[Français]
Merci, monsieur le président.
Honorables députés, je veux d'abord m'excuser de faire ma présentation en anglais. Par contre, je vais répondre avec grand plaisir à vos questions en français.
[Traduction]
La B.C. Freedom of Information and Privacy Association est un organisme sans but lucratif fondé en 1991 pour promouvoir l'accès à l'information, le gouvernement transparent et responsable devant la population et les droits de la protection des renseignements personnels au Canada. Nous servons un large éventail de personnes et d'organismes au moyen de programmes de sensibilisation du public, d'aide juridique, de recherche, de défense de l'intérêt public et de réformes législatives.
Bien que nous ayons pignon sur rue en Colombie-Britannique, la FIPA a également joué un rôle actif sur la scène fédérale. Nous nous sommes joints aux voix qui réclament de manière de plus en plus pressante la réforme de cette loi maintenant devenue désuète. Plus tôt cette année, conjointement avec l'Association canadienne des journaux et la Fédération canadienne des contribuables, nous avons écrit au premier ministre pour lui demander de suivre l'exemple du président Obama et d'inclure la réforme de l'accès à l'information dans le discours du Trône. Il ne l'a pas fait. Les trois mêmes organismes ont écrit au premier ministre durant la dernière campagne électorale pour lui demander d'appliquer les réformes touchant l'accès à l'information sur lesquelles il avait fait campagne en 2006. Évidemment, nous attendons toujours.
Il ne fait aucun doute qu'une réforme de l'accès à l'information s'impose. Lorsque la Loi sur l'accès à l'information est entrée en vigueur, en 1983, le monde était bien différent de ce qu'il est aujourd'hui. La société Chrysler éprouvait des difficultés financières et les premières mini-fourgonnettes faisaient leur apparition sur le marché. Le mur de Berlin existait encore. Les enthousiastes des ordinateurs à la maison pouvaient s'amuser à jouer à Pac-Man sur leur Commodore 64. Dans les bureaux du gouvernement, les machines de traitement de texte Wang, de la taille d'un jukebox Wurlitzer, venaient tout juste d'arriver pour assurer le traitement de l'information.
L'information et la façon dont elle est manipulée ont changé radicalement depuis cette époque, mais la loi qui régit la façon dont les Canadiens ont accès à cette information est demeurée essentiellement inchangée. Depuis cette époque, nous avons eu sept législatures dont des gouvernements majoritaires et minoritaires libéraux et conservateurs. Différents partis ont détenu la balance du pouvoir dans ces gouvernements minoritaires, pourtant la réforme se fait toujours attendre.
Il y a eu des études détaillées et sérieuses sur la Loi sur l'accès à l'information, ainsi que de nombreuses recommandations de réforme. L'une des premières études a été réalisée par le Comité de la justice de la Chambre. Son rapport s'intitulait Une question à deux volets et il a été publié en 1987. Le vice-président du comité était un jeune député du nom de Rob Nicholson. Je vous recommande ce rapport, ne serait-ce que pour la photo du ministre de la Justice qui date des années 1980, bien qu'il contienne certaines recommandations très valables.
En novembre 2001, le Comité sur l'accès à l'information a publié un rapport intitulé Un appel à la transparence. Encore une fois, il n'y a eu aucune suite. Ce rapport a été suivi, en juin 2002, d'un rapport intitulé Accès à l’information: comment mieux servir les Canadiens. Ce rapport était le résultat d'un travail de deux ans, comprenant des voyages à l'étranger et des consultations à la grandeur du pays, effectué par un groupe d'étude de 14 membres formé de spécialistes de la fonction publique fédérale. Le gouvernement a rendu le rapport public, mais ne l'a jamais commenté officiellement.
En 2005, le commissaire à l'information Reid a déposé un projet de loi devant le présent comité intitulé la Loi sur la transparence du gouvernement. Ce projet de loi proposé aurait apporté des changements substantiels à la Loi sur l'accès à l'information. La FIPA a donné son appui à cette proposition, bien que nous ayons été déçu du fait que le commissaire n'ait pas cherché à obtenir des pouvoirs exécutoires.
En 2006, la plate-forme électorale du Parti conservateur contenait des propositions élaborées pour la réforme de la Loi sur l'accès à l'information, que la FIPA a appuyées. L'une des propositions précisait clairement qu'un futur gouvernement conservateur mettrait en oeuvre les recommandations du commissaire à l'information pour la réforme de la Loi sur l'accès à l'information.
Dans notre mémoire de 2006 sur la Loi fédérale sur la responsabilité, que vous avez sous les yeux, la FIPA a exprimé sa déception devant le fait que le gouvernement a décidé de reporter à plus tard la plupart de ces réformes et d'en confier l'étude au présent comité. Nous étions inquiets que le renvoi au comité permanent se révèle encore une fois le cimetière de cette action positive.
Justice Canada a également appuyé la proposition Reid et, dans son exposé devant le présent comité, le commissaire actuel a affirmé qu'il appuyait de manière générale le projet de loi de M. Reid. En résumé, ce projet de loi a été appuyé expressément par les deux derniers commissaires à l'information, par Justice Canada et, dernier, mais non le moindre, par le premier ministre actuel et son parti.
Il faudrait également noter que parmi les huit engagements touchant la Loi sur l'accès à l'information décrits dans la plate-forme électorale du Parti conservateur de 2006, il y en avait un qui consistait à donner au commissaire à l'information le pouvoir d'ordonner la publication de renseignements. La FIPA est également d'avis qu'un consensus s'est formé au cours des quatre dernières années selon lequel le projet de loi du commissaire Reid, enrichi d'un pouvoir exécutoire complet pour le commissaire à l'information, était la voie à suivre.
J'aimerais maintenant donner une réponse aux 12 recommandations proposées par le commissaire actuel. Je serai heureux de commenter davantage n'importe quel de ces points en réponse à vos questions.
Les deux premières recommandations précisent que le Parlement passe en revue la Loi sur l’accès à l’information tous les cinq ans et que tous aient le droit de demander l’accès aux documents conformément à la loi. La FIPA appuie ces deux propositions.
La recommandation 3 veut que la Loi sur l’accès à l’information confère au commissaire à l’information un pouvoir exécutoire pour des questions de nature administrative. La FIPA estime qu'il est indispensable que le commissaire ait un pouvoir exécutoire complet et non pas seulement pour les questions de nature administrative. Un pouvoir exécutoire est essentiel pour assurer le bon fonctionnement de la Loi sur l’accès à l’information. Les commissaires à l'information ont ce pouvoir dans quatre provinces et ces systèmes fonctionnent beaucoup mieux que le régime fédéral actuel.
Le commissaire Reid a exprimé le point de vue que le pouvoir exécutoire changerait la nature de son bureau. Il avait raison et la FIPA croit qu'il s'agirait là d'un changement positif. En cherchant à obtenir un pouvoir exécutoire pour les questions de nature administrative, le commissaire Marleau a effectivement accepté ce changement dans la nature de son bureau. La FIPA n'appuie pas une demi-mesure alors qu'un pouvoir exécutoire complet est véritablement ce qui répond au besoin.
La recommandation 4 veut que la Loi sur l’accès à l’information accorde au commissaire à l’information le pouvoir discrétionnaire d’enquêter ou non sur des plaintes. La FIPA estime qu'un tel pouvoir ne serait acceptable que dans les cas où il s'agit de refuser l'étude d'une poursuite jugée frivole ou vexatoire, et des critères semblables devraient être utilisés dans ces circonstances très rares.
La recommandation 5 concerne un mandat d'éducation du public et de recherche, la recommandation 6 concerne le mandat consultatif et la recommandation 7 prévoit que l'application de la loi soit élargie de manière à couvrir les documents concernant l'administration générale du Parlement et des tribunaux. La FIPA appuie ces trois recommandations.
La recommandation 8 porte que la Loi sur l'accès à l'information s'applique aux documents confidentiels du Cabinet. Dans la plupart des provinces canadiennes, les documents du Cabinet ne sont pas exclus de l'examen par le commissaire. Cette recommandation reconnaît le fait qu'une exclusion pour les documents confidentiels du Cabinet, comme toutes les exclusions en matière de divulgation, peuvent faire l'objet d'un abus ou d'une application excessive. La FIPA recommande fortement que les documents du Cabinet soient reconnus comme une exclusion en matière de divulgation, sujette à un examen par le commissaire.
La recommandation 9 veut que la Loi sur l'accès à l'information exige que toutes les prorogations au-delà de 60 jours soient approuvées par le commissaire à l'information. La FIPA craint que bien que cette proposition puisse réduire la capacité du gouvernement de prendre beaucoup trop de temps pour répondre à une demande, elle aura comme conséquence non voulue d'instaurer un délai automatique de 60 jours pour toutes les demandes.
C'est l'expérience que nous avons vécue en Colombie-Britannique lorsque le gouvernement Campbell a prolongé les temps de réponse de 30 jours civils à 30 jours ouvrables plus 30 autres jours ouvrables si le ministère estime que le fait de répondre plus rapidement gêne de manière indue le bon fonctionnement du ministère. En pratique, bien qu'il y ait un droit d'appel au commissaire, personne ne le fait parce qu'il est impossible que le bureau du commissaire puisse émettre une ordonnance avant que le prolongement de 30 jours soit expiré.
La recommandation 10 prévoit que la Loi sur l'accès à l'information précise les délais pour la réalisation des enquêtes de caractère administratif. La FIPA approuve cette proposition et propose une période de 90 jours, comme le précise le paragraphe 56.6 de la B.C. Freedom of Information and Protection of Privacy Act. Nous croyons qu'une période de 90 jours est appuyée par le commissaire Marleau.
La recommandation 11 veut que la Loi sur l'accès à l'information permette aux plaignants de s'adresser directement à la Cour fédérale en cas de refus d'accès. La FIPA est d'avis que la Loi sur l'accès à l'information devrait mettre à la disposition des plaignants un mécanisme informel et facile à comprendre pour obtenir l'information gouvernementale. Cela comprendrait des mesures de règlement des différends en matière de communication des documents.
Le commissaire a proposé cette recommandation comme un choix et la FIPA considère qu'il s'agit d'une condition préalable pour donner son appui à cette idée. Des plaignants particuliers ou bien nantis pourraient vouloir accélérer les choses et pourraient être en mesure d'en payer le prix, mais le plaignant moyen, le Canadien ordinaire, devrait pourvoir profiter d'un recours administratif informel pour obtenir les documents qu'il réclame.
La personne qui ne connaît pas le système et qui n'a pas les moyens de retenir les services d'un avocat spécialisé en droit administratif aura besoin d'un processus informel. Grâce à un pouvoir exécutoire complet, le commissaire serait en mesure de prendre des ordonnances pour la communication de documents sans qu'il soit nécessaire pour la personne de recourir aux tribunaux pour exercer son droit à l'information.
La recommandation 12 veut que la Loi sur l'accès à l'information prévoie des prorogations pour de multiples demandes simultanées provenant d'un seul demandeur. Cette recommandation devrait être soumise à l'examen du commissaire, et non pas à une décision arbitraire de l'appareil gouvernemental.
En conclusion, j'aimerais répéter le point de vue de la FIPA qu'il existe maintenant au pays un consensus selon lequel le projet de loi du commissaire Reid, enrichi d'un pouvoir exécutoire complet pour le commissaire à l'information, est la voie à suivre, et que le temps presse.
Mesdames et messieurs, vous avez l'occasion de jouer un rôle véritable dans la réalisation de cette proposition, qui reçoit un appui étendu. Un grand nombre de propositions du commissaire Marleau sont utiles, et peut-être même précieuses. Mais la FIPA ne croit pas qu'il soit nécessaire de se contenter de demi-mesures. Les petits pas peuvent être nécessaires, mais le grand bond n'est pas moins nécessaire. Si vous n'osez pas faire le grand bond, le Canada continuera de prendre de plus en plus de retard.
Merci. Je suis impatient de répondre à vos questions.
:
Merci, monsieur le président.
Comme vous l'avez dit, je suis depuis longtemps un défenseur du droit du public de savoir et un utilisateur chevronné de l'accès à l'information. En outre, je ne suis pas bilingue.
Je vous remercie de cette occasion de contribuer à l'effort continu du comité pour obtenir quelque chose de plus qu'une Loi sur l'accès à l'information largement déficiente.
À l'automne 2006, le présent comité était sur le point de consentir à faire progresser un ensemble modeste de mesures de réforme législative, à savoir, le projet de loi sur la transparence du gouvernement de 2005 du commissaire à l'information Reid. Il s'agissait d'une solution de rechange à l'époque, mais il s'agissait néanmoins d'un projet de loi entier et non pas d'une demi-mesure.
Mais les temps changent. On a plutôt apporté des modifications à la pièce à la Loi sur l'accès à l'information dans le cadre de la Loi fédérale sur la responsabilité de 2006. Malheureusement, même si la loi s'appliquait à un plus grand nombre de sociétés d'État, de fondations et de fonctionnaires du Parlement, il y a eu un prix à payer. Les modifications s'accompagnaient d'exclusions et d'exceptions étendues.
Les Canadiens se retrouvent maintenant devant une loi qui prévoit encore davantage le droit au secret, à la prorogation et à l'obstruction. Il faut une orientation et une vision de la part des leaders pour changer cette situation. À l'échelle internationale, le Canada figure au dernier rang en ce qui concerne les droits du public à l'information. La courte liste de modifications possibles au modèle actuel proposée par le commissaire à l'information n'apporte pas cette vision. Ses suggestions auraient pour effet de bureaucratiser encore davantage la loi actuelle déficiente sur l'accès à l'information et de diminuer les droits restreints à l'information qui seraient accordés au public en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Je prie instamment le comité de ne pas adopter ce mélange de mesures administratives et punitives limitées, à courte vue et contre-productives présentées par le commissaire Marleau.
Cependant, je suis ici pour répondre positivement à la demande plus vaste du Comité sur l'accès à l'information de la Chambre pour définir des choix en vue d'un projet de loi dans l'optique de changer la pratique du secret et l'attitude profondément ancrée chez les bureaucrates en place à Ottawa. Le projet de loi que je propose, qui a été distribué et qui est intitulé Loi sur le droit du public de savoir — il serait bien que le comité puisse le déposer sous une forme quelconque —, est véritablement un projet de loi modèle sur la liberté d'information de deuxième génération. Il propose catégoriquement une transparence plus complète. Il s'agit d'un effort législatif qui permet de suivre à la fois la piste de l'argent et la piste des documents relatifs à la sécurité, à l'environnement et à la consommation, quelque chose qui est cruellement absent de la loi actuelle. Il cherche à trouver une porte de sortie à la crise actuelle de l'accès à l'information qui consiste surtout à retarder la communication de l'information et à émettre des refus. Il cherche à trouver une solution pour avoir une meilleure information face aux incertitudes croissantes en matière d'économie et de sécurité, dans la période actuelle.
Il est possible que le projet de loi soit loin d'être parfait dans sa rédaction et je l'ai rédigé en y consacrant mon propre temps pour rendre service au public, et cela m'a permis de me rendre compte de ce que pouvaient ressentir des pionniers de l'accès à l'information comme les députés Barry Mather et Ged Baldwin au moment où ils ont rédigé leurs projets de loi modèles. Eux aussi ont cherché à trouver une façon de sortir des classifications de secret croissantes appliquées à l'information gouvernementale et ont cherché à trouver un moyen de combattre l'aliénation de plus en plus grande du public et de rétablir la confiance dans le gouvernement.
Laissez-moi expliquer brièvement les 12 caractéristiques principales du projet de loi, dont un grand nombre se retrouvent dans les lois progressistes sur la liberté d'information dans le monde.
Premièrement, je ferais des droits à l'information un droit constitutionnel et non pas simplement une obligation législative. Ainsi, le projet de loi établit explicitement que l'article sur la liberté d'expression figurant dans la Charte canadienne des droits et libertés comprend la recherche, l'extraction et la communication d'informations et d'opinions de toutes sortes et sous toutes les formes. Ce n'est pas un changement difficile à apporter, mais c'est un changement très, très important.
Deuxièmement — et vous l'avez entendu d'autres témoins —, il y a une modification majeure dans la disposition de déclarations d'objet du projet de loi, du fait qu'il est axé exclusivement sur le fait de maximiser la divulgation, et laisse tomber l'accent que mettait l'ancienne Loi sur l'accès à l'information sur les objectifs de secret. Il exige des codes de divulgation universels à la fois dans le secteur public et dans le secteur privé, de sorte que l'information sur les deniers publics et sur les questions relatives à la santé, à la sécurité, à l'environnement et à la consommation puisse être suivie de manière régulière et instantanée et soit rendue disponible sur Internet. Ce qui est alors créé, c'est une obligation juridique, obligatoire, de divulgation proactive, quelque chose qui fait défaut dans la loi actuelle. La divulgation proactive ne sera alors plus le dernier recours. Elle ne sera plus limitée à quelques documents administratifs choisis comme les dépenses de voyage des hauts fonctionnaires qui sont affichées tardivement et avec trop peu d'information sur les sites Web du gouvernement.
Troisièmement, le projet de loi permet d'élargir la portée de la loi dans le secteur privé comme dans le secteur public. Autrement, comment serait-il possible de nos jours de surveiller les dépenses publiques et les questions de sécurité? Le projet de loi vise principalement les organismes privés recevant des fonds du fédéral, maintenant nombreux à assumer des fonctions publiques. Le gouvernement ne verserait pas de fonds publics aux organismes qui ne seraient pas dotés de services de divulgation proactive. Aucune entreprise tierce n'aurait droit au pouvoir spécial de s'opposer à une divulgation. Ces dispositions s'appliqueraient au premier ministre et aux ministres, de même qu'à l'ensemble du Parlement.
Quatrièmement, le projet de loi prévoit une obligation légale de documenter les décisions et les interventions clés en détail. Conformément à cette obligation, les organismes doivent conserver des dossiers à jour et facilement récupérables, faute de quoi ils seraient passibles d'amendes.
Cinquièmement, on réclame un accès rapide à peu de frais à l'information. La norme devrait être fixée à 20 jours au lieu de 30. Cela suppose des règles de concertation et d'extension des délais plus strictes et la mise en place de pouvoirs exécutoires pour garantir un service rapide.
Sixièmement, on avance des restrictions limitées et étroites pour la divulgation des renseignements personnels; des données sur la sécurité nationale; des secrets commerciaux; des délibérations non annoncées en matière d'argent, de taxes ou d'actions; d'enquêtes criminelles, et de certains documents de cabinets. On évite beaucoup d'ordonnances imposant le secret dans l'intérêt du public, comme les conseils stratégiques, ou d'autres soutenant que seuls certains documents administratifs peuvent être rendus publics.
Limiter l'application des exemptions signifie aussi réduire grandement les délais de protection, de même qu'appliquer d'importants critères de préjudice. Par exemple, les délibérations ou les documents de cabinets, que mon projet de loi ne désigne plus comme des documents confidentiels de cabinets, pourraient être rendus publics dans les trois ans, mais les cabinets pourraient décider de les diffuser plus tôt. Qu'il s'agisse d'une analyse factuelle, qu'il s'agisse de données sur la santé, la sécurité, l'environnement ou la consommation, qu'il soit question de libertés civiles ou que la divulgation ne fasse de tort important à personne, les documents de cabinets peuvent être rendus publics.
La plupart des présentations au Conseil du Trésor et les ordres du jour de cabinets pourraient automatiquement être rendus publics et ne seraient plus cachés pendant une vingtaine d'années.
Aussi, les données sur les salaires, les avantages sociaux et les indemnités des fonctionnaires ne seraient plus protégées à titre de renseignements personnels.
Je demande au comité de faire attention pour que les exemptions ne deviennent pas des exemptions objectives ou qu'elles aient une portée trop vaste et qu'elles ne soient pas assorties de critères de préjudice ni de contraintes temporelles à court terme. De plus, il n'est pas du tout utile que l'intérêt public supplante de cette façon les dispositions contenues dans les lois canadiennes. Il est préférable d'instaurer un régime de divulgation proactive que de réduire le nombre d'exemptions existantes.
De plus, aucune autre loi du Parlement ne devrait prévaloir sur la Loi sur le droit de savoir. Toutes les lois qui contiennent des dispositions générales de confidentialité devraient être révisés.
Septièmement, il est légalement nécessaire de créer une administration dont la principale mission serait de faciliter l'instauration de pratiques de divulgation proactive. C'est-à-dire qu'il faudrait remplacer le Conseil du Trésor et l'administration actuelle de l'accès à l'information par une autorité indépendante publique dont le mandat consisterait principalement à diffuser l'information, et non pas à en bloquer la divulgation ni à refuser l'accès aux documents.
Huitièmement, on propose de mettre en poste un commissaire à l'information plus rigoureux et doté d'un pouvoir exécutoire ayant force obligatoire et de fonctions plus larges appuyées par un régime exécutoire de sanctions.
Neuvièmement, le projet de loi accroît la transparence en permettant l'accès du public aux réunions des organisations et commissions fédérales.
À l'heure actuelle, certaines organisations sont assujetties à des dispositions les obligeant à tenir annuellement des assemblées générales publiques — dans le cas de la Commission de la capitale nationale, on permet au public d'assister aux réunions du conseil —, mais les vraies affaires se brassent derrière des portes closes et aucun mécanisme ne permet de contester la tenue de réunions à huis clos.
Dixièmement, le projet de loi prévoit une surveillance parlementaire continue afin de favoriser l'instauration de pratiques de divulgation.
Onzièmement, les personnes plus défavorisées doivent avoir les moyens et l'appui nécessaires pour contester des pratiques entravant l'accès à l'information en s'adressant à des organismes communautaires ou aux tribunaux. Il leur serait alors possible de réclamer des injonctions judiciaires à cet effet.
Finalement, on propose l'établissement d'un centre international pour l'excellence en matière de liberté d'information, permettant là encore au Canada de contribuer à la transparence globale et à l'élaboration d'ententes intergouvernementales en faveur de la divulgation de l'information.
J'ai persisté résolument à obtenir des données dans le cadre du régime actuel d'accès à l'information. J'ai contesté les ordonnances de confidentialité devant les tribunaux, et on m'a souvent consulté sur des questions d'accès à l'information. Je suis donc en mesure de constater, 25 ans plus tard, que la Loi sur l'accès à l'information du Canada nécessite une refonte majeure, pas seulement de légers changements.
Pour ne donner que quelques exemples, j'ai eu du mal à obtenir, et parfois mes demandes ont carrément été refusées, des renseignements sur la salubrité des aliments, l'innocuité des médicaments et la sécurité aérienne; des renseignements de nature environnementale sur des sites toxiques, les changements climatiques et les sables bitumineux; de même que des données sur le programme des commandites et d'autres programmes gouvernementaux aux dépenses douteuses.
Je me suis donc mis à la recherche de solutions législatives pour que tout le monde puisse accéder rapidement et facilement à ces données. C'est pourquoi j'ai rédigé une loi sur le droit de savoir, l'amorce d'un débat qui pourra servir au Parlement et à la population.
Je demanderais au comité d'examiner attentivement et d'utiliser mon nouveau projet de loi sur l'accès progressif à l'information. Il se distingue du projet de loi Reid à différents égards. C'est ma contribution à la prochaine étape des efforts de transparence du Canada. Je suis tout à fait disposé à vous expliquer en quoi consiste un code de divulgation proactive; pourquoi il faut assurer un suivi des enjeux relatifs à la sécurité et aux finances; ce qui cloche avec la préséance de la protection de l'intérêt public; pourquoi il est inacceptable que seuls les documents administratifs soient diffusés; quelles sont les solutions en fait de délai; ce qui paralyse actuellement le système d'accès à l'information; en quoi consiste le pouvoir d'exécution et ainsi de suite.
Je vous remercie.
:
Quelles recommandations? Je vais simplement un peu plus loin en me fondant sur mon expérience à l'échelle internationale. J'ai certainement pu constater que vos arguments ont beaucoup plus de poids devant les tribunaux quand il s'agit d'une simple loi, et non pas d'un droit constitutionnel. Voilà une première différence.
Les codes de divulgation obligatoires sont absolument nécessaires, car ils ont pour effet de renverser le processus d'accès à l'information. Plutôt que de donner une liste d'exemptions, sous forme de conseils stratégiques, comme on le fait dans le projet de loi Reid, à savoir qui peut obtenir des résultats de sondage, des statistiques ou autres, je propose d'établir tout ça clairement dans un code de divulgation.
Il est aussi nécessaire d'imposer des obligations à l'égard de la tenue de séances ouvertes, soit des dispositions anti-secret. Il y a assurément un bureau de Ressources naturelles Canada qui examine pour l'Office national de l'énergie les enjeux liés au pipeline de la vallée du Mackenzie et à la sécurité nucléaire. Ces choses doivent être rendues publiques dans le cadre de réunions ouvertes, et nous devons avoir accès à un mécanisme de recours. On ne devrait pas avoir à attendre 20 ou 30 jours pour que notre demande d'accès soit traitée; on devrait pouvoir faire appel auprès du commissaire directement pour lui signaler que l’accès à une réunion nous a été refusé. C'est ce qu'on appelle de la transparence.
Je crois que le droit de contester les pratiques de secret ne se trouve dans aucun projet de loi, car les citoyens sont frustrés de l'attitude des commissaires. On doit leur donner les moyens de s'adresser directement aux tribunaux.
Pour ce qui est des utilisateurs de l'accès à l'information, il y a une différence entre les entreprises et les simples citoyens; et ces derniers ont réellement besoin d'aide. Pourquoi les gens n'ont-ils pas davantage recours à ce mécanisme? Cela s'explique en partie par le fait que c'est compliqué et que beaucoup de citoyens sont exclus du système.
Il n'existe pas de régime à portée internationale. Je soutiens qu'il faut conférer des pouvoirs exécutoires aux commissaires. Je m'explique: si on se limite à des ordonnances administratives, on s'en remet à des enquêtes sur les pratiques de secret, ce qui pose principalement problème à l'heure actuelle, et à des plaintes et recours de deuxième ordre. Et c'est inacceptable à mon avis.
Dernièrement, et ça saute probablement aux yeux, mais j'ai réduit considérablement le nombre d'exemptions et en ai beaucoup restreint la portée. C'est absolument nécessaire selon moi, car c'est cette culture du secret qui est si problématique. Et si on ne fait rien maintenant, on sera coincés avec la même loi dans 25 ans d'ici.
:
Messieurs, vos témoignages à tous les deux nous ont été bien utiles. Il est bien de ne pas entendre le même son de cloche de tout le monde.
Nous sommes conscients que la productivité et le rendement de notre système d'accès à l'information ne répondent pas aux attentes du public ou aux normes que nous aimerions avoir. Certains ont blâmé la loi, d'autres, le commissaire, d'autres encore le ministre responsable du dossier ou le BCP pour son manque de leadership, etc. Il y a suffisamment de blâme à jeter, mais je crois que nous sommes résolus à tout mettre en oeuvre pour faire adopter les points qui font l'objet d'un consensus.
On dirait que M. Reid reçoit un soutien de tous les secteurs. Je pense que nous devrions poursuivre nos travaux dans la mesure du possible, mais, au final, le gouvernement devra présenter au Parlement tous les changements qui seront effectués.
Nous vous remercions vivement, messieurs. Vous pouvez quitter la salle.
Il y a une question que nous voulons régler très rapidement.
Chers collègues, M. Poilievre a déposé un avis de motion. C'est inscrit à notre ordre du jour. J'ai pris le temps de faire une petite vérification de contexte auprès du commissaire à la protection de la vie privée. Le commissaire est absent cette semaine, mais j'ai parlé à la commissaire adjointe, qui m'a informé qu'ils était en négociations avec Google depuis un certain temps en ce qui a trait au projet Street View, et qu'on en était arrivés à une entente préliminaire, selon trois conditions. La première est la mise en place de technologies de brouillage pour les visages, les plaques d'immatriculation et autres renseignements personnels d'ordre privé. Deuxièmement, avant l'activation de l'imagerie à l'échelle de la rue, Google devra en aviser adéquatement le public canadien. Il s'agira d'un avis public global précisant ce qu'on fait, et pourquoi. Troisièmement, on s'est finalement entendus sur la conservation des images identifiables, des images originales: le logiciel devra les traiter, mais on ne sera pas autorisé à conserver ces images; on devra commencer à les éliminer et n'en rien garder. On prévoit achever ces discussions au retour du commissaire.
On me dit également qu'à l'échelle internationale, un groupe a déposé des plaintes dans tous les pays où l'on trouve pareils services ou systèmes de surveillance. On s'attend à la présentation d'une telle plainte, et le commissaire à la protection de la vie privée procède actuellement à tous les préparatifs nécessaires pour lancer l'enquête, ce qui signifie sans doute que les parties à cette enquête et les plaignants ne discuteront probablement pas devant nous des questions liées à la plainte. Ils le feront devant le commissaire.
C'est intéressant, mais comme chacun sait, toutes les questions liées à la surveillance relèvent de la LPRPDE, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, et non de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Techniquement, la présidence devrait déclarer irrecevable la motion de M. Poilievre. Cependant, dans les circonstances, il y aura des développements au cours des prochaines semaines, et j'aimerais reporter la question à la séance du lundi, à notre retour du congé. Nous aurons probablement un peu plus d'information quant au fait qu'il y a ou non un problème.
J'ai lu, dans ce rapport de la commissaire adjointe à la vie privée, que la LPRPDE ne posait pas de problème. On m'a dit que cette loi, qui a été modifiée ou considérablement changée il y a de cela deux législatures, demeure neutre sur le plan de la technologie. Les principes enchâssés dans la loi et les normes à respecter relativement à la protection des renseignements personnels sont très clairs, et peuvent s'appliquer à pratiquement toute utilisation des renseignements personnels. Donc, si nous nous attelons à cette tâche, nous pourrions devoir inviter plus qu'un seul témoin de chaque partie concernée. Si nous devons agir sur ce plan, je crois que toute motion dont nous serons saisis devra être plus précise; on y dira que la tenue d'une étude s'imposera s'il s'avère qu'on a relevé un problème concernant la surveillance vidéo et autres questions connexes. Nous en resterons là, car le comité pourra alors décider de l'étendue des témoignages à entendre, du délai, etc.
La plupart des membres conviendront probablement qu'une fois que nous aurons réglé cette question le lundi, le comité devrait laisser à la présidence le soin de déterminer si nous nous attaquerons à cette étude, advenant qu'un trou apparaisse dans l'horaire de nos séances d'ici l'été, simplement pour nous assurer d'utiliser le temps dont nous disposons. Cela nous fera donc un autre sujet d'étude.
Élaguons un peu la motion pour ensuite la soumettre de nouveau, puis nous l'aborderons le lundi, à notre retour du congé.
Allez-y, monsieur Poilievre.