Passer au contenu

HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 127 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 4 décembre 2018

[Enregistrement électronique]

(0845)

[Traduction]

    Bienvenue à la 127e séance du Comité permanent de la santé. Aujourd'hui, nous étudions les répercussions de l'abus de méthamphétamine au Canada.
    Aujourd'hui, un certain nombre d'excellents témoins viennent nous parler. Nous accueillons James Favel, directeur exécutif de Bear Clan Patrol. Nous accueillons Darlene Jackson, présidente du Manitoba Nurses Union. Nous recevons Sarah Blyth, directrice exécutive de l'Overdose Prevention Society. Enfin, nous accueillons Vaughan Dowie, directeur général, et Victoria Creighton, directrice des services techniques, du Pine River Institute.
    Bienvenue à vous tous. Chaque organisation aura 10 minutes pour présenter son exposé.
    Comme James n'est pas encore assis, nous commencerons par vous, Darlene, pour 10 minutes.
    « Une ou deux touches de méthamphétamine vous dureront durant des heures et vous garderont éveillé pendant des jours. Avec les opioïdes, vous pouvez entièrement prédire le cours du traitement. Nous pouvons nous occuper entièrement d'une personne qui éprouve des symptômes de sevrage aux opioïdes. Avec la méthamphétamine, tout peut changer en un clin d'oeil. »
    Madame la présidente, mesdames et messieurs, merci de m'avoir invitée ici aujourd'hui. Je viens de vous lire une citation d'une infirmière psychiatrique autorisée du Centre des sciences de la santé, le plus grand établissement de soins de santé à l'ouest de Toronto et à l'est de Calgary. Cet établissement est à l'avant-scène de la gestion de la crise.
    Je voulais commencer par cette citation, parce qu'elle tient compte des difficultés uniques auxquelles les infirmières font face lorsqu'elles traitent des consommateurs de méthamphétamine et parce que le fait d'en tenir compte nécessitera quelques changements uniques des politiques.
    Les infirmières savent que l'augmentation rapide de la consommation de méthamphétamine a atteint des niveaux de crise au Manitoba. Les répercussions ravagent bon nombre de nos collectivités et imposent un fardeau important sur notre système de santé. Il est temps que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership par rapport à cette importante question de santé publique. J'espère qu'une partie des renseignements que je vous fournirai aujourd'hui vous aideront à prendre une décision éclairée à l'égard des mesures qui s'imposent.
    Pour commencer, j'aimerais aborder les répercussions sur nos services d'urgence et les unités de santé mentale. Malheureusement, les services d'urgence sont souvent le seul endroit où les consommateurs de méthamphétamine peuvent accéder à un traitement. Certains arrivent en détresse, escortés par la police et sous l'effet d'une drogue qui peut changer leur comportement à tout moment. D'autres se présentent librement, et bien qu'ils semblent calmes au début, un comportement erratique et violent peut apparaître en un instant. Ce n'est pas seulement un danger pour le patient, c'en est aussi un pour les infirmières, les médecins et les fournisseurs de soins de santé. De plus, c'est un danger pour les autres patients dans l'établissement, dont bon nombre ont aussi besoin de soins d'urgence. Ils sont obligés d'attendre plus longtemps, puisque les ressources sont consacrées à des patients qui souffrent d'une psychose causée par la méthamphétamine et d'autres symptômes. Au Manitoba, nous manquons de normes de sécurité uniformes dans nos établissements urbains et ruraux. Même si les SU des hôpitaux de Winnipeg disposent de gardiens de sécurité, leur formation et leur présence varient entre les établissements.
    Le Centre des sciences de la santé a la plus forte présence de sécurité, mais les infirmières là-bas vous diront que les gardiens de sécurité sont souvent surchargés et que la direction leur dit de ne pas intervenir. Les établissements ruraux sont tout particulièrement vulnérables. À Portage la Prairie, à Virden, à Thompson et dans de nombreuses autres collectivités, les infirmières signalent une forte augmentation du nombre de personnes qui se présentent en raison de la méthamphétamine. Ces établissements n'ont habituellement pas de sécurité. Les infirmières reçoivent l'instruction d'appeler la GRC, qui est aussi déjà dépassée et souvent incapable d'intervenir aussi rapidement que nécessaire. Trop souvent, nous entendons des histoires d'infirmières qui se sont fait frapper, à coups de poing et à coups de pied, et cracher dessus, et la crise de méthamphétamine a aggravé la situation.
    Une infirmière a dit être intervenue lorsqu'un patient a commencé à étrangler un employé qui était là simplement pour regarnir les stocks. La blessure que l'infirmière a subie en conséquence l'a confinée à des travaux légers dans les mois suivants. Une infirmière de Brandon nous a dit ceci: « J'ai eu un patient qui a retiré l'intraveineuse de son bras et a essayé de m'agresser avec l'aiguille. Nous avons trouvé des couteaux sur des gens. Des personnes ont détruit nos salles... j'ai travaillé au service de médecine d'urgence pendant huit ans, et au cours des trois dernières années, nous avons constaté une augmentation de la méthamphétamine, et durant la dernière année, la consommation a juste explosé. »
    Au Centre des sciences de la santé, les infirmières déclarent voir à chaque quart de travail de quatre à cinq patients qui présentent des problèmes liés à la méthamphétamine. Auparavant, elles en voyaient ce même nombre par mois. Les données publiées par l'Office régional de la santé de Winnipeg prouvent ce que les infirmières nous disent. Depuis 2013, on a constaté une augmentation de 1 200 % du nombre de patients qui se présentent au SU sous l'influence de la méthamphétamine. L'augmentation exerce de réelles pressions sur les infirmières et d'autres professionnels de la santé. Souvent, il faut plusieurs personnes pour observer ou contenir ces patients. Une infirmière nous a dit qu'ils avaient dû commander plus de fournitures de retenue, qu'il faut une équipe entière de gens — de médecins, d'infirmières, d'aides-soignants — et que tous les autres patients ont habituellement peur, ce qui exacerbe le problème.
    Nous savons que les services d'urgence sont surpeuplés. Pour certaines infirmières, cette crise les amène au point de rupture et les force à songer à quitter la profession ou les unités, comme les services d'urgence, qui sont de plus en plus mobilisés pour s'attaquer au problème de la drogue. Les environnements chaotiques laissent souvent prédire des incidents violents. La crise de la méthamphétamine a amplifié ce problème pour les infirmières, mais on doit aussi tenir compte d'autres facteurs plus généraux.
    Je félicite le comité de la santé d'avoir lancé une étude sur la sécurité et la violence faite aux travailleurs de la santé, et particulièrement M. Eyolfson, de Winnipeg, qui s'est fait le champion de cette question. Cette étude est un pas en avant important, qui, je l'espère, débouchera sur des investissements du gouvernement fédéral dans des services de sécurité dans les établissements de santé.
(0850)
     Le problème de la méthamphétamine va bien au-delà de nos services d'urgence. Le contrôle des infections est une préoccupation. La dépendance empêche souvent les patients d'obtenir un traitement avant que le problème s'aggrave. Nous savons que de nombreux consommateurs s'injectent la drogue par intraveineuse, ce qui peut causer des infections dans les valvules cardiaques et exiger une intervention chirurgicale.
    Je vous raconte ces histoires avec réserve. Nous ne devons pas faire en sorte que ces patients soient stéréotypés ou stigmatisés. Ils souffrent d'une maladie terrible. En tant qu'infirmières, nous voulons d'abord et avant tout que nos patients obtiennent les soins dont ils ont besoin.
    Nous voyons aussi des facteurs sociaux plus généraux qui entrent en jeu. Une infirmière a décrit le problème en disant qu'il n'y a pas assez de programmes de rétablissement. Selon elle, 95 % des patients qui se présentent avec une plainte liée à la méthamphétamine sont observés jusqu'à ce qu'ils soient capables de sortir, puis ils sont libérés. Pour ces infirmières et pour nous tous, c'est désolant de ne pas pouvoir fournir plus de soins à ces personnes.
    La fourniture de logements publics et la réduction de la pauvreté doivent faire partie de la solution à cette crise. La province a retardé la construction d'un plus grand nombre d'unités de logements sociaux. L'appui du gouvernement fédéral et son leadership dans ce dossier sont désespérément nécessaires.
    La méthamphétamine a des effets sur toutes les collectivités, et les consommateurs proviennent de tous les horizons. Une infirmière de santé publique qui travaille dans nos banlieues riches, comme River East et Transcona, m'a dit qu'elle avait constaté une augmentation radicale de la consommation de méthamphétamine. L'infirmière à Portage la Prairie m'a dit: « Ce sont toutes les races, tous les âges. Même les personnes que vous soupçonnez le moins, qui conduisent les véhicules les plus chics, qui ont les meilleurs emplois, en consomment. C'est un problème. »
    Certains consommateurs ne se rendent pas compte de ce qu'ils prennent. Récemment, un groupe d'infirmières oeuvrant à la réduction des méfaits, en dépistant des drogues dans des fêtes, ont déclaré qu'elles n'avaient pas vu depuis l'été de tests ayant révélé la présence de cocaïne. Les gens croyaient prendre de la cocaïne, mais dans 90 % des cas, c'était en fait de la méthamphétamine.
    Quelle est la solution?
    La réduction des méfaits est une partie essentielle. Il est important d'assurer l'accès à des seringues propres. Nous devons assurer l'accès au-delà des heures normales de travail. Les sites d'injection supervisée peuvent aussi réduire le risque d'infection.
    De plus, nous avons besoin de lieux de traitement pour ceux qui souffrent de dépendance. Le Manitoba Nurses Union est un fervent défenseur du centre de rétablissement Bruce Oake, un centre de traitement à long terme en train d'être établi dans l'Ouest de Winnipeg. Lors de notre dernière assemblée générale annuelle, nous avons amassé 30 000 $ pour le centre. Toutefois, même Scott et Anne Oake vous diront que ce centre ne suffira pas à répondre à la demande. C'est une fondation privée qui doit intrinsèquement composer avec des ressources limitées.
    C'est pourquoi il est nécessaire que le gouvernement fédéral intensifie son soutien pour lutter contre cette crise. Nous avons besoin des ressources nécessaires pour intervenir. La réduction des paiements de transfert en santé, de 6 à 3 %, a été une grave erreur. Le financement axé sur la santé mentale est le bienvenu, mais le niveau actuel est simplement inadéquat, et la situation s'aggrave.
    Au Manitoba, nos programmes de dépendance et de soins de santé ainsi que nos programmes de santé mentale n'arrivent pas à répondre à la demande. Les services d'urgence et les programmes de dépendance ont besoin de plus de soutien pour surmonter la difficulté unique de la consommation de méthamphétamine.
    Les infirmières ont proposé des établissements et des programmes réservés aux consommateurs de méthamphétamine. Les patients ont besoin d'un lieu où ils seront en sécurité lorsqu'ils arrêteront de consommer la drogue et ils ont besoin d'accès à un programme de rétablissement.
    Enfin, nous avons besoin du soutien fédéral pour assurer la sécurité. Il nous faut des employés spécialisés et adéquatement formés dans les hôpitaux de nos villes et des services améliorés dans les régions rurales. Les patients et leurs fournisseurs de soins doivent être en sécurité, de sorte que nous puissions nous concentrer sur le traitement. Malheureusement, plus longtemps nous attendons, plus le risque qu'une de ces situations violentes entraîne une blessure plus grave que ce que nous avons vu est élevé.
    Au Manitoba, le gouvernement provincial impose des compressions importantes dans la santé, y compris la fermeture de trois salles d'urgence à Winnipeg. À ce jour, il n'a pas réussi à offrir une réponse importante à cette crise.
    Par comparaison, le gouvernement fédéral a l'occasion de faire preuve de leadership en offrant un soutien réel et des ressources réservées pour les dépendances, la santé mentale et la sécurité.
    Merci. Je serai heureuse de répondre à toutes les questions du Comité.
(0855)
    Passons maintenant à James Favel, directeur général du Bear Clan Patrol.
    Bienvenue.
    Bonjour, mesdames et messieurs. Au nom de Bear Clan Patrol Inc. et de notre conseil d'administration, merci d'accueillir notre voix dans votre chambre.
    Bear Clan Patrol est une patrouille de sécurité communautaire dirigée par des bénévoles. Notre mandat est de protéger et d'autonomiser les femmes, les enfants, les personnes âgées et les membres vulnérables de notre collectivité. Nous le faisons de façon non violente, sans jugement et en harmonie avec les collectivités que nous servons.
    Le second avènement de Bear Clan Patrol a commencé en septembre 2014 dans la foulée du décès de Tina Fontaine, une jeune fille qui a été exploitée et assassinée pendant qu'elle était prise en charge par les services de protection des enfants au Manitoba. À l'époque, notre objectif était d'interrompre les schèmes d'exploitation dans notre collectivité pour faire en sorte que ce qui était arrivé à Tina n'arrive plus jamais à qui que ce soit.
    Notre rôle dans la collectivité a évolué, toutefois, de manière à inclure de nombreux autres moyens de soutenir notre collectivité. Le Bear Clan Patrol d'aujourd'hui est actif cinq et six nuits par semaine, faisant respectivement 11 et 12 patrouilles par semaine. Nous sommes actifs dans trois quartiers défavorisés distincts de Winnipeg, et notre empreinte ne cesse de croître.
    Notre modèle a été partagé avec des collectivités à l'échelle locale, nationale et internationale. Notre bassin de bénévoles est passé de 12 en 2014 à près de 1 500 bénévoles établis à Winnipeg aujourd'hui.
    Jusqu'à présent cette année, nous avons fourni plus de 30 000 heures de services aux quartiers défavorisés de Winnipeg. Nous agissons comme mentor, premier intervenant, gardien et agent de liaison entre la collectivité et les fournisseurs de services. Nous apportons un sentiment d'appartenance et de connectivité aux membres de notre collectivité, et, de plus, nous fournissons à nos membres marginalisés de la collectivité l'occasion de sortir de ce rôle et d'assumer le rôle d'intervenant. Des choses incroyables peuvent être accomplies par des gens qui ont un but, et nous essayons de leur fournir ce but.
    Nous avons constaté de nombreux résultats positifs à la suite de nos efforts, mais malgré tous nos meilleurs efforts, nous ressentons toujours la douleur de la perte. Même au sein de nos propres rangs... en août de cette année, nous avons perdu deux des nôtres. Ce n'étaient pas des étrangers, pas de simples connaissances, mais deux de nos propres membres de la famille Bear Clan sont disparus en raison d'une dépendance et d'une surdose. La méthamphétamine a joué un rôle dans ces deux tragédies.
    À propos de l'abus de méthamphétamine au Canada, j'ai beaucoup voyagé au Manitoba et dans quelques endroits au pays. J'ai vu de mes propres yeux l'augmentation des taux de consommation, l'augmentation du niveau de destruction et les ravages causés dans la vie de tous les membres de notre collectivité. Il n'y a pas une personne que je connais qui ne soit pas touchée par cette épidémie. Les effets se font ressentir ces jours-ci à l'extérieur des quartiers défavorisés, et, sans les mesures de soutien appropriées, les choses ne vont que s'aggraver.
    Dans le cadre de nos déplacements dans les rues de Winnipeg cette année, nous avons récupéré environ 40 000 seringues utilisées. Nous avons observé une augmentation décuplée du nombre de seringues récupérées, année après année, depuis nos débuts en 2015; de 18 seringues en 2015 à 40 000 en 2018.
    Chaque jour, nous nous occupons de membres de la collectivité aux prises avec une dépendance, de gens qui vivent une psychose due à la méthamphétamine et constatons une augmentation de la criminalité violente et des crimes contre les biens. Tous les jours, nous voyons plus de personnes vulnérables, et les services de soutien n'arrivent pas à répondre à la demande.
    Quelques nouvelles ressources sont maintenant accessibles au Manitoba, grâce à l'ouverture récente de cliniques d'accès rapide pour le traitement de la toxicomanie, ou ARTT. Cela a commencé à la fin du mois d'août. Ces cliniques fournissent des services à des toxicomanes qui se présentent sur place, ce qui est une bonne chose, et nous avons déjà aiguillé de nombreux membres de la collectivité vers cette ressource. Le seul problème, c'est qu'elles sont ouvertes deux heures par jour, à raison de cinq jours par semaine. Compte tenu de la portée et de l'urgence entourant l'épidémie de méthamphétamine et de la crise simultanée des opioïdes à laquelle nos collectivités font face, ces horaires sont terriblement décevants.
    Nos patrouilles se font le soir, une fois que la plupart des fournisseurs de services sont partis à la maison pour la journée. Lorsque nous rencontrons des personnes en crise, nous avons très peu d'options à leur offrir. Généralement, les policiers ou les ambulanciers vérifient le bien-être de la personne. Notre projet Main Street ne fournit que les services les plus essentiels, soit trois repas chauds et un lit. Encore là, les membres de la collectivité qui font une psychose causée par la méthamphétamine ne sont pas les bienvenus en raison de la violence connexe.
    Les besoins sont nombreux dans nos collectivités si nous voulons traverser cette épidémie. Nous avons besoin d'un accès fiable à des ressources en temps opportun. Le développement communautaire ne se fait pas de neuf à cinq, du lundi au vendredi. Il doit y avoir un plus grand engagement. Il faut que les services de soutien en santé mentale soient plus rapidement accessibles. Nous avons besoin d'un plus grand accès à des refuges d'urgence et de l'accès à un plus grand nombre de logements abordables.
    Une collectivité qui existe toujours en mode de crise est une collectivité en proie à toutes sortes d'abus sociaux. Je suis sûr que vous n'êtes pas surpris quand je vous dis que le plus grand problème auquel nous continuons de faire face, c'est la pauvreté abjecte qui nous touche nous ainsi qu'un si grand nombre d'autres collectivités de partout au pays. La pauvreté et la déconnexion dans notre collectivité déclenchent la dépendance chez nos membres. Cette dépendance nourrit la violence gratuite, la pauvreté endémique et les crimes contre les biens, et elle se perpétue d'elle-même: la rue, l'hôpital, la prison, et ça recommence.
    Les sites de consommation supervisée, les programmes d'échange de seringues, les programmes en 12 étapes, les possibilités de traitement, ce sont toutes de bonnes choses, mais si vous avez faim ou que vous vous réveillez sur le sofa d'un ami, c'est un autre problème. Si vous ne pouvez pas vous payer le transport pour vous rendre à des programmes, à des entrevues d'emploi, à des rendez-vous chez le médecin et même à des banques ou à des centres commerciaux et pour revenir de ces endroits... ces endroits sont hors de portée de bon nombre des membres de notre collectivité.
(0900)
    Si ces problèmes sous-jacents liés à la pauvreté ne sont pas examinés, il n'y aura pas de progrès important. Si le soulagement de la pauvreté ne fait pas partie des stratégies que nous employons, nous n'irons nulle part.
    Aux fins du compte rendu, il est plus facile d'obtenir des bongs et des pipes à crack dans ma collectivité que des aliments bons et sains, et par cela, je veux dire que nous avons dans notre collectivité deux magasins à succursales qui vendent des fruits et légumes et des aliments sains, mais nous avons aussi deux douzaines de magasins ou plus qui vendent des bongs et des pipes. Le magasin au coin de ma rue vend même morceau par morceau du Brillo pour alimenter ce marché. C'est un problème.
    Quant à nous, nous avons commencé à recueillir des fruits et des légumes et des produits de boulangerie et à les distribuer directement aux membres de la collectivité. L'an dernier, nous en avons ramassé 21 tonnes. Cette année, nous en avons accumulé 55 tonnes jusqu'à présent, et je m'attends à pouvoir livrer 60 tonnes d'ici la fin de l'année. L'an dernier, nous avons fourni l'équivalent de 35 000 $ en placements de travail temporaire par l'entremise de nos bénévoles. Cette année, cela oscillait plutôt autour de 90 000 $ en placements de travail temporaire. Nous sommes très fiers de ces statistiques, mais, malheureusement, nous ne parons qu'aux besoins les plus pressants. Les besoins dans nos collectivités dépassent de loin notre capacité d'y répondre actuellement. Il est temps de changer la façon dont nous valorisons les gens. Il est temps pour nous de commencer à travailler ensemble de façon beaucoup plus utile et collaborative. Il doit y avoir un réel changement dans notre façon de penser, et cela doit se produire maintenant.
    Merci beaucoup.
    Passons maintenant à Sarah Blyth, directrice exécutive de l'Overdose Prevention Society, pour 10 minutes.
    Merci de me recevoir ici aujourd'hui.
    Pour commencer, j'aimerais raconter une histoire personnelle. Je suis allée en Californie dans les années 1990 pour travailler et vivre auprès d'un groupe de jeunes. Beaucoup de gens fréquentaient l'école. Tout le monde travaillait dans l'industrie du sport, du divertissement et de la musique, et tout le monde consommait de la méthamphétamine et du speed pour arriver à terminer l'école et à composer avec les pressions constantes liées au travail.
    Je crois que, ce qui s'est produit, c'est que c'est juste devenu trop courant et très facile. Maintenant, partout aux États-Unis, les gens consomment de la méthamphétamine en cristaux, et cela vient juste d'arriver ici, en réalité. De plus, ces jours-ci, c'est en fait assez facile d'y avoir accès dans les écoles. Mon fils va à l'école, et il dit que les drogues sont si faciles d'accès pour les jeunes que c'est incroyable. De plus, personne ne sera surpris d'apprendre que si des jeunes consomment des drogues, ils en consommeront plus tard dans la vie.
    Je suis directrice exécutive de l'Overdose Prevention Society, située dans le Downtown Eastside de Vancouver. Notre établissement comprend une aire à l'extérieur pour fumer où peuvent s'asseoir 13 personnes, et ce n'est qu'une des deux aires de ce type qui existent au Canada. Nous avons aussi une aire intérieure pouvant accueillir 13 personnes, qui est un site d'injection. Nous voyons chaque jour jusqu'à 700 personnes dans notre site.
    Nous sommes situés dans une des deux ruelles les plus utilisées par les consommateurs de drogues au Canada. C'est un des sites les plus occupés, comparable en ce moment à InSite.
    Dans notre site, personne n'est jamais mort. Environ la moitié de nos participants consomment en ce moment de la méthamphétamine en cristaux. De nombreux participants en consomment conjointement avec de l'héroïne et du fentanyl, y compris des speedballs, qui sont les deux en même temps.
    Si les gens consomment de la méthamphétamine en cristaux, c'est parce que, évidemment, elle soulage une partie de la douleur et de la souffrance, mais c'est une drogue peu coûteuse et elle dure plus longtemps que la plupart des autres drogues. Dans le Downtown Eastside, bon nombre des consommateurs de drogues consomment le plus souvent ce qui est le moins cher et le plus facile à obtenir, et la méthamphétamine en cristaux est assurément une de ces choses.
    Les gens qui consomment des stimulants comme la méthamphétamine et la cocaïne sont aussi exposés au risque de surdose du fentanyl et d'autres contaminants. L'approvisionnement sécuritaire signifie des stimulants de qualité pharmaceutique qui sont facilement accessibles aux gens. Par conséquent, le fait de donner aux gens un accès sécuritaire aux drogues, notamment à la méthamphétamine en cristaux, serait probablement une des meilleures choses que vous pourriez faire juste en ce qui concerne un stimulant qui ne sera pas contaminé par tout ce qui se trouve sous le soleil. Beaucoup des comportements et des maladies auxquels les gens sont exposés proviennent de la contamination.
    Ils utilisent du détergent à lessive et du vermifuge pour cochons. Il y a du fentanyl dans la méthamphétamine en cristaux. Il y a tout ce que vous pourriez imaginer, et nous n'avons aucune idée de la façon dont certains de ces produits nuisent au comportement ou même au foie des gens. Les effets à long terme sur la santé sont tout simplement incroyables.
    C'est vraiment dans le Downtown Eastside, tout particulièrement, que tout est fabriqué à partir des déchets. Tout ce que vous pouvez imaginer s'y retrouve, et c'est vraiment assez horrible. Nous le savons, parce que nous testons les drogues. Nous les testons et nous pouvons dépister, je crois, 100 000 choses différentes, et vous pouvez voir qu'elles sont très contaminées.
    Nous voyons assez souvent des gens qui ont été réveillés pendant des jours. Cet état peut entraîner une psychose, de la paranoïa, de la violence, des hallucinations et une hospitalisation. Malheureusement, les hôpitaux n'ont pas la capacité de composer avec cette situation.
    L'autre soir, nous avons amené une itinérante qui utilise souvent notre site. Elle est aussi bénévole chez nous. Elle consomme une combinaison de drogues. Il a fallu qu'un de nos bénévoles attende pendant quatre heures à l'hôpital pour la faire admettre, et on l'a libérée immédiatement et sans traitement, et elle est revenue nous voir. Ça fait 12 ans que nous travaillons là-bas, donc je suis capable d'aider des gens dans ces situations, mais c'est vraiment difficile.
(0905)
    C'est tellement difficile que le système hospitalier ne peut pas suffire à la tâche. Il est juste submergé par d'autres situations, y compris la crise des surdoses en général.
    Les recommandations pour améliorer les résultats de santé des consommateurs de drogues seraient d'autres ordonnances sécuritaires dont on connaît la puissance et les ingrédients, des fournitures sécuritaires pour réduire les méfaits, des sites de consommation supervisée... Les gens choisissent de s'injecter des drogues parce qu'il n'y a aucun lieu où ils peuvent inhaler des drogues en toute sécurité, et ils vont donc juste se les injecter ou apprendre à le faire. C'est vraiment important de donner aux gens une aire sécuritaire pour fumer, ce qui, en Colombie-Britannique... En fait, à Edmonton, on a un établissement à la fine pointe, qui n'est pas nécessaire, je crois. Vous pouvez offrir, dans le cadre de la crise, certains de ces services ponctuels vraiment de base qui peuvent aider immédiatement les gens et ne représentent pas un coût aussi élevé.
    La vérité, c'est que le coût élevé va se maintenir avec ces crises, selon la façon dont elles se déroulent, où on criminalise des gens et on force des personnes à commettre des crimes et à faire le commerce du sexe pour survivre, et où les femmes s'exposent à un risque. C'est ce qui sera le coût élevé pour le Canada à long terme. Vraiment, ce qui est nécessaire, c'est faire la bonne chose, en donnant aux gens des lieux sécuritaires où consommer, où ils sont traités par des professionnels, où ils ont un accès sécuritaire à des médicaments qui ne vont pas leur nuire. Ça va permettre de réduire la criminalité, toutes ces choses qui, je crois, seraient vraiment importantes.
    La réadaptation suppose un approvisionnement sûr et une désintoxication où l'on offre des solutions de rechange sécuritaires aux drogues, en donnant aux gens quelque chose qui ne va pas leur nuire à long terme. Parmi les gens que nous voyons, beaucoup ont des problèmes de santé mentale et physique, des affections permanentes qui sont vraiment douloureuses, comme un cancer en phase terminale, et qui ont besoin de quelque chose pour le reste de leur vie. Ils s'autoadministrent des médicaments avec des choses qui vont leur nuire et qui aggravent en fait leur situation. Nous devons vraiment découvrir comment aider ces gens. Il y a beaucoup de moyens simples de le faire.
    Merci.
(0910)
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour du Pine River Institute. Commençons par Vaughan Dowie, pour 10 minutes.
    Merci, et nous aimerions remercier le Comité de nous avoir invités.
    Je m'appelle Vaughan Dowie et je suis directeur général du Pine River Institute. Je suis accompagné de ma collègue, Victoria Creighton, qui est notre directrice des services cliniques.
    Nous nous sommes dit que la meilleure contribution que nous pourrions apporter aux délibérations du Comité, ce serait de vous parler de l'importance des services de traitement des adolescents, particulièrement le traitement en résidence pour des jeunes ayant besoin de services pour des comportements de dépendance. Histoire de vous mettre en contexte, permettez-moi de vous parler un peu du Pine River Institute.
    Le Pine River Institute est un programme de traitement résidentiel pour les adolescents ayant des comportements de dépendance et, souvent, d'autres problèmes de santé mentale. Nous servons une population d'adolescents âgés entre 13 et 19 ans. Dans le cadre de notre mandat, nous acceptons les filles et les garçons de partout en Ontario. Notre principal campus est situé juste à l'extérieur de Shelburne, en Ontario, à environ 100 kilomètres au nord-ouest de Toronto. Nous exploitons 36 places, dont 29 sont financées par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l'Ontario. Pour ces 29 places, nous avons une liste d'attente de plus de 200 jeunes.
    Notre programme est unique au Canada. Tous nos élèves commencent par la phase en pleine nature du programme, que ce soit à Muskoka ou à Haliburton, selon la période de l'année. Nous sommes maintenant à la période de l'année de Haliburton. Puis, ils déménagent sur notre campus. Après un moment là-bas, ils passent de plus en plus de temps dans leur collectivité d'origine afin de mettre en pratique ce qu'ils ont appris dans le programme.
    Après leur transition du programme en résidence, nous offrons un soutien de suivi. Notre programme ne fonctionne pas seulement auprès des jeunes. La participation des familles au programme est un critère d'admission. Nous exigeons que nos familles participent au programme au moyen d'ateliers, de retraites et de groupes de parents réguliers, en plus du travail qu'elles font auprès de leur enfant.
    Pine River participe à des recherches continues. Plus particulièrement, depuis nos débuts il y a 12 ans, nous avons investi dans des recherches permanentes sur les résultats. Nous faisons le suivi d'un certain nombre d'indicateurs, particulièrement ceux liés à la consommation de substances, à la fréquentation de l'école ou à la participation au milieu de travail, aux communications avec le système juridique, aux hospitalisations et à d'autres indicateurs de crise, comme les fugues. Nous faisons le suivi de ces indicateurs avant l'admission et après la libération, et chaque année par la suite, jusqu'à ce que le jeune ait 25 ans, pour mesurer si le changement qui s'est produit est maintenu. Nous publions annuellement ces résultats comme moyen d'informer nos bailleurs de fonds, les clients éventuels et d'autres intervenants au sujet de nos résultats. J'ai apporté quelques copies du rapport le plus récent, si quelqu'un aimerait en avoir une.
    La philosophie clinique de Pine River est centrée sur le fait de tenter d'augmenter la maturité du jeune que nous voyons. Nous croyons que le jeune dans le programme affiche un certain retard sur le plan de la maturité. C'est peut-être causé par un traumatisme ou par d'autres obstacles. Nous définissons la maturité comme incluant une orientation future; une éthique sociale; la régulation des émotions; la capacité d'être autonome et de ne pas faire partie d'une relation à la manière d'une marionnette, que ce soit comme marionnette ou comme marionnettiste; l'empathie; ainsi que l'absence de narcissisme. Souvent, ces éléments sont aussi décrits dans des publications comme faisant partie de l'« intelligence émotionnelle saine ».
     Le programme de Pine River a une durée de séjour variable. Par cela, je veux dire que, contrairement à d'autres programmes dans le secteur où la durée de traitement est fixe — 21 jours, 90 jours, 4 mois, peu importe — nous permettons à nos élèves d'achever le traitement à leur propre rythme. Notre durée moyenne de séjour est d'environ 14 mois.
    Quant à la consommation de substances, la majorité de nos élèves consomment plusieurs substances. Ils vont consommer tout ce qui est disponible. Nous demandons à savoir quelle est la drogue de choix. La principale drogue de choix est le cannabis, mais aux fins de la présente séance, le Comité sera sûrement intéressé de savoir que nous demandons aux parents avant l'admission quelles substances le jeune consomme, et les résultats pour la méthamphétamine étaient les suivants.
    En 2015, 2 % de nos parents ont signalé une consommation de méthamphétamine pour leur enfant. En 2016, encore une fois, c'était 2 %. En 2017, la proportion s'élevait à 5 % et, en 2018, c'était 16 %. Comparons cela à ce que nos élèves déclarent eux-mêmes consommer: en 2015, c'était 18 % pour la consommation de méthamphétamine; en 2016, 53 % ont déclaré avoir consommé de la méthamphétamine; en 2017, le nombre s'élevait à 22 % et, jusqu'à présent cette année, nous nous situons à 16 %.
    Nous tirons de ces chiffres quelques conclusions. D'abord, de façon générale, la consommation de méthamphétamine a été beaucoup plus grande que ce qui était soupçonné, même par des parents qui sont vraiment préoccupés par le comportement ou les habitudes de leur enfant. Ensuite, même si les chiffres semblent fluctuer auprès de notre clientèle, c'est un facteur important dans les drogues qu'ils choisissent de consommer.
    Puisque le Comité essaie d'intégrer les perspectives variées concernant les enjeux découlant de la consommation de méthamphétamine au Canada, voici quelques points saillants que nous aimerions transmettre au Comité.
    D'abord, il est impératif d'investir dans des services pour les jeunes afin de traiter les problèmes sous-jacents le plus tôt possible. Ce n'est pas seulement la bonne chose à faire: c'est aussi logique sur le plan économique.
(0915)
    Nous travaillons avec la DeGroote School of Business de l'Université McMaster pour examiner le rendement social de l'investissement réalisé chez les jeunes de notre programme comme résultat du financement gouvernemental. La réponse se situait entre 7 et 10 fois le rendement de l'investissement. J'ai aussi apporté des copies de ce rapport si quelqu'un aimerait en avoir.
    Il doit y avoir une expansion importante des ressources résidentielles accréditées qui se consacrent aux jeunes. Notre liste d'attente de plus de 200 personnes témoigne de façon éloquente de l'absence de ressources de qualité pour les jeunes de ce groupe d'âge. Très souvent, les gouvernements hésitent à investir dans des programmes résidentiels, parce que ceux-ci se situent à l'extrémité la plus coûteuse du continuum, mais le travail auprès des jeunes qui consomment des substances est très important parce que, à mesure que le temps avance, les problèmes deviennent encore plus enracinés, ce qui fait en sorte qu'il est plus difficile d'apporter un changement dans leur vie et leur cerveau. Cette approche est aussi importante — voire encore plus importante — pour la méthamphétamine que pour toute autre substance.
    La sensibilisation du public devrait toujours être un volet de toute approche en matière de consommation de substances et elle devrait fournir des renseignements réels et crédibles au sujet des répercussions de la substance chez les jeunes. Autrement, nous nous appuyons sur le bouche-à-oreille et sur de mauvais renseignements qui minimisent souvent les méfaits possibles.
    Nous félicitons le Comité de son intérêt à l'égard de ce sujet important. Les complexités des enjeux qui sont liés à la consommation et à l'abus de méthamphétamine exigent une réponse à multiples facettes. Dans le cadre de cette réponse, nous demandons au Comité qu'il se rappelle le besoin de fournir des services de traitement efficaces pour les jeunes dans le cadre de notre approche nationale.
    Nous passons maintenant à notre première série de questions. Nous commencerons par mon collègue, Robert-Falcon Ouellette, pour sept minutes.
    Merci beaucoup à vous tous d'être venus ici aujourd'hui. Je vous en suis très reconnaissant.
    Nous n'avons que sept minutes. J'aimerais poser à chacun d'entre vous un certain nombre de questions brèves.
    James, je me demandais si vous pourriez parler un peu plus du cycle de « la rue, l'hôpital, la prison, et ça recommence » dont vous parliez. De plus, j'aimerais que vous parliez des magasins qui vendent plus de pipes à crack, des deux seules épiceries qui se trouvent dans un certain rayon et des répercussions de cela pour un environnement, ainsi que de la façon dont les gens accèdent à des aliments de qualité.
    Nous vivons dans un désert alimentaire dans notre collectivité, et un de nos plus grands problèmes concerne les dépanneurs qui se trouvent dans notre collectivité. Tout est trop cher là-bas, et vous ne pouvez pas vraiment obtenir de bons aliments sains dans ces magasins. Les pipes à crack, les bongs, les feuilles et tous ces types de choses se retrouvent là-bas, mais il n'y a pas d'aliments. Il y a dans notre collectivité un Safeway et aussi un Sobeys Cash and Carry. Ce sont les seuls magasins accessibles à l'intérieur de nos limites communautaires. Le magasin Sobeys Cash and Carry est un peu à l'écart dans un coin difficile d'accès pour la plupart des membres de la collectivité.
    Désolé, quelle était l'autre question?
    La rue, l'hôpital, la prison, et ça recommence...
    Exact. C'est ce que nous voyons. Nous voyons les membres de notre collectivité qui sortent de prison, qui redeviennent dépendants, qui sont en proie à des ennuis, qui vont à l'hôpital et se retrouvent en établissement carcéral. C'est ce qui arrive sans cesse. En ce moment, deux de nos bénévoles sont pris dans ce cycle. Hier soir, je m'en suis occupé jusqu'à 3 heures du matin.
    Dites-vous qu'il n'y a pas assez de soutien lorsque des gens sont en fait libérés de l'établissement carcéral?
    Il n'y a pas assez de soutien quand les gens sont libérés de l'établissement carcéral. Le système d'aide à l'emploi et au revenu est punitif, en quelque sorte. Dans notre collectivité, on offre environ 100 $ par mois pour de la nourriture aux gens qui sortent et ont besoin de ce service. Si vous sortez d'un établissement carcéral et qu'on vous donne 97 $ par mois pour survivre, cela ne va pas entraîner des résultats positifs.
    Merci beaucoup, James.
    Darlene, j'aurais quelques questions. Vous avez mentionné que des infirmières ont proposé un lieu réservé aux consommateurs. Pourriez-vous en parler un peu plus?
    Je crois que nous reconnaissons que la méthamphétamine est une drogue différente des opioïdes. Elle crée une très forte dépendance, elle est incroyablement accessible et elle est peu chère. Nous comprenons que le traitement pour une personne aux prises avec une dépendance à la méthamphétamine devra être totalement différent de celui d'une personne qui a une dépendance différente. Cela doit être un traitement à long terme. Je peux certainement répondre à James quand il parle des cliniques d'ARTT, les cliniques d'accès rapide pour le traitement de la toxicomanie. Je crois que c'est une idée fantastique. Toutefois, deux heures par jour ne sont pas suffisantes.
    J'ai travaillé à l'urgence. J'ai travaillé dans les soins de santé pendant des années, et c'est comme tout le reste. Quand quelqu'un qui a une dépendance prend la décision de changer sa vie, cela doit se passer à ce moment-là. Vous ne pouvez pas lui dire: « J'ai un lit de soins pour vous dans trois mois », parce qu'elle sera alors de retour dans la rue et aura perdu ce besoin de changement. Nous devons être très proactifs. Nous devons être prêts. Quand ce client est prêt, quand ce patient est prêt, nous devons être là pour lui afin de lui fournir ces soins. Ce doit être une intervention à long terme, et il doit y avoir un soutien après le traitement pour faire en sorte que celui-ci soit maintenu.
(0920)
    Dans les salles d'urgence, parce qu'il y a des problèmes de dépendance à la méthamphétamine — vous avez parlé de quatre à cinq heures par jour — qu'est-ce que cela suppose pour les consommateurs ou d'autres patients qui veulent se rendre à cet établissement, pour les enfants et d'autres personnes qui pourraient vouloir aller au Centre des sciences de la santé ou à toute autre salle d'urgence de soins de santé?
    Nos services d'urgence ont été fermés. Nous en avons perdu deux et nous en perdrons un troisième, ce qui veut dire que notre ville a trois points d'accès aux urgences.
    Un des problèmes que nous avons relevés, c'est que le Centre des sciences de la santé se trouve en plein coeur de la ville. De nombreux résidants qui vivent dans cette zone centrale n'ont pas accès à un taxi ou à un autobus pour se rendre dans un établissement de soins d'urgence ou dans une clinique sans rendez-vous.
    Malgré le fait que notre gouvernement et notre autorité régionale de la santé à Winnipeg parlent des « bons soins, au bon moment et au bon endroit », au final, bon nombre de nos personnes qui vivent dans ces régions n'ont pas accès aux bons soins. Ils n'ont aucune façon de s'y rendre. Ils se rendent à l'établissement le plus proche, qui est notre Centre des sciences de la santé, parce qu'ils n'ont pas le choix. Ils n'ont nulle part d'autre où aller. Le fait de prendre un taxi pour se rendre à l'Hôpital général de Victoria est tout à fait hors de leur tranche de revenu.
    Le fait de dire que vous devez être au bon endroit, au bon moment et pour les bons soins est un lieu commun. Cela ne fonctionne pas pour les collectivités dans cette région. Je crois qu'une partie du problème tient au fait que bon nombre de nos patients qui se présentent avec un problème associé à la méthamphétamine sont instables; les choses peuvent changer. En un instant, tous leurs comportements changent. Souvent, ils ont besoin de beaucoup de ressources pour être en sécurité et pour que les fournisseurs et d'autres patients le soient aussi, ce qui veut dire que l'attente pour d'autres patients dans nos services d'urgence est plus longue.
    Merci beaucoup, Darlene.
    J'ai deux dernières questions: une pour Sarah et une autre pour Darlene.
    Vous avez parlé de formation. Je me demandais si vous pouviez, en 30 secondes environ, aborder l'idée de la formation pour les infirmières et d'autres professionnels de la santé, et la façon dont cela doit être augmenté.
    De plus, j'aimerais entendre Sarah parler d'autoadministration d'analgésiques et de produits pharmaceutiques, et de la façon dont les gens obtiennent des produits pharmaceutiques légaux contrairement à des drogues illégales.
    Vous avez chacune 30 secondes.
    J'essaierai d'être brève. La brièveté est mon point fort.
    Je crois que nous devons assurément examiner la formation spécifique concernant des problèmes liés à la méthamphétamine pour le personnel hospitalier, et c'est beaucoup plus important que la prévention de la violence. Nous devons parler de la façon de protéger de façon sécuritaire vous-même, vos autres patients et leur famille. C'est un enjeu important, parce que notre gouvernement et nos employés n'ont pas investi dans cette formation. Comme une infirmière l'a dit: « nous n'avons pas appris comment composer avec la méthamphétamine dans nos cours et nous n'avons aucune façon d'apprendre comment composer avec elle maintenant, à moins que quelqu'un prenne le temps de nous le montrer. »
    Sarah.
    Nous avons à Vancouver un endroit qui s'appelle la clinique Crosstown. Personne n'en a probablement entendu parler, sauf peut-être Don et quelques autres personnes. Elle fournit à environ 100 personnes un accès sécuritaire à de l'héroïne. C'est injectable, et des médecins sont présents pour les aider. C'est un très petit programme, et c'est prouvé que les gens qui utilisent ce programme chaque jour reprennent en quelque sorte une vie normale.
    Ce serait probablement vraiment génial si nous avions ce même type de programme pour les stimulants. Je veux dire que ce serait une excellente idée, parce que le fait d'amener des gens à consommer des stimulants quand ils connaissent leur dose est... Très souvent, les gens ignorent quelle est la dose, et donc, s'ils prennent un stimulant, nous ne savons pas quelle en est la force. S'ils prennent un stimulant vraiment très fort, ne connaissent pas la dose et ne savent pas ce qui le compose, il est plus probable qu'ils connaîtront un épisode psychotique ou feront immédiatement une psychose, particulièrement s'ils se l'injectent.
(0925)
    Je dois vous arrêter. Votre temps est écoulé.
    Passons maintenant à mon collègue, Ben Lobb.
    Merci beaucoup.
    Voici ma première question. Il y a eu un cas récent en Ontario où une personne de 27 ans a été accusée de trafic de nombreuses drogues. Parmi ce qu'il possédait, on comptait 316 grammes de méthamphétamine, 149 grammes d'héroïne, 5,6 kilogrammes de cocaïne et 8,1 kilogrammes de marijuana. L'avocat de la Couronne propose une peine de six à huit ans. Son avocat croit qu'une peine de cinq ans serait appropriée pour ce trafiquant de drogues.
    Je sais que vous n'êtes pas ici pour donner des opinions sur le système juridique, mais mon argument, c'est que 316 grammes de méthamphétamine correspondent à 316 doses de méthamphétamine. Il est en train de détruire des dizaines, voire des centaines de vies, peut-être, et il coûte au système des dizaines de millions de dollars — peut-être des centaines de millions de dollars — et sa peine pourrait être de cinq ans. Est-ce juste ou devons-nous aussi nous pencher sur cette question?
    À mon avis, plus nous donnons aux gens un accès sécuritaire à des drogues, plus nous éliminons complètement du tableau les gens comme lui. Il est nécessaire que les gens obtiennent un accès sécuritaire à des drogues administrées et qu'ils soient vus et soignés par des professionnels médicaux. Je crois que c'est vraiment la meilleure solution pour le gouvernement. C'est quelque chose que le gouvernement...
    Lorsque vous parlez de « drogues administrées », parlez-vous d'une dose de méthamphétamine en cristaux?
    Oui, ou un stimulant de remplacement.
    Les gens doivent obtenir des soins. Certaines personnes choisissent de consommer des drogues, mais beaucoup le font parce qu'ils s'autoadministrent des médicaments pour une diversité de raisons et ont besoin de soins médicaux. Beaucoup de ces gens sont parmi les plus vulnérables de la société. Nous devons faire quelque chose que nous n'avons pas fait auparavant.
    D'accord.
    Monsieur Dowie, je viens de l'Ontario et je ne suis pas très loin de Shelburne. En ce qui concerne les 28 ou 29 places que votre établissement possède et pour lesquelles l'Assurance-santé de l'Ontario ou le réseau de santé local paie, une personne qui prend de la méthadone peut-elle venir dans votre établissement pour obtenir une place payée par le Régime d'assurance-maladie de l'Ontario, le RAMO?
    Pas si elle prend de la méthadone, mais oui, si elle prend de la suboxone, et la raison est relativement simple. Comme je l'ai dit, pour commencer, nous envoyons les gens dans le programme en pleine nature. En Ontario, pour pouvoir administrer de la méthadone, vous devez être membre d'un collège de sciences de la santé, que ce soit en tant que médecin, infirmière, pharmacien ou quoi que ce soit. Nos employés dans le bois, parce qu'ils sont dans le bois, ne sont pas en mesure de le faire. Ce ne sont pas des membres du collège, et ils ne peuvent dont pas administrer en toute sécurité de la méthadone. Ils ne peuvent pas se rendre à la pharmacie locale, parce que...
    La suboxone est semblable — je ne suis pas pharmacien — mais ce n'est pas exactement la même chose, n'est-ce pas?
    Vous pourriez l'administrer. Essentiellement, c'est une pilule à administrer. Vous n'avez pas besoin d'être un professionnel de la santé pour le faire.
    Dans ce cas, pourquoi les médecins ne prescrivent-ils pas aux gens de la suboxone plutôt que de la méthadone?
    Je ne peux pas répondre à cette question. Je crois qu'un changement est en train de se produire. On prescrit un peu moins de méthadone et un peu plus de suboxone.
    Cela semble un peu contraire à l'éthique. Un certain nombre de personnes sont venues dans notre bureau, et elles n'ont pas d'argent. Leurs parents ont dépensé l'argent de leur retraite pour essayer de les aider, et elles ne peuvent obtenir d'accès.
    Je ne veux pas vous critiquer. Je critique en quelque sorte le gouvernement ou les médecins qui ne devraient pas prescrire ce médicament. Ils devraient aider leurs patients à obtenir une place payée par le RAMO — si c'est en fait possible d'en obtenir une.
    Dans beaucoup de régions métropolitaines, le fait de se rendre dans une clinique de méthadone ou ailleurs n'est rien de plus qu'une difficulté. Vous pouvez aller voir le pharmacien et obtenir votre méthadone là-bas. Nous sommes une exception, parce que nous sommes dans le bois et ne pouvons donc pas l'administrer en toute sécurité.
(0930)
    Qu'en est-il du coût d'une place? J'ai lu un article concernant London et Windsor en Ontario où l'on disait que 20 places pourraient coûter de 5 à 15 millions de dollars. Comment est-il possible qu'il y ait un si grand écart? Dans l'industrie, quel est le coût d'une place?
    Comme beaucoup de choses dans la vie, cela dépend. Pour nous, le coût d'un lit d'hôpital est d'environ 460 $ par jour. Ce que nous recevons du gouvernement représente en réalité environ 412 $, ce qui nous donne environ 4,3 millions de dollars pour les 29 places. Cela dépend de votre modèle de dotation et de la façon dont c'est fait. Par exemple, nous sommes plus intenses que d'autres programmes sur le plan clinique, en ce sens que nous avons plus de thérapeutes qui participent, donc c'est un peu plus cher.
    Pour ce qui est des coûts associés au lit d'hôpital, ce sont les coûts de la main-d'oeuvre, les coûts de l'établissement, les coûts des aliments et toutes les autres choses connexes. Votre modèle de dotation est un élément important. Je dirais que le coût d'une place pour un jeune en Ontario, soit tout ce dont je peux parler avec certitude, se situe probablement entre 300 et 450 $ par jour.
    M. Falcon Ouellette et moi-même avons déjà eu un appartement dans le même complexe du centre-ville. Dans le centre-ville ici — je suis sûr que M. Falcon Ouellette a vu la même chose — il y a trois refuges, et je ne critique pas les refuges quand je dis qu'ils sont les épicentres des problèmes sociaux. Juste durant la période que j'ai passée là-bas, j'ai vu des gens s'injecter des drogues dans les escaliers de mon condo, là où vous entrez. J'ai vu des gens s'évanouir et se fendre le front. J'ai vu une multitude de choses comme l'ont probablement vu de nombreuses personnes dans leur propre collectivité.
    Ce que je ne n'arrive pas à comprendre, c'est le fait qu'il y ait un flux incessant de véhicules du service d'incendie, des ambulances, des véhicules des services médicaux d'urgence et des policiers. C'est juste un cercle continu. Je me dis ceci: si votre coût est d'environ 4 millions de dollars par année, pourquoi le gouvernement provincial ou fédéral ne s'associerait-il pas à la ville et n'offrirait-il pas 200 places? Le coût des services de police et des services médicaux d'urgence doit être 10 fois, voire 100 fois plus élevé.
    Où est la rupture ici entre les gouvernements et les gens qui savent en réalité ce qu'ils font?
    Je vais répondre très rapidement.
    Comme je l'ai dit, nous avons effectué une étude sur le rendement social de l'investissement. Nous sommes en mesure de montrer que, pour chaque dollar que le gouvernement investit dans nos programmes ou dans le traitement des jeunes de façon générale, il obtiendra un rendement décuplé.
    Pourquoi les gens ne font-ils pas ces calculs? Je dirais que c'est probablement parce que le gouvernement pense vraiment à court terme, un mandat à la fois, et que ce sont des retombées sur plusieurs mandats. Je crois que ça fait partie de l'équation.
    Votre temps est écoulé.
    Passons maintenant à M. Davies, pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à vous tous d'être ici. Je peux vous dire que votre expérience de première ligne où vous vous occupez de tout l'éventail de la consommation de substances et de la dépendance est puissante, et c'est quelque chose dont le Comité a vraiment besoin.
    Je vais faire quelque chose d'un peu différent.
    Vous avez tous répondu à toutes les questions que je me posais en décrivant de façon très exacte l'origine des problèmes. Je vais donc reprendre quelque chose qui a été dit. Je crois que Mme Blyth a dit les mots « faire quelque chose que nous n'avons pas fait », et une autre personne a mentionné que nous avons besoin d'un changement fondamental des politiques.
    Voici les réponses que je vous ai entendu donner aux questions que j'allais poser, mais c'est maintenant redondant.
    J'ai entendu dire qu'il y a une contamination généralisée de l'approvisionnement en drogues partout au pays. J'ai des chiffres et des statistiques qui en font état. En fait, 39 % des drogues dépistées récemment en Colombie-Britannique n'étaient pas du tout ce que l'acheteur croyait se procurer. J'ai entendu Mme Jackson dire que la cocaïne est en fait de la méthamphétamine, donc nous savons qu'il y a une contamination généralisée.
    Nous savons qu'il existe — appelons juste un chat un chat — un accès très inadéquat à un traitement opportun au pays, et ce, de façon générale, dans chaque modalité, dans chaque population, des Autochtones jusqu'aux jeunes, en passant par les femmes. Que vous soyez aux prises avec l'alcool ou toute autre substance, jusqu'à l'héroïne, les gens ne peuvent obtenir d'accès quand ils en ont besoin. S'il y a une chose que nous savons au sujet de la dépendance, c'est que, lorsqu'une personne cherche à obtenir un traitement — si elle est jamais prête à obtenir un traitement —, vous devez la faire venir immédiatement, sinon c'est une condamnation à mort.
    Monsieur Favel, je crois que vous avez décrit ce cycle sans fin, cette approche du 19e siècle à l'égard de la consommation de drogues et de la dépendance, où on la traite comme un problème criminel plutôt que comme un problème de santé.
    Je vais aborder directement ce qui sont, à mon avis, certaines des solutions fondamentales, et j'aimerais obtenir votre opinion à ce sujet.
    Je m'adresse à chacun d'entre vous: n'est-il pas temps que nous cessions de traiter la consommation de drogues et la dépendance comme un problème criminel et que nous commencions à les aborder comme un problème de santé?
(0935)
    C'est ce que je répète depuis des années.
    Merci.
    Madame Jackson.
    Même si le Manitoba Nurses Union n'a pas de position sur la décriminalisation, nos infirmières estiment que nous devons traiter les patients. Nous devons être là pour fournir un traitement et redonner la santé aux patients. Le fait de les incarcérer ne règle pas ce problème.
    Madame Blyth.
    Je vois des gens qui sont incarcérés et qui sortent des établissements carcéraux. Même les policiers à qui je parle, les ambulanciers, les pompiers, tout le monde sait que nous avons besoin de donner aux gens un accès sécuritaire à quelque chose qui ne va pas les tuer. C'est le premier principe du traitement de première ligne, tout particulièrement en ce qui concerne les gens qui ont une dépendance depuis de nombreuses années. Ils ont besoin d'une personne vers qui aller. Les organisations comme notre site de prévention des surdoses sont la première ligne du rétablissement. Elles ont besoin de gens pour les aider.
    Je crois que c'est tout ce que j'ai à dire à ce sujet.
    Monsieur Dowie ou madame Creighton.
    J'aimerais juste dire que le traitement fonctionne. Il fonctionne quand vous travaillez auprès de la famille, que vous travaillez avec la collectivité et que vous vous focalisez au-delà des symptômes, lorsque vous examinez vraiment les désirs sous-jacents d'un enfant. Cela apporte un changement. Ils auront une vie qui vaut la peine d'être vécue.
    Monsieur Dowie ou madame Creighton, quelle est la liste d'attente actuelle?
    Je crois que vous avez mentionné le nombre de personnes. Quelle est la liste d'attente actuelle pour les places subventionnées par le gouvernement au Pine River Institute pour les jeunes?
    Ce sont 200 jeunes et une attente d'environ un an et demi.
    Je suis un parent. J'ai un enfant de 14 ans qui prend de la méthamphétamine en cristaux. Je viens vous voir et je vous dis que mon enfant a besoin d'un traitement. Vous me dites de revenir dans un an et demi.
    Je vous dirais que nous allons vous mettre sur la liste d'attente et que vous devriez regarder ailleurs.
    Nous n'encourageons pas les gens à attendre en l'absence de services. Nous disons que nous allons vous mettre sur une liste d'attente, mais que vous devriez essayer d'autres options.
    D'accord.
    Ma prochaine question, c'est que si nous traitons le trouble de la toxicomanie et de la consommation de substances comme un problème de santé, notre système de santé ne le traite certainement pas de la même façon. Si j'ai besoin de subir une intervention cardiaque au cours de la prochaine semaine et que vous me dites de revenir dans un an et demi, nous n'accepterions pas cela, mais nous le faisons avec la consommation de substances.
    Est-il temps de dire que nous avons besoin d'un investissement public important — je vais dire « massif » — dans les établissements de traitement au pays?
    Absolument, nous sommes dans une bien mauvaise situation en ce moment. Si les choses ne changent pas rapidement, nous serons dépassés par cette situation. En ce moment, cela ne fait que quatre ans, et nous pouvons toujours changer les choses.
    Je vais me tourner vers vous, parce que vous dirigez un centre de traitement, monsieur Dowie.
    Absolument, le besoin surpasse largement la capacité, et les gouvernements doivent investir. Je suis d'accord pour dire que « massif » est le bon mot.
    Merci.
    Madame Blyth.
    Je crois que cela va coûter à notre pays beaucoup plus d'argent si nous maintenons la façon de faire en ce moment et que nous devons faire quelque chose que nous n'avons pas fait auparavant. C'est une crise de santé nationale. Nous devons la désigner comme telle et avancer de façon importante, autrement, nous aurons de gros ennuis.
    Madame Jackson.
    Je vais vous raconter une histoire rapidement, et je sais que je ne suis pas toujours rapide. J'ai parlé à une infirmière de l'unité de soins néonatals intensifs, où l'on voit de nombreux bébés de mères toxicomanes, et ce qu'elle me disait, c'est que les femmes qui ont une dépendance vont tomber enceintes pour contourner la file d'attente et obtenir un lit de traitement. Nous avons un besoin désespéré de lits de traitement.
    Madame Blyth, rapidement, en ce moment, votre site de prévention des surdoses fonctionne-t-il légalement ou illégalement dans le pays?
    Il fonctionne au motif que c'est une crise provinciale. Nous n'avons pas d'exemption fédérale, mais il fonctionne en raison de la crise provinciale.
(0940)
    Obtenez-vous du financement du gouvernement fédéral?
    Non, nous n'en recevons pas.
    J'ai travaillé dans des refuges dans le Downtown Eastside pendant des années, dans le secteur du logement. Notre personnel est parmi les meilleurs pour ce qui est de s'occuper de gens qui se présentent et sont en crise. Nous avons des gens d'InSite, mais cela peut être très difficile, et nous ne recevons certainement pas le soutien dont nous avons besoin. Nous pourrions utiliser une certaine aide fédérale, juste comme centre pour des gens, de sorte qu'ils n'aient pas à aller à l'hôpital; ils peuvent venir vers nous. Nous avons besoin d'aide supplémentaire.
    Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il doit y avoir un lieu qui est distinct pour les consommateurs de drogues afin qu'ils puissent obtenir l'aide dont ils ont besoin, avec des infirmières et aussi des employés qui sont formés pour aider des gens qui vivent une crise de santé mentale.
    Passons à M. Eyolfson, pour sept minutes.
    Merci à vous tous d'être venus.
    Madame Jackson, merci de vos bons mots sur l'étude sur la violence. J'aimerais transmettre mes remerciements à Sandi Mowat, votre prédécesseure, qui a aidé à défendre cette question.
    Comme vous le savez, j'ai été urgentiste pendant 20 ans et j'ai passé les 8 dernières années au Centre des sciences de la santé.
    J'ai un certain nombre de questions par rapport à tout cela. Vous avez fait une assez bonne observation que, je crois, le public doit comprendre. Vous avez parlé d'infirmières qui voient la violence dans des hôpitaux différents. Diriez-vous que c'est quelque chose, particulièrement du point de vue de Winnipeg, que vous voyez dans tous les quartiers et partout dans la ville?
    Nous la voyons assurément maintenant dans nos services d'urgence. Cela a en quelque sorte changé la donne, parce que Winnipeg n'a plus de circonscription hospitalière pour les ambulances. Donc, s'il y a un client dans la zone centrale qui se trouve à deux pâtés de maisons du Centre des sciences de la santé et qu'une ambulance est appelée, celui-ci peut être amené à l'hôpital Concordia, qui se trouve de l'autre côté de la ville. Il n'y a plus de circonscription hospitalière. Ce qui était autrefois le plus grand problème du Centre des sciences de la santé se transforme maintenant en plus grand problème pour tous les établissements qui fournissent des services d'urgence.
    Merci.
    Vous avez parlé du contrôle des infections. C'est quelque chose dont nous nous sommes occupés. J'ai toujours défendu les centres de consommation supervisée par rapport à la question du contrôle des infections. Les gens disent que nous ne devrions pas gaspiller d'argent là-dessus, mais quand l'hépatite C coûte 300 000 $ par année à traiter et que le VIH coûte environ 1 million de dollars au cours de la vie du patient, soudainement, l'argent semble bien dépensé à ce moment-là.
    Savez-vous s'il y a des renseignements qu'on pourrait obtenir par l'entremise des hôpitaux sur l'incidence de maladies transmissibles par le sang chez les gens qui ont des problèmes liés à la méthamphétamine, que cette population ait ou non l'hépatite C et le VIH?
    Madame Blyth, vous pourriez peut-être nous aider à ce sujet également.
    Je sais que cela se transmet par des pipes et que des pipes propres seraient utiles. Je ne connais pas les statistiques, mais je sais que des pipes propres, de l'équipement propre, des seringues propres, de toute évidence, font la même chose.
    Très bien.
    Madame Jackson.
    Je n'ai pas de statistiques pour vous, mais je sais que le fait d'avoir un programme d'échange de seringues ou de fournir des sites d'injection supervisée, absolument, il y aura un coût, mais ce sera un gain d'efficience, et cela vous permettra au final d'économiser de l'argent. Lorsqu'une personne consomme de la méthamphétamine, s'injecte une drogue et a besoin d'un remplacement valvulaire, c'est un coût énorme pour le système de santé. Nous avons des personnes qui ont consommé pendant de nombreuses années, qui ont subi plus d'un remplacement de valvule, et c'est donc un coût énorme pour le système, mais c'en est aussi un pour notre programme cardiaque.
    Nous savons que nous annulons des interventions chirurgicales. Nous manquons de places et de personnel dans ce programme. Je crois que les sites d'injection supervisée et que les échanges de seringues, les seringues propres, feront économiser de l'argent et sauveront des vies, absolument.
    Merci.
    Comme vous le savez, notre gouvernement provincial actuel et, je crois, le nouveau gouvernement provincial de l'Ontario, sont en fait très réticents au concept des sites de consommation supervisée. Ils affirment qu'il n'y a pas de besoin pour cela à Winnipeg. Que répondriez-vous à cela?
    Je parle aux infirmières. Ce sont les personnes qui me donnent les renseignements, et je peux vous dire qu'ils ont tort. Il y a une crise qui s'aggrave chaque jour. J'ai des infirmières qui ne veulent même plus aller travailler. En fait, une infirmière m'a dit: « Je sais que, chaque jour quand je vais au travail, je serai agressée. Je prie seulement pour ce que soit une agression verbale et non une agression physique. » Je crois que c'est une honte terrible. Je crois que le gouvernement se cache la tête dans le sable par rapport à cette question.
(0945)
    Merci. Je suis d'accord avec vous au sujet des conséquences de l'agression. J'ai été agressé deux fois dans ma carrière d'urgentiste, et cela a tendance à vous secouer et à vous rendre un peu plus hésitant à retourner au travail.
    Madame Blyth.
    Je veux juste dire que nous sommes formés, et j'ai été formée, au fil du temps, pour réduire la violence. On peut le faire, mais vous avez besoin d'une formation appropriée pour le faire. C'est très difficile pour les infirmières dans cet environnement, je crois.
    Merci.
    Monsieur Favel, que répondriez-vous au gouvernement du Manitoba qui dit que Winnipeg n'a pas besoin de sites d'injection supervisée?
    Je dirais qu'il a tort. Comme je l'ai dit, nous voyons que les toxicomanes sont de plus en plus jeunes. Nous en voyons de plus en plus. Comme je l'ai dit, il y a, année après année depuis nos débuts, une augmentation décuplée dans notre collectivité. C'est incroyable. L'an dernier, nous avons récupéré 4 000 seringues, et je ne croyais pas qu'il était possible de trouver 40 000 seringues cette année; or, c'est ce qui est arrivé. L'Office régional de la santé de Winnipeg prévoit distribuer 1,5 million de seringues dans notre collectivité au nom de la réduction des méfaits. J'y suis entièrement favorable, mais on doit le faire de façon holistique. On doit tenir compte des besoins des membres de notre collectivité également. À l'été, nous avons des enfants qui courent pieds nus dans nos collectivités, et nous sortons cinq et six soirs par semaine pour nous assurer qu'ils peuvent le faire en toute sécurité. Nous n'arrivons pas à suivre le rythme.
    Absolument. Je n'arrive pas à imaginer le tableau. J'ai grandi à Winnipeg, et c'est quelque chose que nous n'avions pas l'habitude de voir.
    À notre première année, nous avons vu 18 seringues; la deuxième année, 300; l'an dernier, 4 000; et cette année, 40 000.
    Hallucinant.
    Madame Blyth, vous travaillez dans un centre de consommation supervisée. En réalité, je n'ai jamais entendu dire cela dans une publication avec comité de lecture, mais j'entends les commentaires des gens, qui vont dire: « Je suis allé dans un de ces quartiers et j'ai parlé à quelqu'un qui a dit », et on affirme qu'il y a des augmentations de la criminalité et de la consommation de drogues dans les régions où ces centres sont établis. Que répondez-vous à cela?
    Celui que nous avons établi se trouve dans une des deux ruelles les plus utilisées pour la consommation de drogues, et c'était déjà le cas avant qu'on s'y installe. Ce que je répondrais, c'est que vous devriez établir un centre à l'endroit où les gens consomment des drogues, de manière à éviter les répercussions sur les quartiers. De plus, nous nous assurons que des bénévoles dans le quartier récupèrent régulièrement les seringues dans la ruelle où ils se trouvent, même si elle regorgeait de seringues par le passé.
    L'important, pour les consommateurs de drogues injectables, c'est que nous nous débarrassons de toutes les seringues qui se trouvent là-bas. Il pourrait y en avoir beaucoup plus dans les rues, comme des barils. Il y en a par barils. Nous voyons 700 personnes par jour et nous nous assurons que ces seringues ne se retrouvent pas dans la rue. C'est un lieu pour inviter à l'intérieur des gens qui se trouveraient autrement dans les rues et les ruelles.
    Passons maintenant à M. Webber, pour cinq minutes.
    Je parlais brièvement à Sarah, juste un peu plus tôt, de ma visite dans le Downtown Eastside de Vancouver. J'étais dans votre coin. Je suis allé dans les ruelles et j'ai vu les seringues partout et la dévastation. Je recommanderais à tout le monde ici de s'y rendre juste pour voir la réalité, qui est bouleversante. Elle l'est vraiment.
    J'ai été en mesure de rencontrer le Dr Gabor Maté, un expert des dépendances. Il a reçu l'Ordre du Canada pour son travail sur le traitement des dépendances. C'était vraiment une fin de semaine enrichissante.
    Une chose que j'aimerais vous demander, Sarah, au sujet des drogues contaminées ou de la méthamphétamine que l'on retrouve là-bas, c'est s'il y a une façon de tester la méthamphétamine pour déterminer si elle est dangereuse ou non.
    Oui, nous avons un appareil d'analyse des drogues auquel nous avons accès quelques jours par semaine, puis nous pouvons tester toutes les drogues qui arrivent. Je pense que ce sont 100 000 drogues et d'autres drogues analogues, y compris... Vous pourriez être surpris par ce que les gens s'injectent dans le corps sans connaître la puissance des drogues. Je crois que même les points de vue les plus conservateurs sur la question, vraiment, en ce qui concerne l'approvisionnement sécuritaire en drogues, en toute honnêteté... quand il s'agit de vraiment la comprendre, c'est vraiment la chose la plus importante que nous devons faire pour mettre fin à la criminalité, à tout.
(0950)
    Nous avons besoin d'un plus grand accès à des appareils d'analyse des drogues afin de déterminer...
    Je ne sais pas si vous le connaissez, mais le Dr Mark Tyndall, du Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique, aimerait proposer un projet pilote afin de faciliter pour les gens l'accès sécuritaire à l'héroïne. Je crois que cela inclurait aussi des stimulants, parce que les gens en consomment.
    J'ai quelques questions par rapport aux seringues. Elles sont partout dans East Hastings. Elles sont distribuées gratuitement par InSite. Vous pouvez obtenir des seringues sécuritaires partout dans cette région; pourtant, il y a des personnes diabétiques qui n'ont même pas les moyens de se payer des seringues, et elles réutilisent donc celles qu'elles possèdent. Elles n'ont pas d'accès à des seringues gratuites, mais on dirait que les toxicomanes, si.
    Par exemple, James, les 40 000 seringues que vous avez trouvées, où les personnes se les procurent-elles? Les achètent-elles ou...?
    Street Connections les leur donne gratuitement. Il doit y avoir un processus de récupération des seringues plus strict pour nos collectivités. Si on distribue 100 seringues, on pourrait aussi distribuer un contenant à aiguilles. J'aimerais beaucoup mieux ramasser des centaines de contenants à aiguilles que de milliers et des milliers de seringues.
    Exact.
    Nous avons aussi eu une demi-douzaine de nos bénévoles qui se sont piqués en faisant ce travail. C'est stressant.
    Je ne comprends juste pas pourquoi les personnes diabétiques n'obtiennent pas aussi des seringues gratuitement.
    Si elles se désignent comme toxicomanes, elles peuvent en obtenir gratuitement.
    L'essentiel, c'est la prévention des maladies. C'est moins cher de donner aux gens une seringue que de leur faire subir tous les traitements de l'hépatite ou du VIH à long terme.
    J'ai une question rapide pour M. Dowie ou Mme Creighton.
    Vous avez parlé du coût d'une place, des 460 $ par jour et des 412 $ que vous recevez du gouvernement. Qui paie le reste, le patient ou sa famille?
    Nous demandons le paiement de quelques frais du programme, mais si une personne n'en a pas les moyens, ce n'est pas un obstacle au traitement. Nous travaillons avec une fondation. Elle pourrait frapper à votre porte la semaine prochaine pour vous demander de l'argent, donc c'est un peu de travail qui est fait sur le terrain.
    Ce sont des bénévoles, d'accord.
    James, faites-vous juste du bénévolat au Bear Clan Patrol?
    Nous avons 1 500 bénévoles à Winnipeg et 6 employés à temps plein et à temps partiel.
    Encore une fois, comment obtenez-vous l'argent pour le personnel rémunéré?
    Pour l'instant, nous obtenons la majeure partie de l'argent pour les salaires grâce à des dons privés. Tout récemment, la province est allée à la table et nous a donné quelques centaines de milliers de dollars, mais ce sont tous des fonds réservés, et ils ne sont pas accessibles pour les salaires. Même mon salaire est compromis après janvier.
    La naloxone est utilisée comme antidote au fentanyl, mais il n'y a rien pour la méthamphétamine. La police à East Hastings dit que, lorsqu'elle utilise la naloxone sur certains de ces patients qui font une surdose, ceux-ci sortent de leur état drogué, puis deviennent violents parce qu'ils sont fâchés. Ils sont fâchés parce qu'on les a faits sortir de leur high alors qu'ils ont travaillé très fort pour l'obtenir.
    Est-ce que ce serait une des raisons pour lesquelles les gens migrent vers les méthamphétamines, parce que c'est une drogue qui a un effet plus durable pour eux?
    Oui. Dans le Downtown Eastside, beaucoup de gens consomment tout ce qui est disponible et le moins cher. Je me suis occupée d'un très grand nombre de personnes souffrant de surdose — vous ne pouvez même pas vous imaginer — et je ne vois pas de gens se lever et devenir violents de cette façon-là. Les gens se fâchent. Parfois, ils pleurent. Ils ne savent pas ce qui leur est arrivé.
    Tout dépend de qui se trouve au-dessus d'eux, du fait de savoir si la personne est gentille et bonne pour eux, et les rassure. Si vous vous réveillez, ne savez pas où vous êtes et qu'un policier est au-dessus de vous, ce pourrait être un peu effrayant pour certaines personnes.
    Je n'en suis pas vraiment certaine, mais je peux vous dire que tout dépend de la façon dont vous abordez la situation.
    Passons maintenant à M. McKinnon, pour cinq minutes.
(0955)
    Merci, madame la présidente.
    Madame Blyth, vous exploitez un site de prévention des surdoses, et non pas un centre de consommation supervisée. Est-ce exact?
    Oui. C'est un site de prévention des surdoses, mais c'est aussi un centre de consommation supervisée. Les gens peuvent consommer des drogues, et nous les observons pour nous assurer que, s'ils font une surdose, on peut intervenir rapidement.
    Nous l'avons lancé parce qu'il y avait un très grand nombre de surdoses devant et dans la ruelle où je travaillais.
    Y a-t-il une différence technique entre les deux désignations?
    Pas vraiment, non.
    Où exercez-vous vos activités exactement?
    J'exerce mes activités dans la ruelle dans le Downtown Eastside. Deux ruelles sont le plus utilisées par les consommateurs de drogues. Je travaillais dans une autre entreprise sociale, et les gens frappaient à notre porte arrière.
    Est-ce près d'InSite?
    C'est à environ deux pâtés de maisons.
    Doit-il y avoir plus de ces types de sites dans le Downtown Eastside ou ailleurs dans la vallée du bas Fraser?
    Oui. On vient juste d'en mettre un sur pied à l'hôpital St. Paul, donc c'est vraiment bien. Ce serait une bonne chose qu'il y en ait dans les régions où se trouvent les hôpitaux également, où les gens pourraient venir et avoir... Ils sont très faciles à exploiter.
    Nous avons des consommateurs de drogues qui prennent soin les uns des autres. Ils sont rémunérés pour faire du bénévolat et pour s'entraider. Cela fonctionne très bien, parce que vous payez les gens et qu'ils ont une routine. En fait, cela les aide à se reprendre en main. Ils se surveillent les uns les autres. Ils apprennent à utiliser le Narcan et ils peuvent rapporter cela dans leur collectivité. Cela allège le fardeau du personnel hospitalier, en ce sens que les bonnes personnes s'occupent des crises causées par une surdose.
    Particulièrement lorsqu'ils font une psychose, je trouve que les gens en crise réagissent beaucoup mieux devant les personnes qu'ils connaissent de leur propre collectivité et les gens à qui ils font confiance de façon régulière.
    Vancouver est considéré comme l'épicentre de la crise des opioïdes, tandis que Winnipeg est l'épicentre de la méthamphétamine. Voyez-vous une croissance du problème de la méthamphétamine à Vancouver ou y a-t-il un genre de passage des opioïdes à la méthamphétamine?
    Une récente étude a démontré que c'était comparable, mais je dirais que la moitié des gens environ que nous voyons dans le Downtown Eastside consomment de la méthamphétamine dans une certaine mesure.
    Est-ce une augmentation?
    Oui, c'est une augmentation au fil des ans.
    Croyez-vous que c'est en train de devenir une crise dans cette localité, semblable à celle à Winnipeg?
    Oui.
    Malheureusement, plusieurs crises se produisent en ce moment avec des drogues différentes, de façon générale. De plus en plus de gens consomment des drogues. Le fentanyl peut se retrouver dans n'importe quoi. Nous pouvons tester la méthamphétamine et en retrouver dans cette drogue. On en retrouve dans le crack. Beaucoup de gens fument la méthamphétamine. Lorsque le fentanyl est fumé, il semble produire immédiatement un effet, et le consommateur s'effondre.
    Nous devons vraiment réfléchir à la façon de faire les choses bien différemment de ce que nous avons fait avec cette crise de toutes les drogues. Cela va faire économiser énormément d'argent aux contribuables au chapitre des transports en ambulance et des coûts de santé à long terme, si nous donnons seulement aux gens un accès sécuritaire.
    La clinique Crosstown l'a prouvé avec son programme pour 100 personnes. Les gens ne s'adonnent pas toute la journée au commerce du sexe ou au trafic de stupéfiants pour survivre. Vous retirez de l'équation la criminalité et l'incarcération continue juste en donnant aux gens un accès sécuritaire aux drogues. C'est comme leur donner des seringues. Ils ont des gens vers qui ils peuvent se tourner. Vous pouvez le faire avec peu d'obstacles.
    Je détiens une licence de gestion des médicaments. Je peux avoir en ma possession des drogues et les distribuer à des gens. Ce serait en fait très simple et très peu coûteux de le faire, si seulement c'était fait légalement.
    Vous avez dit que nous devons faire quelque chose que nous n'avons pas fait auparavant.
    Est-ce ce dont vous parlez?
    Dans notre site d'injection supervisée, si nous pouvions donner aux 700 personnes qui se présentent chaque jour quelque chose dont nous connaissons la dose et qui, nous le savons, n'est pas contaminé par du vermifuge pour porcs, du poison à rats et toutes sortes de choses que vous ne pouvez imaginer... Ces gens s'injectent ces choses dans le corps. Cela leur cause toutes sortes de problèmes.
    Lorsqu'ils commencent à obtenir un approvisionnement propre en drogues, nous pouvons alors revenir aux problèmes. Ce sont peut-être des problèmes de santé mentale grave ou encore une personne qui a un accident ou le cancer, ou toute raison pour laquelle les gens commencent à consommer des opioïdes ou des drogues en premier lieu.
(1000)
    Votre temps est écoulé.
    Passons maintenant à M. Lobb, pour cinq minutes.
    Encore une fois, je m'adresse à Mme Blyth: les gens qui vont dans ces sites d'injection apportent-ils leurs propres drogues?
    Oui, ils le font.
    Y a-t-il une façon pour vous de les tester pour voir ce...?
    Oui, nous le faisons.
    Nous avons une personne qui teste les drogues qui entrent.
    Si elles sont contaminées, vous en débarrassez-vous? Est-ce l'idée?
    Non, pas nécessairement. Les gens choisiraient seulement de les consommer. Ils pourraient en consommer un peu à la fois.
    On évite beaucoup de surdoses juste en les renseignant au sujet de la dose des drogues.
    Ce test montrerait-il qu'il y a du fentanyl ou autre chose?
    Oui. La plupart des drogues qui se trouvent dans le Downtown Eastide renferment du fentanyl en ce moment.
    Est-ce que c'est du fentanyl pur ou est-ce que c'est mélangé à du fentanyl?
    C'est du fentanyl, une drogue mélangée avec du fentanyl ou une combinaison.
    Le fentanyl crée une forte dépendance, donc si quelqu'un prend... En ce moment, ce qui est populaire auprès des enfants, c'est le Xanax. C'est super facile à obtenir. Ils l'utilisent dans les presses à comprimés et ils y insèrent du fentanyl. Soudainement, l'enfant est accroc au fentanyl et il ne s'en est même pas rendu compte. Cela crée une très forte dépendance; c'est vraiment difficile d'en sortir, et des gens de plus en plus jeunes...
    Quand vous rencontrez ce problème, vous voulez aider ces gens le plus tôt possible, pour qu'ils ne consomment pas quelque chose qui crée une forte...
    Si vous disiez: « Peu importe ce qui se trouve dans ce petit paquet, je vous conseille de ne pas le prendre », quel pourcentage de gens choisiraient de ne pas le prendre?
    C'est un très faible pourcentage. Ils en consommeraient probablement une petite quantité.
    Si vous disiez: « Ce produit contient une haute teneur de fentanyl », ils seraient surveillés et consommeraient une plus petite quantité à la fois. Nous les conseillerions.
    Je pose la question à Mme Jackson ou à M. Favel: une salle d'urgence est-elle le lieu approprié...? Je ne dis pas que ça l'est ou que ça ne l'est pas. Je demande juste si la salle d'urgence... Vous avez parlé d'une clinique d'ARTT. Il me semble que la salle d'urgence d'un hôpital ne serait probablement peut-être pas le bon endroit pour amener des gens qui sont dans cet état.
    Ai-je raison ou tort de le dire?
    Je crois que vous avez raison de le dire, mais malheureusement, il n'y a pas d'autre point d'accès pour ces patients qui sont aux prises avec cette drogue. Nous n'avons pas d'autres options.
    Devrait-il y en avoir d'autres?
    Je crois qu'il devrait y en avoir d'autres. Je crois que les cliniques d'ARTT sont un très bon début. Elles ont été lancées avec notre gouvernement, mais en ce moment, elles ne peuvent pas s'occuper d'une personne qui vit une psychose induite par la méthamphétamine. Ces clients doivent se rendre dans un service d'urgence pour recevoir un traitement. Puis, nous l'espérons, si la clinique d'ARTT est ouverte et qu'ils recherchent un traitement, nous pouvons les y amener.
    Je crois qu'il y a de meilleures options dans les urgences, mais en ce moment, elles ne sont pas disponibles.
    J'ai l'impression que nous avons notamment discuté, au cours des deux dernières réunions, de la rareté apparente et de la pénurie de ressources pour faire de nombreuses choses. Je regarde la légalisation du cannabis et je me pose juste des questions. Les gouvernements ont-ils tort de ne pas prendre 100 % de cet argent et de le réinvestir pour essayer de régler tous les maux sociaux qui sont causés, peut-être pas par la marijuana, mais par tout le reste?
    Des centaines de millions de dollars seront investis dans le système. Y a-t-il des gens qui réfléchissent à cette question? Est-ce quelque chose où les groupes de défense des intérêts et les gouvernements devraient dire: « Réinvestissons cet argent dans tel projet et plutôt que de le réinvestir dans un certain autre projet fétiche »?
    Je suis d'accord avec vous.
    Je crois que nous devrions investir l'argent que nous recevons dans... Eh bien, je crois que nous n'investissons pas assez d'argent en général dans cette crise. Elle n'a pas été une priorité, mais elle doit l'être. Oui, ce serait très bien si nous pouvions obtenir de l'argent pour un traitement et pour amener les gens à se tourner vers des drogues sécuritaires, y compris le cannabis.
    En fait, le cannabis a été considéré comme une option pour soulager la douleur chez certaines personnes. Beaucoup de gens savent qu'ils ont des problèmes de dépendance liés aux opioïdes, et ils vont à l'hôpital et cherchent à soulager leur douleur. Il a été démontré que le cannabis aide les gens qui souffrent et qui doivent composer avec des traumatismes. Cela comprend les personnes âgées et les vétérans.
(1005)
    Monsieur Dowie, auriez-vous des commentaires à ce sujet? Est-ce peut-être quelque chose que nous devrions faire?
    Absolument. Nous avons préconisé des investissements dans le traitement grâce à l'argent tiré du cannabis. On peut dresser des parallèles semblables avec l'argent tiré de l'alcool, où le gouvernement fait aussi de l'argent. On pourrait aussi dire la même chose pour l'argent tiré des jeux de hasard.
    La question pour le gouvernement est la suivante: devriez-vous profiter de votre part de ces entreprises ou devriez-vous comprendre qu'il y a des conséquences à cela, et, par conséquent, devriez-vous investir dans l'éventail complet des approches de traitement?
    Oui. Ça ne fait pas si longtemps que j'ai fréquenté l'école secondaire, mais évidemment, si on se fie à ma coupe de cheveux ces jours-ci, cela fait quelques années. Quand j'étais à l'école secondaire — je connais M. Oliver et je crois qu'il a grandi dans le comté de Bruce pendant un certain temps — si vous vous procuriez une caisse de bière la fin de semaine, vous croyiez dominer le monde.
    Pourquoi les enfants croient-ils maintenant qu'ils doivent prendre de la cocaïne, de la méthamphétamine en cristaux et du fentanyl? Qu'est-ce qui a changé depuis cette époque? Est-ce l'accessibilité ou le prix?
    Je dirais que c'est la dissolution de la famille. En fait, les enfants ne réfléchissent pas du point de vue d'un jeune adulte — comme vous le faisiez à l'école secondaire — mais ils se disent plutôt: « Que puis-je faire pour soulager la douleur et ne rien ressentir? » Ils n'ont pas en tête l'objectif de bien se comporter. Ils ne se disent pas qu'ils ont un examen le lendemain. Ils se disent juste qu'ils veulent échapper à ce monde.
    Ça fait réfléchir.
    J'aimerais en entendre davantage à ce sujet, mais je dois passer à Mme Sidhu, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente. Merci à vous tous d'être ici.
    J'ai entendu dire que c'était un grand bond. En 2015, c'était 18 %, et en 2016, c'est 53 %. C'est surtout un bond chez nos jeunes.
    Comme vous l'avez dit, pourquoi ces enfants doivent-ils consommer cette méthamphétamine? Comment pouvons-nous les éduquer? Devons-nous les éduquer dans nos écoles? Quel type de programmes devons-nous mettre en place? J'aimerais poser la question à tout le monde.
    Je peux répondre.
    L'éducation est assurément nécessaire. Il s'agit aussi d'éduquer les familles et d'habiliter les parents pour qu'ils exercent leurs compétences parentales. Très souvent, ils ne se sentent pas habilités pour établir une limite. Lorsque je vais parler dans les écoles, les parents me remercient à la fin et me disent: « Formidable, vous m'avez donné la permission de dire non à mon enfant ».
    Cette limitation et cette structure aident en fait les enfants à prendre de la maturité et à grandir. Nous vivons dans une société très permissive. Les enfants n'ont pas ces limites et ne développent donc pas la structure interne nécessaire pour dire non aux drogues ou à d'autres choses. C'est habilitant pour les familles, et ça aide les enfants à développer cette structure interne. Les écoles peuvent aussi jouer un énorme rôle.
    Merci.
    Darlene, vous avez dit que vous aviez des programmes de 21 jours, de 90 jours ou de 14 mois. Comment déterminez-vous quelle personne a besoin de suivre un programme de 21 jours, de 90 jours ou de 14 mois?
    Je ne me rappelle pas avoir dit cela, mais je vais en parler.
    Je sais que bon nombre de nos places de traitement offrent des programmes de 21 ou de 28 jours, dans le cas d'une énorme rechute. Pour la consommation d'alcool, la consommation de drogues ou le jeu, il y a une énorme rechute. Les programmes ne sont pas assez longs pour amener en fait les patients au point où ils sont prêts à apporter le changement et sont habilités à le faire et où ils sont prêts à maintenir ce changement lorsqu'ils seront dans leur collectivité.
    Je crois qu'un programme de 21 ou de 28 jours n'est pas assez long. Les programmes doivent être assez longs pour qu'on s'assure que ces clients sont habilités. Il doit ensuite y avoir un suivi et une certaine forme de soutien dans la collectivité qui continue de les aider à rester habilités dans la collectivité et à ne pas rechuter.
    Vous avez aussi dit que le bon moment et les bons soins ne sont pas disponibles, comme les services de transport. De quels types de services de transport ont-ils besoin?
    J'ai beaucoup réfléchi à cette question. Une des critiques, c'est qu'un très grand nombre de gens qui se rendent au service d'urgence ou au Centre des sciences de la santé ont des problèmes qui ne sont pas de vraies urgences. Cela s'explique probablement. Ces clients sont mieux servis lorsqu'ils sont vus peut-être dans une clinique de soins rapides, une clinique sans rendez-vous ou même un établissement de soins d'urgence, mais ces établissements se trouvent à des kilomètres de distance. Pour quelqu'un qui est marginalisé, qui vit avec un très petit revenu ou qui vit dans la rue et n'a aucun revenu, le fait de marcher deux pâtés de maisons du Centre des sciences de la santé jusqu'à l'hôpital Grace ou Saint-Boniface est énorme. Ces gens n'ont nulle part ailleurs où accéder à des soins de santé. C'est pourquoi ils iront là où ils se trouvent.
    Si nous disons qu'il doit y avoir un accès à des soins de santé dans une région différente, nous devons les aider à se rendre dans cette région. Nous avons peut-être besoin d'une navette. Je ne sais pas de quoi nous avons besoin, mais nous devons nous assurer que ces clients reçoivent des soins. S'ils ne peuvent se rendre qu'à l'urgence du Centre des sciences de la santé, c'est là que nous devons leur fournir des soins.
(1010)
    Merci.
    Quels politiques, programmes et initiatives spécifiques faut-il mettre en place pour éviter que cela n'arrive aux personnes vulnérables?
    Ma question s'adresse à James.
    Encore une fois, je pense que le plus gros problème que je rencontre est la pauvreté dans notre collectivité. Les gens n'ont pas les moyens de sortir de la collectivité. Ils ne peuvent pas se permettre d'aller à certains endroits, et il faut y remédier.
    Cette discussion est fantastique, mais si nous ne traitons pas des problèmes de pauvreté sous-jacents, lorsque des personnes sortent de prison, elles rechutent et retournent à ce qu'elles connaissent. Elles n'ont pas assez d'argent pour survivre, et c'est la seule façon qu'elles connaissent; alors, il y aura des trafiquants de drogue, et les personnes retourneront immédiatement à cette habitude.
    J'ai vu des sans-abri dans ma collectivité et je leur ai demandé: « Pourquoi êtes-vous sans abri aujourd'hui? » Ils répondent: « C'est parce que nous n'avons pas de compte bancaire ». Si vous n'avez pas de compte bancaire, vous ne pouvez pas recevoir vos chèques d'assurance-emploi par dépôt direct. Ils sont sans abri. Nous parlons d'enfants de 20 ans qui sont sans abri à cause de ces règles que nous avons. Nous devons aborder ces règles. Il faut qu'il y ait plus d'argent pour ces enfants, quand ils se sortent enfin d'une telle situation. La seule bénévole avec laquelle je travaille actuellement a été sobre et à jeun pendant 11 semaines, mais elle étouffait. Elle était coincée dans son appartement et ne pouvant aller nulle part; elle a donc rechuté.
    Il doit y avoir plus de sports, et il faut offrir plus de choses. Il doit y avoir des programmes. La démarche doit être plus facile.
    Nous allons maintenant passer à M. Davies, pour trois minutes.
    Merci.
    Merci, monsieur Favel. J'ai mentionné plus tôt que la consommation de substances et la dépendance aux substances devaient être traitées comme un problème de santé, mais je pense que vous soulevez également le fait qu'il faut aussi les aborder comme une question de justice sociale.
    Quelqu'un dans ce groupe pense-t-il que le fait de criminaliser la consommation de drogues contribue à améliorer la situation?
    Pas du tout.
    Personne ne le pense.
    Madame Blyth, je crois comprendre que la méthamphétamine en cristaux est ingérée de différentes manières, mais elle peut également être fumée et prisée.
    Vous avez mentionné que vous êtes l'un des deux seuls endroits en Amérique du Nord — je pense que l'autre est à Lethbridge — qui permet aux clients de fumer ou d'inhaler de la drogue dans un environnement supervisé. Quels sont les obstacles? Pourquoi n'y a-t-il pas davantage de sites de consommation qui permettent l'inhalation de drogues? Ne pouvez-vous pas mourir d'une surdose en inhalant ou en fumant?
    Oui. C'est en fait plus rapide. Si vous avez du fentanyl dans le produit, il s'enflamme. La chimie en cause provoque immédiatement une surdose chez la personne de sorte qu'elle s'effondre immédiatement après avoir fumé.
    Oui, nous sommes l'un des deux endroits. Surrey en aura un bientôt. Celui qui se trouve à Edmonton est un établissement à la fine pointe de la technologie. Ce que nous faisons est vraiment très simple. Je pense que vous l'avez vu, mais c'est une petite tente en bois, et de l'air extérieur y circule; alors, c'est simple.
    Quelle était votre question? J'ai perdu le fil de mes pensées.
    Je suppose que je vais la formuler comme suit. Je connais le centre InSite, qui permet l'injection supervisée; il est approuvé par le gouvernement fédéral. Le centre n'autorise pas l'inhalation. Existe-t-il des sites d'injection supervisée dans le pays, régis par le gouvernement fédéral, qui permettent l'inhalation?
    Non. Je pense que nous devons en obtenir davantage. Je sais qu'il y en a un à St. Paul's. Les responsables ont des problèmes avec des gens qui deviennent maintenant des usagers de drogue injectable. Comme leur tolérance augmente, ils veulent être supervisés parce qu'ils subissent des surdoses après avoir fumé. Ça ne va pas bien du tout.
    Il existe des solutions très simples à ce problème. Je pense qu'elles sont très rentables.
    En Colombie-Britannique, je sais que le médecin chef a déclaré que la situation était une urgence de santé publique. Compte tenu de ce que vous constatez sur le terrain et de l'ampleur du problème, chacun d'entre vous pense-t-il que le gouvernement fédéral devrait déclarer qu'il s'agit d'une urgence de santé publique?
(1015)
    Je le dis depuis le début.
    Oui.
    Avez-vous une opinion à cet égard? Je vois tout le monde hocher la tête.
    M. Eyolfson a formulé des commentaires sur les travers des politiques de l'Ontario et du Manitoba; on a dit que ces gouvernements se mettent la tête dans le sable.
    Jusqu'à présent, notre premier ministre et la ministre de la Santé ont tous deux exclu sans équivoque la décriminalisation et la réglementation des drogues afin d'assurer la sécurité de l'approvisionnement. Ils ont refusé de déclarer la situation comme une urgence de santé publique en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence du gouvernement fédéral, et les libéraux fédéraux — malgré un déficit de 19 milliards de dollars et les 14 milliards de dollars alloués à l'allégement de l'impôt des sociétés au cours de la mise à jour relative à la situation financière la semaine dernière — n'ont pas prévu de hausse substantielle pour faire face à l'augmentation massive nécessaire au chapitre du financement des traitements.
    Y a-t-il des commentaires sur l'approche du gouvernement fédéral? Sommes-nous sur la bonne voie ou avons-nous besoin de ce changement fondamental?
    À l'étage du centre InSite, il y a un endroit appelé Onsite, dont on n'entend pas beaucoup parler. Les gens vont et viennent puis retournent dans la rue. Le fait est que nous n'avons tout simplement pas d'endroit où les gens peuvent se rendre sur demande. Je partage l'avis de tout le monde à la table ici: la personne qui veut un traitement vient habituellement me voir dans une situation très désespérée en disant: « Hé, vous savez quoi, je suis prête pour le traitement. » Elle pleure. Elle semble être au bout du rouleau. Elle a dormi dans la ruelle. C'est fini.
    Cette fenêtre est seulement pour cette période de la journée. Vous ne pouvez pas leur dire de consommer de la drogue pendant encore deux semaines, puis nous leur trouverons une place — si tant est que nous pouvons leur trouver une place. Puis, quand ils arrivent, ils passent par le système pendant une semaine et sortent de nouveau, parce que certains programmes sont très courts. Ils sont de retour dans la ruelle, et qui dort dans une ruelle sans se droguer? Personne; je veux dire, c'est impossible dans le froid et la neige. Cela n'arrive pas...
    Je suis désolée, mais votre temps est écoulé.
    Nous avons suffisamment de temps pour une série de questions de six minutes chacune environ.
    Nous commencerons par M. Eyolfson.
    Merci encore, madame la présidente, et merci à vous tous.
    En ce qui concerne le bilan de notre gouvernement fédéral, conviendriez-vous que nos mesures visant à réduire les obstacles à la sécurité des sites de consommation qui existaient auparavant ont été utiles?
    Oui.
    D'accord. Je vous remercie.
    Madame Jackson, je suis d'accord avec ce que vous dites. Encore une fois, à l'époque où j'étais au service des urgences, nous avons vu beaucoup de situations qui n'étaient pas des urgences. Le service des urgences n'était pas l'endroit approprié, mais c'était le seul endroit où aller. Ce pouvait être n'importe quoi: « J'ai besoin de renouveler une ordonnance parce que mon médecin est en vacances », « Ma femme a perdu au jeu mon argent pour des ordonnances, et où vais-je les obtenir? ». Actuellement, en particulier pour les cas d'intoxication aiguë et pour les gens en crise, c'est vraiment le seul endroit où aller.
    L'hôpital Victoria a déjà été converti en établissement de soins d'urgence. On n'y accepte pas les ambulances. Cela a fait les manchettes cette semaine, et l'hôpital Concordia — très bientôt, je pense — n'acceptera plus les ambulances. Les services d'urgence restants sont-ils en mesure de gérer cette situation de manière adéquate?
    Je ne le crois pas. Le service des urgences de l'hôpital Concordia sera fermé en juin. Il y aura une clinique attenante sans rendez-vous. Je ne crois pas que les trois services d'urgence de Winnipeg disposeront d'un personnel suffisant et seront en mesure de gérer toutes les situations d'urgence.
    Nous savons déjà que le Centre des sciences de la santé et l'Hôpital général de Saint-Boniface accueillent 30 % de patients de plus que ce à quoi on s'attendait au moment de la fermeture de l'hôpital. Ces installations sont en piètre état. Leurs services d'urgence sont en crise.
    Je crois savoir que le Centre Seven Oaks exploite toujours un service d'urgence pour le moment.
    Oui, pour le moment.
    Lorsque j'y travaillais, c'était le deuxième hôpital en importance au titre de l'achalandage au Manitoba. Le service d'urgence y accueillait plus de personnes que l'Hôpital général de Saint-Boniface. Comme il ne s'agissait pas d'un hôpital universitaire, les médecins prenaient également en charge toutes les urgences et les services. À 3 heures du matin, il y avait un médecin pour le service des urgences, les soins intensifs et tous les services.
    Oui. Il est toujours parmi les plus occupés. C'est encore très occupé là-bas.
(1020)
    Pensez-vous que la fermeture de ce service causera encore plus de problèmes?
    Oui, absolument. Nous nous préparons justement à cette éventualité également, car nous passerons de six à trois services d'urgence dans la ville.
    Oui. Je vous remercie.
    Nous avons parlé des causes profondes d'une grande partie de ce problème. Monsieur Favel, j'ai vraiment apprécié ce que vous avez dit au sujet de la pauvreté. Je pense que c'est Gandhi qui a dit que la pauvreté coûte très cher, et c'est tout à fait vrai. Cela conduit à toutes ces choses qui coûtent vraiment beaucoup d'argent à notre filet de sécurité sociale et à nos systèmes de soins médicaux. Nous constatons des problèmes sociaux, car les banques n'ont plus de succursales dans les quartiers les plus pauvres étant donné que tout le monde se tourne vers des sociétés de prêt sur salaire et voit ainsi leur chèque amputé de 3 % pour ce service. Il y a ce genre de choses, et je sais que nous avons besoin de nombreuses politiques économiques qui seront utiles à cet égard.
    En ce qui concerne la santé mentale, selon mon expérience, un certain nombre de personnes ayant des problèmes de dépendance présentent des problèmes de santé mentale. J'ai eu un certain nombre de patients avec des problèmes liés aux drogues. En approfondissant le problème, vous constatiez que leurs symptômes de santé mentale étaient bien antérieurs à la consommation de drogue. J'ai parlé à des adolescents qui fumaient beaucoup de marijuana. Quand vous leur demandiez pourquoi ils aimaient fumer du cannabis, ils disaient qu'ils avaient commencé parce que « les voix leur disaient des choses vraiment effrayantes ». Ils n'ont parlé à personne de ces voix. Ils ont juste commencé à fumer du pot, et c'est ce qui a été remarqué.
    Nous avons beaucoup investi en santé mentale. Là encore, les provinces se sont montrées plutôt réfractaires à cet égard. Elles veulent décider de la façon d'utiliser les fonds pour la santé. Elles n'aiment pas qu'on leur dicte quoi faire, mais pensez-vous que c'est une bonne idée de dire que cette part importante que nous versons aux transferts en santé est consacrée aux services de santé mentale?
    Je demanderai à chacun de vous de répondre à son tour.
    Nous avons absolument besoin de ces soutiens en santé mentale. Encore une fois, nous avons perdu deux de nos bénévoles cet été parce que les services de soutien en santé mentale n'étaient pas là pour eux. Nous avons formé 22 de nos jeunes à l'utilisation de la naloxone. L'idée sous-jacente était que, si nous changions leur façon de penser et que nous leur demandions de réfléchir de manière plus critique et clinique aux médicaments qu'ils utilisent, ils seraient moins enclins à les utiliser. Pour l'essentiel, cela a fonctionné, mais nous en avons néanmoins perdu un cet été. Nous en avons perdu également un deuxième en août. Les soutiens en santé mentale doivent être accessibles pour que ces personnes aient une ressource vers qui se tourner afin de pouvoir retrouver la santé et rester en bonne santé.
    Je suis vraiment désolé d'apprendre votre perte. Je sais que c'est tragique de perdre des collègues et des amis de cette façon.
    Un garçon a eu 18 ans le 25 juin et avait franchi une étape, passant de nos patrouilles de jeunes à nos patrouilles d'adultes. Nous l'avons ensuite enterré le 9 août.
    Je suis vraiment désolé. C'est horrible.
    Madame Jackson, quelle est votre réponse à la santé mentale?
    Je pense qu'il existe des preuves accablantes établissant que les dépendances et la santé mentale vont de pair. Il y a beaucoup de recherches qui prouvent qu'elles sont tout à fait interreliées. Vous avez raison. Lorsque Sarah parle de douleur, beaucoup de dépendances et une grande partie de la consommation de drogue sont liées à la douleur émotionnelle et psychologique. C'est la douleur dont nous parlons. Nous voyons cela même chez les plus jeunes. Nous voyons des enfants à l'école primaire qui sont aux prises avec des angoisses que nous n'aurions jamais imaginées. La société a changé, et la façon dont nous élevons nos enfants a changé. Je pense que nous devons commencer les interventions en santé mentale beaucoup plus tôt. Je pense que nous devons commencer dans les écoles.
    D'accord. Votre temps est écoulé.
    Nous enchaînons maintenant avec M. Webber et M. Lobb, pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Absolument, c'est aussi ce que m'a dit le Dr Gabor Maté: la santé mentale est le problème ici. Il existe des problèmes sous-jacents qui poussent les jeunes vers la drogue. J'ai lu son livre également. Je vous recommande de le lire. Il parle de ses patients, et, oui, ils avaient tous des problèmes sous-jacents bien avant même de commencer à consommer de la drogue. Nous devons donc nous occuper de la santé mentale.
    Je veux revenir à la salle d'urgence, Darlene, et à quel point c'est dangereux pour le personnel infirmier, les médecins et autres personnes.
    Existe-t-il une politique en matière de contention? Par exemple, si une personne est sous l'effet de la méthamphétamine, utilisez-vous automatiquement des moyens de contention pour restreindre ses mouvements et assurer votre sécurité? Quelle est la politique à cet égard?
    Si le patient est incontrôlable ou affiche un comportement violent, il ne peut être immobilisé.
    J'arrive justement des services de première ligne. J'ai travaillé dans les services d'urgence. J'ai entendu dire qu'au Centre des sciences de la santé, il fallait 15 personnes pour maîtriser une patiente qui prenait de la méthamphétamine — 15 personnes.
(1025)
    Ne pouvez-vous pas les menotter à un lit?
    En fait, vous devez les amener au lit et les maintenir dans cette position.
    Le problème est que ces patients sont très instables. Vous ne pouvez pas anticiper un changement de comportement. Par exemple, un employé est entré dans une chambre pour y apporter des fournitures; un patient sous méthamphétamine qui était très coopératif s'y trouvait. Puis, tout à coup, ce patient s'est retrouvé sur l'employé, en train de l'étouffer, et des membres du personnel essayaient de les séparer. Vous ne pouvez pas prévoir le comportement. Cela fait partie du problème. C'est très imprévisible.
    Si c'est imprévisible, quiconque se présente sous l'effet de la méthamphétamine devrait alors être maîtrisé, ne croyez-vous pas? Même si la personne est calme à un moment donné, elle peut s'en prendre à vous à tout moment.
    En ce qui concerne les problèmes de santé mentale connexes, je pense qu'il est très dangereux d'essayer de maîtriser les personnes qui se présentent à l'hôpital. Cela pourrait les provoquer. C'est l'une des choses auxquelles vous devez faire très attention. Le ton que vous employez lorsque vous engagez le dialogue avec ces gens est important, car ils doivent être traités différemment.
    Que font-ils aux ARTT, les cliniques d'accès rapide pour le traitement de la toxicomanie, James?
    Je ne suis pas allé dans les cliniques moi-même, mais nous avons envoyé beaucoup de gens là-bas. Ils obtiennent un soutien, et nous pouvons miser sur cette intervention.
    Je dirais que nous voyons 200 consommateurs de méthamphétamine par jour. En les plaçant dans l'environnement du centre de prévention des surdoses, en reconnaissant ces choses et en leur parlant calmement, nous évitons tout problème de ce type. Il s'agit principalement de dialoguer avec eux et de faire en sorte que les membres de la collectivité leur parlent pour les aider à se recentrer. Je pense que les emmener dans un environnement hospitalier totalement étranger, avec la police et tout le reste, va aggraver la situation.
    Je vois. D'accord.
    Ben.
    Avez-vous un moyen de suivre la durée de vie de quelqu'un qui se présente à votre bureau la première fois? S'il arrive un lundi et qu'il vit deux ans, 10 ans ou un mois, y a-t-il un moyen de suivre cela ou est-ce impossible?
    Nous n'avons pas suivi cet aspect. Je peux certainement dire que beaucoup de gens que j'ai connus au fil des ans, surtout ces dernières années, sont décédés. C'est absolument affreux pour les familles, et on peut éviter une telle situation en leur fournissant des soins médicaux et de santé mentale, le traitement dont ils ont besoin et des solutions de rechange sûres aux drogues qu'ils consomment. Je ne saurais trop insister sur le fait qu'il existe une solution que nous n'appliquons pas. Tout le monde le sait. La police, les services d'ambulance et tout le monde en première ligne la réclament. Tant que nous l'évitons, nous allons continuer dans la crise, et les gens vont mourir.
    L'autre chose que je ne peux m'empêcher de remarquer, vu le temps que j'ai passé à mon bureau au centre-ville ici, c'est qu'il me semblait... tout le monde a parlé de logement et de la nécessité de trouver un logement sûr, et les témoins précédents ont dit la même chose. Je ne peux qu'être d'accord. Si je regarde ce qui s'est passé au centre-ville d'Ottawa, c'est presque comme s'il y a trop de gens, et ils devraient peut-être répartir les refuges afin que les gens puissent faire une pause, car il semble qu'il y a beaucoup trop de gens. Lorsque vous avez trop de monde, il y a énormément de problèmes, sans oublier un magasin de bière et un magasin d'alcool au milieu de trois immeubles de logement. Je connais l'urbanisme, et je sais que des choses se passent sur de nombreuses années, mais il me semble presque contraire à l'éthique que ce soit la façon dont l'urbanisme a fonctionné dans cette ville, et probablement dans toutes les villes du pays.
    Tout le monde veut vivre dans un environnement sûr et propre, et les personnes ayant des problèmes de santé mentale ont besoin d'une aide supplémentaire. Parfois, certains services ou logements abordables se trouvent dans un quartier particulier, mais oui, je pense qu'il serait bien de donner aux gens la possibilité de vivre dans des quartiers différents. Il est sain pour les gens de vivre dans des quartiers différents.
    Ce que j'ai vu, c'est que les gens vivent en communauté pour la protection et la sécurité. À Winnipeg, il y a une rue qui va de Maryland à Sherbrook, où se tiennent de nombreux sans-abri, à l'extrémité de West Broadway et au bord de la rivière, au nord, dans certaines zones. Ils se rassemblent de la sorte pour leur propre sécurité, et nous devons leur fournir de meilleurs services afin qu'ils ne soient pas obligés de se sentir ainsi.
    Nous passons maintenant à M. Davies, pour six minutes.
(1030)
    Merci.
    Monsieur Favel, selon un article que j'ai lu dans le Winnipeg Free Press, le gouvernement fédéral a donné à Bear Clan Patrol environ 100 000 $, ce qui, je pense, a aidé votre organisation à payer du personnel, etc., comme vous l'avez décrit. Je crois comprendre que votre organisation a été obligée de se démener cette année après que Services aux Autochtones Canada a mis en suspens votre financement pour 2018-2019. Est-ce exact?
    C'est juste.
    À l'heure actuelle, vous ne savez pas si le gouvernement fédéral va continuer à financer votre organisation pour le prochain...
    Nous savons qu'il n'en a pas l'intention. C'est ce que nous savons.
    D'accord.
    Monsieur Dowie et madame Creighton, mon collègue, M. Webber, a fait référence au Dr Gabor Maté. D'après ce que je comprends, sa théorie, après avoir travaillé dans le quartier Downtown Eastside, c'est que 100 % des personnes qui avaient des dépendances, et dont il s'est occupé dans ce quartier, présentaient des traumatismes sous-jacents. La plupart remontent à l'enfance. Je suis curieux de savoir ce que vous en pensez. Les traumatismes de quelque type que ce soit constituent-ils l'une des causes immédiates fondamentales de la consommation ultérieure de substances, et, dans l'affirmative, comment gérez-vous cela au sein de votre population?
    Il y a le gros traumatisme et le petit traumatisme. Chaque enfant que nous avons avait subi une forme de traumatisme, et cela provient en grande partie de la mauvaise reconnaissance qui se produit au sein de leur collectivité, de la famille, qui tient au fait de ne pas être vu et de ne pas être tenu dans les bras de quelqu'un. Il y a ces aspirations sous-jacentes du sentiment d'appartenance, de la valorisation ou d'être vu pour la personne qu'ils sont. Lorsque ce besoin est comblé, les enfants s'épanouissent et grandissent. Il est parfois très utile de les retirer de la famille, de les placer dans un environnement où ils sont vus, de faire participer les parents et de les amener à être vraiment à l'écoute, pour que les enfants puissent rebondir. Ils s'animent. Vous pouvez réellement le constater.
    Sans vouloir me répéter, une fois que ces enfants arrivent à la fin de l'adolescence, avec l'approche actuelle axée sur la criminalisation, quelle est l'incidence de la criminalisation sur ce traumatisme?
    Il s'agit d'une mauvaise reconnaissance: on ne voit pas précisément ce qui se passe. On essaie de traiter le symptôme plutôt que le problème sous-jacent.
    Madame Blyth, je voudrais revenir à vous parce que vous avez fait référence à la solution, mais je ne pense pas que vous l'ayez réellement précisée.
    Quelle est la solution qui nous manque, que nous devons fondamentalement envisager en tant que gouvernement fédéral?
    La solution consiste à décriminaliser les personnes et à leur permettre d'accéder en toute sécurité aux médicaments dont elles ont besoin, notamment dans les centres de prévention des surdoses, au centre InSite ou à la clinique de Crosstown, où elles peuvent obtenir un accès sûr à des drogues, à des fournitures sans danger. Elles peuvent s'adresser à quelqu'un sur place qui peut les aider à entrer dans des centres de traitements appropriés, surtout s'ils sont jeunes. Cela semble extraordinaire pour les jeunes, afin qu'ils puissent s'y faire soigner.
    Nous voyons des jeunes dans les rues du quartier Downtown Eastside, et nous en sommes tous bouleversés. Ils n'ont nulle part où aller. Beaucoup de centres pour les jeunes n'acceptent pas les personnes qui consomment, et ces jeunes finissent donc dans la rue. C'est tellement choquant qu'il est difficile de dormir la nuit en pensant à eux et là où ils vont.
    Je tiens également à préciser que je ne pense pas qu'il y ait une personne dans cette salle ou dans le pays qui croit que la consommation de drogue, la consommation de drogue chronique, est préférable, souhaitable ou saine. C'est reconnaître que la consommation de drogue est un symptôme de la douleur sous-jacente qu'il convient de traiter. Si nous avons appris quelque chose en tant que pays après 150 ans, c'est que faire incarcérer des personnes qui sont essentiellement malades, traumatisées ou qui ont besoin de soins est non seulement la mauvaise approche, mais en fait, une approche qui ne fonctionne pas.
    Oui, ce que nous voyons, c'est que des gens achètent leurs drogues dans la rue. C'est ainsi qu'ils les consomment dans nos centres de prévention des surdoses. On leur retire leurs drogues, et ils sont criminalisés de cette façon. Ils sont considérés comme des criminels pour avoir pratiqué le commerce du sexe de survie.
    Toutes ces choses causent plus de traumatismes chez les gens. Le commerce du sexe de survie, quand les gens ne veulent pas s'y soumettre, provoque plus de traumatismes chez les femmes. Cette pratique les expose beaucoup à des risques dans la rue. Si vous pouviez leur fournir un approvisionnement sûr d'une substance qui ne les tuera pas, et ce, dès le départ, vous éviteriez ainsi qu'elles aient des démêlés avec le système pénal et qu'elles soient davantage... C'est vraiment un gaspillage de nos ressources.
(1035)
    Que diriez-vous, madame Blyth, à ceux qui disent que, si nous mettons à la disposition des gens un approvisionnement sûr en drogues, nous consentons en quelque sorte à cette approche, nous l'approuvons; si nous donnons aux gens de la drogue gratuite ou bon marché, cela montre-t-il que nous approuvons cette consommation de drogue?
    Que répondriez-vous à cela?
    Je dirais que nous sommes actuellement dans une situation d'urgence absolue en matière de santé et que les gens consomment des drogues hautement toxicomanogènes. Il n'existe pas d'autres solutions que de donner aux gens des drogues qui ne présentent aucun risque afin que nous sachions qu'ils savent ce qu'ils prennent, puis que nous puissions leur apporter l'aide appropriée dont ils ont besoin. C'est la seule chose que nous puissions faire pour l'instant.
    Monsieur Dowie, qu'en est-il de la prévention?
    Il s'agit de remédier aux contrecoups, de tenter de réduire au minimum les méfaits. Or, comment pouvons-nous, en tant que pays, adopter des politiques qui encouragent nos enfants et nos adultes à éviter la dépendance ou à faire des choix plus sains? Pouvons-nous faire quoi que ce soit en matière de prévention?
    Oui. La prévention comporte de nombreux éléments. Vous commencez par l'éducation. En matière de sensibilisation du public, nous ne semblons pas avoir une approche cohérente. Nous avons probablement 13 approches différentes, une pour chaque province ou territoire du pays. Ensuite, il faut pouvoir intervenir tôt auprès des enfants, généralement dans les écoles et dans la collectivité.
    Il est très difficile d'avoir une approche nationale au pays. Nous avons un pays où il est très complexe de mener une action cohérente et concertée. Est-il logique que vous vouliez, en premier lieu, éduquer les gens et que vous vouliez intervenir tôt dans les problèmes, avant qu'ils ne deviennent incontrôlables? C'est logique. Avons-nous un moyen de le faire dans ce pays? Nous avons une foule de façons de le faire, mais pas de manière cohérente.
    Permettez-moi de m'arrêter à l'une d'entre elles, très rapidement: il suffit de regarder l'éducation du public sur le cannabis. Le gouvernement fédéral a investi beaucoup d'argent dans le dernier budget, dans toutes sortes de choses, et il est distribué, mais pour l'ensemble de l'éducation publique visant les enfants, certaines provinces font des choses, et d'autres, pas. Certaines provinces la traitent comme un programme de financement. Vous ne lancez pas un message uniforme et cohérent.
    Nous allons terminer nos questions avec Robert Falcon-Ouellette, qui a soulevé ce point pour un débat d'urgence à la Chambre.
    J'aimerais le faire dans ma langue.

[Français]

    Nous habitons dans un pays bilingue. Il est donc extrêmement important d'être capable de s'exprimer dans les deux langues au Parlement.
    Le 14 novembre dernier, j'ai participé à un sommet réunissant les peuples autochtones de ma circonscription et les fournisseurs de services qui travaillent avec les personnes aux prises avec une dépendance à la drogue. Beaucoup de solutions ont été suggérées.
    Monsieur Dowie, vous avez un peu parlé de la prévention. L'un des modèles soulevés était celui de l'Islande. Je ne sais pas si vous êtes au courant. Des jeunes de la région de Winnipeg ont dit que c'était ce dont ils avaient besoin. Ils veulent des programmes récréatifs pour avoir des occupations. Ces programmes seraient utiles non seulement pour les jeunes, mais aussi pour les personnes vulnérables ou celles qui habitent dans des quartiers défavorisés. Est-ce un modèle qui fonctionne bien et est-ce quelque chose qui devrait être implanté dans certains secteurs de notre société?
    C'est évidemment l'un des éléments d'une gamme de services de prévention.
    Il y a quelques semaines, j'ai fait une présentation devant l'Association des municipalités de l'Ontario, ou AMO, et c'était aussi l'une des conclusions auxquelles ses représentants en était arrivés. Autrement dit, un service de prévention ou une gamme de services de prévention doit comprendre des programmes récréatifs ou des services de loisir pour les jeunes.
    Ce qui est incroyable, c'est que l'on aboutit souvent à un modèle payant. Or, il en coûte cher d'aller même dans un centre communautaire de la ville. Les coûts doivent donc être défrayés par les contribuables, les gens qui sont capables de payer. Dans le cas présent, j'aimerais savoir s'il faudrait peut-être trouver des subventions ou un autre moyen de réaliser cela. Par exemple, les taxes imposées sur le cannabis devraient-elles servir à financer ces types de programmes?
(1040)
    Si vous posez cette question à l'AMO, sa réponse sera oui. C'est ce que ses représentants réclamaient, soit qu'une partie des revenus de la vente du cannabis soit versée aux municipalités pour financer les programmes récréatifs.
    Pour ma part, je voudrais quelque chose de plus complexe. Le financement de ces services n'est qu'un des éléments. Le financement du traitement est tout aussi important.

[Traduction]

    Il est important de proposer une série d'options. Il y a des enfants qui aiment le sport. Des enfants aiment ceci. Des enfants aiment cela. Faire participer des enfants à des activités où ils sont bons et pouvoir le faire sans que l'argent devienne un obstacle à la participation est évidemment une bonne solution.

[Français]

    Excellent.
    J'ai quelques questions à vous poser, monsieur Favel. L'une des choses que j'aimerais vous dire d'abord, c'est que j'appuie entièrement votre demande de financement. Je crois que votre organisation et le travail que vous faites sont extrêmement importants.
    J'aimerais juste m'assurer de bien comprendre. Vous avez parlé de crimes contre les biens. J'ai fait beaucoup de porte-à-porte et je constate moi aussi que ces crimes sont nombreux: vols, vols à l'étalage, vols de vélos, entrées par effraction dans des cabanons ou des garages, et ainsi de suite Pourquoi est-ce à votre organisme de traiter ces cas? Pourquoi le service de police est-il incapable de s'en charger? Pourquoi votre organisme bénévole doit-il faire un travail qui revient à l'État, notamment ramasser des seringues ou offrir un service d'urgence?

[Traduction]

    Nous agissons comme un complément aux ressources existantes. Nous tentons de soutenir le travail qui se fait là-bas. Nous essayons de libérer la police pour qu'elle puisse mieux faire son travail. Nous essayons de faire en sorte que moins de membres de notre personnel partent en ambulance à cause de la violence. Nous désamorçons des situations lorsque nous en avons l'occasion.
    Tout notre mandat consiste à offrir un soutien dans notre collectivité, car nous faisons partie de la collectivité. Je vis dans le quartier North End de Winnipeg, sur l'avenue Stella, entre les rues McKenzie et McGregor. Cela se passe juste devant ma maison. L'exploitation, le trafic de drogue, tout y est. C'est comme ça que je me suis engagé. Je veux arrêter ces activités. Je veux les empêcher. Je veux aider les membres de ma collectivité à vivre mieux.
    Encore une fois, tout revient à la pauvreté. Tout revient vraiment à la pauvreté. C'est ce que nous devons aborder ici. Les personnes vivant dans la pauvreté vont agir de façon désespérée. Pourquoi les gens se soignent-ils eux-mêmes? Pour fuir. Pour fuir quoi? Pour fuir la douleur. Quelle est la source de leur douleur? Ils ne peuvent pas fonctionner dans ce monde.
    Il n'y a pas suffisamment de ressources ni assez de placements offerts. Nous essayons autant que possible de créer des emplois dans notre organisation. Cette année, nous avons investi 90 000 $ dans des emplois temporaires, entre autres choses, mais l'ARC s'intéresse maintenant à ce que nous faisons. L'Agence me dit que nous ne pouvons pas faire ce que nous faisons parce que nous ne le faisons pas en respectant l'esprit de la loi en ce qui concerne l'ARC.
    Pouvez-vous en parler un peu plus, à propos de l'ARC...
    Je suis désolée, mais le temps est écoulé. Il y a énormément de choses que nous aimerions approfondir.
    Merci à tous les témoins d'être venus et d'avoir présenté votre témoignage. Nous aimerions certainement recevoir les exemplaires des rapports que vous avez évoqués. La greffière les recueillera.
    Nous nous reverrons jeudi.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU