SPRI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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SUB-COMMITTEE ON PRIVATE MEMBERS' BUSINESS OF THE STANDING COMMITTEE ON PROCEDURE AND HOUSE AFFAIRS
SOUS-COMITÉ DES AFFAIRES ÉMANANT DES DÉPUTÉS DU COMITÉ PERMANENT DE LA PROCÉDURE ET DES AFFAIRES DE LA CHAMBRE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 30 septembre 1998
[Traduction]
Le président suppléant (M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD)): Allez-y. Dites-nous ce que vous croyez qu'il nous faut savoir—en cinq minutes.
L'honorable Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Je prendrai moins de cinq minutes.
J'ai fait distribuer aux membres du comité un document expliquant que je voudrais soumettre, pour fins de débat et de vote à la Chambre, l'idée d'une taxe Tobin. L'idée a été présentée pour la première fois par le lauréat du Prix Nobel, M. James Tobin—pas Brian Tobin—dans les années 70. M. Tobin avait proposé d'imposer une taxe minime sur les opérations en monnaies ou devises étrangères afin de tenter de limiter la spéculation sur le marché des devises, cette taxe devant être versée dans un fonds destiné au développement mondial international.
Plusieurs raisons m'amènent à penser que le moment est tout indiqué pour donner suite à cette proposition. Le monde traverse actuellement une crise en matière de devises; on en voit les signes sur le marché asiatique, notamment au Japon, et aussi en Russie. Il a fallu trouver de nouvelles idées sur la façon dont la communauté internationale pourra s'attaquer à ce problème qui a une incidence sur nous tous.
Pas plus tard qu'hier, Alan Greenspan, directeur de la U.S. Federal Reserve, a annoncé une baisse de 0,25 p. 100 des taux d'intérêt afin de tenter d'atténuer certains des problèmes liés à la spéculation et aux marchés des devises dans le monde. Nous avons été témoin il y a quelques jours de l'effondrement de l'important fonds de couverture américain, qui aurait pu avoir une réaction en chaîne si le trésor américain n'était pas intervenu. Le fonds était trop important aux yeux du trésor américain pour qu'il accepte son effondrement.
Il y a tous ces types de problèmes, dont nous sommes tous conscients. Une des idées qui ont été avancées est la soi-disant «taxe Tobin», taxe très minime sur toutes les transactions financières. Il est proposé que la taxe soit fixée à 0,1 p. 100 de toutes les opérations, ce qui équivaut en fait à un dollar sur une opération de 1 000 $ ou à 100 $ sur un condominium de 100 000 $. Il s'agit d'une taxe vraiment minime. D'après les chiffres de 1995, une taxe de ce genre aurait permis de récolter quelque 175 milliards de dollars qui auraient été versés dans un fonds mondial, fonds qui pourrait être utilisé à de multiples fins.
J'estime par ailleurs qu'il faut commencer à parler d'une vision mondiale. Les États-nations perdent très rapidement de leurs pouvoirs, comme nous le savons tous, et bien des décisions qui pouvaient autrefois être prises à l'échelle nationale sont maintenant prises à l'échelle internationale. C'est l'une des raisons pour lesquelles il nous faut un fonds mondial. On a qu'à songer aux problèmes de l'Ukraine et de Tchernobyl et à la nécessité de dépolluer cette partie du monde. On a qu'à penser au développement mondial international pour les pays en développement, ou on pourrait favoriser la création d'emplois et atténuer la pauvreté et la faim. Ce sont là autant de problèmes différents auxquels il faut s'attaquer collectivement.
• 1600
La proposition que je fais aura aussi pour effet d'amorcer en
quelque sorte un débat sur notre vision du monde. Je rappelle au
comité qu'il s'agit ici de sommes d'argent importantes. Dans les
années 70, les opérations financières représentaient environ 18
milliards de dollars par jour. Le montant atteint maintenant
1,3 billion de dollars par jour. Le commerce mondial, soit dit en
passant, se chiffre à 4,3 billions de dollars par an, de sorte que
le montant en cause est énorme.
Le Parti libéral n'est pas là aujourd'hui, mais permettez-moi de vous dire que le ministre des Finances a donné son appui en principe à l'idée d'une taxe Tobin. Je crois que le Cabinet du premier ministre en a fait autant.
M. Martin craignait que l'idée ne recueille pas autant d'appui qu'elle aurait pu dire à cause de l'opposition de l'Allemagne et de la Grande-Bretagne. Depuis, toutefois, il y a eu un changement de gouvernement dans ces deux pays, dimanche dernier en Allemagne et il y a environ un an en Grande-Bretagne, si bien qu'on est maintenant ouvert à l'idée de la taxe Tobin.
C'est quelque chose dont nous devrions discuter. Je ne veux pas en parler trop longuement, monsieur le président, mais il faut en discuter. C'est peut-être une idée à laquelle il serait temps de donner suite. D'ailleurs, à quoi sert-il d'avoir un Parlement si ce n'est pas pour discuter de nouvelles idées et de nouveaux concepts? Divers partis y sont représentés, de même que diverses opinions; soumettons donc la question à la Chambre et voyons ce que les députés en pensent.
Le président suppléant (M. Bill Blaikie): Y a-t-il des questions?
Madame Dalphond-Guiral.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Quand vous parlez de transactions financières, parlez-vous particulièrement de transactions qui se négocient en bourse ou de toutes les transactions, comme des achats d'immeubles?
[Traduction]
M. Lorne Nystrom: C'est là une excellente question et c'est là un des détails dont nous devrions discuter. Pour ma part, j'estime que la taxe devrait s'appliquer, non pas seulement aux opérations boursières, mais à toutes les opérations financières. Il s'agit d'une taxe minuscule. Le taux proposé est de 0,1 p. 100. Cela fait 1 $ sur chaque tranche de 1 000 $. Celui qui irait aux États-Unis et qui dépenserait 1 000 $ aurait à payer une taxe de 1 $ sur ces 1 000 $. Celui qui achèterait un condo dans
[Français]
la Côte d'Azur, dans le sud de la France, pour 100 000 $ canadiens ou...
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: On n'a pas de condo dans le sud de la France pour ce prix-là.
L'hon. Lorne Nystrom: ...un grand chalet, une taxe de 0,1 p. 100 sur 100 000 $ égalerait 100 $. Mais la chose la plus importante est d'avoir une taxe sur la grande spéculation, sur des transactions de milliards et de milliards de dollars.
[Traduction]
De nos jours, la plupart des opérations financières dans le monde se font instantanément par ordinateur. Ce sont des montants énormes qu'on déplace d'un endroit à l'autre. Notre dollar a récemment été victime de spéculations de ce genre, quand les gens ont perdu confiance dans le marché asiatique et dans la stabilité financière de la Russie. On a une grande confiance dans le dollar américain, de telle sorte que les spéculateurs déplacent leur argent pour investir dans le dollar américain avec les conséquences que cela comporte pour nous.
[Français]
C'est une autre raison pour laquelle nous devons avoir des lois ici.
Excusez-moi. Il faut absolument que je parte.
[Traduction]
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Lorne, avez-vous une idée de ce que serait la réaction des marchés et de ceux qui effectuent ces opérations en devises? Seraient-ils prêts à renoncer à ce montant «modeste mais important», ou y verraient-ils une taxe de plus qu'ils refuseraient carrément d'envisager, ou quoi?
M. Lorne Nystrom: En règle générale, leur réaction serait sans doute négative, Deborah. Il s'agit d'une taxe minime qui n'aurait vraiment aucune incidence sur les gens ordinaires, mais je crois qu'ils préféreraient sans doute ne pas avoir à payer cette taxe.
Je tiens à bien insister sur une chose ici, Deborah. Cette proposition ne pourrait donner les résultats escomptés que si elle recueillait l'appui d'un assez grand nombre de pays dans le monde. Il ne serait pas grave que le Zaïre ou le Burundi ne donnent pas leur aval, mais pour que l'idée puisse avoir du mérite, il faudrait que l'Allemagne et les États-Unis soient d'accord.
C'est une idée dont nous, en tant que Canadiens, pourrions faire la promotion. Nous pourrions tenter de montrer la voie pour qu'on adopte cette proposition innovatrice qui pourrait permettre de ralentir la spéculation inutile dans le monde, dont nous souffrons tous—et de créer un fonds pour le développement mondial, qui serait très utile pour toutes sortes de projets.
Mme Deborah Grey: Tony Blair est récemment arrivé au pouvoir en Grande-Bretagne, et vous avez dit que la Grande-Bretagne serait peut-être mieux disposée maintenant à l'égard de la proposition. Le savez-vous de façon certaine?
M. Lorne Nystrom: Oui, absolument. Il n'y a qu'à entendre les déclarations du gouvernement Blair sur le sujet; le gouvernement Blair est certainement ouvert à l'idée. Il en est de même du chancelier élu Schroeder en Allemagne, ce qui fait contraste avec ce que Kohl...
Mme Deborah Grey: Il s'est déjà prononcé précisément là-dessus?
M. Lorne Nystrom: Pas déjà, mais il s'est déjà prononcé là-dessus par le passé.
Mme Deborah Grey: D'accord.
M. Lorne Nystrom: Oui, il s'est montré ouvert à l'idée de créer un fonds de ce genre.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: On va voir s'il a changé d'idée.
L'hon. Lorne Nystrom: Cette fois-ci, je ne sais pas, mais il y a eu des changements importants de gouvernement dans le monde et aussi un changement en France au cours des 12 ou 18 derniers mois.
[Traduction]
C'est simplement quelque chose de nouveau dont nous devrions discuter au Parlement, si nous voulons préparer l'avenir.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Il faudra en parler aux gens du Conseil de l'Europe.
L'hon. Lorne Nystrom: Oui.
[Traduction]
Le président suppléant (M. Bill Blaikie): Y a-t-il d'autres questions?
[Français]
L'hon. Lorne Nystrom: C'est tout? Merci, monsieur le président non partisan.
[Traduction]
Le président suppléant (M. Bill Blaikie): M. Jordan est maintenant arrivé, et je ne demanderais pas mieux que de lui laisser le fauteuil.
M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Non, merci.
Le président suppléant (M. Bill Blaikie): Je continuerai donc.
Monsieur Gilmour, pour M. Garry Breitkreuz.
M. Bill Gilmour (Nanaimo—Alberni, Réf.): Merci, monsieur le président. Comme vous venez de le dire, Garry n'est pas là. Je présenterai son projet de loi et j'espère qu'on acceptera qu'il puisse faire l'objet d'un vote.
Comme le savent sans doute les membres du comité, nous soulignons cette année le 50e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations Unies. L'article 17 de cette Déclaration est libellé comme suit:
-
1. Toute personne, aussi bien seule qu'en collectivité, a droit à
la propriété.
-
2. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa propriété.
Bien que le Canada ait ratifié la Déclaration des droits de l'homme des Nations Unies, les Canadiens sont arbitrairement privés de leur propriété. Dans son ouvrage intitulé Constitutional law of Canada, troisième édition, le professeur Peter Hogg écrit ce qui suit:
-
Le fait qu'il ne soit pas fait mention du droit à la propriété dans
l'article 7 [de la Charte] réduit grandement la portée de cet
article. L'article 7 ne prévoit donc aucune garantie
d'indemnisation ni même de garantie d'une procédure équitable en
cas de saisie de la propriété de quelqu'un par le gouvernement.
L'article 7 ne prévoit aucune garantie de traitement équitable par
les tribunaux, les tribunaux quasi-judiciaires ni les autorités qui
ont un certain pouvoir à l'égard des intérêts purement économiques
des individus ou des sociétés.
Le professeur Hogg écrit également:
-
Il en résulte un article 7 où la liberté doit être interprétée
comme n'incluant pas la propriété, comme n'incluant pas la liberté
de passer un contrat ni, en somme, la liberté économique.
L'ancien premier ministre Pierre Trudeau a longtemps cherché à obtenir une meilleure protection du droit à la propriété, tout d'abord dans son document de 1968 intitulé «Charte canadienne des droits de l'homme», qu'il a déposé quand il était ministre de la Justice, puis dans son document de 1969 intitulé «La Constitution canadienne et le citoyen» et enfin en 1978, quand il a proposé le projet de loi C-60, projet de loi modifiant la Constitution. M. Trudeau a tenté en juillet 1980, puis encore en janvier 1981, de faire inclure le droit à la propriété dans la Charte.
Enfin, en avril 1983, il a dit à la Chambre des communes:
-
[...] si nous pouvions simplement obtenir l'accord du Parti
conservateur pour présenter un amendement sur le droit à la
propriété et le faire adopter dans les 24 heures.
Plutôt que de tenter de modifier la Charte des droits et libertés, le projet de loi d'initiative parlementaire de Garry, le C-304, propose d'inclure une protection suffisante du droit à la propriété dans la loi fédérale en renforçant, non pas la Constitution, mais les dispositions de la Déclaration canadienne des droits relatives au droit à la propriété, chose beaucoup plus facile à faire.
Le projet de loi de Garry ferait en sorte de garantir expressément à toute personne trois choses: premièrement, le droit à la jouissance de sa propriété; deuxièmement, le droit de ne pas être privé de sa propriété si ce n'est au terme d'une procédure juste et équitable et après avoir reçu une indemnisation juste, dont le montant aura été fixé de façon impartiale et qui aura été payé dans un délai acceptable; et troisièmement, le droit d'en appeler aux tribunaux en cas d'atteinte à son droit à la propriété.
Garry a reçu un appui impressionnant de la part du public compte tenu du peu de temps qu'il a eu pour faire la promotion de son projet de loi. Il a reçu 491 pages de pétitions signées par 11 292 Canadiens de tout le Canada. L'appui à un projet de loi de ce genre est très fort. Il a aussi reçu l'appui de l'Association canadienne de l'immeuble, qui représente plus 200 chambres d'immeubles réparties dans toutes les provinces.
La question à l'étude mérite d'être débattue pendant trois heures à la Chambre. Le projet de loi répond à tous les critères pour être choisi comme pouvant faire l'objet d'un vote.
Je suis prêt à répondre à vos questions.
Le président suppléant (M. Bill Blaikie): Quelqu'un a-t-il des questions à poser à M. Gilmour?
Mme Deborah Grey: Vous dites qu'il serait plus facile de modifier la Déclaration des droits que la Constitution. Garry, ou vous-même, avez-vous une idée des appuis que recueillerait pareille modification dans l'ensemble du pays? Car, comme vous le savez, dès qu'il est question de modifier la Constitution, tout le monde donne l'impression de se désintéresser de la question.
M. Bill Gilmour: Il s'agit précisément là du but de son projet de loi. Dès qu'il s'agit de modifier la Constitution, tout le monde prend un air indifférent, mais il semble être bien plus acceptable d'apporter une modification à la Déclaration des droits. Tous les gouvernements qui se sont succédé au pouvoir depuis 50 ans, peu importe leur allégeance politique, n'ont rien fait.
Le projet d'initiative parlementaire de Garry, s'il était choisi comme pouvant faire l'objet d'un vote, permettrait à tous les députés de tous les partis à la Chambre de faire connaître leur opinion et de voter sur cette question.
Si le vote était favorable, nous pourrions ainsi sensibiliser le gouvernement au fait qu'il s'agit là d'une question d'importance clé à laquelle s'intéressent beaucoup de Canadiens, de la Nouvelle-Écosse jusqu'à la Colombie-Britannique en passant par le Québec.
• 1610
J'estime que la mesure devrait faire l'objet d'un vote parce
qu'elle a une incidence sur tous nos électeurs. C'est une question
qui a été mise en veilleuse et qu'il faudrait ramener comme sujet
de débat pour que nous puissions tous avoir notre mot à dire.
Mme Deborah Grey: Vous êtes à même de comprendre l'incidence qu'aurait la mesure sur tous les paliers de gouvernement, et sans doute sur le gouvernement fédéral dans le cas des armes à feu, par exemple, car c'est justement de cela dont nous discutons dans le cadre du projet de loi C-68, à savoir la propriété des armes à feu. Au niveau plus local, au niveau d'une municipalité qui voudrait, par exemple, construire une route qui passerait sur un terrain privé, il y aurait aussi des répercussions.
M. Bill Gilmour: En effet. À mon avis, je crois que ce sont sans doute les municipalités qui sont les plus coupables de ne pas indemniser les propriétaires de façon équitable. Si le propriétaire veut que la route soit construite sur son terrain ou si c'est là la meilleure façon de procéder, il n'y aurait pas de problème; le projet de loi n'interdirait pas de faire comme cela. Il prévoit simplement le versement d'une indemnisation équitable. La route passerait sur le terrain du propriétaire en question et elle est nécessaire, mais il faudrait que le propriétaire soit indemne équitablement.
Mme Deborah Grey: Très bien.
M. Joe Jordan: Bill, à part l'exemple de la route, pouvez-vous nous donner d'autres exemples de problèmes auxquels vous cherchez à remédier?
M. Bill Gilmour: Il s'agit principalement de la propriété privée...
M. Joe Jordan: Je n'ai pas entendu de plaintes de la part de propriétaires expropriés.
M. Bill Gilmour: Bien des gens ne sont pas au courant. Ils ne connaissent pas la loi fondamentale qui prévoit que le propriétaire exproprié soit indemnisé équitablement et le droit du propriétaire qui estime ne pas l'avoir été de demander l'arbitrage par une tierce partie.
Mme Deborah Grey: J'ai eu un cas de ce genre dans ma circonscription: une entreprise forestière est venue tout bonnement se servir sur le terrain privé de quelqu'un et tentait de ne pas l'indemniser. Ce serait là un autre exemple.
M. Bill Gilmour: Je crois que le projet de loi nous aiderait tous en tant que députés, et je vous encourage à le considérer comme mesure pouvant faire l'objet d'un vote car il s'agit d'une question à laquelle s'intéressent les Canadiens.
Le président suppléant (M. Bill Blaikie): Je veux tout simplement dire, sans porter préjudice à la décision d'accepter la mesure comme pouvant faire l'objet d'un vote, que je ne suis pas absolument sûr que la Déclaration des droits aurait une incidence sur les expropriations municipales, etc. En effet, la portée de la Déclaration canadienne des droits se trouvait limitée du fait qu'il s'agissait d'une loi purement fédérale et qui ne s'appliquait donc qu'au domaine fédéral; c'est l'une des raisons pour lesquelles on cherchait à modifier la Constitution afin d'y inclure le droit à la propriété. La Déclaration des droits a une portée limitée. Je n'en suis pas absolument sûr, mais je crois que c'est le cas.
M. Bill Gilmour: Si vous avez raison, et il se peut bien que vous ayez raison, le projet de loi, s'il était adopté, aurait une incidence sur les provinces et les municipalités, car le droit à la propriété serait alors inscrit dans la loi fédérale.
Le président suppléant (M. Bill Blaikie): Sans vouloir engager un débat là-dessus, j'étais là à l'époque où nous discutions de la question, au début des années 80, et c'était dans une large mesure les provinces qui ne voulaient pas d'une modification visant à inclure le droit à la propriété. Elles y voyaient une ingérence dans un domaine de compétence provinciale.
Les participants au débat étaient parfois classés comme appartenant au camp pour le droit à la propriété ou au camp contre le droit à la propriété alors que, dans les faits, le débat portait aussi sur le partage des compétences entre le palier fédéral et le palier provincial. Je tiens à le préciser simplement pour qu'on soit bien informé.
M. Bill Gilmour: On débattait à qui mieux mieux à l'époque, on faisait de l'obstruction...
Le président suppléant (M. Bill Blaikie): On s'amusait beaucoup.
N'y a-t-il plus de questions pour M. Gilmour?
Merci, monsieur Gilmour.
C'en est trop pour moi, toute cette responsabilité. Je vais donc céder le fauteuil au président dûment élu.
Des voix: Oh, oh!
M. Bill Gilmour: Merci à vous tous.
Le président (M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.)): Mesdames et messieurs, veuillez excuser mon retard. J'étais le premier à prendre la parole lors du débat en deuxième lecture du projet de loi C-42.
Je crois savoir que les points 1 et 2 sont terminés et que M. Solomon ne sera pas là. Nous pouvons donc donner la parole à M. Dubé.
M. Jean Dubé (Madawaska—Restigouche, PC): Merci beaucoup...
Le président: Excusez-moi. Les écouteurs ne semblent pas marcher.
Des voix: Oui.
Le président: Dès que je reprends le fauteuil, les problèmes commencent.
M. Jean Dubé: Ou était-ce moi?
Le président: C'était peut-être vous, monsieur Dubé.
[Note de la rédaction: Difficultés techniques]
Le président: Madame?
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Très bien. Je vais parler anglais. Je le fais aujourd'hui et je continuerai à participer aux travaux du comité même si nous n'avons pas le service d'interprétation. J'aime bien parler anglais avec vous—c'est un plaisir pour moi—, mais vous savez, il y a des règles ici. La prochaine fois que cela se produira, je devrai malheureusement partir—pas parce que je suis une trouble-fête, mais parce que je crois que, si vous travailliez à l'Assemblée législative du Québec et que la même chose vous arrivait, vous partiriez vous aussi. C'est donc clair, et je tiens à ce qu'on prenne note du sentiment que je viens d'exprimer.
Le président: Nous en prenons bonne note, et je partage votre sentiment pour ma part. Je suis sûr que tous les autres membres du comité le partagent aussi.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: J'en suis sure. J'ai toujours raison.
Des voix: Oh, oh!
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Vous êtes d'accord avec moi.
[Note de la rédaction: Difficultés techniques]
Le président: Monsieur Dubé.
[Français]
M. Jean Dubé: Merci beaucoup de m'accorder la chance de soulever ce sujet qui est important pour moi et qui est aussi important pour le gouvernement, je pense. Je suis sûr qu'il est important pour tous les partis de la Chambre des communes.
[Traduction]
Le président: Monsieur Dubé, je suis désolé. Nous n'avons pas d'interprétation. Nous avons besoin d'interprétation.
Madame la greffière, pouvons-nous suspendre la séance pendant quelques minutes le temps de voir quel est le problème?
Le président: Mesdames et messieurs les membres du comité, je crois que les problèmes de technologie et de matériel sont maintenant réglés.
Monsieur Dubé, s'il vous plaît.
[Note de la rédaction: Difficultés techniques]
Le président: Bon, vous voulez bien reprendre, monsieur Dubé, pour que nous voyions si ça marche?
[Français]
M. Jean Dubé: Merci beaucoup de m'accorder l'occasion de soulever un sujet qui me tient à coeur et qui est aussi important, je crois, pour le gouvernement de même que pour tous les partis représentés à la Chambre des communes. Il s'agit de nos jeunes et des différents programmes qui leur sont offerts par le gouvernement fédéral.
La Stratégie emploi jeunesse a été lancée en février 1997. Elle englobe des programmes de 12 ministères. Elle englobe quelque 250 programmes à travers le Canada. Le nombre de programmes peut causer des problèmes de reddition de comptes. Il pourrait y avoir plusieurs programmes, mais il est primordial que ceux-ci soient productifs et efficaces.
• 1630
Je ne suis pas ici pour condamner les programmes qui ne
fonctionnent pas, mais pour rendre les meilleurs
programmes plus efficaces.
Comme nous le savons, le taux de chômage chez les jeunes au Canada est deux fois la moyenne canadienne. On en a parlé souvent. Vous en avez parlé souvent aussi. C'est un problème que nous devons régler pour essayer d'améliorer la situation au Canada.
Au Nouveau-Brunswick, ma province natale, il y a un taux de chômage de 25 p. 100 chez les jeunes. C'est excessif et nous devons, en tant que parlementaires, nous occuper de cette situation et trouver des façons de l'améliorer.
La première étape, si nous voulons être des parlementaires responsables, est d'évaluer si l'argent que nous dépensons maintenant est utilisé aux bonnes fins. Il ne s'agit pas de faire une étude avec l'idée préconçue que tous les programmes sont mauvais et inutiles. Si nous découvrons que les programmes sont bien administrés et utiles, ce sera tant mieux.
Nous pourrons ensuite trouver les moyens de les mieux faire connaître aux jeunes qui devraient en profiter. Les programmes moins efficaces prennent les ressources des programmes plus efficaces. Étant donné le taux de chômage élevé chez les jeunes, plusieurs d'entre eux cherchent à se qualifier pour ces programmes. Nous devons, en tant que parlementaires, nous assurer que les programmes que nous donnons aux jeunes Canadiens sont là pour eux. En gros, c'est ce que je vous propose.
Nous devons être sérieux en ce qui a trait à l'avenir de ce pays. Ce sont les jeunes qui prendront nos places. Nous devons débattre de cela à la Chambre. Merci.
Le président: Merci, monsieur Dubé.
[Traduction]
Questions?
Monsieur Harvey.
[Français]
M. André Harvey (Chicoutimi, PC): J'ai une toute petite question à poser. Avez-vous un exemple, monsieur Dubé, d'un programme qui est totalement inefficace ou inapproprié?
M. Jean Dubé: J'espère que les différents ministères font des évaluations de leurs programmes. Je ne voudrais pas me compromettre ici aujourd'hui et descendre un programme, mais je suis sûr que les ministères ont cette information à leur portée et qu'ils sont en mesure de nous la donner. Je peux vous donner un exemple de programme qui fonctionne un peu mieux. Le Youth Internship Program est un programme qui semble très bien fonctionner.
Avant mon entrée en politique, quand j'étais dans le secteur privé, j'ai eu à voir avec ce programme et je puis vous dire qu'il était très efficace. Mais encore là, il y avait un manque de ressources. Il aurait fallu aider plus de jeunes. Si on prenait les ressources affectées aux programmes moins efficaces, les programmes comme celui que j'ai mentionné pourraient aider plus de personnes.
[Traduction]
Le président: Quelqu'un a-t-il d'autres questions à poser à M. Dubé?
Merci beaucoup d'être venu témoigner devant le comité.
Nous passons maintenant au point 4. Nous entendrons M. Riis, sur la motion 360.
M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson et Highland Valleys, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité.
La motion d'initiative parlementaire que je veux proposer vise simplement à faire en sorte que soient exonérées d'impôt les cartes d'abonnement de transport en commun qui sont fournis par l'employeur.
• 1635
Divers facteurs conduisent à cette proposition: le fait que le
transport soit la plus importante source d'émissions de gaz
carbonique au Canada; l'intérêt pour le protocole de Kyoto et les
engagements que notre pays est appelé à prendre en vertu de ce
protocole; la reconnaissance du fait que, d'ici à l'an 2000,
80 p. 100 des Canadiens vivront en milieu urbain où le transport en
commun existe sous une forme ou une autre; la reconnaissance du
fait que la clientèle du transport en commun est actuellement en
baisse; et le fait qu'il est maintenant reconnu que le coût par
personne qui emprunte le transport en commun est maintenant plus
élevé que ce qu'il en coûte à une personne seule de faire la
navette entre son domicile et le centre-ville de la localité où
elle travaille.
Ainsi, pour encourager le recours au transport en commun, la motion demande que nous fassions ce que bien d'autres pouvoirs publics ont fait, c'est-à-dire de permettre à ceux qui bénéficient d'une carte d'abonnement de transport en commun ou de billets de taxi fournis par leur employeur puissent ne pas avoir à payer d'impôt sur cet avantage.
À l'heure actuelle, cet avantage est accordé à ceux qui prennent leurs voitures pour aller travailler et à qui on paie le stationnement. Cet avantage n'est pas imposé. La présente motion d'initiative parlementaire vise simplement à accorder le même avantage à ceux qui ont un abonnement de transport en commun qui leur est fourni par leur employeur, afin d'encourager les gens à utiliser le transport en commun plutôt que leurs voitures et à contribuer ainsi à réduire les émissions.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Riis.
Y a-t-il d'autres questions?
Madame Dalphond-Guiral.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Je suis curieuse. J'ai travaillé pendant très longtemps et mon patron ne m'a jamais offert de laissez-passer. Avez-vous une idée du nombre et du type d'entreprises qui offrent ce service? Je me dis que si c'est bon pour les employeurs, cela pourrait aussi être bon pour les gens ordinaires.
[Traduction]
M. Nelson Riis: Je n'ai pas de chiffres à vous donner pour le moment. Nous en aurions toutefois au moment où la motion serait débattue. Les données sont reconnues. D'après le modèle américain, la mesure se traduirait par un accroissement d'environ 5 p. 100 de la clientèle du transport en commun. C'est tout, malheureusement. Bien sûr, c'est assez considérable pour ce qui est du nombre, et l'accroissement de la clientèle permettrait par ailleurs de rendre le transport en commun plus abordable et plus efficient. La mesure aurait aussi pour effet d'éliminer un nombre important de véhicules, 600 000 je crois, du centre-ville.
Le président: Merci beaucoup. Madame Grey.
Mme Deborah Grey: Pour ce qui est de l'avantage que vous voulez exonérer d'impôt, Nelson, où figurerait-il sur la déclaration d'impôt? S'il devait être exonéré d'impôt, où cet avantage figurerait-il? Est-ce le particulier qui l'inscrirait comme avantage?
M. Nelson Riis: Oui.
Mme Deborah Grey: Pas l'employeur?
M. Nelson Riis: C'est le particulier qui l'inscrirait. Oui, c'est juste. C'est cela qui est proposé. Le particulier inscrirait l'avantage imposable en question.
Le président: Merci beaucoup. Monsieur Jordan.
M. Joe Jordan: Ne prenez pas ma question pour une critique, car je trouve que l'idée est bonne et qu'elle nous incite à mieux tenir compte de tous les coûts, mais quelle serait l'incidence d'une mesure comme celle-là sur les recettes du gouvernement? Y a-t-il des chiffres à ce sujet?
M. Nelson Riis: Les promoteurs de la mesure...
M. Joe Jordan: Cela en vaut la peine, j'en suis conscient, mais...
M. Nelson Riis: D'accord. Vous savez sans doute qu'il y a une étude d'envergure qui a été faite à l'échelle du pays pour tenir compte de divers scénarios. On arrive à la conclusion que la mesure serait relativement neutre sur le plan des recettes, en ce sens que les impôts ainsi perdus seraient compensés par le fait qu'il n'y aurait plus d'exonération d'impôt au titre des places de stationnement pour ceux qui utiliseraient ces abonnements. En outre, l'accroissement de la clientèle rendrait le transport en commun plus efficient.
Je pourrais vous donner plus de détails, mais il semble d'après l'expérience d'autres pouvoirs publics, surtout aux États-Unis, que le coût semble être assez près de zéro.
M. Joe Jordan: La mesure est neutre sur le plan des recettes, mais les instruments utilisés ne tiennent pas compte des avantages pour l'environnement ou pour la santé.
M. Nelson Riis: C'est juste. On ne tient compte que des montants en cause.
Le président: Y a-t-il d'autres questions pour M. Riis?
Merci beaucoup d'avoir comparu devant notre comité.
M. Nelson Riis: Merci beaucoup.
Le président: Nous passons maintenant au point 5, au projet de loi C-225 de M. Wappel.
• 1640
Pendant que vous vous installez, monsieur Wappel, je
rappellerai aux membres du comité que vous avez témoigné devant
nous en juin et que vous avez décidé de témoigner devant nous
encore aujourd'hui. C'est bien cela?
M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président. Vous avez raison. J'ai déjà témoigné devant le comité et j'ai décidé de témoigner de nouveau parce que la composition du comité a changé et que je voulais avoir l'occasion de présenter mes arguments aux nouveaux membres et de répondre aux questions qu'ils pourraient avoir. Cela dit, permettez-moi de présenter mes excuses à ceux qui auront déjà entendu mes propos.
Le projet de loi en question, monsieur le président, traite de l'institution que nous appelons le mariage. Il est très succinct. Il ne contient que quatre brefs articles. Que vise ce projet de loi? Il a pour objet de faire préciser dans une loi que le mariage n'est valide que lorsqu'il est contracté entre un homme et une femme qui ne sont pas déjà mariés, autrement dit, entre un homme seul et une femme seule. En d'autres termes, les partenaires multiples pas plus que les partenaires du même sexe ne peuvent contracter mariage.
Est-ce une question qui relève de la compétence fédérale? Oui. Les articles 91 et 92 de la Loi constitutionnelle de 1867, qu'on appelait autrefois l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, établissent quelles questions sont respectivement de compétence fédérale ou provinciale.
L'article 91.26, où sont énumérées les questions qui relèvent du gouvernement fédéral, dispose que le Parlement du Canada exerce une compétence exclusive sur le mariage et le divorce. Nous avons une Loi sur le divorce et, bien sûr, une Loi sur le mariage. J'ai apporté quelques exemplaires de la loi actuelle sur le mariage, pour les membres du comité qui ne l'ont vue auparavant. Elle est composée de trois articles qui sont à peu près incompréhensibles.
Le terme «mariage» n'y est pas défini, car, jusqu'à tout récemment, tout le monde s'entendait pour définir le mariage exactement comme je le fais dans mon projet de loi C-225. Allan Rock et Anne McLellan, le ministre de la Justice sortant et la ministre actuelle, ont tous deux affirmé par écrit ce qui suit:
-
Aucune loi du Parlement ne définit le terme «mariage» employé dans
les lois fédérales; la définition qu'on utilise dans ce qu'on
appelle la common law fédérale provient de la décision qu'un
tribunal britannique a rendue en 1866 dans l'affaire Hyde et
Hyde contre Woodmansee. Ce jugement, qui établit qu'il ne peut y
avoir mariage entre deux personnes du même sexe ou entre plus de
deux personnes, a toujours servi de base au sens qu'on donne
communément au mot «mariage» au Canada.
-
Donc, le mariage est déjà clairement défini en droit au Canada
comme étant l'union de deux personnes de sexe opposé.
C'est ce qu'ont reconnu par écrit les ministres de la Justice.
Ce qu'il importe de noter dans cette déclaration, c'est que la définition de la notion de «mariage» se trouve dans la common law fédérale, qui est tout simplement la codification de la jurisprudence. Elle peut donc être modifiée n'importe quand par les juges. Il n'existe pas de loi pour guider les juges ou pour leur imposer des contraintes à cet égard.
Par ailleurs, il est faux de prétendre que la définition du terme «mariage» est clairement établie en droit au Canada. Qu'est-ce qui me permet de l'affirmer? C'est que cette définition a été à maintes reprises remise en question devant nos tribunaux, aussi bien par ceux qui voudraient que les unions entre les gens du même sexe soient reconnues comme des mariages que par ceux dont la religion permet la polygamie ou la polyandrie.
Permettez-moi de vous référer à l'Affaire Layland et Beaulne contre le ministre de la Consommation et du Commerce de l'Ontario et le Procureur général du Canada. Dans cette affaire, qui a été jugée en Ontario par trois juges de la Cour divisionnaire, deux homosexuels de sexe masculin poursuivaient le gouvernement de l'Ontario pour le forcer à leur accorder une licence de mariage.
Monsieur le président, si, comme la ministre de la Justice l'a affirmé, «la définition du mot "mariage" est déjà clairement établie en droit», il y aurait eu lieu de s'attendre à ce que les trois juges rejettent unanimement cette requête. Or, la décision a en réalité été rendue à deux contre un. Permettez-moi de vous lire un bref extrait de l'opinion exprimée par le juge dissident, et je cite:
-
Je suis d'avis qu'en restreignant ainsi le mariage aux couples
hétérosexuels, on porte atteinte aux droits des requérants aux
termes du paragraphe 15(1) de la Charte des droits et qu'on ne peut
justifier une telle violation en invoquant l'article 1 de la
Charte. Je souscris à la position défendue avec eux par l'Église
qui soutient que rien dans la common law n'interdit le mariage
entre partenaires du même sexe au Canada.
Et dans ce cas, il s'agissait de la Metropolitan Community Church d'Ottawa.
Monsieur le président, si la loi était claire sur cette question, comme les ministres de la Justice l'ont prétendue, ce juge n'aurait jamais dû faire cette déclaration.
• 1645
Il se pourrait d'ailleurs fort bien qu'une prochaine décision
de ce genre soit prise à deux contre un mais à l'inverse cette
fois. C'est quelque chose de tout à fait possible et auquel il faut
s'attendre, puisque la common law fonctionne de cette façon-ci.
Dans la jurisprudence actuelle, on peut nettement déceler une telle tendance dans les jugements Vriend et Rosenberg, par exemple. Pour que la loi soit aussi claire que voudrait nous le laisser croire la ministre de la Justice, il faudrait que le sens à donner au mot «mariage» soit explicité dans une loi, afin qu'aucun juge ne puisse dorénavant en arriver à une conclusion analogue à celle du juge dissident dans l'Affaire Layland.
Je soutiens que nous nous devons de préserver la définition traditionnelle du mariage, que semble d'ailleurs avoir retenue et reconnue le gouvernement du Canada. Il va s'en dire que d'autres ont un point de vue différent et c'est la raison pour laquelle le Parlement doit absolument se prononcer sur cette question.
Il se trouve que mon collègue d'Hochelaga—Maisonneuve, dans les propos qu'il a tenus le lundi 8 juin, a formulé les commentaires suivants, auxquels je souscris d'ailleurs entièrement, et je cite:
-
C'est vrai qu'on peut souhaiter que les parlementaires de cette
Chambre se prononcent sur la reconnaissance des conjoints de même
sexe.
Il a également dit:
-
Bien sûr, il faut qu'il y ait un départ. Les Réformistes ont raison
de dire que ce n'est pas acceptable que, dans une démocratie, se
soient les juges qui rendent les décisions.
Il a également dit:
-
Mon collègue a raison de dire que nous devons faire ce débat à la
Chambre. Nous devons voter sur une question d'importance comme
celle-là.
Il a tout à fait raison, mesdames et messieurs. Le projet de loi C-225 est le véhicule pour tenir ce débat et ce vote. Il porte sur une question de compétence fédérale, une question d'actualité, une question importante, qui n'a jamais été abordée dans une loi. Il défend une doctrine millénaire qui est aujourd'hui remise en question devant les tribunaux, où certains juges rejettent l'opinion de la ministre de la Justice qui croit à tort que cette définition est clairement établie en droit dans notre pays.
Et la question est d'actualité comme en témoigne la manchette d'un journal québécois du 15 septembre 1998. Elle se lit comme suit: «les couples homosexuels cherchent à se marier légalement». Permettez-moi de vous lire un petit extrait, monsieur le président:
-
Ce qui pourrait être un cas type pour les libertés civiles au
Canada a commencé par être du théâtre hier lorsque le couple et
leur avocat ont essayé d'obtenir une licence de mariage.
-
Hendricks et Leboeuf sont arrivés au palais de justice le bras dans
le bras, ont donné des entrevus aux journalistes et se sont
embrassés devant les caméras sur le seuil du bureau de licence de
mariage.
Monsieur le président, la question n'a rien de théâtrale. Des changements fondamentaux de cette nature ne doivent pas être déterminés par les journalistes, par les groupes d'intérêts spéciaux, ni par les tribunaux. Des questions de ce genre doivent être débattues ouvertement par les élus à la Chambre des communes.
Le président: Merci, monsieur Wappel.
M. Tom Wappel: Si vous permettez...
Le président: Il ne nous reste presque plus de temps, donc je vais devoir vous demander de conclure.
M. Tom Wappel: Très bien. Peut-être que j'aurais la possibilité de faire des remarques en réponse à des questions éventuelles.
Le président: Y a-t-il des questions?
Apparemment que non.
Merci beaucoup de votre exposé.
Nous voici rendus à la question no 6 à l'ordre du jour. Il s'agit de M. Ménard, avec le projet de loi C-309.
Je crois qu'il s'agit d'une deuxième comparution dans votre cas aussi, monsieur Ménard. Merci.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Bonjour, tout le monde. Merci de me donner l'occasion de comparaître une seconde fois.
Mon projet de loi a trait à la reconnaissance légale des conjoints de fait de même sexe. S'il était adopté par la Chambre des communes, il modifierait à peu près 70 lois. Cela voudrait dire que, dans chacune des lois fédérales où il y a une définition hétérosexiste de «conjoint» qui confère des droits et des obligations, il faudrait aussi lire une définition homosexiste du mot «conjoint» qui conférerait des obligations et des droits aux conjoints de même sexe.
Mon projet de loi concerne une question d'actualité, puisque les collègues du Parti réformiste nous rappelaient que le jugement Rosenberg était important parce qu'il modifiait la Loi de l'impôt sur le revenu pour les conjoints de même sexe.
• 1650
La Commission
canadienne des droits de la personne, dans son dernier
rapport annuel, a évalué qu'au cours
de la prochaine année, une
dizaine de tribunaux de droit commun ou de
tribunaux administratifs seront probablement appelés à
se prononcer sur la question de la reconnaissance des
conjoints de même sexe.
J'ai la conviction, tout comme mes collègues du Parti réformiste et probablement comme d'autres collègues autour de cette table, que le débat doit d'abord avoir lieu entre parlementaires et qu'en pareille matière, ce n'est pas aux tribunaux de décider.
Cela étant dit, mon projet de loi n'a rien à voir avec le mariage, dont la célébration relève de la juridiction fédérale. Il y a actuellement très peu de cas devant les tribunaux qui concernent le mariage. La question est de savoir s'il faut reconnaître les conjoints de même sexe. Si nous le faisons, nous le ferons, bien sûr, en vertu de la Charte canadienne. Plusieurs tribunaux ont déclaré que ne pas le faire était incompatible avec l'article 15 de la Charte, qui porte sur le droit à l'égalité.
Je veux terminer en vous disant que 10 grandes villes canadiennes, autant dans l'ouest que dans l'est du pays, ont reconnu les conjoints de même sexe et que cela a eu très peu d'incidence sur leurs trésors publics respectifs. Actuellement, deux provinces, la Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse, reconnaissent les conjoints de même sexe au niveau de leur fonction publique.
Je formule le voeu que nous nous saisissions de cette importante question, qui va faire partie de l'agenda judiciaire des prochains mois. Je vais respecter la décision de la Chambre des communes tout en m'engageant à travailler très fort pour que l'issue du vote soit positive.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Ménard.
[Traduction]
Y a-t-il des questions?
Madame Grey.
Mme Deborah Grey: Réal, quel était le projet de loi de Svend Robinson sur lequel nous avons voté il y a un an?
[Français]
M. Réal Ménard: C'était un projet de loi qui modifiait la Loi canadienne sur les droits de la personne en vue d'y inscrire un motif interdit de discrimination, soit l'orientation sexuelle. Svend fait cette bataille depuis de nombreuses années. Il s'est trouvé que le gouvernement a lui-même modifié la loi. Il s'agissait du projet de loi C-33, qui modifiait la Loi canadienne et interdisait à toutes les entreprises de juridiction fédérale toute forme de discrimination basée sur l'orientation sexuelle.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Y a-t-il d'autres questions pour M. Ménard?
Merci beaucoup d'avoir comparu devant nous aujourd'hui.
[Français]
M. Réal Ménard: Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Nous allons faire une pause de quelques minutes, mesdames et messieurs. Ensuite, nous passerons à huis clos, comme d'habitude, pour débattre de ces affaires.
[Note de la rédaction: La réunion se poursuit à huis clos]