CACN Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité spécial sur la relation entre le Canada et la République populaire de Chine
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 6 décembre 2022
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte.
Bienvenue à la 10e réunion du Comité spécial de la Chambre des communes sur les relations entre le Canada et la République populaire de Chine.
Conformément à l'ordre de renvoi du 16 mai 2022, le Comité se réunit pour étudier les relations entre le Canada et la République populaire de Chine, en mettant l'accent sur l'exposition des fonds d'investissement canadiens aux actions et obligations chinoises liées à des violations des droits de la personne. C'est ce que nous ferons pendant la première heure, après quoi nous siégerons à huis clos pour nous occuper des travaux du Comité.
La réunion d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride, conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 23 juin 2022. Les députés participent, selon le cas, en personne ici même ou à distance au moyen de l'application Zoom.
Voici d'abord quelques consignes à l'intention des témoins et des députés.
Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Si vous participez à la séance par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour l'activer, et assurez-vous de le désactiver lorsque vous ne parlez pas. En ce qui concerne l'interprétation, les participants qui utilisent l'application Zoom ont le choix, au bas de leur écran, entre le parquet, l'anglais ou le français. Ceux qui sont dans la salle peuvent utiliser l'oreillette et sélectionner le canal souhaité.
Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
Pour demander la parole, les députés présents dans la salle doivent lever la main, et ceux qui utilisent l'application Zoom peuvent le faire au moyen de la fonction « Lever la main ». La greffière et moi-même ferons de notre mieux pour respecter l'ordre des interventions. Nous vous remercions à l'avance de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
Conformément à notre motion de régie interne concernant les tests de connexion des témoins, je peux confirmer que tous les témoins ont effectué les tests requis avant la réunion.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à M. Schmale, qui a l'air déconcerté en ce moment, mais je suis sûr qu'il se joindra à nous en temps voulu.
Je vous présente maintenant nos témoins pour la première heure. Nous recevons, à titre personnel, Carl Breau, directeur général de Saimen Inc.; Charles Burton, agrégé supérieur, Centre for Advancing Canada's Interests Abroad, Macdonald-Laurier Institute; et Margaret McCuaig-Johnston, agrégée supérieure, École supérieure d'affaires publiques et internationales et Institut de recherche sur la science, la société et la politique publique, Université d'Ottawa.
Monsieur Breau, nous allons commencer par vous. Vous disposez de cinq minutes pour nous faire une déclaration préliminaire. Surveillez votre écran. À moins que vous utilisiez vous-même un chronomètre, je vous ferai signe, à la manière d'un régisseur de plateau, pour vous indiquer qu'il est temps de conclure.
Vous pouvez commencer votre déclaration de cinq minutes. Merci, monsieur.
Merci beaucoup. Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner.
Je m'appelle Carl Breau, et je suis directeur général des entreprises Nummax et Saimen, toutes deux actives dans le domaine de l'électronique et de la fabrication de produits électromécaniques, tant au Canada qu'en Chine. Le chiffre d'affaires total s'élève à environ 20 millions de dollars.
Je suis un citoyen canadien. Je suis un ingénieur. Je parle français et anglais et je peux parler, lire et écrire en chinois mandarin, bien que mon écriture en mandarin ressemble sans doute à celle d'un enfant de 5 ans. Je vis au Canada, mais je possède également une maison à Shanghai, en Chine, où je passe beaucoup de temps.
J'encadre de nombreux entrepreneurs au Canada, aux États-Unis et en Chine. Je suis d'ailleurs associé et conseiller au Creative Destruction Lab au Canada. J'ai également été nommé accompagnateur pédagogique pour le programme de maîtrise en administration des affaires à l’École internationale de commerce Chine-Europe, à Shanghai. C'est généralement reconnu comme le programme de MBA le mieux coté en Asie.
Enfin, je suis un administrateur certifié et j'ai de l'expérience en tant que membre de conseils d'administration au Canada et en Chine. Je suis également titulaire de brevets et de marques de commerce en Chine. J'ai reçu la médaille du Conseil canadien des ingénieurs pour réalisation exceptionnelle d'un jeune ingénieur. Je ne suis plus jeune, alors je suppose que c'était il y a un certain temps.
Le premier sujet que j'aimerais aborder concerne la traçabilité de la chaîne d'approvisionnement, la transparence et les pratiques exemplaires.
Dans l'ensemble, le milieu des affaires en Chine est très transparent. La comptabilité est fondée sur le système Fapiao, ce qui signifie que toutes les transactions sont enregistrées au fisc au moment où elles ont lieu. La plupart des renseignements relatifs aux entreprises sont publics et facilement accessibles, notamment les documents juridiques, les structures de propriété, les conflits de travail, le nombre d'employés, les cotes de crédit, etc.
Les pratiques exemplaires en matière de chaîne d'approvisionnement en Chine, dont je peux également témoigner, sont à peu près les mêmes que partout ailleurs. La langue et la distance peuvent peut-être rendre les choses un peu plus complexes. La clé, c'est de faire preuve de diligence raisonnable, d'établir la cartographie de votre chaîne d'approvisionnement, de savoir plus ou moins auprès de qui vous achetez vos produits, mais aussi de savoir auprès de qui votre fournisseur lui-même achète ses produits.
Il faut effectuer des vérifications fréquentes auprès de vos fournisseurs ou de vos partenaires, ce qui, dans certains cas, peut se faire à distance grâce aux récentes technologies, comme c'est le cas aujourd'hui.
N'oublions pas que nous sommes des acheteurs ou des investisseurs dans la plupart des exemples présentés ici, et nous pouvons donc exiger toute la transparence que nous souhaitons. Si nous ne sommes pas satisfaits, nous n'avons pas besoin d'acheter ou d'investir en Chine. En tant qu'acheteurs, nous pouvons établir les protocoles de traçabilité et prévoir toutes les exigences de conformité dont nous avons besoin.
Cela dit, je tiens également à souligner l'importance de conclure des contrats exécutoires, clairs et détaillés avec vos partenaires commerciaux en Chine ou, à vrai dire, partout dans le monde. Toutes ces mesures sont des pratiques courantes. C'est pourquoi j'aime dire à mes amis entrepreneurs, lorsqu'ils viennent en Chine, de ne pas laisser leur cerveau dans l'avion. Faites les choses comme vous pensez qu'elles devraient être faites, où que vous soyez.
Enfin, en ce qui a trait à la gestion de la chaîne d'approvisionnement, les technologies peuvent s'avérer utiles. Il existe maintenant des outils de chaînes de blocs, de plus en plus courants, pour aider à la traçabilité. Bien entendu, les outils de vérification à distance et de contrôle de la qualité en ligne ont considérablement évolué ces dernières années, et il est parfois possible d'avoir accès aux images en direct des caméras installées dans les aires de travail.
J'aimerais maintenant dire quelques mots sur la conformité et la responsabilité des entreprises, de notre point de vue.
En Chine, il existe la notion de représentant légal d'entreprise, qui désigne généralement le directeur de l'entreprise. Comme son nom l'indique, le représentant légal assume d'importantes responsabilités légales et personnelles en ce qui concerne les activités des entreprises et la conformité. Il s'agit donc d'un rôle important qu'il faut bien comprendre et bien gérer.
Les fameux écarts de capital social déterminent les responsabilités financières de l'investisseur en cas de défaut de paiement auprès des employés ou des fournisseurs. Il faut donc bien comprendre cette notion. Il s'agit essentiellement de la différence entre le montant fixé comme exigence de capital social et le capital réellement investi dans l'entreprise. C'est ce qui détermine la responsabilité potentielle restante des investisseurs en Chine, ce qui peut être considérable.
On ne peut pas déclarer faillite personnelle en Chine, ce qui crée un niveau supplémentaire de responsabilité. Quelles que soient les dettes ou les responsabilités personnelles qui découlent de certains des aspects que je viens de mentionner, personne en Chine ne peut s'y dérober.
J'aimerais maintenant parler un peu de la redistribution ou de l'effet pare-feu.
Les entreprises canadiennes qui investissent en Chine le font très souvent par l'intermédiaire d'une autre entreprise située dans des endroits comme Singapour. Cela permet à l'entreprise canadienne de se soustraire à la plupart des responsabilités liées à son investissement en Chine. C'est donc considéré comme une bonne pratique, car cela protège les investisseurs. Toutefois, cela amène en quelque sorte les investisseurs à se désengager de leurs responsabilités à l'étranger, y compris en Chine, ce qui peut poser un certain dilemme.
Enfin, pour ce qui est de vivre et de faire des affaires en Chine, je pense que c'est un pays où il est possible de faire des affaires dans le respect total des normes internationales. Tout revient à la question de savoir qui gère et qui prend les décisions. Je me sens totalement en sécurité lorsque je suis en Chine, tant en ma qualité de chef d'entreprise que dans ma vie privée.
J'ai l'impression qu'il existe un parti pris considérable dans la façon dont les journaux et les médias sociaux rapportent les nouvelles concernant la Chine. Personnellement, je ne me fie pas trop à ces renseignements, souvent déformés, pour prendre des décisions.
J'espère vraiment pouvoir apporter une contribution positive à votre comité. Merci infiniment de votre invitation et de votre attention.
La nouvelle politique canadienne sur la région indopacifique définit la Chine comme une « puissance mondiale de plus en plus perturbatrice ». Certains de nos alliés démocratiques aux vues similaires utilisent un langage plus direct en indiquant que leurs politiques nationales devraient considérer la Chine comme un concurrent stratégique ou un rival systémique. Après avoir lu bon nombre des témoignages présentés à votre comité, je pense qu'il est vraiment question ici de la Chine comme adversaire stratégique émergent.
Le programme géostratégique de la Chine est façonné par l'idéologie du Parti communiste chinois, incarné par son secrétaire général, Xi Jinping, qui est manifestement hostile au Canada et aux valeurs libérales de l'Occident.
La Chine en tant que pays, la culture chinoise et le peuple chinois ne sont pas en cause, mais pour l'heure, nous devons reconnaître la vraie nature du Parti communiste. La version révisée de la constitution du parti en Chine — révision effectuée en 2017 — précise clairement que le parti assure un leadership global dans tous les domaines d'intervention et dans toutes les régions du pays.
Comme l'a dit Xi Jinping, en citant le président Mao, « le parti dirige tout: parti, gouvernement, armée, société, éducation — d'est en ouest, du nord au sud, en passant par le centre. » Dans un article de l'agence de presse officielle, Xinhua, au sujet de la déclaration de M. Xi, on peut lire que le parti assure un leadership global dans tous les domaines d'intervention du pays.
Le régime du Parti communiste chinois de la République populaire de Chine est un complexe dans lequel sont intégrés le parti, l'État, l'armée, la sécurité et l'industrie et dans lequel la direction du parti est, comme il l'affirme, « absolue », « puissante », « globale » et « unifiée ».
Toutes les entreprises commerciales en Chine sont assujetties à la direction et à la coordination du Parti communiste chinois et peuvent être déployées à des fins stratégiques non commerciales du régime. Malheureusement, nous voyons beaucoup de cas de ce genre. Aucune entreprise industrielle ou commerciale chinoise n'existe indépendamment du parti-État chinois. Même si certaines entreprises chinoises importantes, comme Huawei, ne sont pas considérées comme des entreprises d'État en tant que telles, elles font néanmoins partie intégrante du régime du Parti communiste chinois et sont intégrées aux objectifs généraux de l'État-Parti communiste chinois. C'est pourquoi nous n'autorisons pas le logiciel et le matériel 5G de Huawei dans nos réseaux de télécommunications canadiens.
En outre, les entreprises chinoises peuvent réciproquement s'appuyer sur l'armée et les services de renseignement chinois pour exploiter les technologies et les données à leur avantage — comme l'a fait Huawei, et il existe des preuves irréfutables à cet égard. Ainsi, le régime intégré de la Chine est en mesure de mobiliser les relations commerciales pour mener à bien ses objectifs, et ce, de toutes sortes de façons. Permettez-moi d'en mentionner quelques-unes.
Tout d'abord, il y a le transfert de technologies. Il existe de nombreux exemples où les technologies ou les procédés de fabrication exclusifs d'entités étrangères sont transférés au régime chinois.
Ensuite, il y a l'espionnage. La mobilisation des entreprises chinoises pour faciliter l'espionnage est bien établie. Mis à part la disposition de la loi chinoise sur le renseignement qui exige que tous les citoyens chinois collaborent avec les services de sécurité et de renseignement lorsqu'ils sont appelés à le faire, la nature intégrée du régime permet de combiner sans heurts la recherche du profit et la quête d'un avantage géostratégique. Ce dernier l'emporte toujours sur l'avantage économique.
Enfin, il y a la coercition économique et les représailles à l'encontre des États qui, aux yeux de la Chine, ont des politiques hostiles. Le régime chinois exerce une coercition économique pour faire pression sur les gouvernements étrangers afin qu'ils se conforment aux exigences non économiques de la Chine. Par exemple, lorsque le conglomérat sud-coréen LOTTE a fait installer sur un de ses terrains de golf le système de défense antimissile à haute altitude conçu pour contrer les missiles nord-coréens, les activités de LOTTE en Chine ont été durement touchées par la fermeture simultanée de ses nombreux grands magasins en Chine sous prétexte qu'ils avaient enfreint le code de prévention des incendies, ce qui était faux. Par ailleurs, nous savons tous que les producteurs canadiens de semences de canola ont vu leurs contrats avec la Chine annulés en raison de fausses allégations selon lesquelles leur produit était contaminé par des matières autres que des semences.
À cela s'ajoute le soutien d'opérations policières illégales dans des pays étrangers. Comme le gouvernement canadien l'a observé, certaines entreprises chinoises au Canada ont envoyé de fausses lettres d'invitation pour faciliter les demandes de visa frauduleuses par des policiers chinois afin qu'ils puissent entrer au Canada pour se livrer à des activités illégales.
Mentionnons également l'application du « pouvoir du discours ». En effet, plusieurs multinationales ont dû « corriger » — pour ainsi dire — leurs sites Web et présenter des excuses pour ne pas s'être conformées au discours du régime chinois selon lequel le gouvernement taïwanais est un régime voyou illégitime qui finira par retourner dans les bras de la mère patrie en tant que province chinoise dirigée par Pékin. Par exemple, le site Web des hôtels Marriott a été bloqué en Chine jusqu'à ce que la multinationale cesse de désigner Taïwan comme un marché distinct pour ses activités hôtelières.
Permettez-moi de conclure en disant que les investissements du Canada dans des entreprises chinoises risquent de faire en sorte que le Canada devienne complice de tout ce que je viens de mentionner, même si l'on agit avec toute la rigueur qui s'impose avant chaque investissement.
Je vous remercie, monsieur le président.
Merci, monsieur Burton.
C'est au tour de Margaret McCuaig-Johnston.
Avant de mettre en marche le chronomètre, je vous invite à dire un mot sur la signification de votre ruban blanc.
Je porte, moi aussi, un ruban blanc, comme beaucoup de députés, à l'occasion du 6 décembre. C'est parce que j'étais directrice du programme pour les femmes en sciences et en génie en 1989 lorsqu'a eu lieu la tuerie de l'École polytechnique. Ce sont les députés eux-mêmes qui ont commencé à porter le ruban blanc dès lors. D'autres, comme moi, ont suivi le mouvement.
J'ai gardé mon ruban blanc pendant toutes ces années, et je le sors chaque année.
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur le président, et merci au Comité de m'avoir invitée à témoigner aujourd'hui.
J'aborde cette question du point de vue de quelqu'un qui suit l'évolution des technologies chinoises depuis des décennies, mais je m'intéresse aussi de près aux enjeux touchant les droits de la personne en Chine depuis 1979, lorsque je me suis rendue au mur de la démocratie de Xidan, à Pékin, pour parler aux travailleurs et aux étudiants.
La Chine utilise aujourd'hui des équipements de surveillance à la fine pointe de la technologie contre le peuple ouïghour, mais aussi au Tibet et en Mongolie, et contre les membres des « maisons-églises » chrétiennes dans toute la Chine.
Que penseraient les Canadiens s'ils savaient que l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada, ou OIRPC, a investi plus de 1 milliard de dollars en fonds publics dans Tencent, propriétaire de WeChat, une application qui sert à surveiller et à censurer les communications des Ouïghours, des Tibétains et des manifestants contre la politique de zéro COVID?
La société Alibaba fabrique des caméras vidéo qui permettent d'observer, de tous les angles, les cellules bondées des Ouïghours dans les camps d'endoctrinement et les prisons. Que penseraient ces Ouïghours s'ils savaient que des retraités canadiens ont investi dans ces caméras vidéo? Le logiciel connexe est également conçu pour repérer des Ouïghours dans une foule.
Neusoft est une entreprise technologique chinoise qui s'est vue confier la tâche de construire un système permettant de cibler les journalistes, les femmes migrantes et les étudiants étrangers afin que les autorités chargées de la sécurité publique puissent les repérer rapidement et entraver leur travail. L'OIRPC et la Caisse de dépôt ont, tous deux, des investissements dans Neusoft.
La semaine dernière, votre comité a appris que l'OIRPC investit dans deux indices de Morgan Stanley, qui comprennent 13 entreprises qui tirent profit du génocide. L'Office prétend qu'il n'investit pas directement dans ces entreprises, mais selon ses propres dires, il investit dans des fonds indiciels, ce qui l'expose à 10 000 titres pour de très petits montants — seulement 1 ou 2 millions de dollars, et parfois même moins. C'est ce que l'Office affirme.
L'OIRPC nous dit souvent qu'il investit dans des entreprises et non dans des pays, mais lorsque les autorités chinoises demandent à une entreprise de concevoir des appareils de surveillance encore plus répressifs pour les utiliser contre certaines catégories de citoyens, cet argument tombe à l'eau. En Chine, les entreprises sont soumises à la direction du gouvernement, et pas seulement aux forces du marché, et elles sont maintenant toutes dotées de comités du Parti communiste qui participent de plus en plus activement à la prise de décisions.
J'ai plusieurs recommandations à formuler.
Premièrement, nous devons établir une liste d'entités, comme aux États-Unis, pour interdire tout investissement canadien dans les entreprises chinoises nommées qui prennent part au génocide et au travail forcé. Cette liste n'a pas besoin d'être la même que celle des Américains, mais elle doit mettre l'accent sur les entreprises qui contribuent au génocide des Ouïghours et à l'État de surveillance.
Deuxièmement, les fonds de pension et les fonds universitaires au Canada doivent être transparents quant à leurs investissements en Chine. Par exemple, lorsqu'une entreprise de surveillance chinoise souhaite conclure une entente de confidentialité, l'OIRPC respecte cette demande, et il ne publie pas les renseignements commerciaux de nature délicate dans certaines circonstances. De telles pratiques masquent les investissements qui nuisent aux droits de la personne.
Troisièmement, les fonds de pension doivent être disposés à entamer un dialogue avec la société civile au sujet de leurs investissements. Ils peuvent bien dire qu'ils utilisent une approche éthique, mais qu'est‑ce qui guide cette approche lorsque la politique de l'entreprise interdit aux gestionnaires de placements de rencontrer les Canadiens pour entendre leurs préoccupations de vive voix? Toute réunion de ce genre se fait avec un responsable des communications pour, selon toute vraisemblance, limiter la discussion à un exercice de relations publiques.
Quatrièmement, même si certains investisseurs privés peuvent rechercher le rendement le plus élevé indépendamment de l'éthique, pour une société d'État qui investit des fonds publics, la barre est plus haute, surtout lorsque le gouvernement estime que les droits de la personne constituent une grande préoccupation. Son code d'éthique devrait être mandaté par le gouvernement, qu'il soit fédéral ou provincial.
Enfin, j'espère que les fonds de pension et les universités examineront désormais, de façon plus générale, les risques économiques et géopolitiques liés aux investissements chinois, notamment dans le secteur de la technologie, l'immobilier, les règlements imprévus et les menaces contre Taïwan. Je crois que nos caisses de retraite et nos fonds fiduciaires universitaires sont assez intelligents pour faire la transition qui leur permettrait de se ranger du bon côté de l'éthique, dans l'intérêt des Canadiens et de leur portefeuille.
Je vous remercie.
Merci beaucoup, madame McCuaig-Johnston.
Nous passons maintenant à notre première série de questions. Madame Dancho, vous disposez de six minutes tout au plus.
Merci, monsieur le président, et merci beaucoup aux témoins d'être des nôtres aujourd'hui. Vous avez tous des parcours très intéressants. En tout cas, nous avons eu droit à des exposés très variés et très instructifs.
Madame McCuaig-Johnston, j'ai quelques questions à vous poser.
Vous avez expliqué très clairement que le RPC, ou Régime de pensions du Canada, compte des investissements dans des entreprises qui utilisent des technologies de surveillance de pointe permettant de repérer — comme vous l'avez précisé — des Ouïghours ou un grand groupe de personnes. C'est certes extrêmement préoccupant, surtout à la lumière de ce que nous avons tous appris au sujet du sort réservé à la population ouïghoure.
Vous avez également souligné, à juste titre, que l'une des principales valeurs du gouvernement est celle des droits de la personne. Compte tenu de votre expertise et de vos connaissances, quelle note attribueriez-vous au gouvernement canadien pour ce qui est de respecter cette valeur essentielle dans les investissements de nos pensions ou d'autres fonds publics dans ce genre d'entreprises? Quelle note lui donneriez-vous?
Je lui donnerais un « D » parce qu'il n'en a pas encore assez fait pour s'assurer que ses fonds ne sont pas investis dans de telles entreprises génocidaires.
Je dois toutefois lui reconnaître un certain mérite. Il s'est retiré de l'investissement direct dans iFlytek. Il s'agit là d'une entreprise qui fabrique des technologies de reconnaissance vocale. Ainsi, les Ouïghours sont tous emmenés au poste de police local pour que leurs voix soient enregistrées dans différentes modulations afin que la police puisse savoir qui parle exactement lors des appels téléphoniques sur écoute.
J'ai été très heureuse que l'OIRPC ait décidé de se retirer de cet investissement — et, d'ailleurs, je l'en ai félicité dans un éditorial —, mais malheureusement, j'ai appris qu'iFlytek fait partie de l'un des fonds indiciels dans lesquels l'OIRPC investit. C'est donc une préoccupation constante. Il ne suffit pas de rester à l'écart et d'investir dans une vaste gamme de fonds qui comprennent des entreprises génocidaires; il faut examiner chacune de ces entreprises pour s'assurer qu'elles ne font pas partie de celles qui contribuent au génocide des Ouïghours.
Il est inadmissible, à mon avis, que des technologies financées par des Canadiens soient utilisées contre les Ouïghours. C'est tout à fait tragique.
Je vous remercie beaucoup de votre réponse. C'est très utile.
J'aimerais poser la même question à M. Burton. Je suis ravie de vous revoir. Merci d'être là.
Quelle note donneriez-vous au gouvernement actuel pour ce qui est de respecter ses valeurs en matière de droits de la personne, compte tenu de l'objet de notre discussion d'aujourd'hui, sachant que notre régime de retraite investit dans de telles entreprises chinoises, entre autres?
Je pense que le « D » attribué par Mme McCuaig-Johnston est peut-être un peu généreux. Nous devons vraiment être beaucoup plus conscients des répercussions de nos investissements en nous demandant si nous favorisons un régime qui nous est potentiellement hostile.
Je suis tout à fait d'accord avec Mme McCuaig-Johnston au sujet des technologies qui servent à perpétrer le génocide des Ouïghours, mais je pense qu'il y a beaucoup d'autres domaines dans lesquels les fonds peuvent être utilisés pour des choses qui vont à l'encontre des valeurs et de l'intérêt national du Canada, à moins que nous sachions exactement où va l'argent et qui s'en sert.
Si nous comptons investir en Chine, j'aimerais que le gouvernement supervise beaucoup mieux ce que font nos régimes de retraite et nos fonds de dotation universitaires.
D'après ce que les investisseurs et, en particulier, les membres de l'OIRPC — je crois qu'on l'appelle aussi l'Office d'investissement du RPC — semblent nous dire, il ne s'agit que de quelques millions de dollars ici et là par l'entremise d'un fonds indiciel. Je ne leur ai pas parlé personnellement, mais si l'on s'en tient aux observations de Mme McCuaig-Johnston et de M. Burton, on dirait qu'ils cherchent des excuses.
Diriez-vous que c'est quelque chose de faisable? Le Canada pourrait‑il dire que nous n'investirons pas l'argent des contribuables ou les fonds de programmes publics dans quoi que ce soit qui nuise à l'un des groupes qui sont marginalisés et maltraités ou dans toute entité qui se livre au génocide des Ouïghours et d'autres personnes? Est‑ce vraiment faisable? En tant que pays, pouvons-nous y parvenir si nous y mettons du nôtre?
Je préférerais que nos régimes de retraite cherchent des investissements rentables ailleurs, mais si nous insistons, d'une part, sur la nécessité de continuer de considérer la Chine comme un rival systémique et, d'autre part, sur la possibilité de dialoguer avec elle, alors nous devons vraiment nous y prendre avec beaucoup plus de soin et de transparence que ce qui est le cas en ce moment.
Je pense que tout investissement en Chine va potentiellement à l'encontre des intérêts canadiens, car nous n'avons aucun contrôle sur ce que le Parti communiste ordonne aux entreprises chinoises de faire.
Nous ne pouvons probablement pas faire table rase du jour au lendemain, mais nous pouvons agir rapidement. Ces fonds sont confiés à des gestionnaires de placements talentueux, qui sont très bien rémunérés. Ils reçoivent des incitatifs pour augmenter les profits des fonds. Or, il faut les encourager à tenir compte de la bonne gouvernance et des droits de la personne. Tel devrait être l'objectif de chaque conseil d'administration. Tencent et Alibaba sont les exemples les plus évidents d'entreprises qu'il faut délaisser. Ces deux entreprises sont bien complices des violations des droits de la personne en Chine. Ce sont les deux cas les plus flagrants.
Il faut également être en mesure d'examiner ces fonds indiciels. Il semble bizarre qu'une organisation appelée Hong Kong Watch, située à Londres, en Angleterre, dise à l'OIRPC quels sont ses investissements, au dollar près, dans un ensemble de 13 entreprises génocidaires. Les gestionnaires de placements eux-mêmes en sont sûrement conscients. Ils devraient être en mesure de se retirer de ces investissements et d'opter pour d'autres fonds.
Je ne pense pas que cela se fasse du jour au lendemain, mais j'estime que l'on pourrait y arriver en un mois ou deux.
Merci beaucoup, madame Dancho.
La parole est maintenant à M. Fragiskatos. Vous avez, tout au plus, six minutes.
Merci, monsieur le président. Merci à nos témoins.
Madame McCuaig-Johnston, je reconnais que l'Office d'investissement du RPC est indépendant et je ne veux pas entrer dans les détails à ce sujet, mais je pense qu'il est important de préciser que l'Office ne fonctionne pas sous les ordres du gouvernement canadien.
Je voudrais me pencher sur certains des points que vous avez soulevés. J'espère que vous pourrez les étoffer en nous aidant à comprendre ce que d'autres pays ont fait en ce qui a trait à leurs offices d'investissement concernant les pensions ou d'autres approches d'investissement que le Canada devrait, selon vous, envisager. Bien entendu, nous reconnaissons que les offices d'investissement dans d'autres pays démocratiques fonctionnent, eux aussi, de façon indépendante.
Avez-vous des observations à faire au sujet d'autres modèles?
Le Royaume-Uni, la France et l'Allemagne font meilleure figure que nous à cet égard.
Je sais que les différents offices d'investissements et fonds de pension échangent fréquemment entre eux et qu'ils ont donc l'occasion de s'inspirer des pratiques exemplaires. Ces pratiques sont bien documentées dans le récent rapport de l'organisme Hong Kong Watch qui examine un éventail de pays tels que les États-Unis et le Canada.
Merci beaucoup.
Permettez-moi de changer de sujet pendant quelques instants.
Le 29 novembre, vous avez écrit une lettre au Globe and Mail dans laquelle vous avez énoncé certains points. Toutefois, si je vous ai bien comprise, vous avez en quelque sorte fourni une explication ou une perspective sur la direction que prend la Chine à la suite des manifestations qui s'y sont déroulées dans les dernières semaines.
Pouvez-vous décrire à ce comité votre point de vue sur la trajectoire que pourrait emprunter la Chine?
La direction que prend la Chine m'inquiète grandement. Je compte de nombreux bons amis dans ce pays. Je vois les effets de la politique de zéro COVID sur les droits de la personne de ceux qui ont été contraints de ne pas quitter leur domicile pendant des mois. Les Ouïghours doivent demeurer chez eux depuis août, sans réapprovisionnement alimentaire adéquat, ce qui me préoccupe.
La commission nationale de la santé commence à assouplir certaines des restrictions liées à la COVID. Le changement est bénéfique par rapport aux contraintes liées à la politique de zéro COVID, mais, ce qui m'inquiète gravement, c'est le manque de vaccins pour protéger la population chinoise. La plupart des aînés chinois ne sont pas entièrement vaccinés. Les vaccins administrés au pays sont loin d'être efficaces. Il semblerait que la Chine s'est fait offrir des vaccins à ARNm des pays occidentaux, mais qu'elle les a refusés.
Xi Jinping tient à sa politique de zéro COVID, et il semblerait qu'il ne veut pas accepter de vaccins de l'Occident. Les autorités chinoises vont pourtant devoir les accepter, au risque de dénombrer des millions de morts et de soumettre leur réseau hospitalier à des pressions insoutenables.
Merci beaucoup. Je pose la question afin de revenir au premier sujet que j'ai abordé: les modèles des autres pays sur le plan des investissements.
La semaine dernière, nous nous sommes fait entretenir de ce sujet en comité. On s'est intéressé au modèle allemand qui a en fait été qualifié de modèle figurant probablement parmi les plus progressistes en matière d'investissements. La loi n'est pas encore en vigueur, mais elle le sera très bientôt. Ainsi, ce que vous venez de nous décrire par rapport à l'orientation actuelle et potentielle de la Chine est préoccupant.
La semaine dernière, on a abordé, entre autres enjeux, la difficulté d'exécuter cette loi. Manifestement, la loi que les Allemands appliqueront — ou qu'ils semblent vouloir appliquer — s'appuie sur une norme éthique. Je les en félicite, mais aucune loi ne peut être efficace si on ne peut l'administrer. On se demande comment, exactement, cette loi sera exécutée. Son efficacité future s'avère très difficile à prédire.
Avez-vous des observations à propos de la question de l'administration?
Je suis tout à fait persuadée que, si le Canada adoptait la même approche, nous serions en mesure de la mettre en œuvre efficacement. J'éprouve un respect inestimable pour Heather Munroe‑Blum, la présidente de l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada, ou OIRPC, et pour les cadres supérieurs de l'organisation. Ils forment une équipe des plus professionnelles et compétentes.
Selon moi, l'administration d'une politique s'appuyant sur des normes éthiques particulièrement élevées ne pose pas problème. Le fait qu'il s'agisse de deniers publics établit une norme plus large pour déterminer la mesure dans laquelle les sociétés d'État doivent respecter les droits de la personne. En effet, l'OIRPC est une société d'État, mais je vois ce que vous voulez dire quand vous faites remarquer que le gouvernement ne peut intervenir pour lui dire comment investir les sommes.
Merci beaucoup.
Je constate qu'il me reste 45 secondes.
Monsieur Breau, je voulais vous poser une question, mais mon temps est maintenant limité.
Vous nous avez présenté différents éléments. Pouvez-vous résumer votre témoignage en une recommandation? Si vous vouliez que notre comité n'examine qu'une seule piste, quelle serait-elle?
Je résumerais ainsi ma recommandation principale: si, par exemple, nous décidons de nous doter d'une nouvelle loi, de renforcer la conformité ou d'accroître la visibilité ou la traçabilité de ce qui se passe en Chine en matière d'affaires ou d'achats, ne craignons pas qu'une telle loi ou que de telles mesures ne puissent être mises en œuvre en Chine. Elles peuvent l'être.
Je crois qu'il s'agit de l'élément principal que j'aimerais recommander: ne croyez pas que, dans le cadre du commerce avec la Chine, les systèmes juridiques ou les mesures prises ici ne pourront fonctionner efficacement.
Voilà comment je répondrais en 30 secondes à votre question pertinente.
Merci beaucoup, monsieur Fragiskatos.
Nous donnons maintenant la parole à M. Bergeron pour un maximum de six minutes.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous les témoins. Je les remercie d'être des nôtres aujourd'hui en cette fin de journée ainsi que de contribuer à notre réflexion.
Monsieur Breau, même si c’est votre droit le plus strict de vous adresser à nous dans la langue officielle qui vous convient, je dois dire que j'ai été un peu déçu de ne pas vous entendre vous exprimer dans la langue de Molière, d'autant plus que vous nous avez dit la parler très bien.
Les quelques rares députés francophones de ce comité sont excités comme des puces lorsque nous recevons des témoins francophones. Nous nous attendons à enfin entendre la langue de Molière, ce qui n'arrive pas très souvent.
Quoi qu'il en soit, je vous pose une question fort simple. On vient d'évoquer le fait que le Parlement jongle avec l'idée de se doter de dispositions législatives visant à exiger des comptes de la part des entreprises canadiennes qui font des affaires en Chine. Cela concerne, entre autres, leur chaîne d'approvisionnement ou leurs investissements. Il veut ainsi s'assurer que les activités sont éthiques et qu'elles évitent le travail forcé ou l'exploitation de l'environnement.
Dans le cadre des activités de vos entreprises et de vos investissements, de quelle façon vous assurez-vous de ne pas être aux prises avec du travail forcé ou des violations des droits sociaux, de l'environnement et ainsi de suite?
De votre côté, y a-t-il une préoccupation à cet égard?
Si oui, comment parvenez-vous à contrôler ce genre de choses?
D'abord, je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner en français aujourd'hui. Effectivement, j'ai toujours le choix et je suis davantage devant ce dilemme lorsque je témoigne dans différentes tribunes.
Je tiens d'abord à dire qu'il faut mettre en place ces choses-là. Pour répondre à votre question, nous établissons certaines règles à suivre quant au respect des droits de la personne, à l'intégrité de la chaîne d'approvisionnement et à la traçabilité des différents produits.
Selon moi, il s'agit simplement d'adopter de bonnes pratiques d'affaires, ce que nous faisons déjà. Nous n'hésitons pas à les mettre en pratique de la même façon que nous le ferions dans un autre contexte ou un autre pays.
Nous établissons une cartographie de notre chaîne d'approvisionnement pour savoir d'où viennent les produits que nous achetons. Nous visitons physiquement les lieux, nous procédons à des audits virtuels auprès de nos fournisseurs et nous faisons les vérifications nécessaires. Il faut faire ses recherches en ligne, aller rencontrer les gens et demander, et même exiger de l'information.
Au fond, on dirait que c'est ce qui manque. De façon générale, ce que j'observe souvent chez les entreprises qui font des affaires en Chine, c'est qu'elles ne mettent pas en place les mêmes choses qu'elles feraient normalement dans un autre pays. Cela s'explique peut-être par le fait que la Chine est différente, par sa langue et son éloignement, et que la façon d'y faire des affaires et un peu différente aussi.
En réponse à votre question, je dirais qu'il faut s'en tenir aux bonnes pratiques d'affaires et aller jusqu'au bout de l'exercice.
Si l'on fait une cartographie de la chaîne d'approvisionnement, il faut la faire jusqu'au bout. Par exemple, le premier niveau consiste à savoir qui sont les fournisseurs de l'entreprise chinoise avec laquelle nous faisons affaire. Le deuxième niveau, c'est de savoir qui sont les fournisseurs de ces fournisseurs, et ainsi de suite pour les troisième et quatrième niveaux.
Il faut creuser pour obtenir l'information voulue. Il faut visiter les fournisseurs et les partenaires et poser des questions. Si l'on n'arrive pas à obtenir de réponses ou que celles obtenues ne nous satisfont pas, il faut simplement reculer et ne pas acheter ces produits ou ne pas faire d'investissement.
Certains problèmes peuvent se produire, mais, quand ils deviennent généralisés, je trouve qu'il y a là un piège. Lorsqu'on désigne, par exemple, une province comme ayant certains problèmes, et que l'on se fait soudainement dire de ne plus rien acheter dans une province ou une région, cela devient trop large et l'on finit par perdre son objectif de protéger certaines personnes. En voulant protéger certaines personnes, on en pénalise parfois beaucoup d'autres.
À mon avis, maintenir des principes d'affaires généralement reconnus est donc la meilleure façon de faire des affaires en Chine.
Il faut trouver les gens, les rencontrer et leur poser des questions.
Merci beaucoup.
Monsieur Burton, dans un article publié récemment dans le Toronto Star, vous dites ce qui suit:
[Traduction]
La campagne de propagande, qui répand des théories du complot disséminées par les médias sinophones du Canada favorables au régime de Pékin, menace notre démocratie. Cette propagande a déjà coûté les sièges à des députés canadiens d'origine chinoise pendant les dernières élections. Puisqu'on ne lève pas le petit doigt, on peut s'attendre à un plus grand nombre de ces situations aux prochaines élections.
[Français]
Je crois que vous faites référence à des députés canadiens d'origine chinoise qui auraient perdu leur siège aux dernières élections, celles de 2021. Vous savez qu'il y a déjà tout un débat entourant les élections de 2019, où le premier ministre a abordé la question avec le président Xi Jinping, mais il semblerait qu'il n'y avait rien de très grave.
Sur quoi vous êtes-vous appuyé pour faire une telle affirmation, lançant pour ainsi dire un pavé dans la mare, alors que nous sommes déjà en train de discuter de ce qui a pu se passer en 2019? Vous en rajoutez quant à ce qui s'est ou se serait passé en 2021.
[Traduction]
Je dois vous interrompre, monsieur Bergeron. Vous avez dépassé le temps imparti.
Monsieur Burton, si vous avez des réflexions à ce sujet, nous pourrions vous demander de les transmettre par écrit à notre greffière. Votre réponse nous éclairerait.
Nous passons maintenant à Mme McPherson pour un maximum de six minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais, moi aussi, exprimer ma reconnaissance aux témoins qui comparaissent devant nous aujourd'hui. Vos témoignages sont fort intéressants.
Je ne suis pas experte en investissements, alors j'aimerais que vous éclairiez ma lanterne.
Madame McCuaig-Johnston, vous avez qualifié l'Allemagne de référence pour la loi qu'elle a proposée. Comme nous le savons, le Canada n'en a toujours pas fait autant. Pendant votre témoignage, je crois que vous avez effleuré la possibilité que le texte prenne la forme d'une politique ou d'une loi.
Pouvez-vous nous expliquer pourquoi l'Allemagne est considérée comme une référence? Devrions-nous changer une politique qui se transformera en loi, ou devrions-nous directement effectuer une modification législative?
Vous pourriez préciser si le texte de loi devrait cibler les deniers publics, ou s'il devrait aussi inclure les fonds comme les fonds universitaires et les fonds de pension.
Je vous remercie beaucoup de la question, monsieur le président.
Les droits de la personne et les valeurs éthiques se trouvent au cœur de la politique allemande. L'approche des Allemands comporte donc à la fois un volet de politique et un volet législatif.
Pour le Canada, j'ai indiqué que je crois que nous devrions nous doter d'un outil comparable à la liste des entreprises des États-Unis. Une telle liste orienterait les fonds fiduciaires des universités et des fonds de pension quant aux investissements interdits, c'est‑à‑dire dans les compagnies qui participent manifestement à des génocides. La liste n'est pas très longue. Il existe de nombreuses autres compagnies en Chine dans lesquelles les fonds pourraient investir.
Cela dit, on peut se demander de façon plus globale dans quelle mesure les régimes de retraite publics investissent en Chine. Dans le cas de la Russie, le Canada ainsi que d'autres pays ont choisi d'imposer des sanctions au pays, et on a constaté que les investissements en Russie ont été gelés. Je serais grandement préoccupée de voir Taïwan visée par un blocus.
Les pays occidentaux se sont demandé s'il était judicieux, parmi les options, de dresser une liste de sanctions pour la Chine et de risquer que des organisations comme l'OIRPC et les fonds fiduciaires des universités implorent le gouvernement de ne pas toucher à tous leurs importants investissements en Chine, au risque de les mettre en péril.
Je crois que cet argument sous-tend des propositions comme celle que M. Burton a décrite et qui se résume à ce conseil: « Jetez un coup d'œil attentif à vos investissements en Chine afin de déterminer si le pays sera stable à l'avenir. »
Les chiffres liés à la COVID nous ont appris que nous pourrions éprouver des problèmes encore plus graves à l'avenir dans les chaînes d'approvisionnement. Je crois que cette situation mérite une réflexion plus poussée que le simple fait de choisir un investissement au détriment d'un autre.
Merci beaucoup.
Monsieur Burton, je vais maintenant m'adresser à vous.
Vous parlez des risques pour les investissements. Nous discutons actuellement de l'importance de faire preuve de diligence raisonnable afin de garantir que nos chaînes d'approvisionnement sont exemptes de travail forcé des enfants ou d'esclavage. Or, en quoi consistent les risques — je crois que Mme McCuaig‑Johnston en a soulevé — pour les entités canadiennes si elles investissent en Chine et que la situation géopolitique dans le monde change? Quels seraient les risques?
Je ne suis pas aussi confiant que M. Breau en ce qui a trait à l'application de nos lois par le régime communiste chinois. Ce qui est préoccupant, c'est que la Chine est un environnement instable; il faut en tenir compte dans toutes les décisions en matière d'investissement.
Pour revenir à ce qu'a dit Mme McCuaig-Johnston, je suis actuellement à Berlin où je participe à une conférence réunissant 240 délégués de 82 pays — y compris des fonctionnaires canadiens — et dont l'objectif est d'organiser une réponse coordonnée aux activités d'ingérence de la Chine. Je crois qu'il faut travailler en collaboration avec les autres pays, échanger les meilleures pratiques et les expériences, et veiller à ce que nous soyons tous sur la même longueur d'onde en ce qui a trait aux investissements chinois et à de nombreuses autres préoccupations relatives au défaut de respecter l'ordre international fondé sur des règles en matière de diplomatie et de commerce.
Les répercussions sont nombreuses. Bien sûr, s'il y a une guerre à propos de Taïwan, les conséquences seront désastreuses pour l'économie mondiale et pour l'avenir géostratégique, notamment en ce qui a trait à notre présence dans la région indopacifique. Toutefois, ces questions sont assez vastes. Nous verrons comment les choses se passeront.
Je comprends. Nous vous accordons six minutes pour aborder ces questions, mais elles sont un peu trop complexes.
Il me reste 10 secondes; je vais donc céder la parole au président.
Merci beaucoup.
Oui? Tant mieux.
Notre greffière, Mme Vohl, s'est isolée après avoir été exposée à la COVID. Elle a décidé de nous rendre service à tous et de ne pas se présenter en personne. C'est très gentil.
Nous passons maintenant à notre deuxième série de questions.
Monsieur Seeback, vous disposez de cinq minutes. Allez‑y.
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'ai lu un article de Hong Kong Watch intitulé « Passively Funding Crimes Against Humanity » qui présentait plusieurs recommandations.
Madame McCuaig-Johnston et monsieur Burton, je crois que vous approuvez ces recommandations, mais je vais tout de même poser la question.
L'une de ces recommandations — et vous en avez parlé — consiste à dresser une liste d’entités interdites dont on sait qu’elles sont impliquées dans le travail forcé imposé par l’État dans la région ouïghoure, en l’appliquant aux marchés publics, aux investissements des fonds de pension et des gouvernements, et aux importations.
Ma question s'adresse à vous deux: est‑ce que vous approuvez cette recommandation? Si oui, pourquoi?
Monsieur le président, je réponds oui, sans hésitation.
J'ai aussi une préoccupation d'ordre plus général. Nous avons parlé des groupes de fonds utilisés par l'OIRPC et d'autres qui regroupent diverses sociétés. L'OIRPC investit aussi dans Alibaba Group, et non seulement dans la technologie d'Alibaba. Ce groupe chapeaute de nombreuses autres sociétés en Chine. Nous ne connaissons pas la situation de chacune de ces sociétés en matière de droits de la personne.
Ce groupe devrait lui aussi être écarté.
J'approuve tout ce qui est écrit dans l'article de Hong Kong Watch. Je crois que les témoignages de M. Tohti et de Mme Calverley de la semaine dernière étaient excellents. J'espère que vous en tiendrez compte dans votre rapport.
Ma question est la suivante: pourquoi le Canada tarde‑t‑il à agir? Avez-vous une idée? On pourrait tout simplement copier la liste des États-Unis si on le voulait. Je sais que ce n'est pas l'idéal, mais on aurait au moins quelque chose.
Est‑ce que l'une d'entre vous comprend pourquoi la situation évolue si lentement au Canada?
Je crois qu'il est très difficile pour le gouvernement de faire un changement aussi radical. Nous pourrions aussi...
Nous pourrions nous inspirer de la Foreign Agents Registration Act des États-Unis ou de la Foreign Influence Transparency Scheme Act de l'Australie. Ce serait facile de le faire, comme vous le dites, parce que les lois ont déjà été rédigées. J'aimerais que la loi canadienne soit plus stricte en ce qui a trait au transfert des technologies militaires classifiées à double usage aux agents d'un État étranger. Notre formulation n'est pas aussi bonne que celle des Américains ou des Britanniques; nous avons donc beaucoup de difficulté à traduire en justice les gens qui s'adonnent à ces activités choquantes.
Nous avons une nouvelle politique indopacifique. Elle n'est pas aussi stratégique que je l'aurais souhaité, mais nous allons y travailler. J'ai confiance que votre comité demandera des comptes au gouvernement afin qu'il serve les intérêts canadiens.
Merci, monsieur le président.
Beaucoup de choses ont changé depuis que les deux Michael ont été pris en otage. Le Canada a beaucoup appris au sujet de la Chine. Le gouvernement a fait beaucoup de progrès. Il a marché sur des œufs pendant très longtemps. C'était frustrant pour des gens comme M. Burton et moi, parce que nous demandions au gouvernement de prendre plus de mesures contre la Chine. À mon avis, la stratégie changera la donne pour le gouvernement. Je crois qu'elle entraînera de nombreux changements. Elle a été lancée il y a une semaine à peine.
À mon avis, cette stratégie est visionnaire. On fait demi-tour. Je crois que le Canada peut faire preuve de leadership avec les autres pays. À mon avis — et je l'ai dit dans une publication internationale — c'est le modèle que les autres pays devraient envisager d'adopter pour faire face à ce nouveau côté agressif de la Chine et pour mettre en œuvre des initiatives ciblées bien financées.
La stratégie est exhaustive et elle est bien financée. Je suis satisfaite. Je crois que nous allons voir d'autres changements de la part du gouvernement dans le domaine des pensions, entre autres.
J'aimerais aborder, rapidement, la question du commerce et des importations de façon particulière — puisqu'il s'agit de mon domaine — et savoir s'il serait difficile de dresser une liste des sociétés interdites, desquelles nous ne devrions pas importer de biens et de produits. Nous ne l'avons pas fait encore, selon ce que je comprends.
Je crois que c'est assez clair. Nous avons d'excellents délégués commerciaux à Affaires mondiales Canada. Ils peuvent compter sur l'aide de la communauté ouïghoure du Canada. Je sais qu'ils échangent beaucoup. Les membres de la communauté peuvent aviser le gouvernement de certains produits qui viennent de régions imposant le travail forcé.
Il ne faut pas oublier que le travail forcé est partout en Chine. On envoie souvent les Ouïghours par dizaines de milliers travailler dans des usines situées ailleurs en Chine. Il faut se demander ce qui arrive de leurs enfants. Il y a plus d'un million d'enfants dans les écoles d'endoctrinement, qui sont surveillés à l'aide des mêmes technologies que celles utilisées pour leurs parents. Il y a aussi 800 000 enfants tibétains. C'est une autre couche de violation des droits de la personne en Chine.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vais continuer dans la même veine que la dernière question qu'a posée M. Bergeron, et j'aimerais que M. Burton réponde à ma question.
Quelle preuve exacte avez-vous qu'un seul candidat ou qu'une seule candidate a perdu ses dernières élections à cause de l'ingérence chinoise?
[Traduction]
Non. Je n'ai pas dit que des candidats avaient perdu leurs élections. Nous ne savons pas pourquoi les gens se rendent aux urnes ni pourquoi ils choisissent de voter pour un candidat ou un autre.
Nous croyons toutefois qu'il y a eudésinformation au sujet de Kenny Chiu sur WeChat; nous avons tenté de savoir qui avait ainsi discrédité M. Chiu et avait dénaturé son projet de loi d'initiative parlementaire. Nous n'avons pas réussi à le faire, et nous avons renvoyé le dossier à...
Seriez-vous surpris, monsieur Burton, d'apprendre qu'il y a eu des centaines de commentaires négatifs à mon sujet sur Twitter pendant la dernière campagne, mais que j'ai tout de même gagné mes élections?
Je crois que la question de l'ingérence du Parti communiste chinois dans les élections est une politique bien établie du Département du travail du Front uni partout dans le monde, coordonnée par l'entremise des ambassades et des consulats.
Ce n'est pas nécessairement nouveau ou unique au Canada, mais il faut certainement y mettre fin. Si des agents se sont adonnés à des activités illégales, comme le financement des candidats, et si des diplomates coordonnent ces activités, alors je crois qu'ils doivent retourner à Pékin.
S'il y a des signes d'ingérence, tout à fait. Ils doivent faire l'objet d'une enquête et être poursuivis. Je suis d'accord avec vous.
Je vais en rester là sur ce sujet. J'aimerais passer à autre chose.
Le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre étudiera la question. Je vais comparaître devant lui.
J'ai hâte de voir cela.
Nous entendons des opinions très variées ce soir: d'un découplage radical entre notre économie et celle de la Chine à un engagement prudent et restreint associé à une influence importante du gouvernement et à un modèle de responsabilité sociale des entreprises.
J'aimerais donner à chacun l'occasion de faire un commentaire à ce sujet.
Monsieur Burton, vous semblez pencher pour le découplage radical, selon des bases idéologiques.
Madame McCuaig-Johnston, vous semblez demander un engagement prudent et restreint, associé à des engagements et à une participation du gouvernement.
Monsieur Breau, vous semblez opter pour un engagement intelligent axé sur les affaires où les entreprises, les directions générales de l'investissement et les caisses de retraite atténueraient le risque en investissant intelligemment selon un modèle de responsabilité sociale des entreprises.
Est‑ce que je vous ai bien saisis? Je pose la question parce que nous tentons de trouver un modèle à adopter.
J'aimerais entendre M. Breau, pour commencer.
Très rapidement, je maintiens ma position, qui correspond à ce que vous avez décrit.
Je crois qu'il y a beaucoup d'interférences entre le Canada et la Chine et j'aimerais que ma contribution ici...
Je ne suis pas politicien et je n'aborde pas la question d'un point de vue politique. Je suis un propriétaire d'entreprise. En tant que citoyen, j'applique les valeurs canadiennes à toutes nos activités, et j'en suis très fier. Je crois que mon témoignage candide devant vous aujourd'hui en est aussi la preuve. Je comparais à partir de la Chine, soit dit en passant.
J'approuve cette position voulant que nous devions nous en tenir aux meilleures pratiques et aux faits, et que nous devions poser des questions pour obtenir des renseignements. Si nous n'aimons pas la réponse, nous pouvons nous en aller, mais il faut d'abord poser la question.
Monsieur le président, je dirais que le député m'a bien saisie.
J'adopte une approche de prudence pour les échanges avec la Chine. J'ai fait cinq années de recherche sur les coentreprises technologiques canadiennes en Chine. J'ai constaté que plutôt que de partager la coentreprise à 50‑50 % ou 51‑49 %, c'était plutôt une majorité chinoise à 90‑10 % ou 80‑20 %, alors que la technologie était 100 % canadienne. Au fil du temps, les partenaires chinois sortaient les partenaires canadiens de la coentreprise.
C'est arrivé souvent. J'ai examiné plus de 30 cas du genre, qui ont été documentés dans une publication du China Institute.
J'use de prudence en ce qui a trait aux questions commerciales. Je ne me fie pas à ce que dit un fournisseur à un autre fournisseur au sujet du travail forcé dans une usine. Je suis sceptique.
Je crois que le gouvernement a un rôle à jouer dans certains domaines importants, comme les droits de la personne, et qu'il doit harmoniser ses pratiques à celles de ses partenaires.
Je suis d'accord avec Mme McCuaig-Johnston. Je crois que sa position est la plus réaliste.
En ce qui a trait au découplage, je crois qu'il viendra plus de la Chine que de nous, étant donné l'approche de M. Xi relative à l'économie de marché. Il semble que la Chine fermera la porte à de nombreuses entreprises canadiennes à un certain moment, mais dans l'intervalle, je crois que les mesures proposées par Mme McCuaig-Johnston sont excellentes.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Madame McCuaig‑Johnston, dans un article, dont vous êtes co-autrice et qui date d'avril dernier, vous déclariez qu'il était temps d'entamer le processus de désinvestissement de la Chine pour éviter d'être complice des atrocités que le gouvernement chinois inflige à son propre peuple pour éviter les risques émergents liés aux investissements chinois et pour ne pas être pris en otage par ces investissements au cours des années à venir.
Faites-vous référence aux fonds d'investissement et aux fonds de pension canadiens, ou faites-vous référence aux investissements chinois mêmes?
[Traduction]
Monsieur le président, je faisais référence aux fonds de pension. J'ai corédigé la lettre d'opinion avec Phil Kretzmar de la communauté juive. Elle sait ce qu'est un génocide et elle tente activement de faire cesser les investissements de nos caisses de retraite et fonds universitaires dans la Chine. C'est à cela que je faisais référence.
Nous allons toujours faire du commerce avec la Chine. Elle a besoin de nos produits et nous avons besoin des siens. Même pendant l'horrible crise avec les deux Michael, nous avons continué de faire affaire avec la Chine, mais pour les caisses de retraite, il faut faire attention.
[Français]
Je vous remercie.
Sur ce même thème, lors de notre dernière séance, nous avons reçu des représentants du Projet de défense des droits des Ouïghours. Comme vous l'avez fait, il y a quelques instants, ils ont signalé le fait que les fonds de pension de Norvège avaient été investis en Russie. Après l'application du régime de sanctions par les pays occidentaux, ces fonds avaient été gelés et dévalorisés après le début de la guerre en Ukraine. Cela a fait perdre des milliers, voire des millions de dollars, aux investisseurs norvégiens.
N'est-ce pas le genre de risque que nous courons en investissant en Chine, considérant le fait que la question n'est pas de savoir si la Chine envahira Taïwan, mais bien quand elle le fera?
[Traduction]
Monsieur le président, c'est un enjeu qui me préoccupe grandement, parce qu'à mon avis, nous avons tellement investi dans la Chine pour nos fonds de pension que cela nuirait à notre capacité de créer des politiques publiques positives en cas de blocage de Taïwan.
Nous devrions être en mesure de fonctionner en tant que gouvernement sans que le secteur privé ou les régimes de pension publics lèvent le drapeau rouge pour dire de ne pas toucher à leurs investissements en Chine. Ils savent très bien que c'est une possibilité et ils devraient faire très attention; ils devraient songer aux façons de réaffecter les fonds investis en Chine vers d'autres pays de la région de manière à respecter la stratégie indopacifique.
Merci, monsieur Bergeron.
Nous passons maintenant à Mme McPherson, qui dispose de deux minutes et demie. Allez‑y.
Merci beaucoup.
Je remercie une fois de plus les témoins d'être avec nous aujourd'hui et de nous transmettre leur expertise.
Madame McCuaig-Johnston, vous avez parlé plus tôt d'incitatifs associés aux droits de la personne. Vous avez dit que les personnes qui gèrent les fonds et qui gèrent le Régime de pensions du Canada sont incitées à faire du profit. Leur rendement est évalué selon ce cadre particulier.
À quoi ressembleraient les mesures incitatives axées sur les droits de la personne? Comment pourrait‑on les intégrer à ce travail?
Ce sont les commissions des pensions qui devraient établir les normes de rémunération des gestionnaires. Nous savons qu'ils accordent de la valeur à la bonne gouvernance et aux facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance, mais ils n'agissent pas concrètement en ce sens. Petit à petit, les fonds de pension réduisent ou annulent leurs investissements dans les grandes sociétés comme Alibaba, Tencent et Neusoft, qui sont clairement des entreprises génocidaires. Nous ne devrions pas investir dans ces sociétés. Je rêve au jour où nous ne ferons plus affaire directement avec elles et où nous aurons des politiques publiques nous interdisant d'investir dans ces fonds en fiducie.
C'est excellent. Merci.
Comme nous parlons de lois, je crois qu'il est important de nous rappeler que même si nous formons le comité sur les relations entre le Canada et la Chine, elles ne s'appliqueraient pas uniquement à la Chine. Elles viseraient le travail forcé dans les chaînes d'approvisionnement de partout dans le monde.
En ce qui a trait à la liste d'entités dont vous avez parlé, serait‑il possible de travailler avec des pays aux vues similaires, avec nos alliés pour l'élaborer? Est‑ce qu'on pourrait utiliser des listes des autres pays?
Je crois que c'est tout à fait possible. Par exemple, la plupart des sociétés minières se trouvent au Canada; nous devrions faire preuve de leadership et veiller à ce qu'il n'y ait aucune forme de travail forcé dans les sociétés minières enregistrées au pays. Cela devrait être énoncé clairement dans la loi que vous envisagez.
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