Au nom de l'industrie canadienne du mouton, j'aimerais remercier le comité de m'avoir invitée à venir discuter des défis auxquels notre secteur est confronté. Merci.
La Fédération canadienne du mouton est un organisme national sans but lucratif qui représente plus de 11 000 éleveurs de moutons au Canada. Le rôle premier de notre organisme, créé en 1990, est d’établir une politique nationale pour le secteur ovin. Notre mission est de travailler en étroite collaboration avec tous les ordres de gouvernement et avec les organismes liés au secteur, au pays et à l'étranger, afin de favoriser la viabilité, l'expansion et la prospérité de l’industrie canadienne du mouton. À cette fin, la Fédération canadienne du mouton désire profiter de cette occasion pour informer le Comité permanent de l'agriculture et de l’agroalimentaire des défis auxquels l’industrie du mouton est confrontée en raison des obstacles au commerce interprovincial, et des moyens possibles d'éliminer ces obstacles.
En mai 2012, la Fédération canadienne du mouton a envoyé une lettre au ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, l’honorable Gerry Ritz, pour appuyer les modifications proposées à la Loi sur l’inspection des viandes visant la rationalisation et la simplification des exigences applicables aux établissements de transformation inspectés par le gouvernement fédéral. Des améliorations ont été apportées au règlement depuis, mais il faut poursuivre la réforme du système existant et la recherche de moyens de réduire les obstacles au commerce interprovincial.
L'annonce d'un système de reconnaissance moins onéreux pour les abattoirs inspectés par le gouvernement fédéral était de bon augure pour l’industrie du mouton, puisque 70 % de ses animaux sont transformés dans des établissements inspectés par les provinces, et seulement 30 %, dans des établissements inspectés par le gouvernement fédéral. À titre d’exemple, l’Ontario transforme 53 % des agneaux nés au Canada, et plus de 90 % de ces agneaux sont traités dans des installations sous inspection provinciale. Cela signifie que 48 % des agneaux nés au Canada doivent être consommés en Ontario et ne peuvent être offerts aux autres consommateurs canadiens.
Le défi, pour les secteurs du mouton et de l'agneau, en est un lié à l'infrastructure. En 2014, il n’y avait que 10 abattoirs inspectés par le gouvernement fédéral, dans trois provinces canadiennes, qui avaient la capacité de transformer les moutons et les agneaux. Malgré nos efforts visant à inciter les transformateurs à obtenir l’inspection fédérale, on nous a dit à maintes reprises qu’il ne s'agit pas uniquement d'une question de coûts liés à l’obtention de la reconnaissance fédérale, mais également de coûts liés à son maintien. Deux usines de transformation de l’Ontario qui sont passées de l’inspection provinciale à l’inspection fédérale ont ultérieurement fermé leurs portes et déclaré faillite. Puisque les grandes épiceries nationales sont réticentes à vendre des produits de viande provenant d’usines sous inspection provinciale en raison de l'infrastructure de leur réseau de distribution interprovincial, il existe un réel besoin d'examiner comment l’agneau canadien pourrait être offert aux consommateurs canadiens. En dépit de la capacité globale de transformation de l’Ontario, la pénurie d'établissements de transformation sous inspection fédérale et la réticence des détaillants à stocker des produits inspectés en province signifient que même les consommateurs de l’Ontario n'ont pas accès à l’agneau canadien. Le manque d’abattoirs agréés par le gouvernement fédéral et l’incapacité à déplacer les produits sous inspection provinciale entre les provinces limitent la productivité et la rentabilité de l’industrie canadienne du mouton.
Les limites imposées par le système actuel d’inspection des viandes ne concernent pas uniquement le secteur de la transformation. Les éleveurs des provinces qui n'ont aucun établissement inspecté par le gouvernement fédéral doivent se contenter d’une clientèle beaucoup plus restreinte ou expédier des animaux vivants vers des provinces ayant une plus grande capacité de transformation. Pour certains éleveurs, les coûts supplémentaires liés au transport de moutons et d’agneaux dans plusieurs provinces peuvent s'élever à 10 % de la valeur de l’animal, ce qui a une incidence importante sur leur rentabilité. Les provinces qui ont la capacité et le territoire requis pour élargir leur troupeau de brebis n’ont pas la capacité d’exporter leur produit, et leur rentabilité en souffre lorsqu'elles doivent déplacer des animaux vivants vers les provinces qui affichent une meilleure demande au détail. De plus, le coût d’élevage de moutons et d’agneaux dans les provinces dotées de grandes métropoles augmente inexorablement en raison de l’augmentation rapide du coût des terrains.
L'étude démographique sur le déplacement des animaux d’élevage publiée récemment, commandée par l’Agence canadienne d’inspection des aliments, révèle qu'en moyenne, plus de 30 000 moutons et agneaux sont expédiés des provinces de l’Ouest vers les provinces de l'Est chaque année, et certaines années, ce nombre dépasse les 50 000 têtes. La durée du transport interprovincial des animaux vivants pouvant facilement dépasser 48 heures, la question du bien-être des animaux peut empêcher certains éleveurs de transiger directement avec les abattoirs ou les marchés aux enchères qui desservent les provinces ayant une capacité de transformation élevée.
La Nouvelle-Écosse est un exemple flagrant du mauvais fonctionnement du système d’inspection des viandes au Canada. L’association des éleveurs de mouton de la Nouvelle-Écosse, l'une de nos provinces membres, s'est évertuée à produire et à commercialiser un agneau de qualité supérieure en Nouvelle-Écosse. Puisque les efforts de marketing de l'industrie stimulent la demande pour ce produit local, les consommateurs le recherchent sur les tablettes des épiceries. Or, les centres de distribution alimentaire des Maritimes étant situés dans d'autres provinces et la Nouvelle-Écosse ne possédant pas d’établissements de transformation inspectés par le gouvernement fédéral, les éleveurs ne peuvent offrir cet agneau de qualité supérieure aux consommateurs de la Nouvelle-Écosse dans les grands commerces de détail.
La capacité limitée des éleveurs d’expédier l’agneau canadien dans les principaux points de vente au détail signifie que la demande intérieure est satisfaite en grande partie grâce aux produits importés. L’industrie canadienne du mouton fournit actuellement moins de 50 % de la viande de mouton et d’agneau consommée au Canada, ce qui démontre la grande capacité de croissance de l’industrie, freinée en partie par les limites actuelles du commerce intérieur. En outre, l’évolution démographique de la population canadienne pourrait accroître davantage la demande des consommateurs canadiens pour les produits du mouton et de l'agneau. On s'attend à ce que la croissance de la population canadienne soit principalement attribuable aux immigrants du sud et du sud-est de l’Asie, du Moyen-Orient et de l’Afrique; elle créera une demande sans précédent pour de nouveaux aliments, qui diffèrent des produits traditionnels offerts dans la plupart des épiceries canadiennes, en particulier pour les produits du mouton et de l’agneau. Selon Marchés mondiaux CIBC, environ 70 % de la croissance des dépenses, dans la prochaine décennie, proviendra des groupes de minorités visibles.
La croissance de la population et l’évolution de la demande des consommateurs montrent qu’il y aura une demande accrue pour l’agneau dans les prochaines années au Canada. C'est une occasion unique pour l'industrie d’assurer sa viabilité et sa rentabilité à long terme. Le défi demeure celui d'offrir un produit canadien aux consommateurs dans les grandes chaînes d’épicerie.
La Fédération canadienne du mouton demande que le comité envisage la mise en place d'un système novateur d'inspection des viandes à l'échelle nationale, qui permettrait de maintenir les normes élevées en matière de salubrité des aliments au Canada et de répondre aux attentes des marchés nationaux et internationaux, tout en éliminant les formalités administratives superflues qui restreignent la capacité des transformateurs qui desservent les secteurs prometteurs. De même, un système d’inspection renouvelé devrait continuer à soutenir les transformateurs régionaux qui fournissent des services locaux et personnalisés aux agriculteurs et aux consommateurs.
L'industrie canadienne du mouton est particulièrement bien placée pour connaître une croissance phénoménale qui lui permettra de s'approprier une plus grande part du marché intérieur. La paperasse liée à la réglementation nuit à la croissance de l’industrie, et le système actuel d’inspection des viandes au Canada ne répond pas aux besoins des éleveurs de moutons et des consommateurs canadiens.
Du point de vue de l'industrie du mouton, le système d’inspection des viandes au Canada ne fonctionne plus, et ce sont les éleveurs et les consommateurs qui en paient le prix. Le rôle du gouvernement fédéral et de ses politiques doit être de soutenir les agriculteurs canadiens et l’agriculture canadienne. L’élimination des obstacles au commerce interprovincial et l’ouverture du marché intérieur aux produits du mouton et de l'agneau assureront la viabilité, l’essor et la prospérité de l’industrie canadienne du mouton afin qu'elle puisse répondre à la demande croissante des consommateurs canadiens.
Je vous remercie beaucoup du temps que vous m'avez consacré.
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Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs, de m'avoir invité à venir prendre la parole devant vous au nom de la Fédération canadienne de l'agriculture.
Je m'appelle Ron Bonnett. Je suis un producteur de boeuf du nord de l'Ontario et je suis président de la Fédération canadienne de l'agriculture, ou FCA, qui représente, par l'entremise des organisations qui en sont membres, plus de 200 000 familles d'agriculteurs au Canada. Nous faisons valoir les intérêts des producteurs agricoles et agroalimentaires canadiens afin d'assurer la croissance continue d'une industrie agricole et agroalimentaire viable et dynamique au Canada.
La FCA appuie les objectifs de réduire les obstacles au commerce interprovincial et reconnaît la nécessité d'éliminer les entraves injustifiées au mouvement interprovincial des marchandises, à l'investissement et à la main-d'oeuvre, et ce, afin d'harmoniser les normes. L'harmonisation des normes dans l'ensemble du pays renforcerait la capacité des agriculteurs canadiens de répondre aux besoins du marché alimentaire national et des marchés d'exportation dont dépendent tant d'agriculteurs.
Nous croyons également que ces objectifs doivent être poursuivis en tenant compte des caractéristiques sociales, culturelles et économiques diverses des provinces, et en respectant les exigences des divers secteurs de production agricole canadienne en matière de marketing. Les agriculteurs canadiens ont exprimé des préoccupations au sujet du nombre élevé de normes et de règlements différents en vigueur au pays; cela nuit à ceux qui cherchent à commercialiser leurs produits à l'extérieur de la province ou représente pour eux des coûts inutiles. C'est particulièrement le cas lorsque les exploitations agricoles sont situées dans des régions adjacentes à d'autres provinces. Au nombre de ces obstacles, on compte les règlements différents en matière de transport — qui peuvent viser notamment le poids et les dimensions des camions, ainsi que la taille des pneus —, les normes différentes relativement aux bâtiments d'élevage, les nouveaux règlements sur la gestion, et les règlements en matière de prévention des maladies qui diffèrent selon les provinces.
En ce qui concerne la production animale, les différences relatives aux inspections provinciales des viandes, dont a parlé ma collègue, ont des répercussions importantes sur les éleveurs de bétail et de volaille, puisque de nombreux commerçants ne veulent pas acheter les produits provenant des établissements inspectés par les gouvernements provinciaux. Cela comprend les produits préparés dans la province et les produits qui vont au-delà des frontières provinciales. De plus, les transformateurs d'aliments nous ont parlé d'un certain nombre de règlements qui diffèrent d'une province à l'autre.
La normalisation des données sur les exploitations agricoles est un autre élément sur lequel il faut se pencher. Les règlements provinciaux varient considérablement, et il est nécessaire d'avoir au pays une base solide de renseignements afin de comparer les diverses approches utilisées par les provinces, d'évaluer leur incidence et d'élaborer des politiques appropriées. Les renseignements sur les investissements des sociétés et la propriété étrangère, de même que les autres données foncières qui pourraient permettre de comprendre ce qui se passe dans l'industrie en sont un exemple.
Comme je l'ai mentionné, la FCA appuie l'objectif de réduire ou d'éliminer les fardeaux inutiles imposés au commerce agricole interprovincial; toutefois, nous croyons également qu'il faudrait envisager certaines exceptions légitimes, comme les mesures visant à protéger la vie animale et végétale, l'environnement et les consommateurs.
L'autre source de préoccupations qui doit être examinée concerne les mesures qui doivent être mises en place pour soutenir le système de gestion de l'offre des producteurs laitiers et avicoles canadiens. Dans le cadre de ce système, la production est gérée à l'échelle provinciale et interprovinciale, et des règles sont nécessaires pour veiller à ce que cela se fasse. Dans le chapitre de l'Accord sur le commerce intérieur qui porte sur l'agriculture, on reconnaît que l'accord n'a pas pour effet d'empêcher les provinces d'adopter ou de maintenir des mesures non techniques qui concernent les systèmes de gestion de l'offre réglementés par les gouvernements fédéral et provinciaux et les offices de commercialisation réglementés par les provinces. L'industrie demande que l'énoncé soit clarifié, compte tenu du caractère vague du terme « mesures non techniques », afin que les mesures relatives à la gestion de l'offre ne soient pas soumises au processus de règlement des différends prévu dans l'accord sur le commerce agricole.
Bien que les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux responsables du commerce aient approuvé une note explicative traitant de ces questions, nous n'en avons pas vu le texte écrit, et il n'a pas été rendu public. En conséquence, nous demandons l'aide du comité afin que la note explicative soit accessible aux secteurs concernés avant qu'elle ne soit ratifiée.
En 2006, le Comité sénatorial des banques et du commerce a procédé à une étude sur le commerce interprovincial; il n'a toutefois publié aucun rapport. D'après les renseignements que nous avons pu recueillir, les membres du comité ont eu beaucoup de difficulté à mettre la main sur des données détaillées au sujet des facteurs qui influent sur le commerce, ainsi qu'à déterminer leurs conséquences.
En résumé, nous estimons que l'objectif visant à réduire les barrières inutiles au commerce interprovincial renforcerait la capacité des agriculteurs canadiens de répondre aux besoins du marché alimentaire intérieur, et leur permettrait de mieux se positionner sur les marchés d'exportation. Nous recommandons au comité d'effectuer une analyse approfondie des mécanismes et des règlements qui sont en place et qui pourraient nuire au commerce agricole interprovincial, tout en gardant à l'esprit qu'il pourrait y avoir des exceptions légitimes.
Ensuite, nous recommandons que le comité nous aide en ce qui concerne la publication de la note explicative relative à l'ACI afin que les secteurs soumis à la gestion de l'offre au Canada aient l'assurance que leurs mesures de soutien seront exemptées du processus de règlement des différends.
Merci. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Je vais reprendre là où je me suis arrêtée et, encore une fois, je vous prie de m'excuser. La brièveté n'a jamais été mon fort, alors je vais essayer de parler plus vite.
Ce que nous préconisons et ce que nous visons, c'est la possibilité de réviser le Programme des travailleurs étrangers temporaires, grâce auquel nous avons pu accéder à cette main-d'oeuvre saisonnière qualifiée bien précise, mais ce n'est pas la seule solution. La réforme totale du programme ne nous aidera pas à atteindre notre objectif.
Par ailleurs, il faut déterminer comment nous y prendre pour trouver des travailleurs qualifiés, les former, investir dans leur formation et les amener à s'intéresser au secteur. À mon avis, cet aspect continuera de poser un défi, parce qu'il n'y a pas beaucoup d'autres possibilités. Et le secteur agricole n'offre pas toujours les emplois les mieux rémunérés ou les plus faciles. N'empêche que des gens s'y intéressent.
Nous avons collaboré avec le Conseil canadien pour les ressources humaines afin d'élaborer une norme professionnelle pour le secteur du mouton. Nous faisons ce travail non seulement pour définir les différents niveaux d'employés dont nous avons besoin dans notre industrie, mais aussi, nous l'espérons, pour donner des pistes en matière d'éducation et de formation à ceux qui veulent se lancer dans cette carrière, mais qui ne savent pas par où ou par quoi commencer.
Permettez-moi de dire, en toute connaissance de cause, qu'il est un peu décevant de voir des collèges de formation agricole fermer leurs portes; je ne parle pas des établissements qui offrent des programmes de baccalauréat et de maîtrise — je n'ai rien contre ces diplômes, puisque j'en suis moi-même titulaire de quelques-uns —, mais je parle plutôt des programmes de certificat axés sur une formation spécialisée et pratique. Comment former des travailleurs pour ce secteur s'il n'y a pas de programmes d'études en place?
Donc, un de nos objectifs, dans le cadre de notre collaboration avec le Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture, c'est de créer des descriptions de travail dans l'espoir qu'elles seront utilisées par les établissements d'enseignements et de formation pour dire aux gens: « Si ce secteur vous intéresse, voici ce que vous devez savoir et voici les possibilités qui s'offrent à vous. »
Il ne s'agit pas seulement de travail sur le terrain. Il y a aussi des emplois indirects dans les secteurs de la gestion, de la supervision et de l'industrie. Nous devons déterminer comment éduquer les gens, comment leur offrir la formation nécessaire et comment les amener à s'intéresser aux débouchés locaux. Si nous ne pouvons pas les former et leur transmettre des compétences, des connaissances et une certaine reconnaissance du travail qu'ils font, nous ne parviendrons assurément pas à susciter leur intérêt. Ensuite, nous devons leur fournir une formation adaptée aux besoins de notre industrie, et nous devons également tenir compte des travailleurs temporaires que nous faisons entrer au pays.
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Vous avez été brève, madame Patterson. Je vous en remercie.
Bon nombre des députés qui sont ici depuis un certain nombre d'années ont entendu parler, à maintes reprises, des différentes questions concernant les abattoirs provinciaux, comme la différence entre la réglementation fédérale et provinciale, la possibilité de maintenir ces abattoirs locaux, et tout le reste.
Bien franchement, vous nous avez lancé un défi. Vous avez dit, à plusieurs reprises, que vous n'avez pas la réponse à cette question. C'est, me semble-t-il, un défi que nous aurons à relever, et nous devons effectivement nous pencher sur cet aspect.
Monsieur Bonnett, vous avez dit qu'un projet pilote avait été lancé, et nous devons peut-être examiner en rétrospective les résultats qui en découlent. J'espère que le rapport tiendra compte de cette recommandation, à savoir que nous devons examiner les résultats et déterminer comment instaurer un secteur qui répond aux besoins des producteurs, des transformateurs et d'un groupe de consommateurs. Au fond, comment atteindre cet objectif? Je ne pense pas que ce soit là une tâche facile. Cette question s'est avérée difficile pour bon nombre d'entre nous, à bien des égards.
Il existe une norme à suivre et, malheureusement — et je l'ai déjà dit au comité —, le problème tient au fait que ce sont les détaillants qui ont décidé de fixer la norme, et pas nous. Si nous établissions la norme, ils auraient tout simplement à l'adopter. Cependant, les détaillants établissent une norme en disant: « Vous devez respecter la norme, sinon vous ne pourrez pas faire partie de la chaîne. » Hélas, cela signifie — du moins dans votre industrie, madame Patterson — que beaucoup de gens sont mis à l'écart, ce qui est bien malheureux.
Je comprends les arguments que vous avez soulevés tous les deux, et je crois que nous devons revoir cette question. Comme je l'ai dit, et j'insiste là-dessus, monsieur Bonnett, nous devons examiner cette étude pour voir ce qu'elle a révélé et pour déterminer si nous pouvons trouver un moyen de gérer ce problème. Je pense que nous sommes nombreux à partager cet avis. Nous ne savons pas encore comment nous y prendre, me semble-t-il, mais je pense que c'est ce qui s'impose.
Je vous remercie de vos observations sur ce sujet. En passant, j'achète des produits de mouton et d'agneau locaux, dans la mesure du possible, mais je conviens que ce n'est pas facile.
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Merci, monsieur le président.
[Français]
Je remercie également les membres du comité.
[Traduction]
Je suis honoré de témoigner devant vous pour vous entretenir du sujet important que sont les barrières commerciales internes et le lien avec la croissance et la compétitivité dans l’industrie agroalimentaire canadienne.
Permettez-moi de commencer par un concept qui rend parfois les Canadiens un peu mal à l’aise, mais c’est fondamental pour que les entreprises agroalimentaires canadiennes deviennent ou demeurent concurrentielles à l’échelle mondiale. C’est l’ampleur des activités. Je crois que le concept économique est évidemment simple et bien compris, et c’est pertinent, peu importe le point de départ. Cela signifie que nous voyons de nombreuses petites entreprises canadiennes du secteur alimentaire qui sont très novatrices et qui ont d’excellents produits, mais qui ne réussissent pas à devenir de moyennes entreprises avec une structure de coûts concurrentielle, parce qu’elles n’arrivent pas à se développer.
Comme vous le savez peut-être, en 2006, les Aliments Maple Leaf perdait énormément d’argent, lorsque nous avons annoncé notre nouveau modèle d’entreprise pour nos activités liées aux protéines animales, dont l’objectif était de modifier notre structure de coûts, de réduire notre exposition aux marchés de marchandises et de moderniser nos usines. Contrairement à bon nombre d’autres entreprises, nous avons décidé de développer au maximum nos activités de ce côté-ci de la frontière canado-américaine. Le parcours a depuis été tumultueux, mais nous n’avons pas dérogé du plan. Nous avons maintenant en gros fait des investissements de plus de 1 milliard de dollars dans des centres d’excellence de transformation de la viande au Canada.
Tous ces investissements en vue d’améliorer la productivité et toutes ces activités de restructuration ont été soigneusement pensés pour obtenir un rendement du capital investi. Dans pratiquement tous les cas, ce rendement est lié à l’ampleur des activités. Si nous n’arrivons pas à faire concurrence aux entreprises canadiennes, américaines et étrangères en ce qui a trait aux coûts de fabrication et de distribution par unité, aux frais généraux d’exploitation des UGS et à l’utilisation de la capacité de l’usine, notre fière entreprise canadienne ne fera pas long feu.
La question est ce que les gouvernements peuvent faire pour donner un coup de pouce et le rapport avec le thème de votre étude. Je crois que le gouvernement fédéral est bien conscient de la nécessité de réduire l’écart entre la productivité au Canada et aux États-Unis. Beaucoup d’éléments dans les plans d’action du gouvernement nous laissent croire qu’il essaie de trouver des solutions, mais nous ne semblons jamais capables de réduire cet écart, même si nous sommes souvent considérés comme une destination de prédilection pour les investissements étrangers. Comme l’Institute For Competitiveness and Prosperity nous le rappelle souvent, un écart de productivité est également un écart de prospérité.
Donc, quelle est la solution? Nous croyons qu’il faut mettre en place les conditions qui permettent aux investisseurs nationaux et étrangers de créer de grandes entreprises de calibre mondial. Pour ce faire, nous devons d’abord comprendre que le Canada est un petit marché, mais nous devons aussi éviter d’avoir peur des grandes entreprises. Ce n’est pas une situation où il y a un gagnant et un perdant dans une économie de marché ouverte sur le monde comme le Canada, en particulier le secteur agroalimentaire. Des exploitations agricoles et des entreprises de toutes les tailles et de tous les secteurs peuvent prospérer, et beaucoup de petits fournisseurs d’intrants croîtront dans le sillage de grandes entreprises ayant des marques établies.
Pour ce qui est des produits carnés, même si les Aliments Maple Leaf détient des parts de marché et domine dans certaines catégories, des centaines d’entreprises et d’importateurs jouissant d’une souplesse prospèrent, innovent sans cesse et répondent aux préférences en constante évolution des consommateurs. Il arrive même parfois qu’ils nous volent nos employés.
Cependant, si nous arrivons à être concurrentiels dans les secteurs automobile, aérospatial et des technologies de l’information, pourquoi ne pas le faire dans le secteur agroalimentaire? Prenez Heineken, Unilever, Danish Crown, Godiva et Carlsberg et les petits pays dont ces entreprises sont originaires, soit les Pays-Bas, le Danemark et la Belgique. Néanmoins, compte tenu des 143 usines d’aliments qui ont fermé leurs portes au Canada depuis huit ans et de l’augmentation des importations d’aliments produits par de telles multinationales, il semble que nous ayons besoin d’une nouvelle stratégie dont l’objectif central serait de développer le secteur alimentaire autant que nous l’avons fait pour bon nombre de produits primaires.
Évidemment, la création d’entreprises de grande envergure ne vient pas naturellement dans notre vaste pays diversifié. Les obstacles sont nombreux, et les arguments en faveur de mesures incitatives sont forts, mais nous pouvons évidemment mettre en place des politiques économiques en vue d’aider aussi nos entreprises canadiennes — même si elles sont de grande envergure pour le marché canadien —, parce qu’elles doivent de toute urgence prendre de l’ampleur pour vraiment être concurrentielles sur le marché mondial.
Si vous vous dites que c’est facile à dire pour une grande société comme les Aliments Maple Leaf, je vous rappelle tout simplement que Maple Leaf arrive 17e rang parmi les entreprises de transformation de la viande en Amérique du Nord. Nous sommes petits comparativement à des géants mondiaux comme JBS, Tyson et Cargill, qui sont nos concurrents au Canada et à l’étranger.
Premièrement, quels sont les obstacles dont le gouvernement peut se débarrasser pour éliminer certains éléments qui désavantagent normalement les entreprises canadiennes dans notre marché intérieur? Permettez-moi de vous en nommer quelques-uns.
Premièrement, le gouvernement fédéral a divers programmes fiscaux, de subventions et de prêts. Ces programmes favorisent pratiquement toujours les entreprises — en particulier pour inciter les investisseurs étrangers — en milieu rural ou dans des régions ayant un taux de chômage élevé; ces programmes ont des cibles en matière de création d’emplois, mais ils ne vérifient pas vraiment que les entreprises atteignent la taille et la productivité nécessaires pour être concurrentielles sur le marché mondial. Les entreprises de 50 employés ou plus ne peuvent souvent pas présenter de demandes dans le cadre de ces programmes.
D’un autre côté, lorsque vient le temps de soutenir les grandes entreprises dans leur quête de développement et de technologies, il semble que la majorité de cette aide va pratiquement toujours aux secteurs automobile et aérospatial. Il y a évidemment de très nombreux programmes provinciaux de subventions, mais ces programmes favorisent encore une fois les investissements en milieu rural. Toutefois, dans l’industrie de la viande, par exemple, nous constatons souvent que les provinces soutiennent les petits abattoirs régionaux qui ne peuvent pas expédier leurs produits dans une autre province, s’ils détiennent un permis provincial. Ces entreprises ont donc de la difficulté à réaliser des économies d’échelle.
Il y a aussi la question des politiques du Canada en matière de concurrence et d’investissements étrangers, qui sont évidemment très restrictives dans certains secteurs, mais ce n’est pas vraiment le cas dans les secteurs agricole et agroalimentaire. Par contre, au sujet de l’examen des fusions et des acquisitions, lorsque Maple Leaf a acquis Schneider Foods en 2004, le bureau a réalisé une enquête sur la concentration dans le marché ontarien du bacon, qui est bien entendu un produit soumis au libre-échange en Amérique du Nord.
En ce qui concerne la politique fiscale, nous avons vu beaucoup de bonnes choses au Canada, dont la réduction du taux d’imposition des entreprises, l’élimination de l’impôt sur le capital et le maintien de la déduction pour amortissement accéléré, mais les structures fiscales au Canada sont bien entendu très variées. Il y a un manque d’uniformité quant à la taxe de vente. Nous avons une quantité déconcertante de crédits d’impôt, dont la conception favorise souvent les petites entreprises, et de nombreuses charges sociales qui nuisent à l’emploi. Tout cela fait grimper les coûts liés à la comptabilité et à l’observation des règles fiscales des grandes entreprises qui font des affaires au Canada.
De plus, il y a évidemment le cadre réglementaire. J’aimerais d’abord traiter de la mise en marché réglementé, soit un élément que nous connaissons tous. Par contre, la mise en marché réglementé et la gestion de l’offre ont des effets sur les entreprises de transformation. Un bon exemple de cela serait l’industrie de la transformation de la volaille en Ontario. C’est une industrie de 2,5 milliards de dollars qui se caractérise par de nombreuses usines inefficaces de petite taille qui sont fortement la conséquence des politiques d’attribution qui sont au coeur de la gestion de l’offre.
Les règlements en matière de salubrité alimentaire sont un autre exemple où il y a de grands écarts entre les provinces et le gouvernement fédéral ou un manque d’uniformité. Cependant, sur la scène fédérale, les nouveaux règlements prévus pour bientôt en vertu de la Loi sur la salubrité des aliments au Canada et la modernisation des inspections sont vraiment les bienvenus. Nous demandons aux provinces de suivre l’exemple du gouvernement fédéral.
Il y a aussi beaucoup de questions d’ordre municipal, y compris des règlements municipaux restrictifs en matière de zonage et d’urbanisme, qui découragent généralement l’établissement d’industries manufacturières de grande envergure ou qui nuisent énormément à leur établissement, en particulier pour ce qui est des industries plus traditionnelles qui sont perçues comme étant des sources de pollution, de bruit et d’odeurs.
Viennent ensuite tous les règlements environnementaux qui sont très complexes et qui se chevauchent dans les divers ordres de gouvernement. Par exemple, nous le constatons dans l’industrie alimentaire avec les programmes de recyclage « bacs bleus » partout au Canada. Chaque programme est différent; ils sont hautement fragmentaires, dispendieux et inefficaces.
Évidemment, nous devons encourager l’élimination des barrières commerciales interprovinciales, mais ce ne sont pas majoritairement des barrières explicites. Ce sont plutôt des conséquences qui découlent des normes, des règlements, des permis et des politiques d’approvisionnement des provinces. Toutes ces différences font grimper les coûts d’administration des entreprises nationales. Chaque province a des règlements différents en matière de main-d’oeuvre et de pensions. Maple Leaf a 19 conventions collectives au Canada. Chacune est sujette à un code du travail provincial différent.
Enfin, quelles sont les mesures incitatives? Je vous ai présenté certains obstacles, mais il y a probablement quatre grands domaines à examiner en vue de stimuler les investissements des entreprises dans le développement et la productivité. Il faut maintenir l’amortissement accéléré concernant les usines et l’équipement par l’intermédiaire de la politique fiscale. Cette mesure a été très efficace, mais elle est seulement renouvelée pour deux ans à la fois. Il faut beaucoup plus que deux ans pour passer du concept au budget et faire approuver des investissements majeurs. Bref, la déduction pour amortissement accéléré devrait devenir permanente.
Les programmes ciblés de prêts et de subventions ont un important rôle à jouer, mais ils ne devraient pas accorder de préférences en fonction du milieu — qu'il soit rural ou urbain —, du secteur industriel, de la création possible d'emplois spécialisés ou non, ou de la taille de l'entreprise qui présente une demande.
Nous accueillons à bras ouverts la Subvention canadienne pour l’emploi, mais nous avons des difficultés en ce qui concerne la pénurie de main-d'oeuvre spécialisée et la disponibilité relative de la main-d'oeuvre, problèmes qui, dans notre industrie, ont été aggravés par les réformes exagérées dont le Programme de travailleurs étrangers temporaires a fait l'objet.
L'infrastructure doit être édifiée à l'échelle. Par exemple, la porte d'entrée de l'Asie-Pacifique, qui est essentielle pour soutenir la croissance de nos exportations vers l'Asie, tarde à se concrétiser en raison de tous les retards entourant l'approbation des projets individuels.
En fin de compte, nous sommes d'avis qu'il faut une approche nationale pour attirer les investissements. Nous avons récemment établi notre grosse usine de viandes préparées à Hamilton, et l'exercice nous a permis de constater à quel point il est difficile de solliciter l'aide des différents organismes provinciaux de développement au Canada ainsi que le peu de coordination entre les différents intervenants. La situation est très différente de celle de pays concurrents.
Votre comité s'attaque selon nous à une question de très grande importance. Dans le contexte économique actuel, les fabricants de produits alimentaires doivent combler l'écart de compétitivité par le biais d'une restructuration et d'investissements visant à améliorer la productivité. La réussite dans cette voie dépend toutefois de la mesure dans laquelle notre industrie saura tirer profit de sa capacité de production et faire passer ses activités à une échelle supérieure. Ce sont là les seuls moyens de défendre notre modeste marché domestique contre les multinationales américaines toutes proches qui profitent d'avantages d'échelle considérables, et de nous attaquer aux marchés mondiaux en pleine expansion.
Bien entendu, si nous avions un secteur primaire de l'agriculture de petite taille, avec des ressources limitées...
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Pour ceux qui ne le sauraient pas, sachez que le Conseil des grains du Canada est un organisme qui s’occupe des intérêts du secteur des grains. Nous représentons les producteurs céréaliers, les sociétés d’approvisionnements agricoles, les compagnies céréalières et les transformateurs.
Le conseil a été formé en 1969 dans le but de coordonner les efforts visant à stimuler la vente et l'utilisation des grains canadiens sur les marchés nationaux et internationaux. Avec le temps, le conseil est devenu le forum officiel le mieux coté pour l'ensemble de l'industrie céréalière canadienne et l'industrie céréalière mondiale. Nous sommes une association pancanadienne et nos intérêts embrassent une variété de cultures, dont les céréales, les oléagineux, les légumineuses à grain et les cultures spéciales. Notre organisation compte 30 membres, qui sont tous partie prenante des chaînes de valeur de ces cultures.
La mission du Conseil des grains du Canada est de mener, faciliter et appuyer l'élaboration et la mise en oeuvre de politiques ayant trait aux problèmes et aux occasions favorables qui ont une incidence sur ces cultures et de permettre une collaboration entre les intervenants de ces différentes cultures. Parmi nos nombreux membres, mentionnons le Conseil canadien du canola, Pulse Canada, Cereals Canada, le Conseil canadien du lin, le Conseil de l'orge du Canada et Grain Farmers of Ontario.
Les membres du Conseil des grains du Canada ont cerné deux piliers stratégiques concernant le travail que nous faisons. Il y a d'abord le besoin d'un accès au marché propice au commerce, puis l'amélioration de notre approche pour ce qui est de mesurer et de communiquer les données de l'industrie en matière de durabilité par le biais de la Table ronde canadienne sur les cultures durables qui vient d'être crée.
Je suis ici pour vous parler de certaines préoccupations qui ont été soulevées relativement à notre premier pilier stratégique, nommément les problèmes qui plombent l'accès au marché et, plus précisément, les obstacles au commerce interprovincial.
En janvier dernier, le Conseil des grains du Canada a envoyé une lettre au premier ministre du gouvernement canadien, aux premiers ministres des provinces et aux ministres fédéraux de l'Agriculture et de la Santé pour leur faire part de nos réserves au sujet des interventions réglementaires non fondées sur des données scientifiques que certaines provinces pratiquent sur certains produits agricoles du secteur des cultures. Je crois que vous avez tous reçu une copie de cette lettre.
En bref, nous demandons aux premiers ministres des provinces de s'engager à travailler à l'adoption d'un accord fédéral-provincial afin de reconnaître les approbations réglementaires fédérales dans le secteur des cultures.
La productivité et la compétitivité sur les marchés mondiaux de ce secteur d'une valeur de plusieurs milliards de dollars dépendent énormément de l'accès rapide et ininterrompu à des intrants et des technologies agricoles et alimentaires qui ont été approuvés sur le plan réglementaire et qui sont disponibles sur une base commerciale dans d'autres pays qui produisent et exportent des grains.
À titre d'exemple, ces intrants et ces technologies comprennent des semences de cultures affichant des caractères agronomiques et de rendement à l’utilisation finale qui ont été élaborées et enregistrées pour la production commerciale; les produits homologués de protection des cultures comme les traitements pour semences, les herbicides, les fongicides et les insecticides qui garantissent des moissons optimales sans compromettre l'innocuité pour la consommation humaine ou l'alimentation animale ni poser un risque pour l'environnement; les additifs alimentaires et les agents technologiques utilisés dans le traitement premier et les traitements subséquents de denrées tels que les céréales, les oléagineux et les légumineuses.
Ces intrants et ces technologies sont soumis à une évaluation préalable à la mise en marché et sont dument enregistrés auprès de ministères et d'organismes fédéraux, dont l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, la Direction des aliments de Santé Canada, l'Agence canadienne d'inspection des aliments et la Commission canadienne des grains. Leur innocuité pour les utilisations prévues a été démontrée scientifiquement, tant sur le plan alimentaire que sur le plan environnemental.
L'une des assises de l'agriculture canadienne et l'un des avantages concurrentiels clés des agriculteurs canadiens est notre système réglementaire fondé sur des données scientifiques, système qui jouit d'ailleurs d'une renommée mondiale. De nombreux pays nous envient en effet d'avoir un tel système qui procède d'une application rigoureuse des sciences pour protéger la santé des citoyens et de l'environnement, un système prévisible et ponctuel qui donne aux agriculteurs et à l'industrie les outils dont ils ont besoin.
Or, les assises de ce système se brisent lorsque les gouvernements provinciaux — qui n'ont pourtant pas les capacités de recherche des organismes fédéraux que je viens de nommer — se mettent à imposer des règles qui vont à l'encontre des décisions fédérales en la matière et les remplacent. Cette dynamique brouille les cartes et vient semer le doute sur les responsabilités en matière de réglementation. On assiste donc à la mise en place d'une mosaïque d'approches provinciales en matière de réglementation, à un chevauchement fédéral-provincial inutile et coûteux et à l'émergence d'approches provinciales qui semblent relever davantage de la perception que de la science.
Un exemple patent de cela est le gouvernement de l'Ontario qui impose une restriction arbitraire fondée sur la perception en ce qui concerne le traitement aux néonicotinoïdes des semences de maïs et de soya, restriction qui fait contraste avec l'approche prudente fondée sur des données scientifiques qu'appliquent à la fois l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire à l'échelon fédéral et l'Agence de protection de l’environnement des États-Unis.
Une telle situation aura des effets négatifs et de grande portée, puisque les agriculteurs seront contraints de revenir à des pesticides anciens et dépassés ou d'acheter leurs semences à l'extérieur du Canada. De plus, cela envoie un très mauvais message aux investisseurs étrangers, soit celui que les investissements au Canada sont risqués en raison de la possibilité que les provinces prennent le pas sur la fonction réglementaire du gouvernement fédéral, et ce, malgré le système réglementaire fondé sur des données scientifiques en place au Canada. De surcroît, ces phénomènes compliquent le commerce interprovincial, freinent l'innovation et font du tort à nos agriculteurs. Selon nous, c'est de la mauvaise politique publique. Nous croyons par ailleurs que la situation pourrait être évitée par un accord entre ministres fédéraux et provinciaux visant à garantir le respect de la prérogative fédérale en matière de réglementation.
Un déséquilibre semblable existe depuis un certain temps, avec les interdictions imposées par les provinces et les autorités locales concernant l'usage de pesticides en milieu urbain. Malgré le fait que l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire effectue de rigoureuses évaluations et réévaluations de tous les pesticides, nous avons vu au Canada l'adoption d'interdictions de pesticides pour des considérations politiques, interdictions qui nuisent à l'investissement et au commerce, et envoient un message clair aux investisseurs étrangers: ici, les décisions en matière de réglementation ne sont pas vraiment tout à fait fondées sur des données scientifiques. Encore une fois, c'est une situation qui découle du manque de coopération fédérale-provinciale en matière de réglementation et, plus précisément, du non-respect de certaines provinces à l'égard de l'autorité et du savoir-faire du gouvernement fédéral en ce qui concerne l'innocuité des produits agricoles pour l'alimentation humaine, l'alimentation animale et l'environnement.
Les agriculteurs et l'industrie sont à juste titre inquiets de voir de pareilles intrusions des gouvernements provinciaux et des autorités locales devenir de plus en plus fréquentes et de plus en plus dérangeantes, et les agissements récents de certaines provinces nous montrent que ces craintes sont fondées.
En conclusion, le Conseil des grains du Canada croit que le gouvernement fédéral a un rôle de leader à jouer pour éliminer le potentiel de ces réglementations provinciales redondantes et nuisibles sur le plan commercial. Les organismes de réglementation fédéraux ont l'obligation de réglementer et de faire appliquer les mesures canadiennes de sécurité pour l'alimentation humaine, l'alimentation animale et l'environnement. Nous croyons que ce mandat devrait aussi inclure le devoir de veiller à ce que les gouvernements provinciaux ne viennent pas balayer du revers de la main les décisions fondées sur les données scientifiques et les risques qui ont été prises au sujet des produits agricoles, décisions qui régissent l'accès à ces produits à l'échelle du Canada.
Je vous remercie de votre attention.