américains utilisent l'expression « blessure morale » pour décrire l'épuisement physique et mental, la crainte d'être infectés, l'approvisionnement inadéquat en équipement de protection personnelle et le déchirement face à la prise de décisions très difficiles.
Nous commençons seulement à percevoir l'impact de la COVID-19 sur la santé mentale. Comme l'a révélé notre expérience de soutien aux Albertains après les feux de Fort McMurray, le rétablissement prend du temps, parfois jusqu'à deux ans. Des recherches menées un an après l'épidémie de SRAS ont révélé une augmentation de la détresse psychologique et des troubles de stress post-traumatique chez les patients et les cliniciens. Nous n'avons pas encore une vue d'ensemble de cet impact, mais notre expérience nous confirme que l'impact sur la santé mentale sera important.
Pour parler simplement, les Canadiens ont besoin d'un investissement immédiat et substantiel dans les soins de santé mentale afin de prévenir les troubles de santé mentale « post-pandémiques ». C'est la raison pour laquelle nous appuyons les Canadiens maintenant et que nous planifions déjà la période de rétablissement à venir. À titre de pionniers et de leaders en matière de santé mentale dans la communauté depuis 1918, nous nous concentrons sur la promotion et la prévention en matière de santé mentale.
Nous voulons éviter les hospitalisations en renforçant la santé mentale des Canadiens avant que leurs problèmes empirent et en soutenant les personnes atteintes d'une maladie mentale grave et persistante afin qu'elles se portent mieux pendant et après le traitement. Notre vaste réseau comprend des conseillers en santé mentale et en toxicomanie, des thérapeutes, des infirmières praticiennes, des pairs aidants et des mentors en rétablissement. Ils sont sur le terrain, dans les quartiers où les Canadiens vivent, travaillent et se divertissent. Nous sommes prêts à mobiliser ce réseau pour offrir davantage de services en santé mentale aux Canadiens qui en ont le plus besoin en cette période de crise.
Nous pouvons rapidement élargir la portée de programmes éprouvés, en anglais et en français, pour tendre la main à des milliers de Canadiens. Nos solutions rentables et fondées sur des données probantes sont conçues pour les enfants et les jeunes, les aînés, les Autochtones et les premiers intervenants. Nous offrons à tous les Canadiens le programme Bounceback. C'est un programme d'acquisition de connaissances qui repose sur la thérapie cognitivocomportementale. Dans la seule province de la Colombie-Britannique, plus de 11 000 personnes ont participé, et 85 % d'entre elles ont dit que le programme les a aidés à apporter des changements durables et positifs pour réduire l'anxiété et la dépression.
Aux travailleurs de première ligne, nous offrons un soutien par les pairs grâce au programme OSI-CAN ainsi qu'un cours de sensibilisation aux troubles de santé mentale dans le cadre du programme Resilient Minds. Ces deux programmes misent sur l'entraide entre professionnels et ont contribué depuis leur création à la santé et au rétablissement de centaines de travailleurs de première ligne. Grâce à un investissement rapide du gouvernement, nous pourrions immédiatement offrir ces programmes éprouvés à l'échelle du pays, y compris dans des collectivités rurales et éloignées.
Même si notre priorité demeure, en pleine pandémie, la mise de ressources à la disposition de Canadiens aux prises avec des problèmes de santé mentale, il est néanmoins essentiel de planifier l'avenir. Nous songeons déjà à l'éventuelle reprise ainsi qu'aux moyens de soutenir les gens dans leur retour à une vie normale. Nos collèges de rétablissement sont des centres d'apprentissage sur la santé mentale qui offrent un enseignement et un soutien par les pairs grâce à des cours sur le bien-être. Il y en a déjà dans 11 collectivités au Canada, et de nombreuses autres sections de l'Association s'empressent d'ouvrir le leur.
Le mandat de l'Association canadienne pour la santé mentale consiste à assurer la santé mentale de tout le monde. Nous savons que l'atteinte de cet objectif nécessite des investissements gouvernementaux considérables dans le domaine. Les Canadiens méritent d'avoir accès à des thérapies financées par l'État et fondées sur des données probantes, ainsi qu'à une aide complémentaire en matière de santé mentale et de soutien social. Comme les répercussions de la COVID-19 sur la santé mentale différeront en fonction de la situation sociale et économique de chaque personne, nous savons qu'une bonne santé mentale commence par des éléments fondamentaux, comme un emploi intéressant et un logement adéquat.
En plus d'aider les gens maintenant, nous devons également être prêts à gérer la pression inévitable qui sera exercée sur le système de santé mentale compte tenu de la hausse des cas de dépression, de détresse psychologique, de toxicomanie, de trouble de stress post-traumatique et de violence familiale qui accompagnent presque toujours les catastrophes de grande envergure. Comme la pandémie de la COVID-19 l'a révélé, notre économie dépend entièrement du bien-être de notre population. Pour la relancer et assurer une reprise durable, nous devons voir à ce que les Canadiens soient en assez bonne santé, tant physiquement que mentalement, pour pouvoir reprendre le travail et mener leurs activités quotidiennes.
Les Canadiens savent que la santé mentale est aussi importante que la santé physique. Comme nous le soulignerons pendant la Semaine de la santé mentale — qui aura lieu du 4 au 10 mai cette année, et que l'Association dirige depuis près de 70 ans —, même si un Canadien sur cinq souffre d'une maladie mentale au cours d'une année type, cinq Canadiens sur cinq doivent protéger leur santé mentale.
Nous sommes véritablement à la croisée des chemins. On n'a jamais été aussi motivé à demander de l'aide, mais le secteur de la santé mentale n'était déjà pas en mesure de répondre à la demande avant le début de la pandémie. Nous devons agir maintenant pour être certains d'être prêts à gérer une augmentation des problèmes de santé mentale attribuable à la COVID-19.
Plus que jamais, le Canada doit faire preuve d'un discernement juste ainsi que de leadership en matière de santé mentale. Nous savons que les Canadiens demanderont de l'aide. Ils tendent déjà la main. Nous vous demandons seulement de bien vouloir nous donner les moyens d'en faire autant.
Merci encore de votre invitation à témoigner. Je suis impatiente de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président. Bonjour et merci de me recevoir aujourd'hui, ainsi que mes collaborateurs, pour discuter du rôle de Services publics et Approvisionnement Canada dans la réponse du gouvernement à la COVID-19.
Tout d’abord, j'aimerais remercier les personnes qui travaillent en coulisse pour rendre cette réunion possible, notamment les interprètes linguistiques qui continuent de jouer un rôle exceptionnel pour veiller à ce que les Canadiens obtiennent les derniers renseignements.
M’accompagnent aujourd’hui M. Michael Vandergrift, sous-ministre délégué, et Mme Arianne Reza, sous-ministre adjointe, Direction générale des approvisionnements.
Notre ministère est l'acheteur central du gouvernement du Canada et est responsable de l'acquisition des biens qui nous aideront à traverser la pandémie de COVID-19. Plus précisément, nous aidons le Canada à obtenir de l’équipement de protection individuelle et des fournitures médicales, dès maintenant et pour les mois à venir. Ce n'est un secret pour personne que nous évoluons dans un environnement mondial hautement concurrentiel, ce qui s'accompagne de défis. Le monde entier s'efforce d'obtenir le même matériel auprès d'un nombre limité de fournisseurs, dont beaucoup sont situés en Chine. Il en résulte une chaîne d'approvisionnement complexe et imprévisible. Ajoutez à cela les restrictions de commande et vous obtenez un marché très instable où les commandes ne se concrétisent pas toujours par des livraisons immédiates.
Je pense que je devrais prendre quelques minutes, monsieur le président, pour parler de notre stratégie d'approvisionnement. Je vais ensuite faire le point sur des biens précis dont nous faisons l'acquisition.
Je peux vous dire que nos experts en approvisionnement travaillent jour et nuit, en achetant de manière agressive auprès de tous les fournisseurs et distributeurs disponibles, ici et à l'étranger. Pour soutenir les travailleurs de la santé qui œuvrent en première ligne au Canada, nous achetons des fournitures au nom de l'Agence de la santé publique du Canada, qui regroupe les demandes des provinces et territoires et gère également notre stock national. Ces activités d'approvisionnement s'ajoutent à ce que font les provinces et territoires par leurs propres moyens.
Je dois souligner que la stratégie que nous mettons en œuvre — j'ai dit que j'allais en parler au Comité — continue d’être peaufinée au fur et à mesure que les choses évoluent, car nous composons avec des marchés mondiaux comme nous n'en avons jamais vu. Je suis sûr que les membres sont conscients de l'importance des équipements de protection individuelle. Étant donné l'ampleur mondiale de la crise et l'importance de la Chine quant à la production d’équipements de protection individuelle, nous sommes confrontés à une situation où de nombreuses administrations se font concurrence pour l'approvisionnement en produits qui se font rares. Parallèlement, l'industrie essaie d’accroître sa capacité pour répondre à la demande, de sorte que de nouveaux acteurs apparaissent rapidement. Normalement, nous ferions l’acquisition de ces produits exclusivement auprès de distributeurs canadiens, mais étant donné l'évolution rapide des conditions du marché, une approche différente était et demeure nécessaire.
Notre approche en matière d'approvisionnement comporte trois volets. Le premier volet de notre stratégie consistait à acheter les stocks existants où nous le pouvions. Comme vous pouvez l'imaginer, étant donné la pandémie, les produits recherchés étaient en quantité limitée, mais il était important de les obtenir pendant que nous mettions en place le deuxième volet de notre stratégie.
Le deuxième volet de la stratégie, qui se poursuit, consistait à passer de grosses commandes afin de créer un flux régulier de marchandises reçues sur un certain nombre de mois. L'un des avantages de cette approche est que, dans un marché concurrentiel, les grosses commandes sont plus intéressantes sur le plan commercial. Le fait de commander en collaboration avec les partenaires provinciaux et territoriaux nous permet de créer des commandes plus importantes et d'attirer ainsi l'attention de l'industrie. Nous avons également pris la décision délibérée de commander de manière agressive ou, autrement dit, de consciemment commander en quantité excessive. Cette décision était et reste délibérée étant donné l'incertitude quant à la rapidité de réception des marchandises.
Comme vous pouvez l'imaginer, une collaboration étroite avec les gouvernements provinciaux et territoriaux est indispensable à notre succès. À cette fin, notre ministre a établi une table ministérielle fédérale-provinciale-territoriale sur l’approvisionnement, qui contribue à une coordination encore plus étroite pour cerner les besoins en approvisionnement et y répondre.
Le troisième volet de notre stratégie est national. Sous le leadership d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada, on a entamé des discussions avec l'industrie au Canada afin de contribuer à combler les lacunes à moyen et à long terme. De nombreuses entreprises de partout au pays ont répondu à l'appel, et certains fabricants ont complètement réorienté leurs lignes de production pour répondre à ce besoin urgent. Le rôle de mon ministère est de mettre en place des contrats avec ces entreprises, et nous l'avons déjà fait, ce dont je parlerai dans un instant.
Il y a des défis à relever, et je mentirais aux membres du Comité si je laissais croire à quiconque que réaliser des approvisionnements dans cet environnement ne pose aucun problème. Les risques sont nombreux. Nous achetons des produits à un volume élevé, et ce, auprès de fournisseurs que nous ne connaissons pas, ce qui peut poser des problèmes de livraison et de qualité. La disponibilité limitée d'un grand nombre de ces produits entraîne une surenchère des acheteurs — j'ai parlé plus tôt de la concurrence —, et les commandes établies sont souvent redirigées vers ceux qui sont prêts à payer le plus cher. En outre, nous constatons en Chine des contrôles à l'exportation et des exigences supplémentaires pour les fournitures médicales. J'ai déjà mentionné la Chine. Les exigences là-bas ont changé à quelques reprises, et il importe de suivre l'évolution de la situation.
Pour tirer notre épingle du jeu dans cet environnement, il nous faut un soutien important sur le terrain. C'est un aspect pour lequel nous avons dû adapter notre stratégie pour mieux composer avec la réalité. Compte tenu de l'émergence de nouveaux acteurs et de la pénurie de fournitures, nous ne pouvons plus compter uniquement sur les distributeurs canadiens pour obtenir des produits. Nos fonctionnaires travaillent en étroite collaboration avec des partenaires dans d'autres pays, y compris les ambassades, pour maintenir notre chaîne d'approvisionnement. Ce soutien et cette expertise sur le terrain s'avèrent inestimables, car le personnel diplomatique et les partenaires externes aident à évaluer les entreprises à l'avance pour mieux garantir la qualité. Cela s’ajoute au soutien sur le terrain pour assurer la livraison des produits, ainsi qu’à l'expertise en matière de logistique et d'entreposage qui contribue à ce que nos envois soient sécurisés et acheminés au Canada.
Ce soutien comprend la réception des produits dès leur sortie des chaînes de production, l'inspection rapide de la qualité, l'organisation de l'expédition vers un entrepôt que nous avons sécurisé à l'aéroport et l’exécution active du dédouanement.
Et dans tout cela, nous avons dû considérablement accélérer nos processus d'approvisionnement en prenant des décisions rapides et en rationalisant les étapes de passation des marchés. Des contrats qui prennent généralement plusieurs mois à finaliser sont mis en place en quelques jours, voire en quelques heures. Les approches concurrentielles traditionnelles aboutiraient à la vente du produit à un autre acheteur avant qu'une décision ne soit prise, le tout dans un environnement où les prix augmentent rapidement et où les règles peuvent changer du jour au lendemain.
Mais même après l'arrivée de ces envois au Canada, l'Agence de la santé publique doit d'abord inspecter les fournitures achetées, puis les acheminer où elles sont nécessaires partout au Canada. Il en va de même pour les fournitures que nous produisons dans les différentes régions du pays. Afin de nous aider dans ces efforts logistiques et d'aider nos collègues à l'Agence de la santé publique du Canada, nous avons conclu une entente avec Amazon Canada pour l'entreposage et la livraison au pays. Postes Canada et Purolator participent également aux efforts visant à aider l'Agence de la santé publique du Canada à acheminer l'équipement de protection individuelle où les besoins sont les plus criants. Il s'agit d'acheminer le plus rapidement possible les fournitures de l'endroit où elles sont fabriquées vers nos médecins, infirmiers et infirmières, et professionnels de la santé. SPAC aide ses partenaires dans cette tâche.
Permettez-moi maintenant de vous présenter les dernières données en matière de commandes et de livraisons. En date du 13 avril — et les chiffres changent rapidement —, nous avons réussi à acheter plus de 293 millions de masques chirurgicaux et plus de 130 millions de masques respirateurs N95, de l’équipement de protection essentiel pour les travailleurs de la santé. À ce jour, nous avons reçu la livraison de plus de 17 millions de masques chirurgicaux et d’un peu plus de 609 000 masques respirateurs N95. Afin de répondre aux besoins en approvisionnement à plus long terme, nous travaillons à la mise en place d’un contrat de fabrication au pays avec Medicom, de Pointe-Claire, au Québec, pour la production de ces masques. Comme pour tout l’équipement que les pays recherchent, les respirateurs sont en pénurie. Malgré cette situation, nous avons réussi à obtenir des commandes pour plus de 32 000 respirateurs auprès de diverses entreprises, dont les entreprises canadiennes Thornhill Medical, CAE, Starfish et FTI Professional Grade.
De plus, nous avons commandé plus de 20 millions de litres de désinfectant pour les mains. La livraison a déjà commencé et se poursuivra au cours des prochains mois. Cette action est soutenue au niveau national en partie grâce à un accord avec Fluid Energy, une société établie à Calgary.
Et nous avons commandé plus de 900 millions de paires de gants, dont près de 5 millions ont été reçues jusqu’à maintenant. Nous avons également commandé 17 millions d’écrans faciaux. Nous avons notamment conclu un accord avec Bauer, qui réoriente ses lignes de production de patins de hockey pour fabriquer ces écrans faciaux qui sont si importants pour le personnel médical de première ligne.
Il est souvent question des trousses de dépistage. En ce qui concerne ces trousses, des fournitures sont en cours de livraison, y compris des centaines de milliers d’écouvillons, et nous continuons à travailler pour en obtenir davantage. Je tiens à signaler qu'il y a une pénurie mondiale de réactif, qui est un produit chimique important utilisé dans les tests de dépistage. C'est un produit que nous recherchons et commandons activement, et nous continuons à surveiller la situation avec Santé Canada comme nous le faisons pour la disponibilité de toutes les fournitures obtenues à l'étranger.
Je tiens également à souligner que Santé Canada et l'Agence de la santé publique du Canada accélèrent les examens réglementaires des nouveaux tests et d’autres produits afin que davantage de produits soient disponibles pour soutenir notre réponse.
Chez nous, nous avons attribué un contrat à Spartan, une société établie à Ottawa, qui fournira des trousses de dépistage rapide permettant de tester plus d’un million de Canadiens pour le virus. Ces trousses s'ajoutent aux millions de trousses de dépistage déjà utilisées dans les provinces et territoires.
Ce ne sont là que quelques-uns des produits que nous avons achetés et quelques-unes des entreprises canadiennes qui relèvent le défi et contribuent à la réponse. Nous augmentons nos commandes et cernons de nouveaux besoins sans relâche.
Avant de conclure, je tiens à souligner deux ou trois choses pour le Comité, car au-delà de l'approvisionnement, le ministère offre un soutien par d'autres moyens. J'ai déjà mentionné nos interprètes qui sont ici aujourd'hui. Le Bureau de la traduction appuie la communication de l'information relative à la COVID-19 aux Canadiens, ce qui comprend les langages des signes, les langues officielles et l'interprétation en langues autochtones pour les représentants du gouvernement, les ministres et le .
Nous gérons aussi l'un des plus grands portefeuilles immobiliers au pays. Nous faisons actuellement l'inventaire de nos avoirs pour étudier la meilleure façon de fournir aux collectivités les logements sûrs dont elles pourraient avoir besoin à l'avenir, ce qui, de toute évidence, nécessite aussi une collaboration avec les autorités locales et les partenaires provinciaux.
En conclusion, monsieur le président, notre rôle le plus important est l'achat urgent de fournitures vitales. Nous traversons une période sans précédent, et le gouvernement prend des mesures sans précédent pour acheminer de l'équipement sur les lignes de front. Bien que nous fassions des progrès considérables, nous évoluons dans un marché hyper concurrentiel et nous devons continuer à être vigilants. Nous savons que nous pourrions être confrontés à des pics d'infection par la COVID-19 au Canada pendant des mois à venir, et nous devons nous préparer à tous les scénarios.
Au nom de nos responsables de la santé, mon ministère continuera à rechercher et à obtenir les fournitures dont nos professionnels de la santé ont besoin pour assurer la sécurité des Canadiens et la leur.
Je vous remercie de votre temps, et nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
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Je vous remercie de votre question.
Oui, j'ai de l'expérience en matière d'épidémie et de pandémie, mais c'est vraiment la première fois qu'il y a une pandémie de cette envergure à l'échelle mondiale.
Est-ce que le Canada aurait pu être mieux préparé? Je crois qu'il y avait quand même des signes clairs. Je ne suis pas dans le secret des dieux au Canada, mais je me demande ce que celui-ci a fait pour se préparer à l'urgence de santé publique mondiale qui a été déclarée le 30 janvier 2020. C'est une question qu'il faudra revoir en temps et lieu, une fois que nous aurons traversé cette période difficile.
Lors d'une urgence de santé publique mondiale, des mécanismes de préparation doivent être mis en branle et une analyse importante doit être faite.
Pour avoir déjà participé à des scénarios de simulation, je sais qu'on les crée souvent de manière abstraite, sans prendre en compte l'écosystème dans lequel se produit la pandémie. Selon moi, personne n'aurait pu prévoir que le monde entier voudrait se procurer des masques N95 ainsi que des équipements de protection individuelle dans un contexte de prédation totale. Tout le monde s'est laissé prendre de court, et je crois que ce sera une grande leçon.
En ce qui concerne les frontières, je crois que la question est excellente, mais sachez que les recommandations de l'Organisation mondiale de la santé n'incluaient pas celle de fermer les frontières. Nous pourrons poser des questions à l'OMS sur la façon dont elle nous a guidés dans notre façon de répondre à cette pandémie. Je pense qu'il y a eu, quelque part, une certaine complaisance. On a dormi « sur la switch », comme on le dit en bon québécois. Comment réagirons-nous la prochaine fois?
Je ne lancerai pas la pierre à M. Matthews, le troisième témoin. Je suis certaine qu'il ne dort pas la nuit pour trouver des équipements de protection pour tout le personnel au Canada. Je crois qu'il faudra qu'il y ait un déclic beaucoup plus rapide pour faire bouger les choses, pour réagir de façon claire et pour utiliser les instances qui ont de l'expérience.
Au Canada, nous avons beaucoup de connaissances. Plusieurs organisations internationales établies au Canada ont agi lors d'épidémies et de pandémies qui ont eu lieu ailleurs dans le monde, et elles peuvent transmettre leurs connaissances. Je pense que nous ne les avons pas très bien utilisées.
Oui, je pense que nous sommes en retard, mais il y a quand même des faits atténuants, parce que l'OMS n'a pas envoyé les bons signaux pour faire comprendre aux gens que c'était dangereux et qu'il fallait se préparer comme il faut. Elle a recommandé de laisser les frontières ouvertes, et on peut remettre cela en question. Pendant l'épidémie d'Ebola, on avait dit de ne pas fermer les frontières et de ne pas mettre les gens en quarantaine. Présentement, nous avons pris un virage à 180 degrés en fermant les frontières. La stratégie clé, pour que les cas n'atteignent pas une intensité maximale, ce qui mettrait nos systèmes de santé complètement par terre, c'est la distanciation physique.
Je pense que nous aurions pu être mieux préparés, mais je crois aussi que nous sommes dans une courbe d'apprentissage très importante.
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En ce qui concerne les tests et les personnes qui devraient être testées, il est difficile d'élaborer une stratégie quand les ressources sont limitées, mais ces travailleurs devraient être testés en priorité, et je crois que cela n'a pas encore été indiqué clairement.
Je pense que cela devrait être recommandé pour les travailleurs parce que, pour le moment, il faut présenter des symptômes pour être testé. Maintenant, les critères ont été élargis par rapport à ce qu'ils étaient auparavant, mais ils doivent être beaucoup plus... Nous avons désormais ajouté les symptômes gastro-intestinaux et les symptômes respiratoires et, pour être testé, un seul symptôme est nécessaire.
Nous savons qu'il y a des porteurs asymptomatiques. C'est la raison pour laquelle, dès que nous pourrons nous le permettre, il devrait être prioritaire de tester les travailleurs de la santé et les travailleurs de première ligne, qui engloberaient les gens qui travaillent dans les pharmacies ainsi qu'à d'autres endroits, comme des résidences pour personnes âgées.
C'est une mesure que nous prenons à certains endroits. Je pense que, dans certains lieux, comme les territoires des Premières Nations, où nous savons qu'il y a des communautés vulnérables, nous ne souhaitons pas introduire la COVID-19 et, par conséquent, nous devrions réaliser des tests. Par exemple, lorsque des gens de Montréal retournent au Nunavut, si nous nous contentons de leur demander s'ils ont des symptômes, je pense, en toute honnêteté, que ces gens, qui meurent d'envie de retourner dans leur collectivité, ne nous diront pas exactement ce qui se passe. Par conséquent, je crois que nous devrions simplement tester ces gens.
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Je vous remercie beaucoup de votre question.
C'est sûr que les patients qui n'ont pas la COVID-19 deviennent des patients de deuxième ordre. C'est quelque chose qui a été prouvé dans presque toutes les épidémies. À ce sujet, il y a beaucoup d'exemples en Afrique de l'Ouest. Il est probable que plus de gens ont vu leur santé se détériorer ou sont décédés des suites d'une maladie autre que l'Ebola que de l'Ebola.
C'est pour cela qu'il est essentiel de reprendre des activités médicales pour les patients qui n'ont pas la COVID-19, notamment des services ambulatoires et hospitaliers. C'est là que prend toute sa valeur l'idée d'avoir des hôpitaux consacrés à des patients testés positifs à la COVID-19 et d'autres pour les patients testés négatifs.
Ainsi, un patient qui se présenterait à l'hôpital pour sa fibrose kystique ne serait pas exposé à la COVID-19. Il ne se mettrait pas en danger. Pour moi, c'est important, et je le dis à tout le monde, il faut planifier la relance dès maintenant, et il va falloir apprendre à vivre avec la COVID-19.
Il faut réfléchir à la capacité de recherche quand la deuxième vague va arriver. Il va falloir être novateur. Il va falloir réorganiser les tâches des différentes communautés médicales. Il va probablement falloir demander aux résidents et à nos étudiants en médecine de travailler à un niveau plus élevé.
Il faut vraiment réfléchir à cela, et j'ai l'impression qu'il n'y a pas beaucoup de plans qui se font dans cette optique, aujourd'hui. On ne peut pas garder éternellement un système de santé en pause. Il y aurait des dommages collatéraux, des situations évitables qu'on aurait pu prévenir, comme le fait que la santé des patients se détériorerait.
S'il y a une chose que vous devez mettre en avant, c'est cela.
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Sur la façon de mieux les protéger, je pense que les travailleurs de la santé... Nous avons déjà discuté de protection physique, et je sais que M. Matthews y travaille. Je pense qu'il a entendu les demandes à cet égard.
Concernant la protection des travailleurs de la santé dans leur milieu de vie, je pense qu'on n'a pas assez bien informé ces travailleurs sur les mesures à prendre pour protéger leur famille et qu'on n'a pas aidé ceux qui veulent s'isoler en allant habiter ailleurs. Comme je l'ai suggéré, nous pourrions offrir aux gens qui ont une maison intergénérationnelle de loger à l'hôtel pour éviter qu'ils n'infectent leur mère de 75 ans, par exemple. On ne le fait pas vraiment, toutefois. Je pense qu'il y a eu des initiatives un peu partout, mais il n'y a pas de véritables directives à cet égard. Je pense que cela devrait être offert; c'est l'une des choses que nous faisions toujours à Médecins sans frontières. Pendant la crise d'Ebola — une situation différente, j'en suis consciente —, tout le monde logeait à l'hôtel. Chacun avait sa chambre et tout le monde était isolé.
J'insiste sur ce point parce qu'on ne veut pas qu'ils infectent leur famille, et inversement, car s'ils devaient être infectés par leur famille, ils seraient testés, même pour un simple rhume. Or, lorsqu'une personne se fait tester, elle doit la plupart du temps rester isolée de 24 à 48 heures, jusqu'à ce qu'elle ait ses résultats. Une personne infectée est mise en quarantaine pendant deux semaines, voire plus, selon l'évolution de sa condition.
Il y a donc la protection physique et la protection de la santé mentale, et je ne pense pas qu'il y ait dans les différents hôpitaux suffisamment de groupes de parole, comme nous les appelons, soit des groupes de gens à qui se confier, à qui parler. Je pense que les services de santé mentale des hôpitaux devraient aussi être accessibles au personnel, à tout le personnel. À mon avis, ce n'est pas que vraiment le cas actuellement dans de nombreux établissements. Je sais qu'il existe une ligne d'écoute téléphonique où les gens peuvent appeler, mais je pense que les gens aimeraient aussi avoir l'occasion d'échanger en petits groupes dans leur hôpital.
Quant aux autres protections supplémentaires dont personne ne s'occupe, le fait que... Les gens mettent leur vie en danger. Que sommes-nous prêts à faire s'ils contractent l'infection et qu'ils meurent? En tant que pays, sommes-nous prêts à assumer nos responsabilités pour les personnes qui ont mis leur vie en danger et fait le sacrifice ultime? Je constate qu'il n'y a pas eu de beaucoup de discussions sur le sujet jusqu'à maintenant. Je sais que cela a été abordé lors de la crise du SRAS, en Ontario, mais si je ne me trompe pas, il n'y a pas eu de véritables conversations à ce sujet. Je n'en ai pas entendu parler.
Je pense que l'évolution à long terme sera un aspect important. Je ne suis pas spécialiste en la matière; je pense que Mme Eaton en sait beaucoup plus que moi. La plupart du temps, les gens peuvent s'en sortir pendant la phase aiguë, mais le TSPT se manifeste deux ou trois mois plus tard. C'est ce que j'ai constaté à Médecins sans frontières. Que faisons-nous pour prévenir cela? Je pense que nous devrions être beaucoup plus proactifs pour nous assurer que cela n'arrivera pas.
Merci beaucoup.