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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 011 
l
1re SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 9 avril 2020

[Enregistrement électronique]

(1110)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Bienvenue à la 11e réunion du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes. Aujourd'hui, notre réunion se déroulera entièrement de façon virtuelle. Conformément à l'ordre de renvoi adopté le mardi 24 mars, nous nous réunissons dans le but d'entendre des témoignages concernant des enjeux liés à la réponse du gouvernement à la pandémie de la COVID-19.
    Aujourd'hui, notre réunion se déroulera entièrement par vidéoconférence et les délibérations seront publiées sur le site Web de la Chambre des communes. À titre d'information, la webdiffusion montrera toujours la personne qui parle plutôt que le Comité au complet. J'aimerais également souligner que c'est un événement historique, car c'est la toute première réunion entièrement virtuelle d'un comité de la Chambre des communes. J'aimerais remercier le personnel de la Chambre, les techniciens et tous ceux qui ont travaillé très fort ces deux dernières semaines pour réaliser ce projet. Je sais que vous êtes sur des charbons ardents à l'arrière-scène et que vous espérez que tout fonctionnera bien. J'ai fait une longue carrière dans le domaine des technologies de l'information et ma première expérience en informatique a d'ailleurs consisté à écrire en Fortran sur des cartes perforées. Je sais que nous avons fait beaucoup de progrès depuis ce temps et je crois donc que tout ira bien. Je vous félicite de ce que vous avez accompli à si court préavis.
    J'aimerais maintenant aborder quelques questions de gestion interne. Tout d'abord, pour faciliter le travail des interprètes et pour veiller au déroulement harmonieux de la réunion, j'aimerais indiquer quelques règles à suivre. Pendant la vidéoconférence, le service d'interprétation fonctionnera comme lors d'une réunion ordinaire du Comité. Ainsi, en bas de votre écran, vous avez le choix entre le parquet anglais ou français. Avant de parler, veuillez attendre que je vous nomme. Lorsque vous êtes prêt à prendre la parole, vous pouvez cliquer sur l'image du microphone pour activer votre micro ou vous pouvez tenir la barre d'espacement enfoncée pendant que vous parlez; votre micro se mettra en sourdine si vous la relâchez, tout comme lorsqu'on utilise un émetteur-récepteur portatif — mais c'est peut-être un exemple d'une autre époque.
    Tous les commentaires formulés par les membres du Comité et les témoins devraient être adressés à la présidence. Si vous devez demander la parole en dehors du temps qui vous est alloué pour les questions, vous devrez activer votre micro et annoncer que vous souhaitez faire un rappel au Règlement. Si vous souhaitez commenter un rappel au Règlement qui a été soulevé par un autre membre du Comité, vous devez utiliser la fonction « lever la main ». Cela signalera au président que vous souhaitez prendre la parole. Ainsi, vous devez cliquer sur les participants en bas de l'écran et lorsqu'un écran s'ouvre, à côté de votre nom, vous pouvez cliquer sur « lever la main ».
    Lorsque vous parlez, veuillez le faire lentement et clairement, et lorsque vous ne parlez pas, vous devriez mettre votre microphone en sourdine. Manifestement, nous encourageons fortement l'utilisation des écouteurs. Si des difficultés techniques surgissent, par exemple avec l'interprétation ou si vous êtes accidentellement déconnectés, veuillez aviser le président ou le greffier immédiatement et les membres de l'équipe technique s'efforceront de résoudre le problème. Veuillez noter qu'il sera peut-être nécessaire de suspendre la séance de temps à autre pour veiller à ce que tous les membres du Comité puissent participer pleinement à la réunion.
    Avant de commencer, pourriez-vous tous cliquer sur le coin en haut à droite de votre écran pour veiller à ce que vous ayez la vue de la tribune? Avec cette vue, vous devriez être en mesure de voir tous les participants en vue de grille, ce qui permettra à tous les participants de la vidéoconférence de se voir les uns les autres. Pendant la réunion, nous suivrons les mêmes règles qui s'appliquent habituellement aux déclarations et aux questions posées aux témoins dans nos réunions ordinaires. Chaque témoin aura donc 10 minutes pour faire une déclaration et nous aurons les séries de questions habituelles des membres du Comité.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins. Nous accueillons donc, à titre personnel, l'honorable David Dingwall, président et vice-chancelier de la Cape Breton University. Nous accueillons également, de l'Association canadienne de santé publique, Ian Culbert, directeur général, et de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, Linda Lapointe, vice-présidente. Du William Osler Health System, nous accueillons le Dr Naveed Mohammad, vice-président exécutif, Qualité, Affaires médicales et académiques. Nous entendrons d'abord M. Dingwall.
    Monsieur Dingwall, vous avez 10 minutes. Allez-y.
(1115)
    Merci, monsieur le président. J'aimerais également remercier les membres du Comité. Avec votre permission, monsieur le président, j'aimerais que la version écrite de ma déclaration soit inclue au compte rendu écrit des délibérations. J'aimerais ensuite formuler sept brefs commentaires dans ma déclaration d'ouverture.
    Vous pouvez faire votre déclaration. Nous obtiendrons la version écrite à un autre moment. En effet, nous ne pouvons pas maintenant, car elle devra manifestement être traduite dans les deux langues officielles avant que nous puissions la distribuer aux membres du Comité. Si vous souhaitez faire le reste de votre déclaration, vous avez 10 minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai distribué la version écrite au Comité hier, comme on me l'avait demandé. Toutefois, j'aimerais seulement formuler sept brefs commentaires.
    Tout d'abord, j'aimerais remercier les membres de votre comité du rôle qu'ils jouent dans l'examen de certains éléments de notre système de soins de santé. Comme vous le savez tous, les enjeux liés à Santé Canada et aux divers organismes de santé, surtout l'Agence de la santé publique du Canada, sont très importants compte tenu de la situation actuelle.
    J'espère que lorsque la pandémie se terminera ou lorsque le nombre de cas diminuera de façon substantielle, votre comité parlementaire continuera d'examiner les événements pour tenter de dégager des pratiques exemplaires non seulement au Canada, mais également dans d'autres pays, afin que les protocoles appropriés puissent être mis en œuvre et, là où c'est nécessaire, être mis à jour de temps en temps.
    Le deuxième point que j'aimerais soulever concerne la question de la gouvernance. D'après ce que je comprends à titre d'ancien ministre de la Santé, je pense que l'Agence de la santé publique du Canada fait effectivement partie d'un système unique. En effet, c'est une entité fédérale, mais elle travaille étroitement avec des entités provinciales et dans le cadre du partage des compétences entre le gouvernement fédéral et les provinces. Il est donc important que ces entités échangent des renseignements de bonne qualité et que leurs membres entretiennent un dialogue franc.
    Selon mes observations, monsieur le président, je crois que c'est ce qui se produit en ce moment. En effet, les intervenants de l'agence fédérale rencontrent régulièrement ceux des agences provinciales, c'est-à-dire de façon virtuelle. Ils échangent des renseignements, des analyses différentes et des modèles différents. Je crois que c'est une bonne chose pour notre pays et pour notre système de soins de santé.
    Je crois que le système fonctionne bien aussi dans ma petite province, c'est-à-dire la Nouvelle-Écosse. Le médecin-hygiéniste en chef, le Dr Strang, a formulé une ordonnance en matière de santé le 13 mars ou vers cette date, et la province a ensuite déclaré l'état d'urgence. Les intervenants rencontrent régulièrement leurs homologues à l'échelon fédéral pour échanger des renseignements, des analyses et des pratiques exemplaires.
    Dans le domaine universitaire, le Council of Nova Scotia University Presidents a créé un groupe de travail dont les membres se réunissent chaque jour. Nous sommes également en constante communication avec le médecin-hygiéniste en chef et son équipe de professionnels afin d'échanger des renseignements et de tenter de résoudre certaines difficultés, surtout en ce qui concerne l'enseignement postsecondaire. Cela fonctionne bien jusqu'ici.
    Les politiciens et les dirigeants politiques des trois partis politiques ont agi de façon très professionnelle, non partisane et efficace. Je crois que le premier ministre provincial, le chef de l'opposition et le chef du NPD méritent des éloges publics pour leur comportement.
    De plus, au niveau supérieur du modèle de gouvernance ou de la bureaucratie, nous avons le sous-ministre de la Santé et manifestement, nous avons le sous-ministre du Travail et de l'Enseignement supérieur, Duff Montgomerie, qui a joué un rôle particulièrement utile pour les établissements d'enseignement postsecondaire et pour les universités dans notre province.
    Le troisième point que j'aimerais soulever, et que certaines personnes considéreront comme étant de nature provinciale, comporte tout de même un élément national. En effet, le gouvernement du Canada et celui de la Nouvelle-Écosse doivent aborder la question des étudiants internationaux du pays qui n'ont pas accès à nos systèmes de soins de santé provinciaux. De nombreux étudiants internationaux doivent payer un fournisseur de soins du secteur privé pour les aider à répondre à leurs besoins en matière de soins de santé. La facture peut être de 1 300 à 1 700 $, et ces étudiants ont un accès limité à notre système de soins de santé.
(1120)
    Les recteurs d'université, les dirigeants d'associations étudiantes et de nombreux autres intervenants ont demandé aux gouvernements provinciaux de veiller, avec l'aide — ou la persuasion morale — du gouvernement du Canada, à ce que nos étudiants internationaux aient facilement accès aux soins de santé dans nos provinces respectives.
    Le quatrième point que j'aimerais soulever, c'est qu'en ce moment, les étudiants, leur famille et leurs amis sont très anxieux. Il y a une douleur bien réelle et il y a évidemment des difficultés liées à la santé mentale. Nous voyons ces problèmes s'exprimer de différentes façons, par exemple lorsque ces étudiants demandent comment ils vont réussir à payer leur loyer, comment ils pourront acheter de la nourriture et comment ils pourront payer leurs droits de scolarité et lorsqu'ils soulignent qu'ils n'ont pas encore d'emploi d'été. De plus, s'il y a des emplois d'été, ils seront limités à certains secteurs. Ils sont donc très anxieux et craintifs face à l'avenir, et je suis sûr que les universités d'un bout à l'autre du pays tentent de se montrer coopératives et de régler ces problèmes du mieux possible. Je ne veux pas rater cette occasion de souligner que leurs préoccupations sont bien réelles, et je crois que Universités Canada a proposé au gouvernement du Canada d'investir dans des bourses d'études pour « un avenir plus prometteur ». Il s'agirait d'offrir, d'un bout à l'autre du pays, environ 500 millions de dollars en bourses pour aider ces étudiants canadiens et internationaux à répondre à leurs besoins et à réduire leur anxiété. J'espère que les membres du Comité, dans leur grande sagesse, envisageront un tel projet.
    Mon cinquième commentaire concerne l'accès Internet à distance. Certaines personnes pourraient affirmer que votre comité s'occupe des questions liées à la santé, et non de celles liées aux technologies de l'information. Toutefois, vous devez savoir que le manque d'accès Internet à distance adéquat cause des problèmes importants à notre système de soins de santé.
    Si vous me le permettez, j'aimerais vous donner un bref exemple. Lorsque les cours en personne ont été suspendus à l'Université Cape Breton le 16 mars dernier, tous nos étudiants du baccalauréat en sciences infirmières ont poursuivi leurs études à distance. À mesure que les étudiants retournaient dans leur foyer un peu partout en Nouvelle-Écosse et commençaient l'apprentissage en ligne à distance, un grand nombre d'entre eux ont éprouvé des difficultés de connexion Internet, car ils vivent dans des régions rurales de la province. Par exemple, 77 étudiants avaient commencé leur stage pratique en soins infirmiers avec la Régie de la santé de la Nouvelle-Écosse, au Cap-Breton, et ils avaient seulement terminé deux jours de stage lorsque la Régie de la santé a suspendu tous les stages étudiants en santé à l'échelle de la province.
    En faisant preuve de créativité, les intervenants de l'université, et surtout ceux du programme en soins infirmiers, ont cherché un modèle d'apprentissage de rechange pour les étudiants qui avaient dû interrompre leur stage en milieu hospitalier. Nous avons donc acheté une simulation virtuelle. Une telle simulation utilise des modules d'apprentissage en ligne interactifs et exige que les étudiants utilisent leurs connaissances et accordent la priorité aux soins aux patients. Il y a plusieurs mises en situation et à la fin de chacune, les étudiants reçoivent de la rétroaction sur les décisions qu'ils ont prises. Ils peuvent répéter les mises en situation à plusieurs reprises et chaque fois, ils recevront de la rétroaction et une note. Le problème, c'est que les modules de simulation virtuelle nécessitent une très bonne connexion Internet pour avoir accès à chaque mise en situation et pour travailler sur chaque cas. On demande maintenant à ces jeunes infirmiers et infirmières d'entrer dans le système de soins de santé à titre de nouveaux fournisseurs de soins pour appuyer le personnel déjà à l'œuvre. Toutefois, en raison de l'absence d'un accès Internet de bonne qualité, il leur est très difficile, et souvent pratiquement impossible, d'offrir leur participation et leur contribution pendant cette période difficile.
(1125)
    Sixièmement, je voudrais soulever la question des investissements stratégiques dans les infrastructures. Un programme qui pourrait s'inspirer du Fonds d'investissement stratégique pour les établissements postsecondaires stimulerait l'économie et enrichirait notre capital scientifique dans le domaine de la santé.
    Chaque université est unique en son genre, mais nous, à l'Université Cape Breton, en Nouvelle-Écosse rurale, nous voulons des installations pour accueillir un laboratoire de recherches collaboratives, des pôles d'apprentissage appliqué en santé publique et des centres d'action communautaire qui profiteront vraiment à la communauté et aux étudiants. Universités Canada, après de vastes consultations des établissements d'éducation postsecondaire de tout notre pays, en a aussi fait la demande au gouvernement du Canada.
    Enfin, septièmement, le Canada a besoin d'un module de dépistage rapide, évolutif. Permettez-moi de prêcher un peu pour ma paroisse, puisque je représente une université. Actuellement, 634 étudiants sont inscrits à notre programme de baccalauréat en sciences de la santé publique, l'un des six qu'agrée, au Canada, l'Institut canadien des inspecteurs en santé publique. Ses bacheliers sont admissibles à un stage et à l'obtention d'un certificat d'agent de l'environnement ou d'agent de la santé publique au Canada. Ils forment ainsi un vivier de talents formés, prêts à répondre à la demande de dépistages rapides pour la main-d'oeuvre.
    De plus, notre université accueille des étudiants de bien plus qu'une cinquantaine de pays. Beaucoup sont munis d'attestations d'études internationales, particulièrement dans les professions de la santé. Un programme de préparation à l'emploi aiderait notre pays, sans parler des petites communautés, à endiguer les pénuries de personnel de soins de santé, qui posent un problème notable au Canada, mais particulièrement dans la région de l'Atlantique. Actuellement, plus de 150 professionnels de la santé — médecins, infirmières, pharmaciens, physiothérapeutes et ainsi de suite — formés à l'étranger étudient dans notre université, mais il faut mettre en oeuvre un modèle de dépistage rapide. Peu importe le nombre d'années qu'il faudra pour disposer du vaccin, je pense que le dépistage devra se poursuivre un certain temps, et nous devrons pouvoir le faire pour rassurer le pays en général, les professionnels de la santé et nos premiers intervenants sur nos possibilités en la matière.
    Monsieur le président, mon exposé est terminé.
(1130)
    Merci, monsieur Dingwall.
    Passons au témoin suivant, l'Association canadienne de santé publique.
    Monsieur Culbert, vous disposez de 10 minutes.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, bonjour. Je vous remercie de votre invitation.
    Pour commencer, je tiens à reconnaître que je participe à la séance sur le territoire ancestral et non cédé des peuples algonquins anishinabés. Mon association est déterminée à collaborer, avec les Premières Nations, les Inuits, les Métis et leurs gouvernements, à la vérité et à la réconciliation, au vrai sens de ces termes.
    Ensuite, j'exprime tout de suite l'appui et la gratitude de mon association envers les efforts de tous acteurs de la lutte contre la COVID-19 au Canada. Dans ces circonstances extraordinaires, des personnes de tous les horizons font preuve de cran.
    Je me propose de montrer que notre système a tiré les leçons du passé et que nous devons continuer de nous adapter et de nous améliorer.
    Notre pays a besoin d'un système de santé publique de dimension nationale qui, en même temps, appuie les provinces, les territoires et les peuples autochtones au moyen des compétences, des moyens et de l'équipement nécessaires pour répondre aux demandes créées par la catastrophe actuelle et les catastrophes à venir ou la lutte contre la pandémie, tout en réduisant la charge imposée au système de soins de courte durée.
    La santé publique se définit comme l'art et la science de la prévention des maladies, du prolongement de la vie et de la promotion de la santé grâce aux efforts organisés de la société. Au Canada, ses fonctions centrales englobent la protection et la surveillance de la santé, la prévention des maladies et des blessures, l'évaluation de la santé de la population, la promotion de la santé et, bien sûr, la protection civile et l'intervention.
    Je vous le rappelle, parce que la pandémie est un exemple d'école de cette définition. Depuis le début de l'année, l'Agence de la santé publique du Canada surveille cette flambée, en étant à l'écoute des faits et de la masse croissante des connaissances accumulées sur ce nouveau coronavirus. L'Agence et les autorisés sanitaires de partout au Canada se sont tenues au courant de cet effort scientifique et y ont contribué.
    Pendant que la COVID-19 se répandait dans le monde, on a révisé les plans de préparation à une éventuelle pandémie élaborés par suite des épisodes du SRAS et de la grippe H1N1, et commencé à formuler la réponse canadienne. Cette réponse s'inspire d'un ensemble de principes intégrés dans les plans actuels de préparation et elle comprend un certain nombre d'engagements. D'abord, tous les pouvoirs publics et tous les acteurs collaborent à la production d'une réponse efficace et coordonnée. Ensuite, les décisions se fondent sur les meilleurs faits connus et l'intervention contre la pandémie est proportionnelle à la menace à un moment donné. Enfin, les plans et les mesures, souples et adaptés à la situation, évoluent en fonction des renseignements nouveaux.
    La santé publique entre en scène dans sa dimension artistique à la prise des décisions concernant les interventions. Malgré la forte tentation de prétendre, après coup, que le Canada aurait dû fermer ses frontières et imposer la distanciation physique dès la reconnaissance du premier cas provenant de l'étranger sur son territoire, le public aurait alors très faiblement appuyé ces mesures, qui auraient été très peu suivies, au préjudice des interventions ultérieures.
    Depuis quelques semaines, le message de l'association que je répète est que la réaction de chacun peut constituer à lui seul le principal facteur de la bonne santé collective de notre pays. Pour le meilleur et le pire, la situation évolue selon le cours prévu. Les dociles aux conseils des autorités sanitaires aident à aplatir la courbe, tandis que les inconscients de la gravité de la situation continuent de mettre en danger la vie des autres.
    L'art de manœuvrer au point de rencontre de la santé publique, des libertés civiles et du comportement humain est toujours difficile. En dépit des critiques contre la stratégie d'intervention graduée ou proportionnée de nos autorités sanitaires et de nos gouvernements, nous croyons qu'ils ont choisi le parti le plus prudent.
(1135)
    Les autorités sanitaires et, comme elles, les politiciens, ont commencé par demander la modification des comportements. Ces demandes se sont graduellement durcies contre les récalcitrants. Chaque nouvelle demande de modification du comportement, pour le lavage fréquent des mains ou la distanciation physique, s'est appuyée sur des faits. Cette façon de faire était et continue d'être un exemple parfait et concret de promotion de la santé ou de responsabilisation des citoyens pour qu'ils améliorent leur hygiène ou qu'ils la prennent en charge.
    Les autorités sanitaires de notre pays comprennent que les commandements ne suffisent pas pour que la population modifie ses comportements. Il faut lui donner les moyens de prendre la décision d'elle-même. Pendant les crises de la santé publique, les efforts de promotion de la santé peuvent être entravés par le manque de ressources ou de temps pour obtenir l'adhésion et modifier les comportements. C'est alors que, à contrecœur, on impose des mesures coercitives et des sanctions pour préserver le mieux-être.
    Notons que beaucoup de nos concitoyens, vivant dans des logements surpeuplés, dans la rue ou dans des refuges, n'ayant pas accès à de l'eau propre, sont incapables de prendre en charge leur santé ou de modifier leurs comportements. Ces déterminants sociaux omniprésents de la santé deviennent encore plus nuisibles en période d'urgence de santé publique.
    Bien sûr, la réaction, jusqu'ici, du Canada à la COVID-19 a amplifié certaines des difficultés perpétuelles de notre modèle fédératif et de la délégation des pouvoirs en matière de santé aux provinces et aux territoires. Cette délégation qui permet aux fonctionnaires des provinces et des territoires d'élaborer des mesures adaptées aux circonstances précises de leur région est à double tranchant. Mais dans l'urgence, elle peut donner l'impression que les différents pouvoirs politiques appliquent sans concertation des stratégies dissemblables contre la pandémie. Le public ou les médias peuvent interpréter les différences dans les messages de santé publique comme des signes de désaccord ou, pis encore, d'incompétence des autorités sanitaires.
    La COVID-19 a encore une fois révélé l'absence de ressort de nos systèmes de santé publique, de santé mentale, de soins de courte durée et, particulièrement, des services offerts à beaucoup de communautés autochtones, sinon à toutes. L'obligation d'effectuer des dépistages et de rechercher les contacts a poussé à bout le personnel, même si toutes les ressources disponibles ont été redirigées vers la lutte contre la COVID-19. Cette réaffectation des ressources aura inévitablement des répercussions, puisque d'autres fonctions centrales de la santé publique seront mises de côté pendant la crise.
    Ce manque de ressort est directement imputable au sous-financement chronique des services de santé publique au Canada. Même si, actuellement, il ne relève pas de l'administration fédérale de corriger ce problème, nous encourageons la mise en place, en consultation avec les provinces, les territoires et les autorités autochtones, d'un mécanisme juridique, réglementaire et financier qui permettrait au gouvernement du Canada de protéger le mieux-être physique et mental des Canadiens et de le promouvoir grâce à des stratégies axées sur la population. Ce mécanisme facilitera l'établissement de normes de santé publique et la prestation de programmes et de services suffisants de santé publique. Son objet serait de guider, à l'échelle nationale, les activités des provinces et des territoires dont la mise en œuvre serait appuyée par une enveloppe de ressources.
    La COVID-19 a bouleversé la vie de beaucoup de nos concitoyens, en multipliant les épreuves et les tragédies. Elle a aussi entraîné un degré sans précédent de progrès scientifiques, de collaboration désintéressée et la volonté bien arrêtée de triompher de ce virus mortel. Malgré les difficultés notables qui ne cessent pas, nous ne pouvons pas nous empêcher de préparer le retour à la normale. Ce faisant, nous pouvons prévoir encore plus d'avance l'état de préparation à la pandémie, étant entendu que le virus ne sera ni le dernier ni le pire pathogène inédit à perturber notre monde.
(1140)
    Trop souvent, l'intérêt politique à l'égard de la santé publique faiblit une année ou deux après une urgence en santé publique. Les budgets qui avaient été débloqués temporairement sont alors réduits pour répondre aux besoins immédiats du système de soins actifs.
    Je demande aux membres du Comité de garder une chose en tête lorsqu'ils formuleront des recommandations pour l'avenir. Les systèmes et les services de santé publique au pays sont la ligne de front du réseau. Si vous voulez des systèmes de soins actifs qui sont viables dans tout le pays, vous devez mettre en place des réseaux de santé publique beaucoup plus robustes pour prévenir la maladie, prolonger la vie et favoriser la santé, aussi bien en situation de crise qu'en temps normal.
    Merci.
    Merci, monsieur Culbert.
    C'est maintenant au tour de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec.
    Allez-y, madame Lapointe.

[Français]

     Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, bonjour.
    Mon nom est Linda Lapointe et je suis vice-présidente inhalothérapeute à la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, communément appelée la FIQ. Je suis notamment responsable du dossier de la santé et de la sécurité au travail de nos professionnelles en soins. Nous représentons près de 76 000 infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes et perfusionnistes cliniques œuvrant dans tous les milieux de soins au Québec.
    Nous aimerions vous remercier de nous avoir invitées à cette étude de la réponse canadienne à la pandémie...

[Traduction]

    Monsieur le président, pardonnez-moi de vous interrompre. Je n'entends pas l'interprétation.
    Monsieur Davies, pouvez-vous regarder au bas de votre écran et vous assurer d'avoir sélectionné « English » dans la section « interpretation »?
    Il y a une barre d'icônes au bas de la fenêtre de Zoom.
    Je vois la section.
    Si j'appuie sur « English », il est indiqué « language interpretation ».
    Devrais-je appuyer sur « English »?
    Oui. Allez-y.
    D'accord. Merci, monsieur le président. Je tiens à m'excuser auprès de la dame qui témoigne.
    Veuillez nous excuser, madame Lapointe. Vous pouvez y aller.
    Voulez-vous que je reprenne du début?
    Oui, s'il vous plaît.

[Français]

     D'accord.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, bonjour.
    Je me nomme Linda Lapointe et je suis vice-présidente inhalothérapeute du Comité exécutif de la FIQ, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec. Je suis responsable du dossier de la santé et de la sécurité au travail auprès de nos professionnelles en soin. Nous représentons près de 76 000 infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes et perfusionnistes œuvrant dans tous les milieux de soins au Québec. Nous vous remercions de nous avoir invitées à cette étude.
    Au cours des 10 prochaines minutes, nous aborderons brièvement la question du financement du fédéral en matière de santé, pour ensuite approfondir la question de la sécurité des professionnelles en soins en ces temps difficiles.
    En ce qui concerne le financement du gouvernement fédéral, le réseau de la santé québécois est mis à rude épreuve depuis l'éclosion de cette pandémie. Sans la volonté et le savoir-faire de celles qui œuvrent au quotidien, les soins nécessaires et de qualité ne pourraient être offerts à la population en ces temps difficiles. Elles relèvent ce défi avec brio tous les jours depuis plusieurs semaines, et ce, malgré les nombreuses contraintes avec lesquelles elles doivent composer.
    Outre l'ampleur de la pandémie et la rapidité de sa propagation, les faiblesses de notre réseau s'expliquent en grande partie par l'insuffisance du financement, aux niveaux tant provincial que fédéral, au cours des dernières années. Depuis plusieurs années, la FIQ demande à ses élus fédéraux, tous partis confondus, d'augmenter le transfert en matière de santé afin de contribuer au financement des soins et des services de santé à hauteur d'au moins 25 % des dépenses faites par les provinces. Cette revendication fort légitime n'a malheureusement pas encore été entendue. Devant la sévérité de l'éclosion de la COVID-19, un financement adéquat aurait sans doute contribué à faciliter le travail quotidien des professionnelles en soins que nous représentons, en plus de permettre d'offrir à la population des soins auxquels elle est en droit de s'attendre.
    Par ailleurs, la semaine dernière, la ministre de la Santé, Mme Patty Hajdu, a fait le constat qu'au cours des dernières décennies, les différents gouvernements fédéraux ont sous-financé la préparation aux urgences de santé publique. Ainsi, selon Mme Hajdu, la Réserve nationale stratégique d'urgence ne contiendrait pas tout le matériel requis pour faire face à une pandémie de cette ampleur. Nous déplorons que cette réserve n'ait pas fait l'objet d'une révision régulière et que les sommes investies ne soient toujours pas au rendez-vous. Une réserve nationale bien garnie aurait été utile, d'autant plus que le Canada dépend en grande partie de l'industrie étrangère pour l'approvisionnement en équipement de protection individuelle.
    Néanmoins, nous saluons la volonté du gouvernement fédéral de pallier cette dépendance en encourageant l'industrie canadienne à produire dorénavant ces équipements essentiels pour le travail de nos professionnelles en soins.
    Je vais maintenant parler de la sécurité de nos professionnelles en soins. En attendant impatiemment cette autonomie d'approvisionnement canadienne en matière d'équipement de protection individuelle, il nous apparaît opportun de rappeler les propos du président de la commission sur le SRAS, le juge Campbell, propos que nous faisons nôtres aujourd'hui. Tant et aussi longtemps que le principe de précaution ne sera pas reconnu comme principe fondamental en matière de santé et de sécurité au travail au Canada, nos professionnelles en soins seront à risque.
    Devant la timidité de certaines recommandations concernant les équipements de protection individuelle par l'Agence de la santé publique du Canada, ou ASPC, notamment dans son refus d'appliquer ce principe de précaution concernant les risques de propagation aérienne de la COVID-19, la FIQ a eu l'occasion d'exprimer son mécontentement, le 7 février dernier, dans une lettre adressée à la Dre Tam, administratrice en chef de l'ASPC. Comme cela a été souligné dans cette lettre, nous croyons toujours aujourd'hui que le leadership de l'ASPC aurait été utile dans le contexte actuel.
    Au Québec, dès le début de cette crise, la FIQ s'inquiétait également des recommandations et des termes utilisés dans certaines recommandations de l'Institut national de la santé publique du Québec, l'INSPQ. La transmission aérienne du virus n'était pas prise en compte, comme à l'ASPC, et les recommandations québécoises faisaient état de scénarios de pénurie appréhendée d'équipement de protection individuelle.
    Cependant, ce qui est encore plus alarmant, c'est que la transmission aérienne du virus est toujours occultée aujourd'hui, alors que la recherche actuelle atteste pourtant cette forme de transmission. D'ailleurs, un comité d'experts américains vient de se prononcer à ce sujet. Il faut rapidement que les recommandations de l'INSPQ soient ajustées pour refléter cette évidence scientifique. Dans le cas contraire, on porte atteinte aux droits des travailleurs à la sécurité.
    Depuis quelques semaines, les scénarios de l'Institut national de la santé publique du Québec se sont rapidement transformés en solutions improvisées de dernier recours, notamment pour les appareils de protection respiratoire. Je pense notamment à l'utilisation prolongée de masques jetables à usage unique ou à leur réutilisation.
(1145)
     L'INSPQ propose également l'utilisation de masques expirés et suggère que l'on procède à la désinfection de masques jetables, le tout étant cautionné par la direction de la santé publique.
    Nous mettons en doute ces directives de santé publique qui semblent séparer, voire opposer la santé publique et la protection des professionnelles en soins. Nous comprenons aujourd'hui qu'elles sont le résultat d'un manque de préparation évident et que cela est au risque et au péril de nos professionnelles en soins.
    Nous sommes très préoccupées par le fait que, devant l'urgence, le principe de précaution qui doit toujours guider les bonnes pratiques en matière de protection contre les infections et en matière de santé et de sécurité du travail soit mis de côté. Le contexte de pandémie ou de difficulté d'approvisionnement ne peut pas justifier que nos professionnelles en soins soient mises à risque de s'infecter.
    Le constat que nous souhaitons partager avec vous aujourd'hui n'est guère reluisant et soulève bon nombre d'inquiétudes chez nos membres. En 2003, lors de l'épidémie de SRAS, la simple incertitude quant aux connaissances sur le virus était une source de stress et d'anxiété considérables pour le personnel de la santé. Aujourd'hui, cette même incertitude est combinée à une réelle pénurie mondiale d'équipement de protection individuelle essentiel.
    Déjà en surcharge de travail au début de la pandémie, les professionnelles en soins se retrouvent confrontées à des débordements importants. Alors que plusieurs personnes font appel aux soins de santé, les professionnelles en soins elles-mêmes ou leurs proches peuvent devenir malades.
    Nos membres vivent un grand stress. Elles se sentent mal protégées face au virus. Ce qu'elles sentent aujourd'hui, c'est qu'elles peuvent être contaminées faute d'être bien protégées et qu'elles peuvent contaminer d'autres patients, des collègues ou les membres de leur famille. Ce qui est encore plus inquiétant, c'est que ce sentiment n'est pas sans fondement: les employeurs leur refusent l'accès aux moyens de protection alors que ces derniers pourraient leur assurer un meilleur niveau de sécurité.
    Cette carence d'équipement se fait cruellement sentir, particulièrement au sein des centres d'hébergement et de soins de longue durée, ou CHSLD. Nos professionnelles en soins, déjà confrontées à l'insuffisance de personnel dans ces milieux, doivent aujourd'hui offrir des soins auprès d'une clientèle très vulnérable, avec un minimum d'équipement de protection. Ces lacunes expliquent en grande partie la vitesse à laquelle se propage le virus dans ces milieux et augmentent incidemment le niveau de stress des professionnelles en soins.
    Aider les personnes dans le besoin peut être gratifiant, mais aussi difficile. Les professionnelles en soins peuvent faire l'expérience de la peur, de la tristesse, de la frustration, d'un sentiment de culpabilité et vivre de l'épuisement. Ce sont des réactions auxquelles on peut s'attendre dans des situations de cette importance et marquées par l'incertitude.
    En conclusion, force est de constater que les recommandations découlant des différents rapports relatifs à l'épidémie du SRAS, en 2003, ne semblent pas avoir été bien assimilées. Nous souhaitons que celles qui se dégageront de la pandémie actuelle soient mises en œuvre et que nous puissions ainsi être mieux préparés pour affronter d'autres pandémies. Il est indispensable que nos professionnelles en soins soient capables d'offrir des soins de qualité à la population dans un milieu de travail sécuritaire où tout le matériel nécessaire est disponible.
     Sur une note plus positive, nous tenons à souligner la célérité du gouvernement fédéral à créer et à déployer des mesures pour soutenir les travailleurs et les travailleuses au cours de cette période de confinement. Certaines de ces mesures ont sans doute contribué à diminuer en partie le stress d'une perte de revenus pour certains conjoints ou conjointes de nos professionnelles et ainsi permettre à ces dernières de continuer d'offrir des soins de qualité à la population.
    Je vous remercie.
(1150)

[Traduction]

    Merci, madame Lapointe. Nous allons maintenant écouter le Dr Naveed Mohammad, qui représente le Système de santé William Osler.
    Docteur Mohammad, vous avez la parole pour 10 minutes.
    Bonjour tout le monde. Je vous remercie infiniment de m'avoir invité à m'adresser aujourd'hui au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes.
    Je suis le Dr Naveed Mohammad, vice-président exécutif de la Qualité et des affaires médicales et académiques au Système de santé William Osler, ou « Osler », comme nous appelons communément notre centre hospitalier. Depuis 1997, j'ai eu le privilège de passer la majeure partie de ma carrière à travailler sur la ligne de front du système de santé en pratiquant la médecine d'urgence, la plupart du temps à Osler. À compter du mardi 14 avril, j'assumerai le rôle de président-directeur général de notre corporation hospitalière.
    Osler est un des plus grands hôpitaux communautaires du Canada, et il dessert notre région de plus de 1,3 million d'habitants. Nous avons trois établissements dans le nord-ouest de Toronto et à Brampton: l'Etobicoke General Hospital, le Brampton Civic Hospital et le Peel Memorial Centre for Integrated Health and Wellness.
    La population que nous servons croît rapidement, ce qui exerce des pressions uniques sur la capacité des programmes de santé communautaire et des soins actifs. En outre, Osler s'adresse à une population très diversifiée, qui comprend une importante communauté sud-asiatique ainsi qu'un grand nombre de nouveaux Canadiens et de patients internationaux. En raison de notre proximité géographique, nous sommes les premiers intervenants pour l'Aéroport international Toronto Pearson, le plus grand aéroport au Canada. Par conséquent, même si Osler entretient une relation fondamentale avec le gouvernement de l'Ontario en tant qu'hôpital public de compétence provinciale, nous sommes également un acteur important touché par les politiques et les orientations législatives du gouvernement fédéral.
    Dans mon exposé, j'aimerais aujourd'hui présenter au Comité un résumé de la façon dont Osler a réagi à la COVID-19, et vous donner une idée de la réalité des équipes de soins de santé qui travaillent sur le terrain. Je vais également vous dire dans quelle mesure la réponse du gouvernement fédéral à la COVID-19 a été efficace pour soutenir les hôpitaux et nos travailleurs de la santé. Je présenterai aussi des suggestions pour que le Canada et notre système de santé puissent mieux se préparer aux pandémies de demain, qui sont inévitables comme nous le savons désormais.
    La COVID-19 est arrivée au Canada à un moment difficile pour les hôpitaux et les services de santé. Nous étions au plus fort de la saison grippale, une période où la plupart des hôpitaux sont chaque année aux prises avec un nombre accru de patients et avec des problèmes criants de capacité. En fait, quand Osler a eu son premier patient atteint de la COVID-19, l'organisation était déjà complètement engorgée depuis un certain temps. Alors que l'éclosion d'un nouveau virus en Chine puis ailleurs faisait les manchettes, il est devenu évident que notre système de santé devait rapidement se doter d'un plan, puisque nous craignions une trajectoire similaire au Canada.
    À l'instar d'un grand nombre de médecins, d'infirmières et de professionnels paramédicaux de ma génération, j'étais en première ligne lors de l'éclosion du syndrome respiratoire aigu sévère, ou SRAS, de la grippe A (H1N1) et du virus Ebola, comme bien des membres de la haute direction d'Osler. Nous savions que nous devions agir en amont.
    De plus, au cours des dernières semaines, les hôpitaux, les partenaires régionaux et les autorités provinciales, y compris le ministère ontarien de la Santé et Santé Ontario, ont collaboré de manière inédite afin d'élaborer et de mettre en œuvre une démarche prévue et progressive entourant la planification des soins intensifs et de la capacité d'urgence. En tant qu'hôpital de soins actifs, Olser a rapidement porté son attention sur les stratégies et les mesures se rapportant à la COVID-19. Nous avons ajusté nos activités cliniques et notre infrastructure afin de pouvoir accueillir les patients atteints de la COVID-19 ou non qui ont besoin de soins hospitaliers. Nous avons toujours eu comme principe fondamental d'assurer la protection et la sécurité de tous les patients, du personnel, des médecins, des bénévoles et de la collectivité.
    Voici quelques stratégies qu'Osler a adoptées pour accueillir les patients atteints de la COVID-19: annuler l'ensemble des services, des procédures et des chirurgies électifs et non urgents, et réaffecter ces espaces dans l'hôpital; dans la mesure du possible, déplacer ou libérer les patients en réadaptation ou qui nécessitent d'autres niveaux de soins, avec le soutien qui convient à domicile ou en milieu communautaire; et profiter du déclin naturel du nombre de patients afin de consolider ceux-ci dans les nouveaux espaces.
(1155)
    Afin de réduire encore plus le nombre de patients qui entrent à l'hôpital et qui en sortent, Osler a amélioré ses soins virtuels par téléconférence et vidéoconférence, et offre désormais plus de services à distance. Ainsi, les soins virtuels ont contribué à diminuer globalement le nombre de patients qui visitent l'urgence pour des raisons autres que la COVID-19, ce qui a permis à l'établissement d'augmenter de façon sécuritaire sa capacité d'accueil pour la COVID-19. Parmi nos stratégies virtuelles, il y a également l'utilisation d'appareils iPad ou autres pour permettre les visites virtuelles entre les patients et leur famille, puisque nous avons dû prendre la décision très difficile d'interdire les visites.
    Nous sommes en train de repérer les locaux vacants de nos établissements afin de créer une capacité supplémentaire de lits pour les patients. Des tentes sont installées à côté de l'hôpital, et nous utiliserons au besoin ces espaces et d'autres locaux non conventionnels pour soigner les patients, y compris les auditoriums, les unités de soins ambulatoires et les salles à manger des patients.
    Afin de faciliter l'évaluation et le dépistage de la COVID-19 pour la population, et aussi pour notre personnel, nos médecins, nos bénévoles et leurs familles, Osler a rapidement mis en place trois centres d'évaluation de la COVID-19, dont un des premiers à voir le jour en Ontario. Ces services sont offerts au sein de l'établissement hospitalier et aussi dans un point de service au volant novateur et accessible. Osler a maintenant fait 5 260 prélèvements. Nous cherchons actuellement des moyens d'accélérer l'évaluation et le dépistage des prestataires de soins locaux et des premiers intervenants, qui courent un plus grand risque d'exposition à la COVID-19.
    Nous continuons à travailler avec les partenaires provinciaux et régionaux pour nous procurer des équipements de protection individuelle, ou EPI. Osler a pu compter sur l'appui extraordinaire de partenaires privés, d'entreprises locales et de donateurs pour faire l'acquisition d'EPI additionnels. Il a fallu une stratégie solide en matière de gérance et de conservation pour garantir un approvisionnement durable, et ce volet demeure une priorité absolue pour l'hôpital.
    Nous vivons une époque sans précédent. Nous avons dû créer ou changer en temps réel de nombreuses politiques et procédures hospitalières, à mesure que les informations sur les caractéristiques du virus et leurs répercussions cliniques ont évolué. Certaines politiques ont donné lieu à des conversations très difficiles pour nos équipes. Des décisions telles que l'interdiction des visiteurs ont été prises à l'aide d'outils de décision éthiques; cependant, les discussions ont été pénibles et parfois émotives. Nous savons que ces changements ont été extrêmement ardus pour nos patients et leur famille.
    Le personnel d'Osler est notre atout le plus précieux. De nombreux membres du personnel hospitalier ont travaillé de longues heures, sept jours par semaine. La santé et le bien-être de nos équipes ont été au centre de nos préoccupations. Nous avons d'ailleurs mis en place des ressources progressives pour un milieu de travail sain et une stratégie de résilience, ainsi que des mesures de soutien pratiques, en plus d'espaces de répit, de réflexion et de bien-être à l'intention de notre personnel.
    Les équipes d'Osler et d'autres hôpitaux et organisations de soins de santé ont été véritablement touchées par la vague de soutien de la population à l'égard de nos héros des soins de santé. Ces gestes ont pris diverses formes, y compris des hommages sincères et justes de la part d'élus, dont le premier ministre Trudeau, le premier ministre Doug Ford, des maires locaux et des conseillers municipaux et régionaux. Les contributions financières aux fondations des hôpitaux, les mots d'encouragement sur les médias sociaux et les simples gestes de gentillesse et de soutien de la part de nos voisins et amis nous ont inspirés et aident notre personnel à traverser ces moments difficiles. Ceux d'entre nous qui travaillent dans le domaine de la santé remercient sincèrement les Canadiens pour ce soutien.
    Après avoir parlé à mes collègues, au personnel infirmier de première ligne, aux médecins et aux autres professionnels de la santé, je peux affirmer que le sentiment collectif est que les gouvernements fédéral et provinciaux ont bien collaboré pour soutenir la crise en première ligne. Le premier ministre fédéral, le premier ministre provincial et les dirigeants municipaux ont présenté des comptes rendus quotidiens avec brio et ont tenu la population au courant des nouvelles décisions et orientations. Nous avons été ravis de constater que les gouvernements se sont serré les coudes sans partisanerie pour accélérer la réponse aux besoins hautement prioritaires, surtout en ce qui a trait à l'approvisionnement d'EPI et de masques N95. Ce sont des réalisations dignes de mention.
(1200)
     Toutefois, je songe à ce qui s'est passé jusqu'à présent et à la meilleure façon de continuer à gérer ensemble la situation, et je vous demande de tenir compte des éléments suivants.
     Même si la réponse du gouvernement a été substantielle et relativement bien coordonnée, nous avons tous été contraints de réagir, à l'instar du reste du monde. Pourtant, puisque nous avons été touchés par le SRAS il y a 17 ans, et plus récemment par le syndrome respiratoire du Moyen-Orient, ou SRMO, et par la grippe A (H1N1), nous savons à quel point il est probable que des pandémies se répandent. Le gouvernement fédéral dispose d'une expertise formidable en matière de planification et de mobilisation des interventions d'urgence, ce qui veut dire qu'il est particulièrement bien placé pour veiller à ce que nous tirions des leçons de cette expérience et fassions ce qui suit.
     Premièrement, il faut augmenter nos réserves d'EPI et d'autres équipements en cas de pandémie, ainsi que diversifier notre réseau de fournisseurs. Le fait de ne pas savoir s'il y aura suffisamment d'EPI, de respirateurs ou d'autre matériel vital a suscité une grande crainte sur la ligne de front.
     En deuxième lieu, il faut élaborer des stratégies pour garantir que nous puissions étendre le dépistage au sein de la collectivité. En termes simples, nous devons pouvoir effectuer plus de tests. Cette méthode nous permettra de mieux cibler la mise en quarantaine du personnel et des médecins, et facilitera la planification de la capacité de pointe, de façon à mieux isoler les patients qui sont atteints ou non d'un virus ou d'une maladie contagieuse en particulier.
    Troisièmement, il faut aller de l'avant avec la stratégie nationale d'assurance-médicaments afin d'atténuer les difficultés relatives aux pénuries et à l'accumulation de médicaments.
    En quatrième lieu, il faut entreprendre une démarche coordonnée, à plusieurs niveaux et multipartite afin de planifier et de mettre en œuvre la réponse à la pandémie. Voilà qui permettra d'optimiser l'expertise fédérale, de garantir une répartition idéale des ressources, d'harmoniser les politiques entre les différentes instances gouvernementales, d'assurer une transparence et une confiance totales, et de garantir que l'objectif demeure la mise en œuvre du plan jusqu'aux premières lignes.
    Pour terminer, nous espérons que nos gouvernements continueront à collaborer de façon non partisane comme ils l'ont fait pour aider tous les Canadiens à vaincre la COVID-19.
     Je tiens à remercier tous les membres du Comité de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous. J'ai hâte d'échanger et de répondre à vos questions.
    Merci.
(1205)
    Merci, docteur Mohammad.
     Nous allons maintenant passer aux questions. Nous allons commencer notre premier tour par M. Kitchen.
     Monsieur Kitchen, vous avez six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
     Je remercie tous les témoins de leurs exposés. C'est très apprécié.
     Merci à chacun d'entre vous qui êtes intervenus sur le terrain. Docteur Mohammad et madame Lapointe, je vous remercie pour tous les efforts que vous déployez afin d'assurer la protection des Canadiens.
     Madame Lapointe, je vous sais gré de vos commentaires. J'aimerais commencer par vous.

[Français]

     Je parle un petit peu le français. J'apprends chaque jour un nouveau mot.

[Traduction]

     C'est tout ce que je peux dire. Je m'excuse.
     À notre dernière séance, nous avons entendu le témoignage de Linda Silas, la présidente de la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et infirmiers. Elle a déclaré ceci: « Cependant, la sécurité en milieu de travail n'a jamais été [la] priorité [de l'Agence de la santé publique du Canada] et, malheureusement, l'Agence a continuellement omis de prendre en compte et de protéger adéquatement la santé et la sécurité des travailleurs de la santé. »
    Elle a continué à parler de certaines choses, mais je vais terminer avec ceci: « Essentiellement, le message se résume ainsi: étant donné l'incertitude entourant le nouveau coronavirus, en particulier pour un aspect aussi fondamental que son mode de propagation, les travailleurs de la santé doivent bénéficier dès le début de la plus haute protection possible et non de la protection de base. »
    Madame Lapointe, d'après ce que vous avez observé, avez-vous l'impression que l'Agence de la santé publique du Canada a réellement pris au sérieux la sécurité des travailleurs de la santé dans leur milieu de travail?

[Français]

     Je vous dirais que c'est plus ou moins le cas. Notre constat aujourd'hui, après quelques semaines de cette pandémie, est que nous avons eu carrément l'impression que les lignes directrices de la santé publique ont été ajustées en fonction de la disponibilité de l'équipement de protection individuelle, alors que la santé publique devrait être au-devant et assurer aux professionnelles en soins et à tous les travailleurs du milieu de la santé une sécurité maximale.
    Les lignes directrices changeaient constamment. On s'apercevait qu'elles devenaient inférieures à ce qu'elles auraient dû être en temps normal, en situation non pandémique. Les lignes directrices changeaient continuellement et faisaient que la sécurité était compromise, ou du moins donnaient le signal aux travailleurs de la santé qu'elle pourrait être compromise. À force de changer les lignes directrices, on venait dire qu'on diminuait le niveau de protection. Par exemple, pour le masque N95, les situations devenaient de plus en plus limitées. Il n'y avait que deux situations ou on pouvait utiliser le masque N95, alors que le mode de transmission n'est pas encore bien déterminé. Depuis les dernières semaines, depuis les derniers jours, plus le temps passe, plus on voit qu'il pourrait y avoir une transmission aérienne. Le masque N95 est justement fait pour les situations ou il y a une transmission aérienne. C'est là-dessus que porte le grand débat.
    Autant la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et infirmiers que nous, à l'échelle provinciale, avons demandé que les professionnelles en soins aient un masque N95 aussitôt qu'il y a un cas suspect, pas seulement pour les cas positifs. Les dernières données montrent que beaucoup de patients sont porteurs du virus alors qu'ils sont asymptomatiques, d'où l'importance de bien protéger les professionnelles en soins, afin qu'elles ne partent pas en isolement et qu'on ne soit pas privés de leurs services.
    Oui, nous avons de grands reproches à faire à l'Agence en ce qui touche la santé publique, notamment sur le plan de la communication. Les documents étaient continuellement mis à jour. C'était difficile d'avoir un portrait en temps réel des ajustements et ce n'était pas concis. Ce n'était pas facilement communicable aux professionnelles en soins sur le terrain...
(1210)

[Traduction]

    Je vous remercie beaucoup. Je suis désolé de vous interrompre, mais je n'ai que très peu de temps.
    Vous avez mentionné plusieurs aspects, et vous avez dit entre autres que les choses changent tout le temps et semblent même changer chaque jour. Vos observations au sujet des masques sont importantes. La question à se poser en réalité est celle de savoir d'où viennent ces masques. Nous avons plusieurs fois soulevé cette question avec la ministre en comité, à savoir la provenance de ces masques et la rapidité avec laquelle nous pouvons les obtenir.
    Plusieurs d'entre vous ont parlé aujourd'hui des protocoles qui ont été établis. La réalité, c'est que nous avons établi ces protocoles dans le sillage du SRAS. Il semble que souvent, dans les hôpitaux, en particulier dans les régions rurales, si vous demandez aux gens où se trouvent leurs protocoles de 2005, ils ne le savent même pas. On s'inquiète de ce que ces protocoles établis après le SRAS ne sont pas effectivement suivis.
    Je vais poser ma question au Dr Mohammad.
    Avant que la COVID-19 se mette à se propager à travers le monde, je me demande si vous-même ou votre hôpital étiez au fait des processus et des protocoles qui avaient été établis précédemment. Je reconnais que votre hôpital est plus gros que bien d'autres hôpitaux à l'échelle du Canada, mais à quelle fréquence les professionnels de la santé relevant de votre compétence sont-ils tenus de revoir ces protocoles? À quelle fréquence faites-vous des essais simulés et des procédures afin de vous assurer que votre hôpital...? Je vous pose cette question de votre point de vue ainsi que de celui des petits hôpitaux à l'échelle du Canada. À quelle fréquence cela se fait-il? Est-ce chaque année, chaque semaine, chaque mois?
    Je peux vous dire ce que nous faisons à Osler.
    Nous sommes une grosse organisation, nous avons plus de personnel et davantage d'amplitude. Nous avons un plan de lutte contre les pandémies dont la responsabilité incombe à notre comité de planification d'urgence, et ce plan est revu annuellement. Le plan de lutte contre les pandémies n'englobe pas seulement le travail qui doit être accompli à l'intérieur d'un hôpital, mais également les partenariats qui doivent être créés à l'extérieur, avec les services médicaux d'urgence, ou SMU, les administrations régionales et le ministère de la Santé, en cas de pandémie. Nous le faisons annuellement et nous en faisons une revue annuelle.
    Comme je l'ai mentionné, nous sommes peut-être un peu avantagés en raison de notre proximité à l'aéroport, mais nous avons des exercices de simulation avec les services d'incendie locaux, avec le service de police local et avec l'Autorité aéroportuaire du Grand Toronto pour divers types de situation, qu'il s'agisse d'un écrasement d'avion, d'un traumatisme majeur ou d'un enjeu comme celui que nous vivons actuellement, avec le risque d'un agent infectieux.
    J'ai travaillé dans des municipalités de 1 600 habitants et 2 000 habitants dans le passé, et en ce qui concerne les petits hôpitaux, tout dépend de l'amplitude de l'administration. À titre d'agent d'agrément à Agrément Canada, il m'arrive souvent d'agréer des hôpitaux à l'échelle du pays, et je constate que dans les petits hôpitaux, à cause de la charge de travail qu'ils ont, ils ne passent peut-être pas en revue les protocoles sur une base annuelle ni même tous les deux ou trois ans. Il est possible qu'ils n'agissent que quand des événements comme celui-ci se produisent.
    Merci, monsieur Kitchen. C'est maintenant au tour de Mme Sidhu.
    Madame Sidhu, vous avez six minutes.
    Je vais commencer par remercier tous les témoins d'être là. Docteur Mohammad, je vous remercie de votre leadership.
    C'est à vous que je vais adresser ma première question.
    Comment le gouvernement peut-il améliorer son aide aux hôpitaux, aux fournisseurs de soins de santé, afin d'atténuer les effets de la COVID-19? Comme vous le savez, nous avons le Brampton Civic Hospital et tous les professionnels de la santé qui font un travail incroyable. J'aimerais avoir votre point de vue là-dessus.
    Je dirais pour commencer que la collaboration est excellente entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, concernant les mesures qu'ils ont mises en place. Les programmes garantissant la stabilité des revenus pour notre personnel et pour tous les travailleurs au Canada et les autres mesures de ce genre sont un atout important et ont une grande incidence sur les membres de notre collectivité et sur nos employés, à Osler.
    Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration, il faut tirer des leçons du passé et avoir des plans en place, en particulier pour l'équipement de protection individuelle. L'un des principaux défis que nous avons à relever en ce moment est lié aux fournisseurs et à la chaîne d'approvisionnement.
    Il y a une autre chose. Je sais que nous avons parlé de ce qui se passe concernant les voyageurs internationaux qui arrivent à l'aéroport. Un des plus gros problèmes auxquels nous faisions face ici, parce que nous sommes si près du plus gros aéroport international au Canada, est que les voyageurs canadiens et les voyageurs étrangers descendaient d'avion et nous disaient que les seules personnes qui leur posaient des questions ou qui les contrôlaient à l'arrivée étaient les agents des services frontaliers. Je crois que c'était une légère faiblesse de notre processus, sachant que de plus petits pays placent aux points de contrôle des travailleurs de la santé publique qui vérifient la température des gens ou leur posent des questions afin d'isoler les personnes à risque dès leur arrivée.
    La dernière chose dont je veux parler est une chose que j'ai mentionnée précédemment, soit notre approvisionnement en médicaments et notre politique concernant la chaîne d'approvisionnement des médicaments. En ce moment, à cause du nombre de patients qui ont besoin d'être placés sous ventilateur et auxquels il faut administrer un sédatif, parce qu'on leur installe un gros tube dans la gorge afin de leur permettre de respirer, je sais qu'à l'échelle du pays et de la province, les médicaments qui sont utilisés pour la sédation des patients risquent de manquer. C'est en fait une chose qui nous inquiète énormément. Par conséquent, quand je parle de la politique d'assurance-médicaments, je ne parle pas que de régimes spéciaux permettant aux Canadiens d'avoir accès à un médicament, si nous en trouvons un qui fonctionne, mais je parle aussi d'une politique d'assurance-médicaments qui crée et qui ouvre les chaînes d'approvisionnement des médicaments très importants dont nous pourrions manquer dans un avenir très rapproché dans les grands hôpitaux.
(1215)
    J'aimerais mentionner autre chose, si vous pouvez répondre.
    À titre de députée de Brampton-Sud, je représente une circonscription très diversifiée. Comme vous le savez, de très nombreuses personnes ayant immigré dans ma circonscription et ailleurs sont des médecins diplômés à l'étranger, et ils ont donc reçu leur formation à l'étranger. Récemment, le gouvernement fédéral a lancé une campagne de recrutement afin de trouver les personnes qui possèdent des compétences en médecine et qui veulent aider dans la lutte contre la COVID-19.
    Docteur Naveed Mohammad, compte tenu de la campagne de recrutement, bien que la reconnaissance des qualifications relève de la compétence provinciale, comment le gouvernement fédéral peut-il soutenir des programmes comme celui-ci dans un effort pancanadien pour combler le manque de personnel dans le domaine des soins de santé?
    Monsieur David Dingwall, j'aimerais que vous répondiez à cela également, je vous prie.
    Voulez-vous que je réponde en premier?
    Oui, je vous en prie.
    Je peux vous dire que nous avons au Canada de très nombreux médecins diplômés à l'étranger. Un grand nombre d'entre eux sont des Canadiens qui ont fréquenté des écoles de médecine étrangères. Ce ne sont pas des personnes qui viennent d'autres pays et qui ont fait leurs études là-bas. Ce sont des personnes qui ont grandi au Canada ou qui sont nées au Canada et qui sont allées fréquenter des écoles de médecine à l'étranger.
    Je peux vous dire que nous avons en ce moment un plan visant la dotation progressive de notre organisation, car nous avons cessé les chirurgies ainsi qu'une grande partie du travail non urgent. Initialement, nous allons utiliser ce personnel pour combler toutes les lacunes. Après, nous allons tendre la main à la collectivité, aux médecins et spécialistes qui exercent leur profession dans la collectivité. Ils ne travaillent pas dans un hôpital, mais ils se proposent pour faire le nécessaire.
    Pour répondre à votre question, l'Ordre des médecins et chirurgiens de l'Ontario travaille avec la province afin de permettre aux médecins diplômés à l'étranger d'obtenir des permis temporaires de pratique d'un mois pouvant être renouvelés mensuellement. Cela signifie qu'à Osler, si nous en venons au point où nous n'avons plus assez de médecins localement, nous embaucherions des médecins diplômés à l'étranger et nous leur donnerions une lettre d'emploi. Quand ces diplômés présenteraient cette lettre d'emploi à l'Ordre des médecins et chirurgiens de l'Ontario, soit l'organisme qui délivre les permis, ils obtiendraient un permis d'un mois pour travailler avec nous, et ce permis serait renouvelable mensuellement.
    Je crois que c'est une excellente idée de mettre cela en place, car c'est pour nous, en Ontario, une mesure provisoire. J'encourage le gouvernement fédéral à recommander cette solution aux autres provinces, car la plupart de ces médecins diplômés à l'étranger seraient prêts à se rendre n'importe où au Canada pour acquérir cette expérience. Non seulement cela va nous aider maintenant, mais cela va aider ces médecins diplômés à l'étranger à obtenir des résidences pour les deux prochaines années parce qu'ils auront accumulé une expérience locale au Canada.
(1220)
    Monsieur Dingwall, que pensez-vous de cela?
    Je trouve plutôt tragique que nous ayons, dans nos établissements postsecondaires à l'échelle du pays, de nombreux professionnels qui ne peuvent pratiquer comme médecins ou infirmières, entre autres. Il y a des façons de contourner cela. Je crois qu'il faut un programme de transition pour les médecins et les autres professionnels, de sorte qu'ils puissent faire leur entrée dans le système et fournir les services nécessaires aux citoyens.
    L'année passée, à mon université, nous avions 17 médecins venus de l'Inde, et ils souhaitaient tous participer aux soins de santé et à un programme de transition. Pour une raison quelconque, les sociétés médicales du pays ne sont pas prêtes à agir d'une manière tangible pour faciliter cette transition.
    Le gouvernement fédéral peut aider en versant les sommes nécessaires à la transition, mais il faut que l'Association médicale canadienne et les associations provinciales [Difficultés techniques] un programme qui aidera. Nous ne souhaitons pas une solution diluée. Nous voulons que ces personnes fassent la transition et deviennent des médecins de famille ou des professionnels dans notre système de soins de santé. Avec un peu de volonté de la part de certaines des parties prenantes, il est possible de réaliser cela très rapidement et ce serait dans l'intérêt de tous.
    Je vous remercie, madame Sidhu.

[Français]

     Monsieur Thériault, allez-y. Vous disposez de six minutes.
    Bonjour, monsieur le président.
    D'abord, je voulais m'adresser à l'ensemble des témoins. Madame Lapointe, messieurs, je vous remercie de votre précieuse contribution.
    Je vais commencer par m'adresser à vous, madame Lapointe. D'abord, permettez-moi de souligner la clarté de votre présentation. Vous avez quasiment épuisé l'ensemble de mes questions. J'en ai encore, mais vous avez fait le point sur la situation, et j'en suis fort content. Permettez-moi aussi de saluer l'ensemble des membres de la FIQ et de souligner leur courage et leur bienveillance en ces temps difficiles.
    C'est une pandémie d'une virulence assez incroyable. En effet, le 13 mars dernier, lors du décret d'urgence sanitaire du Québec, cette décision a été prise alors qu'il y avait 17 cas d'infection et aucun décès. À peu près 25 jours plus tard, hier soir, à 20 h 38, il y avait 10 031 cas et 175 décès au Québec. Personne n'avait vu venir un virus d'une telle virulence. Par contre, vous soulignez le fait que toutes les recommandations pertinentes issues du SRAS ont été plus ou moins respectées.
    À partir de quel moment, madame Lapointe, vous êtes-vous aperçue qu'il y avait un problème du côté du stock d'équipement de protection individuelle?
    Vous avez indiqué que les gens devaient pouvoir faire leur travail avec de l'équipement, mais avez-vous eu connaissance du fait que des membres de votre organisation ont dû travailler sans une protection adéquate? Cela pourrait-il expliquer certaines contagions communautaires que l'on voit aujourd'hui dans certains CHSLD?
(1225)
    Je vous remercie de votre question.
    Effectivement, le manque de matériel a été constaté assez rapidement. C'est ce qui nous a un peu fâchés. Dans tous ses points de presse, pendant deux semaines, M. Legault se faisait rassurant. Il disait qu'il y avait assez d'équipement de protection individuelle.
    Or, sur le terrain — nous représentons 76 000 professionnels en soin dans la province —, cela n'était pas du tout le constat que nous faisions. De plus, nous nous étions fait dire qu'il s'agissait d'une gestion très restrictive. Nous nous disions qu'il y avait peut-être assez de matériel, mais que la gestion était serrée en prévision d'une éventuelle pénurie. En effet, il y avait des vols de masques par les patients et par les visiteurs. Nous n'étions pas certains.
    Au fil du temps, M. Legault avait fini par reconnaître qu'il ne restait de l'équipement que pour une période de trois à sept jours. Nous avions fait ce constat. Depuis deux ou trois semaines, nous avions prévenu le ministère. Je lui envoyais le nom de fournisseurs qui nous contactaient à la Fédération. Comme nous sommes un syndicat, ce n'est pas à nous de fournir l'équipement, c'est aux employeurs.
    C'était à tel point que, cette semaine, nous avons fait livrer au gouvernement 100 000 masques, et nous en attendons 500 000 autres la semaine prochaine. Nous les avons achetés pour faire un pied de nez au gouvernement Legault, même s'il a fait de bonnes choses et même si de bonnes mesures ont été mises en place.
    Comment un syndicat a-t-il été capable de se procurer plus d'un demi-million de masques en sept ou dix jours, alors qu'il ne disposait pas de statistiques d'approvisionnement?
    Si, depuis trois semaines, le gouvernement savait exactement la quantité de matériel de protection individuelle qu'il détenait, comment se fait-il que ces commandes n'aient pas été faites avant?
    Votre deuxième question cherchait à savoir si des professionnels en soins de santé avaient travaillé sans équipement de protection individuelle. La réponse est oui, absolument. Nous ne sommes pas surprises qu'il y ait eu des éclosions de cette importance dans les CSHLD. Nos membres nous criaient ce besoin.
    Sur le site Web de la FIQ, il y a la page « Je dénonce », où on trouve des témoignages sur les conditions de travail. Les soins à domicile et les CHSLD sont les deux milieux où les besoins sont les plus criants et où les gens n'avaient pas de matériel. En soins à domicile, les travailleuses partaient pour voir 12 patients avec seulement un masque. En CHSLD, il n'y en avait pas du tout, à moins que le patient ait reçu un diagnostic positif de COVID-19. Pourtant, il peut y avoir une période avant le diagnostic durant laquelle il est possible de propager le virus. Donc, oui, cela a été problématique.
    Il y a des chercheurs de l'Université Duke qui prétendent que, avec un processus de stérilisation, les masques N95 pourraient être réutilisés.
    J'ai bien compris que ce n'était pas votre premier choix, mais pensez-vous que, effectivement, dans un cas de pénurie, cette stérilisation serait valable? Serait-ce efficace?
     Je ne suis pas une experte, mais il faut bien comprendre qu'il est bien indiqué que ces masques sont jetables et, idéalement, à usage unique. À cause de la pénurie, on essaie de mettre en place toutes sortes de moyens dont l'efficacité n'a pas été prouvée. Au Québec, l'Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail du secteur affaires sociales, l'ASSTSAS, et l'Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail, l'IRSST, sont complètement en désaccord sur cette désinfection.
    Ensuite, les masques ne viennent pas tous de la compagnie 3M, mais celle-ci a publié un communiqué dans lequel elle a dit qu'elle étudiait la désinfection depuis plusieurs années et qu'aucune méthode n'avait pu remplir ses quatre critères relatifs à la filtration, aux élastiques et au matériel. Aucune méthode n'a donc été approuvée. La compagnie 3M essaie de faire cela depuis plusieurs années.
    Certains employeurs du Québec veulent commencer à désinfecter les masques, mais avant d'en arriver là — encore une fois, je ne suis pas une experte —, nous préconisons le port prolongé du N95. Si la professionnelle en soins doit entrer quatre ou cinq fois dans une chambre de soins intensifs, bien évidemment, elle ne pourra pas prendre cinq masques différents. Nous comprenons cela. Si la technique utilisée pour enlever son masque et le remettre est adéquate, nous recommandons à l'infirmière ou à l'inhalothérapeute de reprendre le même masque pour un quart de travail complet, plutôt que d'utiliser des masques désinfectés selon une méthode dont l'efficacité n'a pas été prouvée.
    Je vous remercie, madame Lapointe.
    Monsieur le président, est-ce qu'il me reste encore du temps?
    Merci, monsieur Thériault.

[Traduction]

    Votre temps est écoulé. Vous avez pris une minute de plus.
    C'est maintenant au tour de M. Davies.
    Monsieur Davies, vous avez six minutes.
(1230)
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
    Ma première question s'adresse à l'Association canadienne de santé publique.
    Dans un article du 30 mars paru sur CBC News, monsieur Culbert, vous a signalé que si les citoyens étaient mieux informés au sujet de l'éclosion de COVID-19 dans leur communauté respective, il leur serait plus facile de suivre les conseils des autorités de la santé publique. Cependant, de nombreux professionnels de la santé au pays nous disent que les données relatives à la COVID-19 ont une valeur discutable en raison des faibles taux de dépistage et des retards dans la production des résultats. Ils soulignent également que les données ne sont pas recueillies, compilées ou présentées de manière uniforme dans l'ensemble du pays, ces données ventilées ne sont pas toujours fournies, et les stocks d'équipement médical et d'équipement de protection individuelle, EPI, sont souvent exclus des rapports.
    À votre avis, l'Agence de la santé publique du Canada devrait-elle exiger que des protocoles normalisés en matière de production de rapports soient mis en place à l'échelle du pays?
    Il serait formidable si l'agence avait le pouvoir d'imposer une telle exigence, mais elle ne l'a malheureusement pas. C'est l'une de nos revendications dans le cadre de cette demande visant à instaurer une loi fédérale qui conférerait au gouvernement fédéral un rôle plus important pour coordonner les efforts en santé publique au pays.
    Le manque de données simplifiées dans l'ensemble du pays est un problème persistant. Nous connaissons les ventes d'alcool le lendemain, mais nous ne savons pas quelles seront les répercussions de l'alcool, par exemple, dans 10 ans. C'est le même principe pour l'éclosion de COVID-19. Il y a un manque d'uniformité et nous constatons que c'est la raison pour laquelle le gouvernement fédéral a dû attendre jusqu'à aujourd'hui pour communiquer ses données sur les projections.
    Merci.
    Je ne sais pas trop à qui je devrais adresser cette question, alors n'importe quel témoin peut y répondre.
    L'OMS déclare que nous devons miser sur le dépistage, et je pense qu'il y a clairement un consensus au pays selon lequel le dépistage, la localisation et l'isolement sont des facteurs clés pour nous aider à gérer la crise liée à la COVID-19.
    Ma question porte sur les trousses de dépistage à partir de sérum sanguin. Je crois savoir que ces trousses sont fabriquées au Canada, et qu'elles produisent très rapidement des résultats et peuvent au moins confirmer si une personne a été exposée au virus. Je sais que ces trousses ont été approuvées par les États-Unis et l'Union européenne et qu'elles sont utilisées dans de nombreux pays, mais si je ne m'abuse, Santé Canada n'a pas encore approuvé l'utilisation de ces trousses de dépistage au Canada.
    Devrions-nous rendre ces trousses de dépistage à domicile à partir de sérum sanguin plus facilement accessibles pour pouvoir obtenir des données plus exactes sur les personnes qui ont été exposées au virus au Canada?
    Si l'un de vous veut répondre à la question, n'hésitez pas à le faire.
    Je ne peux pas me prononcer sur les points précis que vous soulevez, mais l'Organisation mondiale de la Santé est un partenaire très fiable et évolué en matière de santé dans le monde.
    J'ai l'impression que c'est probablement une question que le Comité voudra examiner et sur laquelle il voudra obtenir des précisions de Santé Canada pour déterminer la raison pour laquelle il n'approuve pas l'utilisation de ces trousses et les conditions nécessaires pour qu'il l'approuve. À la lumière d'expériences passées, je sais que nos hauts fonctionnaires à Santé Canada sont des hommes et des femmes très estimés qui adhèrent à des normes très élevées. Je pense que nous voudrons entendre leur réponse pour connaître les motifs pour lesquels ces trousses ne sont pas approuvées et la façon dont ce type de dépistage pourrait être instauré. J'estime que le dépistage rapide est l'enjeu le plus important.
    Merci, monsieur Dingwall. Vous nous avez fourni une bonne question à poser aux représentants de Santé Canada à leur prochaine comparution, car il semble un peu incongru que nous ne puissions pas utiliser cette technologie dans notre propre pays tandis que des tests de dépistage fabriqués au Canada sont utilisés partout dans le monde.
    Monsieur Dingwall, je veux vous adresser ma prochaine question.
    Nous savons qu'après l'épidémie de SRAS en 2006, une enquête exhaustive a été réalisée et un rapport a été rendu public par le juge Campbell, que certains qualifient depuis 14 ans de guide pour savoir comment gérer une pandémie semblable à celle du coronavirus. En fait, ce rapport en 2006 a fait état qu'il n'y a plus d'excuses pour que les gouvernements et les hôpitaux soient pris au dépourvu et que les professionnels de la santé ne disposent pas du niveau de protection le plus élevé, à savoir la formation et l'équipement adéquats.
    Il y a d'innombrables histoires au pays qui prouvent que les gouvernements et les hôpitaux ont été totalement pris au dépourvu et que nos travailleurs de la santé de première ligne souffrent d'une pénurie alarmante d'équipement de protection individuelle. Nous savons qu'en 2010, une vérification fédérale a relevé des problèmes avec la gestion de la réserve nationale d'urgence d'équipement médical, et qu'en 2018, une évaluation de l'éclosion de grippe H1N1 a révélé que le Canada était aux prises avec une pénurie de respirateurs.
    Monsieur Dingwall, j'aimerais savoir si vous, qui avez beaucoup d'expérience au Cabinet, pouvez-vous nous éclairer sur la façon dont nous pouvons aller de l'avant pour nous assurer que dans 10 ou 14 ans, nous ne tiendrons pas cette même conversation. Comment pouvons-nous tirer des leçons de l'éclosion actuelle et nous assurer de suivre les étapes qui ont été définies? Nous ne l'avons clairement pas fait après 2006.
(1235)
    C'est une excellente question, et permettez-moi d'y répondre en deux temps.
    D'abord, je pense que de nombreux gouvernements, tant au niveau fédéral qu'au niveau provincial, ont donné suite aux recommandations relatives au SRAS. Là où je pense que nous avons failli à la tâche en tant que société a été notre incapacité d'incorporer dans une loi les obligations des parties qui participent au processus. Par exemple, à l'échelle provinciale, en vertu des codes du travail standards, et à l'échelle fédérale, en vertu du Code du travail, pour ceux qui administrent la santé des Autochtones, les obligations légales sont très vagues relativement à une pandémie. Dans certaines provinces ou dans certains territoires, elles sont littéralement inexistantes. Toutefois, nous devons renforcer ces obligations relatives aux pandémies que l'État doit prévoir, que ce soit pour la sécurité de nos travailleurs, pour des communications rapides ou pour une série d'autres facteurs. Je pense que si nous incorporons ces obligations dans une loi, les gens seront alors tenus de les respecter. Je pense qu'il devrait y avoir des lois d'ouverture, en partie pour veiller à ce que notre plan de lutte en cas de pandémie soit passé en revue tous les trois ans.
    Dans les dispositions relatives à la santé et à la sécurité au travail de nombreuses provinces, il est question d'une pandémie, mais le renvoi est très court et la définition est très inexacte pour expliquer les obligations de l'État à cet égard. J'examinerais ces dispositions pour voir ce qu'elles prévoient pour en faire une obligation législative par opposition à une recommandation d'une commission donnée.
    Merci, monsieur Davies.
    Nous allons commencer notre deuxième série d'interventions avec M. Webber.
    Monsieur Webber, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier les témoins de comparaître devant notre comité. Je sais que vous êtes probablement plus occupés qu'à l'habitude, alors nous vous sommes très reconnaissants du temps que vous nous accordez.
    Ma question s'adresse au Dr Naveed Mohammad, d'Osler.
    Docteur Mohammad, je suis en train de consulter le site Web d'Osler, où l'on peut lire ce qui suit:
Dans le cadre des préparations pour veiller à ce que le centre hospitalier [Osler] soit en mesure de dispenser des soins d'urgence à un nombre accru de patients dans les semaines à venir, une aire de triage temporaire est en train d'être mise sur pied à l'hôpital civique de Brampton et à l'hôpital général d'Etobicoke. Les structures temporaires font partie des efforts de préparation accrus du centre Osler qui sont prévus dans son plan de lutte en cas de pandémie.
Les structures de triage temporaires des services d'urgence, qui demeureront vacantes jusqu'à ce qu'on en ait besoin, peuvent être utilisées pour offrir des ressources additionnelles aux services d'urgence d'Osler, au besoin. Elles offriront un espace consacré au triage des patients pouvant avoir besoin de soins d'urgence et assureront la sécurité des patients qui ne sont pas atteints de la COVID-19.
    Docteur Mohammad, je veux vous faire part également d'une lettre d'un médecin de ma circonscription. Il s'agit d'un court message du Dr Colum Smith dans lequel il fait les déclarations suivantes:
[...] Je ne peux tout simplement pas croire que les hôpitaux locaux reçoivent des patients qui font de la fièvre dans leurs services d'urgence [...]
Nous devons ouvrir sans tarder des installations « destinées uniquement » aux patients qui font de la fièvre [...]
Les patients qui sont atteints de fièvre ou qui présentent d'autres signes ou symptômes de l'infection [COVID-19] doivent faire l'objet d'un triage à l'entrée principale de nos hôpitaux et être dirigés vers une aire d'évaluation distincte [...]
    Docteur Mohammad, puisque le centre Osler a mis sur pied une installation temporaire de la sorte, cela ne devrait-il pas être une pratique courante dans l'ensemble du système hospitalier au pays?
(1240)
    Je vais répondre à votre question de deux façons. Premièrement, tout dépend de la configuration et de la capacité d'isolement du service d'urgence. Autrement dit, chaque hôpital qui compte un service d'urgence a différents types de salles. Nous avons des salles que nous appelons des chambres d'isolement qui ont une pression négative, ce qui signifie que l'air qui y circule est aspiré hors de la chambre. Il y a une salle de bain distincte pour le patient afin qu'il n'ait jamais à quitter la chambre, ainsi qu'une antichambre où l'on peut se changer avant d'entrer dans la pièce pour mettre l'EPI.
    Au centre Osler, à la lumière de notre expérience avec le SRAS — nous étions l'un des sites désignés pour le traitement du SRAS — et des leçons que nous avons tirées de cette expérience, et en raison du fait que nous sommes situés à proximité de l'aéroport, nous avons un système en place à notre service pour que si un patient présente des symptômes grippaux, il fasse l'objet d'un triage dans cette aire distincte. Nous avons installé une tente à l'extérieur à cette fin à chaque site, pour que si le nombre de nos patients atteints de la COVID devenait si élevé que nous devions mobiliser l'ensemble du service d'urgence, les patients qui ne sont pas atteints de la COVID puissent être examinés dans la tente.
    Si un hôpital n'a pas les mêmes capacités que nous, il lui incombe de mettre sur pied des structures comme celle-là, le plus tôt possible, ou de travailler avec sa communauté pour que certains hôpitaux reçoivent un type de patient et d'autres hôpitaux reçoivent un autre type de patient.
    Nous avons le privilège d'avoir trois installations. Nous sommes une société de trois hôpitaux. Nous avons discuté de la possibilité qu'une installation reçoive uniquement les patients atteints de la COVID. Nous ne sommes pas encore rendus là, mais pour répondre à votre question, oui, je suis d'accord que les gens devraient intervenir plus rapidement. Toutefois, tout dépend de la capacité d'accueil de l'établissement.
    Je vous remercie de la réponse, docteur Mohammad, et du travail que vous faites en première ligne. Je vous en suis très reconnaissant.
    Monsieur Culbert, j'ai une question semblable qui porte sur vos observations concernant les pratiques actuelles dans le système canadien de soins de santé. Votre organisme devrait-il envisager de faire pression sur le gouvernement, notamment pour le financement de zones de triage partout au pays?
    Je vous remercie de la question.
    En réalité, notre organisme se concentre beaucoup plus sur le volet du système de santé en amont en cherchant d'abord à éviter que les gens se retrouvent dans ces systèmes de triage.
    Je tiens à souligner, au sujet de la question précédente, que le rapport du juge Campbell portait sur l'Ontario. Si vous regardez les recommandations, la plupart d'entre elles ont été appliquées en Ontario.
    C'est le Dr David Naylor qui a rédigé le rapport fédéral, et bon nombre des recommandations n'ont pas encore été pleinement mises en œuvre.
(1245)
    Très bien. Merci de la réponse.
    Merci, monsieur Webber.
    Nous passons maintenant à M. Fisher.
    Monsieur Fisher, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier chacun d'entre vous d'être ici. Au comité de la santé, nous sommes privilégiés de pouvoir entendre des gens brillants, semaine après semaine.
    Monsieur Culbert, la modélisation n'est pas une question de données, mais les données servent à la modélisation. Aujourd'hui, la Dre Tam et le Dr Njoo ont présenté une modélisation fondée sur les meilleures données qu'ils ont pu obtenir des provinces et des territoires. J'aimerais avoir vos observations sur cette modélisation et sur les mesures, efficaces ou non, que tous les ordres de gouvernement ont imposées aux citoyens canadiens.
    Par ailleurs, dans quelle mesure les actions individuelles des citoyens canadiens sont-elles importantes?
    Vous avez raison de dire que la modélisation est utile, car elle permet au système d'anticiper ce qui pourrait se produire à l'avenir. Ce n'est absolument pas une science exacte, puisque de nombreuses variables peuvent avoir une incidence sur l'évolution des chiffres.
    Comme je l'ai dit dans mon exposé, je persiste à croire que le changement de comportement que nous observons chez les Canadiens est probablement le facteur le plus important. Ce n'est pas le seul, mais c'est certainement le plus important. Si nous maintenons l'éloignement physique et le télétravail — toutes ces mesures — pour que les gens restent en santé, c'est d'abord pour éviter que les gens ne se retrouvent à l'urgence. Si nous réduisons le nombre de personnes infectées, nous réduisons le nombre de personnes qui tombent gravement malades et par conséquent le nombre de personnes qui aboutissent aux soins intensifs.
    Parlons brièvement de l'EPI. Normalement, les commandes, l'entreposage et la distribution aux autorités sanitaires relèvent des autorités sanitaires ou des gouvernements provinciaux et territoriaux.
    Que pensez-vous de ce que fait le gouvernement fédéral actuellement, que ce soit pour l'approvisionnement rapide ou les investissements pour aider les entreprises canadiennes à se convertir pour fournir à nos extraordinaires travailleurs de la santé du pays de l'EPI fabriqué au Canada?
    Je pense que fondamentalement, le gouvernement met tout en œuvre pour fournir la plus grande quantité d'EPI possible aux diverses collectivités.
    Cela nous ramène à la question de la réserve nationale de secours et à la manière dont elle est gérée. À cet égard, je pense qu'une collaboration plus étroite entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux est essentielle, car avoir une réserve nationale d'équipements avec dates de péremption est extrêmement coûteux. Nous pourrions conclure des accords réciproques avec les provinces et les territoires de façon à leur vendre ces équipements chaque année. On pourrait ainsi renouveler continuellement la réserve d'urgence et éviter de gaspiller complètement des ressources en les jetant tout simplement une fois la date de péremption dépassée.
    Je pense qu'une plus grande collaboration nous permettrait d'améliorer ce système de manière spectaculaire.
    En effet, et M. Dingwall a parlé de la collaboration entre l'ASPC et les différentes autorités de la santé, et je suis d'accord avec lui sur ce point.
    Nous parlons toujours de l'évolution rapide de la pandémie. Pouvez-vous nous parler brièvement de son évolution, de la réaction du milieu scientifique et peut-être de celle du gouvernement? Quelles leçons avons-nous retenues, ou devrions-nous retenir, de pays qui, peut-être, sont un peu en avance sur nous par rapport à la pandémie?
    Certainement. Je vais faire une comparaison avec le SRAS.
    Nous ne savions que très peu de choses sur le SRAS. Jusqu'à la fin de la crise, nous ignorions qu'il était aéroporté. Dans le cas de la COVID-19, cependant, le séquençage génomique a été fait extrêmement rapidement. Nous avons une variété de tests de diagnostic et nous les avons rendus accessibles en très peu de temps. Toutefois, contrairement à ce qui s'est passé avec le H1N1, nous ne sommes pas en mesure de produire un vaccin dans un délai aussi court, car il s'agit d'un nouveau coronavirus. Nous ne l'avions jamais vu dans notre environnement.
    La collaboration internationale en matière de partage des connaissances a été formidable. Les maisons d'édition internationales qui publient les revues scientifiques du monde entier ont été très ouvertes à la communication des données et même des documents prépubliés. Je pense que les progrès scientifiques pendant cette période ont été énormes, mais nous sommes toujours en mode rattrapage, parce que nous sommes en situation inconnue jusqu'ici avec ce virus précis.
(1250)
    Me reste-t-il du temps, monsieur le président?
    Il vous reste 20 secondes.
    Dans ce cas, j'ai une petite question.
    Monsieur Culbert, le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer dans les soins de santé des Canadiens, surtout dans le contexte de cette pandémie, mais pouvez-vous confirmer que les lignes directrices pour les travailleurs de la santé relèvent généralement des provinces et des territoires?
    En général, oui. Dans une situation d'urgence comme celle-ci, il incombe à l'Agence de la santé publique du Canada d'élaborer des lignes directrices supplémentaires afin d'assurer une certaine cohérence dans l'ensemble du pays.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Fisher.

[Français]

     Monsieur Berthold, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Culbert, ma question sera assez directe. Vous avez déclaré dans une entrevue à CBC que le fait que les gens en connaissent davantage au sujet d'une pandémie les aide à prendre les bonnes décisions pour leur propre protection. Considérez-vous que le Canada a fait connaître assez rapidement l'ampleur de la pandémie et des risques, alors que c'est seulement aujourd'hui que nous avons pris connaissance des effets prévus sur la santé?
    Ne trouvez-vous pas que le Canada aurait dû agir beaucoup plus rapidement pour faire connaître les risques à la population?

[Traduction]

    À mon avis, le gouvernement a été extrêmement transparent en ce qui concerne le nombre de cas et le type de propagation qu'on observe.
     Je pense que tout le monde veut voir les chiffres de modélisation, mais ils sont si variables, en fonction de la façon dont nous réagissons en tant qu'individus. Il est bon pour le système de savoir ce à quoi nous pouvons nous attendre, mais cela peut aussi susciter la peur chez beaucoup de gens. C'est une période de grande anxiété pour les Canadiens, c'est pourquoi nous devons fournir les chiffres de modélisation avec beaucoup de soin.
    Cependant, je pense que le gouvernement a fait preuve de transparence dans...

[Français]

    Monsieur Culbert, dans une entrevue, vous avez dit ceci:

[Traduction]

    « Avoir plus de renseignements sur l'évolution de la pandémie dans leur collectivité pourrait inciter les gens à suivre les conseils des autorités de la santé publique. »

[Français]

    Je pense que les gens ont été lents à réagir et à se protéger. On ne peut pas dire une chose et son contraire. Plus tôt les gens sont mis au courant de la menace, plus tôt ils vont se protéger.

[Traduction]

    Je crois que la question qui m'était posée lors de l'entrevue de la CBC à laquelle vous faites référence portait sur la quantité d'information qui devait être communiquée, comme le nombre de cas et la précision des informations, dans un contexte de protection de l'anonymat des personnes et des renseignements médicaux confidentiels. Je disais que les informations devraient être communiquées autant que possible, mais sans compromettre la confidentialité. Je ne pense pas que ce soit incohérent par rapport...

[Français]

    Je suis d'accord avec vous. Merci beaucoup, monsieur Culbert.
    J'aimerais maintenant poser une question à Mme Lapointe.
    Madame Lapointe, tout d'abord, je lève mon chapeau à tout le personnel de la santé qui travaille présentement dans les hôpitaux. Vous êtes effectivement au cœur de la crise, c'est important de le dire. J'ai été absolument estomaqué d'entendre que des gens travaillaient encore sans protection dans les établissements, particulièrement dans les CHSLD, où il y a des cas d'éclosion. On voit que le problème est dans ces établissements.
    On travaille actuellement à des technologies qui permettraient de fabriquer des appareils électroniques pour protéger les travailleurs de la santé. Chaque travailleur de la santé pourrait avoir son propre appareil pour filtrer l'air qu'il inspire et expire.
    Pensez-vous que le gouvernement devrait envisager cette solution, étant donné que nous avons appris aujourd'hui que la situation pourrait durer encore plusieurs mois?
     Comme je l'ai dit plus tôt, les lignes directrices de la santé publique au Québec ne cessent de changer. Il a été déterminé qu'il existait une transmission communautaire soutenue à la grandeur du Québec. C'était problématique, car dans les jours précédents on prétendait qu'il existait une transmission communautaire provinciale, mais, dans les documents de l'INSPQ, il y avait toujours un paragraphe qui indiquait qu'il fallait tenir compte de l'épidémiologie régionale. Nous étions toujours dans une zone grise.
    Depuis hier, l'INSPQ a changé son discours quant à la transmission communautaire. Effectivement, le masque chirurgical ou le masque de procédure — je ne parle pas du N95 — est requis pour tous les professionnels et les travailleurs de la santé qui sont à moins de deux mètres d'un patient ou d'un collègue, qu'il soit suspect ou testé positif ou négatif. C'est tout nouveau. Il a fallu une transmission communautaire provinciale pour protéger adéquatement les travailleurs.
    Il reste toujours le dilemme à savoir...
(1255)
    S'il existait une solution technologique permettant à chaque employé d'avoir son propre masque et qu'il ne soit pas obligé de reprendre des masques des autres, des masques jetables désinfectés, devrions-nous choisir cette option?
    Ce serait une option possiblement fort intéressante, mais encore faut-il déterminer le type d'équipement. Nous demandons seulement des masques N95 et nous ne les avons pas. Vous comprendrez que j'attendrai que la technologie arrive avant de l'envisager.
    Je vous remercie, madame Lapointe.
    Monsieur le président, est-ce que j'ai encore du temps de parole?

[Traduction]

    Oui, vous avez 20 secondes.

[Français]

    D'accord.
    Je vais en profiter pour remercier tous les membres du personnel de la santé de leur travail extraordinaire. Je les remercie d'être là, au front, pour nous.
    Je pense que l'ensemble des députés de tous les partis reconnaissent votre beau travail. Nous sommes là pour vous aider et soutenir toutes vos demandes, si vous en avez.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Berthold.

[Traduction]

    Nous revenons à Dre Jaczek.
    Docteure Jaczek, la parole est à vous pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. J'espère que vous m'entendez; je n'ai pas de microphone.
    Ma première question s'adresse à M. Culbert.
     Si je vous ai bien entendu, monsieur Culbert, vous avez dit qu'il y a eu des critiques selon lesquelles les mesures de santé publique n'étaient peut-être pas assez strictes au début de la pandémie. Vous avez également mentionné la difficulté de changer le comportement des gens: il est possible que les gens ne respectent pas les mesures de santé publique s'ils ne sont pas convaincus qu'il existe un risque réel.
    Je me demandais si vous pouviez nous en dire plus à ce sujet, et peut-être nous parler des discussions qui ont eu lieu entre l'Agence de la santé publique du Canada, votre organisme et les diverses autorités provinciales de la santé publique. Pourriez-vous nous donner une idée de la teneur des discussions?
    Avec plaisir. Je vous remercie de la question.
    Je tiens à préciser que dans bien des cas, étant donné que nous sommes une organisation non gouvernementale, nous ne sommes pas au courant des discussions dont vous parlez, même si je copréside, avec la Dre Theresa Tam, le Forum des professionnels de la santé de l'ACSP, qui regroupe les associations de professionnels de la santé. Nous recevons des documents d'information et nous avons des consultations avec l'Agence toutes les deux semaines sur un large éventail de questions, et nous avons pu donner notre avis sur certains documents d'orientation.
    Il est difficile d'inciter les gens à modifier leurs comportements. Lorsqu'une épidémie commence à l'autre bout du monde, il y a un sentiment d'isolation; il y a « eux » et il y a « nous ». Puis, des cas surviennent en Colombie-Britannique ou à Toronto. Cela demeure lointain. Il faut donc lentement changer la perspective des gens pour qu'ils passent au « nous », mais cela prend du temps et des preuves. Il faut prouver aux gens que c'est sérieux. Souvent, c'est là que les autorités de la santé publique sont remises en question. Si nous connaissons du succès, il ne se passe rien de mauvais, mais si nous échouons — si nous ne parvenons pas à changer le comportement des gens, si nous n'adaptons pas nos systèmes pour l'avenir — de mauvaises choses se produisent. C'est un processus.
     Je vais en rester là pour l'instant.
    Vous avez indiqué qu'il serait souhaitable d'avoir un cadre national en matière de santé publique pour l'ensemble du pays. Il a été question d'accorder au gouvernement fédéral le pouvoir d'exiger une coordination des efforts de collecte des données. Ainsi, au lieu d'un système dans lequel les données seraient communiquées sur une base volontaire, le gouvernement fédéral aurait le pouvoir de collecter des données à l'échelle nationale.
    Quelles mesures supplémentaires souhaiteriez-vous voir dans ce cadre national pour assurer une meilleure coordination des activités entre le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires?
(1300)
    Eh bien, l'établissement de normes nationales de santé publique pour tout le pays serait sans doute une formidable retombée d'une situation de ce genre. Prenons l'exemple de l'immunisation: les calendriers d'immunisation varient d'un endroit à l'autre. Il serait donc possible de réunir toutes les parties afin d'établir un calendrier d'immunisation harmonisé, avec le financement nécessaire pour aider les provinces et territoires à adopter ce calendrier. Essentiellement, il s'agit de créer une vague pour améliorer uniformément la santé et le bien-être de tous les Canadiens et combler les lacunes, le cas échéant, dans l'ensemble du pays.
    La capacité des gouvernements provinciaux et territoriaux de collecter les données dont le gouvernement fédéral a besoin est un problème récurrent. Toutefois, on a toujours l'impression qu'on hésite parfois à communiquer des renseignements sur les problèmes existants, puisque ce sont malheureusement les politiciens qui prennent les décisions quant aux renseignements à communiquer. Il y a donc des défis à relever. Je pense qu'avec un cadre national, on pourrait améliorer considérablement les choses.
    Je pourrais peut-être poser la question à l'honorable David Dingwall, étant donné son expérience à titre d'ancien ministre de la Santé.
    D'après la réponse de M. Culbert, que pensez-vous de l'idée d'établir un cadre national en matière de santé publique?
    Je crois que le choix du moment sera d'une grande importance. Je crois aussi que les divers intervenants vous diraient que l'établissement de normes nationales claires, adoptées par tous, aiderait grandement le personnel de première ligne.
    Aussi, je crois qu'il faut établir des obligations réglementaires, comme je l'ai fait valoir en réponse à une question précédente. Je ne crois pas qu'on puisse établir un simple cadre: il faut qu'il ait du mordant sur le plan juridique, pour que les gens rendent des comptes régulièrement. C'est bien de mettre sur pied un cadre, mais il faut aussi s'assurer que les stocks sont renouvelés, que l'équipement est à jour, que les gens sont formés, et que nous connaissions les meilleures pratiques mondiales ainsi que les pratiques de l'Organisation mondiale de la Santé. De ce point de vue là, je dis oui au cadre national, mais il doit avoir du mordant et cela passe par les obligations réglementaires des parties.
    Merci, madame Jaczek.
    Monsieur Thériault, vous avez la parole.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Culbert.
    Vous avez affirmé tout à l'heure que tout se passait comme prévu et que, en ce sens, les mesures devaient être proportionnelles à la menace, parce qu'il pourrait y avoir un faible taux d'adhésion et de soutien aux mesures qui sont prises.
    Pourtant, lorsque le Québec a décrété l'état d'urgence sanitaire, il y avait seulement 17 cas d'infection et aucun décès. Au Canada, il y avait 176 cas et un seul décès. Présentement, le Québec est considéré comme étant l'un des champions des mesures de confinement et du respect du confinement et de l'éloignement social. Nous sommes tout de même les premiers en ce qui a trait au nombre d'infections et de cas, et les décès sont concentrés dans des milieux de vie comme des CHSLD.
    Notamment en ce qui concerne la rationalisation des équipements de protection individuels, comment expliquez-vous qu'après la crise du SRAS nous en soyons arrivés à ne pas pouvoir affronter cette pandémie, avec une réserve nationale déficitaire? Quel rôle que votre association a-t-elle joué, de l'épisode du SRAS à aujourd'hui, pour que nous nous retrouvions dans une telle situation?
(1305)

[Traduction]

    Nous avons certainement tiré de nombreuses leçons de la crise du SRAS et je crois que la situation serait bien pire si nous n'avions pas suivi les recommandations à la lettre. Le personnel de l'Agence de la santé publique du Canada fait un travail colossal et ses efforts en matière de coordination sont immenses.
    Est-ce qu'on a tiré des leçons...

[Français]

     Est-ce que tout se passe vraiment comme prévu en ce qui concerne la pénurie et le niveau de disponibilité des équipements de la Réserve nationale stratégique d’urgence?

[Traduction]

    Pas du tout. Je dirais que notre plus grand échec en matière d'intervention, c'est probablement la réserve nationale d'urgence. Comme je l'ai dit plus tôt, il aurait fallu une collaboration beaucoup plus importante entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux.

[Français]

    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Merci, monsieur Thériault.

[Traduction]

    La parole est maintenant à M. Davies.
    Monsieur Davies, vous disposez de deux minutes et demie. Allez-y.
    Merci, monsieur le président.

[Français]

    Je suis désolé, mais je vais poser ma question en anglais à Mme Lapointe.

[Traduction]

    Madame Lapointe, le nombre de cas de COVID-19 du Québec dépasse largement celui des autres provinces. Selon les chiffres d'aujourd'hui, la province compte 110 cas par 100 000 habitants tandis qu'aucune autre province ne présente plus de 50 cas par 100 000 habitants.
    Pourriez-vous nous dire pourquoi?

[Français]

    Nous pensons que cela est dû en grande partie au nombre de tests qui ont été faits. Au Québec, nous avons été à l'avant-garde pour ce qui est de tester les gens. C'est probablement la raison principale pour laquelle nous avons autant de cas positifs.

[Traduction]

    Merci.
    L'une des observations profondes du rapport Campbell sur le SRAS était la suivante:
Lorsque nous ferons de nouveau face à une crise associée à une maladie infectieuse, il faudra que le principe de précaution dicte l'élaboration, la mise en œuvre et la surveillance des procédures relatives à la sécurité des travailleurs, des lignes directrices, des processus et des systèmes.
    Selon de nombreuses personnes, l'Agence de la santé publique du Canada a trop tardé avant de réagir et a été trop prudente... elle a mis trop de temps à fermer les frontières et à restreindre les déplacements, à reconnaître la transmission communautaire et la transmission asymptomatique, à recommander le port du masque pour réduire les possibilités de transmission. Vous avez dit qu'elle avait peut-être trop tardé à reconnaître la possibilité de transmission par voie aérienne.
    Qu'en pensez-vous, madame Lapointe? Est-ce qu'on applique pleinement le principe de précaution ou est-ce qu'on tarde trop à adopter les mesures qui pourraient ralentir la propagation du virus?

[Français]

    Je vais parler pour les professionnelles en soins que nous représentons. Nous avons été lents pour ce qui est de la protection. C'est un constat que nous faisons sur le terrain depuis plusieurs semaines.
    En ce qui concerne les contaminations dans les CHSLD, à partir du moment où on a mis fin aux visites familiales, il est possible que des professionnels en soins aient contaminé des patients, mais on ne le saura jamais. Il y avait aussi des professionnels en santé qui visitaient plusieurs établissements de santé. Nous sommes en train de corriger cela. Si une personne contaminée et asymptomatique visite deux ou trois établissements, c'est sûr que cela peut occasionner de plus amples contaminations.

[Traduction]

    Merci, monsieur Davies.
    Voilà qui met fin à la deuxième série de questions. Nous passons maintenant à la troisième. Mme Jansen sera notre première intervenante.
    Vous disposez de cinq minutes, madame Jansen. Allez-y.
(1310)
    Je vous remercie de vous joindre à nous aujourd'hui alors que nous tentons de comprendre ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
    Ma première question s'adresse à M. Ian Culbert. Vous avez dit que la Dre Tam avait utilisé une approche progressive en ce qui a trait aux restrictions parce que sinon, les Canadiens n'auraient pas voulu obéir. Il fallait y aller doucement.
    Je vis à une heure de Vancouver environ. Le 21 janvier, j'ai tenu une fête pour le Nouvel An chinois et l'association des arts et de la culture chinois de Langley a fait une très belle présentation. C'était fantastique. Ensuite, le 25 janvier, l'association a annulé une présentation beaucoup plus importante qu'elle devait faire à Langley, en raison de la crise de la COVID. On m'a suppliée de demander au gouvernement d'être plus proactif. Les membres de la communauté se sont mobilisés pour aller chercher les gens qui revenaient de Chine à l'aéroport, pour ne pas qu'ils prennent un taxi. Ils faisaient leur épicerie. Tout cela de façon bénévole.
    Je me demande... Est-ce possible que nous accusions un retard dans la prise des mesures en raison d'une mauvaise évaluation de la volonté des Canadiens à se placer en isolement volontaire?
    Vous parlez d'une communauté qui était très sensible à la situation, puisque ses membres avaient un lien direct avec la Chine et savaient très bien ce qui s'y passait. Je crois que bon nombre de Canadiens ne saisissaient pas l'ampleur de la situation. Ils croyaient que c'était un problème à l'autre bout du monde.
    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse à Linda Lapointe.
    Vous avez parlé des problèmes avec la réserve. Vous avez dit que la réutilisation de l'équipement de protection individuelle avait été une catastrophe. Lors de notre dernière réunion, Mme Linda Silas a dit que c'était absolument épouvantable. À la fin de votre exposé, vous avez dit que le gouvernement avait pris les mesures nécessaires pour aider les travailleurs, ce qui est excellent.
    Est-ce que cela signifie qu'on a mis fin à la réutilisation de l'équipement de protection individuelle? Je ne sais pas ce qui se passe dans l'ouest du Canada.

[Français]

     Non, nous n'avons pas mis fin à la réutilisation de l'équipement. Pour le moment, au Québec, nous n'en sommes pas à la réutilisation de l'équipement, particulièrement en ce qui concerne les masques, mais nous savons que des établissements de santé envisagent cette pratique. Il semblerait qu'un établissement à Québec aurait trouvé un moyen de désinfecter l'équipement. Cependant, nous n'avons pas les méthodes de désinfection que cet employeur compte mettre en place. Pour le moment, nous ne réutilisons et nous ne désinfectons pas l'équipement, mais, si nous venions à en manquer, cela pourrait être une solution.

[Traduction]

    Alors, je ne sais pas exactement ce que vous voulez dire par « prendre les mesures nécessaires ». Je sais qu'ici, en Colombie-Britannique, nous supplions les organismes communautaires et les entreprises de nous donner de l'équipement de protection individuelle. Je crois que ces dons aident, mais c'est difficile de le savoir vraiment.
    Ma troisième question s'adresse au Dr Naveed Mohammad.
    Lors de notre dernière réunion, le Dr Alan Drummond a dit qu’on avait fait fi de certaines leçons. Au début de la réunion, nous avons parlé de la capacité de pointe. Je crois que vous avez clairement établi que, dans votre région, cette capacité passait par l’annulation d’autres interventions médicales. Le Dr Drummond a fait valoir qu’on annulait des opérations pour les cancers.
    Selon lui, il aurait fallu des hôpitaux de campagne pour prendre soin des patients atteints de la COVID de façon distincte, pour continuer de répondre aux besoins habituels. Pourriez-vous nous parler de cela? Vous avez un hôpital de campagne, mais vous annulez des interventions habituelles et nécessaires afin de répondre à la crise actuelle.
    Je vais répondre à votre question en deux temps.
    La capacité de pointe n'est pas un problème nouveau au Canada, en Ontario ou dans le RLISS du Centre-Ouest, dans notre région. La crise de la COVID jette la lumière sur le problème, mais chaque année pendant la saison de la grippe, les hôpitaux du Canada et des États-Unis connaissent d'importants problèmes en matière de capacité d'intervention, ce qui donne lieu à la médecine de couloir. Je crois que c'est la leçon à tirer. Si nous pouvions régler ce problème, ce serait vraiment bien parce que même si nous arrivons à contrôler la COVID, notre capacité de pointe sera encore problématique l'année prochaine et l'année suivante, quand arrivera la saison de la grippe à l'automne.
(1315)
    Donc, vous n'êtes pas d'accord avec l'idée du Dr Drummond de mettre sur pied des hôpitaux de campagne pour isoler les patients atteints de la COVID?
    Je ne suis pas en désaccord avec cela; ce que j'essaie de dire, c'est que d'autres hôpitaux de Toronto établissent des hôpitaux de campagne et que nous étudions la possibilité d'en établir un plus important. Je pense toutefois qu'il est gênant pour un pays industrialisé où souhaite immigrer la majeure partie du monde de devoir utiliser des hôpitaux de campagne pour gérer les pointes annuelles.
    Oui, nous devons avoir recours aux hôpitaux de campagne à l'heure actuelle, mais je crois que le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux doivent travailler ensemble et réaliser que le nombre de lits disponibles pour répondre aux besoins quotidiens de la population est largement en deçà du nombre de lits nécessaires.
    D'accord...
    Merci, madame Jansen.
    La parole est maintenant à M. Kelloway.
    Monsieur Kelloway, vous disposez de cinq minutes. Allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, chers collègues.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui; je remercie aussi tous les travailleurs essentiels du pays.
    Ma première question s'adresse à M. Dingwall.
    Nous savons que le gouvernement lancera un portail sur la santé mentale pour les Canadiens, comme l'a fait valoir la ministre de la Santé lors de conférences de presse. J'aimerais savoir si vos étudiants vous ont parlé de l'impact de la situation sur leur santé mentale. C'est ma première question. J'aimerais aussi savoir si l'université prenait des mesures pour aider les étudiants pendant cette période.
    Je vous remercie pour votre question.
    En ce qui a trait à la santé mentale, nous avons constaté une augmentation importante du nombre d'étudiants qui nous posent des questions, qui ont besoin de réconfort ou d'attention. Le niveau d'anxiété des étudiants est plus élevé qu'avant et nombre d'entre eux ont de la difficulté à se concentrer sur leurs études ou à respecter la distanciation sociale. Ils s'inquiètent à propos de leur famille — où qu'elle soit — et ont un accès restreint aux biens de première nécessité que l'on tient pour acquis.
    Tout cela réuni a un impact réel sur la santé mentale et l'anxiété des étudiants. Par l'entremise de nos services aux étudiants, des consultations avec les représentants des étudiants et de la communication avec les parents, nous tentons de préparer diverses trousses qui abordent les sujets de l'alimentation, des frais de scolarité ou du dialogue constructif.
    Les membres de notre faculté communiquent avec la population étudiante pour...
    Nous sommes actuellement en période d'examens. Les étudiants nous écrivent, alors les membres de la faculté essaient de les accommoder en offrant l'apprentissage à distance. Cela se passe assez bien. Il y a toujours des lacunes, mais la faculté, l'administration et les services aux étudiants déploient des efforts concertés pour aider les étudiants dont la santé mentale est affectée par la situation.
    Merci, monsieur Dingwall.
    Ma prochaine question a trait à l'emploi étudiant.
    Le premier ministre a annoncé de nouveaux changements relatifs au programme Emplois d'été Canada afin de veiller à ce que les étudiants puissent continuer de travailler et acquérir l'expérience dont ils ont besoin en ces temps difficiles. J'aimerais connaître votre opinion à ce sujet et sur l'applicabilité du programme à l'heure actuelle, puisque la définition de l'emploi d'été tel qu'on le connaît est peut-être appelée à changer.
    Comme le savent tous ceux qui ont fréquenté l'université, les étudiants aimeraient travailler pendant l'été afin de payer leurs frais de scolarité et d'assurer leur sécurité financière. Le programme est certainement le bienvenu, mais que vont faire les employeurs? Est-ce qu'ils voudront engager des étudiants s'ils ont dû mettre à pied d'autres travailleurs? Il faudra voir, mais nous accueillons certainement la nouvelle chaleureusement, parce que nous savons que la plupart de nos étudiants veulent travailler pendant l'été afin de se préparer à la prochaine année scolaire. Il faudra voir.
    J'espère que les employeurs — ceux du secteur public et du secteur privé, les organismes gouvernementaux — profiteront de ce nouveau programme annoncé par le premier ministre.
(1320)
    Merci beaucoup.
    Monsieur le président, combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste une minute.
    D'accord. Je vais poser ma dernière question à M. Dingwall.
    Vous avez été député pendant 17 ans, je crois, et aussi ministre de la Santé, comme nous l'avons déjà dit aujourd'hui. Avez-vous vécu une situation comparable lorsque vous étiez au gouvernement ou à la table du Cabinet lorsque vous étiez ministre de la Santé ou des Travaux publics? Bien sûr, la situation actuelle est sans précédent, mais y aurait-il des similitudes avec une situation que vous avez vécue, dont vous pourriez nous parler?
    Pas vraiment. Nous avons vécu la crise du sang contaminé et avons mené une enquête à ce sujet. Nous avons connu l'apparition du sida et avons mis sur pied les programmes de lutte contre le tabagisme, mais je n'ai rien vu de tel que le virus qui a frappé notre pays et le monde entier.
    Si l'on remonte dans le temps et que l'on regarde les études réalisées par l'Organisation mondiale de la Santé sur la variole et d'autres maladies, on se rend compte que la société canadienne est confrontée à une situation assez rare. Je crois que nous allons tirer de nombreuses leçons de cette crise qui nous frappe, et qu'il ne faut pas rater cette occasion.
    On peut parler d'un cadre, de consultations ou de programmes, mais sans des obligations réglementaires pour les particuliers, les fournisseurs et les organismes de soins de santé, cela n'aboutira à rien. Si les gens doivent rendre des comptes au Parlement du Canada et expliquer aux députés ce qu'ils ont fait avec les 250 millions de dollars octroyés pour la recherche ou autre, ils prendront la situation au sérieux.
    Je veux bien qu'on améliore les cadres et les communications, mais sans des obligations réglementaires, nous n'atteindrons pas nos objectifs.
    Merci, monsieur Kelloway. La parole est maintenant à M. Jeneroux.
    Monsieur Jeneroux, vous disposez de cinq minutes. Allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie également les témoins de leur présence, ainsi que leurs associations connexes pour tous leurs efforts de lutte contre cette pandémie.
    Les députés de l'opposition posent des questions difficiles, mais c'est dans le but de mieux appuyer et conseiller le gouvernement actuel et les prochains gouvernements en matière de planification en cas de pandémie. Je vous remercie donc de votre participation.
    Ma première question s'adresse à M. Culbert.
    Corrigez-moi si je me trompe, mais vous avez dit que la réserve nationale d'urgence aurait pu être dans un meilleur état avant la pandémie. Est-ce exact?
    Oui.
     Excellent.
    Suivez mon exposé pendant que je passe en revue la chronologie des événements. Nous avons constaté que, dans une note de service datée du 10 février, on avait conseillé à la ministre de travailler avec les provinces et de les renseigner sur les stocks disponibles seulement sur demande. Le 10 février est survenu, je crois, après la date à laquelle 16 tonnes d'EPI ont été expédiées en Chine.
    Pourriez-vous formuler des observations sur la façon dont nous aurions peut-être pu mieux planifier les choses? Les apparences ne sont peut-être pas très flatteuses lorsque nous parlons d'un meilleur état de préparation des réserves pour affronter l'arrivée éventuelle du virus au Canada.
    Certainement.
    Premièrement, je ne crois pas qu'on ait déjà supposé que la réserve nationale d'urgence permettrait d'alimenter l'ensemble du Canada au cours d'une éclosion de ce genre. Ne perdez pas de vue le fait que le SRAS a touché surtout l'Ontario et la Colombie-Britannique. La grippe H1N1 était un différent type d'éclosion. Par conséquent, les fournitures requises étaient d'un genre différent.
    D'abord et avant tout, nous devons réexaminer ce à quoi la réserve nationale d'urgence devrait ressembler dans les années à venir pour nous permettre de réagir à l'évolution des pandémies.
    Au moment où l'envoi a été fait, je crois qu'on estimait que le risque que les Canadiens couraient était encore très faible et que cet envoi était un moyen de déplacer la première ligne de la pandémie hors du Canada. Si nous pouvions stopper la transmission en Chine, nous serions en mesure de réduire le nombre de cas qui surviendraient au Canada. C'est ce que la politique en matière de santé publique tente d'accomplir: garder l'enceinte de confinement aussi grande que possible.
    Avec le recul, pensons-nous que c'était la meilleure décision à prendre? Peut-être pas, mais je crois qu'elle a été prise de bonne foi, à l'aide des meilleurs renseignements disponibles à ce moment-là.
(1325)
     Merci, monsieur Culbert.
    J'ai une question semblable à poser à Mme Lapointe.
    Je précise de nouveau que les 16 tonnes d'équipements ont été envoyées en Chine des jours avant que la ministre soit informée de cela et qu'elle communique cette information à ses collègues. Je suis curieux de savoir si vous pouvez nous dire ce que vos membres — les infirmiers, les infirmiers auxiliaires et les inhalothérapeutes — pensent des apparences liées à cet envoi et des améliorations qui auraient peut-être pu être apportées à la planification.

[Français]

     Absolument. Je veux bien croire que la décision avait été prise en fonction de la situation du moment, mais on savait très bien que le portrait du 10 février n'allait pas être le même. Les épidémiologistes et les experts ne semblaient pas penser que le Québec en particulier aurait une hausse aussi importante. Selon moi, on n'aurait pas dû prendre de risque. Je comprends qu'on avait le souci de diminuer la propagation, mais on aurait dû au moins s'assurer que nos professionnels en soins de tout le Canada ont au minimum l'équipement nécessaire.
    On se retrouve aujourd'hui avec des professionnels en soins qui n'ont pas été protégés durant les trois dernières semaines. Nous n'en sommes pas encore là, mais, dans les autres pays, environ 14 % des travailleurs de la santé ont été affectés par ce virus et il y a eu des décès, particulièrement en Italie et en Espagne. J'ose espérer qu'il n'y aura pas de décès parmi nos professionnels en soins au Canada, ce serait déplorable.

[Traduction]

    Par curiosité, j'aimerais savoir, madame Lapointe, si votre association a été consultée au sujet de l'un ou l'autre de ces enjeux? La ministre elle-même vous a-t-elle consultés au sujet de la réserve d'urgence?

[Français]

    Non, nous n'avons pas du tout été consultés en ce qui a trait à la réserve nationale. Même à l'échelle provinciale, nous posions régulièrement des questions quant aux quantités d'équipements dans chacun des établissements ou dans leur ensemble. Nous n'avons jamais eu de réponse à nos questions.

[Traduction]

    Merci, monsieur Jeneroux.
    Nous allons maintenant céder la parole au Dr Powlowski.
    Docteur Powlowski, vous avez la parole pendant cinq minutes.
    J'ai une brève question à poser au Dr Mohammad. Soit dit en passant, Woody vous salue.
    Vous avez mentionné le manque de médicaments pour la sédation et l'anesthésie. Je pensais que vous parliez peut-être du Propofol et du Midazolam. Je ne suis pas sûr de savoir de qui relève l'approvisionnement en médicaments. Je crois que, comme toutes les dimensions de la médecine curative, cela relève du gouvernement de l'Ontario. J'estime aussi que le gouvernement fédéral a fait de son mieux et n'a ménagé aucun effort pour obtenir ces médicaments, comme il l'a fait pour toutes sortes d'approvisionnements.
    Savez-vous exactement quelles mesures ont été prises pour tenter d'accélérer l'accès au Propofol ou au Midazolam? Je sais que le Ventolin est un autre médicament qu'il est difficile de se procurer.
    Vous avez raison de dire que les médicaments auxquels je faisais allusion sont le Propofol et le Midazolam. Il y a aussi le fentanyl. Le fait est que, lorsque nous avons été forcés d'administrer des sédatifs aux personnes atteintes de la COVID-19 qui présentaient une détresse respiratoire marquée et de les placer sous ventilation, bon nombre d'entre elles ont été ventilées pendant des périodes beaucoup plus longues qu'elles le seraient habituellement. Par conséquent, cela a non seulement prolongé la période pendant laquelle nous utilisons les médicaments, mais aussi accru le nombre de patients que nous traitons en ce moment dans nos services de soins intensifs.
    Il manque aussi de Ventolin, mais, pour le moment, ce problème existe surtout dans les collectivités. Dans les hôpitaux, notre approvisionnement en Ventolin est bon.
    Nous traitons essentiellement avec nos partenaires habituels. Le ministère de la Santé et ses sources font partie de nos partenaires, mais nous entretenons des relations importantes avec notre chaîne d'approvisionnement et avec les sociétés pharmaceutiques, en raison des grandes quantités de médicaments que nous achetons, à l'instar d'un grand nombre d'hôpitaux de l'Ontario. En ce moment, comme c'est le cas pour les EPI, les fournisseurs ne sont probablement pas capables de produire les biens aussi rapidement qu'il le faudrait, étant donné que le problème est présent à l'échelle mondiale, au lieu de se limiter au Canada et à la Chine, ou à l'Ontario et à la Chine, comme c'était le cas pour le SRAS.
    Je le répète encore une fois, la question est de savoir ce que nous pouvons faire pour nous préparer et pour avoir ces produits sous la main. Je sais que, contrairement aux EPI, les médicaments auront une date de péremption. Par conséquent, il faudra réexaminer la question et chercher un moyen novateur de faire circuler ces médicaments dans nos entrepôts afin que, si jamais un événement comme celui-ci se reproduit, nous soyons beaucoup mieux préparés.
(1330)
     Merci beaucoup. Nous ferons tout ce que nous pourrons à l'échelle nationale pour insister sur ce même enjeu et sur l'accès à ces médicaments.
    J'aimerais changer brièvement de sujet et poser une question un peu théorique à M. Culbert. Il a mentionné que notre approche en matière de santé publique dans le contexte de la crise actuelle a consisté d'abord à tenter de faire des suggestions aux gens, à éduquer le public. Les mesures coercitives ne devaient être utilisées qu'en dernier recours. Je pense que l'Agence de la santé publique du Canada et le ministère de la Santé ont été critiqués peut-être pour la lenteur avec laquelle ils ont pris ces mesures.
    Cependant — et je renvoie cette question aux universitaires et à la communauté de la santé publique —, j'estime que cette approche ne fait que rendre compte des attitudes dominantes des universitaires et de la communauté de la santé publique. Comme j'ai moi-même fréquenté une université un peu spécialisée en santé publique et que j'ai participé à la rédaction de lois sur la santé publique, je crois qu'un incroyable retour de pendule est survenu par rapport à la forte insistance du passé sur l'emploi de mesures coercitives pour contrôler la propagation de maladies infectieuses, sans trop se soucier de porter atteinte aux libertés individuelles. Au fil des ans, en raison du nombre peu élevé de maladies infectieuses, nous sommes devenus beaucoup plus soucieux de faire tout en notre pouvoir pour ne pas empiéter sur les libertés individuelles, et nous hésitons beaucoup à prendre des mesures coercitives, d'une sorte ou d'une autre, pour contrôler la propagation de maladies infectieuses. C'est ce que pensent les universitaires de la santé publique. Même si le gouvernement a été critiqué pour avoir adopté cette approche, elle correspond aux attitudes qui prévalent chez les universitaires de la santé publique et dans les milieux de la santé publique du monde occidental.
    Je vous renvoie la question de savoir si la communauté de la santé publique a commis une erreur à cet égard.
    Je vous remercie de votre question. Je soutiens que certains faits prouvent que les mesures coercitives ne peuvent être utilisées qu'en dernier recours. Par exemple, le fait que les gens atteints de la tuberculose étaient forcés de vivre dans des sanatoriums au début du XXe siècle a eu pour effet de pousser les gens à éviter les autorités de la santé publique, à vivre dans la clandestinité et, en fait, à continuer de propager la tuberculose.
    De plus, au cours des 100 dernières années, l'attitude du public envers la science et les autorités a radicalement changé. Il nous suffit d'examiner le nombre croissant de gens qui hésitent à se faire vacciner ou refusent les vaccins pour savoir qu'on ne peut plus se contenter de dire aux gens ce qu'ils devraient faire. Nous devons les convaincre et les amener à s'engager dans cette voie. Malheureusement, cela requiert du temps, et nous n'avons pas toujours le temps de le faire, mais c'est ce qui fonctionne.
    Merci, docteur Powlowski.
    Nous allons maintenant passer à M. Thériault.

[Français]

     Vous disposez de deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président. Je vais m'adresser à Mme Lapointe.
    En guise de conclusion, je voudrais résumer le message que vous nous lancez aujourd'hui. Si on veut contrer une pandémie aussi virulente en appliquant le principe de précaution en matière de santé publique et de santé et sécurité au travail, cela implique qu'on ne peut pas continuer de précariser et de fragiliser des réseaux de santé par manque de financement. Un financement adéquat serait particulièrement utile pour les services de première ligne, ainsi que pour appliquer le principe de précaution, qui est si important en santé publique.
    Vous nous dites aussi que nous aurions pu être mieux préparés et que le principe de précaution ne doit pas varier selon la quantité d'équipement que nous avons en réserve pour protéger la population. Vous nous avez aussi dit qu'il fallait travailler à cet aspect pour devenir plus indépendants des tractations du marché mondial.
    En fin de compte, vous souhaitez que nous ne sortions pas de cet épisode en mettant des recommandations de côté comme on l'a fait après l'épisode du SRAS, alors qu'on avait manqué de rigueur.
(1335)
     Absolument. Ce n'est pas seulement au Québec, c'est comme cela partout au Canada. Les conditions de travail des professionnelles en soins ne sont pas faciles et ce n'est pas seulement en temps de pandémie. En tout temps, elles ont une charge de travail énorme, sans compter la complexité médicale des problèmes des patients et le manque d'effectif.
     Il y a longtemps que nous préconisons d'avoir un ratio d'infirmières pour le nombre de patients adéquat justement pour donner des soins sécuritaires. En contexte normal, nous sommes toujours à court d'effectif. Les professionnelles de la santé font des heures supplémentaires et ne travaillent pas nécessairement dans les meilleures conditions. C'est particulièrement le cas en temps de pandémie alors que la convention collective est suspendue. Nous envoyons nos professionnelles d'un centre d'activités à un autre et nous ne vérifions pas systématiquement si elles ont l'expertise nécessaire ou s'il s'agit de la priorité de leur centre d'activités. Nous faisons du grand n'importe quoi avec nos professionnelles en soins. Cela ne contribue en rien à l'attraction et à la rétention des professionnelles en soins.
     À la fin de cette crise, il y aura des leurres. Il est fort probable que des gens quitteront la profession. Ils se réorienteront. La situation ne donne pas le goût aux professionnelles de rester ou à la population d'étudier dans ce domaine. Il faut s'y attaquer puisque ce sera problématique à court et à moyen terme.
    Je vous remercie beaucoup.
    Merci, monsieur Thériault.

[Traduction]

     Nous allons maintenant céder la parole à M. Davies.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais mettre l'accent sur les mesures que nous pourrons prendre à l'avenir afin de mieux préparer notre pays pour les années à venir.
    Il est tout à fait clair maintenant que les hôpitaux surpassent régulièrement la capacité d'accueil pour laquelle ils ont été conçus. Je vous fais observer que l'hôpital de Brampton, où Dr Mohammad travaille, a été construit pour accueillir 90 000 patients par année, et il accueille régulièrement 140 000 patients par année. Manifestement, la capacité de nos hôpitaux à gérer des afflux de patients est préoccupante. Nous sommes forcés d'installer des tentes et d'établir des hôpitaux de campagne.
    Monsieur Culbert, vous avez parlé du sous-financement chronique de notre système de soins de santé, et vous avez mentionné qu'en grande partie, ce système ne relevait pas du gouvernement fédéral. En 2014, le gouvernement fédéral a réduit le facteur de progression du financement des soins de santé, en le faisant passer de 6 à 3 %, et le gouvernement actuel a confirmé cette décision, même si nous savons que les coûts des soins de santé augmentent d'environ 5,2 % par année.
     Est-ce une occasion pour nous d'intervenir? Conseilleriez-vous au gouvernement fédéral de jeter un coup d'oeil à ce facteur de progression et de déterminer si nous devrions le hausser afin qu'il se maintienne au même niveau que l'inflation?
    Mes observations portaient précisément sur le rôle que le gouvernement fédéral joue dans la santé publique, c'est-à-dire sur le plan de la prévention et de la promotion de la santé, même s'il n'a pas de rôle à jouer. Je réaffirme que plus nous garderons les gens en santé et plus nous les maintiendrons hors des hôpitaux, sauf dans les cas d'urgence, plus nous serons susceptibles d'avoir un système de santé viable.
    Manifestement, nous devons examiner l'ensemble du financement, mais nous négligeons systématiquement de financer adéquatement le côté préventif de cet enjeu. Seulement 2 à 5 % du budget global sont consacrés au maintien en santé des gens. Cela signifie que nous mettons l'accent sur la maladie, et non sur la santé.
    Docteur Mohammad, l'une de vos quatre recommandations était que nous allions de l'avant en ce qui concerne le régime national d'assurance-médicaments. Je me demande si vous pourriez nous en dire davantage à ce sujet, et nous expliquer pourquoi vous pensez qu'il importe que le gouvernement mette en oeuvre cette politique.
    Premièrement, à l'heure actuelle, on parle du fait que certains médicaments peuvent être efficaces ou non pour traiter la COVID-19. Je sais que ces résultats sont préliminaires, mais bon nombre de gens qui ont accès à un régime d'assurance-médicaments ou qui ont les moyens de le faire se sont constitué des réserves de ces médicaments. Par conséquent, un grand nombre de personnes vulnérables, dont le taux d'exposition pourrait être le plus élevé qui soit, n'ont pas les moyens d'acheter ces médicaments. Je pense qu'une stratégie de mise en œuvre d'un régime d'assurance-médicaments à l'intention de tous les citoyens et, en particulier, de ceux qui sont les plus démunis revêt une importance primordiale non seulement pour les maladies comme la COVID-19, mais aussi pour l'ensemble des maladies.
    Je sais que, lorsque nous prescrivons des médicaments que les gens doivent prendre deux ou quatre fois par jour, ceux qui doivent payer les médicaments de leur poche les prennent seulement une fois par jour ou prennent la moitié de la dose recommandée afin de les faire durer plus longtemps, parce qu'ils n'ont pas les moyens de les acheter, et ce, en temps normal. Les populations vulnérables sont beaucoup plus exposées à des maladies comme la COVID-19, parce qu'ils sont forcés de travailler pour assurer leur subsistance. Ils s'exposent donc parfois à la COVID-19. Pour ces gens, un régime de ce genre est d'une importance primordiale.
(1340)
     Merci.
    Merci, monsieur Davies.
    Cela met fin à nos séries de questions. J'aimerais remercier tous les membres de notre groupe de témoins de nous avoir, de plein gré, consacré une partie de leur temps et de nous avoir communiqué leurs précieux points de vue. Leurs témoignages nous ont été très utiles.
    Avant de conclure la séance, j'aimerais féliciter le personnel de la Chambre des communes et le personnel technique de leur excellent travail dans le cadre de la première séance que notre comité de la Chambre des communes organise par vidéoconférence. En ce qui me concerne, j'estime qu'ils ont fait un excellent travail. Bravo, et merci.
    Cela dit, la séance est levée.
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