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Je pense que je vais commencer, ensuite ce sera au tour de Kalissa, puis de Bob.
Mesdames et messieurs, je vous remercie beaucoup de l'occasion que vous m'offrez de m'adresser à vous aujourd'hui. Nous n'avons appris que lundi soir qu'on nous avait demandé de comparaître, alors que nous rentrions chez nous par l'autoroute 401 après avoir assisté au 38e Congrès annuel du Syndicat national des cultivateurs, à London. Kalissa revenait justement avec moi. Donc, plutôt que de prendre deux ou trois jours de congé, nous sommes venues vous rencontrer. Mais c'est un plaisir d'être ici et nous vous remercions de nous recevoir.
Nous représentons le Syndicat national des cultivateurs. Nous sommes toutes les deux membres de l'exécutif national et du conseil d'administration.
J'en profite pour saluer le député de ma circonscription,. Je vis et j'exploite une ferme dans la région d'Iroquois, en Ontario. M. Lauzon a visité ma localité et il a également assisté à un office religieux à mon église.
Permettez-moi de saluer M. Lauzon. Merci.
Je vais vous exposer notre point de vue dans le contexte de Cultivons l'avenir, qui semble être le sujet à l'étude aujourd'hui, et Kalissa vous parlera de sa vision en matière d'agriculture.
Au cours des dix dernières années, il y a eu beaucoup d'études, de mémoires, de recommandations et de propositions — que bon nombre d'entre nous connaissent très bien — portant sur l'effondrement actuel du secteur agricole dans la société canadienne. La publication de Statistique Canada sur le secteur agricole parue en 2007 montre que les régions rurales du Canada sont en proie à une crise perpétuelle. La diminution du nombre des exploitations agricoles et des agriculteurs, le vieillissement constant et croissant des effectifs et le revenu net moyen très au-dessous de la moyenne nationale, indiquent que l'espace rural souffre sans conteste d'un cancer incurable.
Cultivons l'avenir recommande certes des mesures progressives pour s'attaquer à ce qui préoccupe les agriculteurs et les consommateurs, mais la plupart des principes et politiques ne reposent vraiment sur rien de sensé novateur et éclairé. J'ai participé à plusieurs consultations au fil des années, depuis celles qu'avait enclenchées Lyle Vanclief jusqu'aux plus récentes. Et j'ai voyagé d'un bout à l'autre du pays pour participer à ces consultations.
Les avantages concurrentiels dont on parle beaucoup dans Cultivons l'avenir n'ont pas apporté la réussite financière à la vaste majorité des agriculteurs canadiens. Il est vrai que nous avons été compétitifs. Selon les propres données d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, on doit à l'agriculture des exportations dépassant 15,4 milliards de dollars pour la première moitié seulement de l'année en cours, mais la majorité des agriculteurs afficheront encore une perte nette cette année, ou du moins un revenu agricole très faible.
Dans Cultivons l'avenir, les résultats stratégiques s'appliquent à un secteur compétitif et innovateur qui contribue aux priorités de la société et qui gère les risques de façon proactive. Or, ces résultats ne peuvent être atteints que si l'on règle une fois pour toutes le problème de la rentabilité des exploitations agricoles sans empirer davantage la culture de dépendance sans fin qui caractérise l'agriculture de nos jours. Nous devons briser ce cycle de dépendance.
La prétendue modernisation de nos systèmes de réglementation et l'harmonisation de nos normes dans l'ensemble des conseils internationaux donneront simplement aux agrofournisseurs et aux fabricants de produits alimentaires dont l'exploitation est rentable la capacité d'accéder à des produits qui seraient autrement jugés potentiellement impropres à la consommation au Canada.
Selon les objectifs visés dans Cultivons l'avenir, on peut faire ressortir l'importance d'acheter des produits canadiens en modifiant la réglementation en usage sur l'étiquetage, laquelle prête à confusion. Un programme similaire au programme d'étiquetage exigeant la mention du pays d'origine communiquera aux Canadiens les renseignements dont ils ont besoin. Un nombre grandissant de Canadiens veulent soutenir les produits portant la mention « Cultivé au Canada », pas seulement « transformé et emballé au Canada ».
De plus, en ce qui a trait aux priorités sociales mentionnées dans le document Cultivons l'avenir, en achetant localement ou en achetant des produits « cultivés au Canada », on peut facilement diminuer les risques pour la santé et la sécurité, et les agriculteurs pourront ainsi accroître et faciliter la rentabilité de leur exploitation agricole. Cela va de soi, c'est une simple question de bon sens.
En tant qu'agricultrice, j'ai toujours géré mes propres risques. Je n'avais pas le choix. J'ai exercé ce métier pendant plus de 25 ans et je suis toujours dans le secteur, ce qui est révélateur. C'est peut-être statistiquement impossible, mais c'est vrai. J'ai diversifié mes activités et j'ai établi des stratégies de manière à répondre aux demandes du marché, aux échelles locale, nationale et internationale.
La nouvelle série de programmes proposés et bientôt implantés pourrait être une solution à court terme pour certains agriculteurs, mais par le passé, ceux qui étaient vraiment dans le besoin ont reçu une aide insignifiante sous forme de paiements. Le rapport de la vérificatrice générale — dont j'ai apporté une copie — sur le PCSRA fait ressortir des failles auxquelles on pourra remédier à l'avenir. Une fois de plus, je veux souligner que nous devons sortir du cycle de la dépendance.
Comme nous sommes à court de temps, je vais sauter quelques points de mon exposé.
Il faut en particulier nous concentrer sur les programmes qui permettent aux agriculteurs de tirer un meilleur revenu du marché et non des contribuables. La régularisation du marché et de la gestion de l'offre ont assuré aux agriculteurs la rentabilité. Ce sont des mécanismes qui doivent être protégés dans le commerce international. Ils jouent le rôle d'un programme de gestion des risques de l'entreprise et sont en fait soutenus par la majorité des agriculteurs, pas seulement au Canada, mais partout dans le monde.
Pour avoir plus de succès, les agriculteurs devront accroître la rentabilité de leur entreprise. Les causes profondes des crises qui affectent le revenu agricole ne peuvent être réglées par un programme ou une série de programmes de gestion des risques de l'entreprise.
Les agriculteurs de l'Ouest du Canada — et Kalissa vous en dira davantage là-dessus — ont besoin de moyens de transport appropriés, bien entretenus, accessibles et abordables, y compris des lignes de chemin de fer. Nos exploitations agricoles des Prairies et des régions éloignées étant essentiellement axées sur les produits primaires et l'exportation, il faut instaurer des dispositions particulières garantissant que la Loi sur les transports au Canada fait une priorité absolue de leurs besoins.
Présentement, la crise alarmante qui sévit dans les secteurs du porc et du boeuf ne peut être ignorée — j'élève moi-même du bétail. Si l'on y pense, une bonne gestion des risques de l'entreprise doit absolument permettre de vaincre les crises de cette envergure. La semaine dernière, le SNC a adopté une résolution demandant aux gouvernements fédéral et provinciaux d'aider les agriculteurs en leur versant des paiements progressifs jusqu'à un maximum de 100 000 $ en fonction de leurs pertes courantes sur le marché. Il s'agirait de paiements hors PCSRA visant directement les agriculteurs dans le but de veiller à ce que l'argent des contribuables ne soit pas monopolisé par les grands exploitants d'abattoirs ou les parcs d'engraissement contrôlés par ces derniers, comme cela s'est produit durant la crise de la vache folle.
Comme pour tous les programmes, le SNC demeure inflexible dans sa conviction que toutes les interventions gouvernementales doivent viser d'abord et avant tout les exploitations agricoles familiales et que des agriculteurs comme les éleveurs-naisseurs doivent recevoir de l'aide. En outre, le SNC demande au comité permanent de la Chambre des communes de forcer les grands exploitants d'abattoirs de boeuf et de porc et détaillants en alimentation d'ouvrir leurs livres pour que les agriculteurs, les décideurs et les contribuables puissent découvrir qui sont ceux qui réalisent des bénéfices avec le bétail. Il faudrait également ouvrir une enquête sur les crises soudaines et dramatiques que connaît le secteur agricole, enquête à laquelle les producteurs primaires devraient avoir amplement la possibilité de participer.
Le SNC prépare actuellement un document consultatif destiné aux décideurs qui contiendra des recommandations sur la manière d'assurer la stabilité dans l'industrie du bétail et de restaurer la viabilité des exploitations agricoles familiales, ce qui éliminerait la nécessité de recourir au soutien des contribuables à l'avenir. Enfin, le SNC conseille au gouvernement du Canada de refouler sa tendance naturelle à consulter et à financer à outrance des groupes de réflexion du monde des affaires comme l'Institut canadien des politiques agroalimentaires, l'ICPA. Ce présumé groupe de réflexion indépendant pratique l'exclusion et est très éloigné des réalités du secteur agricole.
Pour clore cet exposé, je parlerai du rôle du gouvernement dans la préservation de la confiance du public, voire la protection du public. Des politiques qui placent les producteurs et les consommateurs au centre du développement garantiront la stabilité et l'équité. Un gouvernement qui n'a pas de politiques visant à préserver et à renforcer les communautés et les économies rurales, la salubrité des aliments, la viabilité des producteurs et la capacité des agriculteurs à prospérer, perd la confiance du public.
Je vous remercie.
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Merci beaucoup de me donner l'occasion de vous parler au nom des rares jeunes cultivateurs qu'il reste au Canada.
J'appartiens à une famille qui pratique l'agriculture depuis cinq générations en Saskatchewan. J'ai été élevée sur une ferme familiale au nord de Saskatoon; je suis la plus jeune de quatre enfants et les trois autres sont tous ingénieurs aujourd'hui. Quand je suis revenue à la ferme il y a quatre ans de cela, c'était une exploitation céréalière typique des Prairies, mais au cours des quatre dernières années, de grands changements y ont été apportés.
Je suis maintenant le principal exploitant de notre ferme familiale de 1 500 acres. Nous avons un permis de production de chanvre depuis 2004, et nous avons récemment obtenu une certification de produits biologiques. La ferme produit aussi du blé, de l'orge, des lentilles, des pois, du lin, de l'avoine et du seigle. Par ailleurs, je viens de renouveler mon mandat de vice-présidente des jeunes au Syndicat national des cultivateurs.
Actuellement, les questions concernant les jeunes agriculteurs au Canada sont épineuses. Ces 15 dernières années, le nombre d'agriculteurs de moins de 35 ans est passé de plus de 80 000 à moins de 30 000, ce qui représente une diminution de plus de 60 p. 100. En l'espace d'une année seulement, l'âge moyen des agriculteurs canadiens est passé de 50 à 53 ans.
Ces statistiques n'ont rien de surprenant, étant donné que le Canada a connu ces dernières années les revenus agricoles les plus faibles de toute son histoire. Tant que la rentabilité à long terme ne sera pas assurée pour nos jeunes agriculteurs, leur nombre continuera de décroître.
L'une des clés du profit durable pour les jeunes agriculteurs réside dans la stabilité des marchés. Il arrive trop souvent, hélas, que les jeunes agriculteurs n'aient pas la souplesse financière voulue pour tirer parti de nos marchés libres. Ils sont souvent forcés de vendre leurs produits dès qu'ils le peuvent et à faible prix pour régler leurs factures. La Commission canadienne du blé et les stratégies de régulation de l'offre d'autres organismes jouent un rôle stabilisateur critique pour les agriculteurs dans cette industrie de plus en plus mouvante.
Les nouveaux programmes de gestion des risques de l'entreprise proposés dans le cadre de l'initiative Cultivons l'avenir sont des solutions à court terme qui ne sont efficaces que si l'on accepte un manque à gagner. Un vrai programme de stabilité agricole doit porter sur des politiques qui renforcent le pouvoir de négociation collectif des agriculteurs, permettant ainsi de réduire les risques au niveau individuel et le besoin d'appui du gouvernement fédéral.
Ma décision de retourner dans le secteur rural en Saskatchewan et de me lancer dans une carrière d'agriculteur va radicalement à l'encontre de ce que recommandent les statisticiens dans le domaine: selon les normes sociales, il est acceptable et raisonnable pour les jeunes de tourner le dos à leurs racines rurales.
La nourriture et l'agriculture sont des éléments fondamentaux de notre société dans son ensemble. En tant que jeune agricultrice, ma réussite dépend non seulement de mes connaissances et de ma compétence, mais aussi d'une politique agricole juste et équitable qui fait passer les intérêts des agriculteurs avant tout.
Merci.
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Merci beaucoup, monsieur le président, et merci de m'avoir invité.
Tout d'abord, permettez-moi d'applaudir ce comité pour avoir réagi aussi rapidement à la crise du bétail. Je crois que vous avez fait venir des représentants du secteur bovin et du secteur porcin il n'y a pas longtemps. Les autres membres de la FCA sont tout à fait d'accord avec les solutions que vous a présentées le Conseil canadien du porc pour remettre l'industrie à flot et aider les agriculteurs à s'en sortir.
Nous exhortons les deux gouvernements à examiner non seulement les solutions faciles sur le plan administratif, mais aussi les suggestions particulières qui leur sont soumises. Injecter de l'argent pour résoudre un problème est souvent une solution de facilité, mais nous devons veiller à ce que nos éventuelles mesures commerciales ne créent pas un problème encore plus grave. Je vous remercie donc encore une fois d'écouter ces personnes.
Je voudrais faire quelques menus commentaires sur trois sujets. Je vais commencer par la réunion des ministres fédéraux et provinciaux qui a eu lieu la fin de semaine dernière. Je vais ensuite vous toucher un mot du document de Cultivons l'avenir qui a été produit à Whistler. Je terminerai par quelques commentaires concernant l'excellente liste de recommandations sur l'agriculture qui a été établie par votre comité.
Tout d'abord, en ce qui concerne la réunion fédérale-provinciale-territoriale de la semaine dernière, elle a été, à notre sens, plutôt constructive. Nous sommes très contents que les ministres aient accepté de prolonger tous les programmes non liés à la gestion des risques de l'entreprise.
L'un des principaux sujets dont il a été question à la table ronde ministres-industrie de Whistler est la nécessité de ne pas entraver les programmes ni leur financement. Les ministres se sont vraiment attaqués à la question, ce dont nous leur savons gré.
Nous sommes aussi très heureux qu'ils aient passé autant de temps à discuter de la crise du bétail. Encore une fois, cela indique clairement qu'ils se rendent compte de la gravité de la situation, ce qui est aussi fort apprécié.
Nous avons eu le plaisir de voir le ministre provincial de l'Agriculture monter au créneau pour défendre la question des programmes de soutien en cas de catastrophe, qui porteront le nom d'Agri-relance. Comme vous le savez, il y avait un problème de financement. Il semblerait que les ministres aient relevé le défi, et nous remercions le ministre fédéral d'avoir su les concilier sur cette question.
Au début, nous étions préoccupés par le caractère régional des programmes de soutien en cas de catastrophe, mais depuis, nous avons appris que les éléments des programmes s'appliqueraient aussi aux catastrophes nationales. En cas de catastrophe à grande échelle, il peut y avoir une différence en termes de financement, mais ce n'est pas un problème du moment qu'il y ait un mécanisme en place pour réagir très rapidement.
Une chose qui continue de nous préoccuper — et ce n'est pas la première fois que je la mentionne ici —, c'est que les membres de la Fédération continuent de demander que les programmes de gestion des risques de l'entreprise comportent ce que nous appelons un élément Agri-flexibilité. Cela fait aussi partie de votre liste de recommandations. Il s'agit simplement de prévoir une certaine souplesse pour que le gouvernement fédéral puisse injecter de l'argent dans d'éventuels programmes destinés à cibler des besoins particuliers d'une province ou d'une région donnée. Cela devrait tout de même aller dans le sens des objectifs nationaux. Mais nous pensons qu'il serait possible de prévoir un mécanisme de ce genre, qui apporterait un élément très constructif à la série de programmes. Nous allons donc continuer de vous demander votre appui à ce sujet. Je sais qu'il en a été question à la réunion fédérale-provinciale, et j'espère qu'on continuera à y travailler et qu'on verra des résultats.
En ce qui concerne le document de Cultivons l'avenir, encore une fois, nous sommes contents du document qui est ressorti de Whistler. Il comprenait une bonne partie des éléments que les membres de la Fédération avaient apporté à ce que nous avons appelé notre Loi agricole canadienne. On y parle de trois cercles plutôt que de trois piliers. Nous pensons que c'est une image constructive, surtout lorsqu'on superpose ces trois cercles et qu'on obtient un petit triangle au milieu. C'est le genre d'intégration dont nous avons besoin dans le secteur agricole, avec toutes nos différentes politiques.
Ces trois cercles représentent l'élément produits et services publics, l'élément gestion des risques de l'entreprise et l'élément croissance stratégique. Nous trouvons que le document de Cultivons l'avenir prévoit suffisamment de souplesse pour que l'industrie puisse continuer à alimenter le processus et mettre au point un nouveau cadre stratégique pour l'agriculture des plus efficace.
Je peux vous assurer que l'industrie est fin prête et impatiente de commencer à travailler sur le détail des programmes. Nous voulons vraiment voir de quoi tout cela aura l'air dans les faits, alors nous avons hâte de commencer la prochaine série de consultations.
J'aimerais aborder très brièvement deux questions.
Je sais que nous avons amplement discuté de la gestion des risques de l'entreprise, je ne m'étendrai donc pas davantage sur ce sujet, sauf pour dire que nous sommes très heureux d'avoir obtenu un niveau supérieur de contribution au PCSRA. Cette augmentation ne pouvait survenir à un meilleur moment pour l'industrie des céréales et des oléagineux, mais compte tenu de la diversité et des différents secteurs qui existent au Canada, elle ne pouvait survenir à un pire moment pour l'industrie de l'élevage. Nous espérons, à nouveau, que les gouvernements se pencheront sur la proposition du CCP concernant cette question, parce qu'à long terme, ce niveau supérieur sera avantageux pour tous les secteurs.
Je serai très bref en ce qui concerne les biens et services publics. Je crois que vous avez tous entendu parler de l'initiative en matière de services d'utilisation des terres agricoles. Il y a actuellement trois ou quatre projets pilotes dans tout le Canada. Nous sommes très optimistes à l'égard de ceux-ci. Par exemple, un de ces projets pilotes est axé sur la population, la municipalité et le gouvernement provincial et reconnaît qu'il y a un nombre assez élevé d'agriculteurs dans une région où il y a beaucoup d'eau. Il a pour objectif de veiller à ce que l'eau ne soit pas contaminée et c'est pourquoi il offre du financement à des agriculteurs pour qu'ils créent des zones tampons plus grandes que ce qu'exige la réglementation. Il s'agit d'un projet très constructif, car il crée des liens étroits entre les agriculteurs et ceux que nous appelons généralement les citadins. Fait surprenant, seulement 11 p. 100 des ruraux sont en fait des agriculteurs, il est donc important qu'existent des liens étroits entre ceux-ci et les ruraux qui ne sont pas agriculteurs de même que les citadins. Le pilier des biens et services publics vise — et ces projets pilotes en sont un bon exemple — à aider les agriculteurs à poser des gestes qu'ils n'auraient pas autrement les moyens de poser, parce qu'ils ne peuvent pas répercuter les coûts ajoutés sur les consommateurs. Il aide à atteindre un objectif social en permettant la préservation et l'amélioration du capital naturel du Canada. Le recours aux fonds publics pour aider les agriculteurs qui fournissent un bien commun permettrait aussi ultérieurement de réduire le fardeau de la gestion des risques de l'entreprise.
C'est ce que nous entendons par biens et services publics. Il ne s'agit pas seulement d'initiatives en matière de services d'utilisation des terres agricoles. Ce peut être des plans environnementaux de la ferme ou des programmes de salubrité des aliments, puisque que ces programmes visent également le bien commun en nous aidant à faire connaître le Canada à l'échelle internationale. Selon nous, ce pilier présente donc un potentiel positif.
Je ne mentionnerai plus la gestion des risques de l'entreprise, mais j'aimerais parler brièvement du pilier de la croissance stratégique. Dans le dernier CSA, on reconnaissait qu'il fallait des piliers de financement. En fait, le premier CSA était constitué de très importants piliers de financement, mais on n'a pas consacré suffisamment de temps à l'élaboration d'une stratégie visant à assurer la croissance et une meilleure rentabilité de notre industrie.
J'aimerais mentionner deux questions sur lesquelles nous avons commencé à travailler, outre les questions habituelles comme veiller à ce que nous ayons un meilleur accès au marché ou un accès à des marchés étrangers rentables, par l'intermédiaire soit de l'OMC soit d'ententes bilatérales, et conserver notre capacité d'utiliser des structures de commercialisation telles que la gestion de l'offre, des offices de commercialisation facultatifs, des lois visant les coopératives ou même un comptoir de vente unique — tant d'outils qui renforcent l'autonomie des agriculteurs. Ces deux questions ne représentent certainement pas une panacée pour toute l'industrie, mais elles constituent, selon nous, un pas de plus vers l'adoption d'une approche stratégique dans le secteur agricole. L'une d'entre elles est ce que nous appelons le plan d'investissement pour les coopératives. Je ne crois pas en avoir déjà parlé devant ce comité, mais nous avons examiné le modèle qui existe au Québec. Vous savez tous comment fonctionnent les coopératives. En fait, si elles fonctionnent partout ailleurs comme elles le font au Manitoba, vous payez des frais d'adhésion de 10 ou 20 $ à la coopérative, mais rien ne vous incite à y investir davantage, puisque le capital investi ne génère aucun rendement.
Au Québec, on vous accorde un allègement fiscal si vous investissez dans une coopérative, parce que c'est le seul bénéfice qui vous revient alors, autre que celui, bien sûr, des ristournes obtenues lors des achats ou ventes en grande quantité effectués par l'intermédiaire de coopératives d'achat. Ainsi, au Québec, des allègements fiscaux à hauteur de 6 millions de dollars ont donné lieu à des investissements directs de 36 millions de dollars dans des coopératives ainsi qu'à des investissements de 100 millions de dollars effectués par les coopératives dans les régions rurales.
Nous croyons que, si une telle politique était appliquée à l'échelle nationale, des allègements fiscaux entre 16 et 20 millions de dollars généreraient au bout du compte des investissements directs de centaines de millions de dollars et des bénéfices accumulés encore plus importants pour les régions rurales. Nous pensons que ce modèle serait excellent pour créer, à peu de frais, un environnement plus solide pour les coopératives, parce que nous savons que le système coopératif peut être un bon outil pour renforcer l'autonomie des agriculteurs.
Deuxièmement, je voudrais évoquer très brièvement un sujet dont j'ai parlé la dernière fois que j'ai comparu devant le comité, soit l'idée d'une étiquette « cultivé au Canada ». Vous en avez fait mention dans vos recommandations. Nous avons effectué une étude dont les résultats vous ont été transmis, il me semble. Selon cette étude, 90 p. 100 des Canadiens aimeraient que les produits canadiens soient clairement identifiés; 50 p. 100 ont affirmé — et je sais que c'est facile à dire au téléphone — qu'ils seraient disposés à payer un supplément pour des produits canadiens et 73 p. 100 d'entre eux ont déclaré qu'ils seraient prêts à payer un supplément plus élevé si une partie de celui-ci revenait aux agriculteurs. Nous avons travaillé fort à ce sujet. Nous allons maintenant créer des groupes de travail qui discuteront avec d'autres organisations agricoles qui ne sont pas membres de la FCA. Nous collaborons déjà avec Fabricants de produits alimentaires du Canada et des distributeurs en alimentation. Nous voulons intégrer toutes les parties à cette initiative et vraiment commencer le marquage des produits canadiens au Canada.
Je crois qu'il me reste deux minutes, monsieur le président. Je vais parler très brièvement de trois recommandations. En passant, tout le document était très positif selon nous.
Une de vos recommandations portait sur la création d'un comité consultatif qui examinerait la politique agricole. D'après la réponse, les consultations sont améliorées grâce à la création de groupes de travail et ainsi de suite, mais je dois souligner l'importance et les avantages pour le gouvernement fédéral et pour le ministre d'avoir un comité consultatif solide. Celui qui existait auparavant a rassemblé la Western Canadian Wheat Growers Association, la Canadian Cattlemen's Association, la Western Barley Growers Association et la Canadian Canola Growers Association. Ce groupe, lorsqu'il est parvenu à un consensus, a fait une recommandation de poids au ministre, ce qui l'a alors aussi aidé dans ses négociations avec les ministres provinciaux.
Votre recommandation 19 porte sur les programmes d'accompagnement. Nous pensons qu'il s'agit d'un volet important que nous devons développer. La recommandation 9 traite de l'élément « cultivé au Canada ». Je vous remercie d'en avoir fait mention. La recommandation 17 porte sur des programmes tels que le Programme d'autogestion des risques et le programme d'assurance-production autogérée. À ce sujet, je voudrais seulement mentionner que l'industrie horticole de tout le Canada a élaboré un excellent programme national d'assurance-production, que rien d'autre ne pourrait surpasser. Nous demandons votre soutien à cet égard.
Merci beaucoup, monsieur le président. J'ai terminé. Je suis disposé à répondre aux questions.
J'étais avec les représentants du Conseil canadien du porc, hier soir, lorsqu'ils ont témoigné devant un comité du Sénat, et ils ne se plaignent pas du prix des céréales, ça c'est sûr. Ils pensent que les producteurs de céréales récoltent enfin ce qu'ils méritent. Par exemple, dans l'ensemble du Canada cette année, le prix de l'orge a augmenté de 70 à 75 p. 100 par rapport à l'année dernière. Ils ont donc ce qu'ils méritent. Malheureusement, cela frappe durement l'industrie des productions animales, et la valeur du dollar augmente beaucoup. Le dollar a augmenté d'environ 10 ¢ entre les mois de janvier et de septembre de cette année, et au cours des deux derniers mois, il a soudainement grimpé de 14 ¢. On observe donc également une certaine volatilité du dollar et, bien entendu, tout cela a contribué à réduire considérablement les marges.
Quant à la souplesse régionale, nous reconnaissons que la situation en Saskatchewan est différente de celle de l'Île-du-Prince-Édouard en matière d'agriculture. Donc, bien que nous appuyons une approche nationale, nous croyons qu'il devrait y avoir une certaine souplesse régionale. Le Québec a lui-même un programme. L'Alberta fait toujours de petites choses complémentaires avec son argent : elle a un prix plancher pour les céréales et elle joue un peu avec ses marges de référence. Les régions font déjà preuve de souplesse de toute façon. Nous savons que les provinces de l'est du Canada aimeraient utiliser des fonds complémentaires pour l'élaboration d'un programme stratégique proactif. La Saskatchewan pourrait utiliser des fonds complémentaires. Elle possède 45 p. 100 des terres arables canadiennes, et son programme d'assurance-récolte est le pire au Canada. Elle pourrait utiliser des fonds complémentaires pour améliorer son assurance-récolte. De cette façon, nous pourrions instaurer une certaine équité au lieu de laisser l'Alberta dépenser beaucoup d'argent dans des initiatives propres à sa province... Le Québec et, bien sûr, l'Ontario aimeraient le programme de gestion des risques. Nous croyons qu'il s'agirait d'un ajout très constructif.
En ce qui concerne l'étiquette « cultivé au Canada », vous avez raison. Je ne sais pas combien d'entre vous ont regardé Market Place et, je crois, W-FIVE. Je pense que nous pourrions maintenant prendre le train en marche et faire en sorte que les consommateurs soient de la partie dans ce dossier. Je me suis entretenu avec des apiculteurs albertains il y a quelques semaines, et je ne m'étais pas rendu compte que, pendant des années, ils ont eu des problèmes avec l'étiquette « numéro un au Canada » apposée sur les contenants de miel. Ce n'est vraiment qu'une norme de classement ou une attestation d'inspection, mais cela laisse entendre qu'il s'agit de miel canadien et les apiculteurs disent que la moitié de ce miel provient probablement d'un autre pays. L'étiquetage n'est soumis qu'à une seule exigence par la loi, celle d'être authentique. Nous pensons donc que ce serait là une excellente occasion d'appuyer les initiatives « d'achat local ». Cela n'a pas pour but de miner les initiatives provinciales ou « d'achat local » qui sont en place, mais simplement d'ajouter un élément constructif qui permet véritablement de désigner les produits canadiens.
C'est un plaisir de vous revoir, Colleen et Kalissa, et vous aussi, Bob.
Nous avons assisté au congrès du SNC la semaine dernière. Des sujets vraiment intéressants ont été abordés, notamment la sécurité des aliments, et beaucoup de prédictions funestes ont été faites. Je dois informer mes collègues que la musique de Kalissa a été l'un des points forts du congrès; j'aurais aimé qu'elle apporte son clavier pour nous jouer quelque chose aujourd'hui, mais je constate qu'elle ne l'a pas fait. Ce sera pour une prochaine fois, peut-être.
Il semble être abondamment question de l'Île-du-Prince-Édouard aujourd'hui, alors que Wayne n'est pas parmi nous, ce qui est plutôt intéressant, mais il y a une question d'un agriculteur biologique de North Milton, à l'Île-du-Prince-Édouard. Il dit qu'à son avis, la politique fédérale en matière d'agriculture appelle à une capitalisation et à une mécanisation intensive de l'agriculture, ce qui transparaît dans le rapport du SNC en Ontario. Il ajoute que « ces politiques ont permis à des entreprises agricoles de réaliser des profits astronomiques au détriment des agriculteurs ruraux ».
Il demande au SNC et à la Fédération canadienne de l'agriculture s'ils soutiennent la mise en œuvre d'une formule qui indemniserait les agriculteurs pour la perte subie lorsque le prix du marché de leurs produits est en deçà du coût de production. C'était ma première question; j'espère que j'aurai l'occasion d'en poser une autre.
Kalissa, en tant que jeune agricultrice, peut-être pourriez-vous nous éclairer à ce sujet.
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Je l'ai déjà mentionné une fois auparavant, si cela ne vous dérange pas que je me penche sur cette question. Nos accords commerciaux nous ont mis dans une impasse. Ils nous tiennent dans un état constant de pauvreté. Et qu'entend-on dire? Nous avons besoin d'un accès accru aux marchés.
J'étais à Hong Kong. J'ai assisté aux réunions ministérielles de l'OMC. Quand j'ai entendu des représentants de l'industrie qui avaient déjà énormément... Le secteur alimentaire est très lucratif. Il y a beaucoup d'argent à faire dans le milieu agroalimentaire. Nombreux sont ceux qui y gagnent très bien leur vie. Ce sont eux, et certains de leurs collègues — que je considère comme des cultivateurs d'agriculteurs — qui demandaient un accès accru aux marchés.
Donc, pour qu'ils puissent obtenir l'accès aux marchés dont ils bénéficient déjà — et qui ne leur a pas en fait été favorable —, ils estiment que l'abandon de la gestion de l'offre et de la Commission canadienne du blé, les deux seuls atouts que nous avons... Lequel allons-nous abandonner en premier? La gestion de l'offre? Non, ce sera la Commission canadienne du blé. Ils auront ainsi un accès accru aux marchés et ils pensent naïvement qu'ils pourront donc faire plus de profits.
Nos accords commerciaux nous mettent dans une impasse. Pourquoi sommes-nous les otages et les prisonniers de ces accords que nous n'aurions jamais dû conclure? J'irais même jusqu'à dire maintenant que nous devons retirer l'agriculture de l'OMC. Je ne veux pas dire qu'il faille mettre fin aux activités commerciales. Le commerce est une réalité et nous sommes un pays à caractère commercial. Nous devons toutefois éviter d'effectuer ce commerce agricole dans le cadre établi par l'OMC qui nous entrave et tient la campagne dans un état constant de pauvreté.
Nous voulons regagner la confiance du public. Quand on fait confiance au gouvernement et qu'il y a une pauvreté extrême — n'ayons pas peur des mots puisque c'est de cela dont il s'agit —, avons-nous un filet de sécurité? Lorsqu'on est déjà par terre, est-il possible de tomber plus bas? Qu'en est-il du filet de sécurité? Il n'y en a pas. Vous n'avez pas besoin d'un filet de sécurité parce que vous êtes déjà au niveau le plus bas.
Il faut un changement radical — et voilà pourquoi cela est trop difficile. Nous parlons du MAAARO, mais cela ne concerne pas ses employés. Le gouvernement libéral de l'Ontario a dit des choses merveilleuses au sujet de ce qu'il veut obtenir en matière d'agriculture. Ce sont les bureaucrates de haut niveau du MAAARO qui n'ont pas fait leur travail, et c'est ce que nous voulons.
Nous observons le même phénomène à Agriculture et Agroalimentaire Canada, et je peux donner des noms. Ils ont une vision différente des choses. Il faut séparer les entreprises du gouvernement, d'Agriculture et Agroalimentaire Canada et du MAAARO. Devant l'OMC, quels sont les intérêts les mieux représentés? Ceux des entreprises, qui se portent encore très bien, et d'Agriculture et Agroalimentaire Canada.
Je ne sais pas si cela a permis de répondre à vos questions, mais c'était ma petite critique.
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Je ne pense pas que les programmes de marge de référence sont efficaces à long terme. Ils sont comme l'assurance-récolte, qui ne fonctionne pas lorsque les récoltes se détériorent pendant plusieurs années d'affilée. Les programmes ne fonctionnent pas non plus.
En ce qui concerne nos exportations, nous avons exporté pour 12 milliards de dollars de marchandises en 1993, et aujourd'hui nous exportons pour 24 milliards, 25 milliards, 26 milliards de dollars. Les agriculteurs n'ont jamais été si pauvres que depuis les trois ou quatre dernières années.
Mme Ross, vous avez absolument raison. Si nous allons appuyer ce concept d'exportation et que les multinationales font des profits faramineux alors que les producteurs primaires font faillite, je ne pense pas qu'il soit utile de déployer tant d'efforts puisque cela n'en vaut pas la peine.
Vous vous demandiez si nous devions discuter en vue de produire un rapport et de demander à voir les livres comptables. Les livres ont été ouverts et nous avons un rapport que vous pouvez lire. Vous n'avez besoin de lire qu'une personne faisait 600 p. 100 alors qu'elle faisait en fait 200 $ par animal pour la dépouille. Il n'y avait rien de vrai dans ces affirmations. Nous avons ce rapport et ce sera avec plaisir que nous vous le montrerons. Cela est maintenant fait, et nous n'avons pas à le refaire.
Je tiens à vous dire que nous, les agriculteurs, avons été pris pour des idiots, et ce, depuis beaucoup trop longtemps. Le système de gestion de l'offre a fonctionné, et jusqu'à ce que nous soyons prêts à foncer et à faire les choses différemment.... Nous pouvons appeler cela de mille et une façons, mais à moins d'être prêts à changer ce qui a été fait dans le passé et à aller radicalement de l'avant.... Je pense sincèrement — et vous avez parlé de faire certaines choses — que nous avons besoin de faire un pas beaucoup plus grand vers l'avant. Je pense que l'agriculture doit relever d'un seul gouvernement au pays.
Il y a un plan agricole pour 50 États aux États-Unis. Nous avons 10 provinces, trois territoires et un gouvernement fédéral qui tentent d'encadrer les activités agricoles. Cela ne fonctionne pas.
Quels sont vos commentaires?
Une voix: C'est une bonne question.
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J'ai une fille qui vient de fêter ses 23 ans en novembre. Elle finira ses études universitaires en décembre. Elle voulait être médecin, et elle s'était inscrite en sciences, mais elle a changé d'idée. Elle veut maintenant devenir agricultrice. En tant que mère, j'ai honnêtement été un peu bouleversée d'apprendre que nous avons influencé ma fille de 23 ans au point que'elle souhaite devenir agricultrice. Elle veut devenir agricultrice et chef cuisinier. En plus, elle est une brillante artiste.
Je dois respecter son choix, mais, le secteur agricole étant ce qu'il est aujourd'hui, nos exploitations agricoles représentent notre revenu de retraite, et ce n'est pas une bonne chose. Elles devraient être une partie de notre vie et de celle de nos enfants. C'était comme ça dans le passé, mais je suis tellement endettée que je compte sur mon exploitation pour assurer ma sécurité pour encore quelques années si possible. Avant d'en arriver là, j'espère régler un bonne partie de mes dettes afin réaliser un bon profit quand je vendrai. La réalité est que mes enfants veulent être agriculteurs, et je dois les aider, sinon ils n'y parviendront pas.
Cependant, de nouveaux programmes sont prévus, comme des programmes d'apprentissage et de mentorat, surtout dans la ceinture verte de Toronto et de Guelph, où la population est plus grande à celle de l'est de l'Ontario. Beaucoup de jeunes élevés en ville ou sur une ferme ne peuvent pas toujours exploiter la terre où ils vivent. Ces jeunes apprennent à pratiquer l'agriculture, en particulier l'horticulture, l'agriculture à soutien communautaire, la culture maraîchère et l'approvisionnement des restaurants et des épiceries indépendantes. L'arrivée de ces programmes est très encourageante.
Prenons l'exemple de la ferme Everdale, un centre d'apprentissage situé à l'extérieur de Guelph. Il y a aussi le Ignatius Jesuit Retreat Centre. Les jésuites qui travaillent sur cette ferme sont membres du SNC. Le centre offre un programme de mentorat aux agriculteurs en herbe. Voilà quelques exemples de ce qui se fait.
Je connais une jeune agricultrice qui a une exploitation à soutien communautaire très prospère, à l'extérieur d'Ottawa. Elle compte 200 clients environ. Elle n'exploite pas sa propre terre, mais celle d'une merveilleuse famille possédant quelque 400 acres. La famille a dit qu'elle n'avait pas les moyens d'exploiter sa terre, mais qu'elle aimait ce que l'agricultrice proposait. La famille a donc accueilli la jeune femme sur sa terre. La jeune femme est agricultrice, mais elle n'a pas besoin de posséder une terre.
La nouvelle génération d'agriculteurs canadiens proviendra également d'immigrants. Il existe actuellement des programmes de formation en agriculture à l'intention des immigrants en vue d'approvisionner les marchés ethniques. Les immigrants seront le nouveau visage de l'agriculture au Canada.
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Je suis le dernier, donc ce doit être à moi.
Merci beaucoup. Je suis heureux de vous revoir, Colleen, monsieur Friesen et Mme Regier.
Je dois dire que je suis un peu abasourdi par vos témoignages, car les commentaires dont me font part les agriculteurs de ma circonscription sont largement positifs. En général, ils me disent « Beau travail, Guy. On sent que ça bouge. » Il y a des exceptions. J'avoue franchement qu'il n'y a pas ou pas beaucoup de mégaporcheries dans ma région, ni d'exploitations bovines.
Je suis fier d'avoir été nommé secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture, car, en moins de deux ans, nous avons injecté 4,5 milliards de dollars dans le secteur de l'agriculture, ce qui a extrêmement réjoui la plupart des agriculteurs de ma circonscription.
Vous avez mentionné, monsieur Friesen, que le ministre avait entamé des négociations avec ses homologues provinciaux. Quand j'ai été nommé à mon poste, il m'a presque tout de suite dit quoi faire. Je voulais savoir en quoi je pouvais l'aider. Il m'a répondu qu'il fallait accorder la priorité aux agriculteurs. Si vous remarquez, c'est ce que notre gouvernement fait depuis qu'il a pris le pouvoir, accorder la priorité aux agriculteurs. C'est ce que les agriculteurs de ma circonscription m'ont demandé, et c'est ce que j'essaie presque toujours de faire.
L'autre chose qu'il m'a dite est que nous devions aider toutes les exploitations agricoles à être profitables et durables. Il a précisé que, s'il n'y avait qu'une chose à comprendre, c'était bien cela. Après tout, c'est tout ce que veulent les agriculteurs de ma circonscription qui traient leurs vaches et font leurs récoltes. Ils veulent des chances égales. Je crois, comme je l'ai toujours cru, que nous nous approchons de ce but et, en effet, les commentaires que j'entends à l'égard du document Cultivons l'avenir sont très positifs.
Monsieur Friesen, vous avez signalé que le document Cultivons l'avenir faisait l'objet de consultations exhaustives à l'échelle du pays. Je pensais que les agriculteurs avaient eu leur mot à dire, et c'est bien le cas, ils aiment cette vision. Je suppose que vous y trouvez de nombreux points positifs ou, du moins, quelques points positifs. J'aimerais avoir votre opinion sur Cultivons l'avenir. Dites-moi quels en sont les points positifs et quelles ont été les lacunes des consultations, s'il y en a eues car, si je ne m'abuse, les agriculteurs ont donné beaucoup de rétroaction. Pouvez-vous me dire ce que vous pensez de cette politique, et indiquer les points forts et les points à améliorer?
Je suis tout à fait d'accord avec vous; le Canada est un chef de file à l'échelle internationale en sciences et technologies ainsi qu'en agriculture et en innovation. J'ai étudié à l'Université de Guelph au début des années 1980. J'ai vu beaucoup d'agriculteurs adopter de nouvelles technologies, mais les technologies n'ont pas toujours joué en notre faveur, comme le montrent nos résultats financiers. Nous devons recourir aux technologies appropriées — je dis bien appropriées —, soit dans la sélection des végétaux, le bétail ou l'équipement que nous utilisons à la ferme, pour accroître nos profits. Certains agriculteurs utilisent des digesteurs-méthaniseurs de leur fabrication, et le biodiesel, deux technologies efficaces, mais il faut encore les peaufiner.
Le Syndicat national des cultivateurs travaille actuellement au dossier portant sur la culture d'aliments pour en faire du carburant. Les réserves mondiales d'aliments sont au niveau le plus bas de tous les temps. J'étais de passage à New York en septembre, et la ville n'a des réserves d'urgence que pour trois jours. Washington et les villes canadiennes sont confrontées au même problème. Partout dans le monde, les réserves d'aliments sont au niveau le plus bas de tous les temps. Bon nombre des nouvelles technologies engendrent la pauvreté et la famine. Nous devons être très prudents si nous choisissons de cultiver les bonnes terres pour récolter des aliments qui serviront à fabriquer du carburant plutôt qu'à nourrir la population.
Nous ne connaissons pas encore le taux de conversion des coûts réels en ressources naturelles nécessaires pour cultiver les aliments qui seront transformés en carburant. Nous avons encore énormément de travail à accomplir avant de crier victoire. Il va de soi que beaucoup d'industries tireront profit de cette technologie, surtout des entreprises de semences et de technologies, qui nous pressent d'aller de l'avant.
Le mot d'ordre est la prudence. Je suis sans aucun doute une agricultrice progressiste, et je soutiens les pratiques qui seront selon moi écologiques et éthiques. Avant d'adopter une nouvelle technologie, je pèse le pour et le contre.
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Je trouve cela très intéressant parce que quand j'ai été nommé porte-parole en matière d'agriculture, en 2005, une des premières activités auxquelles j'ai participé était une grande manifestation dont le thème était « D'abord nourrir notre monde », et elle était organisée par l'Union des producteurs agricoles du Québec, en plein centre-ville de Montréal.
Il n'y a pas beaucoup d'agriculteurs à cet endroit, alors pourquoi cela a-t-il été fait à Montréal, en pleine ville? C'était pour montrer aux consommateurs, dont un grand nombre se trouvent évidemment dans les villes, que beaucoup de produits qu'ils trouvaient en épicerie venaient de terres situées pas loin de chez eux et que, si un jour on perdait l'apport de nos agriculteurs, on deviendrait totalement dépendant de cultivateurs d'autres pays, ce qui pourrait, suite à une malchance quelconque à un moment donné, faire en sorte qu'on ait des pénuries dans certains secteurs, des maladies, enfin, des hausses de prix incontrôlées et incontrôlables, etc.
Le thème avait donc déjà été abordé. C'est pourquoi je vous dis que je trouve cela intéressant. Tout récemment, l'Union des producteurs agricoles et Équiterre ont invité des députés à entendre des conférenciers parlant de souveraineté alimentaire.
Je trouve que c'est intéressant justement parce qu'on fait un peu un parallèle avec ce qui s'est passé dans le domaine de la culture. Le Québec avait été un précurseur à ce chapitre, demandant que la culture ne soit pas considérée comme une marchandise dans le cadre d'échanges internationaux. Il a fallu sept ans pour cela, mais on a réussi à faire en sorte que la culture soit exclue et ne soit pas considérée comme une marchandise et, en d'autres termes, que la diversité culturelle soit finalement reconnue.
J'aimerais que vous nous fassiez un résumé, si vous êtes en mesure de le faire, des discussions sur la souveraineté alimentaire qui se sont tenues chez vous. Cela pourrait alimenter le débat chez nous aussi.
J'ai été invitée à des réunions de l'Union des producteurs agricoles du Québec et de l'UPA Développement international. Le Syndicat national des cultivateurs est membre de La Via Campesina, organisation agricole internationale qui représente des millions de cultivateurs et de pêcheurs dans le monde entier. Il s'agit d'une organisation parallèle à la FIPA.
J'ai en main la déclaration internationale sur la souveraineté alimentaire. La souveraineté alimentaire n'a qu'une définition, qui ne peut être changée. Il s'agit du droit des peuples à une alimentation saine, dans le respect des cultures. Beaucoup de choses que j'ai dites plus tôt aujourd'hui sont fondées sur la souveraineté alimentaire. Nous sommes tellement liés par nos accords commerciaux. En fait, ceux-ci ne prennent aucunement en considération les droits de la personne et la culture. De plus, l'alimentation n'est pas un droit, car un droit accordé peut être supprimé. Tout le monde doit pouvoir se nourrir, et c'est ce que permet la souveraineté alimentaire.
J'ai été en Afrique cette année, et Kalissa aussi. Nous avons été invitées au Forum pour la souveraineté alimentaire, le tout premier forum international de ce genre. Le point de rendez-vous était en Afrique occidentale, dans un petit village au milieu du désert. Il n'y avait pas de Sheraton, croyez-moi. Nous avons dormi sur des planchers de béton, sur des matelas pas plus épais que cela. Cinq cents pêcheurs, paysans, pasteurs et agriculteurs venant de partout dans le monde se sont réunis et ont produit un document exposant leur consensus. Il s'agit de la déclaration internationale de la souveraineté alimentaire.
Nous croyons que, si les gouvernements s'appuyaient sur ce document pour élaborer les politiques agricole et alimentaire — ce document aborde également la stabilité économique, c'est-à-dire que les producteurs d'aliments doivent être stables économiquement —, nous serions incroyablement prospères. Nous aurions des collectivités dynamiques et nous protégerions l'environnement. Les consommateurs seraient gagnants, de même que les agriculteurs et l'environnement. Ce serait une situation avantageuse pour tous.
La souveraineté alimentaire est un excellent modèle, mais laissez-moi vous rappeler qu'il ne peut pas être modifié. Cette déclaration a été formulée... et les 500 personnes rassemblées représentent des millions d'agriculteurs. C'était un véritable honneur d'être là. Des représentants de l'UPA DI y sont aussi allés en qualité d'observateurs. Ils ne pouvaient pas vraiment participer, car ils n'étaient pas membres. Ils ne s'étaient pas vraiment engagés.
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En fait, j'ai noté trois points rapidement, et je vais m'y limiter.
D'abord, nous avons besoin d'argent. Nous devons être en mesure de gagner notre vie. C'est simple. Tout le monde doit pouvoir gagner sa vie. Nous devons recevoir une rémumération adéquate pour notre travail. C'est vrai pour tous les agriculteurs. Ce n'est que lorsque tous les agriculteurs feront suffisamment d'argent que les jeunes agriculteurs s'intéresseront au secteur. D'ici là, ils s'installeront à Ottawa et se trouveront un emploi dans la fonction publique.
En deuxième lieu — et ça devient un peu plus vague — il faut ranimer le sentiment de fierté à l'égard de l'agriculture. Les agriculteurs ont été terriblement marginalisés au cours des 30 dernières années. Lorsque j'étais jeune, personne ne voulait devenir agriculteur. La situation a commencé à changer un peu, mais les agriculteurs ont tellement été rabaissés qu'ils ne tirent plus de fierté de leur travail. Les collectivités rurales sont dévastées. On me demande chaque jour pourquoi quelqu'un voudrait vivre dans une petite ville de la Saskatchewan. Nous devons trouver un moyen de rétablir les choses.
Il s'agit d'un bon métier, et il existe plein de possibilités pour les jeunes de bien gagner leur pain et d'avoir une belle vie. Il importe de ranimer ce sentiment de fierté.
Troisièmement, j'ai rapidement noté qu'il fallait s'attacher à la collectivité, et il y a là un rapport avec la fierté. Les jeunes gens ont besoin d'avoir l'impression d'appartenir à une collectivité et de contribuer à la région où ils travaillent. Je pense en particulier à la Saskatchewan, puisqu'il s'agit de mon seul point de référence. Il y a tellement d'endroits en Saskatchewan où les gens n'ont pas de voisin. Pouvez-vous imaginer de ne pas avoir de voisin, d'habiter sur une ferme où votre voisin le plus près se trouve à plus de 16 kilomètres? Je sais qu'il est très difficile pour vous de comprendre, mais c'est la réalité. Personne ne veut vivre ainsi. Les gens n'accepteront pas cette situation, alors il faut changer les choses.
C'était, en bref, les trois points que je voulais vous présenter.