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La séance est ouverte. Bienvenue à la 38
e réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes.
Notre collègue Alice Wong est des nôtres aujourd'hui pour remplacer M. Moore pendant la première heure.
Bienvenue, madame Wong. Nous sommes heureux de vous accueillir au sein de notre comité.
Je rappelle à tous que nous poursuivons notre étude de la Charte canadienne des droits des victimes.
Nous souhaitons la bienvenue aux témoins qui sont avec nous. Je leur signale qu'ils peuvent avoir accès à des services d'interprétation en cliquant sur l'icône du globe terrestre au bas de leur écran. Vous pouvez ainsi sélectionner la langue dans laquelle vous voulez entendre nos délibérations. Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix.
Avant d'entendre les témoins que nous recevons aujourd'hui, il faudrait que nous adoptions le budget de fonctionnement pour la tenue de ces audiences. Ce budget, dont tous les membres du Comité ont reçu une copie hier, s'élève à 2 550 $. Il servira à payer nos dépenses pour l'étude en cours.
Est-ce que tout le monde est d'accord pour approuver ce budget?
Des députés: D'accord.
La présidente: Merveilleux. Merci à tous.
Je sais que nous attendons toujours M. Niemi du Centre de recherche-action sur les relations raciales. Deux témoins sont toutefois déjà avec nous. Nous recevons ainsi Mme Jessica Reid, directrice générale des programmes et de la recherche pour l'organisation Kids with Incarcerated Parents (KIP) Canada. Nous accueillons également M. Jody Berkes, président de la Section de la justice pénale à l'Association du Barreau canadien.
C'est moi qui surveille le temps alloué aussi bien pour les témoins que pour les membres du Comité. J'utilise ces petits cartons pour vous indiquer qu'il ne vous reste qu'une minute ou 30 secondes pour vos observations préliminaires ou vos questions et réponses.
Je vais maintenant permettre à Mme Reid de nous présenter ses remarques préliminaires.
À vous la parole pour les cinq prochaines minutes.
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Bonjour, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du Comité.
Je vous remercie de me donner l'occasion de vous expliquer à quel point il est important de tenir compte des enfants de parents incarcérés dans la Charte canadienne des droits des victimes. Je vais également vous faire part de nos recommandations quant aux moyens à prendre pour protéger les droits de ces enfants, faciliter leur guérison et en arriver à rompre le cycle de la criminalité et des traumatismes intergénérationnels. Après avoir pu observer les effets dévastateurs de l'incarcération des parents dans mon rôle d'éducatrice, j'ai créé KIP Canada il y a maintenant 10 ans. Nous sommes à l'heure actuelle une des seules organisations au pays à offrir un soutien aux enfants affectés par les démêlés de leurs parents avec la justice. Dans mon travail de praticienne, d'éducatrice et de chercheure, j'ai pu constater à quel point il est nécessaire d'apporter des changements aux politiques en place afin de mieux aider les quelque 370 000 enfants innocents qui sont touchés par ce phénomène au Canada.
Depuis des décennies, les enfants de parents incarcérés sont des victimes invisibles et oubliées. Malgré les répercussions de la criminalité de leurs parents sur leur bien-être, leur sécurité économique et leur développement, ces enfants ne sont toujours pas reconnus comme des victimes de la criminalité au Canada et sont ainsi privés du soutien dont ils auraient besoin. Pourtant, les effets ressentis sont tels qu'ils répondent parfaitement à la définition de victime incluse dans la Charte.
Il faut d'abord et avant tout reconnaître que la criminalité parentale s'inscrit souvent dans un contexte de traumatismes intergénérationnels et d'oppression systématique dont l'impact se fait sentir de façon disproportionnée chez les enfants marginalisés qui sont exposés à des problèmes de santé mentale et de toxicomanie, à la pauvreté et à d'autres expériences difficiles qui ne font qu'exacerber les effets néfastes sur leur bien-être. La criminalité parentale se traduit immanquablement pour les enfants par des dommages affectifs, une marginalisation et de l'isolement.
Les chercheurs ont constaté qu'un enfant sur cinq est présent lors de l'arrestation de son père ou de sa mère. Dans bien des cas, les enfants voient des armes être pointées en direction de leurs parents et la police faire irruption dans leur domicile. La nature de tels incidents entraîne souvent pour les enfants des symptômes de stress post-traumatique, une anxiété de séparation et même une régression développementale. Il n'en demeure pas moins que ces enfants pleurent la perte de leurs parents, car il leur est difficile de maintenir le contact avec eux pendant leur détention en raison des obstacles à surmonter en matière de moyens financiers, d'éloignement géographique et de politiques à respecter.
Les spécialistes classent désormais l'incarcération des parents parmi les expériences négatives vécues pendant l'enfance en raison des répercussions à long terme sur le développement et le bien-être des personnes touchées. Ainsi, des recherches ont démontré que les enfants séparés d'un parent incarcéré avant leur 18e anniversaire encourent un risque plus élevé d'éprouver des problèmes de santé mentale et physique ainsi que de développement, et ce, pendant toute leur vie. En l'absence d'un soutien adéquat, on estime que les enfants de parents incarcérés sont de quatre à sept fois plus susceptibles d'avoir eux-mêmes des démêlés avec la justice. Cela montre bien à quel point il est important que les enfants touchés par l'incarcération d'un parent soient reconnus comme des victimes dans la Charte et obtiennent le soutien nécessaire pour atténuer les impacts d'une telle situation.
Conformément à ce que nous apprend la recherche, les programmes et les mesures de soutien déployés par KIP Canada ont démontré l'efficacité d'une intervention rapide pour répondre aux besoins uniques des enfants touchés par l'incarcération d'un parent en prêtant une oreille attentive à leurs préoccupations et en misant sur des pratiques tenant compte des traumatismes vécus, axées sur les points forts et visant à contrer l'oppression. À ce titre, le counselling, les programmes parascolaires, le mentorat, les groupes de soutien par les pairs et les visites familiales permettent d'offrir un soutien efficace aux enfants et aux jeunes à toutes les étapes du processus judiciaire. L'effet combiné de ces mesures contribue à leur mieux-être, au développement de facteurs de protection et à de meilleurs résultats d'une manière générale tout en perturbant le cycle de la criminalité intergénérationnelle.
C'est en nous fondant sur les recherches menées, notre expérience pratique, la Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant et le travail de notre comité consultatif de jeunes que nous vous soumettons les cinq recommandations suivantes.
Premièrement, il faut que les enfants de parents incarcérés soient pris en compte dans la Charte canadienne des droits des victimes.
Deuxièmement, il convient de garder à l'esprit l'intérêt supérieur des enfants de parents incarcérés, une fois que ce fait est établi, à toutes les étapes du processus judiciaire.
Troisièmement, il faut modifier les politiques en vigueur afin d'abaisser les obstacles, notamment pour ce qui est de l'âge minimum requis, pour permettre aux enfants de garder contact avec leurs parents.
Quatrièmement, on doit investir dans des interventions précoces adaptées aux besoins particuliers des enfants de parents incarcérés.
Cinquièmement, il y a lieu d'améliorer les communications et la coordination entre les systèmes de justice, de protection de l'enfance, d'éducation et de santé mentale de telle sorte que les enfants et les familles aient plus facilement accès à des services de soutien complets.
Les expériences et les traumatismes vécus par tous les enfants canadiens devraient nous interpeller, mais ceux dont les parents sont incarcérés demeurent des victimes oubliées. Il est grand temps que nous reconnaissions l'importance des traumatismes associés à la criminalité parentale et que nous réagissions en conséquence pour que ces jeunes victimes soient prises en compte dans cette charte et obtiennent le soutien qu'elles méritent. En agissant ainsi de façon proactive, nous contribuerions à atténuer les effets des traumatismes intergénérationnels, à éliminer les obstacles systémiques et à favoriser la guérison de ces victimes invisibles tout en offrant à notre pays l'une des stratégies de prévention du crime les plus efficaces dans laquelle il pourrait investir.
Je vous remercie.
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Bonjour à vous, madame la présidente, ainsi qu'aux honorables membres du Comité.
Je m'appelle Jody Berkes, et je suis président de la Section de la justice pénale à l'Association du Barreau canadien.
Je me joins à vous aujourd'hui depuis le territoire traditionnel des Wendats, de la nation Anishinabek, de la confédération Haudenosaunee, de la Première Nation des Mississaugas de Credit et de la nation métisse. C'est le territoire visé par le traité faisant référence au concept du bol à une seule cuillère.
Je vous remercie d'avoir invité l'Association du Barreau canadien à participer à votre étude sur la Charte canadienne des droits des victimes, que j'appellerai ci‑après la Charte. Notre section de la justice pénale s'enorgueillit notamment du fait qu'elle compte parmi ses membres aussi bien des procureurs de la Couronne que des avocats de la défense. C'est ainsi que nous pouvons vous parler de la façon dont les lois sont appliquées au sein de notre système de justice pénale dans une perspective à la fois unique et exhaustive.
[Français]
L'Association du Barreau canadien, ou ABC, est une association nationale qui regroupe plus de 36 000 juristes du pays. Le principal objectif de l'ABC est l'amélioration du droit et de l'administration de la justice. C'est dans cette optique que nous sommes ici ce matin, au nom de la section de droit criminel.
[Traduction]
Bien que la Charte parle de « victimes », l'Association du Barreau canadien préfère utiliser le terme neutre « plaignant » avant tout verdict de culpabilité. J'utiliserai donc le terme « plaignant » lorsque je parlerai du procès et des étapes qui le précèdent. J'emploierai le terme « victime » lorsqu'il sera question du prononcé de la sentence et des procédures postsentencielles.
Notre section est favorable d'une manière générale au déploiement de ressources additionnelles pour permettre aux plaignants de bénéficier de conseils juridiques indépendants au sujet du processus de justice pénale. Des conseils semblables facilitent le bon fonctionnement du système en respectant le rôle joué par la Couronne à titre de ministre indépendant de la justice, plutôt que de défendeur du plaignant, en même temps que le rôle du tribunal à titre d'entité décisionnelle, plutôt que d'intervenant aidant les participants à s'y retrouver au sein du système judiciaire.
Nous sommes en outre favorables à ce que l'on fournisse aux plaignants tous les renseignements indiqués aux articles 6 à 8 de la Charte, avec une mise en garde quant à la confidentialité requise au titre des enquêtes criminelles en cours. Nous souscrivons également aux mesures de protection des plaignants prévues aux articles 9 à 13 de la Charte. Une grande partie de ces mesures sont d'ailleurs déjà mises en œuvre en application des dispositions du Code criminel régissant la mise en liberté sous caution, les infractions d'entrave à la justice, les interdits de publication, les demandes de dossiers de tiers et les aménagements requis pour les témoins comme les écrans, le témoignage à distance et le soutien d'une personne de confiance.
Nous avons toutefois des réserves quant à l'élargissement du rôle joué par les plaignants dans les poursuites criminelles, car cela pourrait créer des attentes déraisonnables ou des différends entre les procureurs de la Couronne et les plaignants. Prenons l'exemple de l'article 14 de la Charte qui prévoit ce qui suit: « Toute victime a le droit de donner son point de vue en ce qui concerne les décisions des autorités compétentes du système de justice pénale en ce qui touche les droits qui lui sont conférés par la présente loi et à ce qu'il soit pris en considération. »
La Couronne n'a pas l'obligation juridique et éthique de garantir une condamnation, mais plutôt de s'assurer que tous les faits pertinents ont été présentés au juge et au jury de telle sorte que justice puisse être rendue. La Couronne doit par conséquent jouir d'un pouvoir discrétionnaire absolu lorsque vient le temps de déterminer si des poursuites seront intentées. Il en va de même pour ce qui est de décider si l'on va continuer d'aller de l'avant avec les poursuites entreprises ou si on va les retirer. Bien qu'il soit approprié de solliciter le point de vue d'un plaignant relativement à des questions de procédure et quant à savoir s'il convient de maintenir le cap avec une poursuite, la Couronne ne peut pas être liée par les souhaits alors exprimés. Cette considération demeure inchangée sans égard à la volonté du plaignant de poursuivre les procédures ou de les interrompre.
Nous sommes conscients que la Charte exige de la Couronne qu'elle informe les plaignants des demandes de procès et qu'elle en discute avec eux. Nous avons cependant exprimé nos préoccupations concernant les modifications apportées au Code criminel par le truchement du projet de loi de telle sorte que les plaignants ont dorénavant qualité pour agir à l'égard de certaines demandes de procès lors de poursuites pour agression sexuelle. L'ajout d'une tierce partie autorisée à présenter des observations concernant le droit est problématique pour deux raisons. Premièrement, cela pourrait créer des tensions entre la Couronne — la partie responsable des poursuites à l'égard des infractions présumées — et le plaignant, qui risque fort d'être le principal témoin de la Couronne. Deuxièmement, cela pourrait rendre plus complexe et plus long le traitement des demandes préalables au procès tout en risquant de donner lieu à une cessation de procès, ce qui entraîne un gaspillage de ressources judiciaires.
En résumé, la Section de la justice pénale de l'Association du Barreau canadien voit d'un bon œil les ressources additionnelles qui pourront être déployées afin d'offrir davantage d'information et d'assistance aux plaignants dans le cadre du processus pénal. Par contre, nous sommes d'avis qu'il convient de laisser les décisions relatives aux poursuites, y compris les réponses aux arguments juridiques, entre les mains compétentes des procureurs de la Couronne.
Madame la présidente, je sais que j'ai dépassé le temps imparti, mais je vous demanderais de bien vouloir m'accorder encore quelques secondes. C'est ma troisième comparution devant ce comité, et je tiens à vous exprimer ma reconnaissance pour l'occasion qui m'est ainsi offerte. J'estime que vous posez des questions réfléchies et stimulantes, et je souhaiterais que tous les Canadiens puissent avoir la chance d'expérimenter notre démocratie de cette manière.
En terminant, je tiens à remercier tous les membres du personnel du Comité et de l'équipe de soutien technique. Vous faites tous montre d'un professionnalisme irréprochable.
Je vous remercie.
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Je vais essayer de vous répondre.
Il va de soi que tout plaignant dans une affaire criminelle a le droit de retenir les services d'un avocat. Il n'y a aucune restriction en la matière. Il s'agit en fait de savoir qui va payer pour ces services.
Il m'est souvent arrivé de fournir des conseils juridiques indépendants à des plaignants dans différentes affaires touchant notamment des crimes financiers, des crimes familiaux et diverses autres infractions. Je leur communique tous les renseignements dont ils ont besoin au sujet de leurs droits et responsabilités. J'ai l'impression que cela les aide beaucoup à comprendre un système qui peut être source de confusion, de découragement et parfois de crainte, autant pour les plaignants que pour les défendeurs.
Je crois que vous souhaitez savoir en fait qui va payer la note. Si nous prévoyons un tel droit, il faut qu'il soit assorti d'un financement conséquent. Est‑ce que ce financement va provenir du gouvernement fédéral ou des provinces? Il y a actuellement différentes provinces qui financent des cliniques d'aide juridique. Je peux certes vous dire, au nom de l'Association du Barreau canadien, que tout financement additionnel serait le bienvenu.
Je ne sais pas s'il est nécessaire de prévoir expressément un droit d'obtenir des conseils juridiques, car un tel droit existe déjà, et personne ne semble vouloir l'éliminer.
Merci.
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Merci, madame. Je viens de mettre mon chronomètre en marche.
Tout d'abord, je remercie les deux témoins.
Monsieur Berkes, je commençais à penser que vous étiez un membre du Comité et non un témoin, puisque vous êtes venu témoigner si souvent. Je dis cela pour plaisanter, bien sûr, mais surtout pour exprimer ma gratitude, car votre témoignage, chaque fois, et aujourd'hui ne fait pas exception, a été très utile. Je vous en remercie. Je sais combien il est difficile de prendre du temps pour faire cela.
Madame Reid, merci d'être venue aujourd'hui et d'être porte-parole concernant une question qui est, pour le moins, incroyablement difficile. Vous êtes une voix isolée pour une cause qui ne reçoit pas beaucoup d'appuis, mais qui gagne du terrain grâce à vous.
D'autres membres du Comité ne le savent peut-être pas, mais dans le cadre de ses efforts de sensibilisation, Mme Reid faisait, avant la pandémie, un pèlerinage annuel de Toronto à Ottawa, ce qui ne semble pas très impressionnant jusqu'à ce que l'on sache qu'elle le faisait à pied. Elle l'a fait plusieurs années de suite pour tenter de sensibiliser le public et de recueillir des fonds pour cette cause. Je vous remercie de tout ce que vous faites. Ce n'est pas facile.
L'une des raisons pour lesquelles c'est difficile, c'est que nous parlons des victimes et de leurs droits. Les gens associent automatiquement les victimes aux personnes qui ont été victimes d'un crime, mais le terme « victime » a une définition plus large. Si l'on regarde la définition de « victime » dans cette Charte, à mon avis — et vous n'avez pas à me convaincre —, elle devrait également inclure les enfants des personnes qui ont commis des crimes. C'est pourquoi vous êtes ici aujourd'hui.
Le problème, c'est que cela a automatiquement une connotation négative, parce que d'une certaine manière, vous êtes à contre-courant, et je le comprends. Quand il est question de donner des droits spéciaux pour des crimes spéciaux, par exemple, et d'autres choses connexes, pour moi, on se concentre sur le crime et non sur les personnes, et c'est sur les personnes que nous devons nous concentrer. C'est ce que vous faites dans votre cause.
Qu'avez-vous à dire aux gens qui disent que nous ne devrions même pas parler des familles des personnes qui ont commis des crimes dans le cadre de cette discussion?
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Madame la présidente, de façon générale, mes observations portent moins sur des concepts généraux que sur le fonctionnement, mais la question qui a été posée est vraiment importante.
Au bout du compte, mon opinion personnelle, que j'ajouterai ici, c'est que tous les intervenants du système de justice pénale, du juge aux jurés en passant par les victimes présumées et les accusés, sont des êtres humains. Le gouvernement doit comprendre le fardeau que le système impose sur toutes les parties: juges, jurés, procureurs de la Couronne, avocats de la défense, plaignants et défendeurs. J'appuie entièrement l'idée qu'on essaie d'aider tous ceux qui font partie du système avec le soutien qui leur permettra de se remettre du traumatisme qu'ils ont subi à la suite de l'infraction présumée: aider les accusés à se remettre du traumatisme qu'ils ont subi et qui les a poussés à commettre l'infraction, et aider les jurés et les personnes qui travaillent dans le système et qui doivent observer les répercussions de l'infraction.
Pour répondre à la question directement, je serais favorable à ce qu'on élargisse les mesures de soutien en incluant les enfants des accusés comme victimes.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Je remercie Mme Reid et M. Berkes d'être ici ce matin.
Monsieur Berkes, c'est vrai que nous vous voyons souvent, mais c'est toujours un plaisir de vous recevoir.
Madame Reid, je ne connaissais pas vos capacités en matière de marche, mais je suis très impressionné d'apprendre que vous avez marché à plusieurs reprises de Toronto à Ottawa.
Madame Reid, je suis aussi impressionné par le fait que vous travaillez sur le dossier des enfants de parents incarcérés. Ce n'est pas un sujet facile et j'ai été touché d'apprendre cela, car je crois que notre système de justice oublie souvent ces gens.
Cela étant dit, les enfants de parents incarcérés, c'est une chose, mais j'aimerais aussi que vous nous parliez des parents d'enfants incarcérés.
Est-ce un aspect sur lequel vous travaillez? Est-ce que votre clientèle — si je peux utiliser ce mot — compte des parents d'enfants incarcérés?
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Merci, madame la présidente.
Oui, il s'agit bien d'un groupe d'individus dont nous devons également nous soucier. En ce qui concerne le travail que nous faisons à KIP Canada, nous nous concentrons sur les enfants et les jeunes et, par conséquent, sur leurs familles. Il est certain qu'en ce qui a trait aux familles dont les enfants ont des démêlés avec la justice, nous devons également soutenir les parents.
Je pense que lorsque les enfants sont touchés, ils subissent un niveau supplémentaire de traumatisme et de stress lorsque leurs parents sont en prison, mais nous devons également tenir compte des répercussions qu'a le fait qu'un membre d'une famille, peu importe lequel, a des démêlés avec la justice sur l'ensemble de la famille, y compris les parents.
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Actuellement, au Canada, les enfants et les familles touchés par le système de justice sont mal servis. Ils ne bénéficient pas du soutien dont ils ont besoin, et c'est à cet égard que nous devons investir des ressources.
En ce qui concerne les types de services, je conviens que le counselling est très important. De plus, en raison des préjugés associés au fait qu'un parent ait des démêlés avec la justice, les enfants ont l'impression d'être les seuls à vivre cette situation. Il est essentiel de les mettre en contact avec des pairs et il doit y avoir des groupes de soutien et de mentorat, afin de favoriser leur réussite scolaire pendant qu'ils grandissent. C'est très important.
De plus, je pense qu'ils doivent être inclus et que leur voix doit être entendue à toutes les étapes du processus dans le système de justice, lorsque nous prenons des décisions qui les concernent.
Enfin, nous savons à quel point il est important pour les enfants d'entrer en contact avec leurs parents. Si nous voulons rétablir l'unité familiale, et si l'enfant souhaite avoir ce contact, nous devons nous assurer que nous créons des possibilités de le favoriser et de réduire les obstacles. Actuellement, il existe de nombreux obstacles à cet égard.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
J'aimerais remercier les témoins de leur présence.
Je tiens à vous remercier tout particulièrement, madame Reid. J'ai enseigné le droit pénal pendant 20 ans avant mon arrivée au Parlement, et j'ai rarement examiné la question des enfants dont les parents sont incarcérés, sauf sur une base individuelle. Je pense que vous avez fait un travail très utile en attirant notre attention sur cette question de façon plus systématique.
Ma question porte sur ce qui caractérise les enfants. Nous savons que certains groupes de notre société — les groupes marginalisés, les Autochtones, les Canadiens racialisés — sont largement surreprésentés dans notre système carcéral. Je suppose donc que les caractéristiques des enfants dont les parents sont incarcérés reflètent ce fait. Je me demande si vous pourriez nous dire quelque chose à ce sujet.
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Chose certaine, un système centralisé de recours serait le mécanisme le plus efficace, qui permettrait en plus d'accroître la satisfaction.
Pour avoir travaillé dans l'appareil de justice pénale depuis plus de 20 ans maintenant, voici ce qui est dommage à propos du système. Lorsqu'une décision est équitable, toutes les parties impliquées sont généralement mécontentes du résultat. Demandez à un criminaliste comment savoir si un jugement est juste, et il répondra que c'est lorsque personne n'en est satisfait.
Il va sans dire que la présence d'un système centralisé pour traiter ces plaintes...
Je suis d'avis qu'il y a parfois des problèmes structurels impossibles à contourner, et que les gens seront insatisfaits du résultat quoiqu'il arrive. Cependant, lorsque je tente d'expliquer au plaignant le fonctionnement passé du système dans une situation similaire à la sienne, puis ce qui serait idéal, je constate que le plaignant n'est peut-être pas satisfait du résultat, mais qu'il le comprend.
Si vous me le permettez, j'aimerais revenir sur ce que Mme Reid a dit précédemment. Le Parlement est saisi d'un projet de loi visant à supprimer les peines minimales obligatoires, qui sont la principale cause de la surreprésentation des communautés marginalisées et autochtones dans les prisons. Les conséquences dévastatrices qu'a l'incarcération de ces personnes ne se limitent pas à elles; elles se répercutent également sur leurs familles et leurs enfants. Votre comité devrait s'occuper du projet de loi à la première occasion et l'adopter le plus rapidement possible.
L'Association du Barreau canadien a adopté une résolution pour demander au Parlement de supprimer les peines minimales obligatoires.
Je vous remercie.
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Je vous remercie infiniment, madame la présidente.
Je tiens à dire que je suis très ébranlé, comme nous le sommes probablement tous, par ce qui s'est passé à London, en Ontario, il y a 36 heures. Ces nouvelles pèsent lourd sur nos épaules à tous, et à juste titre: une famille musulmane a été la cible d'un crime horrible motivé par la haine, d'un acte terroriste qui lui a coûté la vie.
Je pense aux victimes de haine et de gestes ciblés. Je sais qu'aucun des témoins n'a abordé le sujet directement, mais je pourrais poser la question à M. Berkes.
Monsieur, vous avez dit brièvement ce que vous pensez du projet de loi , qui porte sur les peines minimales obligatoires, et je suis tout à fait d'accord avec vous. La Chambre est également saisie du projet de loi , qui se rapporte un peu à la question que je soulève. Il traite des signaux d'alarme et de la façon d'aborder les personnes qui pourraient commettre un acte haineux. En les interpellant, il serait possible de leur confisquer des armes, y compris des armes à feu.
À votre avis, quelle serait l'incidence d'une telle législation sur la protection des Canadiens?
Je vous remercie, monsieur.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Monsieur Berkes, j'aimerais que vous nous parliez de la définition de « victime » que l'on retrouve actuellement dans la Charte. On parle d'un particulier ayant subi des dommages, et ainsi de suite. C'est une définition large, mais qui n'est peut-être pas appliquée de façon uniforme partout au Canada et au Québec dans les tribunaux. L'application peut varier selon les juges et selon les autorités administratives provinciales.
N'y aurait-il pas lieu de préciser cette définition ou de mentionner dans les dispositions générales que ces termes-là incluent notamment, sans pour autant exclure les termes généraux, telle ou telle situation?
Par exemple, les notions de familles des victimes et d'agresseurs n'apparaissent pas spécifiquement ici. Elles devraient peut-être être mieux couvertes.
Quel est votre avis, monsieur Berkes?
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Je vais encore une fois essayer d'être très bref, madame la présidente.
En ce qui a trait à la terminologie employée par les avocats de la défense, le terme « victime » est fort complexe. Pour ce qui est de la façon dont nous voyons ou nommons les choses, nous privilégions le terme « plaignant » pour désigner la personne qui dépose une plainte de nature criminelle.
Les autres parties peuvent être des témoins. Elles peuvent subir les répercussions tant de l'accusation que du fonctionnement du système judiciaire.
Je pense que si vous n'utilisez pas le terme « victime » pour désigner ces personnes, mais que vous dites simplement ce qu'elles sont — la famille du défendeur ou celle du plaignant —, vous accordez moins d'importance aux étiquettes au profit des êtres humains. Voilà qui permet de répondre à leurs propres besoins, qui diffèrent nettement selon l'endroit où ils se trouvent dans la salle d'audience. Pour la famille du défendeur, le besoin immédiat peut consister à ce que l'individu revienne chez lui pour purger une peine avec sursis, ce qui évite de déchirer la famille. Quant à la famille du plaignant, elle aura peut-être besoin de services de consultation.
Si nous nous intéressons plus aux besoins qu'aux étiquettes, je pense que nous améliorerons le niveau de justice pour toutes les parties prenantes du système.
Je vous remercie.
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Je tiens à remercier la présidente. Permettez-moi de faire deux petites remarques.
D'une part, à l'instar de tous les membres du Comité, je souhaite exprimer notre stupéfaction et notre horreur à l'endroit du crime haineux de London. Nous allons redoubler d'efforts pour lutter contre la haine au Canada, qu'elle soit fondée sur l'islamophobie ou sur tout autre motif.
D'autre part, d'après les témoignages que nous avons entendus jusqu'à maintenant, et aussi ceux que nous allons écouter, je sais que les réunions nous ont fait comprendre que l'examen quinquennal de la législation relative aux victimes d'actes criminels doit bel et bien avoir lieu.
Puisque le temps file, je vais laisser le Comité accueillir le prochain groupe de témoins.
Je vous remercie.
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Reprenons. Je remercie nos témoins de prendre le temps de comparaître aujourd'hui.
Je tiens à informer les participants que les services d'interprétation se trouvent au bas de l'écran.
Veuillez sélectionner la langue dans laquelle vous souhaitez entendre les délibérations. Vous pouvez parler dans la langue officielle de votre choix. Exprimez-vous lentement et clairement, afin de faciliter l'interprétation pour nous tous, mais surtout pour nos interprètes. Lorsque vous avez fini de parler, veuillez remettre votre micro en sourdine. Lorsque vous parlez, assurez-vous que votre microphone est activé. Ce serait utile.
Sur ce, je souhaite la bienvenue à nos témoins.
Nous accueillons l'honorable sénateur Pierre‑Hugues Boisvenu. Bienvenue devant notre comité.
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Nous recevons également Mme Jo‑Anne Wemmers, qui est professeure titulaire à l'École de criminologie du Centre international de criminologie comparée à l'Université de Montréal.
Pour terminer, nous écouterons l'avocat Leo Russomanno, de la Criminal Lawyers' Association.
On m'informe que M. Russomanno n'a pas effectué son test de son avant le début de la réunion. Monsieur, veuillez vous assurer de parler très lentement, clairement et fort pour éviter les délais dans l'interprétation.
Comme les témoins le savent peut-être, j'ai des cartons pour signaler qu'il reste une minute et 30 secondes à vos remarques liminaires, afin de vous aider à respecter le temps imparti.
Nous allons commencer par l'honorable sénateur, qui a cinq minutes.
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Je vous remercie beaucoup, madame la présidente.
Mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de me donner l'occasion de vous adresser la parole aujourd'hui sur la Charte canadienne des droits des victimes, adoptée par le gouvernement conservateur en 2015. J'ai œuvré pendant presque 10 ans à l'adoption de cette Charte.
En 2005, trois ans après l'assassinat de ma fille Julie, j'ai eu une rencontre privée avec M. Stephen Harper. Ce dernier a pris l'engagement personnel de faire de son gouvernement le gouvernement des victimes et d'adopter une charte des victimes. Sans cet engagement, cette charte n'aurait jamais vu le jour. Il a tenu parole et je tiens à l'en remercier.
La Charte canadienne des droits des victimes se voulait avant tout une reconnaissance pour les victimes d'actes criminels de leurs droits au sein du système de justice pénale. Cette loi supraconstitutionnelle, faut-il le répéter, repose sur quatre droits fondamentaux que les acteurs du système de justice pénale ont l'obligation de respecter: le droit à l'information, à la participation, à la protection et au dédommagement.
Malheureusement, depuis son introduction il y a maintenant six ans, les victimes ne sont pas toujours traitées selon les principes de la Charte. En théorie, la Charte a pour objectif de rééquilibrer les droits des criminels et des victimes dans le système de justice en recentrant l'importance du rôle de ces dernières. En pratique, ce concept n'a pas été appliqué correctement, comme en témoigne le rapport intitulé « Le rapport final sur l'examen du système de justice pénale du Canada », paru en 2020.
Tout d'abord, le rapport montre que les victimes ont de la difficulté à signaler le crime qu'elles ont subi à la police par peur d'en subir les conséquences et de crainte que leur cas ne soit pas pris au sérieux. Cette perte de confiance est le résultat d'une justice qui est souvent très laxiste à l'égard des agresseurs des victimes de violence conjugale et d'agression sexuelle, notamment. Ainsi, les articles 9, 10 et 13 contenus dans la section Droit à la protection ne sont pas respectés.
Je vous rappelle que, parmi les 160 femmes assassinées au Canada en 2019, la majorité avait dénoncé leur agresseur à la justice. Cela leur a coûté la vie. Le rapport souligne également un manque de compassion et de respect envers les victimes quand elles se trouvent à l'intérieur du système de justice.
L'automne dernier, j'ai déposé un projet de loi au Sénat modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition afin d'aider les familles de victimes qui se sentaient exclues par la Commission des libérations conditionnelles du Canada lorsqu'il s'agissait de les informer du déroulement des audiences de libération conditionnelle.
Alors que le Sénat et la Chambre ont rapidement adopté des motions permettant de tenir des séances par vidéoconférence, est-il normal que la Commission des libérations conditionnelles du Canada ait pris presque une année afin de permettre aux familles de victimes d'assister à ces audiences? L'article 8 contenu dans la section Droit à l'information n'a donc pas été respecté. Les failles expliquées dans ce rapport sont une conséquence directe d'un manque d'action du gouvernement fédéral pour ce qui est de faire respecter, par ses propres institutions, la Charte canadienne des droits des victimes. Lorsqu'une loi aussi complexe que celle-ci est appliquée, le gouvernement a le devoir de s'assurer de sa mise en œuvre et de l'améliorer en continu.
Le rapport intitulé « Rapport d'étape: Charte canadienne des droits des victimes » du Bureau de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels, paru en 2020 également, nous indique que les possibilités de formation offertes aux représentants du système de justice pénale sont limitées et qu'il n'y a eu aucune campagne pour informer les victimes et la population canadienne de leurs droits.
Le premier point soulevé dans le rapport d'étape est l'absence de recours juridique en cas de non-respect des dispositions de la Charte. Lorsque les droits des victimes ne sont pas respectés, ces dernières n'ont aucun recours possible devant les tribunaux. Elles peuvent toujours formuler des plaintes auprès de l'organisme mis en cause, mais aucun mécanisme de gestion de ces plaintes n'a été mis en place, tel que le prévoyait la Charte lors de son adoption en 2015.
Pour remédier à ce problème, il est impératif que la première recommandation du rapport soit mise en place, c'est-à-dire: « Supprimer les articles 27, 28 et 29 de la Charte canadienne des droits des victimes, qui interdisent aux victimes d’interjeter appel devant les tribunaux lorsque leurs droits ne sont pas respectés. »
L'autre point important concerne une modification qu'il me semble urgent d'adopter pour améliorer le traitement de ces plaintes. Le Bureau de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels relève directement du ministre et du ministère de la Justice. En raison de l'importance du mandat de l'ombudsman, son indépendance par rapport au ministère de la Justice est obligatoire, et une loi devrait être adoptée en ce sens afin que ce poste relève directement du Parlement. Le Bureau de l'ombudsman devrait également être la seule autorité compétente pour examiner les plaintes des victimes d'actes criminels relatives à la façon dont elles sont traitées par un ministère ou un organisme fédéral.
Si l'enquêteur correctionnel relève du Parlement pour que son indépendance soit respectée, pourquoi n'en est-il pas ainsi pour l'ombudsman des victimes d'actes criminels?
Messieurs et mesdames les députés, la révision quinquennale de la Loi est incontournable. En 2015, nous étions conscients que nous venions de donner aux victimes un véhicule pour la reconnaissance égale de leurs droits. Malheureusement, depuis son adoption, le gouvernement fédéral a oublié d'entretenir ce véhicule et, ce qui est pire encore, il n'a placé personne à bord pour le conduire.
Il vous appartient maintenant de décider du sort de la Charte canadienne des droits des victimes. Sans révision quinquennale pour entendre la voix et l'opinion des victimes, le système de justice aura peine à rétablir la confiance que ces dernières ont perdue dans la justice canadienne.
Je vous remercie beaucoup de votre attention.
Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
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C'est un honneur d'être ici. Je vous remercie de m'avoir invitée.
La Charte canadienne des droits des victimes est bel et bien un pas dans la bonne direction, mais il reste plusieurs problèmes à régler. Il incombe au Canada d'appliquer partout au pays la Déclaration des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux victimes d’abus de pouvoir, qui a été adoptée par les Nations unies en 1985 — le Canada fait d'ailleurs partie des pays à la tête de cette initiative. Malheureusement, le Canada ne respecte pas pour l'instant les normes minimales à l'égard des victimes d'actes criminels.
Des éléments déterminants de la Déclaration des Nations unies, comme l'indemnité de l'État, le soutien aux victimes et la justice réparatrice, brillent par leur absence de la Charte canadienne des droits des victimes.
Par exemple, selon les articles 12 et 13 de la Déclaration des Nations unies, les États doivent créer des programmes d'indemnisation à l'intention des victimes de violence. Au Canada, les provinces et les territoires n'offrent pas tous de tels programmes en ce moment. Cette disparité doit être rectifiée afin que tous les Canadiens aient accès aux normes minimales établies par les Nations unies. La Charte canadienne des droits des victimes doit être modifiée pour inclure ces droits fondamentaux des victimes. Plus précisément, il faut modifier la Charte pour y inclure l'accès au soutien aux victimes, à la justice réparatrice et aux programmes d'indemnisation de l'État.
En deuxième lieu, en ce qui a trait au dédommagement et à l'exécution d'une ordonnance de dédommagement, l'article 17 de la Charte canadienne des droits des victimes dit aux victimes de s'adresser au tribunal civil. Or, nous savons qu'un jugement en matière civile n'aide pas vraiment les victimes. C'est bien connu depuis 20 ou 30 ans dans le milieu de la recherche. Puisqu'une telle disposition est inadéquate, d'autres pays ont confié à l'État, plutôt qu'aux victimes, la responsabilité d'exécuter les ordonnances de dédommagement. Elles sont gérées de la même façon que les amendes. L'État a déjà des mécanismes pour s'assurer que les amendes sont payées, des systèmes qui peuvent être utilisés pour récupérer le dédommagement dû par un délinquant. J'aborde cette question dans ma recherche en bref qui s'intitule « Le dédommagement dans le contexte de la justice pénale », que j'ai joint à mes documents hier. Il est disponible en anglais et en français.
Troisièmement, en ce qui concerne la langue, l'article 3 de la Déclaration des Nations unies prévoit que les droits et les services s'appliquent à toutes les victimes, sans distinction de langue, de race, de sexe, d'âge, et ainsi de suite. Le Canada est officiellement bilingue, sans compter les nombreuses autres langues et les langues autochtones qui s'y trouvent. Le système de justice pénale est conçu pour répondre aux besoins linguistiques des accusés et des délinquants, mais il ne tient pas compte des besoins linguistiques des victimes.
Voici un exemple qui n'est malheureusement pas rare dans les tribunaux de Montréal. Il arrive qu'une partie — disons le contrevenant — parle une langue, comme l'anglais, et que la victime en parle une autre, comme le français. L'accusé a accès à des services de traduction, à juste titre, mais pas la victime. Si la victime souhaite assister au procès et suivre l'affaire, elle ne peut même pas demander à un ami bilingue de l'accompagner pour l'aider à traduire. Puisque ce sont des citoyens, il s'agit d'un tribunal public, et personne n'est autorisé à parler pendant le procès.
Le problème ne se limite pas à la salle d'audience. Les services tels que les programmes d'indemnisation ont souvent des sites Web unilingues, des formulaires unilingues, et ainsi de suite. Plus précisément, la Charte canadienne des droits des victimes devrait être modifiée pour que les droits et les services s'appliquent de manière équitable, sans distinction de langue, de race, de sexe, d'âge, et ainsi de suite.
En quatrième lieu, les droits énoncés dans la Charte canadienne des droits des victimes ne sont pas exécutoires. J'étais ravie d'entendre le sénateur soulever la question lui aussi. Par conséquent, lorsque les droits des victimes ne sont pas respectés, celles‑ci n'ont aucun recours. À quoi servent les droits s'ils ne sont pas exécutoires? Les victimes sont impuissantes devant un État omnipotent qui a le pouvoir de les obliger à témoigner ainsi que de les mettre à l'écart. Nous devons reconnaître qu'un crime est une violation des droits de la personne des victimes, ainsi qu'une atteinte à la société.
Pour traiter les victimes avec dignité et respect, il faut reconnaître que ce sont des personnes devant la loi, qui ont des droits et des recours. La Charte canadienne des droits des victimes doit être modifiée pour inclure un mécanisme d'exécution. Sinon, je cite le juge ontarien Gerald Day, qui en conclut que la législature ne voulait pas que la Déclaration des droits des victimes procure des droits aux victimes. C'est ce qu'il a dit en 1999 dans la décision Vanscoy et Even. Dans cette affaire, deux victimes ont dit au gouvernement que leurs droits énoncés dans la Charte des droits des victimes d'actes criminels de l'Ontario n'avaient pas été respectés.
J'ai joint une copie du chapitre 7 de mon livre Victimologie: une perspective canadienne, dans lequel j'aborde les droits des victimes au Canada et à l'étranger.
Plus précisément, les articles 27, 28 et 29 de la Charte canadienne des droits des victimes devraient être supprimés, puis remplacés par un mécanisme d'exécution.
Modifier le libellé de la Charte canadienne des droits des victimes, notamment à l'article 20, afin de reconnaître les droits de la personne des victimes et de reconnaître que le crime dont elles ont fait l'objet constitue une violation de leurs droits de la personne.
Au nom de la Criminal Lawyers' Association, je vous remercie de nous avoir invités à comparaître à nouveau au sujet de cet important projet de loi. Si je me souviens bien, il y a environ cinq ou six ans, j'ai comparu devant un comité sénatorial pour parler de ce projet de loi. Je pense qu'il est important que le Comité examine les projets de loi après leur promulgation, afin d'évaluer leur performance.
Je n'ai pas l'intention d'utiliser la totalité de mes cinq minutes. D'après mon expérience, le dialogue le plus utile se produit lors de l'échange de questions et de réponses avec les membres du comité.
J'aimerais préciser que certains membres de la Criminal Lawyers' Association pratiquent principalement le droit pénal. Cela comprend également la prestation de conseils juridiques indépendants aux plaignants et aux victimes présumées. Dans ma propre pratique, je me suis occupé de nombreux dossiers dans lesquels j'ai fourni des conseils juridiques indépendants à des témoins, à des victimes présumées et à des plaignants.
Je pense que le point de vue des parlementaires est très important, mais la perspective de la Criminal Lawyers' Association est directement liée aux questions que les députés pourraient se poser sur les effets concrets de certains de ces changements dans les tribunaux de première instance.
En général, je dirais que la Criminal Lawyers' Association est préoccupée par les cas où les aspirations ne correspondent pas à la réalité sur le terrain et aux investissements dans le système de justice pénale. Nous pouvons aspirer à créer un meilleur système, mais si nous ne nous en donnons pas les moyens sur le terrain en investissant dans le système et dans des modèles d'accès à la justice, ces aspirations ne sont que des paroles creuses.
L'accès à la justice est une expression à la mode. Tout le monde aime parler de l'accès à la justice. Mais trop souvent, d'après mon expérience, lorsque vient le temps d'investir dans le système de justice pénale, ce n'est plus qu'un slogan. Et sans suivi et sans investissement, l'accès à la justice restera un objectif inatteignable. Il est important d'aborder certaines de ces questions et de chercher à comprendre comment les victimes, les témoins et les plaignants voient le système de justice pénale.
Je m'arrêterai donc ici pour le moment. Je serais heureux de recevoir les commentaires ou les questions des membres du Comité. Je vous remercie.
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D’abord, je tiens à informer le Comité que le projet de loi a été écrit avec au-delà d’une centaine de femmes qui ont toutes été victimes de violence conjugale, dont une grande partie ayant été victimes de tentatives de meurtre. Nous leur avons donné le crayon et nous leur avons tout simplement demandé quelles étaient les modifications qu’elles voulaient voir apporter au Code criminel.
Trois éléments importants en sont ressortis.
Le premier élément est de mieux surveiller les agresseurs lorsqu’ils sont en instance de procès en utilisant le bracelet électronique, qui est déjà utilisé à certains égards au Canada et dans de nombreux pays.
Le deuxième élément est d’introduire dans le Code criminel l’obligation, pour les agresseurs, de suivre une thérapie. Il s'agit donc de travailler sur la cause de la violence. Les conséquences sont les femmes qui se font assassiner, mais les causes sont souvent des hommes qui maîtrisent mal leurs émotions. En imposant aux agresseurs l'obligation de suivre une thérapie, nous allons travailler directement sur les causes.
Le troisième élément est d’introduire dans le Code criminel des prescriptions en ce qui a trait aux ordonnances de ne pas troubler la paix et d’introduire un nouveau chapitre particulier concernant la violence conjugale.
Ce premier pas que nous faisons vise à assurer une meilleure protection des femmes et, surtout, à réduire le nombre d’assassinats au Canada. Au Québec, chaque année, on dénombre un nombre d'assassinats qui équivaut au nombre de victimes de la tuerie de l'École polytechnique. Ce sont annuellement entre 12 et 15 femmes qui se font assassiner au Québec. La pandémie a fait augmenter ce nombre de crimes.
C’est un projet de loi très important. Mon collègue M. Jacques Gourde l’a déposé à la Chambre des communes. Je pense que la Chambre des communes devrait rapidement étudier ce projet de loi, car des vies en dépendent.
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Je suis tout à fait d'accord.
Mesdames et messieurs les députés, permettez-moi de faire une comparaison avec la Charte canadienne des droits et libertés, qui a été adoptée en 1982. Cette dernière a vraiment évolué depuis son adoption en fonction des décisions des tribunaux. Cela ne s'est pas produit depuis six ans pour la Charte canadienne des droits des victimes. Celle-ci est un véhicule théorique, mais il faut passer de la théorie à la pratique. En ne gérant pas les plaintes de façon concentrée à un endroit, par exemple au Bureau de l'ombudsman, on ne peut obtenir une image réelle de la faiblesse de cette charte et de l'opinion des victimes.
Mme Illingworth, l'ombudsman du Bureau de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels, a tout à fait raison de dire qu'il faut donner à son bureau la responsabilité de gérer les plaintes. J'ajouterai qu'il faut lui donner toute son indépendance, parce que la nature de son poste risquerait de la placer en conflit d'intérêts avec le ministre si elle avait à évaluer des plaintes concernant son ministère.
L'ombudsman doit donc relever directement de la Chambre des communes, comme c'est le cas pour l'enquêteur correctionnel. Ce sera à tous les députés d'évaluer la qualité de cette charte et de veiller à ce que les organismes fédéraux y adhèrent. Cette indépendance est très importante.
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Chaque jour, chaque semaine, des victimes d'actes criminels, qui sont aux prises avec le système de justice, contactent mon bureau pour obtenir du soutien. Lorsque je renseigne ces victimes sur le contenu de la Charte, je suis renversé d'apprendre que les avocats de la Couronne, qui représentent l'État, n'ont aucune idée du contenu de la Charte. C'est souvent le cas de certains juges aussi.
Il n'y a pas eu de campagne d'information pancanadienne pour informer les avocats de la Couronne du contenu de la Charte, ni pour offrir de la formation aux juges quant au contenu de la Charte, ni pour fournir de l'information à la population. Qui sait si, demain matin, on ne sera pas victime d'un acte criminel? On n'a aucune idée des droits que le système doit nous offrir.
À ce chapitre, il faut que le gouvernement fédéral transmette l'information de la même façon qu'il le fait dans d'autres dossiers, comme la santé, l'industrie et l'environnement. Il faut informer les gens du contenu de cette Charte, sans quoi nous serons toujours au même point dans cinq ans.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Bonjour, chers collègues.
J'aimerais remercier tout particulièrement les témoins des témoignages importants qu'ils ont livrés aujourd'hui.
Avant de commencer, je tiens à dire que tous les habitants de ma circonscription de Cape Breton—Canso et moi-même sommes de tout cœur avec les victimes de la fusillade de London, en Ontario, et leurs familles. C'est une immense tragédie.
Madame Wemmers, dans la nuit du 18 au 19 avril, ma province, la Nouvelle-Écosse, a été victime d'une horrible tragédie, qui est maintenant connue comme la pire fusillade de masse de l'histoire du Canada. Le tireur est entré dans 16 petites collectivités rurales de ma province, a tué 22 personnes et blessé 3 autres, dont des agents de la GRC. C'est un chapitre exceptionnellement triste de l'histoire de la Nouvelle-Écosse et du Canada. Dix jours seulement après cette tragédie, notre gouvernement a annoncé l'interdiction immédiate de quelque 1 500 marques et modèles d'armes d'assaut de qualité militaire.
Je pense que nous savons tous que les victimes qui survivent à de tels actes violents subissent souvent un traumatisme émotionnel et physique.
Madame Wemmers, que signifie cette interdiction pour les victimes de la violence armée ou pour les victimes d'autres formes de criminalité, par exemple la violence familiale? Vous en avez parlé en détail dans votre déclaration préliminaire, mais j'aimerais vous donner l'occasion d'approfondir certains des points que vous avez soulevés. Pensez-vous que notre gouvernement pourrait faire davantage pour soutenir les victimes de la violence armée ou leur famille à l'avenir?
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Oui, je pense que nous pouvons faire plus. En particulier, l'indemnité offerte par la Nouvelle-Écosse aux victimes de violence, par exemple, est très limitée. La province offre des soins psychologiques, ce qui est très important, mais c'est tout ce qui est offert.
Par conséquent, il y a de grandes différences entre les différentes régions du Canada. En effet, certaines provinces n'offrent absolument rien. Par exemple, Terre-Neuve-et-Labrador n'offre rien du tout. Les territoires non plus. C'est inacceptable.
Donc, oui, il y a beaucoup à faire et on peut faire beaucoup plus pour veiller à ce que le Canada respecte les normes minimales établies dans la Déclaration des Nations unies, afin de répondre aux besoins des victimes. Je pense notamment à l'horrible événement qui s'est produit récemment à London, en Ontario. Mes premières pensées ont porté sur l'aide et l'assistance qui sont actuellement offertes en Ontario pour l'enfant qui a survécu. En effet, l'année dernière, le gouvernement ontarien a éliminé son programme d'indemnisation de l'État. Ce qui était offert auparavant, après 20 ans d'efforts pour améliorer l'aide offerte, a été remplacé par une offre très minime de services, en comparaison avec le Québec, par exemple.
C'est très inquiétant. Nous devrions au moins établir des normes minimales qui s'appliquent à l'échelle du pays, afin que les services essentiels de base soient offerts à tous les Canadiens qui sont victimes de violence.
Cela répond‑il à votre question?
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Oui. Je vous suis très reconnaissant de vos commentaires.
Madame Wemmers, le projet de loi , Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le ministère de la Justice et apportant des modifications corrélatives à une autre loi, a récemment modifié le Code criminel, afin de donner aux plaignants dans les cas d'agression sexuelle le droit de participer aux procédures visant à déterminer l'admissibilité des preuves concernant leurs antécédents sexuels ou d'être représentés dans le cadre de cette procédure. Notre gouvernement considère qu'il s'agit d'un changement important pour soutenir les victimes d'agression sexuelle.
Encore une fois, dans le même ordre d'idées, y a‑t‑il d'autres moyens, par l'entremise de la Charte canadienne des droits des victimes ou un autre instrument, par lesquels notre gouvernement pourrait soutenir les victimes d'agression sexuelle?
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Je vous remercie, madame la présidente.
Sénateur Boisvenu, si vous me le permettez, je vous donnerai l'occasion de formuler votre pensée plus tard.
J'aimerais d'abord poser une question à Mme Wemmers.
Madame Wemmers, j'ai bien aimé les quatre sujets que vous nous avez présentés, et le quatrième m'intéresse particulièrement. Il s'agit de la question du renforcement des mécanismes et de leur mise en œuvre.
À votre avis, les services offerts actuellement par l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels au Canada sont-ils suffisants et adaptés aux diverses situations? Devrait-on effectuer des changements à cet égard? Est-ce que certaines responsabilités devraient être transférées à un autre service d'aide aux victimes?
Je vais passer à un autre sujet, madame Wemmers.
Comme le sénateur Boisvenu, vous avez dit que les articles 27, 28 et 29 devraient être supprimés de la Charte canadienne des droits des victimes afin de permettre aux victimes d'exercer des recours lorsque leurs droits ne sont pas respectés.
Selon vous, quels recours les victimes devraient-elles exercer dans une situation particulière où un droit n'est pas respecté? Les victimes auraient-elles le droit de demander de porter en appel une décision rendue contre l'accusé? Voudrait-on que les victimes demandent, le cas échéant, un dédommagement à l'accusé ou au gouvernement?
À votre avis, quels sont les recours spécifiques que les victimes auraient avantage à exercer, mais qu'elles ne peuvent exercer actuellement à cause des articles 27, 28 et 29?
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Je vous remercie de la question.
Nous avons plusieurs exemples de recours exercés dans d'autres pays. Par exemple, aux États‑Unis, chaque État a sa propre déclaration des droits, qui inclut des droits exécutoires. C'est intéressant, car les États‑Unis utilisent le système de common law, tout comme le Canada, mais leur système inclut des droits exécutoires.
Par exemple, dans l'État de l'Oregon, il existe un recours que l'on appelle le mandamus, lequel se trouve aussi dans le Code criminel du Canada...
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La grande faiblesse de l'aide aux victimes, notamment en ce qui a trait au dédommagement, c'est qu'elle relève des provinces. Quatre provinces ont de bons services, quatre provinces ont des services minimaux et quatre provinces et territoires n'offrent pas de services aux victimes. Les Canadiens et les Canadiennes ne sont donc pas égaux devant la loi.
Par ailleurs, si un crime est commis en Ontario, mais que la victime est québécoise, elle ne sera pas indemnisée par sa province. Le crime doit avoir lieu dans la province où demeure la victime. Le ministre de la Justice devrait faire preuve de leadership, imposer des normes minimales, comme c'est le cas dans le domaine de la santé et divers programmes, et s'assurer que tous les Canadiens sont traités de manière égale, peu importe où le crime a été commis. C'est totalement anormal qu'un Québécois agressé à Vancouver, par exemple, ne reçoive pas d'aide de la Colombie‑Britannique ni du Québec. Par contre, le Québec tend à le faire, au moyen de sa nouvelle loi.
Il y a certainement un leadership à développer au sein du gouvernement fédéral, dans le cadre de réunions des ministres de la Justice, pour parler de la réciprocité entre les provinces et des normes minimales sur le plan de l'aide aux victimes. À mon avis, c'est le minimum que le pays doit faire.
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Je présume que c'est un peu inquiétant, étant donné la notion d'indépendance des procureurs et les décisions difficiles que doivent prendre les procureurs de la Couronne.
Je n'œuvre pas dans ce domaine — je n'ai jamais été sous-procureur de la Couronne ou procureur de la Couronne —, mais je crois comprendre que lorsqu'il s'agit de retirer des accusations graves, par exemple des accusations concernant des armes à feu ou des allégations d'agression sexuelle, des accusations de cette nature, ce n'est pas simplement le procureur de la Couronne qui prend la décision unilatérale de retirer une accusation.
Mon expérience concerne surtout l'Est de l'Ontario, mais je crois que le Guide des procureurs de la Couronne énonce qu'un procureur de la Couronne responsable d'un dossier doit consulter les procureurs principaux de la Couronne, sinon le procureur de la Couronne de l'instance en question ou un sous-procureur de la Couronne, et participer à une discussion très sérieuse avant de retirer l'accusation. Il ne s'agit pas d'une décision improvisée ou d'une décision prise unilatéralement, mais d'une décision prise dans les circonstances où… Encore une fois, d'après ma propre expérience dans l'Est de l'Ontario, ces décisions ne sont pas prises à la légère.
J'imagine que je me demande à quoi cela ressemble sur le terrain. L'examen d'une décision serait… Dans quel forum cela se ferait‑il? Je suis inquiet à l'idée d'accaparer davantage de ressources judiciaires dans un système qui manque déjà de ressources et qui fait face à des retards systémiques. Je m'inquiète aussi de l'impact que cela pourrait avoir sur l'indépendance du processus de poursuite.
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Comme l'a également mentionné le sénateur, c'est ce que nous faisons dans d'autres domaines, par exemple les services médicaux, où il y a au moins des exigences minimales à l'échelle du pays, et il revient ensuite aux provinces de les respecter de la manière qui leur convient.
Je pense que le point de départ serait la Déclaration des Nations unies des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux victimes d'abus de pouvoir.
Si vous le souhaitez, je peux vous donner des exemples encore plus probants. Par exemple, le Conseil de l'Europe, qui est beaucoup plus précis et détaillé, va dans le même sens et affirme essentiellement la même chose, mais avec plus de détails et de précision. En ce sens, il est intéressant de souligner que le Conseil de l'Europe travaille actuellement à l'élaboration d'une nouvelle recommandation pour les victimes d'actes criminels. C'est donc quelque chose que nous voyons à l'échelon international. Ce serait une occasion pour le Canada de rattraper son retard, car, si je pense que le Canada était un chef de file en matière de droits des victimes dans les années 1980, il semble malheureusement avoir perdu cette avance au cours des 20 dernières années. Je serais très heureuse de nous voir faire mieux, car nous pouvons faire mieux.
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Merci de votre patience.
Chers collègues, je regarde l'horloge. Il nous reste environ 10 minutes de réunion. Je voulais clarifier quelque chose avant de répartir le reste du temps pour les membres.
En ce qui concerne M. Niemi, je sais que nous avons parlé d'annexer ses déclarations aux témoignages d'aujourd'hui, mais je demande aux membres si nous voulons continuer avec ce que nous avons convenu, ou si nous devrions le réinviter pour jeudi? Nous devons garder à l'esprit que les deux groupes de témoins de jeudi sont remplis, avec trois témoins par groupe, alors ce pourrait être un peu difficile, mais nous ferons de notre mieux pour que cela fonctionne.
Si les membres peuvent me donner quelques éclaircissements à ce sujet, ce serait utile.
Monsieur Garrison.
Le greffier communiquera avec M. Niemi et lui offrira l'une ou l'autre des deux heures, soit la première soit la deuxième. Nous aurons donc quatre témoins pour l'un des groupes, et nous continuerons à partir de là.
Avec le temps qu'il nous reste, et je me rends compte que nous devons absolument terminer à 13 heures, ce que je vais faire, comme je l'ai fait à la dernière heure, c'est de proposer une question par parti, en commençant par M. Cooper, qui comparaît en personne aujourd'hui.
Allez‑y, monsieur Cooper.
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Je vous remercie, monsieur le député. Vous soulevez un point très important.
Comme beaucoup de députés, je veux aussi offrir mes condoléances à la communauté londonienne pour les événements qui se sont produits récemment.
Il faut comprendre que l'ombudsman traite des plaintes de tous les organismes fédéraux et que ce poste relève d'un ministère. Il va donc un jour ou l'autre se retrouver en conflit d'intérêts.
En 2017 ou en 2018, un projet de loi a été déposé par la députée Sylvie Boucher, je crois, pour que ce poste relève de la Chambre des communes et qu'il soit rendu permanent.
Actuellement, le poste d'ombudsman est un programme qui relève du ministère de la Justice et qui peut être aboli en tout temps. Ce n'est pas une loi qui a créé ce poste. Il est important de rendre ce poste permanent dans la structure, parce que les victimes sont aussi importantes que les criminels qui, eux, bénéficient d'un enquêteur qui fait partie de la structure de façon permanente, qui relève d'une loi et qui relève du Parlement. Encore une fois, on dirait que l'on traite les victimes comme des personnes de second ordre et que l'on accorde plus d'importance aux criminels.
Ce n'est pas mon intention de retirer des droits au poste d'enquêteur correctionnel, mais bien de le mettre sur un pied d'égalité avec celui de l'ombudsman en inscrivant le poste de celui-ci dans une loi et en faisant en sorte que l'ombudsman rende des comptes au Parlement. Ainsi, tous les partis, et non seulement le ministre, pourraient questionner l'ombudsman au sujet des lacunes du système concernant le traitement des victimes d'actes criminels.
C'est donc un sujet très important, et j'espère que le Comité va se pencher là-dessus pour, éventuellement, en faire une proposition.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Merci à tous les témoins de tout le travail qu'ils font à cet égard. C'est un enjeu très important. Parfois, les victimes de crimes sont très oubliées dans la façon dont elles sont perçues.
Cette question s'inscrit dans la même veine que celle de l'un des intervenants qui a parlé précédemment des enfants de l'accusé en tant que victimes. Ce que je veux demander, c'est peut-être pour Mme Wemmers et M. Russomanno en ce qui concerne la violence à l'égard d'une personne intime, où la victime finit par être l'enfant de la victime ainsi que de l'accusé. Comment pensez-vous que cette déclaration des droits pourrait être modifiée, changée ou améliorée par les services, afin que nous puissions les aider? Il peut s'agir d'un témoin du crime. Ils peuvent être l'enfant de l'accusé et aussi l'enfant de la victime.
Pouvez-vous rapidement nous en dire plus à ce sujet?
Madame Wemmers, vous avez la parole en premier.
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C'est une bonne question.
Je crois que, dans sa forme actuelle, la Charte des droits des victimes reconnaît que les membres de la famille des victimes d'actes criminels, y compris dans l'exemple que vous avez fourni, seraient considérés comme des victimes aux fins de cette loi. Si l'on ajoute qu'ils sont également des membres de la famille de l'accusé, je ne pense pas qu'il en faille davantage pour qu'ils soient visés par ce projet de loi.
Pour faire suite aux observations formulées par les intervenants lors de la séance précédente, il est important de reconnaître que certains membres de la famille des personnes incarcérées et des accusés souffrent également beaucoup de la perpétration de crimes, et qu'ils sont, directement ou indirectement, touchés de manière significative. L'incarcération est évidemment une perturbation massive qui affecte souvent non seulement la personne accusée qui est emprisonnée, mais aussi d'autres membres de la famille, qui perdent un être cher pendant une longue période, ou une source de revenus dont ils dépendent, ou un soutien émotionnel. Les membres de la famille de la personne accusée souffrent énormément de diverses manières.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Madame Wemmers, plus tôt, le sénateur Boisvenu et vous nous avez parlé du problème de la réciprocité entre les provinces. Les services ne sont pas les mêmes dans chaque province, et il faudrait trouver une façon de les uniformiser partout au Canada. Je comprends cela. Comme nous parlons d'infractions à des lois canadiennes, il me semble que cela devrait être relativement simple à organiser.
Ma question porte plutôt sur la famille des victimes de crimes commis à l'étranger, comme la mère d'un enfant tué à l'étranger, le fils d'un parent tué à l'étranger ou encore le fils ou l'épouse de quelqu'un qui a commis un crime à l'étranger. Les dispositions actuelles de la Charte ne prévoient aucun soutien pour ces gens.
À votre avis, y aurait-il lieu de modifier les définitions de la Charte pour y inclure les crimes commis à l'étranger et pour offrir aux victimes canadiennes et québécoises de crimes commis à l'étranger la même protection que si ces crimes avaient été commis au Canada?