Il s'agit de la neuvième séance du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous procédons à l'étude de la Loi sur l'accès à l'information.
Nous accueillons aujourd'hui trois témoins qui vont comparaître par vidéoconférence. Il y a M. David Loukidelis, commissaire à l'information et à la protection de la vie privée de la Colombie-Britannique depuis 1999. M. Loukidelis a rédigé de nombreuses décisions en matière d'accès à l'information tant pour le secteur public que pour le secteur privé. Il travaille aussi activement à assurer la pleine mise en œuvre des lois de sa province qui concernent l'accès à l'information et la vie privée. Il est également professeur à l'Université de Victoria, où il enseigne le droit liés à l'accès à l'information et à la protection de la vie privée.
Nous accueillons aussi M. Stanley L. Tromp. M. Tromp est journaliste, et il connaît très bien le processus de demande d'accès à l'information grâce au poste qu'il a occupé au journal étudiant de l'Université de la Colombie-Britannique, l'Ubyssey. Sa demande d'accès à l'information pour le contrat de marketing UBC Coca-Cola a été à l'origine, en 1995, d'un litige qui a duré cinq ans, d'un appel qui a été accueilli par la Cour suprême de la Colombie-Britannique ainsi que d'une importante décision sur la divulgation du commissaire à la protection de la vie privée de la Colombie-Britannique. Il a lancé le caucus de l'accès à l'information de l'Association canadienne des journalistes, et il a été l'un des fondateurs du groupe B.C. journalists for freedom of information en 1998. Ses articles, souvent écrits à la suite de demandes d'accès à l'information, ont été publiés dans le Globe and Mail, le Vancouver Sun, le Georgia Straight, le Vancouver Magazine, le Vancouver Courier et dans de nombreuses autres publications.
Nous accueillons enfin M. Murray Rankin. M. Rankin travaille à titre d'associé chez Heenan Blaikie, où il concentre sa pratique sur les causes de droit public, tout particulièrement les dossiers de droit autochtone, de droit de l'environnement, de droit à l'information et de protection des renseignements personnels. Son intérêt pour les questions d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels lui a permis de travailler sur la communication de renseignements entre pays à la direction de la science, de la technologie et de l'industrie de l'OCDE, à Paris. Son curriculum vitae est beaucoup plus long que ça, mais il a été consultant auprès du Comité de la Chambre des communes chargé d'examiner la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels en 1987 et en 1992.
Bienvenue messieurs. D'après ce que je comprends, deux d'entre vous vous trouvez à Victoria, et vous, monsieur Tromp, vous vous trouvez à Vancouver.
Nous n'avons pas vraiment parlé en détail de la façon dont nous aimerions procéder avec vous, mis à part pour dire que nous aimerions entendre ce que vous avez à dire sur un certain nombre de choses, et plus particulièrement votre point de vue et votre analyse de la situation du système d'accès à l'information actuel et de la loi, vos observations sur certaines des conséquences de cette situation, et peut-être quelques solutions, tant administratives que législatives, de façon à nous permettre de mieux saisir l'urgence du travail que nous avons à faire.
Ce que je vais faire, c'est que je vais vous accorder à chacun de cinq à sept minutes pour formuler des observations préliminaires à l'intention du comité. Ensuite, je vais céder a parole aux membres du comité pour qu'ils puissent vous poser des questions en fonction de ce que vous aurez dit.
Nous allons commencer par M. David Loukidelis, Commissaire à la vie privée et à l'information de la Colombie-Britannique.
Monsieur Loukidelis, s'il vous plaît.
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Merci, monsieur le président, et merci aux membres du comité de l'occasion qui m'est offerte de me joindre à vous par vidéoconférence depuis Victoria et de vous faire part de quelques idées, du point de vue de la Colombie-Britannique, sur la réforme de la loi fédérale sur l'accès à l'information.
Le travail que je fais depuis 1999 — depuis le dernier millénaire — dans le cadre de mon poste de commissaire, ici, en Colombie-Britannique, n'a que renforcé ma conviction selon laquelle une loi sur l'accès à l'information bien faite est absolument indispensable au bon fonctionnement de tout gouvernement démocratique. Ce genre de lois est tout à fait conforme aux principes et pratiques de la démocratie parlementaire, et elles sont en fait devenues la pierre d'assise de la responsabilité et de la transparence de nos gouvernements.
Bien entendu, toute loi doit faire l'objet de révisions et de modifications périodiques, que ce soit pour corriger les erreurs et les oublis ou pour l'adapter aux nouveaux besoins et aux nouvelles possibilités. Ça fait maintenant une génération que le Parlement a procédé à une révision complète de la loi — le rapport Une question à deux volets, dont le président a déjà parlé — et recommandé une réforme de cette loi fédérale. Il y a eu depuis de nombreuses initiatives de réforme qui se sont succédé.
Depuis l'adoption de la loi au début des années 1980, bon nombre de provinces et de territoires ont adopté des lois sur l'accès à l'information beaucoup plus modernes que la loi fédérale. Je pense qu'il est juste de dire que nous en sommes maintenant à la troisième génération des lois sur l'accès à l'information au Canada. La Loi sur l'accès à l'information est, pour le dire sans détour, une loi de la première génération qui n'est malheureusement plus adaptée à l'époque. Je crois humblement qu'une excellente occasion s'offre au comité de recommander une réforme visant à améliorer la loi de façon significative, pratique et réaliste. Je remercie le comité de l'intérêt qu'il porte à cette loi, qui, je le répète, est l'un des outils importants de la démocratie.
J'aimerais maintenant parler des recommandations que vous a faites mon collègue, Robert Marleau, commissaire à l'information du Canada. À deux exceptions près, je ne propose pas d'aborder en détail chacune des recommandations qu'il vous a faites. Il l'a bien entendu déjà fait lui-même lorsqu'il a comparu devant vous. Je vous dirais que, à mon avis, ces recommandations portent sur des éléments importants qui existent déjà dans la Loi sur l'accès à l'information de la Colombie-Britannique et ailleurs au pays.
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Bien sûr. Avec plaisir. Toutes mes excuses.
Encore une fois, à deux exceptions près, je ne propose pas d'aborder chacune des recommandations que M. Marleau a formulées à l'intention du comité. Je dirais que ces recommandations portent sur des éléments importants qui existent déjà dans la Loi sur l'accès à l'information de la Colombie-Britannique et ailleurs au pays, entre autres au Québec, en Alberta et en Ontario.
À cet égard, l'application de ses recommandations permettrait à mon avis de régler beaucoup des problèmes de la loi fédérale, notamment dans le domaine important de la surveillance et de l'application de la loi par le bureau du commissaire. Ce sont des recommandations importantes, parce qu'un régime d'accès à l'information n'a de sens que si la conformité fait l'objet d'une surveillance efficace et indépendante.
La première chose précise que j'aimerais dire au sujet des recommandations qui ont été faites a trait au pouvoir exécutoire. À l'heure actuelle, la Loi sur l'accès à l'information prévoit un contrôle de novo par la Cour fédérale lorsque l'organisation refuse l'accès à l'information, mais elle ne prévoit pas, d'après ce que je comprends, de contrôle en cas de litiges de nature administrative et concernant par exemple les frais ou la prorogation de délais.
Dans ce contexte, je comprends tout à fait les raisons pour lesquelles mon collègue a formulé la troisième recommandation de la série, dont l'application ferait en sorte que son bureau aurait un important pouvoir de surveillance pour les questions liées aux frais et aux prorogations de délais, ce qui lui permettrait de compléter le rôle actuel de la Cour fédérale en ce qui a trait au refus d'accorder l'accès à l'information.
Contrairement au commissaire fédéral, j'ai moi-même un plein pouvoir exécutoire, comme les commissaires du Québec, de l'Ontario, de l'Alberta et de l'Île-du-Prince-Édouard. En fait, nous fonctionnons comme des tribunaux administratifs, et nous prononçons des ordonnances exécutoires soit en faveur de la décision d'un organisme public de refuser l'accès soit lui ordonnant de divulguer davantage l'information.
Ce rôle touche les appels concernant les frais et les prorogations de délais, devrais-je ajouter, ainsi que d'autres mesures ou décisions prises par les organismes publics dans le cadre de notre Loi sur l'accès à l'information. Nos ordonnances peuvent entièrement faire l'objet d'un contrôle judiciaire par notre cour supérieure, et non d'un appel de novo, pour les motifs de droit administratif habituels, ce qui confère un élément de responsabilité à nos mesures et à nos décisions et qui crée un mécanisme de freins et de contrepoids.
Pour m'en tenir à la situation et à l'expérience vécue en Colombie-Britannique, nous avons constaté, au cours des 16 années écoulées depuis la création de notre bureau, que ce pouvoir exécutoire a en fait favorisé la résolution des conflits. Nous réglons de 85 à 90 p. 100 des cas d'appels concernant l'accès à l'information qui nous sont renvoyés dans le cadre d'un processus de médiation.
De façon générale, les avocats n'interviennent pas au début du processus. Dans les quelques rares cas où nous tenons une audience d'appel officielle, ce qui, je devrais le préciser, se fait par écrit, nous sommes en mesure de rendre une décision motivée, qui peut servir de précédent et qui renseigne les deux parties concernées, le public et les organisations gouvernementales. En moyenne, nous ne sommes visés que par quelques contrôles judiciaires par année, mais je peux vous assurer que la possibilité de contrôle judiciaire fait en sorte que nous nous assurons de la qualité des décisions que nous rendons.
L'autre idée que je veux aborder a trait à la septième recommandation de M. Marleau, selon laquelle la Loi sur l'accès à l'information devrait s'appliquer aux documents qui ont trait à « l'administration générale du Parlement ». Là-dessus, je dirais simplement que ce n'est pas le cas en Colombie-Britannique à l'heure actuelle, mais que ça l'est au Québec. Je suis assurément tout à fait en faveur de cette recommandation, et je vais formuler une recommandation du même genre dans le cadre de l'examen de la loi qui aura lieu bientôt en Colombie-Britannique, qui doit commencer à l'automne, en fait.
Avant d'inviter les membres du comité à me poser des questions, j'aimerais dire deux autres choses, qui sont en fait des recommandations que je fais au comité.
La première chose a trait à la divulgation courante des documents. J'ai depuis longtemps adopté la position selon laquelle un programme complet et obligatoire de divulgation proactive courante des documents, sans demande d'accès, devrait être prévu par la loi. Ce genre de démarche de divulgation proactive a deux avantages. Premièrement, la divulgation courante permet de mieux atteindre les objectifs de la loi en ce qui concerne l'ouverture et la transparence. Deuxièmement, elle permet de réduire les coûts liés à l'accès à l'information en évitant le travail plutôt coûteux qui consiste à répondre à des demandes précises et souvent répétées d'accès aux mêmes renseignements.
[Français]
La communication obligatoire contribuerait grandement à une culture favorisant davantage la transparence [Note de la rédaction: difficultés techniques] qui doit demeurer à jour et recevoir l'approbation du commissaire à l'information.
[Traduction]
L'approche adoptée au Royaume-Uni est remarquable à bien des égards, et des mécanismes semblables ont fait l'objet de recommandations au Québec et en Colombie-Britannique. Je signale également que, en 1998, le président des États-Unis a demandé que soient créées des salles de lecture électronique afin qu'un système de divulgation proactive puisse être instauré. Je demande au comité de recommander un mécanisme de divulgation proactive courante et sans demande d'accès, du genre de celui du Royaume-Uni, dans le cadre d'une réforme visionnaire et à l'avant-garde de la Loi sur l'accès à l'information.
L'autre recommandation que j'aimerais présenter au comité concerne les évaluations des facteurs relatifs à l'accès. Des organismes publics et des entreprises de partout au Canada effectuent depuis un certain nombre d'années des évaluations des facteurs relatifs à la vie privée qui visent à évaluer les répercussions sur la vie privée de projets de programmes, de lois ou de systèmes. Ces évaluations permettent d'atténuer ou d'éviter les répercussions sur la vie privée dès le départ, et, au fur et à mesure que les gouvernements font la transition vers le monde électronique et s'éloignent du monde du papier, je dirais qu'il est capital que l'adoption de nouveaux systèmes d'information électronique et leur expansion ne nuisent pas à l'ouverture et à la transparence.
Les organismes publics ne peuvent pas se permettre de refuser de s'atteler à la tâche qui consiste à s'assurer que le droit d'accès à l'information soit respecté de la même façon avec les grands systèmes d'information électronique qu'avec les systèmes de tenue de dossiers papiers. Les demandes d'accès présentées en vertu des lois actuelles mettent de plus en plus à l'épreuve les limites de l'utilité de ces lois, et les organismes publics doivent s'assurer que leurs systèmes d'information électronique sont conçus et utilisés de façon à leur permettre d'offrir l'accès à l'information dans le cadre de la loi.
La population est en droit de s'attendre à ce que les nouvelles technologies de l'information engendrent un plus grand respect du droit à l'information, et non le contraire, et à ce que les organismes publics cherchent activement et efficacement à atteindre cet objectif. Si la loi exigeait la tenue d'une évaluation des facteurs relatifs à l'accès le plus tôt possible dans le processus de mise au point d'un système, ou encore d'examen d'une nouvelle loi ou d'un nouveau programme, cela permettrait de garantir que l'accès à l'information fait partie intégrante du système, plutôt que d'être oublié puis refusé. Je demande au comité de recommander que les évaluations des facteurs relatifs à l'accès soient un élément de la Loi sur l'accès à l'information et du mécanisme fédéral d'accès à l'information.
Pour conclure, je remercie le comité de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui, et je serai heureux de répondre à vos questions au moment opportun.
Merci.
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Si on me pose des questions en français, je vais faire de mon mieux pour répondre dans cette langue.
Permettez-moi simplement de dire ceci. J'ai en main un document rédigé en 1987 par un comité qui ressemblait beaucoup au vôtre. Je suis fier d'avoir été l'un des directeurs de recherche pour le rapport Une question à deux volets comme on l'appelait en 1987.
Fait intéressant, parmi les membres de ce comité, il y avait un jeune député du nom de Rob Nicholson, qui est maintenant l'honorable ministre de la Justice, ainsi que le député de Burnaby, Svend Robinson, et M. Warren Allmand, de Montréal, de Notre-Dame-de-Grâce, en fait. Ils ont rédigé un rapport unanime contenant des dizaines de recommandations. Je dois dire à regret que rien n'a été fait à la suite de leur travail, et ça fait maintenant 22 ans. En fait, très peu de modifications ont été apportées à la loi au fil des ans.
Vous comprendrez donc que, du fait de cette expérience, je ne suis pas très optimiste au sujet des initiatives de réforme de la Loi sur l'accès à l'information. Malgré tout, pour reprendre les paroles intemporelles du poète Alexander Pope: « L'espoir jaillit, éternel ».
J'ai fourni au greffier de votre comité un exposé que j'ai rédigé dans les deux langues officielles l'an dernier et que j'ai présenté au Forum des politiques publiques à Ottawa. Ce texte résume les choses auxquelles je vous propose de réfléchir.
Permettez-moi cependant de dire dès le départ que je suis assez d'accord avec la plupart des 12 recommandations que le commissaire à l'information, M. Marleau, a présentées à votre comité. De plus, je suis évidemment d'accord en général avec le projet de loi de l'ancien commissaire, M. Reid, et je suis heureux de voir que de nombreux députés sont maintenant en faveur de ce projet de loi. Cependant, j'espère sincèrement que ce sera un projet de loi du gouvernement qui sera présenté à l'issue de vos délibérations. À mon avis, ce serait une façon d'envoyer le message selon lequel le gouvernement est disposé à offrir un soutien nécessaire à la réforme de cette loi, qui aurait dû avoir lieu depuis longtemps.
Mon message correspond tout à fait au mandat du comité, c'est-à-dire qu'il est temps de cesser d'examiner la question et de passer à l'action. La Loi sur l'accès à l'information est vieille d'une génération, de plus de 25 ans. Elle a été adoptée avant que tout le monde ait un ordinateur, avant Internet, les courriels et le reste. Comme M. Loukidelis vous l'a dit, c'est une loi de la première génération que vous avez devant vous; le monde a évolué, et l'heure est à la réforme.
Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Mes salutations aux membres du comité. C'est un grand plaisir et un honneur de m'adresser à vous aujourd'hui depuis Vancouver.
Je vais vous épargner mon français, qui est malheureusement à peu près nul, quoique j'essaie de remédier à ça.
J'ai écrit un livre intitulé Fallen Behind: Canada's Access to Information Act in the World Context. Je crois que le greffier vous a distribué un résumé de ce rapport en quatre pages, et j'en ai également affiché une version française dans mon site Web sur l'accès à l'information. J'espère que ce sera un guide utile pour formuler vos questions.
Le rapport et le résumé en disent déjà beaucoup, mais j'aimerais quand même vous faire part d'autres idées.
La semaine dernière, le commissaire à l'information vous a parlé de la nécessité de rendre la Loi sur l'accès à l'information conforme aux régimes plus progressistes qui existent à l'échelle nationale et à l'échelle internationale. Comme il l'a dit, les Canadiens s'attendent à ce que les droits d'accès à l'information soient les mêmes à tous les échelons. C'est bien le cas. Les 12 recommandations du commissaire sont importantes, mais nous devons aller beaucoup plus loin.
Je suis en faveur de l'adoption de l'un ou l'autre des deux projets de loi d'initiative parlementaire concernant la réforme de la LAI présentés en 2008, tous deux fondés sur la Loi sur la transparence du gouvernement de M. Reid, mais avec un élément capital en plus, c'est-à-dire le plein pouvoir exécutoire en matière de divulgation des dossiers.
Pourquoi ce rapport, Fallen Behind? Les débats sur la réforme de la Loi sur l'accès à l'information étaient devenus trop étroits et tournaient en rond pour la plupart, alors je voulais envisager la question d'un nouveau point de vue. Nous devons plutôt réviser et réformer constamment la Loi sur l'accès à l'information en fonction de l'évolution du contexte international et du contexte historique. Cette approche pourrait avoir un profond effet positif sur les attentes des Canadiens, et même leurs exigences, par rapport à leurs droits à l'information.
Un document très pertinent à cet égard, c'est le document intitulé The Public's Right to Know: Principles on Freedom of Information Legislation, publié en 1999 et dans lequel sont décrites les normes généralement admises en matière d'accès à l'information à l'échelle internationale. Ces principes ont été élaborés par Toby Mendel, chef du programme de droit de l'organisation de défense des droits de la personne londonienne ARTICLE 19, et ils ont été approuvés par les Nations Unies.
À la lecture de ce document, j'ai été très étonné et troublé d'apprendre que la Loi sur l'accès à l'information du Canada ne respecte pas ces principes sur 12 points, et même la version la plus récente de cette loi. Ironiquement, le monde avance, et le Canada semble aller dans la direction opposée.
J'ai ensuite trouvé d'autres organisations dont les normes sont semblables, par exemple le Secrétariat pour les pays du Commonwealth et le Conseil de l'Europe.
J'ai analysé et comparé tous les documents pertinents que j'ai pu trouver, c'est-à-dire le texte des lois sur l'accès à l'information de 68 pays, 29 projets de loi, 12 lois provinciales et territoriales du Canada et les observations de 14 organisations gouvernementales internationales et de 17 organisations non gouvernementales du Canada. J'ai comparé tous ces documents à la Loi sur l'accès à l'information en vigueur et aux huit promesses faites par le premier ministre en 2006 au sujet de la réforme de cette loi et qui n'ont pas été tenues. J'ai inscrit les principaux thèmes dans une feuille de calcul Excel aux fins de comparaison et ainsi créé un tableau sur l'accès à l'information dans le monde, qui a servi de fondement à mon rapport. Vous pouvez consulter ce tableau dans mon site Web.
La plupart des pays du Commonwealth ont pris beaucoup d'avance sur le Canada, même le Royaume-Uni, ironiquement, puisqu'il s'agit du modèle suivi par le Canada dans le domaine du secret parlementaire et puisque ce pays a adopté une loi sur l'accès à l'information près de 20 ans après nous. Les bureaucrates canadiens invoquent encore, pour empêcher la réforme de la LAI, la grande tradition de confidentialité du régime britannique. Dans ce cas, comment expliquent-ils que le Freedom of Information Act adopté en 2000 au Royaume-Uni accorde aux commissaires à l'information le pouvoir d'ordonner la divulgation de dossiers, contient une dérogation générale touchant l'intérêt public et un critère relatif aux préjudices aux fins de conseils stratégiques et vise un éventail beaucoup plus grand d'entités quasi gouvernementales, alors qu'il n'y a rien de tout cela dans notre LAI?
Au sein du Commonwealth, les meilleurs modèles dont le Canada pourrait s'inspirer sont à mon avis les lois sur l'accès à l'information de l'Inde et de l'Afrique du Sud, en majeure partie, mais pas pour tout.
Dans la préface de mon rapport, M. Mendel a écrit:
La Loi sur l'accès à l'information et son application doivent être réformées de toute urgence. Si ce n'est pas fait, la réputation du Canada dans le monde, celle d'un pays fortement engagé à participer et à protéger les droits de la personne [...] [est] en jeu.
L'incitation à la transparence ne peut avoir d'effet si aucune directive ne vient d'en haut. Malgré tout, au Canada, on ne se rappellera aucun premier ministre en poste qui ait parlé de l'utilité d'une loi sur l'accès à l'information depuis le court règne de Joe Clark en 1979. Le président des États-Unis, Barack Obama, a pour sa part pris un décret-loi dès le premier jour où il est entré en fonction, dans le but de renverser la position par défaut de son prédécesseur en faveur de la confidentialité. Le nouveau président a écrit avec raison:
Tous les organismes devraient adopter une présomption en faveur de la divulgation, afin de renouveler leur engagement envers les principes de la FOIA et afin de permettre l'entrée dans une nouvelles ère de transparence gouvernementale.
La mesure à prendre au Canada est simple: le premier ministre doit tenir les huit promesses concernant la réforme de la LAI qu'il a faites pendant la campagne électorale de 2006. Cela permettrait au Canada de respecter les normes mondiales, en gros.
J'ai cru que ces promesses de réforme de la LAI étaient sincères, et on m'a traité de naïf. Pourtant, tout juste après l'élection des conservateurs, de nombreux observateurs ont été vraiment stupéfaits de voir le nouveau premier ministre renverser si radicalement sa position sur la question de la transparence.
Des huit promesses en question, le gouvernement est très fier d'en avoir tenu la moitié d'une, c'est-à-dire celle concernant l'ajout de sociétés d'État et de plusieurs fondations à la liste des organisations visées par la loi. Le gouvernement n'a cependant pas respecté les sept promesses et demie qui restent en adoptant le projet de loi C-2, la Loi fédérale sur la responsabilité. La réforme de la LAI a encore une fois été renvoyée au cimetière des études superflues, et c'est là qu'en est la question à l'heure actuelle au Canada. Il n'est pas nécessaire de faire de nouvelles études. Nul besoin de réinventer la roue ici lorsqu'il y a des choses qui fonctionnent bien ailleurs dans le monde.
Pour être juste envers tout le monde, chacun des partis a à un moment ou un autre promis d'appliquer l'idée de la transparence gouvernementale, mais aucun n'a vraiment tenu promesse. J'ai aussi été déçu de voir que, contrairement aux conservateurs, les libéraux n'ont aucunement mentionné la réforme de la LAI dans leur plate-forme électorale de 2006. Nous attendons toujours que le chef actuel du Parti libéral énonce en détail ses politiques quant à la LAI.
Dans le passé, un peu partout dans le monde, des bureaucrates occupant des postes importants et des procureurs de la Couronne non élus se sont souvent vivement opposés à l'adoption de lois efficaces en matière d'accès à l'information, en mettant en garde les ministres contre des préjudices théoriques et illusoires pouvant découler d'un appui à une plus grande transparence. Par « bureaucrates », j'entends des gens qui occupent des postes importants dans le milieu de l'élaboration des politiques, et non de simples fonctionnaires. C'est vraiment un exemple dans lequel une petite minorité dirige.
Est-ce que les bureaucrates canadiens s'attendent encore à ce que nous croyions que ce sont les autres pays et les provinces du Canada qui se sont trompés avec leurs lois sur l'accès à l'information et que seule Ottawa a raison avec sa LAI vieille de 25 ans? D'après un document de travail publié en 2005 par le ministère de la Justice, « [...] il n'y a rien de grave à reprocher à la Loi sur l'accès à l'information en sa forme actuelle ».
Cette affirmation n'a que peu de choses à voir avec la réalité actuelle à l'échelle mondiale, et elle est tout simplement erronée. Aux yeux des représentants du ministère de la Justice, il semble que la LAI actuelle, avec ses exemptions, avec son manque de critères relatifs aux préjudices ou de dérogations touchant l'intérêt public en général, avec l'absence de pouvoir exécutoire et avec les délais de réponse d'un an, fonctionne très bien et ne devrait pas être modifiée. Est-il cependant acceptable à leurs yeux que plus de 100 organisations quasi gouvernementales ne soient toujours pas visées par la LAI, notamment la Société canadienne du sang et la Société de gestion des déchets nucléaires, dont l'exclusion pourrait donner lieu à un préjudice pour la santé et pour la sécurité publiques? Est-il acceptable à leurs yeux qu'un délai de deux semaines soit la norme juridique mondiale en ce qui concerne l'accès à l'information, alors que, au Canada, certains organismes s'accordent une prorogation de 240 jours, ce qui correspond à trois fois la moyenne précédente? La dernière fois que j'ai présenté une demande d'accès à l'information, croyez-le ou non, j'ai dû attendre neuf mois pour obtenir le procès-verbal d'une réunion du Cabinet qui a eu lieu il y a 20 ans.
Au lieu de cela, je leur demande d'agir selon l'esprit de la loi et d'aider les parlementaires à faire en sorte que notre LAI respecte les normes mondiales. Ne pas le faire, ce serait vraiment mettre en jeu la réputation mondiale du Canada en ce qui concerne la démocratie et le respect des droits de la personne, réputation à laquelle nous tenons.
Les temps ont en effet beaucoup changé depuis 1982, et notre meilleur espoir, c'est qu'un fort appui bureaucratique à une grande réforme transparaisse dans le prochain document de travail sur la LAI du gouvernement. On espère aussi que le comité actuel va être autant en faveur de la réforme que le comité précédent. Dans son rapport du 15 novembre 2005, ce comité a déclaré ce qui suit:
Le comité croit que après près de 20 ans de pression visant la refonte de la Loi sur l'accès à l'information, il ne faut plus atermoyer, mais moderniser la loi sans plus tarder.
De même, selon le magazine Maclean's, le député conservateur Mike Wallace a écrit au ministre de la Justice le 22 juin 2007, en son nom et au nom de trois autres députés conservateurs du Comité de l'éthique, pour lui demander de prendre des mesures décisives — rien de moins qu'une loi — au cours de l'automne suivant, afin de renforcer la LAI comme l'avait promis le parti lors de la campagne de 2006. Des efforts du genre seraient encore très appréciés aujourd'hui.
En somme, il est important de rappeler que l'accès à l'information est un sujet qui doit idéalement transcender les partis politiques et les idéologies, et que tout parti formant un gouvernement aujourd'hui pourrait se retrouver dans l'opposition demain à essayer lui-même d'utiliser la loi de façon efficace, comme cela a été fait si souvent dans le passé. Je demande à tous les députés de travailler ensemble à des réformes nécessaires, dans le but de renforcer notre démocratie et d'offrir un héritage durable à leurs électeurs.
Sur cette question, en fait, le comité pourrait même adopter la devise du président américain: « Oui, nous le pouvons. »
Merci.
:
J'ai très bien entendu la question. Si vous me le permettez, je peux y répondre.
Monsieur Siksay, je dois admettre que c'est mon cheval de bataille, alors je suis très content que vous ayez posé cette question. À mes yeux, une loi qui ne prévoit pas le plein pouvoir exécutoire, c'est un oiseau auquel il manque une aile, et un oiseau pas très en forme en plus. Je sais que les recommandations de M. Marleau sont essentiellement un compromis sur la question du pouvoir exécutoire, qui lui permettrait d'obtenir le pouvoir nécessaire pour régler ce qu'il appelle les questions administratives et prendre des décisions définitives à cet égard, et son rôle serait différent par rapport à la chose la plus importante, c'est-à-dire la capacité du commissaire d'ordonner au gouvernement de divulguer de l'information. Pour moi, ça doit absolument être une partie intégrante de la loi. La plupart des lois dignes de ce nom que je connais, sinon toutes, accordent à une personne la capacité d'ordonner au gouvernement, après les délibérations appropriées, de divulguer un document. Aux États-Unis, ce sont les tribunaux qui jouent ce rôle, et dans la plupart des provinces, ou du moins dans cinq d'entre elles, c'est le commissaire qui a le pouvoir de prendre une décision définitive —je m'empresse d'ajouter que c'est toujours sous réserve des règles habituelles concernant le contrôle judiciaire relatif aux erreurs de compétence ou autres que le commissaire peut faire en cours de route.
Je ne pense pas que les données montrent que cela est à l'origine d'une judiciarisation indue des questions d'accès à l'information au Canada. Au contraire, en Colombie-Britannique, de 85 à 90 p. 100 des questions sont réglées dans le cadre de la médiation et sans recours aux tribunaux, et nous n'avons qu'un ou deux contrôles judiciaires par mois. Cette situation n'est pas différente de celle des autres provinces, notamment l'Ontario. À mon avis, donc, c'est un élément absolument essentiel qui doit faire partie de votre projet de réforme pour que celui-ci ait une quelconque crédibilité.
Pour terminer, je dirais simplement que, il y a 22 ans, un comité unanime comme le vôtre a formulé cette recommandation précisément.
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Merci, monsieur le président.
Vous avez sous les yeux une version modifiée, si je peux m'exprimer ainsi, de la motion que vous avez peut-être examinée il y a quelques jours. Après l'avoir réexaminée, nous avons constaté qu'elle contenait de nombreuses répétitions, et nous l'avons donc abrégée.
Monsieur le président, les documents que j'ai demandés au greffier de distribuer aux membres du comité, et je crois que cela a été fait, contiennent des lettres sur le sujet qui nous occupe et le compte rendu d'une décision de la Cour fédérale concernant le privilège qui interdit l'utilisation d'un témoignage présenté devant les comités dans toute procédure intentée à l'extérieur de la Chambre. La correspondance a débuté le 12 août dernier. Ce jour-là, le comité a reçu une lettre du commissaire, qui voulait obtenir divers documents. Je me suis penché sur cette requête, et nous avons eu quelques discussions avec la commission. J'ai répondu à la lettre le 15 septembre, mais à ce moment-là, nous étions en campagne électorale. Le comité n'a donc jamais été saisi de la question, que je vous présente aujourd'hui en vous fournissant des éléments contextuels.
Plus récemment, dans sa lettre datée du 6 mars, Mme Brooks, avocate de la commission, a demandé l'autorisation d'utiliser les comptes rendus. À mon avis, cette lettre démontre clairement que la requête de la commission est semblable à celle qui avait été présentée dans le cadre de l'enquête de M. Gomery, où les avocats avaient cherché à utiliser le témoignage livré par des témoins devant le comité afin de contre-interroger ces mêmes témoins lorsque ceux-ci se présentaient devant le commissaire Gomery.
Sans entrer dans des complexités de nature juridique, je dois vous expliquer qu'il s'agit ici d'un cas où des avocats tenteront d'utiliser un témoignage sous serment présenté précédemment pour discréditer le témoignage que le témoin est en train de présenter devant le commissaire. En effet, l'avocat dira au témoin: « vous dites cela aujourd'hui, mais voici ce que vous avez dit l'autre jour au moment de votre témoignage sous serment ». En employant cette tactique à répétition, l'avocat souhaite assurément qu'à la longue, la crédibilité du témoin soit minée, c'est le moins que l'on puisse dire et que le témoignage rendu par le témoin soit discrédité.
Ainsi, j'estime qu'il est probable qu'il s'agisse-là du traitement que les avocats de cette commission tenteront de faire subir à certains témoins qui se sont présentés devant notre comité — il ne s'agit que d'une hypothèse, mais selon moi, la lettre de Mme Brooks est assez claire à cet égard. Je m'abstiendrai de vous indiquer de quels témoins il pourrait s'agir, mais j'imagine que les membres peuvent se faire leur propre idée à ce propos.
À cette fin, il est nécessaire, car cela fait partie du processus, que nous présentions la question au comité et que nous lui demandions de prendre une décision. Cette décision sera ensuite transmise à la Chambre. Celle-ci devra alors affirmer solennellement la recommandation du comité, qui sera enfin présentée à la commission. Ainsi, la commission sera clairement et officiellement avisée de la position du comité sur cette question.
J'aimerais simplement ajouter que j'ai de bonnes raisons de croire — ce n'est peut-être qu'une supposition — que la commission tente de faire en sorte que cette question ne soit pas abordée effectivement, de manière à ce que ses avocats ne perdent pas leur temps à plaider en faveur de l'utilisation des témoignages parlementaires à des fins de contre-interrogatoire. J'ai l'impression que l'avocate de la commission tente de balayer cette question sous le tapis en préparation des audiences, qui débuteront, je crois, à la fin du mois. En prévision de cela, ils ont enclenché ce processus, et c'est pourquoi je me trouve ici aujourd'hui.
Compte tenu de l'heure, je ne veux pas monopoliser davantage le temps du comité, mais je recommande à ses membres... Je suis prêt à lire aux membres du comité les points saillants du jugement rendu par la Cour fédéral affirmant solennellement le privilège parlementaire. Je vous ai distribué une version anglaise et une version française du jugement. Il s'agit d'un très bon jugement, non seulement parce qu'il énonce une opinion que j'aimerais que le tribunal reprenne à son compte, mais également parce qu'il constitue une étude exhaustive de l'importance du privilège parlementaire qui fait en sorte que les témoignages présentés devant les comités du Parlement ne peuvent être utilisés par les tribunaux. Il s'agit d'une lecture très intéressante. Je ne vous volerai pas votre temps en entrant dans les détails de ce jugement, mais il est important de le prendre en considération. Il a été invoqué au moment où le ministre Gagliano, qui témoignait devant le juge Gomery lorsque ce jugement a été rendu par ce dernier, s'est présenté devant la Cour fédérale pour obtenir un contrôle judiciaire sur cette question. Sa requête avait été rejetée. Le tribunal a statué qu'il était tout à fait approprié et compréhensible que les comités tiennent à ce que les témoignages qui leur sont présentés ne puissent pas être utilisés dans le cadre d'autres procédures.
Cependant, permettez-moi d'ajouter quelque chose. Je suis certain que cette idée a traversé l'esprit des membres du comité, mais pour le compte rendu, j'imagine que je devrais le dire. S'il arrivait que notre comité autorise l'utilisation des témoignages dans le cadre de cette procédure ou de toute autre procédure, j'ose affirmer qu'il serait très difficile dans l'avenir pour notre comité ou pour tout autre comité de donner aux témoins une assurance de protection. Je présume que les témoins ne prendraient pas au sérieux cette assurance et, dans le cas de témoins bien en vue, nous assisterions à l'intervention d'une batterie d'avocats chèrement payés prêts à faire valoir que leurs clients n'ont pas à répondre à telle ou telle question du comité.
À mon avis, il est tout à fait dans l'intérêt des comités de veiller à ce que les témoignages qui leur sont présentés ne soient pas utilisés à l'extérieur et à ce que les témoins qui se présentent devant eux puissent s'exprimer librement et ouvertement sur les questions qui revêtent un intérêt pour les comités. Ceux-ci devraient pouvoir insister pour que les témoins puissent parler librement, ouvertement, sans restrictions, en toute franchise et en toute sincérité, sans avoir à se préoccuper du fait que leur témoignage puisse être utilisé contre eux dans d'autres procédures.
Ainsi, à titre de conseiller juridique, je ne peux qu'enjoindre au comité d'examiner attentivement la présente notion, dans l'espoir que ce principe soit réaffirmé dans l'intérêt de notre comité et de tous les comités.