:
Bonjour, mesdames et messieurs, bienvenue.
Il s'agit de la 44e réunion du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées. Nous sommes ici pour poursuivre l'exploration du potentiel de la finance sociale au Canada.
Pendant la première heure, nous avons le plaisir d'accueillir M. Bruce Dewar, président-directeur général de LIFT Philanthropy Partners, qui aura une déclaration à faire. Bienvenue.
Nous allons également entendre, par vidéoconférence de Montréal, M. Stephen Huddart, président-directeur général de La fondation de la famille J.W. McConnell.
Enfin, par vidéoconférence de Calgary, nous entendrons M. Wayne Chiu, directeur général du Trico Group. Bienvenue, monsieur.
Vous disposerez chacun d'un maximum de 10 minutes pour faire votre déclaration, après quoi nous passerons aux questions des membres du comité. Mesdames et messieurs, il s'agira de tours de cinq minutes, aujourd'hui, car nous recevons deux groupes de témoins, un pendant la première heure et l'autre, pendant la deuxième.
Monsieur Dewar, voudriez-vous s'il vous plaît commencer votre déclaration?
:
C'est un plaisir d'être ici pour m'adresser à votre comité.
La finance sociale a un énorme potentiel parce qu'elle peut encourager l'innovation sociale, au Canada, en donnant aux investisseurs et aux organismes à mission sociale de nouvelles occasions de travailler en partenariat pour réaliser des projets innovateurs et faire passer leurs excellentes idées à un échelon supérieur, partout au pays. La finance sociale améliorera la situation sociale et économique des Canadiens et, fait plus important encore, des collectivités dans lesquelles ils vivent.
Comme nous le savons tous, le Canada fait face à des problèmes économiques croissants et à des enjeux sociaux complexes de plus en plus graves. Notre population vieillit, les travailleurs prennent leur retraite, et nous devons répondre à une plus grande demande de travailleurs scolarisés et spécialisés. Les données du gouvernement fédéral sur le chômage font état d'une pénurie de compétences dans les régions et parmi les groupes sous-représentés, par exemple les Canadiens d'origine autochtone, les nouveaux immigrants et les adultes peu alphabétisés.
De plus, la santé de notre population est menacée. L'inactivité physique mène à des maladies chroniques, à une augmentation du coût des soins de santé et à des pertes de production. L'inactivité physique représente en coûts annuels de soins de santé plus de 2 milliards de dollars. Le gouvernement pourrait obtenir des résultats différents et meilleurs pour les contribuables canadiens s'il se penchait sur de nouveaux modèles et de nouvelles façons de faire les choses. L'innovation sociale et la finance sociale peuvent faire partie de sa trousse d'outils.
Passer de l'acceptation des possibilités de la finance sociale à la mise en oeuvre de projets représente un défi pour tous les gouvernements, pas seulement pour le gouvernement fédéral. Nous voyons qu'il en est ainsi pour les gouvernements provinciaux et partout dans le monde. Si nous examinons globalement la finance sociale, il est évident qu'il n'existe pas de solution unique et que les outils de la finance sociale prennent de nombreuses formes. Il est trop tôt pour faire des prédictions définitives ou formuler une conclusion sur les modèles les plus efficaces à l'échelle mondiale, car ils n'ont pas tous encore porté fruit.
Il y a trois ou quatre ans, les gens parlaient des obligations à impact social, des investissements d'impact et de la rémunération au rendement, des modèles qui peuvent tous être utilisés au Canada. Je crois que nous pourrons proposer une solution canadienne, qui intègre les meilleurs éléments de ces principes, pour faire en sorte que les organismes à mission sociale puissent fournir des résultats pour les Canadiens.
Au Royaume-Uni, on a reconnu que, pour que les investissements donnent des résultats, ils doivent être acheminés vers les organismes à mission sociale qui sont prêts à les utiliser. Il est essentiel de mettre en place un réseau d'organismes capables d'accepter et d'utiliser les outils de la finance, si l'on veut que le Canada réussisse de façon durable. Si ces organismes ont la capacité nécessaire et qu'ils sont autonomes, ils peuvent, lorsqu'ils mettent la main sur les outils d'investissement, agir à plus grande échelle et avoir un impact plus important en faisant fructifier davantage les deniers des contribuables.
Pour déterminer si les organismes à mission sociale ou les organismes sans but lucratif sont prêts à s'intégrer à un réseau fondé sur l'approche de la finance sociale, les intervenants de LIFT croient que les éléments qui suivent sont essentiels à la réussite: une théorie du changement qui soit claire et dont les résultats ont été démontrés, un plan de croissance stratégique permettant d'obtenir les résultats souhaités, la capacité de faire ressentir l'impact à l'extérieur de la sphère de compétence et à l'échelle du pays, une efficience et une efficacité éprouvées, un outil de mesure et d'évaluation permettant de s'assurer que le rendement des investissements est bien le rendement escompté et des organismes prêts à avoir un impact et à tirer parti des investissements.
Le gouvernement doit commencer à travailler avec des intermédiaires au moment de cerner les organismes dont les modèles ou les interventions donnent de bons résultats. Le gouvernement doit ensuite amener les intermédiaires à travailler de concert avec les organismes à mission sociale pour qu'ils consolident leurs capacités et les renforcent, pour qu'ils soient davantage durables et puissent plus efficacement produire des impacts sociaux mesurables. Les intervenants de LIFT croient également qu'un cadre pancanadien de projets prêts à utiliser les investissements et à avoir un impact aidera le Canada à montrer aux autres administrations comment apparier les besoins des régions et des collectivités et les priorités stratégiques du gouvernement dans un cadre de finance sociale générant des résultats mesurables. Il faudra que le gouvernement, les intervenants et l'ensemble des partenaires déterminent les résultats positifs. Il faut définir clairement l'objectif des interventions et chercher à savoir si l'intervention entraîne un résultat à elle seule ou en combinaison avec d'autres projets.
Globalement, les organismes de philanthropie spéculative sont reconnus comme étant des acteurs clés qui aident les organismes à mission sociale à se préparer à recevoir des investissements et à avoir des impacts. Selon un rapport du G8, la collaboration à l'échelle mondiale est au coeur de la finance sociale et de l'innovation sociale. Les intervenants de LIFT sont fiers de faire partie d'une alliance axée sur les pratiques exemplaires aux côtés de trois autres organismes de philanthropie spéculative à l'échelle du monde: Impetus Private Equity Foundation, du Royaume-Uni; Social Ventures, en Australie; New Profit Inc., aux États-Unis. Nous soutenons les efforts déployés par le Canada pour mettre en place un réseau mondial. Ces trois organismes se sont intéressés directement ou indirectement à la question des obligations d'impact social et aux outils de finance sociale.
Les intervenants de LIFT croient qu'il est essentiel de définir des valeurs de référence, des paramètres de rendement et des processus d'évaluation de façon à pouvoir mesurer notre impact social au moment de cibler des populations et des régions. C'est pourquoi nous tenons à nous assurer que tous les projets comportent un élément de mesure et que la responsabilité est claire.
Je remercie le comité de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole. Je répondrai plus tard avec plaisir à vos questions.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Permettez-moi de vous dire à quel point j'apprécie l'occasion qui m'est donnée de m'adresser à vous aujourd'hui. Il s'agit vraiment, pour nous, d'une précieuse occasion de travailler avec nos partenaires du gouvernement, du secteur privé et du secteur communautaire afin d'améliorer la vie des Canadiens de nos collectivités.
Je suis président-directeur général de La fondation de la famille J.W. McConnell, qui a vu le jour à Montréal en 1935, ce qui en fait la deuxième fondation privée à être créée dans notre pays. Notre fondation est aujourd'hui la troisième en importance, au Canada, vu l'importance de ses actifs. Notre mission est de mobiliser les Canadiens pour créer une société innovatrice, inclusive, durable et résiliente. Mettre de côté une portion substantielle de sa fortune à des fins de philanthropie était peut-être une idée nouvelle, en 1935, mais il est certain qu'elle s'est répandue, dans notre pays. Le Canada compte aujourd'hui quelque 10 000 fondations privées et publiques qui gèrent des actifs d'environ 55 milliards de dollars. Conformément à la réglementation qui régit ces fonds, de 2 à 3 milliards de dollars environ sont investis et distribués chaque année dans des projets communautaires.
Nous croyons que, si nous voulons sérieusement nous attaquer au problème que le témoin précédent, M. Dewar, a mis en relief — par exemple, les coûts croissants et insoutenables des soins de santé, le chômage élevé et chronique chez les jeunes, la viabilité des collectivités dépendantes d'une ressource en déclin ou dont le secteur manufacturier a déménagé dans le Sud —, il serait temps de dégager davantage de ces ressources et des actifs constitués par des dons pour les faire contribuer aux priorités communautaires et nationales. Je crois que c'est de cela que nous devons parler.
Notre fondation a fait son premier investissement d'impact en 2007. Il s'agit d'un domaine relativement nouveau au Canada. Conformément à notre objectif philanthropique, l'amélioration de l'enseignement au premier cycle, nous avons consenti un prêt de 10 millions de dollars à un groupe qui désirait créer une université en adoptant un nouveau modèle pour l'enseignement de premier cycle, le modèle des cohortes. En conséquence, aujourd'hui, l'Université Quest, comme on l'appelle, arrive au premier rang des établissements d'enseignement de premier cycle au pays. En passant, le prêt nous a été remboursé avec intérêts en 2009, ce qui en fait notre investissement le plus rentable, sur les 600 millions de dollars de dons reçus cette année-là. C'était une année très difficile, sur le plan financier, comme vous vous en rappelez. Je le souligne parce qu'il est important de savoir que, lorsque nous parlons d'investissement d'impact et de finance sociale en ce qui concerne les fondations, nous supposons souvent que le rendement est inférieur à celui du marché; cependant, comme les investissements sont liés aux besoins de la collectivité et souvent soutenus par des gens en chair et en os, dans nos collectivités, ils ne sont pas liés au rendement du marché et peuvent souvent, surtout lorsque la situation économique est mauvaise, le dépasser.
Donc, lorsque nous discutons avec les fiduciaires des fondations — nous parlons ici de l'obligation fiduciaire —, nous devons être clairs sur le fait qu'il est important, oui, de tenir compte des résultats sur les plans social et économique autant que du rendement des investissements; toutefois, nous pouvons également dire que, même s'il est acceptable d'accepter un rendement moins élevé que celui du marché, il n'est pas toujours nécessaire de le faire.
À titre de pionniers du domaine de la finance sociale, nous pouvons attirer l'attention sur quelques initiatives clés auxquelles nous avons participé, entre autres le Groupe de travail canadien sur le financement social, dont le rapport, publié en 2010, proposait au pays un programme que nous appliquons aujourd'hui, je crois, vous et moi.
C'est le ministre Flaherty qui avait distribué le rapport aux ministres des Finances des provinces, en leur recommandant d'y jeter un coup d'oeil. Et de fait, nous voyons partout au Canada que des progrès considérables se font à l'échelon des provinces, qui mettent en oeuvre des choses comme des sociétés d'intérêt communautaire en Colombie-Britannique ou un portail d'approvisionnement pour les entreprises sociales, comme ici, au Québec, entre autres initiatives. Je crois donc que nous sommes sur la bonne voie, mais je crois que, si nous regardons ailleurs dans le monde, nous constaterons que la croissance de ce secteur est plus rapide à l'étranger qu'au Canada.
J'ai pris connaissance, l'autre jour, de statistiques selon lesquelles entre 2012 et la fin de 2014, la valeur mondiale des investissements d'impact a augmenté pour passer à 23 milliards de dollars. Pendant cette période, au Canada, ils ont augmenté, je crois, et sont passés de 2 à 5 milliards de dollars. Nous sommes devancés par le Royaume-Uni, les États-Unis, l'Australie et d'autres pays, qui accomplissent des progrès. Je crois qu'il est important pour nous de combler cet écart.
Aujourd'hui, notre portefeuille d'investissements d'impact est d'environ 25 millions de dollars, et les investissements concernent toute une gamme de fonds et d'initiatives d'entreprise. Mais, en raison de l'absence de produits disponibles au Canada, la moitié environ de cette somme est en fait investie à l'étranger.
Si nous discutons de cette question, au Canada et ailleurs dans le monde, c'est en partie parce que le public, et en particulier les bénévoles et les donateurs, voudrait que les organismes de bienfaisance aillent au-delà des symptômes des problèmes systémiques et qu'ils s'attaquent réellement aux causes sous-jacentes en visant les résultats. Je crois que nous constatons que le secteur philanthropique communautaire prend ce virage, et je crois que, en partenariat avec les gouvernements et le secteur privé, nous sommes maintenant encouragés à faire certains changements très importants.
En tant que donateurs, nous finançons la recherche et développement sur le plan social. Nous prenons les premiers le risque en cherchant à améliorer les résultats sociaux et nous créons les conditions nécessaires à de futurs investissements dans l'infrastructure communautaire et les programmes sociaux à l'aide, par exemple, d'investissements de capitaux patients, de garanties de prêt et de mécanismes de financement axés sur les résultats, par exemple les obligations à impact social et d'autres mécanismes touchant la santé, la justice, l'éducation, les personnes handicapées et le développement économique communautaire.
J'aimerais explorer trois domaines qui offrent aux Canadiens, je crois, des possibilités considérables d'augmenter les activités que nous menons en partenariat avec les gouvernements et le secteur privé afin d'obtenir de meilleurs résultats sur le plan social.
Parlons d'abord des investissements dans les collectivités et de l'intégration des buts sociaux, environnementaux et économiques. Je vais vous donner trois exemples.
À Toronto, nous participons actuellement à l'initiative Evergreen CityWorks. Nous avons versé une subvention pour l'élaboration d'un plan d'activité touchant ce qu'on appelle le renouvellement des tours; il s'agit essentiellement d'un modèle de réaménagement environnemental de vieilles tours d'habitation du nord de la ville qui doit faire en sorte que les économies d'énergie réalisées compensent le coût initial de la rénovation énergétique. Mais nous parlons également de rénovation sociale. Selon certaines recherches, les gens qui vivent dans ces tours sont souvent seuls, et il y a un niveau de criminalité élevé, les gens font peu confiance à leur voisin, et ainsi de suite. En partenariat avec l'administration municipale, nous examinons la possibilité de modifier le zonage des terrains qui jouxtent ces tours pour y bâtir de nouvelles installations de faible hauteur en proposant d'autres types d'innovation sociale de façon à créer, en dehors de ces tours, une collectivité plus viable et plus dynamique.
Mon prochain exemple est celui de Winnipeg. Nous travaillons en partenariat avec le Conseil pour la réduction de la pauvreté de Winnipeg, un regroupement de gens d'affaires; avec Centraide Winnipeg; avec la Fondation Winnipeg; et avec le gouvernement provincial pour faire changer les résultats sur le plan social dans le nord de la ville. C'est un quartier urbain très difficile qui compte une forte proportion de résidents d'origine autochtone et, selon les statistiques sociales, la situation y est franchement inacceptable dans un pays comme le Canada. Dans ce quartier, près de 25 % des enfants sont placés en foyer d'accueil avant d'avoir l'âge de 5 ans.
Nous reconnaissons avoir pris un engagement qui s'étendra sur toute une génération et que nous pourrons soutenir par des subventions, la capacité de faire l'essai de nouvelles solutions, dans la collectivité et avec nos partenaires communautaires, mais nous reconnaissons également qu'il faudra un jour consentir des investissements beaucoup plus importants si nous voulons transformer le système. Nous nous intéressons entre autres aux capitaux réservés au Bon d'études canadien, une somme de 1,2 milliard de dollars qui n'est actuellement pas utilisée et qui était en fait conçue pour aider les familles à faible revenu à assurer une éducation postsecondaire à leurs enfants. Nous savons que, selon certaines recherches, pour des enfants de 4 ans seulement, le seul fait de savoir que de l'argent a été mis de côté pour leur avenir a un effet mesurable et positif sur l'assiduité à l'école, sur l'abstention d'actes de vandalisme et d'actes criminels, et ainsi de suite. Le fait de savoir que des dispositions ont été prises pour assurer son avenir donne à un enfant un élan formidable.
Pourquoi ces fonds restent-ils inutilisés? Pourquoi ne nous sommes-nous pas donné le moyen de transférer cet argent dans une collectivité comme Point Douglas? Voilà le défi auquel nous faisons face et, pour parler franchement, si la collectivité pouvait recevoir des fonds de cette ampleur, nous devrions également penser à créer des entreprises sociales pour donner aux jeunes des possibilités d'emploi plutôt que de les laisser devenir chômeurs ou décrocheurs.
Cette idée de réexaminer nos actifs et de les réaffecter en fonction de leur objectif original est, je crois, au coeur de certaines des réflexions les plus judicieuses au sujet du financement social, de nos jours. Il ne s'agit pas de créer de l'argent neuf. Il s'agit d'utiliser les fonds et les actifs existants à des fins meilleures et supérieures.
Le prochain exemple que j'aimerais vous donner est celui de Montréal, où nous sommes en pourparlers avec l'administration municipale, des organismes philanthropiques partenaires, le secteur communautaire, le secteur de la haute technologie et le milieu universitaire, entre autres, au sujet d'une transformation communautaire et de notre vision de Montréal dans un avenir immédiat. Encore une fois, il faut pour cela que tous les intervenants se présentent à la table, c'est-à-dire les syndicats, les propriétaires d'entreprise et le secteur des finances. C'est en unissant nos forces que nous pourrons réellement obtenir des résultats très importants et différents.
Le deuxième domaine dont j'aimerais parler concerne les Autochtones. Comme M. Dewar l'a dit, ils représentent un de nos plus grands défis sur le plan social. Il représente également, ajouterais-je, l'un de nos meilleurs moyens de changer le monde.
J'aimerais vous donner un exemple de projet auquel nous participons et qui a trait aux investissements d'impact. Nous avons conclu un partenariat avec la nation huronne de Wendake, au Québec, pour renforcer le modèle des propriétés foncières dans les réserves et pour l'appliquer ailleurs. Les Hurons ont adopté un modèle différent. Ils ont mis en place un fonds d'hypothèques, pour eux-mêmes, à partir du financement fédéral versé à leur collectivité. Ils ont organisé un référendum, et ce n'est plus le conseil de bande qui contrôle ces fonds, désormais. Un système de gouvernance indépendant a été créé, et c'est selon un modèle d'affaires que les hypothèques sont accordées aux membres de la collectivité. D'ailleurs, plus de 400 prêts hypothécaires ont été consentis, et le taux de défaut est inférieur à 2 %. Ils sont tous liés, d'ailleurs, à 7,5 %, et le fonds est solide au point d'attirer les investisseurs de l'extérieur. Ils voudraient que ce modèle soit diffusé...
:
Merci de m'avoir invité à m'adresser à vous aujourd'hui.
En plus d'être le PDG d'une entreprise privée, je suis le président de l'organisme Trico Charitable Foundation. Créé en 2008, l’organisme Trico Charitable Foundation vise à promouvoir l’innovation et le renforcement des capacités dans le domaine de l’entrepreneuriat social.
Nous avons été honorés de participer, en 2014, au Comité consultatif national du Canada du Groupe de travail sur l’investissement social, créé par le G8 sous la présidence du Royaume-Uni. Aujourd'hui, nous réitérons les suggestions que nous y avons faites. Il y a deux mesures cruciales que le gouvernement fédéral peut prendre pour favoriser l’entrepreneuriat social. Il s'agit de permettre aux organismes sans but lucratif de faire des profits et de permettre aux fondations privées de financer des organismes sans but lucratif. Bien que nos recommandations portent principalement sur notre soutien à l’entrepreneuriat social plutôt qu’à la finance sociale comme telle, nous les voyons comme des possibilités en amont visant à accroître la réceptivité à l’investissement des organismes souhaitant accéder à la finance sociale à l'avenir.
Puisqu'il s'est penché directement sur la finance sociale, nous aimerions féliciter le comité de ses efforts afin de déterminer comment le gouvernement peut encourager efficacement la croissance de la finance sociale au Canada, qui a commencé à se faire sentir à l’étranger. Je prends très au sérieux la combinaison des éléments suivants: « au Canada » et « qui a commencé à se faire sentir à l’étranger ». Il faut absolument apprendre des expériences à l’international, et pas seulement les copier, mais il faut également les appliquer d’une manière qui respecte le contexte unique du Canada et le met à profit.
Ce sentiment correspond aux conclusions d’un nouveau rapport que j'aimerais recommander, et je remercie le gouvernement canadien d'avoir eu la vision et le leadership nécessaires pour le financer. Le rapport est intitulé Social Impact Investment: Building the Evidence Base et est publié par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). On y dit que « … les mesures prises dans un pays ou une région peuvent ne pas être indiquées pour un autre pays ou une autre région. Les objectifs stratégiques, les expériences et le contexte local doivent être pris en compte ».
J'aimerais en profiter pour appuyer les recommandations et les prochaines étapes énoncées dans le rapport. Selon le rapport, étant donné que l’investissement à impact social est un domaine naissant, il faut des preuves concrètes de ses effets. En particulier, des travaux plus poussés sont nécessaires pour démontrer les avantages de l’approche en matière d’investissement à impact social, par rapport aux modèles de prestation des services sociaux existants. L’OCDE recommande principalement de constituer une base de données probantes, notamment de s’entendre sur les définitions, de bâtir l’infrastructure nécessaire pour mettre en place des processus coordonnés de collecte de données, de favoriser les efforts sur la mesure des résultats sur la société et l’évaluation des politiques.
D’après toutes les observations de la Trico Charitable Foundation, les besoins essentiels pour le développement de la finance sociale sont les suivants: renforcer les capacités de la « demande », aider à nourrir et à créer des entreprises prêtes pour l’investissement et l’impact social et constituer une base de données probantes, comme le décrit l’OCDE.
Quand nous nous sommes penchés sur le renforcement des capacités de la demande, nous avons été ravis de travailler avec le ministère de l’Emploi et du Développement social du Canada afin d’aider à renforcer les capacités par l’intermédiaire d’Enterprising Non Profits Canada, un réseau national de sections régionales qui soutiennent les entrepreneurs sociaux dans la création d’entreprises solides et influentes. C’est grâce à des réseaux nationaux comme celui-là que nous pouvons nous concentrer sur le développement d’entreprises prêtes pour l’investissement. Dans nos récentes conversations avec des représentants du Royaume-Uni, nous avons appris que bien que les initiatives de finance sociale aient gagné en popularité, il reste encore du travail à faire pour que ce « réseau » d’organisations soit prêt à investir dans ces produits de finance sociale à l'avenir.
Private Equity Foundation, un pionnier de la philanthropie spéculative au R.-U., a préparé pour le compte du Comité consultatif national du Royaume-Uni du Groupe de travail sur l’investissement social un rapport dans lequel il relève deux types de renforcement des capacités organisationnelles dont aurait besoin le secteur social. L’un est de développer des organisations solides et résilientes qui peuvent croître de façon durable. L’autre est de développer des organisations en mesure de produire des résultats sociaux valables, fiables et prévisibles, ultimement pour un grand nombre de personnes.
Ces deux types sont essentiels pour favoriser la croissance du marché de l’investissement social, mais ce dernier type a été négligé pour faire place au développement du marché.
Nouveauté intéressante à la suite de ce rapport, annoncée en octobre 2014 par le Bureau du Cabinet: la création d’un fonds d’un peu moins de 3 millions de dollars canadiens visant d’abord et avant tout à ce que les organisations soient « prêtes à faire des investissements à impact social ». Gérés par le Social Investment Business pour le compte du Bureau du Cabinet, les fonds permettront à des entreprises sociales ambitieuses de recevoir des subventions qui les aideront à gérer leur rendement et à accroître leur impact social pour attirer davantage d’investisseurs. Des subventions de 35 000 $ canadiens à environ 300 000 $ canadiens seront offertes jusqu’à la fin de janvier 2015 pour aider les organisations à bâtir leur infrastructure et leur savoir-faire ainsi qu’à mettre de l'avant leur impact. Les responsables du fonds affirment que sans systèmes et connaissances adéquats, nombre de bonnes entreprises sociales peinent à démontrer comment leur impact peut être mesuré. Ce nouveau fonds vise à régler ce problème en leur offrant l’aide d’experts.
Pour ce qui est de notre deuxième sujet, soit la constitution d'une base de données probantes, un examen récent de la Social Value Act (R.-U.) mené récemment a permis de relever trois obstacles à l’exploitation de son potentiel: la sensibilisation et le recours à la loi sont partagés, elle ne définit pas la « valeur sociale » et la mesure de la valeur sociale n’est pas pleinement définie.
Tous ces problèmes seraient réglés par la constitution d'une base de données probantes, comme le recommande l’OCDE. Nous entendons souvent qu’il faut mettre en place de grands fonds sur la finance sociale — le domaine est prometteur —, mais il y a très peu de données rigoureuses sur leur impact social. Notre fondation s’est donc associée à la Banque de développement du Canada (BDC) pour mener des recherches sur l’impact de ce que nous appelons les « fonds nationaux ». Trico et la BDC cherchent à déterminer dans quelle mesure les fonds nationaux permettent de répondre aux besoins de financement des entreprises sociales, à partir de leur création et tout au long de leur cycle de vie. Les fonds nationaux sont des réserves d’argent importantes qui servent à investir dans des entreprises sociales. L’étude se propose d’examiner deux ou trois fonds nationaux en place au R.-U. et un fonds bien connu aux États-Unis. En outre, elle examinera quatre entreprises sociales canadiennes axées sur des fonds d’investissement. Nous espérons recevoir le rapport d’ici le 21 avril 2015 et serons heureux de le faire parvenir aux membres du comité lorsqu’il sera disponible.
C’est au chapitre de la constitution d’une base de données probantes que le besoin est le plus grand; et actuellement, le gouvernement est bien placé pour faciliter les progrès à cet égard. Des avancées considérables dans le domaine de la finance sociale nous attendent si le gouvernement nous aide à créer une telle base de données, comme le recommande l’OCDE.
Dans des conversations sur la finance sociale, on entend souvent des gens réclamer du financement gouvernemental, des incitatifs gouvernementaux ou encore que le gouvernement élimine les risques pour attirer les investissements dans la finance sociale. Nous soupçonnons que « l’argent » sert déjà à financer les possibilités d’investissement actuelles. Ce qu’il faut véritablement pour ouvrir de nouveaux débouchés, mobiliser encore plus les investissements et permettre au gouvernement de participer activement à la finance sociale, c’est renforcer les capacités des organisations et constituer une base de données probantes, à défaut de quoi les investissements resteront là où ils sont ou seront peu optimaux.
Si le comité est tenté de participer à de telles activités, je l’exhorte une fois de plus à s’en tenir aux conseils de l’OCDE concernant le moment et la pertinence de la mise en place de politiques visant à soutenir l’investissement à impact social:
Il est important que l’intervention politique soit bien ciblée, transparente et bien coordonnée avec les politiques existantes ainsi qu’avec le marché. Les politiques doivent également être cohérentes afin que les acteurs du marché à la fois comprennent les répercussions des politiques et sachent combien de temps elles peuvent être en place […] pour veiller à ce qu’elles procurent les résultats visés.
Nous félicitons le gouvernement fédéral de son engagement soutenu à l’égard de l’entrepreneuriat social et de la finance sociale. Nous sommes heureux de pouvoir contribuer au dialogue. Nous croyons fermement qu’en portant une attention accrue à la propension à investir et à la création d’une base de données probantes, le Canada pourra devenir un leader mondial dans cette sphère d’activité.
Merci, monsieur le président.
:
Bienvenue à nouveau, mesdames et messieurs.
Nous venons juste d'être informés que nous devons voter à 17 h 30. La navette sera devant l'édifice à 17 h 15 exactement; nous pourrons donc monter à bord immédiatement et nous rendre sans problème à la Chambre des communes. Cela dit, l'horaire de ces exposés sera évidemment touché, et la période de questions encore plus.
À moins que le comité ne s'y oppose, je vais donner aux témoins le temps qui leur est alloué pour présenter leur exposé, parce qu'ils sont venus pour prendre la parole. Nous aurons le plus grand nombre possible de séries de questions et nous les raccourcirons peut-être même à trois minutes ou à une question par membre afin de procéder le plus efficacement possible.
Mais juste avant... j'espérais faire ceci à la fin. Chers collègues, comme vous le savez probablement, notre secrétaire parlementaire, Scott Armstrong a perdu son père la semaine dernière. C'est pourquoi Scott est absent, et Mme Goguen est ici pour le remplacer. J'aimerais vous dire, bien sûr, que nos pensées sont avec Scott et sa famille à cette occasion. Si vous souhaitez lui envoyer une note et que vous avez besoin de ses coordonnées, veuillez me les demander afin que vous puissiez lui transmettre vos sympathies.
Bienvenue à nouveau, mesdames et messieurs.
Nous poursuivons notre étude sur le potentiel de la finance sociale.
Mme Cathy Taylor, directrice exécutive de l'Ontario Nonprofit Network se joint à nous.
Nous recevons également M. Michael Toye, directeur général du Réseau canadien de développement économique communautaire.
M. Michael Oster, président du Fonds d'emprunt communautaire d'Ottawa partagera son temps avec M. Toye.
En dernier lieu, M. Jacques Charest, président de CAP Finance prendra la parole.
Madame Taylor, voulez-vous commencer? Vous disposez de 10 minutes.
:
Merci beaucoup de m'avoir invitée à discuter avec vous aujourd'hui.
Je m'appelle Cathy Taylor. Je suis la directrice exécutive de l'Ontario Nonprofit Network, dont le siège social se trouve à Toronto. Nous sommes un réseau qui regroupe 55 000 organismes sans but lucratif et oeuvres de bienfaisance de la province de l'Ontario, qui oeuvrent dans tous les secteurs: des groupes confessionnels, des groupes de sport et de loisirs, des troupes de théâtre, des groupes du domaine des arts et de la culture, des services sociaux, des services de santé et des groupes provenant de tout l'éventail du secteur sans but lucratif.
Mes remarques aujourd'hui visent à vous présenter le point de vue des organisations sans but lucratif, et non celui des investisseurs.
Vous savez peut-être qu'au Canada, il y a ce que nous appelons le secteur sans but lucratif de base — il ne comprend pas les municipalités, les universités, les commissions scolaires et les hôpitaux. Nous sommes un secteur très important. Nous générons 35,6 milliards de dollars, ou 2,6 % du PIB du Canada, et sommes l'un des secteurs économiques qui croissent le plus rapidement, avec un taux de croissance annuel de 7 %. En fait, depuis 2008, nous sommes l'une des seules industries au Canada qui croît à ce rythme.
Contrairement à la croyance répandue, 61,5 % des revenus du secteur sans but lucratif de base proviennent d'un revenu gagné et de la vente de biens et services, et non du gouvernement ou d'autres activités de charité; 15 % de cette somme proviennent des droits d'adhésion. Les capitaux provenant des trois ordres de gouvernement comptent seulement pour 19,7 % des revenus des organismes sans but lucratif et des oeuvres de charité. Je crois qu'il s'agit d'une distinction importante quand nous parlons de la finance sociale et des entreprises à vocation sociale.
Le secteur du bienfait d'intérêt public au Canada — nous disons souvent que les organismes sans but lucratif fournissent un bienfait d'intérêt public — n'attend pas d'aide financière du gouvernement ni d'aide philanthropique. En fait, c'est exactement l'opposé: le secteur sans but lucratif comprend des organisations indépendantes qui fournissent une contribution économique importante tout en poursuivant leurs missions sociales. Selon un sondage effectué récemment en Ontario, 88 % des entreprises à vocation sociale exerçaient leurs activités comme organismes sans but lucratif, et 4 % de plus étaient des organismes à but lucratif détenus intégralement par leur organisme sans but lucratif. Donc, quand nous parlons d'entreprises à vocation sociale et de la finance sociale, nous parlons principalement de la structure organisationnelle du secteur sans but lucratif.
Les entreprises à vocation sociale réinvestissent de façon importante dans leur collectivité parce qu'elles emploient des gens qui ont souvent des vulnérabilités et des handicaps et qu'elles offrent des services publics au sein de leur collectivité. Le secteur sans but lucratif et des oeuvres caritatives est axé sur l'engagement de construire des collectivités fortes, résistantes et inclusives qui favorisent le mieux-être collectif, et non l'accroissement de la richesse privée.
L'entreprise à vocation sociale est un outil puissant qui peut être utilisé dans les collectivités locales. Nous sommes convaincus que le gouvernement fédéral doit jouer un rôle dans la création d'un environnement favorisant la finance sociale et les entreprises à vocation sociale, qui ont le potentiel de pallier aux inégalités croissantes dans les collectivités et de jouer un rôle majeur dans l'établissement de collectivités résilientes et dotées des actifs nécessaires. Nous vous félicitons certainement de profiter de cette occasion d'en discuter.
Nous aimerions faire les recommandations suivantes aujourd'hui afin que vous les envisagiez.
Premièrement nous recommandons d'axer votre travail et vos efforts sur la création d'un environnement favorisant la finance sociale, et, plus précisément, les entreprises sociales qui misent sur la confiance du public envers le secteur sans but lucratif, lequel jouit de l'un des niveaux de confiance les plus élevés parmi tous les secteurs au Canada. À cette fin, nous croyons que toutes les entreprises à vocation sociale, peu importe leur structure ou leur source de revenus, devraient avoir une vocation publique et une mission, être exploitées pour le bien collectif et non pour le profit personnel, réinvestir leur excédent de revenus dans leur mission publique et garder leurs actifs dans le domaine public pour le bien collectif.
Une partie de ce cadre habilitant, pour lequel le gouvernement fédéral a un rôle à jouer et une responsabilité, consiste à déterminer la définition d'une entreprise à vocation sociale. Et il y a là une occasion de l'harmoniser avec celle de nos gouvernements provinciaux.
Deuxièmement, pour ce qui est du concept d'une législation à double but ou hybride concernant les entreprises, nous vous encourageons à attendre et à observer pour l'instant. Bien d'autres éléments seront beaucoup plus profitables par rapport au temps investi. De nouvelles lois régissant les entreprises à l'échelle fédérale s'appliquent au secteur sans but lucratif. De nombreux gouvernements provinciaux adoptent de nouvelles lois applicables au secteur sans but lucratif à l'échelle provinciale. Honnêtement, la dernière chose dont nous avons besoin actuellement est un autre texte législatif qui essaierait d'établir ce à quoi une législation à double but ou hybride ressemble.
Nous savons que la C.-B. et la Nouvelle-Écosse ont élaboré une telle loi. Nous ne disposons que de quelques exemples d'organisations qui l'ont utilisée, et nous devons voir comment elle fonctionne plutôt que d'être les premiers à mettre une autre loi en place. La législation applicable aux entreprises est assez flexible; nous devons voir comment elle évoluera.
Troisièmement, nous vous invitons à réformer et à réinterpréter la Loi de l'impôt sur le revenu en ce qui concerne les organisations sans but lucratif, surtout celles qui fournissent un bienfait d'intérêt public, afin de leur permettre d'être rentables et d'accroître leurs revenus. L'interprétation actuelle de la Loi de l'impôt sur le revenu empêche les organisations sans but lucratif de générer des revenus — non pas de faire du profit, mais de générer des revenus qu'elles peuvent réinvestir dans leur mission dans le cadre de leur organisation — ainsi que de maintenir une réserve de liquidités.
Comme vous le savez, toute entreprise doit avoir une réserve de liquidités aux fins de son exploitation. Il est impossible d'exploiter une organisation avec ce genre de limitations, et d'autant plus impossible d'exploiter une entreprise à vocation sociale ayant l'objectif d'être accessible et inclusive sans disposer de ces outils. Le revenu qui est réinvesti dans la mission de l'organisation ne constitue pas un profit. La réglementation concernant le secteur sans but lucratif et les oeuvres caritatives n'est pas en phase avec ce qui se passe sur le terrain et a désespérément besoin d'être modernisée.
Quatrièmement, n'excluez pas les organisations sans but lucratif des programmes de soutien aux entreprises, et traitez les entreprises à vocation sociale exerçant leurs activités comme des organisations sans but lucratif et des oeuvres caritatives comme des petites ou moyennes entreprises dans le cadre des programmes qui sont déjà en place. Elles ont besoin d'avoir accès au même financement et au même soutien aux entreprises que les entreprises du secteur privé. De nombreux programmes gouvernementaux offrent du soutien et des capitaux aux petites ou moyennes entreprises. Permettez à ces programmes d'être aussi accessibles à des organisations sans but lucratif qui fonctionnement comme des entreprises à vocation sociale. Il s'agit d'une mesure assez simple qui peut être mise en place dans un très court délai et qui n'exige pas de nouvelles ressources.
Actuellement, les organismes sans but lucratif sont souvent activement exclus et inadmissibles à recevoir du financement en recherche et développement ou du financement de démarrage dans le cadre de programmes de soutien à la planification des entreprises qui sont offerts aux petites et moyennes entreprises. Souvent, selon ce que nous entendons sur le terrain, les organisations commencent par s'ériger en organisations à but lucratif afin d'obtenir ces ressources de démarrage, puis deviennent des organisations sans but lucratif une fois établies.
Cinquièmement, les entreprises à vocation sociale ont besoin d'un financement par emprunt créatif et qui répond à leurs besoins. Certains des intervenants précédents ont parlé de certains outils qui existent, comme l'« argent lent »; selon ce concept, une période de grâce est accordée avant que le prêt fasse l'objet d'un intérêt et doive être remboursé. Mentionnons aussi des faibles taux d'intérêt à long terme consentis pour les projets comme les logements sociaux et les projets d'investissement et du financement d'exploitation non garanti offert aux entreprises à vocation sociale, comme les marges de crédit pour les flux de trésorerie.
Je ne crois pas que nous parlons nécessairement toujours d'outils complexes liés à la finance sociale qui doivent être en place. La majorité des organisations du secteur sans but lucratif et des oeuvres de charité sont des petites ou moyennes organisations, et elles ont besoin de certains outils financiers de base qui ne sont pas actuellement offerts à notre secteur. Les bailleurs de fonds ne connaissent habituellement pas bien le modèle des organisations sans but lucratif ou des entreprises à vocation sociale et reculent, même si c'est beaucoup moins risqué pour eux d'investir dans leurs initiatives. Le gouvernement peut jouer un rôle afin de permettre à ces institutions de fournir ces types de soutien.
Les entreprises à vocation sociale ont souvent besoin de beaucoup de temps pour devenir lucratives, étant donné qu'elles comblent un vide qui n'a habituellement pas été comblé par une entreprise privée parce qu'il n'y a pas de marge de profit. Il n'est pas réaliste de s'attendre à ce que le secteur soit en mesure de fournir ce service estimant que, subitement, il y aura une marge de profit. Aidez-nous à comprendre comment nous pouvons fournir le service au prix coûtant, ce qui est notre rôle.
La dernière recommandation est d'élaborer un plan d'approvisionnement à caractère social pour le gouvernement qui encouragerait des entreprises qui obtiennent des contrats du gouvernement à faire affaire avec des entreprises à vocation sociale dans le cadre de leur travail. Utilisez le pouvoir d'achat du gouvernement pour renforcer les collectivités. L'Écosse, nous le savons, est un chef de file à cet égard, et il y a de nombreux autres exemples de façons dont cela a été fait partout dans le monde.
Merci beaucoup d'avoir écouté nos idées sur le renforcement de la finance sociale et de l'entreprise à vocation sociale. Nous avons un plan visant à soutenir les entreprises à vocation sociale en Ontario, que nous serons heureux de vous remettre, et nous attendons vos questions avec impatience.
:
Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs, je vous remercie de me donner l'occasion vous présenter un exposé aujourd'hui.
Si je comprends bien, il s'agit de la deuxième semaine de votre étude. La finance sociale est un très grand terme. Il peut être difficile, peut-être, de bien comprendre de quoi il s'agit; par conséquent, je souhaitais partager mon temps avec l'un de nos membres, le Fonds d'emprunt communautaire d'Ottawa, dont font partie certaines des personnes en première ligne qui effectuent le travail sur le terrain et qui ont un réel impact sur la vie des gens. Je vais parler de certaines recommandations de haut niveau, puis je laisserai la parole à Michael Oster.
Mon organisation, le Réseau canadien de développement économique communautaire, est une association nationale de groupes communautaires, comme le Fonds d'emprunt communautaire d'Ottawa, qui travaille sur des approches intégrées pour le développement économique et social de leur collectivité. Nous comptons plusieurs centaines de membres dans chaque province et territoire.
Comme, je crois, tous les témoins présents ici aujourd'hui, nous représentons le côté de la demande de la finance sociale, et non les investisseurs, les fournisseurs ou les intermédiaires. Nous représentons le côté de la demande de votre étude, les groupes communautaires, les entreprises à vocation sociale, les coopératives et les autres programmes et services de prestation visant à améliorer la situation socio-économique au sein des collectivités. Nous tentons de travailler de façon intersectorielle puisque nous constatons que les problèmes économiques et sociaux sont liés entre eux et qu'il ne suffit pas de traiter uniquement les symptômes.
M. Butt a mentionné plus tôt que nous devons nous concentrer sur l'objectif social, et nous en convenons parfaitement.
[Français]
Nos membres font face à de nombreux défis dans leur travail quotidien, mais l'accès à des sources de capitaux adaptées à leurs besoins est l'un des aspects les plus importants qui empêche la croissance de pratiques probantes. La finance sociale a émergé en partie comme une réponse à cette demande.
Cependant, à l'extérieur du Québec, le Canada a pris du retard comparativement au Royaume-Uni et aux États-Unis. Nous avons donc cinq recommandations qui visent à contribuer à assurer notre rattrapage. Elles sont incluses dans les documents que nous vous avons remis. Comme l'a mentionné plus tôt M. Mayes, ils mettent l'accent sur le rôle du gouvernement fédéral. Je vais d'ailleurs dire quelques mots sur chacune d'entre elles.
Premièrement, pour ce qui est de stimuler l'investissement, comme nous venons de le voir avec le gouvernement de l'Ontario et comme l'expérience de la Fiducie du Chantier de l'économie sociale nous le démontre, si le gouvernement est prêt à investir des capitaux de risque, cela peut servir de levier à des investisseurs privés, des institutions et des fondations.
[Traduction]
En ce qui concerne les changements réglementaires ou relatifs aux programmes visant à soutenir les entreprises à vocation sociale, nous vous demandons instamment de miser sur ce qui fonctionne déjà.
Comme Cathy vient de le dire, il y a de nombreux petits exemples et modèles qui ont prouvé leur efficacité. L'un d'entre eux est le Fonds d'investissement en développement économique communautaire de la Nouvelle-Écosse. Au cours des 15 dernières années uniquement, 48 FIDEC ont mobilisé 7 500 investisseurs — des personnes souhaitant investir leurs économies dans des projets qui profiteront à leur collectivité — et ont généré plus de 56 millions de dollars en investissements. De nombreux autres fonds pourraient être créés afin d'étendre les occasions d'investissement et de développement aux collectivités dans l'ensemble du Canada.
Certains de nos membres laisseraient entendre que les nouveaux modèles de rémunération et les nouveaux contrats axés sur le rendement ont reçu une attention disproportionnée dans le débat concernant la finance sociale jusqu'à maintenant. Vous avez déjà entendu des témoins dire qu'ils ne peuvent pas remplacer le financement du gouvernement et que ces modèles ont une utilité quelque peu limitée dans le large éventail des services communautaires. Dans les situations où ils sont appropriés, ils présentent des avantages importants. Mais ils ne sont pas une panacée; donc, dans votre rapport, je vous encouragerais à les analyser tout en tenant compte du large éventail d'outils disponibles pour la finance sociale.
À mesure que l'approvisionnement en capital de la finance sociale s'accroît, la capacité des organismes sans but lucratif, des oeuvres caritatives et des entreprises à valeurs combinées devra aussi être soutenue afin d'accroître la demande. Stephen Huddart a mentionné plutôt l'absence d'un produit disponible à des fins d'investissement. Wayne Chiu a aussi mentionné le besoin d'accroître la capacité du secteur social.
En particulier, les entreprises à vocation sociale sans but lucratif et les coopératives devraient avoir un accès égal aux outils de renforcement de la capacité des entreprises qui sont déjà en place et qui sont financées par le gouvernement — ici, je répète le très bon conseil de Cathy —, ainsi qu'à des débouchés à ce chapitre. Il s'agit de programmes qui existent déjà; ils ne coûteraient pas plus cher et favoriseraient de façon importante le renforcement de la capacité.
Finalement, pour ce qui est de ma dernière recommandation concernant la question précédente de Mme Sims, peu importe ce que le gouvernement entreprend, je mettrais l'accent sur le fait que l'élément le plus important est la façon de le faire. Il faut qu'il s'agisse d'un modèle de collaboration en partenariat avec les institutions du secteur privé et les groupes communautaires, puisqu'une approche axée sur la finance sociale reconnaît qu'aucun secteur ne peut relever ces défis par lui-même.
Nous aimerions féliciter Emploi et Développement social Canada d'avoir mis sur pied une table ronde d'intervenants qui font exactement cela, et nous préconisons son maintien au moment où le paysage de la finance sociale évolue.
Je vais maintenant céder la parole à Michael.
Monsieur le président.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de présenter mon point de vue au comité. Je suis très heureux d'appuyer le Réseau canadien de développement économique communautaire, l'ONN et d'autres organisations du secteur des services sociaux qui comparaissent devant le comité.
Mike m'a demandé de prendre quelques minutes pour présenter des exemples réussis de finance sociale et de faire le point sur le Fonds pour les projets pilotes d'entrepreneuriat social de l'Ontario.
Je suppose que le comité connaît déjà le Groupe d'étude canadien sur la finance sociale, qui travaille sous l'égide du MaRS Centre, et les rapports qu'il a publiés en décembre 2010 et décembre 2011. Je me limiterai à exprimer mon appui général aux recommandations du groupe d'étude: investissements axés sur la mission des fondations, création par le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces, d'un fonds d'investissement d'impact, établissement d'un groupe de travail sur la fiscalité et, comme l'a déjà mentionné Mike, un accès plus facile des entreprises sociales aux programmes de développement des PME financés par les gouvernements.
D'après le site anglais de Wikipedia:
La finance sociale est une approche de gestion de l'argent qui assure un dividende social et un rendement économique… La finance sociale comprend l'investissement communautaire, la microfinance…
… comme ce que mon organisation fait depuis 15 ans…
… les obligations à impact social…
Nous avons présenté des mémoires à ce sujet à la Commission ontarienne des valeurs mobilières, à EDSC et à d'autres.
La finance sociale est liée « à l'entreprise durable et au crédit aux entreprises sociales », domaine dans lequel nous sommes sur le point de devenir des chefs de file.
La finance sociale comprend en outre:
Des subventions philanthropiques axées sur les résultats et des investissements liés aux programmes, qu'on appelle parfois la philanthropie à risque…
Mon premier exemple de finance sociale, c'est la douzaine — peut-être plus — de fonds d'emprunt communautaire qui existent au Canada, dont le Fonds d'emprunt communautaire d'Ottawa que je dirige depuis l'automne 2011, après avoir pris ma retraite du secteur privé. Créé en 2000, le FECO a organisé près de 300 prêts d'environ 3 millions de dollars en capital accessible à l'intention d'emprunteurs qui ne pouvaient pas obtenir de financement bancaire, mais dont les antécédents et les aspirations méritaient notre appui. Avec notre aide, ces emprunteurs ont amélioré leur vie, ont réduit leur dépendance par rapport aux services sociaux et aux fonds publics, ont trouvé des emplois pour eux-mêmes et pour d'autres ou ont réussi à décrocher de meilleurs emplois.
Ces avantages sociaux et d'autres ont été mesurés entre autres par le Centre Carleton d'innovation communautaire.
Comme deuxième exemple, je dirai que le FECO a reçu un investissement à impact de 57 000 $ en 2012 par l'entremise de la Fondation communautaire d'Ottawa. Avec des fonds de contrepartie provenant de Citoyenneté et Immigration Canada et de la Fondation Trillium de l'Ontario, nous avons lancé une nouvelle initiative, les programmes d'immigrants partenaires. Nous avons créé un nouvel atelier sur le crédit, contribuant ainsi au renforcement de la littératie financière à Ottawa. En l'espace de 13 mois, nous avons offert cet atelier à plus de 700 immigrants. Parmi ceux qui ont participé à un sondage, 45 % avaient pris une ou plusieurs mesures concrètes pour améliorer leur cote de crédit et leur comportement par rapport à l'endettement, comme le fait de payer à temps la facture de leur carte de crédit, d'éviter les prêts sur salaire, de réduire le nombre de leurs cartes de crédit et, dans certains cas, de commencer à se servir du carte de crédit qui, bien utilisée, leur permet d'établir leur crédit et de s'adresser plus tard à une banque afin d'obtenir un prêt pour acheter un appartement, une maison ou une voiture ou pour lancer une entreprise.
Il y a déjà 26 immigrants qui ont obtenu des prêts du FECO l'année dernière, et nous nous attendons à ce que 50 autres prêts soient accordés en 2015. L'investissement à impact de 57 000 $ rapporte d'importants dividendes sociaux et assure des emplois plus nombreux et de meilleure qualité. Les immigrants peuvent ainsi mieux exploiter leurs talents, ce qui contribue à réduire la pénurie de compétences. De plus, cela améliore les niveaux de service dans notre collectivité tout en diminuant les pressions qui s'exercent sur les services sociaux. Bien entendu, tout cela est mesurable.
Mon troisième exemple porte sur un projet que nous élaborons et qui portera le nom de Fonds durable de financement social. Nous envisageons des investissements à impact et d'autres genres d'investissements afin de constituer un bassin de capital d'un million de dollars, avec injections annuelles de 100 000 $ pour financer les opérations et d'éventuelles pertes sur prêts. Nous avons déjà réussi à obtenir du financement de la Fondation communautaire d'Ottawa, de Centraide Ottawa et d'autres, avec investissements de contrepartie du Bureau pour l'entreprenariat social de l'Ontario, en vue de fournir des services et du financement à des entreprises sociales en démarrage ou aux premiers stades de développement.
Par suite du succès de nos programmes d'immigrants partenaires, nous nous attendons à avoir besoin de capitaux supplémentaires d'ici le milieu de 2015. Un groupe de travail formé de membres de notre conseil d'administration s'occupe activement de ce projet. Parmi les options envisagées, il y a celle d'une obligation communautaire qui servirait à récompenser des partenaires de formation en vue d'un niveau amélioré de création d'emplois pour les immigrants et d'autres résidents marginalisés du Canada et d'Ottawa. Un soutien fédéral à ce chapitre serait évidemment le bienvenu.
L'autre question qu'on m'a demandé d'aborder est celle du Fonds pour les projets pilotes d'entrepreneuriat social dont s'occupe le Bureau pour l'entreprenariat social du ministère ontarien du Développement économique, de l'Emploi et de l'Infrastructure.
mesdames et messieurs, je suis honoré d'être parmi vous aujourd'hui.
:
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner devant le comité.
Je suis Jacques Charest, président de CAP Finance, soit le Réseau de la finance solidaire et responsable. Ce réseau vise à promouvoir la finance solidaire et le capital de développement au Québec. Dans mon travail de tous les jours, je suis directeur général de la Fiducie du chantier de l'économie sociale, qui est un fonds d'investissement créé spécifiquement pour les entreprises d'économie sociale. D'ailleurs, je vais vous en parler brièvement vers la fin de ma présentation. Je vais toutefois tenter d'être le plus bref possible pour que les membres du comité aient le temps de me poser des questions.
Qu'est-ce que CAP Finance? CAP Finance a été créé il y a quelques années, soit vers 2010. il regroupe la grande majorité des institutions financières et des organismes de financement de la finance responsable au Québec.
Qu'est-ce que la finance responsable? La première chose à dire à ce sujet, c'est de déterminer ce dont il est question lorsqu'on parle de finance sociale, de finance responsable, de capital de développement et ainsi de suite. Pour notre part, nous séparons le capital de développement et la finance sociale.
En ce qui a trait au capital de développement, ce sont des institutions financières qui font du capital de risque pur, mais en ayant des objectifs socioéconomiques précis. Elles veulent, évidemment, que leur investissement rapporte, mais elles veulent en même temps créer des emplois et contribuer au développement régional et local. Cela est gouverné par des intervenants associatifs. Dans ce cas-ci, on parle de création d'emplois au niveau local.
Parlons maintenant de la finance solidaire, qui est au coeur de notre discussion. La finance solidaire fait intervenir des institutions financières, des organismes sans but lucratif, des coopératives de crédit et des caisses qui investissent presque exclusivement dans des entreprises d'économie sociale et dans le développement local ou communautaire. Leur mandat est de fournir, entre autres, du financement et de nouveaux outils d'investissement aux entreprises d'économie sociale.
Notre organisme regroupe presque tous les intervenants. Je ne vais pas les énumérer ici car cela prendrait trop de temps, mais vous pouvez consulter notre document à ce sujet.
En 2013, de concert avec la professeure Margie Mendell et son équipe, CAP Finance a commandé une étude à ce sujet parce que les données étaient insuffisantes. Nous voulions savoir quelle était la situation au Québec et ce que l'ensemble des intervenants au Québec avaient investi dans le capital de développement et la finance responsable.
Prenons la question du placement responsable. Je ne parle pas d'investissement direct en entreprise, mais de l'achat de produits financiers responsables, de fonds responsables, de fonds éthiques et ainsi de suite. En 2010, le placement responsable se chiffrait à 161 milliards de dollars. En 2013, il se chiffrait à 274 milliards. Quant à l'investissement responsable, il était de 13 milliards de dollars en 2010 et de 18 milliards de dollars en 2013.
Passons maintenant à ce qui touche les actifs de la composante de l'investissement responsable. Au Québec, l'investissement en capital de développement est de 17 milliards de dollars. En 2013, l'investissement en finance solidaire, c'est-à-dire dans des entreprises d'économie sociale et dans le développement local, a été de 1,4 milliard de dollars, ce qui représente une augmentation de 40 % par rapport à 2010.
Le marché est là et il y a des investissements. Toutefois, il faut le faire de façon correcte. Il faut travailler autant du côté de l'offre que de la demande. Si on a réussi à investir à ce point, c'est parce qu'on a travaillé autant sur l'offre que sur la demande. Il faut qu'il y ait des intermédiaires pour ce qui est des fonds d'investissement. Nous parlerons plus tard des pistes de solution que pourrait utiliser le gouvernement à ce sujet. Il est important que des intervenants soient sur le terrain pour travailler tout autant sur l'offre que sur la demande de financement, et ce, afin d'éviter qu'il y ait de très bons produits mais pas d'entreprises, ou l'inverse.
La situation est donc vraiment passée du placement à l'investissement dans les entreprises. En matière de financement social, il est important de distinguer les entreprises qu'on pourrait qualifier de privées et les entreprises à but non lucratif, soit les entreprises collectives. Les unes ne sont pas meilleures que les autres; c'est un choix que les gens font. Pour notre part, nous avons choisi les entreprises collectives, les entreprises d'économie sociale, mais il est important de faire cette distinction parce qu'elles n'ont pas toutes besoin des mêmes outils financiers.
Ceux de l'entreprise privée sont assez présents. Lorsqu'on veut s'adresser aux entreprises d'économie sociale, il faut tenir compte de certaines différences. Il faut voir le type de financement qui est possible. On doit voir cela comme un grand tout. Il ne s'agit pas de répondre aux besoins de l'une et de l'autre, mais de considérer les besoins qui sont spécifiques à chacune des clientèles.
Quelle pourrait être l'apport du gouvernement du Canada à ce sujet? À cet égard, je parlerai plus tard de sa contribution à la fiducie.
Comme cela a été mentionné précédemment, il est important d'appuyer les intermédiaires du marché, soit par l'entremise de fonds spécialisés ou centraux, soit par un fonds qui pourrait alimenter d'autres fonds ou encore par des fonds servant au rehaussement du crédit. Il s'agit de savoir s'il s'agit de subventions dont nous avons besoin. C'est en effet le cas dans certaines situations. Parle-t-on de premières pertes ou de garanties de prêt? C'est peut-être le cas, mais ce sont des solutions qu'il faut considérer pour déterminer la façon de faciliter le développement de la finance sociale au Québec.
En outre, il faut rendre le capital de développement accessible à nos intervenants, c'est-à-dire les fonds institutionnels, soit des fonds de travailleurs, des fonds de retraite, des fonds de pension ou de fondations et diminuer les barrières à l'investissement. M. Huddart y a d'ailleurs fait allusion. De notre côté, nous travaillons de concert avec des entreprises et des fonds. Or il y a des problèmes et des barrières, et ce, simplement parce que ces gens ne peuvent pas investir dans une société en commandite. Il faut donc que nous essayions de contourner cela.
Comme Cathy Taylor l'a mentionné plus tôt, la méthode la plus simple consiste à nous considérer comme des entreprises, donc à couvrir l'ensemble des produits et des mesures de soutien à l'investissement destinées aux entreprises privées. Dans un programme, nous voyons souvent qu'il est destiné à des entreprises de catégorie 1. Pourquoi ne s'agit-il pas d'OBNL ou de coopératives? C'est parce qu'il en est ainsi. Il y a aussi des programmes qui touchent les capitaux et les actions d'une compagnie, mais comme il n'y en a pas pour ce qui touche une entreprise d'économie sociale, il faut trouver un équivalent.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, il faudrait dans certains cas établir des structures mixtes. Il faudrait déterminer comment les lois peuvent être modifiées de façon à se diriger vers des entreprises mixtes. On parle soit d'entreprises de type B ou d'actifs immobilisés. Il s'agit de voir comment une troisième ou une quatrième forme d'entreprise peut être présente et s'assurer qu'on parle vraiment de finance sociale et d'entreprises sociales. Qu'elles soient à but lucratif ou incorporées, il faut que les actifs immobilisés restent dans les entreprises.
Il y a des pistes de solution que je voudrais mentionnées. Je peux vous faire part de deux projets sans pour autant parler de mes propres entreprises. Il reste que c'est un bel exemple.
La Fiducie du Chantier de l'économie sociale a été créée au début de 2007 à l'aide d'une subvention de l'État. La capitalisation se chiffre à 53 millions de dollars. Au départ, le gouvernement fédéral a fourni une subvention d'environ 20 millions de dollars, ce qui nous a permis d'obtenir, de la part de fonds de travailleurs et du gouvernement du Québec, 30 millions de dollars d'investissements et de prêts. À partir de là, nous avons pu, depuis 2007, investir 45 millions de dollars dans 127 entreprises du Québec. Cela a généré près de 2 500 emplois, 400 postes d'insertion et 265 millions de dollars en investissements. En outre, selon notre scénario, ces chiffres vont doubler sur une période de 15 ans. On parle donc d'une subvention qui a contribué à démarrer le mouvement et qui a apporté beaucoup à la fiducie. Nous avons fait des investissements à l'échelle du Québec.
Enfin, à titre de dernier exemple, je vais vous parler de l'un de nos projets qui est en cours présentement. Nous avons créé un fonds pour les OSBL impliqués dans le milieu de l'habitation et destiné à la rénovation des logements. Cela se fait dans le cadre d'un programme fédéral. Nous visons ceux qui ont besoin d'aide pour arriver avant la fin de la première hypothèque, mais qui n'ont pas l'argent nécessaire pour faire face à des hausses de coûts. Nous avons donc travaillé de concert avec nos partenaires, soit des investisseurs privés et des fonds fiscalisés. Le but était d'amasser 31 millions de dollars et de prêter de l'argent à ces gens, selon les mécanismes dont ils avaient besoin.
Dans ce cas-ci, les ententes avec la SCHL fonctionnent très bien. Il s'agit de s'assurer que ces nouveaux types de produits financiers passent la rampe dans le cadre des programmes et qu'ils nous permettent d'investir.
Avec un projet de 31 millions de dollars, nous allons pouvoir rénover 1 200 unités de logement. Dans ce cas-ci, il ne s'agit que de modifier un programme. En matière d'habitation, l'hypothèque n'est pas toujours le meilleur moyen de financement.