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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 18 mars 2003




Á 1110
V         Le président (L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.))
V         Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.)
V         Le président
V         M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne)
V         Le président
V         Mme Elizabeth Dowdeswell (présidente, Société de gestion des déchets nucléaires)

Á 1115

Á 1120

Á 1125
V         Le président
V         M. Roy Bailey
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         M. Roy Bailey
V         Mme Elizabeth Dowdeswell

Á 1130
V         M. Roy Bailey
V         Le président
V         M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ)
V         Mme Elizabeth Dowdeswell

Á 1135
V         M. Bernard Bigras
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         Le président
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         Le président
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         Le président
V         M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD)
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         M. Richard Dicerni (président du conseil, Société de gestion des déchets nucléaires)

Á 1140
V         M. Joe Comartin
V         M. Richard Dicerni
V         M. Joe Comartin
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         M. Joe Comartin
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         Le président
V         M. Julian Reed (Halton, Lib.)

Á 1145
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         M. Richard Dicerni
V         M. Julian Reed

Á 1150
V         M. Richard Dicerni
V         M. Julian Reed
V         Le président
V         M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.)
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         M. Alan Tonks

Á 1155
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         M. Alan Tonks
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         M. Alan Tonks
V         Le président
V         Mme Hélène Scherrer

 1200
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         Le président

 1205
V         M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne)

 1210
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         Le président
V         M. Bernard Bigras
V         M. Richard Dicerni

 1215
V         M. Bernard Bigras
V         M. Richard Dicerni
V         M. Bernard Bigras

 1220
V         M. Richard Dicerni
V         M. Bernard Bigras
V         M. Richard Dicerni
V         M. Bernard Bigras
V         M. Richard Dicerni
V         M. Bernard Bigras
V         M. Richard Dicerni
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         M. Joe Comartin
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         M. Joe Comartin
V         Mme Elizabeth Dowdeswell

 1225
V         Le président
V         M. Julian Reed
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         Le président
V         M. Alan Tonks
V         Mme Elizabeth Dowdeswell

 1230
V         Le président
V         Mme Elizabeth Dowdeswell
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 019 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 18 mars 2003

[Enregistrement électronique]

Á  +(1110)  

[Français]

+

    Le président (L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Mesdames et messieurs, le comité commence son travail. Je voulais faire quelques annonces, mais Mme Scherrer demande la parole. Je vais la lui donner.

+-

    Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Merci, monsieur le président.

    J'imagine que vous alliez probablement aborder le sujet aussi. J'ai reçu ce matin une ébauche de document sur un voyage qui doit se faire la semaine prochaine en Angleterre. J'aimerais que les gens qui sont appelés à voyager commentent aussi là-dessus. Je me demande si le moment est vraiment bien choisi pour passer quelques jours en Angleterre, à Londres plus précisément, au cours de la semaine prochaine.

    Je sais que M. Comartin devait participer au voyage et M. Bigras aussi. Dans un premier temps, je dois dire que j'ai quelques réticences et que j'aimerais les partager avec les collègues qui doivent également participer à ce voyage.

+-

    Le président: Je comprends bien vos réticences, mais je pense que le meilleur moment pour discuter de ça sera jeudi matin, quand nous commencerons notre séance. On va en discuter jeudi.

[Traduction]

    Jeudi nous discuterons également avec des fonctionnaires de deux ministères, Environnement et Statistique Canada. Ils nous présenteront des documents ainsi que leurs opinions sur le rapport portant sur l'état de l'environnement et sa résurrection. Il nous faudra deux bonnes heures, alors ne prenez pas d'engagements pour le déjeuner avant 13 h 15. Nous pourrions faire en sorte qu'on nous serve le déjeuner, et ainsi nous n'aurions pas à prendre d'autres dispositions et nous pourrions siéger jusqu'à 13 h 30. Veuillez communiquer vos intentions au greffier.

    Monsieur Bailey.

+-

    M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le président, comme il y a des membres du comité qui sont absents aujourd'hui, il serait peut-être bon de les informer de la décision qui a été prise en réponse à la question d'Hélène, afin qu'ils soient au courant et afin que ceux qui sont intéressés puissent donner leurs noms pour le voyage à l'étranger. Nous étions déjà au courant, mais je crois que mon collègue demande une réponse définitive, et j'estime qu'ils devraient être prêts à la donner d'ici là.

+-

    Le président: Je demanderai au greffier d'appeler chacun des membres demain. Les choses ne seront probablement pas claires avant le week-end, mais si les membres souhaitent discuter de cette question jeudi, nous pourrons le faire, mais j'espère que ce ne serait pas trop long afin de ne pas faire d'attendre les témoins. Demain, le greffier demandera à chacun des membres s'il a l'intention ou non de participer au voyage.

    Nous allons maintenant entendre nos distingués invités qui, sauf erreur, sont ici pour nous informer au sujet de leur organisation, de leurs mandats et de leurs intentions, étant motivés par l'excellent principe selon lequel vaut mieux informer les parlementaires en amont plutôt qu'en aval, pour utiliser une analogie environnementale. Alors nous leur sommes très reconnaissants de comparaître aujourd'hui.

    A titre de document de référence, en plus de ce qui nous sera présenté aujourd'hui, je vous renvoie au rapport du vérificateur général pour 1995, que vous pouvez obtenir, notamment au chapitre 3 et au paragraphe 3.45 et suivants sous le titre «beaucoup d'études et de recherches ont été entreprises en vue de concevoir une nouvelle installation de stockage permanent des DHR». Ça nous prouve que ce dossier avance à la vitesse d'un glacier, puisque c'est dans sa nature, et cette question reste donc d'actualité et peut-être plus que jamais. Sur ce, je vous présente Mme Dowdeswell, une fonctionnaire nationale et internationale très distinguée. Je vous souhaite la bienvenue au comité, madame Dowdeswell. Vous avez la parole. Veuillez nous présenter vos collègues.

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell (présidente, Société de gestion des déchets nucléaires): Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs, de l'occasion que vous nous donnez de comparaître aujourd'hui devant le Comité permanent de l'environnement et du développement durable.

    Je suis accompagnée de M. Richard Dicerni, président du conseil d'administration de la Société de gestion des déchets nucléaires et vice-président directeur et secrétaire général de la Ontario Power Generation, de Mme Kathryn Shaver, directrice générale de la société, responsable des questions de gouvernance et de réglementation, et de Mme Donna Pawlowski, qui aujourd'hui m'aidera à répondre aux questions techniques.

    Nous en sommes aux premiers mois de notre mandat et je suis heureuse de vous présenter la Société de gestion des déchets nucléaires et d'amorcer ce qui sera, je l'espère, un dialogue permanent. Si le comité a des conseils ou des suggestions à nous fournir alors que nous entreprenons l'étude des solutions pour la gestion à long terme des déchets nucléaires au Canada, nous serions certainement heureux de les recevoir.

    L'exposé que j'ai préparé est très court. Ainsi, il nous restera plus de temps pour discuter avec les membres du comité et pour répondre à vos questions.

    La Société de gestion des déchets nucléaires a été créée en vertu de la Loi sur les déchets de combustibles nucléaires, qui a reçu la sanction royale le 13 juin 2002 et qui est entrée en vigueur le 15 novembre 2002. Comme l'exige la loi, les producteurs de déchets nucléaires, notamment la Ontario Power Generation, Hydro-Québec et la Société d'énergie du Nouveau-Brunswick ont créé cet organisme. Ce sont les sociétés canadiennes qui sont propriétaires de centrales nucléaires. Le conseil s'est engagé à remplir toutes les exigences de la Loi sur les déchets de combustibles nucléaires et nous avons structuré notre société de manière à ce qu'elle reflète les objectifs de cette loi. Conformément aux principes du «pollueur payeur», les propriétaires de déchets ont élaboré des dispositions de partage des coûts pour financer notre organisme. Le conseil a également créé un conseil consultatif composé d'un certain nombre de Canadiens distingués, présidé par l'honorable David Crombie. Le conseil consultatif contribue considérablement aux travaux de la société en fournissant des conseils qui vont bien au-delà de ce qu'exige la loi, c'est-à-dire de commenter notre étude vers la fin de nos travaux. Les sociétés ont également créé des fonds détenus en fiducie pour que l'argent soit disponible pour financer la solution de gestion des déchets nucléaires que le gouvernement adoptera en définitive.

    Essentiellement, la société a trois ans pour étudier des méthodes de gestion à long terme des déchets nucléaires du Canada. Elle doit présenter une recommandation au gouvernement par l'entremise du ministre des Ressources naturelles. En guise de contexte, il y a environ 1,5 million de grappes de combustible au Canada. Une fois sorties des réacteurs, on les place en général pendant dix ans dans des piscines remplies d'eau situées dans les centrales nucléaires afin qu'elles puissent refroidir et être à l'abri jusqu'à ce que leur radioactivité diminue. Ensuite, ils sont en général placés dans des contenants de stockage à sec dont la durée de vie prévue est de 50 ans. Notre tâche consiste à recommander au gouvernement les mesures à prendre après cette période.

    La loi exige que nous examinions au moins trois solutions mentionnées dans la loi, soit le stockage en formation géologique profonde, le stockage dans les centrales nucléaires, et le stockage centralisé en surface ou souterrain. Nous pouvons également examiner d'autres solutions, mais nous devons, pour chacune d'elle, décrire de manière complète les différents éléments, y compris les risques, les coûts et les avantages, et nous devons élaborer un plan de mise en oeuvre. Toutes les solutions doivent être évaluées en fonction de divers critères,notamment éthiques, sociaux, économiques, techniques et environnementaux. Lorsque le gouvernement du Canada aura choisi une méthode de gestion des déchets nucléaires, la société sera chargée de la mise en oeuvre.

    Comme la plupart d'entre vous le savez, la société a été créée en réponse au groupe d'études Seaborn qui a fait une évaluation environnementale du stockage en formation géologique profonde, le concept élaboré par l'EACL pour enfouir les déchets nucléaires profondément dans le bouclier canadien. L'une des leçons importantes du groupe Seaborn, qui est clairement reflétée dans la Loi sur les déchets de combustibles nucléaires adoptée par le Parlement est que pour être acceptable un plan de gestion à long terme du combustible nucléaire épuisé doit recevoir l'appui du public ou de la société. Il doit être fondé sur un cadre d'évaluation éthique et social approprié. Ces exigences sont reflétées dans notre énoncé de vision, de mission et de valeurs. Cet énoncé est le point de départ et le fondement de toutes les activités de la société.

Á  +-(1115)  

    Nous considérons que notre mandat consiste à élaborer de concert avec les Canadiens une méthode de gestion à long terme du combustible nucléaire épuisé, qui soit acceptable sur le plan social, valable sur le plan technique, responsable sur le plan environnemental et faisable sur le plan économique. Les gens s'attendent avec raison à contribuer à trouver des solutions aux grandes questions de politique générale qui les touchent, notamment la manière dont les déchets nucléaires sont gérés au Canada. C'est pourquoi la SGDN a dès le début tenté de mobiliser un vaste éventail de communautés d'intérêt, d'abord pour nous aider à arrêter notre plan de travail, puis à formuler la recommandation comme telle.

    Nous avons appelé la première phase de notre effort «Conversations sur les attentes». Au cours des derniers mois, nous avons rencontré de nombreux particuliers et groupes, y compris les habitants de collectivités où se trouvent un site nucléaire, des organismes environnementaux, des jeunes, des experts sectoriels, des Canadiens des différentes régions du pays, des Autochtones et, bien entendu, des parlementaires. Nous avons discuté notamment de qui ils sont, de leurs intérêts, ainsi que de la manière dont ils souhaitent être consultés et collaborer à notre effort.

    À la deuxième phase de notre tâche, qui est près de commencer, nous nous inspirerons de ce que nous avons entendu et appris. En effet, la prochaine étape de notre travail consistera à élaborer un cadre intégré pour l'analyse des différentes méthodes de gestion que j'ai mentionnées. Ce cadre exprimera les grandes lignes des valeurs et des priorités des Canadiens, ainsi que les meilleures connaissances et le savoir-faire sur ce sujet. Le développement durable sous-tendra notre schéma conceptuel à mesure que nous établirons des critères d'évaluation reflétant les valeurs sociales, éthiques et communautaires, l'intégrité environnementale, la faisabilité économique et les normes techniques qui s'appliquent. Nous avons l'intention d'utiliser divers outils pour intéresser les parties prenantes à notre travail. Ainsi, nous escomptons nous servir d'outils comme les groupes de citoyens, les tables rondes d'experts et les ateliers de discussion des différents scénarios, et nous voulons faire fond des résultats d'une enquête publique que nous avons entreprise pour nous assurer que nous établissons le dialogue avec un large éventail de Canadiens.

    L'essentiel de notre dialogue avec le grand public se fera par le truchement de notre site Web. On y trouvera des études et des documents, qui y seront archivés, ainsi que des résumés des conclusions tirées de discussions et d'activités menées à différentes étapes de notre effort. On prévoit également faire des sondages en direct et recueillir des commentaires pour que tout le monde puisse exprimer son point de vue, notamment ceux qui n'ont peut-être pas l'occasion de contribuer d'autres façons. Notre site Web est déjà opérationnel, et je vous encourage à le consulter à l'adresse www.nwmo.ca.

    Tout au long de cette deuxième phase, il y aura une interaction dynamique entre le processus de mobilisation que je viens de mentionner et nos travaux de recherche et d'analyse portant sur les méthodes de gestion. Il existe d'importantes connaissances et expériences au Canada et à l'étranger sur cette question. Nous ne sommes pas seuls. En effet, bien des pays de par le monde en sont exactement à la même étape d'enquête que nous. Nous maîtriserons les meilleures connaissances disponibles à ce sujet, y compris les récents travaux effectués par les propriétaires conjoints de déchets depuis la publication du rapport Seaborn en 1998. Notre rôle est de nous convaincre que les bonnes questions ont été posées au sujet des méthodes de gestion du combustible nucléaire que nous sommes en train d'étudier, et qu'on y a bien répondu. Si nous constatons des lacunes, nous commanderons notre propre recherche. Comme je l'ai déjà dit, nous avons l'intention de travailler avec la communauté internationale pour faire en sorte que les connaissances découlant de la recherche entreprise actuellement ailleurs dans le monde, notamment en Suède et en Finlande, seront mises à contribution dans le cadre de notre étude. Nous intégrerons continuellement les éclairages fournis par la recherche et par notre dialogue avec les citoyens grâce à notre cadre analytique, et nous poserons des questions aux experts à mesure qu'elles surviendront durant le processus de mobilisation du public et, enfin, nous présenterons les conclusions aux parties intéressées et au grand public pour discussion.

Á  +-(1120)  

    Il est important que notre dialogue ait lieu au moment opportun et selon une méthode qui convient aux différents auditoires, intérêts et capacités des collectivités et des particuliers avec qui nous sommes appelés à travailler. Nous continuerons de nous fonder sur les connaissances des experts et des conseillers qui ont géré des programmes semblables de mobilisation du public dans d'autres domaines. Nous avons à coeur de tenir des consultations constructives, par exemple avec les Autochtones, et sachez que nos discussions à cet égard ne font que commencer. À la fin de cette étape de notre travail, nous rédigerons un document de travail où nous exposerons les différentes options et proposerons un cadre analytique.

    Voilà qui m'amène à la troisième phase, laquelle portera essentiellement sur l'évaluation des différentes méthodes de gestion. La réaction du public au document de travail sera cruciale pour l'évaluation. Il sera donc important d'incorporer une orientation sociale sur la manière optimale de mettre en application le cadre analytique et de cerner les points forts et faibles des méthodes de gestion telles que décrites par le public. Avant de soumettre notre rapport final au gouvernement, nous avons l'intention de tester et de valider nos recommandations.

    Monsieur le président, trois années, ce n'est pas une longue période pour effectuer ce genre d'étude. Nous devons lutter continuellement pour trouver un équilibre entre élaborer un plan d'une manière opportune et faire en sorte que le dialogue soit approprié, si bien que tout l'éventail des points de vue sociaux puisse être repris et intégré dans notre recommandation. Nous nous réjouissons à la perspective de relever ce défi, et nous sommes heureux de contribuer au processus décisionnel du gouvernement sur cette question on ne peu plus importante. Nous nous engageons à assumer toutes les responsabilités dont nous a investi la Loi sur les déchets de combustible nucléaire. Une de ces responsabilités consiste à faire rapport régulièrement au ministre des Ressources naturelles. D'ici quelques semaines, nous soumettrons notre premier rapport annuel au ministre, M. Dhaliwal, lequel rapport couvrira la période entre octobre et décembre 2002. Je me ferais un plaisir d'envoyer à tous les membres du comité un exemplaire de ce rapport, et avec votre permission, monsieur le président, je resterais en contact avec le greffier du comité pour prendre les dispositions nécessaires.

    Comme je l'ai dit, j'espère que ceci n'est que le début d'un dialogue permanent avec votre comité. Vos conseils, vos recommandations et vos suggestions relativement à la SGDN seront toujours accueillis favorablement. Je me fais un plaisir aussi de prendre part à une conversation avec vous et de tenter de répondre à vos questions.

    Je vous remercie, monsieur le président.

Á  +-(1125)  

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Bailey.

+-

    M. Roy Bailey: Merci beaucoup, monsieur le président.

    Personnellement, en arrivant, j'ai jeté un coup d'oeil aux noms des témoins, et j'ai pensé qu'il s'agissait peut-être d'une conférence régionale de délégués de ma propre région. En effet, ma région compte environ huit familles Shaver, et un des membres de cette famille est Cathy Shaver, une de mes anciennes étudiantes. La famille Dowdeswell est l'une des premières familles à avoir fondé ma collectivité; elle s'était établie avec l'avènement du chemin de fer en 1912, il y a encore des terres qui appartiennent à cette famille. Les Pawlowski sont aussi une famille assez notoire, principalement parce que le père et le fils étaient commissaires-priseurs. Tout cela pour dire, monsieur le président, que je me sens dans mon élément, ici.

    Merci beaucoup pour votre exposé. Je me suis découvert un vif intérêt pour le combustible nucléaire et la gestion d'autres types de déchets. J'ai même consacré une partie des deux semaines de congé parlementaire à un autre type de gestion de déchets, en tentant de comparer notre façon de faire avec celle de nos voisins américains.

    Madame Dowdeswell, vous avec mentionné les fonds détenus en fiducie. Qui détient ces fonds?

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Ces fonds en fiducie sont détenus par des institutions financières dans chacune des trois provinces où se trouvent des propriétaires de déchets.

+-

    M. Roy Bailey: Merci.

    Vous avez dit que cela prend un certain temps avant qu'il soit possible d'enfouir les déchets dans de profondes cavernes, par exemple. J'ai eu moi-même une longue et agréable conversation au sujet de l'entreposage des déchets nucléaires avec un jeune ingénieur de la Saskatchewan qui ne cessait de voyager. J'ai appris qu'il n'était pas nécessaire d'accumuler autant de déchets et qu'il était possible de continuer à faire de la régénération, ce qui permettrait éventuellement de n'avoir qu'un dixième des déchets nucléaires que nous avons aujourd'hui, même s'il reste moins coûteux d'utiliser de l'uranium frais que de régénérer celui qui a déjà été utilisé. Si c'est le cas, j'ai pensé qu'il vaudrait la peine de se pencher sur la possibilité de réduire tous nos déchets. Si nous n'accumulions qu'un dixième de ce que nous avons aujourd'hui, nous n'aurions pas tant de préoccupations à ce sujet, mais j'imagine que c'est une autre paire de manches. Je tenais à mentionner à quel point j'ai trouvé la conversation agréable.

    Vous avez dit une chose qui m'a beaucoup plu, et qui s'avère non seulement dans ce domaine mais aussi dans beaucoup d'autres. Vous avez parlé de l'appui d'une population éclairée. Le mot déterminant là-dedans, c'est « éclairé ». En effet, ce sont les gens non éclairés qui sont toujours les plus négatifs, alors que ceux qui sont éclairés sont plus disposés à voir une question sous un angle positif. Mis à part votre site Web, pouvez-vous nous expliquer ce que fait votre organisation pour parrainer l'appui d'une population éclairée?

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: J'ai toujours cru que l'information était à la base même de toute modification de comportement pour la plupart des grandes questions environnementales, et j'en veux pour preuve le cas qui nous concerne. Nous n'avons pas encore mis au point un plan d'action détaillé, mais nous savons qu'il faut présenter de l'information la plus objective et la plus neutre possible chaque fois que nous en avons l'occasion. Pendant nos premiers mois, nous nous sommes surtout préparés à utiliser le site Web de la façon la plus efficace possible pour atteindre le plus grand nombre possible de gens; mais nous en avons également profité pour avoir des conversations avec les Canadiens et pour énoncer des faits pertinents. Ainsi, notre recherche d'opinion publique a révélé que beaucoup de Canadiens ne comprennent pas combien de déchets sont générés et ce qui leur arrive actuellement. Voilà pourquoi nous avons l'intention de mettre au point des feuillets de renseignements. Mais nous allons communiquer avec les collectivités, sur demande, pour essayer de transmettre le message.

    On nous a conseillé de nous pencher sur les différentes façons de préparer du matériel pédagogique en vue de le présenter dans les tribunes appropriées. L'une des choses que je ne peux me permettre d'oublier, c'est évidemment le calendrier qui est le nôtre ainsi que les priorités à accorder aux activités que nous entreprenons. Mais je souscris sans réserve à ce que vous dites, savoir qu'une bonne information est indispensable pour que la population comprenne.

Á  +-(1130)  

+-

    M. Roy Bailey: Merci beaucoup.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Bigras.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Merci, monsieur le président.

    Vos travaux pour le Québec sont assez importants, compte tenu entre autres des choix stratégiques qu'aura à faire Hydro-Québec dans les années à venir, par exemple pour l'avenir de la centrale nucléaire de Gentilly-2.

    Comme vous le savez, soit on devra procéder à une réfection de la centrale, qui coûtera 845 millions de dollars, soit on entrevoit une fermeture potentielle, qui occasionnera des coûts d'un milliard de dollars. Il nous paraît donc important de prendre une décision à cet égard, vu qu'il y a actuellement plus de 3 000 tonnes de déchets sur le site et qu'on calcule qu'il s'en ajoutera 100 tonnes par an jusqu'en 2013.

    Vous nous avez dit que les consultations étaient importantes. D'ailleurs, dans la loi, on nous indique assez clairement que le processus de consultation est prévu durant la période de mise en place de la société de gestion et qu'il doit être mené avec transparence et rigueur. Madame Dowdeswell, vous avez indiqué hier au journal Le Soleil, et je cite:

Mais chose certaine, dit-elle, nous consulterons les communautés évoluant aux environs des centrales nucléaires. Elles sont au coeur de nos préoccupations. Et nous voulons surtout connaître leurs attentes.

    Monsieur le président, je suis d'accord sur une phrase comme celle-là, mais ce que les gens veulent savoir, c'est quel est l'échéancier. Vous avez trois ans à partir du moment où la loi a reçu son décret, c'est-à-dire jusqu'en 2005, pour faire des propositions au gouvernement. Je me rends compte que vous avez dit tout à l'heure à mon collègue M. Bailey que vous n'aviez pas de plan d'action. Vous n'êtes pas en mesure de nous dire dans quel délai ces consultations seront faites ni de quelle façon la population sera consultée. Les expériences passées et les résultats de la Commission Seaborn nous indiquent que ce que les gens veulent, c'est non seulement que les aspects techniques soient pris en considération, mais que les aspects sociaux le soient tout autant. Voilà la grande conclusion de la Commission Seaborn.

    Est-ce que vous avez aujourd'hui un plan d'action à nous proposer pour qu'on puisse dire aux citoyens de quelle façon ils seront consultés après trois ans et quelles sortes de recommandations seront faites au gouvernement?

[Traduction]

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Merci de votre question. Au cours de la première phase de nos activités, nous avions décidé d'avoir des conversations sans formalité avec les Canadiens de toutes les régions. Je suis heureuse de vous signaler que nous venons tout juste de passer deux journées couronnées de succès au Nouveau-Brunswick, et que nous avons eu l'occasion de rencontrer les travailleurs des centrales, le groupe de liaison de la collectivité, les collectivités autochtones, les maires des régions, la Chambre de commerce, c'est-à-dire toute la gamme des gens intéressés. Nous comptons faire une visite semblable au Québec, même si je ne sais pas exactement à quelle date cela se fera; nous espérons qu'elle aura lieu avant la fin avril.

    Ce ne sont là que des conversations initiales. Nous ne savons que trop bien que les consultations se font généralement à la fin des démarches, c'est-à-dire une fois que les questions ont été réglées et que le plan d'action a été établi; c'est à ce moment-là qu'on demande aux gens d'accepter ou de rejeter diverses options. Pour notre part, nous avons refusé cette façon de faire. Nous voulons que les Canadiens puissent nous aider à mettre au point au départ la démarche à suivre, et voilà pourquoi nous voulons tenir des conversations sans formalité dès le début. C'est ensuite que nous aurons des conversations plus poussées et qu'il sera possible de consulter la population à la deuxième et à la troisième étape, telles que je les ai décrites.

    Ce que j'ai répondu au journaliste du Soleil avait trait à la première phase de nos activités, et c'est pourquoi je n'ai pas pu lui donner de date précise puisque rien n'a encore été confirmé.

Á  +-(1135)  

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: Donc, cela concernait l'aspect plutôt social de la démarche. D'un point de vue plus technique, comme vous le savez, l'utilisation du Bouclier canadien comme «lieu national» d'enfouissement des déchets constitue une possibilité qui est fortement prise en considération. Donc, sur une échelle allant de «pris fortement en considération» à «pris peu en considération», quelle place accordez-vous à cette option dans la recommandation que vous pourriez être appelés à faire? Mais surtout, au-delà de la consultation sociale avec les communautés sur cette question, quelle place allez-vous accorder aux consultations techniques?

    Par exemple, est-ce que vous envisagez concrètement de faire une tournée canadienne qui viserait à tester l'hypothèse de la méthode d'enfouissement dans le Bouclier canadien? Est-ce que c'est envisageable? Naturellement, l'aspect social est fondamental, parce que les communautés veulent savoir où seront enfouis ces déchets, mais l'aspect technique est tout aussi important pour avoir une vision durable quant à l'enfouissement de ces déchets. Donc, est-ce que vous envisagez une tournée canadienne sur la question de l'enfouissement des déchets nucléaires dans le Bouclier canadien?

[Traduction]

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Nous voulons absolument nous assurer que l'on tienne compte des aspects techniques de ces trois méthodes. Beaucoup de techniciens et de spécialistes se sont penchés sur le stockage géologique. Mais nous devons aussi consacrer tout autant d'efforts à l'étude des deux autres méthodes. Nous savons que beaucoup de recherche se fait dans d'autre pays—comme par exemple en Suède et en Finlande—depuis l'époque du rapport Seaborn. Ici même au Canada, les trois propriétaires de déchets ont continué à effectuer de la recherche, tout comme l'a fait l'EACL. Nous allons étudier la recherche qui aura été faite sur les trois options et, avec l'aide des experts internationaux, nous allons prendre nos décisions sur les questions qui ne sont pas encore réglées. Plusieurs scientifiques nous ont déjà signalé les questions qui leur laissaient des doutes de même que celles qui les renforçaient dans leurs convictions. Nous en tiendrons compte et nous nous demanderons s'il reste encore des lacunes dans notre analyse de la situation, pour que les chercheurs de notre propre programme puissent les combler.

+-

    Le président: Pourriez-vous répondre à la deuxième partie de la question de M. Bigras?

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Les questions d'ordre technique feront également l'objet de consultations, soyez-en sûrs.

+-

    Le président: Mais vous allez également parcourir le pays?

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Nous n'avons pas encore décidé s'il faudrait parcourir tout le pays ou non, mais vous avez raison de dire qu'en principe, notre mandat est pancanadien et que nous consulterons tous les Canadiens.

[Français]

+-

    Le président: Merci, monsieur Bigras.

    Monsieur Comartin, s'il vous plaît.

[Traduction]

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Merci monsieur le président, et merci à nos témoins.

    J'ai certaines interrogations au sujet du conseil d'administration. Lorsque nous avons étudié le projet de loi, on a longuement discuté de la façon dont serait formé le conseil d'administration; de plus, c'est avec beaucoup d'insistance, surtout de la part des partis d'opposition, qu'on a demandé que certains des membres représentent les Autochtones, le milieu de l'environnement, les syndicats, ainsi que les conseils locaux de municipalités où étaient déjà stockés des déchets. Pouvez-vous nous dire si les membres du conseil d'administration reflètent bien cet éventail?

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Avec votre permission, monsieur le président, je demanderais au président du conseil d'administration de répondre.

+-

    M. Richard Dicerni (président du conseil, Société de gestion des déchets nucléaires): La loi porte que les propriétaires de déchets doivent assumer l'administration de la société de gestion des déchets. Vous vous rappellerez sans doute que la commission Seaborn avait proposé un autre modèle de gouvernance, mais que le gouvernement avait préféré adopter le modèle de régie par les propriétaires de déchets comme en Scandinavie. Le conseil d'administration actuel est composé de représentants de Ontario Power Generation, de New Brunswick Power et d'Hydro-Québec.

    En ce qui concerne les contacts avec les autres clientèles, nous avons voulu former un conseil consultatif qui soit aussi représentatif que possible à l'heure qu'il est. Il compte actuellement sept ou huit personnes. Nous cherchons à activer les choses le plus possible—même si le président a parlé de bouger à la vitesse des glaciers. Nous avons voulu que la société soit sur pied le plus rapidement possible après l'adoption de la loi, nous avons nommé une présidente qui a, à son tour, nommé son personnel et un conseil consultatif. Nous avons voulu que le conseil consultatif soit bien représentatif de la grande diversité des points de vue. Le président a mentionné que David Crombie en faisait partie, et il est accompagné de gens représentant tout un éventail de points de vue. Nous avons donc tenu compte de notre objectif de faire participer de vastes pans de la société.

Á  +-(1140)  

+-

    M. Joe Comartin: Le nom et les titres de compétence des membres du conseil consultatif figurent-ils également sur le site Web? Vous faites signe que oui.

    Combien de fois le conseil d'administration, les propriétaires se sont-ils réunis?

+-

    M. Richard Dicerni: Trois fois, si je ne m'abuse. La première, c'était pour mettre sur pied la société et étudier les différentes candidatures. La deuxième réunion visait à établir les principales balises. Enfin, nous nous sommes réunis récemment une troisième fois; à cette réunion, la présidente a fait le point sur ces principales activités.

+-

    M. Joe Comartin: Quand le délai de trois ans prendra-t-il fin?

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Le 15 novembre 2005.

+-

    M. Joe Comartin: Au moment où le projet de loi franchissait les différentes étapes, des parlementaires ont exprimé le désir de participer davantage au processus, aussi bien aux consultations continues qu'à l'examen final. Entendez-vous faire appel à la participation d'un comité parlementaire d'ici le 15 novembre 2005?

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Ma présence ici ce matin témoigne de ma volonté de connaître le point de vue des parlementaires. Nous avons également l'intention de répondre aux demandes du Comité permanent des ressources naturelles, et nous savons que des sénateurs s'intéressent également à ce dossier. Si je me suis adressée à votre comité en premier lieu, c'est parce que je suis profondément convaincue que la question dont nous débattons a trait au développement durable; il était donc indiqué, à mon avis, de comparaître d'abord devant votre comité, mais cela ne veut pas dire que les autres parlementaires seront exclus. Nous nous sommes entretenus par le passé avec les parlementaires qui avaient manifesté de l'intérêt pour cette question, surtout ceux qui représentaient des régions dotées d'installations nucléaires. Nous continuerons à le faire.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Reed.

+-

    M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Comme je suis ce dossier depuis 25 ans, je trouve extrêmement encourageante la formation de cette société. J'ai en main une partie du nouveau Livre blanc sur l'énergie du Royaume-Uni. Il traite d'énergie nucléaire et la question des déchets nucléaires reste à régler. Un échange de vues avec les gens du Royaume-Uni nous donnera peut-être un meilleur éclairage sur cette technologie.

    À mon avis, les déchets nucléaires sont le problème le plus important qu'il faut régler si nous voulons continuer à exploiter l'énergie nucléaire. Nous faisons l'autruche depuis 25 ans, une génération; et on vient de décider de stocker des déchets hautement toxiques en Ontario. Si on ne s'attaque pas dès maintenant à ce problème, on pourra faire une croix sur cette forme d'énergie. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé d'acceptation sociale. Je suis tout à fait d'accord avec vous, mais je me demande comment faire pour réussir ce véritable tour de force : susciter l'acceptation sociale alors que le problème se pose déjà, quoiqu'on fasse. Dans l'avenir, on pourra essayer de susciter l'acceptation sociale. Je ne voudrais pas être à votre place car une tâche gigantesque vous attend.

    Voici ma question : Selon les auteurs de ce Livre blanc britannique, la conjoncture économique actuelle fait perdre son attrait à l'énergie nucléaire. Au Canada, l'énergie nucléaire reste une option peu attrayante, mais au fil des ans nous avons entendu les responsables de sociétés d'énergie nucléaire nous vanter son caractère économique et tout le reste. Qu'adviendra-t-il des fonds détenus en fiducie? Est-ce que leur coût viendra gonfler le coût de l'électricité ou sera-t-il dissimuler dans l'assiette fiscale globale?

Á  +-(1145)  

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Les propriétaires des déchets continueront à contribuer à ces fonds en fiducie jusqu'à ce que le gouvernement exerce son choix d'une méthode de gestion et octroie un permis de construction. Autrement dit, la Société de gestion des déchets nucléaires ne peut pas toucher à ces fonds tant que le permis de fonctionnement n'aura pas été octroyé.

    Je vais demander au président de répondre plus précisément à votre question sur la façon dont les propriétaires des déchets peuvent gérer ce fonds en fiducie.

+-

    M. Richard Dicerni: Les sommes que nous versons dans les comptes en fiducie chaque année figurent sur nos états financiers; il s'agit d'un poste de dépense distinct du bilan de Ontario Power Generation (OPG).

+-

    M. Julian Reed: Le mandat de cette société ne l'obligeait pas à déclarer tous ses coûts chaque année. Elle pouvait produire des états financiers, mais la Loi sur la société de l'électricité ne l'obligeait pas à y inclure ses coûts d'immobilisations; les coûts de remise à neuf n'ont pas été attribués au coût de l'électricité. C'est ainsi qu'après 25 ans, nous nous sommes retrouvés avec cette dette accumulée de 38 milliards de dollars, si je ne m'abuse, et cela s'est fait sous l'égide de la Loi sur la société de l'électricité. Cela m'amène à la question de l'avenir de l'énergie nucléaire. Pour que ce type d'énergie soit viable économiquement dans l'avenir, il faut que sa dimension financière soit absolument transparente, ce qui n'est pas encore le cas.

Á  +-(1150)  

+-

    M. Richard Dicerni: Il y a une énorme différence entre la Loi sur la société de l'électricité et la récente Loi sur la concurrence dans le secteur de l'énergie, en Ontario. Comme l'exige la législation fédérale, nous avons versé 500 millions de dollars à titre de contribution initiale; les dépenses d'OPG sont donc tout à fait transparentes à cet égard. Il en va de même des 100 millions de dollars que nous contribuons chaque année à ce fonds. La contribution d'Hydro-Québec est proportionnelle à la quantité des déchets qu'elle produit. Cet argent est versé dans des comptes en banque distincts, comme Mme Dowdeswell l'a indiqué, en vue de financer la construction d'installations ou la mise en oeuvre d'une autre stratégie. Ontario Hydro n'avait pas constitué des réserves pour les mêmes fins.

+-

    M. Julian Reed: Je vous souhaite bonne chance dans votre tâche herculéenne. Si vous avez besoin de notre aide, je pense que nous sommes tous prêts à vous appuyer.

+-

    Le président: Monsieur Tonks.

+-

    M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie les témoins de leurs exposés.

    La Commission Seaborn a fait la distinction entre la faisabilité sur le plan technique et le stockage sécuritaire des déchets nucléaires d'une part, et la sécurité de la société, d'autre part. Je n'ai pas encore très bien compris cette distinction. Pourriez-vous expliquer au comité les grandes lignes des différences entre la faisabilité technique et la sécurité de la société?

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Je ne prétends pas interpréter les propos de la Commission Seaborn, mais je sais que les questions de sécurité technique et sociale ainsi que de responsabilité éthique sont fort épineuses pour beaucoup de pays à l'heure actuelle. Selon certains, il serait facile de décrire d'une façon technique les conséquences d'une option donnée et d'effectuer les recherches sur divers aspects de cette approche technique. Cependant, la gestion des déchets nucléaires hautement toxiques suscite beaucoup d'attention, voire d'anxiété, chez la population depuis 30 ans. L'incertitude, la complexité et la longue période pendant laquelle les effets de ces décisions se font sentir contribuent à ce climat. Selon certains experts, il s'agirait de milliers d'années, et des périodes aussi longues dépassent tout simplement l'entendement de la plupart des gens.

    Les aspects sociaux et éthiques ont trait à l'équité intergénérationnelle. Les décisions que nous prenons aujourd'hui vont-elles empêcher les générations futures de prendre des décisions? Et inversement, si nous avons produit les déchets, n'avons-nous pas la responsabilité morale de les éliminer? Ce sont des questions sociales, mais elles se répercutent sur les collectivités et sur leurs moyens de subsistance et sur leur volonté d'accepter ou non la présence des déchets à long terme. Dès lors, il devient capital d'aborder le débat en suivant une série d'étapes et il faut également déterminer les conditions dans lesquelles une collectivité est prête à accepter cette responsabilité.

+-

    M. Alan Tonks: Je suis sûr que le comité saura apprécier cette réponse. Il semblerait à mon sens que dès lors qu'on procède à de larges consultations, les gens veulent comprendre que ce ne sont pas simplement les meilleures données scientifiques qui assurent l'intégrité de la décision, mais ils veulent également avoir l'assurance que l'angle du développement durable est pris en compte, et que peu importe la technologie qui est adoptée, des générations futures ne sera pas compromis. Je demeure convaincu que les collectivités vont vouloir comprendre qu'elles aussi ont la possibilité d'examiner ce genre d'avenir. Pendant vos consultations, y a-t-il des collectivités qui vous ont déjà signalé qu'elles comprenaient les deux volets, le volet sécurité scientifique et le volet pérennité? Et y a-t-il des collectivités qui vous ont dit oui, nous voulons vraiment avoir une technologie dans ce domaine-ci, et nous en avons parfaitement compris le pour et le contre?

Á  +-(1155)  

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Cette question n'a pas encore été posée aux collectivités canadiennes, mais, par contre, d'autres pays comme la Finlande et la Suède l'ont fait, et si je parle de ces deux pays c'est parce que je me suis entretenue récemment avec des gens là-bas. Ainsi, la Suède a invité toutes les municipalités d'une région géographique qui convenait particulièrement à ce genre de projet, et cela représente pratiquement l'ensemble du territoire suédois, à dire si elles voulaient que les discussions se poursuivent. Au bout du compte, quatre collectivités voulaient approfondir la chose et les pouvoirs publics en ont retenues deux en vue de choisir un site définitif. Je parle ici du processus de sélection du site. Nous, nous travaillons plutôt sous l'angle de la gestion, qui précéderait la sélection d'un site, mais je suis partie du principe que, si je voulais préparer un plan de mise en oeuvre en vue d'une recommandation, il serait utile en autres de fixer au moins certains critères possibles pour les communautés disposées à recevoir le site avant même le début du processus de sélection. Mais je pense pouvoir dire sans crainte de me tromper que, dans le monde entier, il a été extrêmement rare qu'on réussisse à intéresser des collectivités.

+-

    M. Alan Tonks: Je comprends les balises qui ont été mises en place au niveau de la participation des communautés. Pensez-vous que vous devez également présenter les meilleures données scientifiques disponibles au sujet des autres options, par exemple ce que vous avez appris lors de vos voyages à l'étranger? Pensez-vous que cela fasse partie de la dynamique de votre rôle?

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Tout à fait. Notre travail doit toujours reposer sur les meilleures données scientifiques disponibles. Les trois options envisagées par la loi sont celles que nous devons examiner, certes, mais cela ne veut pas dire pour autant que nous ne sommes pas attentifs à toute autre option qui pourrait se présenter, et nous savons que certains pays en envisagent déjà certaines très sérieusement.

+-

    M. Alan Tonks: Très bien.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci, monsieur Tonks.

    Madame Scherrer, deuxième tour.

[Français]

+-

    Mme Hélène Scherrer: Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je dois d'abord vous avouer que le sujet d'aujourd'hui ne m'est pas très familier, si ce n'est pour ce que j'en ai appris lors de votre présentation ou par l'entremise des médias, dans les journaux et à la télévision; mon point de vue sera donc celui d'une citoyenne plutôt que celui d'une parlementaire.

    Mon sentiment premier me porte à vous dire que les simples mots « déchets nucléaires » me font peur et continuent de susciter la crainte dans ma communauté et chez les gens qui m'entourent.

    D'après ce que je peux comprendre, la mise en vigueur de la loi votée récemment est due à des pratiques de mauvaise gestion et à de mauvaises décisions. La mauvaise foi n'était pas nécessairement en cause, mais il reste que des dommages importants en ont résulté. La prise en charge de la gestion de ces déchets toxiques n'a peut-être pas été très musclée.

    Vous parlez de la sensibilisation du grand public. Je vais vous parler en tant que citoyenne plutôt qu'en tant que parlementaire versée dans le sujet. Comme le dit M. Reed, vous avez un grand bout de chemin à faire pour convaincre les gens qu'il est réellement possible de gérer des déchets nucléaires sans que cela ait des impacts négatifs sur la communauté. Je vous souhaite également beaucoup de plaisir lorsque viendra le temps de choisir un site.

    Même si l'ensemble de la population en venait à penser que ces opérations ne sont pas nécessairement dangereuses, vous auriez toujours à vivre avec le syndrome du «pas dans ma cour». Malgré leur compréhension des faits, les gens refuseront toujours que vous vous approchiez de leur communauté; ils ne voudront rien entendre.

    Pour en arriver à une gestion plus saine des déchets nucléaires et à une dédramatisation de ce sujet, il faudrait, à mon avis, garantir à la population que les dommages subis par certaines communautés peuvent être corrigés. Si on pouvait prouver aux gens qu'en dépit de cette mauvaise gestion qui a causé des dégâts ou des accumulations incontrôlables à certains endroits, on est désormais capable de contrer ces effets et d'assurer une bonne gestion, je pense qu'on pourrait établir un sentiment de confiance. Il faudrait démontrer que la gestion de ces déchets est faisable partout au pays.

    Dans vos phases 1, 2 ou 3, prévoyez-vous des opérations précises visant à réparer les dégâts ou à mettre en application des mesures qui vont faire en sorte que le public ait confiance en la faisabilité d'une telle gestion?

  +-(1200)  

[Traduction]

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: La phase un avait surtout pour but de nous aider à comprendre les préoccupations des gens sans les forcer de quelque façon que ce soit, à faire un choix entre trois options, mais plutôt à comprendre leurs points de vue sur la question de la gestion des déchets nucléaires de haute activité. À mon avis, il serait injuste de dire que la gestion de ce genre de déchets nucléaires a été jadis mal pensée. Je suis toute nouvelle dans ce domaine, mais selon ce que je sais, la communauté mondiale n'est tout simplement pas parvenue à trouver des solutions techniques socialement acceptables qui auraient permis de progresser dans ce domaine. Les milieux intéressés se sont surtout employés, étape par étape, à faire en sorte qu'on puisse utiliser des méthodes de stockage temporaires qui soient les meilleures , par contre, à ce stade-ci, nous parlons des problèmes de gestion à long terme, et cela n'est en rien lié à ce qui se faisait jadis, mais c'est simplement qu'on n'a pas encore réussi à trouver des solutions techniques qui soient à la fois économiquement faisables et socialement acceptables.

+-

    Le président: Merci, madame Scherrer.

    Permettez-moi d'abord de vous féliciter pour le nom direct et transparent que vous avez donné à votre société. À notre époque, il est très rafraîchissant de voir éviter les termes orwelliens que l'on utilise pour tenter de déguiser l'intention véritable d'un organisme.

    Vous avez demandé des conseils et des suggestions, et les membres de notre comité ont certainement déjà formulé des conseils. J'aimerais vous soumettre une ou deux réflexions en ce sens. Il me semble que votre société dispose de deux avenues possibles: un examen passif ou un examen actif. J'entends par là, premièrement, un examen qui fait le bilan de la situation et qui cherche les moyens de la gérer. Vous avez une quantité X de combustible épuisé; on projette que vous recevrez la quantité Y de combustible épuisé pour une certaine période, et vous gérez la situation, comme M. Bigras l'a déjà dit, du point de vue technique et social. L'approche active, elle, suppose probablement une question a priori: voulons-nous augmenter ou réduire la quantité de déchets de combustible nucléaire? En d'autres mots, comment voulons-nous façonner l'avenir? Si l'avenir n'est pas façonné par les producteurs de ces déchets, qu'ils soient façonnés par vous, la Société. Parce que si vous adoptez le mode de gestion actif, vous voudrez sans doute examiner toutes les mesures fiscales, fédérales et provinciales, qui facilitent la production de déchets de combustible nucléaire sans proposer les moyens de les réduire. C'est toute une entreprise, mais elle pourrait s'avérer fructueuse.

    À titre d'exemple, au niveau fédéral, des milliards de dollars en subventions ont été versés, depuis 1952, à l'industrie nucléaire. À chaque année, dans le budget on y affecte une somme. Rien qu'en 1998, cette somme s'élevait à 220 millions de dollars; cette année, on affecte 120 millions de dollars, et pour chaque exercice financier, il y a une telle somme. Voulez-vous vous attaquer à cela? Voulez-vous poser des questions? Il me semble qu'il y a également au niveau provincial des mesures qui méritent d'être examinées, mais toutes ces réflexions découlent de la question de base que vous voudrez peut-être vous poser : souhaitons-nous encourager une production de déchets de combustible nucléaire accrue ou réduite? Ainsi, il me semble que le financement de l'industrie nucléaire, et les subventions qui y sont accordées sont d'une importance capitale.

    Mes collègues ont déjà abordé une autre question, à savoir, si les frais d'électricité comprennent les coûts de mise en service et, si c'est le cas, où cela s'applique-t-il, dans quelle mesure, et cela se fait-il avec des fonds distincts? En Ontario, au Québec, au Nouveau-Brunswick et ailleurs, toute la question de la mise en service doit aussi être examinée parce que cela ne fait pas encore partie du coût total de la production de déchets. On ne peut, comme l'ont souligné M. Tonks et Mme Scherrer, aborder ce problème isolément de ces autres éléments et aspects. C'est pourquoi M. Reed se plaint que c'est une tâche terriblement difficile, mais si vous ne vous attaquez pas à ces aspects de la question, vous faillirez à votre devoir, du moins d'après mon évaluation de votre mandat.

  +-(1205)  

    Nous en venons ensuite à la mise à l'épreuve et à la validation de vos recommandations, qui sera l'étape décisive. Si vous le souhaitez, bien sûr, notre comité se fera un plaisir de discuter avec vous de ces recommandations.

    Pour conclure,—car c'est un sujet qui se prête à des discussions interminables—, j'aimerais rappeler à votre attention quelque chose que je trouve utile du point de vue historique. Dans le rapport de 1995 du vérificateur général, on retrouve cette petite phrase, un véritable bijou, au paragraphe 3.53:

Selon le premier échéancier du Canada, établi en 1978, on prévoyait qu'un programme de démonstration de stockage permanent pourrait être entrepris en 1985, avec une installation en grandeur réelle fonctionnelle en l'an 2000.

    Donc je suis sûr que vous êtes motivés au plus haut point par l'optimisme et la détermination.

    Sur ce, nous amorçons la deuxième ronde avec M. Mills.

+-

    M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Merci beaucoup.

    Excusez-moi d'avoir été en retard et de ne pas avoir entendu votre exposé, mais j'ai néanmoins quelques questions et des remarques.

    Premièrement, je suis un peu soucieux de constater que votre comité consultatif ne comprend pas de Canadiens de l'Ouest. Or, il y a là des compétences dans le domaine de l'énergie nucléaire également.

    Deuxièmement, j'entends parler de plus en plus du recours possible à l'énergie nucléaire, pour deux raisons. D'abord, les sables bitumineux constituent la raison principale. Leur exploitation exige beaucoup d'énergie. On utilise du gaz naturel pour produire la vapeur nécessaire au processus d'extraction. La hausse des coûts énergétiques et la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto sont les raisons pour lesquelles ils envisagent aujourd'hui l'énergie nucléaire. Croyez-vous que ce raisonnement va s'étendre ailleurs, à mesure qu'augmenteront les coûts énergétiques et que s'accentueront les préoccupations environnementales?

    Par ailleurs, dans quelle mesure avez-vous pris en compte le terrorisme dans vos réflexions, le potentiel que cela représente pour le terrorisme? C'est ce que disent mes électeurs: Écoutez, le monde a changé depuis le 11 septembre, et les déchets de combustible nucléaire représentent un danger potentiel entre les mains de certains. Je n'oublierai jamais ma visite à Murmansk. J'ai vu cette vallée où gisaient à l'air libre des barres de combustible nucléaire épuisé et je me suis dit, voilà comme ils stockent leurs déchets nucléaires. C'est assez effrayant quand on pense à ces endroits, au fait que la radioactivité persiste très longtemps, et ainsi de suite.

  +-(1210)  

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Vous avez cité un excellent exemple de ce qui se dessine dans les premières conversations que nous avons eues avec certaines collectivités. Ce sont précisément la sorte de problèmes que nous essayons de comprendre et qui soulèvent des inquiétudes chez les gens. La sécurité est assurément l'une d'elles. Maintenant, à la deuxième étape, il nous faut décider de la meilleure manière d'élaborer un cadre analytique qui tienne compte des préoccupations soulevées par le public. De plus, pour les questions qui peuvent faire l'objet de recherches, nous avons la responsabilité de trouver les meilleures solutions possibles.

    En outre, je devrais essayer de calmer, dans une certaine mesure, les inquiétudes du président concernant les questions financières. La loi nous oblige à examiner l'aspect financier de toute option que nous proposons. À notre avis, cela suppose une analyse du cycle de vie de ces coûts. Même si je ne saurais présumer du résultat d'une telle analyse, je peux vous assurer que la question de l'examen financier est l'un des éléments clés dont nous devons tenir compte, comme on peut s'en douter dans un tel contexte de développement durable.

+-

    Le président: Merci, monsieur Mills.

    Monsieur Bigras.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: Monsieur le président, j'ai deux questions à poser; je vais commencer par la plus importante, soit celle qui porte sur le financement.

    J'ai relu les articles 9 à 11 de la loi; on y précise, entre autres, les quotes-parts initiales de chacune des quatre sociétés, soit Hydro-Québec, la Société d'énergie du Nouveau-Brunswick, Énergie atomique du Canada et Ontario Power Generation. J'ai été plutôt stupéfait lorsque j'ai vu le montant que chacune de ces sociétés devait verser, particulièrement celui d'Énergie atomique du Canada, qui compte débourser 10 millions de dollars pour le fonds et le financement.

    Je pense à ces sommes et je fais un parallèle avec ce que vous avez dit plus tôt, à savoir que le fédéral a, au fil des ans, encouragé l'industrie nucléaire à raison de 5 milliards de dollars par année. Le bénéfice net d'Énergie atomique du Canada en 2000--je n'ai pas de chiffres plus récents--était de 43,3 millions de dollars et la contribution fédérale se chiffrait à 137 millions de dollars. À notre avis, il est clair que la société a les moyens de débourser plus que les 10 millions de dollars prévus initialement.

    On doit prendre en considération ce qui se passe ailleurs. En 1998, la Commission Seaborn précisait que le coût estimé d'une installation de gestion à long terme des déchets de combustible nucléaire se situait entre 8,7 et 13,3 milliards, en dollars de 1991. Ce montant est évalué, à l'heure actuelle, à 15 milliards de dollars par la plupart des pays, dont la France et les États-Unis.

    J'aimerais savoir comment vous garantirez que le choix qui sera fait parmi les différentes recommandations ne sera pas basé sur des montants actuellement considérés inacceptables en ce qui a trait à l'atteinte de l'objectif d'entreposage recommandé par la Commission Seaborn et certains pays étrangers et qu'il ne compromettra pas la sécurité du public.

    Il faut à tout prix éviter, monsieur le président, que le choix que fera le Canada ne tienne compte que des limites financières imposées à la société, alors qu'Énergie atomique du Canada, comme je l'ai dit, a des bénéfices nets importants. Comment pouvez-vous nous garantir que les ressources financières que vous avez à votre disposition nous permettront de faire un choix sécuritaire et que ce dernier ne tiendra pas compte uniquement des limites financières établies?

+-

    M. Richard Dicerni: Je vous remercie pour cette question. J'aimerais d'abord vous donner quelques points de repère.

    Premièrement, le gouvernement du Canada a fait une analyse de la situation, pour ensuite fixer des montants en fonction des pourcentages de déchets nucléaires accumulés par les sociétés.

    Deuxièmement, la Commission canadienne de sûreté nucléaire nous impose des contraintes quant aux montants que nous devons déposer dans des fonds sécuritaires. D'ailleurs, la compagnie pour laquelle je travaille, Ontario Power Generation, doit comparaître le 10 avril devant la Commission canadienne de sûreté nucléaire; à cette occasion, nous devrons leur faire part de la façon dont nous comptons mettre de l'argent de côté, que ce soit pour le déclassement ou les déchets nucléaires. Si on ne réussit pas à les convaincre--je crois cependant que nous disposons des dossiers nécessaires pour le faire--, cela aura des répercussions sur les permis d'exploitation de nos centrales nucléaires.

    En ce qui nous concerne, il n'est pas question uniquement des 500 millions de dollars que nous avons déboursés et des 100 millions de dollars que nous mettons annuellement  dans le pot; il est plutôt question du type d'engagement global qui assurera que les fonds seront là.

    Ainsi, de concert avec le gouvernement de l'Ontario, nous allons nous présenter le 10 avril. Les documents sont déjà disponibles, et il me fera plaisir de vous les faire parvenir.

  +-(1215)  

+-

    M. Bernard Bigras: Est-ce que l'enveloppe globale qui devrait vous permettre de mettre sur pied des installations de gestion nucléaire à long terme est comparable à ce que la Commission Seaborn proposait en chiffres de 1998? On précisait que les coûts estimés d'une installation étaient de 8,7 à 13,3 milliards, en dollars de 1991.

    Est-ce que l'enveloppe globale dont vous disposez pour atteindre ce même objectif, nonobstant la méthode choisie, vous permettra d'atteindre cet objectif? Il semble y avoir un écart important entre l'enveloppe dont vous disposez et ce que la Commission Seaborn ainsi que certains pays recommandent.

+-

    M. Richard Dicerni: J'aimerais faire deux commentaires.

    Premièrement, les documents dont je fais état et dont on discutera le 10 avril abordent justement cette question de front. Nous croyons que les enveloppes que nous avons à notre disposition vont permettre d'avoir les recettes nécessaires pour combler la différence entre ce qui existe aujourd'hui et ce qui sera nécessaire dans 10, 15 ou 20 ans.

    On ne parle pas d'une solution qui sera mise en oeuvre au cours des deux ou trois prochaines années. Il faudra un certain nombre d'années avant que tous les processus de consultation et d'approbation environnementale soient complétés. Donc, si on envisage une solution dans 10, 15 ou 20 ans, nous sommes convaincus que les sommes nécessaires pour la mettre en oeuvre auront été déposées et qu'elles seront suffisantes.

+-

    M. Bernard Bigras: Ça veut dire que l'ensemble des hypothèses qui sont sur la table sont réalisables avec le cadre financier que vous avez. Est-ce cela que vous êtes en train de nous dire?

  +-(1220)  

+-

    M. Richard Dicerni: Oui.

+-

    M. Bernard Bigras: Donc, comment pouvez-vous expliquer l'écart entre les estimations de la Commission Seaborn et le financement que vous avez actuellement?

+-

    M. Richard Dicerni: C'est tout de même le gouvernement qui a déterminé ces montants. Le gouvernement a fourni, dans une première lancée, à peu près 600 millions de dollars et chaque année, cela doit augmenter d'environ 110 millions de dollars. Avec les intérêts et les investissements, et avec les contributions annuelles, dans 15 ou 20 ans, il y aura assez d'argent accumulé pour mettre en oeuvre les solutions.

    Mais comme je vous l'ai dit, tout cela fera l'objet d'une présentation formelle devant la Commission canadienne de sûreté nucléaire le 10 avril, et on a une documentation assez étanche qui, je pense, répondra à vos questions.

+-

    M. Bernard Bigras: J'ai une autre inquiétude, monsieur le président, quant à la composition de la Société de gestion des déchets nucléaires. Une des recommandations fortes de la Commission Seaborn était de voir, si possible, à la création d'une agence indépendante qui puisse faire la lumière sur l'ensemble des situations. Vous nous dites aujourd'hui qu'il va y avoir un comité consultatif, mais il sera formé par les sociétés d'énergie nucléaire qui vont le mettre en place, n'est-ce pas? Ou me dites-vous que c'est le contraire?

    La Société de gestion des déchets nucléaires est formée des sociétés d'énergie nucléaire. Par qui le comité consultatif sera-t-il nommé?

+-

    M. Richard Dicerni: On est obligés d'opérer à l'intérieur du cadre législatif que le gouvernement a proposé et que le Parlement a ratifié. Je suis d'accord avec vous que la Commission Seaborn avait proposé une autre formule. Le gouvernement ne l'a pas retenue. Nous ne pouvons opérer que dans le contexte de ce que le Parlement a approuvé.

+-

    M. Bernard Bigras: À ce moment-là, quelle garantie pouvez-vous nous donner que dans les choix et les recommandations faites au gouvernement, les sociétés d'énergie nucléaire ne seront pas en situation de conflit d'intérêts, vu qu'elles seront amenées à prendre des décisions et donc à faire des recommandations, alors qu'elles sont à la fois juges et parties?

    Je veux seulement avoir des garanties, au fond. Je sais que le cadre législatif est là.

+-

    M. Richard Dicerni: La deuxième partie de votre première question concernait les membres du comité consultatif. Ces gens-là n'ont, à mon avis, aucun antécédent au sein des sociétés. Les personnes que nous avons retenues sont des gens comme David Crombie, qui est un ancien ministre fédéral et un ancien maire de Toronto, Helen Cooper, qui était maire de Kingston et une ancienne présidente d'un organisme provincial, le président de l'Université de Lakehead, un politologue de l'Université de Toronto, quelqu'un du Département de génie physique de l'École Polytechnique de Montréal. Nous pourrons fournir au comité la liste de tous les membres, mais ce ne sont pas des gens issus des sociétés d'énergie nucléaire. Nous avons fait un effort pour aller chercher des gens qui sont en mesure de donner à Mme Dowdeswell ainsi qu'au conseil des avis assez indépendants.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Comartin.

+-

    M. Joe Comartin: J'aimerais parler des volumes projetés de déchets que vous serez appelés à gérer. A-t-on décidé de fonder les hypothèses sur les centrales existantes, ou allons-nous prévoir la gestion d'un plus grand volume de déchets de façon à tenir compte de la mise en service possible de nouvelles centrales, voire même de la possibilité d'importer du combustible irradié d'ailleurs dans le monde?

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Pour l'instant, l'hypothèse de départ est de 3,8 millions de grappes de combustible sur la durée de vie utile des centrales existantes. Nous n'avons pas abordé la question de l'importation de déchets, ni n'avons-nous discuté de la possibilité de la création d'une plus grande quantité de déchets.

+-

    M. Joe Comartin: Certaines centrales envisagent la possibilité de prolonger leur durée de vie utile, ce qui accroîtrait le nombre de grappes. Cela a-t-il été pris en compte?

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Il faudrait que je revois les chiffres pour vous répondre, car je ne voudrais pas vous induire en erreur. Je présume que cette estimation comporte une certaine marge de manoeuvre, mais rien d'énorme.

+-

    M. Joe Comartin: A-t-on envisagé ou même prévu le déclassement des centrales, surtout de celles qui semblent sur le point de l'être, comme à pointe Lepreau au Nouveau-Brunswick? A-t-on aussi tenu compte de la façon dont leurs déchets allaient être traités?

+-

    Mme Elizabeth Dowdeswell: Pas encore, mais lorsque nous nous examinerons l'état actuel des choses, il faudra étudier autant la remise en état que le déclassement.

  +-(1225)  

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    Le président: Je vous remercie, monsieur Comartin.

    Monsieur Reed.

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    M. Julian Reed: Merci, monsieur le président.

    Pardonnez-moi, mais je continue à douter que les fonds en fiducie seront suffisants. Par le passé, tous les projets nucléaires ont donné lieu à des dépassements de coûts. Les crédits affectés à la centrale de Darlington étaient d'abord de 3,5 milliards de dollars mais il a fallu les augmenter jusqu'à 5 milliards de dollars et enfin jusqu'à 15 ou 16 milliards de dollars. Pour ce qui est de la remise en état de la centrale A de Pickering, il s'agit d'un autre projet gigantesque qui a largement dépassé son budget et son échéancier. Maintenez-vous la possibilité qu'on ajoute des sommes à ce fonds de fiducie? Je sais bien que vous me répondrez que ce fonds va fructifier de lui-même, grâce à des investissements judicieux etc., et tout cela est fort bien, mais vu la façon dont on a toujours établi les budgets, il y a toujours en fin de compte un écart énorme. J'aimerais savoir si vous vous préparez à cette éventualité?

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    Mme Elizabeth Dowdeswell: Je dois préciser qu'en vertu de notre mandat, et lorsqu'on nous le recommande, nous sommes obligés de soumettre un plan de financement préétabli prévoyant la gestion à long terme des déchets. Nous le faisons donc tout simplement dans le cadre de notre travail qui consiste à examiner la question et à formuler une recommandation.

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    Le président: Je vous remercie.

    Monsieur Tonks.

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    M. Alan Tonks: Merci, monsieur le président.

    J'aimerais enchaîner sur la question de la sécurité technique. Votre mandat ne vous laisse que peu de temps, et M. Mills vous a posé une question urgente sur la réutilisation de combustible nucléaire dans des activités à valeur ajoutée. Vous semblez y avoir répondu par des solutions compatibles avec le développement durable et l'intérêt de la collectivité. Par conséquent, il me semble que vous devrez d'emblée éliminer les technologies qui ne cadrent pas avec vos balises. La question est peut-être prématurée mais je vous la pose quand même. Pouvez-vous nous affirmer avec certitude que le stockage souterrain des déchets est, en principe, sûr?

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    Mme Elizabeth Dowdeswell: Je ne suis pas en mesure de l'affirmer pour le moment. À mes yeux, nous n'avons pas entrepris d'études qui le prouvent de façon satisfaisante. Nous n'avons pas non plus élaboré les critères dont nous aurions besoin pour nous prononcer et qui tiendraient compte de l'avis du public. Ce qui nous pousse à agir c'est l'échéancier fixé par la mesure législative, et c'est le seul dont je tiens compte. Voilà ce que je fais pour le moment. De nombreuses recherches ont déjà été effectuées là-dessus au Canada et dans d'autres pays, et nous avons d'ailleurs noué des liens avec ces derniers et des institutions de haut- savoir afin d'utiliser leurs renseignements. Quoi qu'il en soit, les trois options qui ont été présentés semblent raisonnables, et sont aussi le fruit d'études effectuées tant au Canada qu'ailleurs dans le monde. Nous devons cependant trouver réponse à certaines questions avant de nous prononcer. Les autres options dont on discute beaucoup dans certains cercles et à l'échelle internationale nous paraissent assez éloignées, et ils ne seront pas prises en compte pour le moment.

  -(1230)  

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    Le président: Eh bien, vous avez sans doute remarqué que la question intéresse vivement les membres du comité, et que cet intérêt s'accroît même. Nous vous remercions vivement d'être venu nous rencontrer et de nous avoir renseigné sur votre travail. Nous vous sommes également très reconnaissants d'avoir décidé de mettre d'abord à l'essai puis de valider vos recommandations avant de soumettre un rapport définitif au gouvernement. Une telle initiative vous honore et nous vous en félicitons. C'est aussi rafraîchissant car ça ne se produit que rarement.

    En guise de conclusion, étant donné l'ampleur de votre mandat, il me semble que vous devrez faire certaines observations sur la production et la consommation d'énergie, parce qu'en fin de compte, les déchets en sont l'aboutissement. Compte tenu du protocole de Kyoto et d'autres réalités, votre mandat procure une occasion exceptionnelle, et peut-être très opportune, d'examiner les causes des déchets innombrables que nous produisons et leur gestion et peut-être même leur réduction ainsi que d'envisager comment nous voulons façonner notre avenir énergétique. Vous pourriez écrire des choses fort intéressantes et utiles là-dessus. Je suis d'ailleurs sûr que vous le savez déjà.

    Encore une fois, merci beaucoup et tous nos voeux de succès.

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    Mme Elizabeth Dowdeswell: Monsieur le président et distingués membres du comité, merci beaucoup de nous avoir donné l'occasion de comparaître. J'espère sincèrement que nous aurons bien d'autres occasions, au cours de l'existence de la Société, de nous entretenir avec vous.

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    Le président: La séance est levée.