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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 5 juin 2003




Á 1110
V         Le président (L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.))
V         Le très honorable Herb Gray (président, Section canadienne, Commission mixte internationale)

Á 1115

Á 1120

Á 1125
V         Le président
V         M. Vernon Thomas (professeur, Département de zoologie, Université de Guelph)

Á 1130

Á 1135
V         Mme Charlotte Vasarhelyi (Université de Guelph)

Á 1140

Á 1145
V         M. Vernon Thomas

Á 1150
V         Le président
V         M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne)
V         Le très hon. Herb Gray
V         M. Bob Mills

Á 1155
V         Le très hon. Herb Gray
V         M. Bob Mills
V         Le très hon. Herb Gray
V         M. Bob Mills
V         Le très hon. Herb Gray
V         Le président
V         M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ)
V         Le très hon. Herb Gray

 1200
V         M. Bernard Bigras
V         Le très hon. Herb Gray

 1205
V         Le président
V         M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD)
V         Le très hon. Herb Gray
V         M. Joe Comartin
V         Le très hon. Herb Gray

 1210
V         Le président
V         M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.)

 1215
V         Le président
V         Le très hon. Herb Gray

 1220
V         M. Joe Comartin
V         Le très hon. Herb Gray
V         Le président
V         Le très hon. Herb Gray
V         Le président
V         M. Julian Reed (Halton, Lib.)
V         Le très hon. Herb Gray

 1225
V         Le président
V         Mme Gail Krantzberg (directrice, Bureau régional des Grands Lacs, Commission mixte internationale)
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.)
V         Le très hon. Herb Gray

 1230
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. Vernon Thomas
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. Vernon Thomas
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le très hon. Herb Gray
V         Le président

 1235
V         M. Vernon Thomas
V         Le président
V         M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.)
V         M. Vernon Thomas

 1240
V         Le très hon. Herb Gray
V         Mme Gail Krantzberg
V         Le très hon. Herb Gray
V         Mme Gail Krantzberg
V         Le très hon. Herb Gray
V         Mme Gail Krantzberg
V         M. Alan Tonks

 1245
V         Le président
V         M. Vernon Thomas
V         Le président
V         Le très hon. Herb Gray
V         Le président
V         Le très hon. Herb Gray
V         Le président
V         Le très hon. Herb Gray
V         Le président
V         Le très hon. Herb Gray

 1250
V         Le président
V         Le très hon. Herb Gray
V         Le président
V         M. Bob Mills
V         Le très hon. Herb Gray

 1255
V         Le président
V         M. Bernard Bigras
V         Le très hon. Herb Gray
V         M. Bernard Bigras
V         Le très hon. Herb Gray
V         M. Bernard Bigras
V         Le très hon. Herb Gray
V         M. Bernard Bigras
V         Le très hon. Herb Gray
V         M. Bernard Bigras

· 1300
V         Le très hon. Herb Gray
V         M. Bernard Bigras
V         Le président
V         M. Vernon Thomas
V         M. Bernard Bigras
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Mme Charlotte Vasarhelyi
V         M. Joe Comartin
V         Mme Charlotte Vasarhelyi
V         M. Vernon Thomas

· 1305
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Mme Gail Krantzberg
V         M. Joe Comartin
V         Mme Gail Krantzberg
V         Le président
V         M. Paul Szabo
V         Le très hon. Herb Gray

· 1310
V         Mme Gail Krantzberg
V         M. Vernon Thomas
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le très hon. Herb Gray

· 1315
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le très hon. Herb Gray
V         Le président
V         M. Vernon Thomas
V         Le président
V         M. Vernon Thomas
V         Le président
V         Le très hon. Herb Gray
V         Le président
V         Le très hon. Herb Gray
V         Le président
V         Le très hon. Herb Gray
V         Mme Gail Krantzberg
V         Le président

· 1320
V         Mme Gail Krantzberg
V         Le président
V         Mme Gail Krantzberg
V         Le président
V         Mme Gail Krantzberg
V         Le président
V         Mme Gail Krantzberg
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne)
V         Le très hon. Herb Gray
V         M. Paul Forseth
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         M. Vernon Thomas
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 025 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 5 juin 2003

[Enregistrement électronique]

Á  +(1110)  

[Français]

+

    Le président (L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous souhaite la bienvenue au Comité permanent de l'environnement et du développement durable.

[Traduction]

    La réunion d'aujourd'hui revêt beaucoup d'importance, en raison de la présence parmi nous de deux organismes prestigieux, l'Université de Guelph et la Commission mixte internationale, ou CMI. Connus pour des raisons et des réalisations différentes, les deux nous font honneur en venant nous parler de questions liées à l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs. Rappelons qu'il s'agit de l'une des plus remarquables ententes internationales de l'histoire, particulièrement en Amérique du Nord.

    Je vous souhaite la bienvenue à tous. Je suppose que la CMI aimerait intervenir en premier. Nous accueillons donc le très honorable Herb Gray, Mme Krantzberg et M. Clamen, de la CMI.

    Avant de vous céder la parole, je vous serais reconnaissant de limiter votre exposé à une quinzaine de minutes, afin que nous disposions d'une bonne période de questions.

+-

    Le très honorable Herb Gray (président, Section canadienne, Commission mixte internationale): Merci, monsieur le président. Je suis ravi d'être parmi vous aujourd'hui.

    Je prendrai la parole au nom de la commission, mais pour m'aider à répondre aux questions, je me suis entouré de Mme Gail Krantzberg, directrice du Bureau régional des Grands Lacs, et de M. Murray Clamen, secrétaire de la commission et donc le cadre le plus haut placé de la section canadienne. Cette section est située ici à Ottawa, où j'y ai également mes bureaux.

    Mon exposé durera certainement moins de 15 minutes. Pour me conformer à vos instructions, je n'aborderai donc que certaines des questions exposées dans le document déjà distribué. Si vous m'y autorisez, j'aimerais que les parties non lues soient annexées comme lues afin que le texte en entier figure au procès-verbal de votre réunion.

    Je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui pour discuter des plus récents rapports de la Commission mixte internationale, et plus particulièrement de son 11ième rapport biennal sur l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, publié en septembre 2002, et particulièrement de ce qu'il dit sur les espèces exotiques envahissantes.

    J'aimerais d'abord parler quelque peu du rôle de la commission. Elle a été créée il y a environ une centaine d'années en vertu du Traité des eaux limitrophes de 1909, signé par le Canada et les États-Unis. Le rôle de la commission est de prévenir et de résoudre les différends le long de la frontière, d'un océan à l'autre, aux endroits où elle passe par des lacs ou des rivières, comme les Grands Lacs et la section internationale du Saint-Laurent entre Cornwall et Massena. À ma gauche, vous pouvez voir une carte géographique illustrant ce dont je vous parle.

    Mes remarques valent également pour les cours d'eau coulant de part et d'autre de cette frontière, comme la rivière Rouge, qui coule du Manitoba vers le Dakota du Sud. La commission joue le même rôle pour les eaux limitrophes qui se forment à la frontière entre le Yukon et la Colombie-Britannique, et l'Alaska ou qui la traversent. En bref, la commission traite des questions environnementales transfrontalières qui touchent à la qualité de l'eau et de l'atmosphère au-dessus.

    Les six commissaires, trois Canadiens et trois Américains, font preuve d'impartialité, et ce, malgré les différences dans la taille de la population et les économies des deux pays. Les commissaires prennent leurs décisions par consensus, normalement à l'issue de longues consultations. Bien qu'elle communique officiellement avec les deux gouvernements fédéraux par l'intermédiaire du ministère des Affaires étrangères, au Canada, et du département d'État, aux États-Unis, la commission est une organisation internationale autonome régie par le Traité des eaux limitrophes. La commission agit de manière indépendante et n'est pas sous la direction des deux gouvernements. Elle travaille néanmoins en étroite collaboration avec tous les ministères concernés des deux pays, sur une base presque quotidienne.

    En vertu du traité, la commission peut être appelée par les parties à examiner des requêtes pour l'aménagement de barrages ou de canaux dans les eaux limitrophes. Si elle choisit d'approuver de telles requêtes, la commission émet généralement une ordonnance d'approbation qui limite le niveau ou le débit des eaux pendant l'année et peut imposer d'autres conditions. Une fois la structure en place, la commission met sur pied un conseil de contrôle permanent qui s'assure du respect de l'ordonnance et des conditions afférentes. De tels conseils sont situés dans la section internationale du fleuve Saint-Laurent, sur les rives de la rivière Niagara, au bord de la rivière St. Marie et à Sault Ste-Marie, ainsi qu'à d'autres endroits.

    La Commission n'a pas été appelée à jouer un tel rôle depuis le début des années 60. Toutefois, s'il y a de nouveaux projets semblables, comme la construction d'un pont traversant la rivière Detroit, et que cet ouvrage ne soit pas régi par une entente bilatérale distincte, il se peut que la Commission soit appelée à tenir des audiences sur la question. À mon avis, toutefois, ce n'est pas pour demain.

    La Commission se penche officiellement sur d'autres questions seulement en réponse à des demandes précises des gouvernements, appelées «références». Les gouvernements doivent fournir les ressources nécessaires à la Commission lorsqu'ils lui demandent de répondre à des références et de produire des rapports énonçant des conclusions et recommandations. Les rapports sont fournis aux divers gouvernements, mais ils sont également rendus publics.

    La Commission ne gère ni ne finance directement de programme. Elle ne procède pas non plus à la cueillette et à l'analyse d'échantillons d'eau et d'air. La Commission peut cependant compter sur le travail de 19 conseils scientifiques, conseils de contrôle et groupes de travail permanents. D'autres groupes, sont mis sur pied de manière ponctuelle en vue de répondre à des références.

    Ainsi que je l'ai déjà dit, certains conseils contrôlent le partage des eaux à certains endroits, comme sur la rivière St. Mary's, à Sault Ste. Marie, et dans la section internationale du fleuve Saint-Laurent. D'autres, comme le Conseil scientifique des Grands Lacs, se penchent sur des questions d'ordre scientifique. Tous les conseils se composent d'un nombre égal de Canadiens et d'Américains qui occupent des postes à temps plein dans des ministères et des universités, et qui sont des experts dans leur domaine. Ces personnes participent aux conseils de la Commission pour leurs compétences personnelles et professionnelles, et non à titre de représentants de leur employeur, gouvernement ou institution. En passant, les commissaires ne sont pas les représentants de leur gouvernement respectif, en quoi la Commission diffère des autres organismes internationaux; nos membres cherchent à bien servir les intérêts des populations et à atteindre les objectifs du traité.

    La Commission alerte également les gouvernements lorsque certaines situations sont préoccupantes le long de la frontière, comme la sûreté des barrages ou le potentiel d'introduction d'espèces exotiques, comme la carpe asiatique. Les alarmes sonnées par la Commission favorisent la prise rapide de mesures pour éviter ou résoudre les situations éventuellement problématiques. Ce rôle d'alarme est l'un des plus précieux de la Commission.

    J'aimerais maintenant aborder l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs. Même si la CMI travaille tout le long de la frontière canado-américaine, elle consacre beaucoup de temps et de ressources à aider les gouvernements à mettre en oeuvre l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs.

    Le Canada et les États-Unis ont signé l'accord pour la première fois en 1972. En 1978, ils signaient l'accord actuel dont l'objectif est de restaurer la santé physique, chimique et biologique de l'écosystème des Grands Lacs. L'accord comporte une référence permanente à la CMI, qui est chargée d'aider à sa mise en oeuvre. L'une des exigences est la suivante:

«La Commission doit, au moins tous les deux ans, présenter un rapport détaillé aux Parties et aux Gouvernements des États et des provinces sur les progrès accomplis vers la réalisation des objectifs généraux et spécifiques, en traitant au besoin des questions liées aux annexes du présent accord».

    À mon avis, l'annexe 15, portant sur la pollution atmosphérique, est très intéressante et importante. Ce rapport dit que doit faire partie de l'accord une évaluation de l'efficacité des programmes et autres mesures adoptés en vertu de l'entente.

    Ainsi que je le disais, en septembre dernier, la Commission communiquait aux deux gouvernements et au public sont 11ième rapport biennal sur l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs. Il met en lumière trois problèmes critiques que doivent aborder nos deux nations afin de restaurer cet écosystème d'importance mondiale. Viennent en premier les espèces exotiques envahissantes et la nécessité d'en arrêter toute introduction, future ou actuelle. Le second est celui de l'absence d'indicateurs, dont on a besoin pour améliorer le contrôle de la santé de l'écosystème et la communication des résultats. En troisième lieu, il y a celui des sédiments contaminés par des produits chimiques toxiques, qu'il faut nettoyer. Le rapport aborde aussi 14 autres questions importantes qui ont trait à l'accord et à la santé des Grands Lacs.

Á  +-(1115)  

    Les espèces exotiques envahissantes, transportées involontairement à partir d'écosystèmes étrangers jusqu'aux Grands Lacs, sont l'une des questions névralgiques abordées par ce rapport. Ces espèces ont montré qu'elles peuvent menacer les Grands Lacs puisqu'elles n'y sont confrontées à aucune limitation naturelle, comme les prédateurs de leurs écosystèmes d'origine. L'explosion des populations de moules zébrées, par exemple, a coûté des centaines de millions de dollars en dommages aux prises d'eau et causé beaucoup de torts sur le plan écologique. Vous avez aussi certainement entendu parler des problèmes causés par la lamproie marine, qu'on a heureusement réussi à juguler, tout au moins en partie. Vous aurez peut-être des questions à me poser sur ce programme.

    On observait récemment que des carpes asiatiques remontaient le Mississippi. Si elle n'était pas tenue à l'écart par les barrières électriques de la rivière Illinois, cette espèce ravagerait les écosystèmes des Grands Lacs en y tuant les proies des populations indigènes de poissons ainsi que les plantes, le plancton qui alimentent bon nombre d'espèces indigènes. Aujourd'hui, les Grands Lacs abritent plus de 160 espèces exotiques qui menacent la durabilité de son écosystème. Une véritable menace pèse: La prochaine espèce exotique envahissante, si elle arrivait à pénétrer dans les Grands Lacs, pourrait causer encore plus de dommages que la moule zébrée.

    Puisque l'eau de lest est la principale menace pour les Grands Lacs, les États-Unis ont adopté des règlements à cet effet et le Canada a élaboré des lignes directrices nationales volontaires. Ces règlements et lignes directrices, administrés par des représentants fédéraux, obligent les navires à vidanger leur eau de lest avant d'entrer dans le fleuve Saint-Laurent et les Grands Lacs. Les risques sont malgré tout encore très présents puisque la majorité des navires qui entrent dans le système des Grands Lacs peuvent prétendre n'avoir aucune eau de lest à leur bord et ne pas être inspectés. Même si les navires sont inspectés, les sédiments résiduels qui se trouvent dans les citernes vides et les films biologiques qui contaminent la coque ou la chaîne de mouillage peuvent quand même abriter des espèces exotiques sous forme de larves nageantes ou d'alevins.

    Aussi, lorsque la citerne est remplie avec l'eau des Grands Lacs à la suite du déchargement du navire, puis vidée lors du chargement de nouvelles marchandises, la vase et les sédiments peuvent être déversés en même temps que l'eau de lest.

    Les appâts et les bateaux des pêcheurs sportifs en provenance d'un autre bassin ou qui se déplacent d'un lac à l'autre sont deux autres sources d'introduction et de dissémination des espèces exotiques. La vente de poissons exotiques, comme la carpe asiatique, dans certains marchés et restaurants ethniques des villes des Grands Lacs, comme Toronto ou Chicago, constitue un autre problème.

    Conscients des risques que courent les Grands Lacs, nous croyons que les deux gouvernements nationaux doivent de toute urgence prendre des mesures plus draconiennes afin de prévenir toute introduction future d'espèces exotiques. Il devra être question notamment de nouveaux règlements et programmes obligatoires pour s'assurer que les navires qui prétendent n'avoir aucune eau de lest à leur bord n'abritent pas des espèces exotiques qui pourraient contaminer nos eaux. Il faudra également que l'on effectue des recherches sur les mesures à prendre pour contrôler les espèces déjà présentes dans les lacs.

    Dans son dixième rapport biennal publié en 2000, la Commission recommande qu'on lui donne une référence afin qu'elle élabore des normes binationales sur le déversement de l'eau de lest. Les deux gouvernements ont répondu que des progrès avaient été faits. La Commission s'inquiète cependant de la lenteur de ces progrès, alors que la menace pesant sur les Grands Lacs demeure élevée.

    Elle recommande donc dans son onzième rapport biennal qu'une référence lui soit donnée sur les espèces exotiques afin qu'elle puisse coordonner les efforts binationaux pour que cesse cette menace perpétuelle qui plane sur l'économie et l'intégrité biologique des Grands Lacs.

Á  +-(1120)  

    J'inviterais les membres du comité à revoir les dernières recommandations du Comité permanent des pêches et des océans, dans son rapport du 27 mai intitulé «Les espèces aquatiques envahissantes: des invités surprise». La commission a comparu devant le comité en février dernier et lui a fait part de ses inquiétudes à ce sujet.

    Les recommandations du comité font écho à celles de la commission en ce qu'elles dénoncent la lenteur des progrès accomplis et soulignent l'urgence de la situation. La deuxième recommandation du comité stipule: Que le Canada donne à la Commission mixte internationale une référence pour qu'elle coordonne et harmonise les efforts des deux pays dans le but de contrer la menace des espèces aquatiques envahissantes dans le bassin des Grands Lacs.

    Nous prions donc le Comité permanent de l'environnement et du développement durable d'appuyer à son tour nos recommandations, y compris la demande d'une référence des espèces exotiques envahissantes.

    Je vais sauter certaines parties du texte, mais je le répète, je vous serais reconnaissant de vouloir les considérer comme lues et de publier le document en entier.

    En guise de conclusion, je tiens à rappeler que la Commission tient une réunion publique tous les deux ans, au sujet de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs. Dans le cadre de cette rencontre, la commission propose des ateliers techniques sur les questions abordées par ses différents conseils et une tribune libre où le public et les ONG sont invités à faire leurs observations. À la lumière des résultats et des propos entendus, la commission prépare ensuite un nouveau rapport biennal.

    La dernière réunion a eu lieu à Montréal, et la prochaine se tiendra du 18 au 20 septembre sur le campus de l'Université du Michigan, situé à Ann Arbor. Je vous invite d'ailleurs à participer à cette importante activité de notre organisme. Consultez notre site web pour connaître le programme de la réunion.

    La Commission mixte internationale collabore avec d'autres organisations, plus particulièrement avec quelqu'un que vous connaissez sans doute, la commissaire à l'environnement et au développement durable, et la Commission nord-américaine de coopération environnementale. Nous sommes aussi en contact avec la Table ronde sur l'environnement et l'économie.

    En outre, la commission communique régulièrement avec l'industrie, le milieu des affaires, les écologistes et les groupes communautaires du bassin des Grands Lacs et des cours d'eau sur lesquels veille la CMI en vertu du Traité des eaux limitrophes. Ces groupes sont notamment le Great Lakes United, le Council of Great Lakes Industries, la Ontario Federation of Anglers and Hunters, la Georgian Bay Association, le Sierra club et Enquête Pollution.

    Ainsi que je le disais, nous restons en contact régulier et fréquent avec tous les ministères et organismes pertinents des deux pays.

    Merci de m'avoir donné l'occasion de faire le survol des travaux de la Commission mixte internationale, et particulièrement de vous parler des espèces exotiques envahissantes. Je suis tout à fait disposé à répondre à vos questions et à vos observations, et de le faire en français et en anglais, y compris sur des questions que je n'ai pas abordées dans le cours de mon bref exposé.

Á  +-(1125)  

    Encore une fois, j'espère pouvoir compter sur votre appui pour la mise en oeuvre des recommandations que j'ai énumérées. Je souhaite également pouvoir garder contact avec le comité et tous ses membres ainsi qu'avec toutes les personnes préoccupées par notre environnement, et plus particulièrement par la qualité de l'eau et de l'air dans lesquels nous ne pourrions exister.

    Merci beaucoup.

+-

    Le président: Je vous remercie, monsieur Gray.

    Monsieur Thomas, la parole est à vous.

+-

    M. Vernon Thomas (professeur, Département de zoologie, Université de Guelph): Je vous remercie, monsieur le président, et vous salue ainsi que les membres du comité.

    L'exposé que je m'apprête à vous faire suit de très près la version résumée que je vous ai fournie et qui est disponible en français. Mon adjointe Charlotte Vasarhelyi, une de mes anciennes étudiantes dont les travaux sur le sujet ont été publiés, le lira en partie.

    Le problème d'envergure internationale qui a fait l'objet de l'exposé de M. Gray est devenu tellement grave que dans l'alinéa 8h) de la Convention sur la biodiversité, il est précisé que toutes les parties contractantes ont l'obligation d'intervenir de toute urgence. Par conséquent, en tant que signataire, le Canada doit prendre les mesures qui s'imposent pour combattre les espèces exotiques envahissantes, qu'elles soient terrestres ou aquatiques. Faute d'agir, nous ne respecterons pas l'esprit de cette convention.

     Les problèmes expliqués par M. Gray vont s'aggraver encore si le réchauffement de la planète se poursuit au rythme actuel. Cela signifie que, dans le cas où les eaux de la région des Grands Lacs se tempéreraient encore, des espèces d'autres régions du globe arriveraient ici peut-être en plus grand nombre. De plus, il est probable que les espèces indigènes du sud des États-Unis s'étendent davantage au nord et fassent concurrence aux nôtres au sein des Grands Lacs, tout en affectant notre économie locale.

    Ici, j'aimerais établir un parallèle entre les problèmes environnementaux dont il est question aujourd'hui et la santé humaine.

    Ces deux derniers mois, nous regrettons de le rappeler, mais nous avons subi les conséquences de l'arrivée d'un virus envahissant qui a donné naissance au SRAS, particulièrement à Toronto. Cela a créé énormément de problèmes médicaux, personnels, sociaux et économiques, non seulement pour la ville de Toronto mais aussi pour l'Ontario et le Canada.

    À cette liste, on peut ajouter le virus du Nil occidental, qui lui aussi traîne à sa suite de nombreuses répercussions sociales et médicales bien connues.

    Si l'on pousse le parallèle encore plus loin, on peut parler d'une autre particule envahissante ayant causé un syndrome chez les bovins de l'Alberta, la maladie de la vache folle.

    Nous sommes au courant de ces questions parce qu'elles ont affecté le Canada. Nous le sommes aussi à cause de leurs lourdes conséquences pour notre agriculture, notre santé et notre bien-être, et parce que leur résultante économique est facile à documenter. Je dirais cependant que nous devons être tout aussi vigilants face à l'arrivée d'espèces envahissantes dans nos eaux douces et nos eaux côtières. Leur présence est aussi destructrice et coûteuse.

    Permettez-moi de vous citer quelques chiffres. Aux États-Unis, David Pimentel a estimé que du côté américain du bassin des Grands Lacs, les espèces envahissantes causent à chaque année des dommages directs pour près de 1,1 milliard de dollars sans compter leurs effets sur les autres composantes de cet écosystème.

    Au Canada, Hugh MacIsaac de Windsor a calculé qu'à l'échelle nationale, les espèces envahissantes entraînent des dommages d'une valeur de 5 à 14 milliards de dollars par année pour l'agriculture, et de 7 à 20 milliards de dollars dans le secteur forestier.

    Si on les compare aux conséquences du SRAS et de la maladie de la vache folle, ces chiffres demeurent considérables, et je crois qu'il y a lieu de prendre le risque qu'ils représentent pour la biodiversité ou pour l'économie avec autant de sérieux. Il est donc impératif à mes yeux que notre gouvernement agisse par la voie législative pour lutter contre ce problème écologique.

    M. Gray a rappelé que le Canada s'est doté de lignes directrices volontaires. Cela signifie qu'il n'existe aucune loi nous contraignant à agir pour prévenir ou enrayer. En revanche, aux États-Unis, tant sur le plan fédéral qu'au sein des États riverains des Grands Lacs, on a adopté et on met à jour de nombreuses lois qui portent non seulement sur l'invasion par de nouvelles espèces, mais aussi sur leur propagation éventuelle dans les eaux intérieures.

Á  +-(1130)  

    Soyons réalistes. Sans loi habilitante, il n'existe aucun moyen de gérer le problème. Ce genre de loi-cadre est ce qui permet à un gouvernement ou à un ministère d'engager des sommes, d'affecter des ressources humaines et peut-être de rendre des comptes sur des questions ponctuelles. Par conséquent, si nous tenons vraiment à agir, nous devons en adopter une.

    Notre exposé abordera deux questions sous un angle pragmatique. En premier lieu, nous parlerons des espèces envahissantes, qui nous arrivent par les eaux de lest et une échappatoire. Deuxièmement, nous allons proposer des mesures d'intervention rapide pour les cas où l'on découvrirait une nouvelle espèce envahissante ayant un potentiel dévastateur.

    On peut aussi présenter ces deux questions sous un autre aspect. Ainsi, comment pouvons-nous nous conformer à nos obligations en vertu de la Convention sur la biodiversité, comme nous nous sommes engagés à le faire? Aussi, comment pouvons-nous porter à leur conclusion logique les très nombreuses recherches déjà effectuées ou en cours, et qui pourraient nous aider à réprimer efficacement le problème? Il y a donc deux mots clés ici, la prévention et la répression.

    Le reste de l'exposé vous sera lu par Charlotte Vasarhelyi, dont les travaux sur le sujet ont été publiés, ainsi que je vous le disais. Elle parlera de l'élaboration des mesures législatives qui s'appliqueraient à ce domaine.

    Charlotte.

Á  +-(1135)  

+-

    Mme Charlotte Vasarhelyi (Université de Guelph): Merci, Vernon.

    Je vais tout d'abord vous donner un bref aperçu qui concerne les espèces exotiques envahissantes et leur entrée dans les Grands Lacs par l'entremise des eaux de lest tout particulièrement. Je vais ensuite parler des amendements qu'on propose à certaines lois et qui visent à contrer l'introduction et la propagation des espèces exotiques envahissantes, particulièrement en ce qui concerne les navires délestés.

    Comme Herb Gray l'a dit, les eaux de lest sont le premier vecteur de l'introduction et de la propagation subséquente des espèces exotiques envahissantes dans les Grands Lacs. Une étude de Mills et de ses collaborateurs a conclu que 40 espèces exotiques envahissantes se sont établies dans les Grands Lacs entre 1960 et 1990, et qu'environ 60 p. 100 d'entre elles y étaient entrées par l'entremise des eaux de lest.

    Donc le risque de nouvelles introductions et de propagation d'espèces exotiques envahissantes est important.

    Comme on l'a dit plus tôt, en 1989, le Canada a mis en place des lignes directrices volontaires pour le contrôle des eaux de lest, en vertu desquelles les navires entrant dans les Grands Lacs en provenance de l'extérieur de la zone économique exclusive étaient tenus de remplacer en mer l'eau de lest qu'ils contenaient. Cependant, depuis ce temps, le gouvernement canadien n'a pas adopté de règlement exécutoire sur l'eau de lest, et il préfère à la place aider les États-Unis à faire respecter les règlements américains.

    Donc, même s'il existe des règlements américains ainsi que des lignes directrice volontaires du côté canadien, de nouvelles espèces exotiques envahissantes continuent d'entrer dans les Grands Lacs. Cela s'explique du fait que la plupart des navires qui entrent dans les Grands Lacs sont réputés n'avoir aucune eau de lest à bord, ils sont donc chargés au maximum de marchandises, et ces navires délestés jouent un rôle important étant donné qu'ils sont exemptés de l'application des règlements sur l'eau de lest. C'est là une lacune importante dans la loi qui doit être comblée si l'on veut contrer ce problème. L'étude récente de M. Niimi du ministère des Pêches et des Océans a conclu que, sur 26 navires délestés qui avaient été contrôlés, neuf, soit environ 35 p. 100, avaient à leur bord au moins une citerne de lest contenant des fonds d'eau douce.

    Même si les invasions d'espèces exotiques envahissantes par l'eau de lest continuent de poser un problème, le Canada ne s'est toujours pas doté d'une loi qui lui permettrait d'agir sur ce front. On croit pourtant que le respect des lois existantes tant au niveau bilatéral qu'au niveau fédéral au Canada, si celles-ci étaient modifiées, pourrait enrayer ce problème.

    Je veux maintenant parler de quelques textes de loi choisis et vous expliquer l'usage qu'on peut en faire pour mettre un terme à l'invasion et à la propagation des espèces exotiques envahissantes, particulièrement par l'entremise des navires délestés.

    Parlons d'abord de la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales qui donne effet au Traité des eaux limitrophes internationales entre le Canada et les États-Unis. Cette loi traite en partie de la pollution des eaux limitrophes, mais il y est également question d'un certain nombre d'autres problèmes, par exemple, l'écoulement de l'eau, les niveaux d'eau et d'autres préoccupations d'ordre environnemental. Par «pollution», on entend normalement la pollution chimique, mais si cette définition était élargie pour inclure les espèces exotiques envahissantes dans les eaux de lest, on pourrait alors mettre au point des dispositions visant les espèces exotiques envahissantes en vertu de cette loi.

    De même, plusieurs lois canadiennes, notamment, la Loi sur la marine marchande du Canada, la Loi sur les pêches et la Loi sur les ressources en eau du Canada, si elles étaient modifiées, pourraient soutenir une initiative en ce sens.

    Le projet de loi d'initiative parlementaire C-389, déposé au Parlement fédéral en 1989, visait à modifier la Loi sur la marine marchande du Canada. Voici la définition de «polluant» qu'on trouve dans ce projet de loi: «l'eau de lest qui n'a pas été remplacée conformément aux règlements d'application de la présente partie». On doute fort que ce projet de loi soit adopté étant donné qu'il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, mais on pourrait s'inspirer de l'esprit de ce projet de loi pour apporter des modifications à la Loi sur la marine marchande du Canada.

    Dans la Loi sur les pêches, il y a des dispositions relatives à la protection de l'habitat et à la prévention de la pollution. Les articles 34 et 36 interdisent l'ajout d'une substance nocive dans des eaux où vivent des poissons ou à tout endroit où la substance nocive pourrait parvenir à de telles eaux. Cependant, l'expression  «substance nocive» n'est pas clairement définie dans le texte de loi. De même, l'alinéa 34(1)b) fait mention de l'eau de lest mais non dans le contexte des espèces exotiques envahissantes.

    On pourrait donc modifier la loi, entre autres, en élargissant la définition de «substance nocive» pour y inclure les espèces exotiques envahissantes qui entrent par les eaux de lest. Cette modification contraindrait tous les navires entrant dans le Saint-Laurent à se défaire de leurs eaux de lest en mer ou à traiter les fonds d'eau de lest.

Á  +-(1140)  

    La Loi sur les ressources en eau du Canada répartit la responsabilité à l'égard des ressources en eau entre les gouvernements fédéral et provinciaux. La loi a pour objet de promouvoir la recherche et de mettre en oeuvre les programmes concernant l'utilisation de l'eau douce.

    En vertu de la Loi sur les ressources en eau du Canada, la pollution concerne principalement les déchets chimiques, et il n'est pas fait mention dans la loi des espèces exotiques envahissantes. Le terme «déchet» est défini dans la loi comme étant «toute substance qui, si elle était ajoutée à l'eau, altérerait ou contribuerait à altérer la qualité de celle-ci au point d'en rendre l'utilisation nocive pour l'homme ou pour les animaux, poissons ou plantes utiles à ce dernier». Encore là, si on élargissait la définition du terme «déchet» afin d'y inclure toute substance ou tout biote non indigène, on pourrait mettre au point des dispositions en vertu de la loi qui permettraient de prévenir et de contrôler l'entrée d'espèces exotiques envahissantes.

    Le gouvernement fédéral américain a récemment proposé la National Aquatic Invasive Species Act. Si cette loi était adoptée, on comblerait la lacune dans les règlements concernant les navires délestés du côté américain. Le Canada doit en faire autant étant donné le problème que pose en ce moment l'invasion d'espèces exotiques envahissantes et leur propagation dans les eaux canadiennes.

    Le mieux consisterait probablement à modifier les lois existantes afin de prévenir et de contrôler l'entrée des espèces exotiques envahissantes dans les Grands Lacs. On pourrait y parvenir en adoptant certaines des mesures que j'ai proposées.

    J'aimerais parler en deuxième lieu aujourd'hui de la capacité d'intervention rapide à l'égard des espèces exotiques envahissantes dans les Grands Lacs. Pour prévenir l'invasion et la propagation des espèces exotiques envahissantes, il faut une solution à deux volets. Premièrement, il faut assurer le dépistage précoce, suivi d'une intervention rapide. La prévention, au niveau de l'entrée et de la propagation, est importante parce qu'une fois qu'une espèce exotique s'établit, il est très difficile sinon impossible de l'éliminer. De même, la prévention coûte beaucoup moins cher que le contrôle et la gestion.

    Il faut une capacité d'intervention rapide parce que les espèces exotiques envahissantes réussissent à entrer en ce moment dans les Grands Lacs intentionnellement et non intentionnellement, par exemple, par le déversement des eaux de lest, mais aussi par l'aquaculture, les résidus de jardinage et les poissons appât. En outre, les espèces exotiques entrent dans les Grands Lacs et les cours d'eau avoisinants grâce à des vecteurs comme les canaux et les embarcations de sport. Le Canada doit s'attaquer à toutes ces causes, et pas seulement aux eaux de ballast.

    L'Australie est un excellent exemple de la manière dont une capacité d'intervention rapide peut servir à éliminer une espèce exotique envahissante nouvellement découverte. Il y a, par exemple, le cas de cette moule exotique qui a été découverte dans les eaux australiennes à la fin mars 1999. Trois jours après qu'elle eut été repérée, on a modifié la Fisheries Act et la Commonwealth Quarantine Act. Ces modifications législatives ont permis de mettre en quarantaine les trois ports infectés. Grâce à la capacité d'intervention rapide déployée dans ce cas-ci par toutes les parties intéressées, on a réussi à éliminer cette moule exotique dans les 26 jours qui ont suivi la première observation.

    Donc le Canada pourrait se servir de l'Australie comme modèle pour mettre au point sa capacité d'intervention rapide au niveau fédéral à l'égard des espèces exotiques. Les dispositions de la Loi sur les pêches relatives à la protection de l'habitat pourraient être étendues aux espèces exotiques envahissantes et imposer la mise en oeuvre d'un plan d'action rapide afin de protéger les habitats d'eau douce et les espèces qui vivent dans le bassin des Grands Lacs.

    On pourrait élargir la définition de «déchet» dans la Loi sur les ressources en eau du Canada pour en faire l'assise juridique d'intervention rapide. En outre, l'Accord de 1978 relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs oblige le Canada à maîtriser les invasions d'espèces étrangères et à rétablir et conserver l'intégrité biologique des Grands Lacs. La prise de mesures correctives à l'égard des espèces exotiques envahissantes est conforme à cette obligation et nécessiterait que l'on élargisse les mesures visant les produits chimiques et la pollution pour y inclure la maîtrise des espèces exotiques envahissantes.

    L'élargissement des définitions dans la Loi sur les pêches et la Loi sur les ressources en eau du Canada permettrait au gouvernement fédéral de prendre des mesures rapidement pour repousser les espèces nouvellement entrées. Et de telles modifications législatives seraient conformes à cet accord.

    Cependant, pour créer cette capacité d'intervention rapide, il faut se doter d'un cadre de gestion où sera défini le rôle de toutes les parties intéressées, notamment les gouvernements fédéral et provinciaux, ainsi que les ministères comme le ministère des Pêches et des Océans, Transports Canada et Environnement Canada. Cela nous permettrait de procéder à des interventions uniformes et rapides faisant intervenir tant les gouvernements fédéral et provinciaux que toutes les autres instances chargées de repousser les espèces exotiques envahissantes.

Á  +-(1145)  

    Sur ce plan, je rappelle que la loi qui a été déposée récemment aux États-Unis, la National Aquatic Invasive Species Act, est assortie de conventions prévoyant la création d'un plan d'action rapide aux États-Unis. Comme on le voit, les États-Unis ont reconnu qu'une capacité d'intervention rapide pour contrer les espèces exotiques est une priorité, et ils ont mis au point une stratégie en ce sens. Il s'agit donc de prendre les premières mesures voulues pour contrer ce problème.

    Étant donné que les Grands Lacs constituent une ressource partagée, le Canada doit mettre en oeuvre des lois semblables à celles des États-Unis afin d'assurer la maîtrise uniforme et complémentaire des espèces exotiques envahissantes.

+-

    M. Vernon Thomas: Merci, Charlotte.

    Nous avons donc fait état dans notre exposé de deux problématiques. Il s'agit d'abord de prévenir l'entrée des espèces exotiques; et si celles-ci entrent par cette passoire, il faut éliminer ces espèces, non seulement dans les eaux qui sont réglementées par l'État fédéral mais aussi peut-être dans les eaux avoisinantes qui sont réglementées par les provinces.

    Le thème de notre exposé, c'est la nécessité d'une action rapide, et nous vous avons indiqué comment on pourrait élargir les définitions de plusieurs lois fédérales qui vous permettraient de prendre les dispositions voulues. Nous pensons que c'est là une façon plus expéditive de procéder que de créer une nouvelle loi qui porterait expressément sur les Grands Lacs. Une telle initiative de la part du gouvernement fédéral nous permettrait de nous conformer à nos obligations en vertu de la convention sur la biodiversité, également de compléter des initiatives américaines qui sont déjà en cours. En fait, on pourrait même aller un peu plus loin et dire que si nous ne faisons rien, nous risquons de mettre en péril les intérêts que les Américains cherchent à protéger par la voie de leurs révisions législatives.

    À mon avis, ce serait faire de la bonne politique que d'adopter ces changements, modifications ou nouvelles définitions. Je doute que le gouvernement ou les membres de ce comité s'opposent vraiment à ces mesures du simple fait qu'on ne cherche ici qu'à protéger l'environnement, la biodiversité et les activités économiques humaines qui y sont associées. De même, je ne crois pas que les provinces fassent la moindre objection non plus du simple fait que le gouvernement fédéral ne ferait qu'agir à l'échelle nationale dans l'intérêt des économies provinciales et de la biodiversité de ces mêmes provinces. On ne verrait pas le même spectacle qu'ont orchestré les opposants à la ratification de l'accord de Kyoto.

    Je vais conclure ne mentionnant un autre parallèle, qui a encore une fois trait à la réglementation environnementale aux États-Unis et au Canada.

    Il y a environ 87 ans de cela, un traité très sage a été conclu, nommément la Convention concernant les oiseaux migrateurs entre le Canada et les États-Unis. Ce sont des législateurs très intelligents qui ont donné effet à ce traité, et pour en assurer le respect, le Canada et les États-Unis se sont dotés de lois distinctes mais complémentaires qui permettent aux deux parties de gérer cette ressource commune, les oiseaux migrateurs, d'une manière uniforme et complémentaire. Cela s'est fait il y a 87 ans. Cette loi pionnière pour la conservation de la faune est encore en vigueur aujourd'hui. Il n'existe aucune autre loi qui s'applique à la même échelle géographique. Il s'agissait ici de protéger les oiseaux migrateurs, particulièrement la sauvagine.

    Il y a 17 ans de cela, le gouvernement du Canada, celui des États-Unis et plus tard celui du Mexique ont adopté le Plan nord-américain de gestion de la sauvagine, plan très ambitieux qui prévoit des dépenses d'environ 100 millions de dollars US par année pour trouver de nouveaux habitats à ces mêmes espèces. Ce plan marche très bien. Pourquoi? Parce que ces pays étaient convaincus que c'était une bonne chose à faire, que c'était nécessaire, et parce que les gens étaient prêts en grand nombre à en soutenir la réalisation.

    À mon avis, ce qui est bon pour les canards est bon aussi pour les espèces envahissantes. C'est un bon exemple d'un traité et d'une loi nationale complémentaire qui permet la saine gestion de la sauvagine. Je pense que nous pouvons en faire autant pour les espèces envahissantes dans les Grands Lacs.

    Merci.

Á  +-(1150)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Thomas.

    Si les gens s'en tiennent à leurs cinq minutes, nous pourrons peut-être avoir deux tours. Nous allons commencer avec M. Mills.

+-

    M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

    Merci à nos invités, particulièrement à M. Gray qui a été mon collègue pendant plusieurs années.

    Monsieur Gray, j'aimerais vous poser une question précise au sujet de la qualité de l'air, question qui entre dans le mandat de la CMI qui unit les États-Unis et le Canada. Il est évident que nous avons des problèmes de ce côté dans le sud de l'Ontario, région où l'air est le plus pollué au Canada.

    La deuxième région où l'air est le plus pollué est la vallée du bas Fraser. Étant donné que je m'intéresse depuis maintenant plus de deux ans aux audiences relatives au Sumas, qui se déroulent à l'heure où nous nous parlons, je n'ai jamais été témoin de la moindre intervention de la CMI dans ce dossier des plus importants, où il est question de bâtir une centrale électrique dans l'État de Washington, à la frontière, région qui vient deuxième rang en ce qui concerne la pollution de l'air au Canada, et cet air entre au Canada. Essentiellement, c'est l'État de Washington qui obtient les emplois et qui vend l'énergie à la Californie, et la Colombie-Britannique ne reçoit pour sa part que la pollution, et pourtant on utilise sa nappe aquifère, et c'est elle qui reçoit les eaux usées et bien sûr les cinq tonnes de particules, etc., dans son air.

    Savez-vous si la CMI a fait quoi que ce soit du côté de l'État de Washington et de la Colombie-Britannique dans ce dossier?

+-

    Le très hon. Herb Gray: La commission est parfaitement au courant de ce problème. Nous avons été contactés directement par les maires de cette région. Nous nous sommes servis de notre réseau d'alerte pour transmettre ces préoccupations directement aux hautes instances gouvernementales des deux pays.

    Afin d'intervenir d'une manière plus structurée, nous devrions recevoir une référence des gouvernements canadien et américain qui nous permettrait de réunir un conseil d'experts, et ce, afin d'établir une base d'enquête neutre et scientifique qui déboucherait sur un plan d'action et un rapport officiel, comme ce fut le cas, par exemple, lors de l'inondation de la rivière Rouge dans le Dakota du Nord et au Manitoba.

    Nous sommes donc au courant du problème. Nous savons que le public est alarmé. Nous nous sommes servis de notre réseau d'alerte pour en saisir les gouvernements. Mais pour agir plus directement, les gouvernements devront nous donner un mandat; donc si vous ou votre comité pouvez convaincre les gouvernements de nous donner un mandat officiel, nous serons ravis d'intervenir dans ce dossier d'une manière plus suivie et plus officielle.

+-

    M. Bob Mills: Je vais maintenant faire appel à votre expérience gouvernementale. Il y a bien sûr des gens qui sont intervenus, il y a eu des rencontres avec le public auxquelles ont assisté entre 6 000 ou 8 000 personnes. Des centaines de pétitions ont été signées. Le public est intervenu massivement.

    Je sais qu'Environnement Canada a fourni de notes d'information mais le ministère n'est pas intervenu aux audiences dans l'État de Washington ni aux audiences de l'ONE qui se déroulent en ce moment en C.-B. Je trouve cela très irritant, quand on sait que le gouvernement de la C.-B. s'oppose à ce projet. C'est aussi le cas de la ville d'Abbotsford. Il y a eu toutes ces pétitions et tout cela, et les gouvernements américain ou canadien ne sont nullement intervenus.

    J'ai rencontré le gouverneur Locke; je me suis rendu aux audiences aux États-Unis où l'on m'a permis d'intervenir, mais on m'a refusé d'intervenir au Canada. Voilà qui montre à quel point le gouvernement s'intéresse à cette question. Je vais intervenir quand même, mais je vais passer par la porte d'en arrière au lieu de passer par la porte d'en avant au Canada. Et pourtant, je peux intervenir aux États-Unis.

    J'ai simplement le sentiment que le gouvernement canadien a été totalement absent de ce dossier et je ne comprends pas pourquoi. C'est la deuxième région la plus polluée au niveau de l'air, et nous nous apprêtons à ajouter à cela plus de pollution américaine. Le Sumas II n'est qu'une centrale; on compte en bâtir 12 autres.

Á  +-(1155)  

+-

    Le très hon. Herb Gray: Eh bien, je tiens à rappeler que la commission n'est pas un organisme du gouvernement canadien, ce n'est pas non plus un organisme du gouvernement américain.

+-

    M. Bob Mills: Comment pouvons-nous obtenir que le cabinet intervienne ici, vous qui comptez 40 ans de métier de ce côté?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Eh bien, je crois qu'il faut être tenace. Il n'y a pas de solution magique. Il y a la période des questions. Il y a le travail en comité, et vous pouvez entre autres inviter les ministres et les fonctionnaires à témoigner.

+-

    M. Bob Mills: Je devrai peut-être faire du piquetage devant le cabinet du premier ministre pour attirer son attention sur cette question.

+-

    Le très hon. Herb Gray: Vous ferez comme vous voudrez. Je ne suis pas en mesure de vous dire ce que vous devriez mettre sur votre pancarte ou quoi que ce soit du genre.

    Mais nous sommes parfaitement au courant du problème. Nous sommes en contact direct avec vos maires, et j'espère que vos commentaires au comité vont peser dans la balance. Je le répète, comme je l'ai dit dans mes lettres aux maires, si les deux gouvernements nous donnent un mandat officiel, nous serons ravis de recourir à ce processus qui nous a permis d'apporter des changements constructifs au niveau de la rivière Rouge—dans le nord, par exemple.

    Je suis heureux que vous m'ayez donné le loisir de clarifier notre position à ce sujet.

+-

    Le président: Nous allons passer au second tour.

    Nous avons sur la liste M. Bigras, M. Comartin, suivi ensuite de M. Szabo, M. Reed, Mme Kraft Sloan et M. Tonks.

    Monsieur Bigras.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Merci, monsieur le président.

    J'aimerais me joindre à mes collègues pour remercier nos témoins de leur présence, en particulier M. Gray avec qui on a eu la chance de siéger. Il fait bon de se revoir aujourd'hui.

    Ma question portera sur la navigation sur le réseau Grand Lacs--Voie maritime du Saint-Laurent.

    Le ministère de la Défense des États-Unis a rendu public, le 21 février dernier, un projet d'agrandissement de la Voie maritime du Saint-Laurent. On apprenait qu'une étude avait débuté le 15 janvier 2001, dont le but était d'élargir et de creuser la voie afin de développer le commerce par la navigation sur le Saint-Laurent. Cela est bien clair dans l'étude. Le but de tout cela est d'arriver à une forme de rentabilité pour permettre aux Panamax de plus de 1 000 pieds d'entrer dans nos eaux. Il appert qu'ils sont déjà présents sur le lac Supérieur.

    Compte tenu du fait que les gouvernements peuvent envoyer une demande d'approbation d'un ouvrage à la Commission mixte internationale, quel rôle comptez-vous jouer dans le cadre de ce projet qui, naturellement, n'en est qu'à l'étape de l'étude, mais qui pourrait très certainement avoir un impact non seulement sur l'économie, mais aussi sur l'environnement, par l'érosion des berges et la remise en suspension des sédiments?

    Selon vous, quel rôle la Commission mixte internationale devrait-elle jouer dans le cadre de ce projet futur d'élargissement de la Voie maritime?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Nous suivons de près ce projet proposé. Nous avons, au sujet des Grands Lacs, des réunions publiques pour donner au public l'occasion de présenter son point de vue. Nous jouons même en ce moment un rôle formel. Ces réunions publiques ont donné aux gens l'occasion de présenter leurs préoccupations sur cette étude du Corps of Engineers des États-Unis.

    J'ai eu des réunions avec le ministre des Transports du Canada pour lui présenter ces préoccupations et avoir un échange à cet égard.

    Vous avez dit vous-même qu'il s'agissait seulement d'une étude préalable du Corps of Engineers. À ce jour, ni le gouvernement américain ni le gouvernement canadien n'ont décidé de procéder à la réalisation d'un tel projet et on n'a même pas attribué de fonds pour continuer l'étude.

    Je pense que notre ministre des Transports et son homologue américain ont récemment signé un accord en vue de coopérer dans ce domaine. Je pense qu'un porte-parole canadien a dit qu'on avait l'intention, non pas de réaliser un grand projet comme celui que vous avez décrit, mais seulement d'étudier en temps et lieu la façon d'améliorer le réseau actuel du Saint-Laurent.

    Je termine en répondant plus spécifiquement à votre question. Encore une fois, si les gouvernements donnent à la Commission mixte le mandat de faire des études formelles, nous serons heureux d'accepter cette responsabilité. Toutefois, en ce moment, les gouvernements ne nous ont pas donné un tel mandat. Selon mes études personnelles à ce sujet, ce sont, comme on dit en anglais, des early days. Il serait intéressant que vous demandiez à M. Collenette ou à ses fonctionnaires de vous donner des renseignements plus complets à cet égard.

  +-(1200)  

+-

    M. Bernard Bigras: Monsieur Gray, je suis d'accord avec vous. Avec toute l'expérience que vous avez, vous savez fort bien que lorsqu'on commence à discuter, cela veut dire qu'on commence à mettre le pied dans la porte. On le voit dans le cas du bouclier antimissile.

    La réalité, à mon avis, est que le principe de précaution devrait prévaloir dans ce cas-là. C'est l'approche que vous devriez privilégier. Lorsque l'accord dont vous nous parlez a été annoncé le 1er mai par le ministre des Transports, on disait qu'il fallait faciliter la coopération pour assurer la rentabilité à long terme du réseau Grand Lacs--Voie maritime du Saint-Laurent.

    Cette affirmation contenue dans le communiqué signé par le ministre des Transports, le 1er mai dernier, n'exclut pas la possibilité qu'on en vienne à un agrandissement, avec les conséquences que cela pourrait avoir sur le Saint-Laurent et sur les Grands Lacs.

    Vous nous avez fait aujourd'hui une bonne présentation de 45 ou 50 minutes et je suis tout à fait d'accord sur cela, mais il ne faut pas passer à côté de l'aspect fondamental, à savoir que ce que vous nous avez décrit pourrait être accéléré, notamment sur le plan des espèces envahissantes, dans la mesure où on ne dit pas non maintenant à ce projet.

    Je veux m'assurer que vous soyez le gardien, parce qu'on ne peut pas tenir des discours creux et surveiller notre environnement transfrontalier d'un océan à l'autre. Il faut protéger l'environnement et non pas simplement viser la rentabilité de la Voie maritime.

+-

    Le très hon. Herb Gray: Je dois vous assurer que nous allons prendre les responsabilités que nous attribue le Traité des eaux limitrophes internationales. Nous devons travailler dans les cadres qui nous sont fixés par le Traité des eaux limitrophes internationales, par l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs et par l'Accord Canada-États-Unis sur la qualité de l'air.

    Nous ne disons pas que notre priorité principale est d'assurer la navigation; c'est l'une de nos préoccupations. Relativement à l'environnement, si vous regardez notre énoncé de mission, vous verrez que ce document dit que nous devons respecter le principe de la précaution, ainsi que les idées du développement durable et des écosystèmes. C'est pourquoi nous sommes au courant des discussions qu'il y a là-dessus. Nous devons nous renseigner.

    Selon les informations que nous avons, aucun fonds n'est prélevé par le Congrès américain, non plus que par notre gouvernement et notre Parlement.

    Quelque chose de très important s'est produit du côté américain: il y a quelques mois, la sénatrice Hillary Clinton s'est prononcée totalement contre ce projet. Vous pouvez vous imaginer ce qu'une telle chose veut dire dans le système américain.

    Je vous suggère de vous mettre en contact avec M. Collenette, pas seulement parce qu'il est ministre des Transports, mais aussi parce que la plupart des écluses sont sur le territoire canadien et que la plus grande partie du territoire qui sera touché est la responsabilité du gouvernement canadien. C'est une autre raison pour laquelle on doit demander à ce comité de continuer à suivre ce dossier.

  +-(1205)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Bigras.

    Monsieur Comartin, s'il vous plaît.

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Merci, monsieur le président.

    Bienvenue à M. Gray, à M. Thomas et aux autres membres de la délégation. Merci d'être venus.

    Je tiens aussi à reconnaître la présence parmi nous de Mme Kraft Sloan et à lui souhaiter à nouveau la bienvenue au comité. Sa passion pour l'écologie nous manquait. Je ne dis pas cela pour diminuer vos mérites, monsieur Szabo. Votre contribution a été appréciée. Mais elle nous manquait.

    Monsieur le président, je tiens aussi à profiter de l'occasion pour dire que je suis un peu inquiet du fait que ces audiences ont lieu au moment où le ministre de l'Environnement s'apprête à faire une annonce à laquelle nous étions tous invités, mais à laquelle nous n'avons pas pu nous rendre bien sûr parce que nous devions débattre ici de la législation sur les espèces en péril, qui est plus importante. Je tiens simplement à signaler cela pour mémoire.

    Également pour mémoire, je tiens à marquer mon désaccord... Comme vous savez, M. Gray et moi-même nous sommes opposés depuis longtemps dans un certain nombre de dossiers. Je crois que je le connais depuis plus longtemps que quiconque ici présent. Donc, pour mémoire, je tiens également à marquer mon désaccord avec les propos qu'il a tenus dans son exposé au sujet de la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales, lorsqu'il a affirmé que...

+-

    Le très hon. Herb Gray: Où en êtes-vous dans mon texte?

+-

    M. Joe Comartin: Vous n'avez pas numéroté vos pages, monsieur Gray, j'ai donc du mal à trouver ce passage. Je crois que c'est à la troisième page de la copie papier.

    Vous affirmez que le projet de loi C-6 a eu pour effet d'interdire tout prélèvement massif d'eau. Je crois au contraire que certaines personnes ont affirmé très clairement, notamment des experts en droit commercial, qu'il s'agit là en fait d'un système de licences pour l'exportation de l'eau.

    Je ne veux diminuer nullement les mérites de M. Gray, parce que je crois connaître parfaitement bien sa position, et je suis d'accord avec lui, et il s'agit bien d'interdire l'exportation de l'eau. Mais je m'inquiète, monsieur le président, de la position de son homologue américain avec qui j'ai conversé peu après sa nomination à la coprésidence de la CMI. Il disait que l'eau est une denrée. Bien sûr, quand on connaît nos traités et nos accords commerciaux, l'utilisation de ce terme pour décrire l'eau a de quoi nous inquiéter vivement parce que s'il s'agit d'une denrée, elle est alors assujettie aux dispositions de l'OMC et de l'ALENA, et on peut l'exporter, ou on peut en contraindre l'exportation.

    Ce ne sont là que mes commentaires à moi.

    Cette semaine justement, la Great Lakes United a rendu public son rapport qui fait état de la coordination de l'action d'un grand nombre de groupes écologistes des deux côtés de la frontière. Je crois que 170 groupes écologistes communautaires ont pris part à la publication de ce document. Ce que je vais vous dire, monsieur Gray, c'est que ce document définit le cadre de ce que nous devons faire au Canada et aux États-Unis pour assainir et protéger les Grands Lacs.

    J'ai deux questions. Premièrement, veuillez me dire si vous avez pris connaissance de ce document et si vous êtes d'accord avec ses recommandations de manière générale? Partant de là, pouvons-nous nous attendre à des recommandations semblables émanant de la CMI et, en particulier, des délais précis et des montants d'argent précis qu'il faudra dépenser pour restaurer et protéger les Grands Lacs?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Je me réjouis de la publication du livre vert de Great Lakes United et des autres groupes de défense de l'environnement. Le rapport appuie et confirme les constatations, les conclusions et les recommandations de la commission concernant la nécessité de mieux gérer ou de le faire plus efficacement avec une structure de reddition de comptes pour l'assainissement des Grands Lacs et on y réclame un calendrier pour l'attribution de sommes plus conséquentes consacrées à cette tâche. Je suis impatient de discuter de ce rapport avec ses auteurs, la Great Lakes United et les autres groupes. Le rapport reprend et appuie les conclusions de la Commission mixte internationale. Le commissaire à l'environnement et au développement durable rend des comptes à la Chambre des communes et le U.S. General Accounting Office, aux États-Unis, est l'équivalent de notre Bureau du vérificateur général du Canada et du Bureau du commissaire à l'environnement et au développement durable. Récemment, cet organisme affirmait dans un rapport qu'une structure de gestion plus efficace, un financement accru et des calendriers s'imposaient.

    Du point de vue de la commission elle-même, le livre vert reprend de façon générale ce que nous avons dit, non seulement dans le 11 rapport biennal, mais aussi ce que nous constations dans un rapport récent sur l'état d'avancement des activités d'assainissement dans chacune des zones problématiques, ou dans les 42 secteurs préoccupants restants.

    Après l'importante réunion de septembre à Ann Arbor, à laquelle j'ai été invité, la commission entreprendra la rédaction du prochain rapport biennal. Je suis sûr que le livre vert sera alors une des principales sources d'information.

    Nous pouvons faire des rapports plus fréquemment. Nous ne sommes pas limités à deux rapports par année et la commission va devoir déterminer si elle doit faire des constatations avant son prochain rapport biennal.

    Je voulais dire quelque chose à propos de vos remarques sur le projet de loi C-6. Si je ne m'abuse, en pratique, ce projet de loi interdit que l'on transporte de gros volumes d'eau à partir du côté canadien du bassin des Grands Lacs—en fait, à partir de n'importe quel bassin le long de la frontière illustré sur cette carte. Il pourrait y avoir des exceptions en cas d'urgence, etc. Je ne sais pas si c'est ce que mon nouvel homologue américain vous aura dit lors de conversations privées, mais la commission représente le consensus des six commissaires et la commission n'a pas accepté de considérer l'eau comme une denrée susceptible de faire l'objet d'une transaction commerciale, comme cela est prévu dans d'autres accords. Bien entendu, on fait exception de la vente de petites quantités d'eau embouteillée, etc., mais c'est autre chose.

    Je tiens à ajouter que si je ne m'abuse, les États américains limitrophes des Grands Lacs sont de façon générale du même avis que le gouvernement canadien et ceux des provinces et rejette l'idée du transport d'eau en vrac. Les lois là-bas sont différentes. Apparemment, les lois fédérales permettent que l'on délègue aux États le pouvoir de se lier par contrat dans un domaine de compétence fédérale. On est en train de négocier un tel contrat, que l'on appelle Annexe 2001. On espère que tout sera achevé en l'an 2004 et je suis sûr que nous nous attellerons volontiers à cette tâche.

    Une chose est rassurante toutefois car, que je sache, les États américains avoisinant les Grands Lacs refusent l'idée que l'on prélève de gros volumes d'eau dans les Grands Lacs, soit par pipeline, par bateau ou autrement. Toutefois, ils sont régis par un cadre constitutionnel législatif qui applique la négociation de ce contrat. Je pense que c'est la meilleure façon d'expliquer les choses. Pour ma part, j'espère que ce travail sera terminé le plus vite possible.

  +-(1210)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Comartin.

    Monsieur Szabo.

+-

    M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président, et je tiens sûrement à souhaiter la bienvenue pour la première fois au Très honorable Herb Gray. C'est un plaisir que de vous revoir ici, monsieur Gray, avec les témoins qui vous accompagnent.

    J'ai deux questions à vous poser à titre collectif. La Commission mixte internationale existe depuis 1909, et son mandat l'oblige entre autres à évaluer la pertinence et l'efficacité des programmes, etc., dans la mesure où ils ont trait au maintien de la santé des Grands Lacs. Je ne peux que présumer que la dégradation qui s'est opérée dans les Grands Lacs jusqu'à présent a eu lieu au cours de la période depuis laquelle la CMI existe.

    Je trouve très intéressant que M. Thomas ait mentionné le SRAS, la maladie de la vache folle et leurs répercussions économiques. En effet, monsieur le président, la Chambre des communes a tenu des débats d'urgence sur ces deux questions. Cependant, nous n'avons pas eu de débat d'urgence sur cette question-ci, en dépit des dimensions économiques que M. Thomas a mentionnées et des effets sur la santé qui pourraient se chiffrer à des dizaines de milliards de dollars, et il pourrait en coûter beaucoup plus.

    J'imagine que ce que je veux savoir, c'est à quel point la situation devra-t-elle se dégrader dans les Grands Lacs avant que la CMI en fasse une urgence nationale ou nord-américaine, au lieu d'attendre ces mandats bilatéraux, et demande en fait ces mandats bilatéraux?

    Ma deuxième question a trait à une contradiction apparente dans la politique actuelle. Il existe en ce moment essentiellement des lignes directrices volontaires pour les navires qui entrent chez nous avec leurs eaux de lest, et non des règlements exécutoires. Il me semble que si nous n'avons que des lignes directrices volontaires, on compromet les objectifs de la CMI pour une autre raison quelconque. Cette raison pourrait-elle être la protection des avantages économiques auxquels il faudrait renoncer si nous avions des règlements exécutoires?

  +-(1215)  

+-

    Le président: Monsieur Gray.

+-

    Le très hon. Herb Gray: Vous avez abordé plusieurs sujets très importants.

    Vous parlez de la détérioration des eaux et de la crise dans les Grands Lacs. Il faut un juste milieu ici. Depuis l'entrée en vigueur de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, il y a eu une amélioration dans l'ensemble des Grands Lacs, en particulier du point de vue des systèmes d'égout, qui n'étaient pas à la hauteur. Des deux côtés de la frontière, des centaines de millions de dollars ont permis d'améliorer les installations de traitement des égouts. Cela a amélioré la qualité de l'eau dans les Grands Lacs.

    Il y a également eu des avancées du côté du contrôle des produits chimiques, en particulier le phosphore. C'est un peu aigre-doux. Il y a des aspects positifs, mais il y a encore des problèmes. Par exemple, l'assainissement—très coûteux—des sédiments contaminés est lent, car il s'agit d'un héritage des premiers jours du développement industriel.

    En outre, il y a un reflux. Le phosphore revient dans le lac Érié et nous finançons un groupe de travail binational de scientifiques qui doivent en expliquer la cause. Cela est-il dû aux grandes exploitations agricoles, car les moulées dont on nourrit les animaux contiennent beaucoup de phosphore et il y aurait une infiltration? Est-ce à cause du système digestif de la moule zébrée que le phosphore se crée? Les scientifiques n'ont pas encore toutes les réponses, mais ils travaillent avec diligence. Il y a donc un reflux.

    Par ailleurs, il y a désormais de nouvelles familles de produits chimiques que l'on n'avait pas pris en compte lors de la signature de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs. Il s'agit en effet de diverses formes de perturbateurs endocriniens et il y a aussi les agents ignifuges, lesquels sont utiles pour empêcher que les meubles s'enflamment soudainement mais, une fois dans l'eau, ces agents créent de nouveaux problèmes.

    On ne peut donc jamais cesser d'être vigilants. On ne peut jamais dire que désormais les lacs sont assainis et que l'on peut passer à autre chose. Étant donné l'action de l'homme sur l'écosystème, nous devrons toujours être vigilants et actifs.

    Maintenant, à propos du mandat, nous cherchons à en obtenir un. Nous avons demandé aux gouvernements de nous confier officiellement la tâche de coordonner tous les aspects de la lutte contre les espèces exotiques. C'est pour cela que nous sommes ici aujourd'hui : nous demandons votre appui, car le comité des pêches nous l'a déjà donné.

    Dans plusieurs ministères, on prend des mesures ponctuelles dans le dossier des espèces exotiques. Officiellement, c'est le ministère de l'Environnement qui est le ministère responsable, même si on pourrait prétendre qu'il vaudrait mieux confier la tâche au ministère des Pêches et des Océans. Je ne veux pas occasionner une controverse entre ministères, mais il faut une structure de gestion, comme nos amis universitaires l'ont signalé très efficacement, pour coordonner le travail et procéder à la mise en oeuvre, notamment un mécanisme de réaction plus rapide.

    Je ne suis pas sûr que l'on puisse prétendre que l'imposition d'une réglementation aboutit à une perte d'avantages économiques. Les Américains s'en accommodent. Si le réseau de navigation éprouve des difficultés, ce n'est pas à cause du coût des vidanges ou des inspections, que je sache. Il est vrai que le transport maritime sur les Grands Lacs est un facteur économique très important, rentable pour l'économie des localités situées sur les lacs du côté canadien comme du côté américain. Des emplois sont en cause. Des secteurs industriels également. En outre, on pourrait prétendre que la façon la plus écologique de transporter des marchandises est la voie maritime plutôt que, disons, la route par camion diesel dont M. Comartin et moi-même...

  +-(1220)  

+-

    M. Joe Comartin: Les chemins de fer sont supérieurs.

+-

    Le très hon. Herb Gray: Je sais. Il va falloir discuter des trains une autre fois.

+-

    Le président: Pouvons-nous nous en tenir à notre sujet de discussion?

+-

    Le très hon. Herb Gray: D'accord. Je termine.

    Il est impossible d'éviter les contradictions en politique publique, mais des lignes directrices obligatoires s'imposent.

    Permettez-moi de terminer avec cette brève remarque. Je crois savoir que le gouvernement fédéral est en train de préparer des règlements pour remplacer les lignes directrices obligatoires mais je ne pense pas que le comité approuverait le rythme auquel on élabore ces règlements.

+-

    Le président: Merci, monsieur Szabo.

    Monsieur Reed, suivi de Mme Kraft Sloan.

+-

    M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Bienvenue à tous. Bien entendu, une bienvenue toute particulière à mon ancien collègue, Herb Gray.

    J'ai trois questions à vous poser. Je vais parler avant tout de ce problème très grave des eaux de lest. J'ai trois questions à poser et n'importe lequel d'entre vous peut y répondre.

    Tout d'abord, les vidanges en mer constituent-elles une mesure satisfaisante?

    Deuxièmement, existe-t-il des technologies qui permettraient de purifier ou d'assainir l'eau de lest?

    Troisièmement, est-ce qu'on a envisagé de remplacer l'eau de lest par une autre forme de lest? Je vous rappelle à tous qu'autrefois—il y a longtemps—le lest était solide. Je vous rappelle également qu'il y a échange de conteneurs d'un navire à l'autre quand ces derniers traversent l'océan. A-t-on envisagé d'utiliser un lest solide?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Je vais demander à Mme Krantzberg de m'aider à vous répondre, mais je vais faire quelques brèves remarques, en commençant par la dernière.

    Tout d'abord, on fait beaucoup de recherches dans le domaine que vous avez évoqué. Mme Krantzberg vous dira si on songe à un ballast solide plutôt que liquide mais là encore, je vous dirai, profane que je suis, c'est une question de technologie. Les navires qui mouillent dans les Grands Lacs déchargent leur cargaison à Windsor. Il faudrait que ces navires embarquent une autre cargaison, là même, pour se maintenir équilibrés et ragréés.

    Il se peut que d'un point de vue technologique ou économique, la façon la plus efficace de procéder soit de remplir les cales d'eau. En outre, encore d'un point de vue profane, je serais porté à croire que le ballast solide n'est peut-être pas plus propre que l'eau. Il pourrait s'y trouver toutes sortes de contaminants. Songez aux sédiments qui nous inquiètent dans les Grands Lacs.

    Ensuite, on fait beaucoup de recherches sur le plan technologique pour surmonter les éléments néfastes que contiennent les cales dans les eaux de ballast ou dans les sédiments résiduels. Il existe une technologie à rayonnement ultraviolet, les biocides, le chauffage. Jusqu'à présent, rien n'a été retenu comme la meilleure solution—moins encore la meilleure façon d'appliquer cette solution.

    Si je ne m'abuse, l'Organisation maritime internationale est en train de préparer une convention internationale là-dessus. Vous voudrez sans doute vous renseigner à ce propos.

    Il y a donc le travail que l'on fait du côté des technologies dont j'ai parlé et c'est parce que les vidanges en mer ne sont pas satisfaisantes. Même si l'on change l'eau de lest—et même en l'absence de ballast—la construction même des navires, avec toutes sortes de recoins, implique qu'il y aura toujours un petit peu d'eau qui restera. Il y a toujours des sédiments résiduels et tout comme dans l'eau, il peut s'y trouver des larves, des alvins, des organismes vivants. Au moment où on prend un nouveau ballast, même si c'est de l'eau douce des Grands Lacs, ces organismes peuvent y survivre.

  +-(1225)  

+-

    Le président: Donnons la parole à Mme Krantzberg, même brièvement.

+-

    Mme Gail Krantzberg (directrice, Bureau régional des Grands Lacs, Commission mixte internationale): Très brièvement, je répondrai que non, les vidanges en mer ne sont pas satisfaisantes. Il est question de lignes directrices obligatoires. La plupart des navires lestés qui mouillent dans les Grands Lacs sont conformes à ces lignes directrices mais ce sont les navires délestés qui posent le véritable problème car ce sont les vases qui contiennent des organismes. Le délestage en mer n'est pas une réponse. Nous nous préoccupons sérieusement avant tout de la vase que les navires délestés transportent.

    Maintenant, pour ce qui est des technologies de nettoyage du ballast, beaucoup de techniques sont à l'essai ou à l'état de projet pilote et M. Gray y a fait allusion. Dans les Grands Lacs, le problème se pose car nous n'avons pas à notre disposition des navires pour faire des essais en vraie grandeur. Voilà où le gouvernement pourrait encourager les armateurs à aider. Les navires sont souvent utilisés pendant une journée ou deux mais ensuite il faut qu'ils repartent pour le port suivant, de sorte que le temps permettant de faire des expériences directes, grandeur nature, est limité.

    Je ne pense pas avoir grand-chose à ajouter à ce qu'a dit M. Gray à propos du ballast solide. Quand on pense à des solides, on pense à des éléments végétaux, marins, à des matériaux d'assise, à des résidus animaux et tout cela peut contenir des organismes également.

    La véritable solution passe par des technologies pour les navires délestés. Voilà ce dont nous avons besoin : des technologies qui permettent de nettoyer les sédiments qu'ils contiennent.

+-

    Le président: Merci, monsieur Reed.

    Madame Kraft-Sloan, c'est à vous.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président. C'est un véritable plaisir que de me retrouver au comité de l'environnement. Je tiens à remercier le collègue qui m'a souhaité la bienvenue.

    De plus, je suis ravie de vous voir, monsieur Gray. Vous avez toujours eu une oreille sympathisante pour les dossiers de l'environnement que nous défendons.

    Monsieur Thomas, nous avons travaillé ensemble sur certains projets par le passé avec les autres témoins.

    Monsieur Gray, ma question va porter sur le mandat concernant les espèces envahissantes. Certains membres du comité vous dont déjà posé des questions là-dessus. Quant à moi, ce qui m'inquiète davantage, c'est ce qui se passera une fois que vous aurez obtenu ce mandat éventuel. Pouvez-vous nous dire quel sera le rôle de la CMI qui devra faire intervenir d'autres gouvernements? Que se passera-t-il quand vous aurez obtenu ce mandat?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Tout d'abord, les budgets de la commission nous viennent de deux gouvernements. La commission ne s'autofinance pas. Notre budget actuel ne prévoit pas de poste pour les programmes. Il sert essentiellement à Mme Krantzberg et à M. Clamen, qui s'occupent de notre bureau régional des Grands Lacs, situé à Windsor, et de nos bureaux d'Ottawa et de Washington.

    Si nous obtenons un mandat, il faudra ni plus ni moins qu'il soit accompagné d'un chèque. À supposer que cela se fasse, il nous faudra d'abord concevoir un programme, c'est-à-dire constituer un groupe d'experts où oeuvreront des fonctionnaires et des experts des deux pays et ils s'emploieront à dégager un consensus et à établir des faits et des données scientifiques. Ensuite, il y aura des audiences publiques et des rapports.

    Dans le cas d'un mandat permanent, comme celui qui autorise, en vertu de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, le travail de notre bureau des Grands Lacs et de notre personnel à Ottawa et à Washington, il faudra sans doute prévoir un mécanisme différent, une sorte de bureau de gestion ou de coordination.

    Pour l'heure, il n'existe rien de tel au gouvernement du Canada. Je m'empresse d'ajouter qu'il y a des gens qui travaillent ponctuellement dans les laboratoires fédéraux de Burlington, par exemple, et ailleurs. Il manque donc une gestion coordonnée et une structure de contrôle qui pourra optimiser de façon urgente ce qui existe et amplifier au besoin.

    Étant donné que la surveillance de la mise en oeuvre de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs a été un succès, nous avons demandé aux gouvernements de nous donner un mandat pour les espèces exotiques envahissantes. Je ne vous donnerai pas les détails de ce que devrait comporter ce mandat, mais, en tout cas, il faudra nécessairement une structure organisationnelle. Il faudra un plan de mise en oeuvre conjoint.

    Nous pensons qu'il faudrait que ce soit une organisation binationale, en raison de la crédibilité. Notre collègue, M. Thomas, a évoqué le traité sur les oiseaux migrateurs. Le traité des eaux limitrophes de la Commission mixte internationale est encore plus ancien—1909—bien avant mon temps.

  +-(1230)  

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Avec votre permission, je voudrais poser une brève question aux autres témoins.

    Je me suis reportée au premier paragraphe de la page 5, où vous citez les lois qu'il faudrait modifier. Songez-vous à un projet de loi omnibus pour accomplir cela? Vous dites que ce serait mieux que de déposer une nouvelle loi. Autrement dit, vous songez à cela, un projet de loi omnibus, n'est-ce pas?

+-

    M. Vernon Thomas: Oui. Si l'on se rappelle le nombre de sessions parlementaires qu'il a fallu pour que soit adoptée la Loi sur les espèces en péril, on peut se demander si l'on veut la même chose pour les espèces envahissantes. J'ose espérer que non. Pour un universitaire, il est peut-être plus facile de procéder en élargissant certaines définitions plutôt que de créer une nouvelle loi de toutes pièces. Voilà.

    Les définitions qui figurent dans ces lois ne sont peut-être pas actualisées étant donné les véritables problèmes que nous éprouvons dans les Grands Lacs. Tout en maintenant l'esprit de ces lois, nous pensons qu'il est possible d'élargir les définitions afin d'y introduire des dispositions concernant la gestion.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Si l'on procède ainsi, n'y aura-t-il pas des articles opérationnels dans ces lois qu'il faudra modifier pour permettre que le travail se fasse?

+-

    M. Vernon Thomas: Je ne suis pas compétent en la matière mais je suppose que oui, parce qu'il faudra élargir la logique, l'esprit du préambule, et élargir les définitions dans les règlements pris en vertu des lois.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: C'est tout sur cette question. Il y a donc trois aspects en l'occurrence.

    Merci.

+-

    Le très hon. Herb Gray: J'ai une brève remarque à faire. La collègue de M. Thomas a signalé certaines carences dans les textes législatifs. Toutefois, je rappelle que ni dans le Traité des eaux limitrophes ni dans l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs on ne trouve une définition de pollution se bornant aux produits chimiques. Le traité lui-même évoque la pollution mais elle n'est pas limitée à la pollution chimique. En fait, et Mme Krantzberg saura nous aider, si on se reporte à l'annexe 6 de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, on constate qu'on exige d'examiner la pollution résultant de la navigation:

... méthodes et pratiques concernant les eaux résiduaires et leur effet nocif sur la qualité des eaux, y compris, au besoin, des études pour déterminer si le poisson ou les invertébrés vivants qui se trouvent dans l'eau de lest rejetée dans le bassin des Grands Lacs constituent une menace pour ce dernier;

    et c'est tout à fait le cas en l'occurrence.

    Je ne dis pas que des définitions ne seraient pas utiles. Je pense que ce serait utile mais je voulais ajouter que ce n'est pas la peine de s'en prendre au Traité des eaux limitrophes ou à la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales. Leurs dispositions sont assez générales.

    En outre, on me signale qu'il y a des articles dans la Loi sur les pêches, notamment l'article 42, que l'on peut invoquer pour interdire l'importation de poissons vivants ou d'espèces vivantes. Je vais devoir demander à quelqu'un de fouiller cette question. Peut-être pourriez-vous demander à votre attaché de recherche de le faire.

+-

    Le président: Merci.

    Avant de passer au deuxième tour, après les questions de M. Tonks et les miennes, je voulais rappeler que M. Thomas avait l'intention de faire une brève intervention en réponse à l'une des trois questions de M. Reed. M. Reed ne pouvant pas rester pour le deuxième tour, je vous donne la parole tout de suite.

  +-(1235)  

+-

    M. Vernon Thomas: En effet, on a demandé si les vidanges en mer étaient satisfaisantes.

    Quand un cargo est chargé, il reste peu de place pour l'eau de lest et l'Organisation maritime internationale a affirmé que les vidanges en mer étaient très dangereuses, pour utiliser ses propres mots, et voilà pourquoi l'eau de lest est d'habitude chargée dans des régions côtières ou dans des estuaires.

    Toutefois, si on procédait au rinçage à l'eau salée des citernes de ballast délestées, cela aiderait un peu ou modérément car la quantité résiduelle d'eau douce qui se trouve dans ces supposées citernes vides se retrouverait dans un milieu salin. En même temps, en outre, on pourrait procéder au rinçage en mer des chaînes d'amarrage. Elles rouilleraient un peu plus vite dans ces conditions, mais cela fait partie de la navigation.

+-

    Le président: Merci, monsieur Reed.

    Monsieur Tonks.

+-

    M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Merci beaucoup de vos exposés. Je les ai trouvés vivement intéressants mais d'une certaine façon, inquiétants étant donné les défis qu'ils exposent et la lenteur avec laquelle on atteint certains des objectifs d'assainissement des eaux des Grands Lacs, etc.

    J'ai trois questions à vous poser.

    En ce qui concerne le ballast, vous avez parlé de modifications à la loi et de la question des définitions. Vous avez parlé en même temps de l'urgence en ce qui concerne le contenu biologique des citernes de ballast et de son impact sur les eaux douces.

    Pourrions-nous jouer un rôle? Je me rends compte qu'il est frustrant de se tourner vers les nouvelles technologies mais il me semble en même temps qu'il y a une grande urgence. Est-ce que nous pourrions appuyer la CMI, s'agissant de la mise en oeuvre des nouvelles technologies? Vous avez parlé des rayonnements ultraviolets. De nos jours, grâce au rinçage, il doit y avoir de meilleurs moyens de traiter les effluents qui proviennent des citernes.

    À propos des secteurs préoccupants, vous le savez, le président de temps en temps dit que partenariat et repère ce sont de grands mots, de grandes notions, mais rien ne vaut les échéanciers. A-t-on établi un ordre prioritaire des secteurs préoccupants avec des repères pour ce qui est de la santé communautaire, définis d'une façon ou d'une autre? Avez-vous l'intention de présenter un plan stratégique fondé sur la liste des priorités pour les secteurs préoccupants, la responsabilité des gouvernements et du secteur privé qui doivent se donner un échéancier concernant l'assainissement de ces secteurs?

    Troisièmement, je voudrais aborder une question de processus avec le président. Vous avez demandé que notre comité prenne des mesures et que le gouvernement aussi en prenne. Cela m'amène à demander au président—et j'attends ses consignes—ce qu'il pense que nous devrions faire, c'est-à-dire comment nous devrions intégrer ces requêtes dans le programme de travail du comité?

    Merci.

+-

    M. Vernon Thomas: Pour ce qui est des calendriers, etc., n'oubliez pas que je ne suis qu'un universitaire, je n'ai donc pas vraiment le pouvoir de suggérer quoi que ce soit au gouvernement. Cependant, il me semblerait logique et raisonnable, les États-Unis ayant fixé ce calendrier législatif et ces dates pour atteindre ses objectifs qu'en tant que cogestionnaire des Grands Lacs et de cet écosystème, que le Canada s'efforce de se fixer un calendrier analogue.

    À mon avis, il n' est pas responsable de la part d'un État souverain de simplement dire : bon, d'accord, les États-Unis semblent faire un bon travail d'analyse de salinité aux écluses; laissons-les faire. Il faut que nous nous donnions les moyens de faire la même chose en suivant un calendrier analogue.

    Puisque les États-Unis estiment pouvoir adopter leurs lois et mettre en place ces mesures d'intervention rapide et de contrôle de eaux de ballast dans les années qui viennent, nous devrions essayer de les imiter, surtout au niveau des mesures d'intervention rapide. Nous avons des ressources en personnel—ce qui nous fait peut-être défaut c'est le coordination.

    Quant à votre dernière question sur ce que votre comité peut faire, d'après moi—je suis peut-être naïf, mais je ne suis qu'un pauvre universitaire—, c'est une question qui concerne et qui touche clairement plusieurs ministères : Transports, Pêches et Océans, Environnement, voire même Commerce international. Votre comité pourrait essayer de jouer les coordinateurs entre les différents ministères fédéraux et distribuer les rôles. Dire, par exemple, qu'en cas d'invasion, le rôle principal devrait être confié à Pêches et Océans, surtout s'il y a des programmes d'éradication à mettre en place; et confier, par exemple, à Environnement Canada le soin d'identifier avec la plus grande précision possible les organismes coupables. Nous pouvons le faire aujourd'hui—Environnement Canada peut assumer la responsabilité de créer les bases de données biologiques utilisées comme référence pour l'identification de certaines espèces envahissantes particulières.

    Votre comité pourrait recommander ce degré de collaboration.

  +-(1240)  

+-

    Le très hon. Herb Gray: J'ajouterais, d'après ce qu'o m'a dit, qu'aux États-Unis il y a un U.S. Aquatic Nuisance Species Task Force, qui je suppose, madame Krantzberg, est fédéral.

+-

    Mme Gail Krantzberg: Il est composé de représentants des États et du gouvernement fédéral et il est géré par la Commission des Grands Lacs.

+-

    Le très hon. Herb Gray: Dont les bureaux sont à Ann Arbor.

+-

    Mme Gail Krantzberg: Exactement.

+-

    Le très hon. Herb Gray: Nous avons sollicité un mandat de coordination, mais il y a d'autres modèles. Il pourrait y avoir un bureau de coordination au gouvernement fédéral, mais pour être efficace, il faut qu'il y ait une forme de couplage binational, soit sur le modèle de la Convention concernant les oiseaux migrateurs soit sur le modèle de la Commission mixte international, ou quelque chose de distinct, bien que je suppose, pour éviter les chevauchements, peut-être que notre idée de faire jouer ce rôle de coordination par la CMI serait peut-être la plus judicieuse en termes de dépenses, de temps et de ressources humaines.

+-

    Mme Gail Krantzberg: Si je peux me permettre un petit commentaire sur la question des zones à problème et des plans stratégiques, faire incomber aux gouvernements et au secteur privé—par exemple, les municipalités—la responsabilité de fixer des calendriers, en fait dans le rapport que le président M. Gray a mentionné tout à l'heure, le rapport d'avril sur les zones à problème, une des recommandations était que les gouvernements fournissent à la Commission un calendrier d'objectifs de restauration pour ces zones à problème et de faire rapport sur l'amélioration de la qualité de l'eau dans des délais fixés. Nous avons donc demandé aux gouvernements de dresser des listes de priorité d'assainissement, d'arrêter des calendriers et de fixer des délais d'assainissement. C'est ce que la Commission a demandé et nous attendons la réponse des deux gouvernements fédéraux... Nous avons reçu il n'y a pas longtemps une réponse du gouvernement américain à cette recommandation. Nous attendons celle du gouvernement canadien et nous les rendrons toutes les deux publiques.

+-

    M. Alan Tonks: À ce sujet, monsieur le président, je vous l'ai entendu dire aux représentants de l'OCDE à propos des calendriers de réponses, de mesures correctives et de comptes rendus. En fait, c'est là où je veux en venir. Vous n'avez pas eu de réponses de notre propre administration.

    Vous avez mentionné le U.S. Aquatic Nuisance Species Task Force. Je ne pense pas que nous en ayons l'équivalent. Je n'en ai jamais entendu parler au ministère des Pêches et des Océans. Je suppose que c'est ce dont notre comité va devoir discuter en priorité : comment resserrer les boulons, avoir des réponses et mettre fin à l'inaction et à l'inertie, puisqu'une fois que nous aurons un calendrier, nous pourrons le suivre et prendre des mesures sur une base périodique.

    C'est la question que je voulais vous poser, monsieur le président. Nous pourrions peut-être discuter entre nous du rôle de contrôle que nous pourrions jouer.

    Merci beaucoup. Je vous sais gré de ces réponses.

  +-(1245)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Tonks.

    Avant de commencer la deuxième ronde de questions, j'aimerais simplement indiquer aux membres du comité que, bien entendu, ils peuvent tout à fait proposer une motion conformément à la procédure habituelle pour l'examen de ce comité et discussion. Nous nous réunirons probablement de nouveau mardi prochain, nous l'espérons, si un de nos témoins est d'accord.

    Avant cela ou avant la fin de la réunion, nous pourrions certes discuter de la possibilité de motions pour appuyer un certain nombre de questions soulevées par nos témoins d'aujourd'hui.

    Deuxièmement, j'aimerais demander à M. Thomas, à propos de la conclusion de son excellent document, si la connaissance d'une initiative prise actuellement par un ministère du gouvernement de proposition d'un amendement qui permettrait d'atteindre le résultat souhaité.

+-

    M. Vernon Thomas: Non, monsieur le président. J'ai posé la question au directeur général d'Environnement Canada qui est responsable de la question des espèces exotiques envahissantes, mais je n'ai toujours pas de réponse.

+-

    Le président: Monsieur Gray, le gouvernement a-t-il demandé à la CMI de mettre en place, si vous voulez, du côté canadien un équivalent du programme national sur les espèces aquatiques envahissantes et le ministre des Pêches et des Océans a-t-il été sollicité dans ce sens?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Aux pages 42 et 43 de notre 11e rapport biennal nous faisons des recommandations précises qui touchent non seulement aux genres de règlements déjà réclamés par les membres de votre comité, et à la recherche mentionnée, mais également à une structure de gestion pour coordonner et harmoniser les efforts d'action binationaux pour stopper la menace que représentent pour l'économie et l'intégrité biologique des Grands Lacs les espèces exotiques.

+-

    Le président: Monsieur Gray, puis-je vous demander si le gouvernement a répondu aux recommandations contenues dans votre 11e rapport biennal?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Ils viennent tout juste de nous répondre qu'ils aimeraient encore réfléchir à cette question de référence. Nous n'avons pas encore reçu de réponse officielle du gouvernement canadien, mais comme nous en avons reçue une du gouvernement américain, l'expérience me dit que nous ne devrions pas attendre très longtemps celle du gouvernement canadien.

+-

    Le président: Quand vous aurez reçu cette réponse, pourriez-vous la communiquer aux membres de notre comité?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Oui, c'est un document public. Sauf erreur, la réponse américaine qui vient de nous être envoyée est aussi sous forme de document public et publiée sur le site Web approprié que votre personnel pourra facilement trouver. Je n'en ai qu'une copie.

+-

    Le président: Tout ce que vous avez peut nous être utile pour discussion sur d'éventuelles motions.

+-

    Le très hon. Herb Gray: Si je peux me permettre de faire une suggestion à votre personnel, il devrait essayer d'en savoir plus sur ce groupe de travail américain, comment il fonctionne et qui y siège. Il devrait aussi s'intéresser à la National Invasive Species Act et à son application. Je crois qu'elle doit être renouvelée et refinancée. Ensuite, bien entendu, très bientôt je l'espère, nous recevrons la réponse du gouvernement canadien à laquelle vous voudrez peut-être consacrer quelques réunions.

  +-(1250)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Gray.

    Une partie de votre exposé qui n'a pas été lu par manque de temps est consacrée aux indicateurs. C'est un sujet qui intéresse vivement certains membres de ce comité et qui sont tout à fait prêts à vous offrir leur soutien.

    Ma question à propos de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs concerne son objectif chimérique, celui de l'interdiction totale de rejet. Qu'avez-vous à dire à son sujet?

+-

    Le très hon. Herb Gray: C'est toujours l'objectif. Tant que nous n'aurons pas tout fait pour atteindre cet objectif d'interdiction totale de rejet, les menaces pour la santé humaine posées par les métaux et les produits chimiques toxiques demeurera. C'est donc un objectif qu'il nous semble indispensable et essentiel de poursuivre.

    Les calendriers ne sont jamais chose facile, surtout s'ils nécessitent des engagements de fonds, mais comme l'a dit Mme Krantzberg, pour les zones où la situation est la pire dans les Grands Lacs, nous avons exigé des calendriers et des plans détaillés quand il n'y en avait pas. Nous publions dans ce rapport un tableau comparatif détaillé de toutes ces zones sensibles et avec les deux gouvernements nous prenons les mesures nécessaires pour transformer ce tableau en un site Web évolutif.

    Donc, comme je l'ai dit, pour répondre à votre question, l'interdiction totale de rejet continue à rester notre objectif.

+-

    Le président: Merci, monsieur Gray.

    Monsieur Mills, deuxième tour.

+-

    M. Bob Mills: Merci. J'ai deux petites questions.

    Pour commencer, j'aimerais avoir un bilan sur... J'ai l'impression que cela fait des siècles qu'on parle de moules zébrées. J'ai l'impression que nous n'arrêtons pas de parler de ces espèces envahissantes, et je me demande, puisqu'elles sont là depuis si longtemps, ce que peut faire le gouvernement. Où en est-on?

    Deuxièmement—j'aurais dû le dire tout à l'heure—, une des premières choses que le gouverneur de Washington m'a dites: «Allons faire un tour dans le port de Seattle. Je veux vous montrer des eaux usées non traitées. Elles viennent de chez vous».

    Bien entendu, les eaux usées de Victoria se déversent tout près de la frontière canado-américaine et elles atterrissent quotidiennement sur leur côte. Encore une fois, il me semble que c'est une question qui devrait être réglée par une commission canado-américaine et je n'arrive pas à croire que les États-Unis ne l'aient pas encore exigé. C'est leur problème numéro un. Quand j'ai commencé à parler d'air, ils m'ont tout de suite parlé d'eaux usées.

+-

    Le très hon. Herb Gray: Eh bien, je dois rappeler à tous que la Commission ne s'occupe que des eaux douces qui forment ou traversent la frontière. Mais nous nous rapprochons de l'eau salée; par exemple, nous nous intéressons à l'estuaire de la rivière Ste-Croix. Cette rivière forme la frontière entre le Nouveau-Brunswick et le Maine. Nous nous intéressons aussi à l'estuaire du Saint-Laurent. Nous avons entrepris cette étude importante sur nos ordonnances de contrôle, et cette étude doit embrasser tout le Saint-Laurent jusqu'à l'eau salée.

    Mais Victoria n'est pas bordée d'eau douce. La ville est sur l'océan. Si l'on veut modifier le traité pour nous donner juridiction dans les secteurs d'eau salée, je le répète, nous accepterons ce défi.

    Il est évident que vous soulevez une question importante. Nous espérons que Victoria aura accès à certains nouveaux programmes d'infrastructure fédéraux sur la base d'un partenariat pour remédier à ce genre de choses, parce qu'il est vrai que c'est une question importante.

    Pour ce qui est du bulletin sur les espèces exotiques, je ne crois pas que l'on ait encore mis au point de technologies pour éliminer la moule zébrée. La seule chose que nous pouvons faire—et cela est coûteux—c'est de gratter l'intérieur des lignes de prises d'eau ou les plages, etc. On procède à des recherches en ce moment, mais il n'existe pas à ma connaissance de technologies qui nous permettraient de nous en débarrasser, contrairement à la lamproie marine, où la Commission des pêcheries des Grands Lacs a créé des technologies qui ont eu pour effet de repousser la lamproie marine à tel point que les stocks indigènes qui avaient été fortement entamés par la lamproie marine ont pu être restaurés.

    C'est un autre cas où il faudra rester vigilant indéfiniment, et je remarque que les membres de votre comité et d'autres en ont appelé auprès du gouvernement fédéral pour que l'on préserve les crédits de la Commission des pêcheries des Grands Lacs, particulièrement pour le programme de la lamproie marine. Cela rejoint mon appel à la vigilance.

  +-(1255)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Mills.

    Monsieur Bigras.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: Merci, monsieur le président.

    D'abord, je tiens à réaffirmer le fait que je pense qu'il faut être vigilant vis-à-vis du mémoire de coopération qui a été signé le 1er mai par M. Mineta et M. Collenette. Je pense qu'il comporte des dangers importants pour l'environnement et que le comité devra être vigilant.

    Une analyse a été faite pour le compte du Board of Technical Experts. Je ne sais pas si vous connaissez cet organisme dont font partie des représentants des deux gouvernements. Dans cette analyse on concluait, et je cite:

...il est temps que les gouvernements fédéraux, américain et canadien, financent une nouvelle étude qui porterait non pas sur l'agrandissement de la voie maritime mais sur des solutions alternatives, plus douces et plus durables.

    Je voudrais savoir ce que vous pensez de cette analyse et de cette recommandation, monsieur Gray. Souscrivez-vous à cette analyse?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Malheureusement, je ne connais pas cette commission d'experts. Pourriez-vous me remettre une copie de ce document? Ce bureau d'experts binational relève de quel...

+-

    M. Bernard Bigras: C'est un bureau formé de représentants des deux gouvernements et de chercheurs.

    J'aimerais savoir si vous pensez qu'il faudrait faire une nouvelle étude qui porterait, non pas sur l'agrandissement de la Voie maritime du Saint-Laurent, mais sur des solutions alternatives plus douces et plus durables. Croyez-vous que ce soit la voie à suivre?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Je dois étudier le rapport. Je ne l'ai pas vu. Si vous m'en transmettez une copie, je vais pouvoir vous répondre par écrit. Vous parlez d'un bureau qui comprend des représentants des deux gouvernements. Comme vous le savez, il y en a beaucoup. Je dois m'excuser du fait que je ne suis pas au courant de ce rapport.

+-

    M. Bernard Bigras: Je voudrais vous poser une autre question. Dans une déclaration, M. Michael Douglas, de l'ONG Lake Ontario Keeper, concluait que la révision, en termes d'infrastructures, contenait des faiblesses importantes, tant économiques qu'environnementales. Il ajoutait que le temps pressait et que l'on devait confier à une entité indépendante la tâche d'identifier de nouvelles avenues concernant le transport maritime sur la voie de navigation Grands Lacs--Voie maritime du Saint-Laurent.

    Croyez-vous que le temps presse? Je suis convaincu que vous allez me dire qu'effectivement le temps presse, mais croyez-vous qu'il faille confier à une entité indépendante le soin de trouver de nouvelles alternatives concernant le transport maritime?

+-

    Le très hon. Herb Gray: La Commission mixte internationale, qui est une entité indépendante, a fait de telles études dans le passé. Si on lui en fait la demande formelle, elle sera prête à refaire ce genre de travail.

    En outre, étant donné qu'il est question d'alternatives au commerce maritime, vous devriez demander à des experts de comparaître devant ce comité. Ils vous parleront de ce qui est avantageux au point de vue économique pour le système des Grands Lacs, et ainsi de suite.

    En fait, il y a du commerce maritime sur les Grands Lacs depuis des centaines d'années, alors que la Voie maritime du Saint-Laurent date du début des années 1960.

+-

    M. Bernard Bigras: Mais vous devez savoir que l'agrandissement de la Voie maritime aura un impact sur le port de Montréal et sur l'économie de Montréal.

+-

    Le très hon. Herb Gray: Je dois préciser que le Conseil international de contrôle du fleuve Saint-Laurent est en contact très étroit avec l'Administration portuaire de Montréal afin de s'assurer que la quantité d'eau dans le port de Montréal soit suffisante pour desservir les bateaux internationaux.

+-

    M. Bernard Bigras: J'aimerais poser une dernière question aux universitaires, en l'occurrence à M. Thomas.

    Apparemment, les Panamax, qui mesurent 1 000 pieds, circulent présentement sur le lac Supérieur. Compte tenu des éventuels impacts environnementaux et des espèces envahissantes, croyez-vous que l'agrandissement de la Voie maritime pour permettre à ces navires d'y circuler serait une solution durable? À votre avis, quelle incidence cela aurait-il sur la problématique des espèces envahissantes?

·  +-(1300)  

+-

    Le très hon. Herb Gray: D'après les experts, si on creuse des canaux pour permettre aux Panamax d'entrer dans les Grands Lacs, cela aura un impact sur le niveau de l'eau. Les écosystèmes seront en outre très gravement touchés. C'est pourquoi on doit procéder avec beaucoup de prudence et faire des études très approfondies à l'égard de telles propositions.

+-

    M. Bernard Bigras: Ma question était destinée à M. Thomas.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Thomas.

+-

    M. Vernon Thomas: Oui. Tout ce que je peux répondre ici, c'est que si les changements dans les niveaux de l'eau, dans la composition de l'eau, ont des effets nocifs sur les habitats du poisson et d'autres organismes d'eau douce, les dispositions de la Loi sur les pêches nous permettent déjà de protester. Si l'on ne traite pas les eaux de lest, si l'on ne dépasse pas les mesures d'observation volontaires à l'avenir, il y aura alors lieu de s'inquiéter des taux accrus d'introduction d'espèces exotiques dans les Grands Lacs. Si les gouvernements canadien et américain imposent une série de règlements obligeant tous les navires délestés à traiter les eaux de lest résiduelles, nous serons moins inquiets.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: Merci.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Bigras.

    M. Comartin, Mme Kraft Sloan, M. Tonks.

    Monsieur Comartin.

+-

    M. Joe Comartin: Un mot au sujet des exportations d'eau, d'après mes informations les plus récentes, les huit États bordant les Grands Lacs réclamaient une augmentation substantielle des exportations d'eau, et il a fallu que les deux gouvernements fédéraux interviennent pour que cette proposition soit écartée.

    Mais j'ai une question qui s'adresse à M. Thomas ou à Mme Vasarhelyi. L'agrile du frêne est entré dans le comté d'Essex, et d'après ce que nous avons pu apprendre, il serait entré chez nous dans une caisse d'expédition. Cette maladie détruit tous les frênes. On a donc ordonné que tous les frênes du comté d'Essex soient abattus et détruits dans le but de contrer cette maladie. Nous avons bâti ce qu'on appelle maintenant un mur pare-feu à peu près à la hauteur de la frontière du comté, entre le nôtre et celui de Kent. Le problème que nous avons maintenant est le suivant. Étant donné que l'agrile du frêne est également présent dans le sud du Michigan, ce qu'on craint—et en fait, c'est plus qu'une crainte parce qu'on est presque sûrs que cela va arriver—, c'est que les bateaux de plaisance vont lui faire franchir ce mur pare-feu.

    J'ai deux questions. Premièrement, pour ce qui est de la loi que nous avons maintenant, quelles en sont les dispositions que nous devrions modifier pour stopper cela, pour que nous puissions faire examiner comme il faut les caisses d'expédition qui entrent chez nous? Je ne saurais vous dire pour le moment qui est responsable de cela.

    Deuxième question, est-ce que la méthode de réaction rapide, l'expérience australienne que vous avez mentionnée en exemple, pourrait être utilisée le long de ce mur pare-feu pour en assurer l'efficacité?

+-

    Mme Charlotte Vasarhelyi: Je peux répondre à la première question. En ce qui concerne la loi, je crois qu'on pourrait invoquer la législation sur l'inspection des aliments pour les caisses d'expédition.

+-

    M. Joe Comartin: Nous ne savons pas s'il y avait des aliments dans la caisse. Nous pensons qu'elle aurait pu contenir d'autres effets commerciaux. Nous sommes presque certains qu'il ne s'agissait pas d'aliments.

+-

    Mme Charlotte Vasarhelyi: D'accord, eh bien, s'il ne s'agissait pas d'aliments, j'ignore quelle loi on pourrait invoquer.

+-

    M. Vernon Thomas: Oui, la question des marchandises qui entrent chez nous, qui est liée aux expéditions, aux caisses d'expédition, aux emballages, est très sérieuse. M. Hugh MacIsaac a déjà dit qu'une simple inspection au hasard d'échantillons de caisses d'expédition aurait révélé que le genestrole qu'on utilise pourrait contenir un nombre important de larves d'espèces exotiques et d'espèces parvenues à l'âge adulte qui pourraient poser des problèmes. La loi qu'on a mentionnée aujourd'hui ne serait peut-être pas indiquée pour interdire ce genre de matériau, à moins qu'il n'existe une disposition quelconque dans la Loi sur la marine marchande du Canada qui traite des matériaux associés à l'importation de marchandises.

    Il est raisonnable de s'attendre pour le moment à ce qu'on cesse d'utiliser le varech séché qu'on utilise comme matériel de protection pour les expéditions; et que l'on pourrait substituer aux palettes de bois des palettes de métal sans qu'il en coûte trop cher. Pour les espèces aquatiques envahissantes, je pense qu'on devrait invoquer des règlements différents de ceux que nous avons mentionnés ici.

    En ce qui concerne le mur pare-feu, toute la question est de savoir si l'on peut atténuer le mal qui a été fait. Dans un cas comme celui-ci, une fois que le mal a été fait et s'est largement répandu, votre capacité d'intervention rapide est essentiellement d'une valeur minime.

    Si vous avez les moyens voulus pour déceler ces choses rapidement, c'est dans ce cas-là que votre capacité d'intervention rapide donnera des résultats. L'exemple que Charlotte a donné, celui de la moule striée en Australie, est très bon, parce que dans les trois jours, on avait trouvé une solution. Réagir. Éliminer. Mettre en quarantaine. Et en 26 ou 27 jours, on avait éliminé ce parasite dans ces régions géographiques relativement petites.

    On pourrait aussi mentionner l'exemple d'une espèce qui a été introduite en Californie il y a quelques années. Encore là, une intervention rapide a permis d'éliminer cette espèce en relativement peu de temps, en moins d'un mois. On a obtenu un résultat ici parce que la détection s'est faite tôt, et parce que l'invasion était très circonscrite géographiquement; donc votre mur pare-feu pourrait être déployé immédiatement avec un certain succès.

·  +-(1305)  

+-

    Le président: Merci.

+-

    M. Joe Comartin: Nos témoins pourraient-ils me dire s'ils ont compétence pour intervenir dans ce domaine ou s'il y a quoi que ce soit qu'ils puissent faire pour contrer l'agrile du frêne?

+-

    Mme Gail Krantzberg: Au sujet de l'intervention rapide, si vous me permettez un commentaire avant de répondre à la question directement, le problème qui se pose dans cette région Laurentienne et des Grands Lacs, c'est qu'il y a près de 100 millions de frênes rien que dans l'État du Michigan, sans parler des milliers ou des dizaines de milliers de frênes qui sont infectés en ce moment dans la région d'Essex. Essentiellement, le mur pare-feu, ou même le projet pilote où interviendrait un antiparasitaire—et il s'agit d'un antiparasitaire générique qui tuerait l'adulte—doit être considéré comme une mesure de gestion du risque de haut niveau. Le mal s'apprête à s'étendre. La situation n'est pas sans espoir, il est donc possible de stopper la propagation du phénomène.

    Dans ce dossier, la CMI ne peut faire que ce qu'elle dit vouloir faire pour contrer l'introduction d'espèces envahissantes.

+-

    M. Joe Comartin: Madame Krantzberg, si je puis vous interrompre, je ne songeais pas vraiment à la question de la compétence de la commission étant donné qu'il ne s'agit pas d'une espèce aquatique.

+-

    Mme Gail Krantzberg: Eh bien, je sais pour ma part que l'Agence canadienne d'inspection des aliments fait un superbe travail de recherche à Guelph pour trouver des technologies—des produits chimiques, des insecticides et d'autres technologies pour détruire ce coléoptère. Je pense que si vous cherchez un organisme à qui faire appel, ce serait probablement celui-là, et Agriculture Canada aussi. Ces deux instances seraient probablement à même d'intervenir.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Szabo.

+-

    M. Paul Szabo: Merci, monsieur le président.

    J'aimerais savoir en dernier lieu, en ce qui concerne les 160 espèces qui sont entrées dans les Grands Lacs, a-t-on pris des mesures correctives qui ont eu un effet mesurable? De même, à combien se chiffrera le nombre d'espèces s'il y a migration des États du sud ou si la migration se poursuit d'autres sources?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Je vais amorcer une réponse et vais demander à Mme Krantzberg de m'aider. J'espère aussi que nos amis de l'Université de Guelph auront le temps de répondre.

    Notre plus grande réussite a été la lamproie marine. On n'a pas réussi à l'éliminer, mais grâce à un certain nombre de programmes, on a réussi à la circonscrire, en utilisant des produits chimiques, en s'attaquant à la capacité de reproduction de la lamproie marine. Ne me demandez pas de vous expliquer en détail comment cela marche, mais apparemment, ça marche. Donc, les espèces qui avaient beaucoup souffert ont réussi à se rétablir dans une large mesure. C'est la plus grande réussite que je connaisse, et nous espérons poursuivre dans le même sens.

    Je vais demander à Mme Krantzberg de vous parler des autres programmes.

    Nous avons déjà parlé de la moule zébrée. On n'a pas encore mis au point de programme pour la contrer. Je crois que cela illustre l'ampleur du problème.

·  +-(1310)  

+-

    Mme Gail Krantzberg: Je n'ai presque rien à ajouter. La lamproie marine est probablement la seule stratégie de contrôle qui a vraiment bien marché. Certains ont dit qu'on avait réussi dans une certaine mesure à contrer la salicaire pourpre, mais nous n'en sommes pas sûrs pour le moment.

    Nos projections d'avenir ne devraient pas être différentes de ce qu'elles sont maintenant. Tant que ces navires délestés vont entrer chez nous, il faudra s'attendre à voir apparaître de nouvelles espèces envahissantes chaque année.

+-

    M. Vernon Thomas: C'est exact. Je ne peux pas ajouter grand-chose à cela. Je suis d'accord pour dire que le programme de la lamproie marine a été notre plus grand succès. Il faut admettre aussi que cela a pris un grand nombre d'années et qu'il a fallu dépenser des millions et des millions de dollars tant du côté canadien qu'américain.

    Il est très évident que nos succès sont limités et que nos dépenses sont énormes. Selon le mode de vie de ces espèces, on peut entrevoir ce qu'il en coûte et on peut s'attendre à ce que notre taux de réussite baisse. S'il s'agit d'une espèce qui se reproduit par voie de rapports sexuels et que vous avez un nombre relativement petit, par exemple, de mâles dans le lac Ontario et de femelles dans le lac Érié, le problème n'est pas énorme. Mais si vous avez des espèces d'invertébrés qui sont capables de se reproduire sans rapports sexuels, alors vous avez un potentiel d'augmentation exponentielle. C'est le genre de problèmes pour lesquels il existe rarement des solutions rapides et toutes faites.

+-

    Le président: Merci, monsieur Szabo.

    Et enfin, et non la moindre, madame Kraft Sloan.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Merci beaucoup, monsieur le président.

    Monsieur Gray, ma question porte surtout sur ma circonscription. Le lac Simcoe se trouve dans ma circonscription. Une partie de ma circonscription borde une partie du lac. Depuis 1993, soit depuis que j'ai été élue, j'essaie de trouver des fonds pour contribuer à améliorer la qualité de l'eau du lac Simcoe. Cependant, il n'y a pas vraiment de possibilités du côté fédéral. L'autorité chargée de la conservation, par exemple, est responsable de l'administration de certains aspects de la Loi sur les pêches, et de ce côté également, les possibilités sont très limitées. Nous n'avons presque rien obtenu.

    J'ai également parlé à la commissaire à l'environnement et au développement durable de cette question, et le problème tient au fait que, étant donné que le lac Simcoe n'est pas nécessairement considéré comme un cours d'eau frontalier, le gouvernement fédéral a beaucoup de mal à intervenir.

    Cependant, ce lac fait partie du bassin des Grands Lacs. Je sais qu'il n'y a pas beaucoup d'argent, ou qu'on pourrait sûrement mieux financer les programmes correctifs, mais est-ce que vous ou les autres témoins pourriez me dire comment on pourrait faire du lac Simcoe une zone d'intervention?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Tout d'abord, et c'est une réponse un peu technique, mais le libellé et l'administration du traité sont tels que ce n'est pas parce qu'un ruisseau est un affluent et qu'il se décharge, par exemple, dans le lac Ontario qu'il relève automatiquement de la compétence de la commission.

    Vous avez juste ici l'exemple de la rivière des Outaouais. Nous nous intéressons à ce qu'on appelle le courant d'eau douce de la rivière des Outaouais, à l'endroit où il se déverse dans le Saint-Laurent, mais nous ne nous occupons pas de la rivière des Outaouais jusqu'à ses eaux d'amont. C'est ainsi qu'on interprète le traité. Donc, même si l'eau du lac Simcoe finit par se déverser dans les Grands Lacs, cela ne nous confère pas nécessairement de responsabilité.

    Cependant, je pense que le gouvernement provincial serait un bon endroit où commencer. Il y aura peut-être un nouveau gouvernement provincial d'ici quelques mois, qui sait? Deuxièmement, les municipalités entourant le lac Simcoe peuvent recevoir des fonds dans le cadre des programmes d'infrastructure fédéraux. Il leur faudrait créer un partenariat avec la province et, bien sûr, utiliser leurs propres ressources. Je vous encourage à aider vos électeurs à se renseigner sur les programmes d'infrastructure fédéraux pertinents, dont le programme d'infrastructure verte qui est géré par la Fédération canadienne des municipalités, que M. Tonks, j'en suis sûr, connaît encore très bien.

·  +-(1315)  

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: En fait, monsieur Gray, nous sommes déjà passés par là, et on bâtit en ce moment une nouvelle station d'épuration des eaux usées à Sutton, au coût de 16 millions de dollars. Ce n'est pas un montant d'argent négligeable. Un tiers de cet argent provient du fédéral. Cependant, c'est l'amélioration de la qualité de l'eau à proprement parler et les autres recherches qui font problème.

    Merci quand même.

+-

    Le très hon. Herb Gray: Tout ce que je peux vous dire de plus, c'est que certaines institutions de la région pourraient vouloir prendre part à certains de ces projets de recherche, et je songe par exemple aux laboratoires de recherche de Burlington ou à certaines universités, si elles ont les fonds voulus.

+-

    Le président: Merci, madame Kraft Sloan.

    Monsieur Thomas, vouliez-vous intervenir?

+-

    M. Vernon Thomas: Non, je ne veux pas répondre à cette question-là, mais j'aimerais peut-être ajouter quelques mots à la réponse que j'ai donnée à M. Tonks plus tôt au sujet de ce que le comité pourrait faire pour faire avancer le dossier des espèces exotiques envahissantes au niveau gouvernemental. Puis-je?

+-

    Le président: Je vous en prie.

+-

    M. Vernon Thomas: Merci.

    Puisque nous avons ratifié la convention sur la biodiversité et que je suppose que cela relève du ministre de l'Environnement, il serait peut-être bon de demander comment nous entendons nous acquitter de nos obligations en vertu de l'alinéa 8h) sur les espèces envahissantes, sachant bien que le dossier relève de plusieurs ministères mais sachant aussi qu'un nombre considérable des espèces que le Canada a inscrites sur la liste des espèces en péril selon la définition du COSEPAC sont menacées à cause de la présence d'espèces exotiques envahissantes dans l'eau comme sur terre?

    Je pense que ce serait une question tout à fait pertinente à poser au ministre?

+-

    Le président: Monsieur Thomas, nous n'avons pas encore ratifié la convention sur la biodiversité. L'intention est de le faire avant 2004, mais le Canada ne l'a pas encore ratifiée.

+-

    Le très hon. Herb Gray: Je songe à un autre succès : jusqu'ici on a pu empêcher la carpe asiatique d'envahir les Grands Lacs grâce à des barrières électroniques installées sur la rivière Illinois et à la nouvelle technologie de barbotage. Cela peut sembler complètement farfelu mais apparemment ça fonctionne. Espérons que le succès se maintiendra.

+-

    Le président: Excusez-moi, monsieur Thomas, c'est le protocole sur la biosécurité auquel je songeais. Je me suis trompé.

    Monsieur Gray, j'aimerais que vous développiez un paragraphe de votre exposé, à savoir celui où il est question des investissements dans l'infrastructure de traitement des eaux usées au Canada. Je pense que vous citez le chiffre de 300 millions de dollars dans votre rapport. Cela vous semble-t-il suffisant?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Je vais demander à Mme Krantzberg et à M. Clamen de m'aider à répondre.

    Il reste des choses à faire. Prenez ma propre région, celle de Windsor, où la ville de Windsor souhaite entreprendre des projets pour supprimer le risque de débordement des égouts afin que l'eau ne soit pas contaminée. Mais cela coûte cher. On a donc amélioré l'infrastructure à Windsor mais il y a encore des choses inachevées, pour ainsi dire, dans un grand nombre d'agglomérations.

    Mais pourtant, l'argent a été dépensé à bon escient. L'eau est plus propre quand on se reporte aux repères permettant de déterminer si elle est potable, si on peut s'y baigner—même s'il y a encore des plages que l'on doit fermer—et si l'on peut y pêcher. Il y a encore des choses à faire.

+-

    Le président: Est-ce que la section canadienne de la CMI a fait une évaluation de l'investissement nécessaire pour les infrastructures de traitement des eaux usées, etc.?

+-

    Le très hon. Herb Gray: Madame Krantzberg, pouvez-vous répondre à cela, s'il vous plaît?

+-

    Mme Gail Krantzberg: Oui. D'après nos meilleures estimations—que nous avons préparées en consultation avec les ministères fédéraux—, il faudrait pour les zones préoccupantes des Grands Lacs environ 1,8 milliard de dollars pour des usines de traitement des eaux usées, pour l'écoulement des égouts pluviaux, les égouts unitaires et la modernisation des stations d'épuration des eaux usées.

+-

    Le président: Du côté canadien seulement?

·  -(1320)  

+-

    Mme Gail Krantzberg: Oui, du côté canadien.

+-

    Le président: Et du côté américain?

+-

    Mme Gail Krantzberg: Pour le côté américain, nous n'en savons rien. On sait très peu de choses sur les sommes déjà dépensées et sur les besoins. Nous n'avons des chiffres que pour deux grands centres urbains et cela représente au moins trois milliards de dollars. Mais ce n'est que pour deux grands centres urbains et il y a 26 autres zones préoccupantes pour lesquelles nous n'avons pas de renseignements.

+-

    Le président: Peut-on les obtenir?

+-

    Mme Gail Krantzberg: Nous continuons de demander ces renseignements auprès du gouvernement fédéral américain et nous espérons pouvoir les obtenir d'ici un an.

+-

    Le président: Allez-vous les communiquer au comité alors?

+-

    Mme Gail Krantzberg: Certainement.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Comartin, une dernière question.

+-

    M. Joe Comartin: J'aurais quelque chose à dire sur ce dernier point, monsieur le président. Les chiffres que l'on vient de nous donner ne tiennent pas compte du fait qu'il s'agit de l'épuration primaire et secondaire. Il n'y a pas de traitement de toutes les toxines puisque cela suppose une épuration tertiaire. Au pays, personne ne fait cela en ce moment, à ma connaissance.

    En ce qui concerne la station d'épuration des eaux usées de Windsor, vous semblez enchanté de celle d'Ottawa, à Windsor, on prétend avoir l'usine la plus propre parce que le traitement à l'ozone qu'on utilise permet peut-être d'éliminer certaines toxines, bien que nous n'en soyons pas sûrs.

    Quoi qu'il en soit, ces chiffres ne tiennent pas compte des produits chimiques actifs qui passent dans le système parce que l'épuration primaire et secondaire ne les élimine pas du tout.

+-

    Le président: Le substitut de M. Lunn.

+-

    M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Merci. C'est un plaisir de voir M. Gray à nouveau à une table de comité et sur la Colline.

    Je me demandais si vous aviez quelque chose à ajouter au sujet du détroit de Juan de Fuca. Depuis longtemps, les Américains se plaignent du manque de traitement des eaux usées à Victoria et je me demande si vous pouvez faire le point sur cette situation. Est-ce que nous allons réussir à faire avancer ce dossier?

+-

    Le très hon. Herb Gray: La Commission mixte internationale ne s'intéresse qu'à l'eau douce, à l'eau qui constitue ou traverse la frontière. Une petite exception, ce sont les estuaires des eaux frontalières comme l'estuaire du Saint-Laurent ou l'estuaire de la rivière Ste-Croix. Nous n'avons aucune responsabilité en ce qui concerne Victoria, ni le détroit de Juan de Fuca, car il s'agit d'eau salée. Si les deux pays s'entendent pour élargir le traité et nous confier plus de responsabilités, je suis convaincu que nous le ferions.

    Je suis au courant bien sûr de la situation. Votre collègue a signalé que cela ennuie énormément l'État de Washington ainsi que les habitants de la région de Victoria. Toutefois, aux termes du traité, nous ne pouvons rien faire.

+-

    M. Paul Forseth: Merci.

+-

    Le président: Monsieur Comartin, une dernière, dernière question.

+-

    M. Joe Comartin: Je pense que c'est probablement le consensus au sein du comité—et je présente un avis de motion pour la prochaine réunion—que nous mettions à l'ordre du jour une motion pour adopter la recommandation selon laquelle nous appuyons que soit confiée à la commission mixte la référence au sujet des espèces envahissantes. Si vous pouviez noter que j'ai donné avis de motion, nous pourrons en discuter à la prochaine réunion.

+-

    Le président: C'est noté. Merci.

    Nous allons conclure la réunion. Nous avons passé deux bonnes heures bien remplies. Nous avons appris beaucoup de choses sur d'éventuelles politiques.

    Les membres du comité souhaitent manifestement donner suite à plusieurs de vos suggestions. Nous vous tiendrons évidemment au courant, et nous vous remercions de votre présence ici aujourd'hui.

    Nous espérons vous revoir bientôt. Merci beaucoup.

+-

    M. Vernon Thomas: Merci, monsieur le président.

-

    Le président: La séance est levée.