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SPRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SUB-COMMITTEE ON PRIVATE MEMBERS' BUSINESS OF THE STANDING COMMITTEE ON PROCEDURE AND HOUSE AFFAIRS

SOUS-COMITÉ DES AFFAIRES ÉMANANT DES DÉPUTÉS DU COMITÉ PERMANENT DE LA PROCÉDURE ET DES AFFAIRES DE LA CHAMBRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 20 octobre 1997

• 1539

[Français]

Le président (M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.)): Nous allons commencer nos travaux. Bonjour, chers collègues.

Quatre de nos collègues nous présenteront aujourd'hui leur motion ou projet de loi. Tout d'abord, nous entendrons notre collègue Svend Robinson qui nous présentera son projet de motion numéro 123 et qui disposera de cinq minutes pour le faire. Nous disposerons à notre tour d'une période équivalente pour lui poser des questions, s'il y a lieu. Soyez le bienvenu.

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Merci, monsieur le président. J'aimerais remercier le comité de me donner l'occasion de vous présenter quelques raisons pour lesquelles j'espère que vous retiendrez ma motion comme affaire devant faire l'objet d'un vote.

• 1540

[Traduction]

Je demande au comité de déclarer la motion numéro 123 que j'ai déposée au sujet de l'euthanasie, c'est-à-dire de l'aide au suicide fournie par un médecin, une affaire qui fait l'objet d'un vote.

Durant les cinq minutes qui me sont allouées, je vous donnerai essentiellement les raisons pour lesquelles j'estime qu'il faudrait se prononcer au sujet de cette question et les évaluer en fonction des critères dont se sert le comité pour décider de ce qui n'a pas à faire l'objet d'un vote.

Selon les critères, pour être déclaré une affaire qui fait l'objet d'un vote, il faut que la motion ou le projet de loi ne soit ni futile ni insignifiant. L'affaire dont il est question ici porte sur l'une des questions les plus fondamentales au sujet desquelles nous ayons à nous prononcer, soit la question de personnes en phase terminale ou atteintes d'une maladie incurable qui souhaitent qu'on les aide à mourir.

À plusieurs occasions, j'ai présenté des projets de loi d'initiative parlementaire à ce sujet, durant la dernière législature et, en fait, durant la législature précédente. Aujourd'hui, plutôt que de proposer un projet de loi qui énumère des critères précis, je propose une motion de nature très générale voulant que soit établi un comité qui pourrait tenir des audiences à cet égard. Ensuite, il pourrait faire des recommandations relatives à la teneur du projet de loi.

Plutôt que de se lancer dans un débat sur la pertinence d'un élément particulier du projet de loi, je fais appel à la procédure prévue à l'article 68 du Règlement en vue de permettre à un comité spécial d'examiner tous les aspects de cette question.

En réalité, il y aurait deux votes libres à la Chambre des communes. L'un porterait sur la motion comme telle en vue d'établir le comité. Si la Chambre, dans sa grande sagesse, estimait qu'il vaut mieux ne pas établir de comité spécial, la motion serait alors rejetée, et la question serait réglée. Par contre, si la Chambre convenait d'établir le comité spécial demandé, celui-ci lui ferait rapport. Ensuite, conformément à l'article 68 du Règlement, en adoptant une motion d'adoption du rapport, la Chambre ordonnerait que soit déposé un projet de loi donnant suite aux recommandations. La Chambre aurait donc deux occasions de se prononcer, lors de votes libres, sur le fond de la question.

Comme je le disais, il s'agit nettement d'une question d'intérêt national. C'est aussi une question au sujet de laquelle la Chambre n'a pas encore eu la possibilité de se prononcer, en dépit d'un intérêt manifeste. Plusieurs projets de loi d'intérêt privé ont été présentés par différents partis. Ainsi, un conservateur, Bob Wenman, avait présenté un projet de loi analogue. D'autres en ont aussi présenté, mais la Chambre n'a jamais eu l'occasion de se prononcer.

L'autre raison impérieuse en faveur d'un vote est le fait qu'en dépit d'indications—de promesses en fait—du premier ministre et du ministre de la Justice selon lesquelles la Chambre aurait l'occasion de se prononcer sur cette question, cela n'a pas encore eu lieu. La promesse a été faite peu après le décès de Sue Rodriguez. Elle était très claire. On avait pris l'engagement qu'à la Chambre, quelle que soit l'opinion à ce sujet, il y aurait au moins un vote, vote qui se fait toujours attendre.

La motion à l'étude aujourd'hui donnerait aux députés l'occasion de tenir un vote libre à cet égard. Vous vous demanderez peut-être si la ministre de la Justice projette quelque chose. Je vous réponds par la négative.

[Français]

La ministre a dit qu'elle n'avait pas l'intention de déposer un projet de loi ou une motion sur cette question. C'est donc pour nous, députés, la seule occasion de tenir un vote libre.

[Traduction]

La question ne figure pas au programme législatif du gouvernement. En fait, la ministre de la Justice a clairement dit qu'elle n'avait pas l'intention d'y donner suite. Donc, à moins qu'une motion de cette nature ne fasse l'objet d'un vote, il n'y aura pas de vote libre.

Très brièvement, pour ce qui est des autres critères, il ne s'agit clairement pas d'une question d'intérêt strictement régional, pas plus qu'elle ne concerne le nom d'une circonscription électorale. De plus, elle a été rédigée avec le plus grand soin afin de ne pas exiger de modifications évidentes. Elle n'empêcherait donc pas un comité de déposer un projet de loi.

Tel que je l'ai déjà mentionné, le sujet ne reprend pas celui d'une affaire bien précise que le gouvernement a déjà incluse à son programme législatif, comme il est prévu au numéro 5, au contraire. La Chambre en a été saisie à plusieurs reprises. Il n'existe pas d'autres moyens, à la portée de la Chambre, de traiter avec efficacité de cette question par le biais d'une autre procédure, comme le prévoit le critère 7. Elle n'est certes pas rédigée en termes partisans. Elle satisfait aussi aux critères 9, 10 et 11, là où on mentionne les questions ayant déjà été tranchées par la Chambre, et ainsi de suite.

• 1545

Je demande donc aux membres du comité de reconnaître l'importance de donner aux représentants élus de la Chambre la chance de se prononcer, quelle que soit leur opinion. S'il y a un thème qui revient chaque fois qu'un tribunal étudie cette question —et plusieurs l'ont fait, dont la Cour d'appel, la Cour suprême du Canada—, ils ont tous affirmé qu'en fin de compte, c'était à la Chambre des communes de trancher.

Voilà cinq ans presque que la Cour suprême du Canada s'est prononcée. La Chambre n'a pas eu l'occasion de voter. Je supplie donc les membres du comité d'accepter cette façon de faire, qui a été choisie avec soin afin de permettre la participation la plus générale qui soit. Il n'est pas question de se limiter à un projet de loi précis, mais simplement de demander à un comité spécial de donner aux Canadiens l'occasion d'étudier toutes les dimensions de cette question, puis de permettre qu'elle fasse l'objet d'un vote.

[Français]

Merci, monsieur le président

Le président: Merci. Y a-t-il des questions?

[Traduction]

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur Robinson, envisagiez- vous la formation d'un comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat ou un comité de la Chambre seulement?

M. Svend J. Robinson: Ce serait uniquement un comité de la Chambre. Aux termes de l'article 68 du Règlement, il s'agit en fait d'une motion voulant que soit établi un comité de la Chambre pour étudier la motion.

En réalité, le Sénat a déjà examiné cette question. Un comité sénatorial spécial avait été créé. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire que le comité de la Chambre reprenne l'étude déjà faite par le Sénat. Il aurait ainsi la tâche plus facile et, en fait, des membres du comité sénatorial pourraient fort bien contribuer aux travaux du comité de la Chambre.

Si, dans leur grande sagesse, ceux qui s'occupent de cette question décidaient qu'ils veulent peut-être un quelconque comité mixte, je n'y suis pas opposé. Cependant, ce que je souhaite, c'est qu'un comité de représentants élus examine la question.

Le président: Monsieur Blaikie.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Il m'a semblé, d'après ce que vous avez dit, que la promesse faite après le décès de Sue Rodriguez venait de l'actuel premier ministre.

M. Svend J. Robinson: Elle a été faite par le premier ministre Chrétien et par le ministre de la Justice d'alors, M. Allan Rock.

M. Bill Blaikie: Cela nous donne une idée de la date à laquelle elle a été faite.

M. Svend J. Robinson: Effectivement. Cette promesse a été faite en février 1994.

Le président: Je vous remercie.

Y a-t-il d'autres questions?

Monsieur Robinson, je vous remercie.

M. Svend J. Robinson: C'est moi qui vous remercie, monsieur le président.

[Français]

Le président: J'invite maintenant M. Benoit à nous présenter son projet de loi C-203.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Merci, monsieur le président. Mesdames et messieurs, je vous souhaite le bonjour.

Aujourd'hui, je vous parlerai du projet de loi C-203, Loi modifiant la Loi de mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur. Le problème, c'est que l'accord a été signé par toutes les provinces et tous les territoires en 1994, qu'il est entré en vigueur en juillet 1995, mais qu'il laissait d'importants secteurs ouverts à des négociations ultérieures. Ces négociations sont dans une impasse. Des échéances n'ont pas été respectées. Le comité de négociation interprète l'expression «accord par consensus» comme signifiant un consentement unanime. Or, il est tout simplement trop difficile, comme vous devez vous en douter, aux provinces et aux territoires de s'entendre à l'unanimité sur des questions telles que celles qui relèvent de cet accord.

Une étude fédérale qui a fait l'objet d'une fuite et dont j'ai fait circuler un exemplaire a révélé que l'Accord sur le commerce intérieur ne porte que sur 13 p. 100 des milliers de barrières au commerce interprovincial auxquelles se butent 50 entreprises canadiennes incluses dans l'étude. Les auteurs de l'étude ont aussi constaté que 56 p. 100 de ces barrières commerciales seraient éliminées si l'accord était mis en oeuvre et que seulement 31 p. 100 des barrières demeureraient intactes.

Le manque de progression dans ce dossier freine la croissance économique et la création d'emplois partout au Canada. J'en fait la preuve.

Ainsi, la Chambre de Commerce du Canada a déclaré qu'une augmentation de 10 p. 100 du commerce intérieur entraînerait la création de 200 000 emplois. Selon le Fraser Institute, l'élimination des barrières au commerce interprovincial entraînerait en moyenne une hausse du revenu familial de 3 500 $ par année. L'Association des manufacturiers canadiens a en outre estimé que l'élimination de ces barrières injecterait entre 6 et 10 milliards de dollars dans l'économie canadienne. Ce sont là des affirmations assez spectaculaires venant de groupes très crédibles.

• 1550

Ottawa a le pouvoir de légiférer en matière de commerce et l'obligation constitutionnelle de voir à la libre circulation au Canada des biens, des services, des capitaux et des personnes. Cela est très clair.

Le projet de loi C-203 contribuera à résoudre les difficultés concernant l'Accord sur le commerce intérieur comme tel en conférant au gouvernement fédéral le pouvoir de mettre en vigueur une proposition aux termes de l'accord si les deux tiers au moins des provinces et des territoires représentant 50 p. 100 de la population approuvent la proposition. La disposition s'appliquerait lorsqu'on a cherché à obtenir le consentement unanime des provinces, mais qu'on ne l'a pas obtenu. Le projet de loi d'intérêt privé ne s'appliquerait que lorsque les propositions tombent sous le coup des pouvoirs législatifs fédéraux prévus dans la Loi constitutionnelle de 1867 et qu'elles concernent le libre commerce interprovincial.

Plusieurs groupes ont fait des déclarations au sujet de cette proposition particulière ou de propositions analogues. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a demandé à ses membres s'ils estimaient que le gouvernement fédéral devait prendre des mesures pour faire en sorte que soient appliquées sans plus tarder les dispositions de l'Accord sur le commerce intérieur. Cinquante-huit pour cent d'entre eux ont répondu par l'affirmative. J'ai ici un exemplaire des résultats du sondage effectué par la fédération.

En août, Tim Reid, président de la Chambre de Commerce du Canada, a déclaré:

    «La règle de l'unanimité est parfaitement ridicule... Il faut montrer que le fédéralisme canadien est efficace—c'est là une grande lacune du processus de prise de décision.»

Il aimerait que l'on adopte une formule moins exigeante.

Les ministres fédéraux ont aussi déclaré qu'il faut faire quelque chose. La nécessité pour le gouvernement de jouer un rôle dans la conclusion de l'accord a aussi été reconnue, par exemple par le ministre de l'Industrie lui-même, celui-là même qui est responsable des obstacles au commerce interprovincial. En février dernier, à Edmonton, lors d'une conférence sur la petite entreprise, le ministre fédéral a dit:

    «J'estime qu'il faudra bientôt que le gouvernement fédéral envisage d'autres stratégies...»

Après quoi, il a ajouté:

    «Je ne saurais trop dire à quel point je suis déçu, fâché et frustré... Après tant de temps, que l'on ait réalisé si peu de progrès montre bien qu'il est temps de revoir la stratégie.»

Je vous rappelle que c'est le ministre de l'Industrie qui parle.

Enfin, en octobre dernier, selon le Financial Post, nulle autre qu'Anne McLellan aurait déclaré que, bien qu'elle espère la conclusion d'un accord sur le libre commerce intérieur en matière d'électricité, elle envisage aussi la possibilité qu'Ottawa exerce ses pouvoirs constitutionnels en vue de gérer l'union économique du pays et d'éliminer ces barrières.

Je vous laisse sur cette note. Vous vous demandez peut-être si le gouvernement fédéral ne semble pas alors imposer aux provinces quelque chose dont elles ne veulent pas. En tant que réformiste, j'estime qu'il faut vous dire que nous sommes tout à fait contre l'idée que le gouvernement fédéral impose aux provinces des choses qu'il ne devrait pas imposer. C'est un principe auquel nous tenons beaucoup. Par contre, si vous examinez quelques-unes...

Par exemple, en signant l'Accord sur le commerce intérieur, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux se sont engagés à l'unanimité à abolir ces barrières. Ils en ont pris l'engagement. Ils ont tous reconnu que, tout compte fait, ce serait avantageux pour toutes les provinces. Le gouvernement fédéral a l'obligation constitutionnelle de faire en sorte que les biens, les services, les capitaux et les personnes puissent circuler librement à l'intérieur du pays. Cette règle de l'unanimité signifie qu'un seul premier ministre, par souci de protéger un secteur de sa province, peut bloquer l'accord. Il est donc clair que l'unanimité n'est pas un concept utile.

En guise de conclusion, j'aimerais dire qu'il faut que quelqu'un fasse preuve de leadership dans ce domaine, et toutes les provinces sont d'accord pour dire qu'il faudrait éliminer les barrières au commerce intérieur. Elles le disent toutes et elles sont toutes d'accord avec ce principe. Toutes les provinces reconnaissent qu'elles y trouveraient leur compte. Le projet de loi prévoit le leadership qu'il faut. Je vous demande d'en faire un projet de loi qui fera l'objet d'un vote.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Benoit. Une question de la part de M. Epp.

[Traduction]

M. Ken Epp: Monsieur Benoit, vous êtes-vous renseigné pour savoir si votre projet de loi pose des problèmes en ce qui concerne la Constitution?

• 1555

M. Leon E. Benoit: J'ai effectivement effectué beaucoup de recherche à ce sujet et j'en ai discuté avec des constitutionnalistes. Ils sont du ferme avis qu'en fait, c'est au gouvernement fédéral qu'il revenait de faire en sorte que ces barrières ne soient jamais mises en place. En ne s'opposant pas à leur mise en place, il a donc failli à son devoir. C'était l'avis unanime, je crois, des experts. En fait, certains ont recommandé cette approche en vue de résoudre le problème que pose la conclusion de l'Accord sur le commerce intérieur.

[Français]

Le président: Madame Dalphond-Guiral.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Après avoir lu rapidement l'article que vous proposez, dois-je comprendre que, par exemple, une province qui serait tout à fait opposée à un type de libre-échange pour un produit pourrait se le voir imposer?

[Traduction]

M. Leon E. Benoit: En fait, toutes les provinces ont signé cet accord, y compris le Québec et l'Alberta. Bien sûr, elles sont toutes préoccupées; elles ne souhaitent pas que le gouvernement fédéral leur impose quelque chose dont elles ne veulent pas.

Chaque province a un secteur particulier qu'elle aimerait protéger. Pourtant, chaque province a reconnu et déclaré sans ambages que l'abolition de ces barrières, telle que prévue dans l'accord, profiterait à toutes les provinces.

Sur un point particulier, effectivement, l'accord prévoit une formule qui permettrait à sept provinces représentant au moins 50 p. 100 de la population de conclure l'accord, même s'il n'a pas l'appui de certaines provinces.

À nouveau, je répète que cet accord est avantageux pour chaque province.

Parce qu'il n'est pas mis en oeuvre, notre économie perd entre 6 et 10 milliards de dollars. Chaque famille canadienne perd en moyenne 3 500 $. On pourrait créer jusqu'à 200 000 emplois simplement en accroissant de 10 p. 100 le commerce inter- provincial. Les avantages sont donc spectaculaires.

Le président: Je vous remercie.

[Français]

Est-ce qu'il y a d'autres questions?

[Traduction]

Monsieur Benoit, je vous remercie beaucoup.

M. Leon E. Benoit: C'est moi qui vous remercie.

Le président: J'aimerais maintenant inviter Mme Michelle Dockrill à nous expliquer la motion numéro 136.

Madame Dockrill, je vous souhaite la bienvenue.

Mme Michelle Dockrill (Bras d'Or, NPD): Je remercie les membres du sous-comité de m'avoir autorisée à venir présenter ma motion aujourd'hui. C'est la première fois que cela se produit. Je vous suis donc reconnaissante de votre aide.

Dans cette motion, je demande que le gouvernement prenne des mesures pour développer la mine Donkin, de Cap-Breton, comme une société d'État, plus particulièrement qu'elle soit exploitée par l'actuelle Société de développement du Cap-Breton.

J'espère pouvoir vous convaincre que cette motion mérite de faire l'objet d'un vote.

Permettez-moi de commencer par vous situer en contexte.

Comme vous le savez peut-être, le taux réel de chômage à Cap- Breton oscille entre 35 et 40 p. 100. Notre population baisse de façon constante. Le nombre de jeunes qui quittent l'île a atteint un seuil critique. D'après les données du dernier recensement, durant la période quinquennale qui s'est terminée en 1991, 2 700 jeunes dont l'âge variait entre 18 et 24 ans ont quitté l'île sans espoir de retour.

En ce qui me concerne, il est évidemment crucial pour l'avenir de l'Île d'offrir de bonnes perspectives d'emploi si nous voulons renverser ces tendances. Soyez assurés que malgré le fort taux de chômage et la migration de nos jeunes travailleurs, beaucoup d'habitants du Cap-Breton comprennent les nouvelles tendances de l'économie et des entrepreneurs locaux créent des entreprises, lesquelles ne peuvent toutefois pas survivre dans nos collectivités sans les industries de base, comme celle du charbon.

La Société de développement du Cap-Breton (DEVCO) a fait ses preuves. Cela a pris de nombreuses années et les erreurs commises ont coûté cher, mais aujourd'hui, il ne fait aucun doute que l'avenir de l'Île du Cap-Breton dépend de façon critique de relations économies solides, à long terme, fondées sur une population active locale et expérimentée.

• 1600

Le fait que DOSCO ait décidé d'abandonner l'exploitation minière au Cap-Breton a déclenché l'enquête Donald en 1966. Le gouvernement de l'heure a convenu que les mines n'étaient pas économiquement viables, tout en reconnaissant toutefois que les perturbations sociales d'une fermeture de cette importance étaient inacceptables. Donald a mis au point un plan préconisant l'élimination progressive de la mine sur 15 ans, et a prévu en même temps la création d'une société de développement distincte, chargée de promouvoir d'autres emplois locaux. C'est en fonction de ces deux mandats que DEVCO a été créée en mars 1968. Cela s'est révélé impossible à gérer.

Avant même que trois ans ne s'écoulent, une nouvelle approche a été adoptée, un plan nouveau, mettant l'accent non pas sur d'autres perspectives pour la population active locale, mais plutôt sur la promotion de l'industrie du charbon auprès d'investisseurs et d'industries de l'extérieur. Cela s'est également révélé coûteux et non productif, voire même dangereux. Le danger d'une entreprise privée qui est essaie de réaliser des bénéfices en améliorant la qualité d'une mine pendant quelques années et qui ensuite, l'abandonne, a été illustré bien des années plus tard par l'explosion en mai 1992 à la mine Westray à Plymouth, où 26 hommes ont perdu la vie.

Ce n'est qu'en 1972 que la gestion DEVCO s'est rendu compte que l'élimination progressive de l'industrie n'était pas la réponse idéale et qu'une exploitation minière viable était en fait possible. C'est alors que le gouvernement de l'heure a appuyé un plan de 20 à 25 ans visant l'établissement stable d'une industrie du charbon sur l'Île. Aujourd'hui, en 1997, deux mines relèvent de DEVCO: les mines de charbon Phalen et Prince. Elles sont cogérées avec les United Mine Workers of America, et sont dotées d'employés qualifiés et compétents. L'exploitation charbonnière est viable et il faut aujourd'hui prendre les mesures qui s'imposent pour en assurer la prospérité.

Voici maintenant les raisons qui m'ont poussée à présenter cette motion.

Monsieur le président, on estime que la mine Donkin de l'Île du Cap-Breton, grâce à la technologie minière de 1997, grâce à ses ouvriers formés et à ses actifs, pourrait facilement produire de 350 à 400 millions de tonnes de charbon. Il ne fait aucun doute que la mine Donkin doit faire partie des éventualités de DEVCO. Il faut prévoir une période de transition de trois à trois ans et demi pour que la production de la mine Donkin atteigne le million de tonnes par an.

Si nous continuons à ne pas faire cas des problèmes actuels et futurs des deux mines de DEVCO, l'industrie du charbon sur l'Île du Cap-Breton, comme nous la connaissons aujourd'hui, pourrait cesser d'exister, ce qui pourrait provoquer la catastrophe sociale que nous avons essayé d'éviter en créant DEVCO. La mine Donkin représente l'avenir de DEVCO et DEVCO est cruciale pour le Cap-Breton.

Il est vrai que le gouvernement du Canada a fait d'importants investissements dans l'industrie du charbon au Cap-Breton. Aujourd'hui, si la mine Donkin faisait partie de DEVCO, nous pourrions réaliser des rendements sur ces investissements. Au Cap-Breton, nous sommes maintenant prêts à remettre au Canada une partie des investissements qu'il fait depuis 30 ans sur notre île et également prêts à contribuer à l'économie du Canada.

D'où me vient cette certitude? Le potentiel d'exportation du charbon apparaît clairement dans l'ouest du Canada ainsi que sur le marché mondial. L'est du Canada devrait participer au marché mondial grâce à trois mines d'État, dont la mine Donkin.

Les employés, la collectivité, la province et le Sénat lui- même, sont d'avis que la mine Donkin devrait être développée dans le cadre de DEVCO. Cela en vaut la peine pour le Cap-Breton, pour le Canada et pour les contribuables canadiens qui ont fait cet investissement. Je crois qu'un débat public sur cette motion montrerait que le Parlement appuie une telle motion.

Merci.

Le président: Merci, madame.

[Français]

Est-ce qu'il y a des questions?

[Traduction]

M. William Blaikie: Le gouvernement actuel vous a-t-il donné une indication de ses intentions?

Mme Michelle Dockrill: Nous savons qu'il s'est engagé à verser 300 000 dollars à une société privée chargée d'une étude de faisabilité. Comme je l'ai dit, cette mine de charbon est cruciale pour DEVCO, car les deux mines exploitées actuellement sont décrites par la gestion de DEVCO elle-même comme n'étant pas très viables à long terme.

• 1605

Il est temps que DEVCO rapporte quelque chose. Nous connaissons l'un des taux de chômage les plus élevés et une telle aide est cruciale pour notre Île.

Le président: Avez-vous une autre question?

M. Ken Epp: Une, rapidement. Je ne sais pas si c'est au comité de décider si votre motion doit faire l'objet d'un vote ou non, mais elle a été modifiée par rapport à votre première version. Pouvez-vous nous en expliquer la raison?

Mme Michelle Dockrill: Une modification...?

M. Ken Epp: La motion qui figure sur la liste initiale n'est pas la même. S'agit-il d'une erreur de copiste?

Mme Michelle Dockrill: Oui.

M. Ken Epp: D'accord, c'est entendu.

Mme Michelle Dockrill: C'est la raison pour laquelle je ne vous suivais pas. Excusez-moi.

Le président: Merci beaucoup.

Nous avons maintenant une motion qui va être présentée par M. Gary Lunn au nom de son collègue, Reed Elley.

M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Réf.): Merci, monsieur le président.

Monsieur le président, la motion au sujet de laquelle je demande au comité de décider si elle peut faire l'objet d'un vote est assez simple: que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait appuyer l'égalité des provinces et des Canadiens en général en faisant en sorte qu'aucune province ne soit reconnue comme société distincte dans le cadre de la Constitution du Canada.

La motion est très claire, et comme nous avons tous entendu parler du point qu'elle soulève, je vais m'en tenir aux critères retenus pour décider si les motions peuvent faire l'objet d'un vote. En octobre 1987, une liste de critères négatifs a été publiée à cet égard. J'ai choisi les plus importants. Je vais commencer par cela avant de revenir sur l'importance de cette motion.

Tout d'abord, la motion ne doit pas être futile. Je crois que nous convenons probablement tous que ce qui a trait à l'unité nationale est de grande importance et ne peut donc pas être considéré comme futile.

Il est très important que le Parlement fasse preuve de leadership à ce sujet. Nous ne pouvons continuer de n'en tenir aucun compte. C'est d'une importance nationale pour tous—les dix provinces, tous les partis politiques—je le répète, il est temps que le Parlement fasse preuve de leadership et prenne la deuxième mesure prévue dans l'accord de Calgary.

Deuxièmement, la motion ne doit pas susciter de la discrimination contre une région donnée. Cette motion défend clairement le contraire—l'égalité de toutes les provinces et de tous les Canadiens—donc, pas de problème de ce côté-là.

La motion peut-elle être réglée en faisant appel à une autre procédure ou un autre organisme? De toute évidence non. Compte tenu de la gravité de cette question, le Parlement est bien le seul endroit où on puisse l'aborder. Après la déclaration de Calgary, quatre partis politiques et neuf provinces le reconnaissent. Je le répète, il est temps que le Parlement fasse preuve de leadership à cet égard.

Ensuite, pour faire l'objet d'un vote, une motion ne peut pas être anticonstitutionnelle. Elle ne l'est pas. Nous voulons que le gouvernement confirme son engagement à l'égard des dispositions du paragraphe 15(1) de la Constitution du Canada en matière d'égalité. En refusant de reconnaître une province ou un groupe comme société distincte, nous renforçons le concept d'égalité entre tous les ressortissants de notre pays.

Ce que nous envisageons est fondamental. Ainsi que le stipule l'Accord de Calgary, il est bon de reconnaître la spécificité. Ce que nous disons—et c'est la nuance—c'est qu'il faut faire en sorte qu'aucune province ou aucun groupe particulier de Canadiens ne soit reconnu comme distinct.

• 1610

Je me suis limité à cinq critères. Je ne vais pas tous les passer en revue, bien que cela soit possible, car la motion cadre avec les 11 critères. Je vais passer au dernier: la motion ne peut être rédigée en des termes partisans. Il n'y a rien de tendancieux dans cette motion. Elle transcende tout sectarisme politique. Elle défend les principes d'égalité que nous devrions tous appuyer et promouvoir.

Je vois plusieurs personnes sourire.

J'espère que le sous-comité acceptera que cette motion fasse l'objet d'un vote. Je crois fortement que nous pouvons faire preuve de leadership en prenant la deuxième mesure prévue par l'Accord de Calgary. Je crois en un pays fédéral fort. Nous devons faire preuve de leadership. C'est d'une importance capitale pour ce Parlement. Je vous demanderais donc de choisir cette motion pour qu'elle fasse l'objet d'un vote.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci.

Monsieur Epp, une question?

M. Ken Epp: Je sais que vous parlez au nom d'un de vos collègues, mais comment osez-vous nous dire ouvertement que cette motion n'est pas rédigée en des termes partisans? J'imagine que l'on pourrait s'attendre à ce qu'un député du Bloc pose cette question, mais...

M. Gary Lunn: Eh bien, je ne demande pas...

M. Ken Epp: ...c'est à mon avis pas mal tendancieux.

M. Gary Lunn: Je demande que l'on fasse en sorte qu'aucune province ne soit reconnue comme société distincte dans le cadre de la Constitution du Canada. Ce n'est pas contre le Québec. Ce n'est pas pour le Québec. Ce n'est pas pour la Colombie-Britannique. C'est contre toutes les provinces en général. Nous ne reconnaissons pas une...

La Colombie-Britannique se compose de nombreuses cultures différentes et cette motion ne va pas à l'encontre de cette réalité. Elle est strictement non tendancieuse. Premièrement, nous ne devrions pas conférer de pouvoirs particuliers à une province ou reconnaître une société distincte au sein de n'importe quelle province; deuxièmement, nous appuyons le concept d'égalité de toutes les provinces et de tous les Canadiens. A mon sens, il n'y a rien de tendancieux là dedans. Cela ne s'applique pas à une province en particulier.

[Français]

Le président: Est-ce qu'il y a d'autres questions? Monsieur Blaikie.

[Traduction]

M. Bill Blaikie: À plusieurs reprises, M. Lunn a dit, «nous». Qui est «nous»? S'agit-il de vous-même et de M. Elley ou êtes-vous le porte-parole d'un groupe plus vaste?

M. Gary Lunn: Lorsque je dis «nous», je veux parler du Parlement. J'espère que cette motion pourra être choisie pour faire l'objet d'un vote de manière qu'en tant que Parlement, nous puissions faire preuve de leadership.

M. Bill Blaikie: Non, vous étiez en train d'expliquer ce que vous voulez dire, lorsque vous dites qu'aucune province ne devrait être reconnue comme société distincte et vous avez utilisé le pronom «nous». Ce n'est pas lorsque vous avez défendu le choix de la motion. Lorsque vous vous êtes attardé sur le fond de la motion, vous avez dit «nous».

M. Gary Lunn: Non, je parlais en mon nom et bien sûr au nom de M. Elley. J'en ai discuté avec lui aussi.

Toutes mes excuses.

Le président: Il est d'accord avec lui-même. C'est pourquoi il a dit «nous».

M. Bill Blaikie: Le «nous» de majesté.

M. Gary Lunn: Le «nous» de majesté. Cela nous arrive à tous, n'est-ce pas?

Une voix: «Nous, le peuple».

Le président: Y a-t-il d'autres questions?

M. Gary Lunn: Je crois que c'est ainsi qu'ils commencent. «Nous, le peuple»? Est-ce dans...?

Des voix: Oh, oh!

Une voix: C'est la version américaine.

[Français]

Le président: Pas d'autres questions?

[Traduction]

M. Ken Epp: Madame Parrish est bien silencieuse aujourd'hui.

Le président: Merci beaucoup.

M. Gary Lunn: Merci beaucoup, monsieur le président.

Le président: Nous allons maintenant suspendre la séance pour une minute avant de siéger à huis clos.

M. Ken Epp: La motion 20 a-t-elle été retirée?

Le président: Non, mais M. Bellehumeur ne peut pas la présenter.

M. Ken Epp: Nous en concluons donc qu'il ne l'a pas présentée?

Le président: C'est bien cela.

M. Ken Epp: D'accord.

Le président: Merci beaucoup. Nous allons poursuivre la séance à huis clos.