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Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue, tout le monde, à la 15e réunion du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes.
Nous nous réunissons aujourd'hui conformément aux ordres de renvoi du 11 avril et du 20 avril 2020. Le Comité se réunit pour entendre des témoignages concernant des questions liées à la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19.
La réunion d'aujourd'hui se déroule entièrement par vidéoconférence, et les délibérations seront disponibles sur le site Web de la Chambre des communes. Comme à la dernière réunion, la diffusion Web montrera toujours la personne qui parle plutôt que toutes les personnes présentes au Comité.
Pour faciliter le travail de nos interprètes et assurer une réunion ordonnée, j'aimerais vous exposer quelques règles à suivre.
Premièrement, l'interprétation dans le cadre de cette vidéoconférence fonctionnera pratiquement de la même manière qu'à une réunion régulière du Comité. Vous pouvez choisir, au bas de votre écran, le signal du parquet, le signal en anglais ou le signal en français. Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme. Lorsque vous êtes prêt à intervenir, vous pouvez soit cliquer sur l'icône du microphone pour activer votre micro, soit appuyer sur la barre d'espacement lorsque vous parlez, et lorsque vous relâchez la barre d'espacement, votre micro sera mis en sourdine, comme un walkie-talkie.
Je vous rappelle que toutes les observations des membres et des témoins doivent être faites par l'entremise de la présidence. Si des membres doivent demander la parole en dehors du temps qui leur est imparti pour les questions, ils doivent activer leur micro et déclarer qu'ils ont un rappel au Règlement. Si un membre souhaite intervenir sur un rappel au Règlement qui a été soulevé par un autre membre, il doit utiliser la fonction « Lever la main ». Cela fera savoir à la présidence que vous souhaitez intervenir. Pour ce faire, vous devez cliquer sur « Participants » au bas de l'écran. Lorsque la liste s'affiche, vous verrez, à côté de votre nom, que vous pouvez cliquer sur « Lever la main ».
Lorsque vous avez la parole, veuillez vous exprimer lentement et clairement. L'utilisation d'écouteurs est fortement encouragée. Si vous avez des écouteurs et un microphone, veuillez tenir le microphone près de votre bouche lorsque vous parlez pour améliorer la qualité du son pour nos interprètes.
Si des problèmes techniques surviennent, par exemple, en lien avec l'interprétation ou si vous avez été accidentellement déconnectés, veuillez en informer le président ou la greffière immédiatement et une équipe technique travaillera à régler le problème. Veuillez prendre note que nous pourrions devoir suspendre les travaux durant cette période car nous devons nous assurer que tous les membres sont en mesure de participer pleinement aux délibérations.
Avant d'entamer la réunion, est-ce que tous les participants pourraient, s'il vous plaît, vérifier dans le coin supérieur droit qu'ils sont en mode « Galerie »? Cette fonction vous permet de voir tous les participants dans une sorte de grille. Elle permettra à tous les participants à la vidéoconférence de se voir.
Durant cette réunion, nous suivrons les mêmes règles qui s'appliquent habituellement aux déclarations liminaires et à la période des questions dans le cadre de nos réunions régulières. Chaque groupe de témoins disposera de 10 minutes pour faire ses déclarations liminaires, qui seront suivies des séries de questions habituelles posées par les membres.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
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Oui, il y a effectivement ces défis, mais nous utilisons la même procédure pour les questions et le temps alloués que dans une réunion régulière. J'essaie de tenir compte des problèmes techniques. J'accorde du temps supplémentaire aux gens si, par exemple, les témoins ne peuvent pas entendre la question ou ne peuvent pas répondre. Quoi qu'il en soit, je tenterai d'être scrupuleusement équitable envers tout le monde.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue aux témoins.
De l'Association canadienne des policiers, nous accueillons Tom Stamatakis, président.
Du Syndicat des agents correctionnels du Canada, nous recevons Jeff Wilkins, président national, et Éric Thibault, vice-président national.
Du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile, nous accueillons Patrick Tanguy, sous-ministre adjoint, Service de la gestion des urgences et des programmes.
De l'Agence de la santé publique du Canada, nous accueillons Sally Thornton, vice-présidente, Direction générale de l'Infrastructure de sécurité sanitaire, et Cindy Evans, vice-présidente par intérim, Gestion des urgences.
Nous allons commencer avec l'Association canadienne des policiers.
Monsieur Stamatakis, vous avez 10 minutes, s'il vous plaît.
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Monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du Comité, merci de l'invitation à comparaître devant vous cet après-midi dans le cadre de votre étude sur la réponse canadienne à la pandémie de COVID-19 et de l'occasion d'offrir le point de vue des policiers qui travaillent aux premières lignes sur cet enjeu important.
Avant de commencer ma déclaration, cependant, je veux tout d'abord prendre quelques instants pour offrir mes plus sincères condoléances à la famille de l'agente Heidi Stevenson de la Gendarmerie royale du Canada et à toutes les victimes de l'horrible attaque survenue en Nouvelle-Écosse la fin de semaine dernière. J'aimerais également remercier le premier ministre, le ministre et tous les représentants élus de tous les partis qui ont adressé des propos bienveillants à nos collègues du milieu policier, tant à la GRC que dans d'autres services municipaux, qui ont conjugué leurs efforts pour aider dans le cadre de cette importante enquête en cours.
Je suis particulièrement reconnaissant de l'occasion de comparaître virtuellement cette semaine, puisque c'est la semaine où nous étions censés tenir notre conférence législative annuelle de l'Association canadienne des policiers, ce qui donne à nos membres l'occasion de venir à Ottawa et de rencontrer leurs représentants élus fédéraux. De toute évidence, la COVID-19 a changé nos plans. Bien que nous ayons déjà commencé la planification de notre conférence de 2021, le fait de comparaître devant vous me donne l'occasion de présenter notre organisation aux nouveaux membres du Comité et de me présenter à nouveau à quelques visages familiers.
L'Association canadienne des policiers est la plus grande organisation de défense des intérêts des services de police au pays, avec plus de 55 000 membres civils et membres assermentés qui servent dans les corps policiers d'un bout à l'autre du pays. Nos membres sont aux premières lignes de cette pandémie depuis le début et travaillent en étroite collaboration avec d'autres premiers répondants. Bien qu'il y ait eu une certaine courbe d'apprentissage pour nous tous pendant que nous nous adaptions à ces nouvelles circonstances, j'espère que ce comité et votre rapport éventuel contribueront à fournir un cadre pour cibler les aspects dans les multiples secteurs qui ont été efficaces et les secteurs que nous pouvons améliorer dans le futur.
Cette pandémie fait ressortir les circonstances difficiles auxquelles sont confrontés les membres que je représente habituellement pour s'acquitter de leurs fonctions et assurer la sécurité de la population. Nous ignorons souvent avec qui nous interagissons dans la communauté et avons peu de contrôle sur l'environnement dans lequel ces interactions ont lieu. Depuis le début de mars, les policiers continuent de s'acquitter de leurs fonctions malgré les ordonnances de santé publique qui enjoignent à la majorité des autres citoyens de rester chez eux et de pratiquer la distanciation physique. Il est important de reconnaître ce fait et les effets aggravants que cette pandémie a sur une profession qui est déjà aux prises avec des défis associés à la santé mentale et au bien-être, ainsi que les répercussions sur les policiers et leur famille.
J'aimerais prendre quelques instants pour énoncer brièvement certains de nos principaux enjeux du point de vue des services de police, puis j'espère qu'il restera le plus de temps possible pour les questions.
D'abord et avant tout, l'un des principaux défis auxquels sont confrontés nos membres est un manque général d'uniformité dans les messages communiqués par les divers ordres de gouvernement et les responsables de la santé concernant les paramètres des ordonnances qui enjoignent les gens de rester chez eux. Cela a semé quelque peu la confusion et a donné lieu à des niveaux inégaux d'application de la loi au pays, ce qui est frustrant pour la population et pour ceux qui doivent faire respecter la loi. Je crois qu'il est important d'insister sur le fait que bien qu'il y ait certains cas bien documentés d'excès de zèle dans l'application des ordonnances de mise en quarantaine, les statistiques qui ont été rendues publiques montrent que jusqu'à présent, les services de police et les organismes d'application des règlements ont eu recours avec succès à la sensibilisation et à l'encouragement dans la grande majorité des cas.
Cela dit, je comprends certainement la frustration et même la colère qu'ont exprimées les membres du public qui sont potentiellement passibles de contraventions pour des infractions qui peuvent sembler nébuleuses, dans bien des cas. Bien que je comprenne que ce problème particulier est assorti d'un certain nombre d'ordonnances provinciales et municipales différentes, je crois que le gouvernement fédéral devrait assumer un rôle dans ces circonstances, surtout pour ce qui est de communiquer, dans la mesure du possible, des messages uniformes et clairs concernant les ordonnances de santé publique. Les services de police savent que nous avons un rôle d'application de la loi à assumer, mais les messages concernant notre rôle doivent être clairs et uniformes dès le départ pour éviter de miner la légitimité de la police et la confiance du public.
Un autre secteur où je crois que le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle important est dans l'utilisation et l'approvisionnement de l'équipement de protection individuelle, ou EPI, ou de l'accès à cet équipement, pour les premiers répondants au pays. Depuis le début de la pandémie, nous avons vu un ensemble disparate de politiques qui ont été annoncées par les services de police concernant l'EPI devant être porté par le personnel, et même un ensemble plus varié quant à l'accès global, plus particulièrement pour les services de police de petite et de moyenne taille et les services de police dans les régions rurales ou éloignées de notre pays. Là encore, il y a un énorme défi à relever, étant donné que, en dehors de la GRC, l'approvisionnement et le maintien de l'ordre relèvent des provinces ou des municipalités. Je crois que ces circonstances ont fait ressortir la nécessité d'assurer une coordination additionnelle, dans la mesure du possible, du gouvernement fédéral pour veiller à ce que des normes minimales soient atteintes à tout le moins.
En outre, du point de vue de la santé et sécurité au travail, l'Association a constaté un manque de cohérence dans les mesures de gestion de l'exposition du personnel de première ligne visant à protéger les policiers et leur famille, qui ont un risque d'exposition accru. Idéalement, en tant qu'organisation nationale, l'Association estime qu'il serait utile que les intervenants de première ligne sachent que des mesures ont été mises en place en cas d'exposition à la COVID-19: accès à des installations de décontamination, tests effectués le plus rapidement possible et, pour les cas déclarés positifs, mesures préventives pour minimiser le risque de transmission aux membres de la famille et aux proches, y compris la possibilité de loger ailleurs qu'à domicile si nécessaire.
Ces mesures doivent inclure l'établissement d'une présomption selon laquelle tout résultat positif est lié au travail afin d'éliminer toute incertitude ou anxiété concernant la perte de salaire ou de revenu.
La dernière préoccupation dont je souhaite parler par rapport à la réponse à la pandémie est liée aux établissements carcéraux du Canada. Certains ont réclamé la libération hâtive de certains délinquants du système carcéral en raison d'inquiétudes liées à la COVID-19 et le risque d'épidémie dans ces établissements. De toute évidence, la protection de la santé des détenus en milieu carcéral doit être au centre des préoccupations du gouvernement et des agences responsables du maintien de notre infrastructure correctionnelle et de la santé du personnel.
Notre association a d'importantes préoccupations quant aux conséquences potentielles de la mise en liberté de ces délinquants, surtout dans le contexte particulier actuel au Canada.
La réponse à la COVID-19 a déjà mis à rude épreuve les organismes d'application de la loi du pays. Étant donné les projections actuelles concernant la transmission, je pense qu'on peut raisonnablement s'attendre à ce que la pression augmente davantage à mesure que le personnel de première ligne sera exposé au virus et forcé au confinement. La libération d'un grand nombre de délinquants des établissements correctionnels au moment où nos ressources sont déjà sollicitées au maximum risque de surcharger inutilement un système déjà hypothéqué, d'autant plus que bon nombre de services liés à la surveillance, à la réadaptation et à la réinsertion, dont les délinquants ont besoin, font eux-mêmes l'objet d'une fermeture obligatoire.
Pour conclure, dans l'ensemble, malgré ces préoccupations, je pense que la réponse des services policiers à la pandémie a été positive. Comme tous les Canadiens, nos membres sont conscients de l'incertitude engendrée par cette situation sans précédent — ou presque. Malgré ces circonstances, nos membres continueront de faire preuve de professionnalisme et de dévouement auxquels les Canadiens s'attendent, à bon droit.
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions. Je vous remercie encore une fois de l'occasion de comparaître au Comité aujourd'hui.
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Monsieur le président, membres du Comité, mesdames et messieurs, bonjour. Je suis accompagné de M. Éric Thibault, le vice-président national du Syndicat des agents correctionnels du Canada. Nous tenons tous deux à vous remercier de nous donner l'occasion de vous parler aujourd'hui.
J'aimerais d'abord présenter mes condoléances au nom de l'UCCO-SACC-CSN à tous les membres de la famille de la GRC pour la perte tragique de la gendarme Heidi Stevenson. J'aimerais également présenter nos condoléances à tous nos membres, puisque nous avons perdu deux gestionnaires correctionnels, soit un de l'établissement de Springhill et l'autre de l'établissement Nova. C'est une période des plus tragiques ici en Nouvelle-Écosse, d'où je vous parle aujourd'hui. Nous souhaitons exprimer nos sincères condoléances.
Pour commencer, je tiens à dire que je suis fier de représenter un groupe de professionnels aussi formidable qui continue de s'acquitter de son mandat face à la menace invisible qu'est la COVID-19. Nos membres qui vont travailler jour après jour dans l'un des milieux de travail les plus dangereux au Canada poursuivent courageusement ce travail, malgré le risque personnel accru. Il convient donc de les féliciter.
Le Syndicat des agents correctionnels du Canada, UCCO-SACC-CSN, et les agents correctionnels que nous représentons n'ont toujours demandé qu'une chose du gouvernement, en dehors des périodes de négociations, soit d'avoir les mesures de protection nécessaires pour atténuer le plus possible tout risque pour notre santé et notre sécurité. Dans le cas de la menace actuelle, le Syndicat a demandé une protection supplémentaire: équipement de protection individuelle, tests de dépistage du virus pour tous les travailleurs de première ligne, participation au processus de planification d'urgence à l'échelle locale, régionale et nationale. Réfléchir à des scénarios hypothétiques et s'y préparer, c'est dans la nature d'un agent correctionnel. Malheureusement, ce virus appelle nombre de scénarios du genre et, pour la grande majorité de nos membres, beaucoup de questions restent sans réponse.
Parlons de l'équipement de protection individuelle. En un mois à peine, nous avons constaté un important changement de culture quant au port du masque dans nos établissements. Au début de cette crise, nos membres pouvaient faire l'objet de sanctions disciplinaires s'ils décidaient de porter un masque en fonction de leur propre évaluation des risques. Cela a aussi été un motif de refus de travailler. Le Service correctionnel du Canada a justifié sa position en indiquant que seul le SCC pouvait évaluer le risque, et qu'on craignait que le port du masque ne suscite la peur dans la population carcérale. Aujourd'hui, à peine un mois plus tard, c'est le contraire. Une personne qui ne porte pas systématiquement un masque lorsqu'il est impossible de maintenir la distanciation physique risque des sanctions disciplinaires.
L'exemple peut sembler frappant, mais il illustre très bien le changement de culture complet qui s'est opéré en très peu de temps grâce à l'insistance du syndicat pour que toutes les mesures nécessaires pour atténuer le risque soient prises. Je ne comprends tout simplement pas comment ce message est resté ignoré pendant le processus de planification d'urgence.
Nos premières discussions avec le SCC concernant la COVID-19 ont eu lieu le 6 février, lors de la rencontre régulière du Comité national de consultation patronale-syndicale. À cette date, l'Agence de santé publique du Canada avait indiqué que le risque lié au coronavirus était considéré comme faible. Je dirais qu'à l'issue de cette réunion, aucune des parties n'aurait pu prédire comment notre vie allait changer en l'espace d'un mois à peine.
Le 9 mars, alors que la menace pour la population augmentait, nous avons commencé à discuter avec la haute direction des précautions prises par le SCC dans l'optique d'une propagation du virus. Parmi les mesures initiales, notons le dépistage des visiteurs qui pouvaient avoir voyagé ou qui présentaient des symptômes, la planification d'urgence à l'échelle locale et l'inventaire de l'EPI et du matériel. Deux jours plus tard, le a annoncé des mesures budgétaires pour répondre à la COVID-19. On a commencé à voir des restrictions dans certaines provinces à mesure qu'on déclarait l'état d'urgence.
Pendant la semaine du 16 mars, l'UCCO-SACC-CSN s'est rapidement adapté à la réalité que nous vivons aujourd'hui. Nous tenons régulièrement des téléconférences et des vidéoconférences pour maintenir la communication avec le SCC et le Conseil national mixte. Depuis cette date, nous discutons de toutes ces questions de manière continue. Nous avons eu d'innombrables discussions bilatérales par téléphone afin de résoudre les problèmes qui semblent surgir au quotidien. Je dirais que dans ma carrière de dirigeant syndical, la consultation et l'action concertée menées dans le dernier mois pour lutter contre la menace commune qu'est la COVID-19 sont sans précédent.
Le 26 mars, nous avons appris qu'il y avait un premier cas confirmé de COVID-19. Un de nos membres qui travaille à l'établissement de Port-Cartier a contracté le virus entre le 9 et le 14 mars. C'est un cas de transmission communautaire. Il a ensuite accidentellement propagé le virus alors qu'il était asymptomatique. Dans les jours suivants, nous avons constaté la virulence incroyable de la COVID-19, puisque le nombre de cas positifs a augmenté en quelques jours seulement.
Pendant cette période, toutes les parties ont travaillé avec acharnement pour réduire la propagation du virus. Des mesures d'urgence ont été élaborées et mises en œuvre. Toutefois, l'établissement a connu un grave problème de personnel en quelques heures en raison de la mise en quarantaine de nombreux agents correctionnels, sur avis des autorités de santé publique lors des recherches de contacts.
Le 2 avril, j'ai envoyé une lettre au ministre de la Sécurité publique concernant l'urgence de fournir des tests pour les agents correctionnels. Les conseils des autorités de la santé publique pour limiter la propagation sont judicieux, certes, mais envoyer en confinement une bonne partie du personnel de première ligne a des répercussions négatives directes sur l'effectif qui demeure en poste.
Étant donné que la Loi sur les mesures d'urgence n'a pas été invoquée, le dépistage de la COVID-19 demeure de compétence provinciale, de sorte que les critères applicables pour que nos membres puissent faire le test varient d'une région à l'autre du pays. Dans les sites touchés, on a dû faire preuve d'une grande créativité pour réaménager les horaires et les lieux de travail, sur une base volontaire, simplement pour assurer la continuité. L'élargissement des critères pour inclure les personnes asymptomatiques permettrait d'augmenter le nombre de tests de dépistage et ceux dont le résultat serait négatif pourraient retourner au travail beaucoup plus tôt, et non après une quarantaine de 14 jours. Cela demeure un problème important, alors que le virus continue de se propager dans nos établissements.
Actuellement, quatre établissements connaissent d'importants problèmes de personnel: le Centre fédéral de formation, l'établissement Joliette et l'établissement de Port-Cartier, au Québec, et l'établissement de Mission, en Colombie-Britannique. Il serait très avantageux d'y faire rapidement et de manière continue des tests de dépistage, tant pour les détenus que pour le personnel.
L'UCCO-SACC-CSN n'a cessé de demander au gouvernement et à l'employeur de fournir des tests pour le personnel, car il n'est absolument pas possible que ces gens demeurent chez eux. Il faut une exception pour les employés fédéraux essentiels à la fonction publique sans que le gouvernement fédéral ait à invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
Comme nous le savons tous, ce virus se propage lorsque les gens ne peuvent pratiquer la distanciation physique. L'auto-isolement s'est avéré problématique dans certains de nos établissements. Les cellules à occupation simple, qui sont équipées de toilettes et d'eau courante, permettent aux détenus de s'isoler facilement. Cependant, de nombreux établissements sont conçus selon un modèle comprenant des espaces de vie communs et n'ont pas de cellules permettant l'isolement. Ce modèle favorise la réhabilitation et le sentiment d'appartenance à la communauté, mais représente un désavantage certain dans la crise que nous vivons aujourd'hui. Si le virus pénètre dans un établissement, les infrastructures ou l'absence d'infrastructures ont une incidence directe sur le plan d'attaque interne.
Il y a aussi d'autres défis à relever. Certains établissements sont en région très éloignée. Il est de plus en plus difficile de transférer le personnel d'un établissement à un autre lorsqu'il s'agit d'établissements isolés comme ceux de Port-Cartier ou de Grande Cache. Ce sont des défis qui ont leurs particularités et qu'il faut prendre en considération dans la planification en cas d'urgence.
Il est louable que notre gouvernement ait essentiellement confié la gestion de cette crise aux scientifiques et aux responsables de la santé publique. Dans une crise comme celle-ci, il semble évident que le rôle du gouvernement s'est transformé, passant d'un organe législatif à un mécanisme d'appui aux décisions prises par les professionnels de la santé et les scientifiques du pays. Dans toute crise, vaut mieux toujours se fier aux spécialistes.
Cela dit, bien que le SCC ait généralement tenu compte des conseils des autorités de la santé publique, on constate qu'il les a parfois ignorés en raison de problèmes liés au personnel ou au coût potentiel des heures supplémentaires. Certains membres qui avaient été exposés et qui avaient été testés se sont fait dire de retourner au travail, même s'ils n'avaient pas eu leur résultat, ce qui a mis le personnel et les détenus en danger.
Encore une fois, nous ne serions probablement pas dans cette situation aujourd'hui s'il y avait eu, dès l'émergence de ce virus, des consultations et un examen approfondi des plans d'urgence. Si le SCC avait écouté son personnel de première ligne, si le gouvernement avait entendu notre plaidoyer pour faciliter les tests de dépistage, la situation dans certains établissements du pays ne serait peut-être pas aussi catastrophique qu'elle l'est aujourd'hui.
En conclusion, il importe de souligner que le monde n'était pas prêt pour cette pandémie. Il est toujours facile de juger après coup. Toutefois, si des mesures appropriées avaient été prises lorsque la contagiosité de ce virus a commencé à être largement connue, bon nombre de nos établissements auraient été beaucoup mieux préparés. Ce virus mortel exige une réponse proactive et énergique. Se contenter de réagir et tarder à s'adapter ne fait qu'accroître le danger auquel le personnel, les détenus et le grand public sont exposés.
Je vous remercie. Je suis prêt à répondre à toutes les questions du Comité.
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Je vous remercie, monsieur le président et membres du Comité permanent de la santé, de me donner l'occasion de témoigner. Je suis vraiment heureux de vous donner de l'information sur le rôle du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile dans la réponse canadienne à la pandémie de la COVID-19.
Je m'appelle Patrick Tanguy. Je suis sous-ministre adjoint principal du Secteur de la gestion des urgences et des programmes à Sécurité publique Canada.
Comme nous le savons tous, beaucoup de choses ont changé depuis ma dernière comparution devant ce comité, le 3 février dernier. Les répercussions de la COVID-19 à l'échelle nationale et internationale ont touché tous les aspects de nos vies et tous les secteurs de la société dans les collectivités, petites et grandes, de partout au pays. Ces répercussions ont été particulièrement ressenties par le secteur de la sécurité publique, y compris par les travailleurs et les bénévoles qui participent aux interventions d'urgence, ainsi que par les personnes qui travaillent à assurer la sécurité de nos collectivités pendant que la pandémie de la COVID-19 sévit.
Avant de commencer, j'aimerais souligner le travail incroyable des premiers intervenants, ainsi que des agents et des bénévoles de la sécurité publique qui appuient la réponse du Canada à la pandémie de la COVID-19 alors que leurs vies personnelles et professionnelles ont été touchées. Cela comprend les organisations représentées à la réunion d'aujourd'hui, mais aussi beaucoup d'autres, trop nombreuses pour être énumérées.
J'aimerais commencer par rappeler au Comité le rôle de Sécurité publique Canada dans la gestion des urgences. Comme le prévoit la Loi sur la gestion des urgences, le ministère joue un rôle clé dans la coordination des activités de gestion des urgences entre les institutions fédérales et d'autres entités, comme les provinces et les territoires.
Le Centre des opérations du gouvernement, un actif pangouvernemental hébergé par mon ministère, constitue la principale plateforme que nous utilisons pour mener ces activités. Comme le précise le Plan fédéral d'intervention d'urgence, le Centre des opérations du gouvernement appuie la capacité d'intervention et la coordination pendant des événements d'intérêt national, comme la pandémie de la COVID-19.
Le Centre des opérations du gouvernement réunit tous les partenaires d'une intervention à un événement dans un environnement commun afin d'harmoniser les actions et les capacités collectives pour en arriver à des analyses et à des mesures efficaces. Le Centre des opérations du gouvernement interagit aussi au quotidien avec les centres des opérations d'urgence provinciaux et territoriaux et coordonne les demandes d'assistance officielles pouvant provenir des ministères et organismes fédéraux ainsi que des provinces et des territoires.
En plus du rôle du Centre des opérations du gouvernement, la Direction générale des communications de Sécurité publique Canada exerce un leadership en ce qui a trait aux communications pangouvernementales liées à l'événement en assurant une coordination avec les autres ministères fédéraux en vue de créer des messages clés efficaces pour le gouvernement du Canada qui visent à préserver le calme et à inspirer la confiance chez les Canadiens.
J'aimerais souligner à nouveau que mon ministère exerce son leadership en gestion des urgences en étroite collaboration avec ses homologues des provinces et des territoires. Cette collaboration se fait dans le cadre de diverses tables fédérales-provinciales-territoriales, aux échelons des ministres, des sous-ministres et des sous-ministres adjoints. Il est notamment question des ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables de la gestion des urgences et des cadres supérieurs responsables de la gestion des urgences.
Depuis le début de la crise de la COVID-19, ces tables se réunissent plusieurs fois par semaine pour rester informées des priorités actuelles, des lacunes possibles et des demandes d'assistance que nous pouvons recevoir. Au cours des dernières semaines, mon ministère a mobilisé ces tables sur des questions telles que la capacité en gestion des urgences dans les collectivités éloignées et isolées du Nord, les services essentiels et d'autres sujets liés à la santé.
En vertu de la Loi sur la gestion des urgences, mon ministère est aussi responsable de la direction de l'effort national qui est déployé en vue de renforcer la résilience des infrastructures essentielles. Nous assumons cette tâche en étroite collaboration avec les ministères fédéraux responsables de chacun des 10 secteurs des infrastructures essentielles du Canada et avec le secteur privé.
Le Forum national intersectoriel est le principal mécanisme employé par le gouvernement pour mobiliser les dirigeants nationaux de chacun des 10 secteurs des infrastructures essentielles du Canada en réponse à la COVID-19. Les membres du Forum national intersectoriel se réunissent chaque semaine pour présenter aux dirigeants des infrastructures essentielles un bilan des questions relatives à la santé, fourni par nos collègues de l'Agence de la santé publique du Canada, et des efforts de planification déployés par le gouvernement fédéral.
Comme vous le savez, les répercussions de la pandémie de la COVID-19 ont une vaste portée et touchent de nombreuses organisations fédérales et leurs partenaires. Compte tenu du nombre d'acteurs et de questions en jeu, la coordination est essentielle pour assurer une réponse cohérente de l'ensemble du gouvernement. Pour assurer cette coordination, nous avons pris un certain nombre de mesures pour renforcer la capacité du Centre des opérations du gouvernement de coordonner la réponse fédérale collective à cette situation d'urgence.
Afin de favoriser une plus grande collaboration et un échange de renseignements entre les diverses parties visées, nous avons intégré au Centre des opérations du gouvernement des experts en la matière de nombreux ministères fédéraux responsables. Il est notamment question de Services aux Autochtones Canada, de Santé Canada et des Forces armées canadiennes. Nous avons aussi intégré au Centre des opérations du gouvernement des experts en protection des infrastructures essentielles afin de faciliter une plus grande collaboration avec le secteur privé.
Pour terminer, nous avons intégré des représentants de la Croix-Rouge canadienne afin de favoriser un plus grand échange de renseignements avec les organisations de la société civile, reconnaissant que bon nombre d'entre elles jouent un rôle important. Grâce à cette capacité accrue, nous avons établi une équipe chargée exclusivement de la connaissance de la situation au sein du Centre des opérations du gouvernement. Cette équipe produit quotidiennement des rapports de connaissance sur la situation pour orienter nos interventions.
En plus de faciliter une meilleure connaissance de la situation, le Centre des opérations du gouvernement se sert aussi de sa capacité accrue pour appuyer la planification fédérale. Le Centre travaille avec de nombreux partenaires afin de développer le plan d'intervention du gouvernement. Ce plan vise à cerner les responsabilités et les rôles généraux, ainsi que les principales activités de chaque ministère fédéral pour atténuer les répercussions de la COVID-19. Ce plan précise un certain nombre de questions transversales, telles que les infrastructures essentielles, les mesures de santé publique, la planification de la continuité des activités, et le reste. Les provinces, les territoires, le secteur privé et la Croix-Rouge canadienne ont été appelés à participer à l'élaboration de ce plan.
Comme je l'ai mentionné, la protection des infrastructures essentielles est un élément important de la réponse de mon ministère à la pandémie. Mon ministère s'affaire aussi à aider nos partenaires externes, y compris les provinces, les territoires et les municipalités, à favoriser la résilience des systèmes d'infrastructures essentielles. Nous nous concentrons ici sur la protection des biens, des systèmes, des réseaux et des services essentiels à la santé, à la sécurité et au bien-être économique des Canadiens. En effet, une défaillance de l'un de ces systèmes peut avoir des effets en cascade sur d'autres secteurs, ce qui pourrait amplifier les répercussions économiques et sociales et celles sur la sécurité des Canadiens.
Comme vous le savez, un certain nombre d'administrations au Canada ont annoncé l'entrée en vigueur de la fermeture d'entreprises et de mesures à la frontière. Les annonces provinciales et territoriales ont souligné que seules les organisations nécessaires pour fournir les services essentiels étaient autorisées à fonctionner. Plus tôt ce mois-ci, mon ministère a publié un document intitulé « Orientation sur les services et les fonctions essentiels au Canada pendant la pandémie de la COVID-19 » afin de fournir des conseils clairs lorsqu'il s'agit de déterminer les services et les fonctions qui sont essentiels dans le contexte de la pandémie.
J'aimerais conclure en mettant en évidence certains domaines sur lesquels nous allons nous concentrer dans le cadre de notre collaboration d'urgence pour la suite des choses. D'abord, nous allons continuer à travailler avec nos partenaires pour relever le défi que présentent les événements cycliques. La réponse à la COVID-19 est une préoccupation, mais nous devons également être en mesure de répondre aux besoins en cas d'inondation ou de feu de forêt. Les ressources et le personnel requis pour une intervention pourraient être déjà déployés en réponse à la pandémie de la COVID-19. Nous devrons travailler en étroite collaboration de façon à bien coordonner la réponse à des événements tels que des inondations.
Nous travaillons avec nos partenaires pour veiller au bien-être mental à long terme des personnes qui travaillent en première ligne, y compris le personnel de la sécurité publique.
Encore une fois, monsieur le président, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de fournir quelques commentaires. Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Monsieur le président, je vous remercie de m’avoir invité à m’adresser au Comité aujourd’hui. Je tiens aussi à prendre un instant pour exprimer nos condoléances pour le décès d’Heidi Stevenson. Chers collègues, nos pensées vous accompagnent.
Comme vous le savez, notre principale priorité est la santé et la sécurité des Canadiens. L’Agence de la santé publique du Canada surveille activement la pandémie de COVID-19 et y répond, et se prépare à tous les scénarios possibles en s’appuyant sur des données probantes au fur et à mesure que la science évolue. L’Agence collabore depuis le début avec les autorités de la santé publique provinciales et territoriales partout au pays pour veiller à ce que nos préparatifs et nos mesures d’intervention soient pertinents et adaptables en fonction des plus récentes données scientifiques et de l’évolution de la situation.
L’Agence a activé son Centre des opérations du portefeuille de la Santé pour assurer une planification et une coordination efficaces des efforts d’intervention en collaboration avec des partenaires internationaux et ses partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux. Vous avez entendu les témoignages de bien des représentants des agences de santé publique depuis le début de la pandémie. Aujourd’hui, je suis accompagnée de ma collègue Cindy Evans, qui est vice-présidente par intérim de la gestion des urgences et qui travaille dans une autre partie de l’organisation. Je crois comprendre que vous nous avez invitées aujourd’hui précisément pour donner un aperçu de la Réserve nationale stratégique d’urgence du Canada, de la gestion de l’inventaire et de l’élimination des masques médicaux et des gants.
J’aimerais parler de la Réserve nationale stratégique d’urgence, mais je dois d’abord mettre la situation en contexte.
Comme vous le savez, la santé publique est une responsabilité que se partagent les administrations fédérale, provinciales, territoriales et locales. Toutefois, l’hypothèse fondamentale à la base de la gestion des situations d’urgence est que les administrations provinciales, territoriales et locales sont préparées dans une mesure raisonnable aux situations d’urgence les plus courantes.
La Réserve nationale stratégique d’urgence est la réserve d’urgence en santé du gouvernement fédéral. Le rôle du gouvernement fédéral en ce qui concerne l’entreposage de biens d’urgence sanitaires comporte deux volets. Primo, elle fournit une capacité d’appoint aux provinces et aux territoires, à leur demande, lorsque les ressources de ces derniers ne sont pas suffisantes. Secundo, elle est la seule et unique fournisseuse de certains actifs pour les urgences de santé publique rares, par exemple les vaccins ou les antidotes coûteux et rarement utilisés.
Pour comprendre la réserve telle qu’elle est aujourd’hui, il faut comprendre pourquoi elle a été créée et de quelle façon elle a évolué. Elle a été créée en 1952, durant les premières années de la guerre froide, au moment où l’une des plus grandes menaces à la sécurité et à la santé nationales était la menace d’attaque nucléaire. Elle a été autorisée à entreposer des provisions de santé essentielles à des fins de protection civile. Durant les années 1960, l’inventaire a été élargi: 200 lits d’hôpital, des centres de traitement, des laboratoires de base et des centres des donneurs de sang y ont été ajoutés. Nombre de ces ressources ont été déployées à l’avance dans des écoles, des sous-sols d’église, des centres communautaires et d’autres endroits.
Dans les années 1980 et 1990, la portée de la réserve a été élargie pour comprendre la capacité d’intervenir en cas de catastrophes naturelles et d’autres types de situations d’urgence, et ce, par l’entreposage de fournitures requises pour appuyer les évacuations et les soins aux personnes déplacées, comme des trousses pour l’installation de centres de réception, des unités de cuisine mobile et des unités en cas de catastrophe aéroportuaire.
Les années 2000 ont été une période de changements radicaux dans la nature des menaces à la sécurité internationale et à la santé publique, notamment en raison des attentats terroristes du 11 septembre 2001, de l’éclosion de SRAS de 2003 et de la pandémie de grippe H1N1 de 2009.
Durant cette période, la réserve a changé et est devenue plus axée sur les menaces chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires. Les priorités sont passées des « lits et couvertures » aux stocks de médicaments antiviraux, qui constituent le traitement clé en réponse aux éclosions virales, comme les pandémies de grippe. Le rôle de la réserve pour ce qui est de l’approvisionnement a également évolué, en tant qu’organisme d’approvisionnement collaboratif et centre d’échange de renseignements potentiel, afin de préparer le terrain pour l’approvisionnement potentiel en grandes quantités.
Nous avons cherché à moderniser la réserve de façon continue en tant qu’élément important de la gestion et de la préparation aux situations d’urgence. En 2012, la réserve contenait des fournitures médicales utiles et des fournitures d’intervention en cas de pandémie, mais également des fournitures et des hôpitaux de campagne désuets. Les actifs étaient entreposés à divers endroits dans neuf villes, et dans environ 1 000 sites préalablement établis dans les provinces et les territoires, par exemple dans des écoles ou des centres communautaires. Nombre des sites avaient été déplacés ou fermés, si bien que certains actifs n’étaient plus de bonne qualité puisqu’ils avaient été entreposés pendant une longue période.
Une évaluation indépendante du réseau des entrepôts fédéraux s’est penchée sur l’empreinte et l’a trouvée trop grande. On a jugé qu’il serait plus efficient de passer de neuf entrepôts à six, et que la capacité d’intervention ne serait pas réduite. Nous avons commencé à mettre en œuvre cette solution. Dans le cadre de cette initiative, des éléments de valeur ont été repositionnés et d’autres actifs obsolètes ont été cédés conformément aux directives du Conseil du Trésor sur l’aliénation du matériel excédentaire.
En ce qui concerne la gestion des stocks, la réserve examine ses stocks régulièrement. Dans le cadre de ces examens, le matériel désuet est aliéné. Pour répondre à votre question précise, en 2019, par exemple, environ deux millions de masques périmés et 440 000 masques périmés ont été aliénés lors de la fermeture de l’entrepôt de la réserve de Regina. Les masques et les gants avaient été achetés en 2009 et avaient dépassé la limite de cinq ans d’entreposage, recommandée par le fabricant.
L’Agence suit des lignes directrices strictes lorsqu’elle déploie du matériel. Si elle n’est pas en mesure de garantir la qualité du matériel, elle ne le déploie pas. Même dans les circonstances actuelles, où selon les orientations le déploiement de pièces d’équipement de protection individuelle périmées est autorisé, l’Agence examine de très près tout équipement datant de cinq ans ou plus. Il s’agit d’une pratique conforme aux recommandations des fabricants.
Au moment de procéder à l’aliénation du matériel en surplus, il arrive que nous les offrions à nos homologues provinciaux et territoriaux, que nous les vendions par l’entremise de GCSurplus et que nous les recyclions, quand c’est possible. En dernier recours, nous devons éliminer les actifs obsolètes, périmés ou inutilisables.
Il est important de noter que lorsque nous avons des stocks expirés, nous déterminons s’ils peuvent ou non être donnés pour une utilisation appropriée, mais il existe des paramètres concernant les dons. Par exemple, l’Organisation mondiale de la Santé autorise le don d’équipement de protection individuelle, mais le matériel doit être donné deux ans avant son expiration. C’est donc dire que si nous avions du matériel en stock pendant trois ans, nous serions tenus de le donner et de faire une rotation du matériel.
Lorsqu’il s’agit de reconstituer les actifs, nous le faisons en fonction des évaluations des risques et des menaces, et des scénarios crédibles qui rendent compte des types de risques auxquels le Canada est confronté ou pourrait devoir faire face. Nos décisions d’acheter des actifs sont axées sur la faible probabilité, les événements ayant des répercussions importantes dans le cadre desquels le gouvernement fédéral serait vraisemblablement le seul fournisseur, et sont fondées sur un budget d’environ 2 millions de dollars par année.
En résumé, la réserve complète la capacité provinciale, territoriale et locale. Elle se prépare à des événements à faible probabilité et à fort impact — par exemple, une attaque terroriste ou une catastrophe naturelle majeure — et elle veille à la disponibilité continue de produits pharmaceutiques, d’équipement et de fournitures médicales qui sont rares ou difficiles à obtenir dans un court laps de temps. La réserve remplit également un rôle de créneau dans l’entreposage de certains actifs rares et de grande valeur dans le système national de gestion des urgences, par exemple un vaccin contre la variole. La réserve vise vraiment à servir de capacité de pointe, et elle maintient la capacité de faciliter l’approvisionnement en grandes quantités avec les provinces et les territoires.
Afin de répondre aux défis sans précédent que pose la pandémie, la réserve est mobilisée pour soutenir les efforts de réponse. L’Agence tire parti de sa capacité d’approvisionnement en grandes quantités en travaillant de concert avec les provinces, les territoires, Services publics et Approvisionnement Canada et Santé Canada pour fournir du matériel aux travailleurs de la santé de première ligne. L’Agence a travaillé en étroite collaboration avec les provinces et les territoires, Services publics et Approvisionnement Canada, et Santé Canada pour effectuer ces achats en grandes quantités et faire des dons.
Elle a aussi accru sa capacité interne en mettant sur pied des unités spéciales chargées de l’approvisionnement en équipement de protection individuelle, de l’identification de cet équipement pour les fournisseurs de soins de santé, de la préparation de réquisitions, de l’examen de spécifications de produits et de la mise à l’essai de produits. Elle a aussi déployé de l’équipement et du matériel de la réserve pour répondre aux demandes d’aide des provinces et des territoires.
L’Agence a également mobilisé les Forces armées canadiennes pour faciliter la logistique, ce qui fait une énorme différence. Nous sommes passés de 15 à 30 déploiements par année environ au même nombre de déploiements par mois. Le volume est bien supérieur à tout ce que nous avions prévu. Plus de deux douzaines de membres des forces, qui travaillent sans relâche, assurent la logistique par voies aérienne et terrestre pour le transport de ces biens dans le monde entier.
Nous avons aussi conclu un contrat avec Amazon Canada, qui fait appel à Postes Canada et à Purolator pour faciliter la distribution de l’équipement de protection individuelle et des fournitures achetés par le gouvernement. Depuis le 1er avril, nous avons expédié environ 1,2 million de masques N95, six millions de masques chirurgicaux et huit millions de paires de gants de nitrile aux provinces et aux territoires, et on s’attend à ce que d’autres matériels arrivent et soient distribués au cours des prochains jours.
Au cours de sa longue histoire, la réserve est passée d’une réserve en temps de guerre à un inventaire plus moderne de biens particuliers pour les situations qui auraient une faible incidence, mais une forte probabilité de se produire. Cette pandémie nous a vraiment donné l’occasion de nous mobiliser comme jamais auparavant pour assurer l’approvisionnement en vrac, l’expédition à grande échelle, la vérification des produits et les tests. Répondre à cet événement a nécessité des approches nouvelles et innovantes et des partenariats non traditionnels. Il s’agit de mesures qui auront une incidence sur l’avenir de la réserve.
Monsieur le président, nous vous remercions de de nous avoir donné l’occasion de venir aujourd’hui pour donner un aperçu de la Réserve nationale stratégique d’urgence. C’est avec plaisir que nous répondrons maintenant à vos questions.
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Je vous remercie, monsieur le président. Je suis sensible à vos efforts. Vous avez un très bel accent français.
Je veux m'adresser au Syndicat des agents correctionnels du Canada.
Tout à l'heure, vous avez dit qu'il fallait agir pour composer avec les risques supplémentaires qu'apportait cette pandémie et se concentrer sur trois aspects: les tests de dépistage, l'équipement de protection individuelle et la planification de processus d'urgence adéquats.
En date du 21 avril, à Joliette, il y avait 51 cas confirmés de détenus ayant la COVID-19, sur une population d'environ 130 détenus; il y en avait 49 au Centre fédéral de formation, à Laval, et 14 à l'Établissement Port-Cartier. Il y a donc 114 cas confirmés chez les détenus au Québec, pour seulement 188 tests de dépistage réalisés.
D'abord, jugez-vous que le nombre de tests réalisés est suffisant? Jugez-vous que ce manque de dépistage est maintenant réglé, ou persiste-t-il encore?
Ensuite, vos agents disposent-ils actuellement de suffisamment d'équipement de protection individuelle pour faire leur travail correctement? On a vu que, dans des milieux de vie fermés, ils deviennent souvent, malgré eux, des vecteurs de contamination.
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Je vais d'abord répondre à la question sur l'équipement de protection individuelle.
Les Services correctionnels ne nous ont pas indiqué un manque d'équipement de protection individuelle. Il est souvent question de la façon de l'utiliser.
Lorsque j'ai parlé de planification dans mon discours préliminaire, et des éventualités qu'il faut aborder à l'échelon local, je faisais référence au moment où le virus arrive. Lorsque j'ai parlé d'équipement de protection individuelle, je faisais référence au moment de l'utiliser. Il a fallu beaucoup de temps pour que l'équipement de protection individuelle dont nous avions besoin pour travailler sur le terrain nous soit transmis par l'entremise de nos comités de santé et de sécurité. Si un détenu est atteint de la COVID ou présente des symptômes, bien sûr, les contacts avec cette personne ne seront pas du tout les mêmes que lorsque nous pouvons garder une distance. Je peux vous dire qu'on ne nous a pas fait état d'un manque d'équipement de protection individuelle. La question a plutôt trait au moment de l'utiliser.
Pour ce qui est du dépistage, nous savons que les 188 tests ont été réalisés sur des détenus qui présentaient des symptômes ou en faisaient état.
Dans mon discours préliminaire, j'ai dit que le dépistage était une priorité. Ce que je voulais dire par là, c'est que les autorités de santé publique interviennent lorsqu'une personne est atteinte de la COVID. On procède à la recherche des contacts et l'on demande aux agents qui peuvent avoir été en contact avec le détenu ou un autre membre du personnel atteint de rentrer à la maison et de s'isoler pendant 14 jours. Ces personnes ne présentent pas de symptômes, alors elles ne peuvent passer un test de dépistage dans leur province, mais elles doivent rester à la maison pendant 14 jours.
Le problème, qui s'est intensifié très rapidement à l'Établissement de Port-Cartier, c'est que la grande majorité de notre personnel a dû retourner à la maison pour s'isoler. Ainsi, les autres membres du personnel doivent créer de nouveaux horaires et faire beaucoup d'heures supplémentaires pour tenir le cap. Évidemment, le dépistage est important pour la population carcérale, mais aussi pour les agents correctionnels qui sont renvoyés chez eux.
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Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui.
Monsieur Stamatakis, ma question est pour vous.
J'habite à Vancouver où vous avez connu une longue et belle carrière au sein du service de police. J'ai communiqué avec certains de vos membres avant la tenue de la réunion et je leur ai demandé quels étaient leurs défis et leurs préoccupations. J'aimerais vous lire une des réponses que j'ai reçues.
Un agent du service de police a dit ceci: « Lorsque j'exprime mes préoccupations, on me répond tout simplement de porter mon équipement de protection individuelle ou que je vais de toute façon contracter la maladie à un moment donné. Dans les faits, puisque je fais un travail de première ligne, je ne peux pas éviter les interactions à risque élevé. J'ai l'impression que le gouvernement présume que nous allons être infectés et qu'il faut encaisser. Je ne suis pas en désaccord avec cela, mais je sais que nombre de mes collègues, qui ont des parents âgés à la maison, sont beaucoup plus inquiets que moi. J'ai souvent dû intervenir sans équipement de protection individuelle, puisque sans une intervention immédiate de ma part, des gens auraient pu être blessés ou pire encore. Après coup, lorsqu'on discute de ce qui s'est passé, on me dit de revenir au travail jusqu'à ce que je présente des symptômes. En plus, il faut intervenir auprès de personnes qui ont des problèmes de toxicomanie ou de santé mentale, qui n'arrivent même pas à avoir une hygiène de base, et je dois partager mon équipement... cela n'arrête jamais. »
Monsieur Stamatakis, étant donné ce qui se passe dans certaines administrations comme à New York, où 4 000 membres du service de police ont reçu un résultat positif au test de dépistage de la COVID-19 et où environ 15 % du personnel en uniforme est malade, avez-vous des préoccupations similaires pour vos membres?
Voilà pourquoi, dans mon exposé, j'ai essayé de faire valoir qu'un des défis des services de police, dans ce contexte sans précédent, est précisément ce que décrit l'agent avec lequel vous avez communiqué. Souvent, nous ne savons pas à qui nous avons affaire, et nous avons peu de contrôle sur l'environnement dans lequel nous sommes appelés à interagir avec les gens. Ce sont des préoccupations très réelles. Voilà pourquoi le niveau d'anxiété est si élevé chez le personnel policier pendant cette pandémie.
Nous essayons d'établir des protocoles pour minimiser les risques. Il s'agit de fournir de l'équipement de protection individuelle et de modifier nos interventions pour les divers types d'appels, en réduisant autant que possible le nombre d'interactions avec le public, car on ne peut interagir comme on l'aurait fait en temps normal. Le but est d'empêcher que les policiers ne soient exposés. C'est un véritable problème; je dirais que notre approche a été de soulever les problèmes au fur et à mesure. Actuellement, notre approche consiste à cerner certaines de nos préoccupations pour essayer de trouver des solutions à ces problèmes de manière prospective en fonction de l'évolution de la situation.
Dans cette optique, j'ai eu de bonnes communications avec le et les fonctionnaires de Sécurité publique Canada, qui ont été sensibles à certains problèmes que nous avons soulevés. Toutefois, la situation est sans précédent, et ce que décrit cet agent est la réalité des policiers d'un bout à l'autre du pays.
Heureusement, au Canada, peu de policiers... Des agents ont été déclarés positifs dans presque toutes les administrations, mais pas en grand nombre. Le plus difficile est de composer avec les problèmes d'effectifs associés au confinement des policiers qui ont été exposés. Nous gérons cela par l'intermédiaire... J'y ai fait allusion dans mon exposé; il est nécessaire de faire des tests de dépistage et de faciliter l'accès à des professionnels de la santé qui peuvent conseiller adéquatement nos membres. C'est le cas dans la plupart des administrations, et nous essayons d'en tirer parti.
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Merci beaucoup de cette question.
Il y a en fait trois aspects.
En ce qui concerne les partenariats, j'aimerais qu'il y ait une relation solide et soutenue avec la Croix-Rouge canadienne. Elle a été d'une aide inestimable pour offrir des services dans les communautés et pour contribuer à sensibiliser le public. L'organisme a une compréhension de ce qui se passe sur le terrain et une connaissance qui permet de faire le pont entre l'aspect de la santé publique et certaines des autres préoccupations concernant nos communautés vulnérables, les problèmes auxquels elles sont confrontées et les meilleures façons de les régler.
Étant donné que nous traitons principalement avec un enjeu d'intérêt public, les problèmes auxquels sont confrontées les personnes vulnérables dans les communautés sont exacerbés. Nos organisations comme la Croix-Rouge sont très importantes. Il serait extrêmement utile que ces organisations œuvrent dans un cadre de travail plus officiel.
Nous avons des relations axées sur la collaboration phénoménales avec nos provinces et nos territoires. Je n'ai jamais vu des organismes unir leurs efforts aussi rapidement et de façon aussi exhaustive et ouverte. Sur le plan de la santé, cette collaboration est un atout important. Cela témoigne d'années de planification. Ce n'est pas une collaboration qui s'est matérialisée seulement à cause de la pandémie; elle existe depuis le SRAS. Nous avons fait beaucoup de planification de lutte contre les pandémies et de travaux de préparation avec les provinces et les territoires. Je ne pense pas que nous ayons à mener des exercices plus généraux pour comprendre les répercussions de la santé publique sur d'autres secteurs de l'économie. Nous ne devrions pas seulement mettre l'accent sur la santé publique; nous devrions tabler sur cette approche, cette collaboration et ces exercices pour en élargir la portée, et collaborer davantage avec les groupes avec lesquels Patrick Tanguy travaille dans ce secteur.
Le troisième aspect, à mesure que nous envisageons l'avenir, c'est qu'il faut comprendre les répercussions d'une situation de santé publique comme celle-ci sur la sécurité nationale. Nous avons tendance à traiter la santé publique comme étant un secteur à part des autres. Nous voyons maintenant les répercussions de cette situation non seulement sur les gens, mais aussi sur les chaînes d'approvisionnement, sur notre capacité d'importer des denrées alimentaires, sur l'agriculture et sur tous les aspects de l'économie.
Je pense que parmi les mesures très énergiques qui ont été prises, il y a eu le récent appel à l'action. Pendant que nous nous penchons sur l'approvisionnement et traitons avec les fournisseurs existants, nous avons lancé un appel à l'action auprès du secteur privé et des entreprises privées pour renforcer les capacités au Canada pour répondre aux besoins en santé publique et en EPI. Nous devons comprendre que c'est une mesure qui doit être maintenue et devenir une stratégie à long terme plus vaste à l'avenir.