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Bonjour, je m'appelle Sunil Johal et je suis le directeur des politiques du Mowat Centre de l'école de politique publique et de gouvernance de l'Université de Toronto. Jamie Van Ymeren, associée chargée des politiques à l'égard de la plaque tournante de la recherche dans le domaine à but non lucratif du Mowat Centre, m'accompagne. Nous allons partager notre temps de parole. Nous voudrions remercier les membres du comité de nous donner l'occasion de participer à la réunion d'aujourd'hui.
Le Mowat Centre mène des recherches sur les difficultés auxquelles les gouvernements font face lorsqu'il s'agit d'étendre l'utilisation des fonds et des programmes axés sur les résultats à des domaines où l'exécution est complexe ainsi que sur les obligations à impact social et l'expérience de la première vague de fournisseurs de services sans but lucratif qui ont participé à ces programmes. Aujourd'hui, notre déclaration portera principalement sur l'environnement propice et l'infrastructure de soutien nécessaires à l'accroissement de la probabilité de réussite de ces initiatives, car les gouvernements peuvent jouer un rôle clé dans leur établissement.
Comme vous l'avez déjà entendu dire, l'éventail d'activités qui s'inscrivent dans la finance sociale est vaste et souvent lié à la tendance générale au chapitre du financement et de l'évaluation axés sur les résultats. Alors que les initiatives de finance sociale visent à générer des retombées à la fois sociales et financières, le financement axé sur les résultats correspond à des ententes d'impartition en vertu desquelles les gouvernements récompensent financièrement les fournisseurs de services ou les investisseurs privés d'avoir eu une incidence positive et soutenue sur la vie des utilisateurs des services.
Les modèles de financement axé sur les résultats peuvent prendre diverses formes, comme des contrats de paiement en fonction des résultats, des obligations à impact social, des contrats axés sur le rendement et des contrats incitatifs liés au rendement, entre autres.
L'intérêt à l'égard de ces modèles peut être perçu comme s'inscrivant dans un programme général de réforme du secteur public. De nos jours, les gouvernements ont recours à une gamme de nouveaux outils pour transformer la prestation des services de première ligne. Le résultat est qu'on se concentre davantage sur l'orientation des ressources vers les programmes et services qui entraînent les conséquences sociales les plus positives.
Vous avez déjà entendu des témoignages sur les changements qui pourraient être effectués afin de permettre l'investissement par des fondations privées et une plus grande participation des organismes sans but lucratif sur le front de l'entreprise sociale et de l'investissement d'impact. Nous pourrions répéter nombre des recommandations précédemment formulées par des témoins représentants des fondations, des organismes sans but lucratif et des investisseurs d'impact qui ont puisé dans les rapports du groupe de travail du G8 sur le financement social.
Nous voudrions souligner certains des travaux de base de nature non réglementaire dont les gouvernements doivent tenir compte au moment d'étudier ces nouveaux modèles. Les modèles de finance sociale et de financement axé sur les résultats ont un potentiel énorme, mais ils présentent également des risques d'échec s'ils ne sont pas mis en oeuvre adéquatement. Il doit y avoir un engagement solide à l'égard de la mise en place des conditions nécessaires à la réussite. Il faut se concentrer sur trois aspects clés: améliorer les données probantes; renforcer les capacités; et trouver la bonne combinaison de mesures incitatives.
Tout d'abord, les gouvernements devraient investir dans l'amélioration des données probantes et des mesures afin de tirer parti d'occasions prometteuses d'innover sur le plan des programmes et de soutenir l'élaboration à long terme de politiques axées sur des données probantes. Si la finance sociale est souvent louangée comme étant un moyen de promouvoir l'innovation et d'avoir une incidence sociale positive, la réalité, c'est que l'investissement dépend de l'assurance que les cibles au chapitre des résultats pourront être atteintes.
À ce jour, les données probantes à la disposition des gouvernements, des investisseurs et des organismes sont, au mieux, disparates. Les données probantes sont plus solides dans certains domaines où on a toujours procédé à des évaluations rigoureuses, comme celui de la santé, mais elles demeurent faibles dans la plupart des autres domaines. Un sondage fédéral mené en 2010 a révélé que, en moyenne, les ministères ne consacrent à l'évaluation que 0,08 % de leurs dépenses directement liées aux programmes. La clarification des objectifs des programmes et la collecte de données de base sur le rendement des programmes, les collectivités et les populations sont une condition préalable à l'adoption de ces types de modèles.
Ce travail doit être fait en amont. Trop souvent, les gouvernements intègrent l'évaluation de l'incidence au moment où ils mettent en oeuvre les approches de financement axé sur les résultats. Même dans les domaines de programme où une évaluation rigoureuse a eu lieu, cela n'est pas toujours facilement accessible pour tous les intervenants qui participent au processus. Sans cette information, les fournisseurs de services ne peuvent pas prendre de décisions éclairées au sujet d'interventions fructueuses, et les investisseurs ne peuvent pas faire de choix financiers prudents.
Les premières expériences des obligations à impact social et d'autres modèles d'investissement montrent que ces nouveaux modèles exigent beaucoup de temps et un investissement initial, surtout dans les domaines de l'appariement des données, du calcul des coûts et de la mesure des résultats. L'extraction des données existantes dans les systèmes administratifs et la collaboration avec les fournisseurs de services afin de recueillir toute donnée supplémentaire requise vont non seulement aider les gouvernements à évaluer les coûts possibles et l'efficacité de leur travail, mais aussi permettre de simplifier les négociations futures.
Je vais maintenant céder la parole à Jamie, qui abordera les deux autres aspects que nous voudrions souligner pour vous.
Notre deuxième recommandation, c'est que les gouvernements doivent investir dans l'infrastructure de soutien nécessaire pour renforcer les capacités au sein de la fonction publique et des organismes de prestation de services.
Dans le cas des organismes sans but lucratif qui sont parties à des ententes complexes, par exemple à l'égard des obligations à impact social, il faut approfondir les connaissances de leurs membres en matière de finance et d'évaluation et renforcer les mesures de soutien pour s'assurer qu'ils peuvent participer efficacement à ces processus. Les fournisseurs de services qui sont parties à des obligations à impact social remarquent qu'elles présentent un défi important au chapitre des capacités en ce qui a trait aux compétences en finance et en évaluation, mais aussi au chapitre des ressources organisationnelles. Par conséquent, certains partenaires modestes mais novateurs du secteur sans but lucratif pourraient bien avoir été exclus.
Le comité a déjà entendu des exemples de fonds établis ailleurs dans le but de préparer les organismes aux conséquences. En outre, des instituts indépendants qui se penchent sur « ce qui fonctionne » peuvent jouer un rôle précieux pour ce qui est de synthétiser le savoir et de diffuser des conseils sur les interventions qui ont fait leurs preuves, et, de même, les laboratoires d'aide technique peuvent offrir de la formation, des conseils ou des services d'analyse à l'appui de l'évaluation d'impact. Par exemple, le gouvernement du Royaume-Uni est en train d'établir un réseau de centres « What Works » qui donneront des conseils dans des domaines comme l'éducation, la réduction de la criminalité, l'intervention durant la petite enfance et le vieillissement des populations.
Les gouvernements devront également examiner leur capacité organisationnelle interne de s'engager dans des projets de financement axé sur les résultats et mettre en oeuvre de tels projets, et établir des mesures de soutien, au besoin. Les pénuries de spécialistes internes en matière d'évaluation et l'absence d'organisations indépendantes pouvant donner des conseils sur les interventions fondées relativement aux données probantes sont des défis auxquels font face de nombreux gouvernements.
Enfin, il faut s'assurer que les mesures d'incitation à l'égard des intervenants et des systèmes sont harmonisées afin de veiller à ce que les modèles fonctionnent à l'avantage du public. Ces nouveaux mécanismes de financement comprennent de nombreuses composantes et visent à s'attaquer à des enjeux sociaux complexes et bien ancrés. Les nouveaux modèles axés sur les résultats ne peuvent être efficaces que si les incitatifs visant tous les groupes d'intervenants — à savoir les gouvernements, les organismes sans but lucratif fournisseurs de services, les investisseurs et les clients — sont harmonisés.
Pour un gouvernement, ces modèles touchent souvent de multiples domaines et ordres de gouvernement, et la réussite dépend d'une coordination efficace. En réaction à ce problème, certaines administrations sont en train de constituer un fonds central de résultats ou d'établir des ententes d'investissement conjoint fondées sur des cas particuliers.
L'omission de négocier des ententes appropriées pose un risque important et peut mener à des trop-payés et à des moins-payés, à une utilisation abusive du système et à l'absence de collaboration entre partenaires. Ces risques sont particulièrement criants lorsque les modèles de résultats sont introduits dans des systèmes de soutien social mal coordonnés, où la capacité des fournisseurs est faible, où la confiance fait défaut, où les rôles sont mal définis et où le risque n'est pas réparti équitablement.
La création des bonnes conditions pour les négociations et la présence de tous les partenaires à la table sont essentielles. Il faut s'assurer que les mesures des résultats choisies permettent de récompenser une incidence réelle. Les indicateurs qui incitent aux abus et à la recherche de résultats à court terme qui ne sont pas utiles aux estimations à long terme de l'incidence sont néfastes pour la collectivité, pour les investisseurs, pour les fournisseurs et pour les décideurs.
En conclusion, le gouvernement a un rôle important à jouer pour ce qui est d'appuyer la finance sociale par la promotion d'un environnement solide et propice. Pour ce faire, il doit entre autres établir des informations de base de qualité, renforcer les capacités des intervenants internes et externes et mettre en place le bon ensemble de mesures incitatives. Ces modèles sont complexes et, pour que le public en profite, ils doivent être appuyés d'un engagement tout aussi fort à effectuer les changements nécessaires à leur réussite.
Merci.
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Merci beaucoup. Je suis légèrement désavantagé, du fait que je ne suis pas au courant de tout ce que vous avez abordé lors des réunions passées, mais je vais essayer de faire fond sur ce que j'ai entendu.
Je m'intéresse aux obligations à impact social et à leur raison d'être. Je pense que l'attrait des obligations à impact social est assez évident pour les organismes de prestation de services; en effet, s'ils ont la chance de pouvoir y participer, ces organismes pourraient compter sur un financement plus ou moins garanti pour la durée de la soi-disant obligation. Elles sont également attrayantes pour les organisations de financement, puisque, si les résultats attendus sont obtenus, elles obtiennent un taux de rendement, qu'il s'agisse d'organismes à vocation sociale ou d'entités privées.
Selon moi, la clé de l'intérêt du gouvernement tient à un certain nombre d'éléments. L'un de ces éléments est que, dans un contexte d'austérité budgétaire, les gouvernements cherchent d'autres sources de financement. À long terme, toutefois, si les obligations à impact social portent fruit, le gouvernement devra payer pour cinq ou sept années de services; un tel engagement entraîne donc des conséquences sur le plan budgétaire. Ces conséquences n'ont pas encore été cernées de façon très détaillée, à ma connaissance, alors il pourrait y avoir des contraintes budgétaires même au moment de les conclure.
Selon moi, la question qui s'impose est la suivante: pourquoi le gouvernement n'exigerait-il pas que tous les services offerts soient fournis, et pourquoi devons-nous conclure ces ententes assez complexes — comme nous l'avons entendu — pour réaliser ces économies et améliorer l'efficience? Ma propre approche est marquée par un certain scepticisme. Je peux voir l'attrait, surtout pour les organismes de services sociaux. Pour ce qui est des fondations caritatives qui se contentent de déplacer de l'argent d'une approche de prestation de services à une autre, je crois que cette façon de faire n'entraîne aucune augmentation nette des ressources.
Je pense qu'il y a de graves questions à se poser — comme nous l'avons entendu plus tôt aujourd'hui — au sujet de la façon d'établir les exigences en matière de rendement et de bien faire les choses en ce qui a trait aux mesures incitatives. Selon moi, c'est probablement l'aspect le plus important et le plus difficile, parce que les économies peuvent prendre de nombreuses formes. Elles peuvent prendre la forme de recettes additionnelles ou d'une réduction des coûts, et les coûts pourraient être opérationnels ou indirects. Ils peuvent être assez difficiles à gérer.
Je pense que les gens qui sont sceptiques à l'égard des obligations à impact social font souvent valoir qu'elles pourraient servir à miner l'emploi et la rémunération dans le secteur public, et ils font preuve d'une grande prudence à cet égard.
Le lancement des obligations a commencé assez lentement. Il y en a peut-être de 30 à 60 à l'échelle de la planète; il est difficile de savoir combien. Selon les dernières données à ma disposition, il y en avait environ 30 à la fin de l'année dernière, et 30 en préparation. À mon avis, ce départ lent indique un certain nombre de difficultés du point de vue des risques liés au financement et de la capacité des gouvernements de réussir à négocier les indicateurs de rendement.
Alors, ma conclusion serait qu'elles font des promesses qui sont très attrayantes, surtout pour les organismes de services publics, si tant est que ces promesses se réalisent. Elles pourraient être attrayantes pour un gouvernement. Un grand nombre de ces promesses reposent de toute manière sur des dépenses gouvernementales courantes. Si on investit de l'argent dans l'intervention durant la petite enfance et que cela porte fruit, on économise plusieurs fois l'argent qu'on a investi, qu'on ait eu recours ou non à des obligations à impact social.
Je ferais valoir que la priorité devrait être l'amélioration du financement et la prestation de services dans et par le secteur public, et que cette priorité devrait l'emporter sur la poursuite et la création d'environnements propices aux obligations à impact social.
Merci.
Cela nous amène à peu près à la fin de cette série de questions.
J'en ai deux ou trois.
Lorsque nous avons commencé l'étude, nos témoins étaient des représentants du gouvernement, et, plus tard, c'étaient d'autres représentants du côté de l'approvisionnement, comme la Banque Royale et d'autres institutions. Vous pouvez regarder notre liste de témoins pour le comprendre. Je pense que, dès le départ, il était assez clair que les personnes du côté de l'approvisionnement, pas celui de la demande, voyaient ces obligations comme une autre option de financement qui s'ajoutait à ce que font déjà les gouvernements.
Je viens du milieu des affaires, où on examine le besoin en fonds de roulement pour mener certains projets. D'où provient cet argent? Je sais que de nombreux organismes de ma circonscription sont frustrés parce qu'ils n'ont aucun accès au fonds de roulement du gouvernement. Certains fonds leur sont consentis pour l'exécution de programmes. Année après année, ils découvrent bien trop tard qu'ils n'auront pas accès à ces fonds, alors ils sont toujours mal pris à la fin.
De certaines façons, la finance sociale complète les programmes existants que, selon moi, la plupart de nos témoins n'envisagent pas d'arrêter ni de modifier et qui ne seront pas retirés, car le gouvernement essaie toujours de réduire les coûts liés à la prestation, mais il s'agit d'un autre moyen.
Je suis en relation étroite avec certains organismes de ma collectivité qui sont absolument frustrés lorsqu'ils tentent de faire démarrer des projets touchant, par exemple, le logement de personnes atteintes de déficience intellectuelle.
Dans ce contexte, puis-je vous demander si vous pensez ou non que, dans l'avenir, la finance sociale sera un moyen utile d'ajouter à ce que font déjà les gouvernements ou de le compléter?
Si vous voulez tous les trois formuler un commentaire à ce sujet, nous allons conclure après cela.
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Merci beaucoup, monsieur le président, de l'occasion qui m'est donnée d'être ici aujourd'hui.
Je vais parler au nom de Coopératives et mutuelles Canada, ou CMC. C'est l'organisme national qui représente les coopératives et les mutuelles du Canada. Nous comptons des membres dans toutes les provinces et nous sommes présents dans les collectivités urbaines et rurales.
J'aimerais vous parler aujourd'hui de quelques modèles de finance sociale que les coopératives utilisent, et ce, depuis un certain temps déjà. J'aimerais aussi mettre en lumière pourquoi nous croyons que la coopérative est le modèle idéal à suivre pour promouvoir et encourager la finance sociale partout au pays. J'espère aussi pouvoir ajouter à ce qui s'est dit pendant votre étude de la finance sociale.
Les deux modèles de financement dont je vais parler sont le fonds d'investissement éthique et l'entente de rémunération au rendement.
Laissez-moi commencer par dire que nous croyons que les coopératives fournissent du financement social, d'une manière ou d'une autre, depuis leurs tout débuts au Canada, il y a plus de 100 ans. Le modèle coopératif se prête tout naturellement à ce type d'approche, fondée sur la responsabilité sociale.
Comme nombre d'entre vous le savent déjà, les coopératives sont guidées par sept principes reconnus partout dans le monde qui aident à façonner leurs décisions d'affaires et leur gouvernance, ce qui les place dans une catégorie à part des autres entreprises.
De ces sept principes, celui de la participation économique des membres est probablement celui qui est le plus étroitement lié à la finance sociale. Les gens s'unissent pour former une coopérative afin de répondre à un besoin, et ils investissent dans cette coopérative. Ils ne demandent pas le soutien du gouvernement et ne sollicitent pas de dons. C'est précisément ça, la différence entre les organismes sans but lucratif et les coopératives. Les coopératives favorisent l'entraide, et c'est en assurant l'autonomie des gens qu'elles leur permettent de s'aider eux-mêmes.
Laissez-moi vous donner un exemple pour illustrer comment ces principes aident à mettre en place un environnement favorable à la finance sociale.
Commençons par examiner les fonds d'investissement éthique. À l'heure actuelle, nous comptons plusieurs de ces fonds à l'échelle du pays. Ils sont conçus pour servir à une région géographique particulière ou pour aider un secteur particulier du mouvement coopératif.
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Laissez-moi vous donner un exemple d'un de ces fonds. L'Arctic Co-operative Development Fund a été créé en 1986 pour fournir des services financiers aux coopératives du Canada arctique. Il s'agit d'un fonds autogéré, constitué de ressources financières mises en commun, qui appartient aux coopératives ayant accès au capital et est contrôlé par elles. L'investissement de départ était de 10 millions de dollars, et le fonds s'élève aujourd'hui à plus de 45 millions de dollars; il appartient presque exclusivement à des collectivités inuites et dénées dans le nord.
Le fonds de la coopérative de travailleurs Tenacity Works, plus modeste, est un autre exemple. Il s'agit d'un fonds d'investissement dont l'objectif est de créer de nouvelles coopératives de travailleurs, ou de favoriser l'expansion des coopératives existantes, dans toutes les régions du Canada. Le fonds appartient à la Fédération canadienne des coopératives de travail et est exploité par elle. Les fonds sont investis dans des coopératives de travailleurs du Canada.
Dans les deux cas, ces fonds ont reçu une aide financière du gouvernement fédéral au début, et ils ont tous deux joué un rôle crucial en comblant des besoins importants en matière de financement dans leur secteur respectif. Toutefois, ces fonds sont trop petits et trop ciblés, et ils sont loin de répondre à tous les besoins en matière de finance sociale du mouvement coopératif du Canada. Le secteur coopératif possède un énorme potentiel et pourrait répondre à une vaste gamme des besoins des Canadiens d'aujourd'hui, comme les soins à domicile; le logement, en particulier pour les personnes âgées; la relève au sein des entreprises; l'énergie renouvelable, et d'autres encore. Toutefois, pour que ce potentiel se réalise, les coopératives doivent jouir d'un accès accru à des capitaux adaptés à leurs besoins.
C'est à cette fin que le secteur coopératif a pris la décision de créer un fonds de développement coopératif national. Grâce au financement du secteur des coopératives et des mutuelles, le Fonds canadien d'investissement coopératif est conçu pour aider les coopératives à accéder à du capital qui pourrait ne pas leur être offert ailleurs. Ce sera un fonds dont les responsables connaîtront le secteur des coopératives et dont le mandat consistera à structurer les investissements en fonction des principes de la coopération et du rôle que joue le capital dans les coopératives.
Il s'agit d'un fonds d'emprunt qui va consentir du financement adapté aux besoins des coopératives, et il aura un effet de levier sur les autres institutions financières et sur les programmes gouvernementaux, qui fourniront la plus grande partie du capital. Le fonds sera géré de manière responsable, de manière à générer un niveau d'épargne adéquat et à augmenter l'avoir des membres au fil du temps.
L'objectif du fonds n'est pas de remplacer ou de copier une source de financement actuellement utilisée par le secteur coopératif ou à laquelle le secteur a accès. Un groupe d'investisseurs — à savoir Vancity, le groupe Co-operators, Assiniboine Credit Union, Affinity Credit Union, Connect First, Arctic Co-Operatives Limited, La Fédération canadienne des coopératives de travail et Desjardins — s'est déjà engagé à verser 20 millions de dollars.
Le fait que nos investisseurs sont prêts à accepter un taux de rendement très bas afin de stimuler le développement économique est une indication claire de l'impact de ce fonds sur le financement social. Nous avons donc ici un exemple de coopératives qui s'unissent pour créer un fonds qui favorisera le développement des coopératives au Canada ainsi que l'entreprise sociale grâce à un modèle de financement social. Ces coopératives n'avaient pas besoin de faire cela. Plus important encore, ces coopératives ne le font pas pour faire un profit, mais parce qu'elles souscrivent aux principes du mouvement coopératif.
Je suis convaincu que, parmi les gens ici présents, nombreux sont ceux qui estiment que l'idée de créer un fonds d'investissement financé par le secteur coopératif est une bonne idée. Vous pensez également probablement que, si ce fonds est financé par le secteur coopératif, le gouvernement fédéral n'a pas besoin d'y participer. Nous pensons que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer pour ce qui est de fournir du capital qui s'ajoutera à l'investissement et que ce fonds ne devrait pas être la responsabilité d'une seule partie, mais plutôt être le fruit d'un partenariat pour encourager ce type d'investissements.
Les deux fonds que j'ai mentionnés illustrent bien comment un investissement modeste du gouvernement, assorti de la contribution du secteur, permet de créer un fonds d'investissement viable et durable pour aider les membres. À notre avis, un fonds national s'adressant à l'ensemble du secteur coopératif renferme les mêmes promesses.
Il y a aussi un avantage à utiliser le modèle coopératif au moment d'assurer une contrepartie au financement social. Les coopératives sont dirigées par leurs membres et servent à combler leurs besoins. Les membres ont un intérêt direct dans la coopérative, qu'elle soit à but lucratif ou non. N'oubliez pas que des gens qui s'unissent en vue de poursuivre un objectif commun forment des coopératives. Souvent, c'est parce qu'ils cherchent à obtenir un service particulier, qui n'est offert ni par le secteur privé, ni par le secteur public. C'est pour cette raison qu'on dit souvent que les coopératives font partie du tiers secteur. Les membres de la coopérative décident de son programme et stimulent l'innovation qui crée l'environnement propice à la finance sociale. Sans nos membres, la finance sociale n'aurait aucune raison d'être.
À notre avis, la meilleure façon d'évaluer la réussite d'une coopérative, c'est d'observer que les membres y participent et croient aux services qu'elle fournit.
Un autre modèle de finance sociale actuellement utilisé est l'entente de rémunération au rendement. La coopérative de services à domicile mise sur pied au Québec est un magnifique exemple de ce type de modèle. C'est un modèle très fructueux, et le gouvernement du Québec est ravi des résultats. Ces coopératives offrent de nombreux services aux aînés et aux personnes handicapées, par exemple des soins à domicile, des services d'entretien ménager, les soins personnels, l'aide touchant les médicaments, etc.
Au Québec, le gouvernement a créé en 1997 le programme d'exonération financière pour les services d'aide domestique. Ce programme a pour but de soutenir les clients les plus pauvres. Par exemple, une personne dont le revenu est égal ou inférieur à 15 000 $ par année aura droit à une réduction de 13 $ pour chaque heure de service rendu, et une personne dont le revenu est supérieur à 40 000 $ par année aurait droit à une réduction maximale de 4 $ par heure de service rendu. Le but du programme est de faire en sorte que les personnes à faible revenu aient accès à des services de qualité.
Les coopératives de soins à domicile sont des coopératives sans but lucratif comptant de multiples parties intéressées. Le client, les partenaires de la collectivité et les employés en sont tous membres, ce qui veut dire qu'ils sont également des actionnaires. Grâce à cette approche, les coûts restent beaucoup moins élevés que ce que le secteur public ou le secteur privé pourrait offrir.
Ce modèle particulier profite au gouvernement provincial, car il permet d'offrir dans toutes les régions de la province des services rentables, mais également parce que le gouvernement peut percevoir des impôts auprès de travailleurs qui, autrement, auraient été payés au noir.
En raison de la flexibilité du modèle coopératif et du pouvoir qu'il confère à ses membres, ce modèle est devenu un chef de file des services sociaux au Québec. Nous avons ici un autre exemple de gens qui unissent leur force afin de répondre ensemble à leurs besoins économiques, sociaux et même culturels communs dans le cadre d'une entreprise détenue en commun et démocratiquement contrôlée.
Pour terminer, j'espère et je suis convaincu que les membres de votre comité verront les avantages du modèle coopératif au moment d'élaborer leur rapport. Je n'ai pu vous présenter aujourd'hui que quelques exemples, mais les histoires de réussite formidables sont nombreuses. Comme je l'ai déjà dit, la finance sociale, ce n'est pas un nouveau concept. C'est ce que font les coopératives depuis toujours. C'est dans nos gènes.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président, et bon après-midi. Merci de l'occasion qui m'est donnée. Je suis désolé de n'avoir pas pu être parmi vous.
J'aborde votre sujet de discussion sous l'angle du logement et de l'itinérance, en tant que promoteur du logement abordable; j'ai trouvé un logement à plus de 4 000 personnes grâce à un éventail de programmes « Logement d'abord ». J'ai acquis de l'expérience dans le secteur privé et dans une société ouverte.
Je suis un ardent partisan de la finance sociale et des entreprises sociales, mais je dois vous avertir: ni l'un ni l'autre n'est une panacée. Pour mon témoignage, aujourd'hui, je vais me concentrer sur la finance sociale et, plus précisément, sur les obligations à impact social et sur les possibilités de la finance sociale au regard du logement abordable, dans une veine comparable à ce dont M. Murphy vient de parler.
Je commencerai par le potentiel des obligations à impact social pour la réduction de l'itinérance, car ces instruments ont fait l'objet de nombreuses discussions et recherches dans le milieu de la finance sociale. Le gouvernement du Canada a récemment réorienté sa stratégie quant aux partenariats de lutte contre l'itinérance vers l'approche « Logement d'abord », que je soutiens de tout coeur et avec un grand enthousiasme. Logement d'abord, c'est une approche révolutionnaire et on ne peut plus efficace en matière d'itinérance, et ce modèle est au coeur de la réduction de l'itinérance observée à l'échelle de la province, ici, en Alberta.
À première vue, le modèle Logement d'abord se prêterait bien aux obligations à impact social. Pour que ces obligations soient fructueuses et qu'elles soient pour le gouvernement un choix financier judicieux, il faut qu'elles génèrent des économies de coûts ou permettent un évitement de coûts et que cela profite aux investisseurs. Selon une évaluation récente faite à l'échelle nationale de l'approche Logement d'abord par la Commission de la santé mentale du Canada, pour chaque 10 $ investis dans un projet appliquant ce modèle, les économies moyennes s'établissaient à 21,72 $. Les résultats pour l'Alberta, en ce qui concerne les participants à de tels projets, montrent une réduction de 85 % des journées d'emprisonnement, une diminution de 67 % des journées d'hospitalisation et une baisse de 61 % des interactions avec les services médicaux d'urgence.
J'adorerais voir les obligations à impact social appliquées à grande échelle au Canada, mais, honnêtement, je doute qu'elles puissent s'appliquer dans le cadre de la lutte contre l'itinérance, et il y a trois raisons pour cela.
Premièrement, pour qu'un rendement soit possible, les gouvernements doivent être prêts à monnayer les économies et à rembourser le principal aux investisseurs, avec un modeste profit. En majeure partie, les économies réalisées au titre de l'itinérance, pour la plupart des services sociaux, en particulier dans le cadre de l'approche Logement d'abord, vont aux provinces, ce qui n'aide pas le gouvernement fédéral, et il sera difficile d'amener les gouvernements provinciaux à monnayer leurs économies.
Deuxièmement, il faut pouvoir compter sur des intermédiaires compétents qui peuvent surveiller leur rendement, qui s'appuient sur des systèmes rigoureux de traitement des données, qui peuvent gérer le risque dans tout un portefeuille de programmes et qui savent communiquer avec les investisseurs sur le marché; ce genre de personnes est très rare, de nos jours, au Canada. Le gouvernement fédéral pourrait créer de puissants intermédiaires, par le truchement de diverses stratégies de partenariats de lutte contre l'itinérance dans le milieu des organismes communautaires, mais il lui faudrait transformer de fond en comble et renforcer le rôle de ces organismes et changer le mode d'administration de la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance.
Troisièmement, pour obtenir des résultats, il faut pouvoir compter sur des organismes partenaires compétents et capables. Atteindre le niveau de rendement nécessaire pour obtenir des résultats, c'est plus facile à dire qu'à faire, et la responsabilisation à l'égard des résultats est une notion relativement nouvelle dans le secteur des OSBL. Je crois que le secteur y arrivera, dans les cinq prochaines années peut-être, mais je ne crois pas que le modèle Logement d'abord est arrivé à un niveau de maturité suffisant pour soutenir les obligations à impact social.
Ces obligations, à mon avis, seraient plus utiles aux nouvelles initiatives ou aux initiatives émergentes ou encore lorsqu'une initiative est associée à un système gouvernemental pour la première fois et qu'il est possible de transférer le risque à l'investisseur. Dans le cas d'initiatives éprouvées, comme Logement d'abord, le gouvernement ferait mieux de se tourner du côté des ententes liées au rendement — dont a parlé l'autre témoin —, qui consiste à inciter les intervenants à dépasser les cibles en matière de rendement et à imposer des pénalités à ceux qui ne les atteignent pas. C'est une façon de stimuler le rendement et de réaliser des économies sans avoir en même temps besoin d'investissement en capital.
À mon sens, les obligations à impact social sont un excellent outil quand il faut stimuler l'innovation, mais elles ne sont pas aussi précieuses que les outils évolutifs quand il s'agit de régler des problèmes sociaux. Dans mon esprit, l'élément clé de l'étude du comité, c'est de chercher où le gouvernement fédéral peut avoir le plus d'impact. Dans le domaine du logement et de l'itinérance, à mon avis, le gouvernement ferait mieux de s'occuper des infrastructures physiques.
Chaque année, 235 000 Canadiens font l'expérience de l'itinérance; chaque nuit, 35 000 Canadiens n'ont nulle part où coucher. Selon les estimations, 1,5 million de ménages canadiens à faible revenu présentent un besoin impérieux en matière de logement, et plus de 730 000 ménages locataires présentent des besoins extrêmes en matière de logement.
L'augmentation massive du nombre de sans-abri aujourd'hui, au Canada, remonte à l'époque où le gouvernement fédéral a commencé à se retire de l'investissement dans le logement; par exemple, il a réduit de 46 % ses investissements dans le logement abordable au cours des 25 dernières années, malgré une croissance de 30 % de la population du Canada. Le Canada fait face à une pénurie très, très grave de logements. Les marchés n'offrent pas de logements abordables, car ceux-ci ne sont pas très rentables. De plus, le marché de la construction de logements locatifs est limité, car on peut faire beaucoup plus d'argent beaucoup plus rapidement sur le marché des propriétés résidentielles.
Une belle occasion s'offre au gouvernement fédéral de mobiliser, à peu de frais, les investisseurs privés pour qu'ils investissent dans les logements locatifs et les logements non destinés au marché. C'est clairement une compétence fédérale au regard de laquelle je recommanderais de mettre l'accent sur la finance sociale. Dans ce domaine, les possibilités de la finance sociale ne sont limitées, en réalité, que par notre créativité. M. Murphy a donné deux bons exemples, je vais de mon côté vous exposer trois idées.
Premièrement, il faudrait que les dons de terrain et d'immeuble à des organismes sans but lucratif ou à des organismes de bienfaisance aux fins de projets de logement abordable soient déductibles d'impôt. C'est déjà le cas quand il s'agit de conservation de l'environnement; nous devrions offrir les mêmes mesures incitatives dans le cas du logement abordable.
Deuxièmement, il faudrait instaurer un crédit d'impôt pour les logements à loyer modique. Essentiellement, par ce crédit d'impôt, le gouvernement fédéral accorderait des réductions aux investisseurs privés en fonction des dollars qu'ils ont investis dans des projets de logement abordable admissibles. Contrairement à ce qu'il fait pour d'autres mesures incitatives, le gouvernement fixerait chaque année le montant du crédit d'impôt pour les logements à loyer modique de façon que le coût soit connu à l'avance. Les crédits seraient distribués aux provinces et aux territoires en fonction des résultats d'une évaluation par la SCHL des besoins impérieux en matière de logement, et un organisme provincial ou territorial évaluerait les demandes et y répondrait selon des critères prédéfinis. Le crédit d'impôt pour les logements à loyer modique est offert depuis 30 ans aux États-Unis, et il a permis la création de milliers d'unités de logement. Nous estimons que, moyennant un investissement annuel de 150 millions de dollars dans ces crédits d'impôt, il serait possible de créer chaque année plus de 4 800 unités de logement.
Troisièmement, j'envisagerais la possibilité d'offrir une garantie de prêt sur les obligations pour le logement émises par des organismes sans but lucratif. Aujourd'hui, les grands promoteurs privés de logements locatifs peuvent obtenir du financement sur le marché. Les grandes entreprises se voient accorder du financement à un taux avantageux parce qu'elles présentent un risque de crédit acceptable. De manière générale, les organismes sans but lucratif n'ont pas suffisamment de liquidités ou d'actifs pour obtenir un financement à faible coût, comme c'est possible pour une entité du secteur privé. S'ils pouvaient obtenir une garantie, les organismes sans but lucratif pourraient émettre des obligations adossées à leurs actifs. Ce serait en fait un outil parfait pour réaménager de vieux logements sociaux financés au départ par la SCHL, qui sont aujourd'hui pour la plupart libres d'hypothèque et sont situés sur des terrains de premier ordre, presque partout au pays. Ce serait également un moyen de s'assurer que les logements sociaux, à l'échéance de l'entente conclue avec le gouvernement fédéral, ne tombent entre les mains de promoteurs privés. Avec cette approche en matière de financement et avec une garantie par le gouvernement fédéral d'environ 500 millions de dollars de dette, probablement par l'entremise de la SCHL, il serait possible de créer des investissements de plus de 1,5 milliard de dollars pour le logement, ce qui est équivaut à environ 8 000 nouvelles unités de logement abordable, sans que cela ne coûte un sou au gouvernement.
La créativité dans le domaine du financement des logements est vraiment très forte, de nos jours, au Royaume-Uni. Je vous encouragerais, si vous en avez l'occasion, à jeter un coup d'oeil au groupe Orbit, un très bon exemple. De la même façon, revitalisation du quartier Regent Park, à Toronto, a profité de l'aide de la ville de Toronto, qui a permis de réduire de beaucoup le coût des emprunts.
En conclusion, je suis un fervent partisan de la finance sociale et des entreprises sociales, et j'encouragerais les membres du comité, lorsqu'il sera question du logement et de l'itinérance, de choisir des moyens d'action où le gouvernement fédéral peut réellement avoir une grande incidence, dans des sphères de compétence clairement fédérale, c'est-à-dire dans la création de logements locatifs abordables.
Au bout du compte, la finance sociale ne pourra pas elle seule juguler la crise du logement au Canada. Il faudra un jour que le gouvernement fédéral y consacre des investissements directs. Selon nos estimations, un montant d'à peu près 46 $ par Canadien, soit environ 1,7 milliard de dollars par année, somme utilisée sous forme d'investissements combinés et directs, conformément à des stratégies en matière de finance sociale, permettrait d'éliminer presque totalement l'itinérance au Canada en 10 ans.
Je vous remercie.
Le problème à l'égard des données, à notre avis, est toujours à l'échelon fédéral, en particulier. Comme vous le savez très bien, la plupart des coopératives sont constituées en vertu d'une loi provinciale. Il n'y a que 80 ou 90 coopératives, environ, qui sont régies par une loi fédérale; toutes les autres sont régies par des lois provinciales.
Certains gouvernements provinciaux — celui du Québec, notamment — ont consacré énormément de temps et d'énergie à encourager le secteur, dans la province, à recueillir les données en question et, essentiellement, à faire une évaluation des besoins sur le terrain pour savoir quelles lacunes il fallait combler. Le gouvernement peut ensuite s'adresser au secteur des coopératives et lui dire: « Grâce à votre aide, nous avons cerné les lacunes. Pouvons-nous mettre sur pied des coopératives qui vont les combler? »
Le gouvernement québécois travaille actuellement, en collaboration avec des sociétés minières du Nord, à un projet pilote qui vise à savoir s'il serait possible que des coopératives collaborent avec les mines pour fournir les services externes — l'entretien ménager, le transport, des choses comme cela —, ce qui permettrait de réduire les coûts. Ce serait une façon d'augmenter les recettes de la province.
D'autres provinces entament peu à peu le même processus. Je sais que le Manitoba envisage d'élaborer une stratégie provinciale de développement des coopératives qui, selon ce que j'en sais, doit être bientôt signée. Certaines provinces sont plus en avance que d'autres, disons-le ainsi.
Cependant, à l'échelon fédéral, il y a encore du rattrapage à faire et il est difficile d'avoir un bon portrait des besoins et des lacunes à l'échelle nationale. Nous espérons cependant que ces fédérations, par exemple la fédération s'occupant de la santé dont nous avons reçu un représentant hier, et d'autres fédérations, voudront commencer à collaborer avec nous, et nous les encouragerons à réunir les données grâce auxquelles nous pouvons prendre des décisions éclairées.
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Je remercie nos témoins d'aujourd'hui.
Pour commencer, j'aimerais poser à M. Richter quelques questions sur un des sujets auxquels j'ai réfléchi. Vous avez dit que, en ce qui concerne l'itinérance et les logements abordables, nous avons creusé un trou. Je crois que la question à poser est celle de savoir pourquoi il y a une demande? Ensuite, il faut savoir comment nous pouvons répondre à ce besoin et, en même temps, promouvoir certains des résultats qui sont à mon avis liés aux logements du marché, par exemple la fierté d'être propriétaire, la responsabilité, l'intérêt financier, ce genre de choses?
Nous avons discuté avec un groupe de constructeurs sur la question de savoir comment, comme vous l'avez dit, les gouvernements pourraient donner un terrain, et peut-être que les administrations locales pourraient assumer les droits d'aménagement et une partie de... Car 45 % du coût d'une maison est constitué, dans le fond, des taxes et droits imposés par les administrations, croyez-le ou non. Il y a aussi, entre autres choses, les frais d'intérêt, et les gouvernements peuvent décider d'intervenir, peut-être en fournissant le capital sans intérêt, et encourager cette façon de faire.
Mais, au bout du compte, à titre de personne qui a de l'expérience sur le marché du logement, j'ai constaté que les gens qui ont un sentiment de responsabilité de la propriété, qui sont fiers d'être propriétaires et qui ont intérêt à prendre soin de leur propriété... parce que ce qui vous tue, ce sont les coûts de fonctionnement et d'entretien des propriétés une fois la construction terminée.
Je suppose que ce à quoi je veux en venir, c'est ceci: pourriez-vous imaginer une structure quelconque qui vous permettrait d'offrir des logements abordables aux personnes sans abri et, en même temps, d'obtenir certains de ces résultats, tout en étant assurés que l'investissement est protégé et que les besoins finiront par disparaître?
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Vous soulevez plusieurs choses, mais la première question était de savoir comment nous en sommes arrivés là? L'itinérance de masse au Canada coïncide avec le retrait du gouvernement fédéral. Sur une période de 25 ou 30 ans, probablement, les investissements fédéraux dans le logement abordable ont diminué d'environ 46 %. Il y a une corrélation directe entre le retrait de ce financement et l'augmentation de l'itinérance de masse moderne. Une réduction de 46 % des investissements dans le logement, qui s'est étalée sur les 25 dernières années, cela constitue, je crois, un facteur important. Il y a toutes sortes d'autres facteurs importants, mais c'est probablement le plus important.
Quant au second point que vous avez abordé, les coûts de fonctionnement et d'entretien, vous voulez savoir comment nous pouvons nous assurer que ces immeubles seront bien entretenus? Je peux vous le dire d'expérience, personne n'est aussi heureux de vivre en appartement qu'une personne qui a vécu dans une boîte en carton. Cette personne sera fière d'être propriétaire, elle sera fière de ce qui lui appartient. La grande majorité des gens qui obtiennent un logement ne veulent pas perdre ce qu'ils ont, et ils seront portés à en prendre soin.
Le troisième point, c'est qu'il est important que nous arrivions à comprendre... Un des principaux défis de la promotion immobilière sans but lucratif, c'est de trouver des gestionnaires sans but lucratif qui font bien leur travail. Nous devons nous assurer qu'ils savent entretenir les immeubles de façon appropriée et à peu de frais.
Nous avons besoin de promoteurs prêts à assumer un risque financier. La plupart des œuvres de bienfaisance et des organismes sans but lucratif craignent l'endettement comme la peste. Nous devons trouver un moyen de leur faciliter les choses, de les rendre plus à l'aise; nous devons trouver parmi les organismes sans but lucratif ceux qui sont prêts à prendre ce risque. Il y en a qui ne sont pas prêts, sur le plan opérationnel, à prendre un tel risque lorsqu'ils doivent répondre aux besoins des gens.
M. Butt a parlé du programme Logement d'abord. Une des choses importantes que nous avons apprises des intervenants des programmes Logement d'abord en Alberta et du projet At Home/Chez Soi, c'est à quel point le soutien au logement est important, surtout pour les personnes qui présentent les besoins les plus complexes. Il ne s'agit pas seulement de l'infrastructure du capital ou des mécanismes financiers.
Construire des logements ou des maisons et les financer, cela n'a absolument rien de sorcier. Il n'y a aucune part de mystère; il s'agit de trouver une façon créative de réunir l'argent. Quand on a affaire à des personnes dont les besoins sont complexes, ce sont les soutiens qu'il est possible de fournir qui importent. C'est à ce chapitre que la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance a été si précieuse, et c'est aussi à ce chapitre que le soutien des provinces a été utile.
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Un des avantages des obligations à impact social, c'est qu'elles peuvent créer une discipline, comme vous le dites, à l'égard du résultat escompté. Vous avez tout à fait raison.
Aujourd'hui, nous pouvons suivre n'importe quelle vache, du pré jusqu'à l'assiette, en Alberta, mais nous ne pouvons pas vous dire combien il y a au Canada de personnes sans abri, ce qui leur arrive lorsqu'ils sont dans le système, ce qui leur arrive lorsqu'ils en sortent. Nous arrivons à le faire dans tous les autres domaines; il n'y a aucune raison pour laquelle nous ne pourrions pas le faire dans le domaine de l'itinérance. Nous avons commencé, en Alberta, à utiliser des systèmes d'information sur la gestion des sans-abri. Ils devraient nous permettre de suivre tout le monde. Nous savons qui ils sont et ce dont ils ont besoin. Il nous faut les enregistrer dans le système, faire un suivi de ce qu'ils vivent et comprendre ce qui leur arrive lorsqu'ils quittent le système. Mais les données et les systèmes de données des services sociaux à ce sujet sont médiocres.
Un bon exemple d'un système convenable qui ne fonctionne pas aussi bien qu'il le pourrait, c'est le Système d'information sur les personnes et les familles sans abri, du gouvernement fédéral. Ce système permet de recueillir des données sur les gens utilisant des programmes financés par le gouvernement fédéral, mais il est très difficile, pour les intervenants sur le terrain, ceux des organismes, de savoir qui sont exactement ces personnes et comment elles se déplacent dans le système. L'information est communiquée verticalement, mais elle ne l'est pas horizontalement, et c'est pourquoi il nous est impossible, aujourd'hui, d'assurer le suivi des gens qui utilisent le système de soins.
Tant qu'il vous est impossible de recueillir ces données et de savoir avec certitude... Par exemple, pour prouver qu'une obligation à impact social donne de bons résultats dans le domaine de l'itinérance, vous devez pouvoir prouver qu'une personne a obtenu un logement et a conservé ce logement pendant une année et montrer qu'elle utilise moins le système public. Mais aujourd'hui, sans système d'information sur la gestion des sans-abri, nous ne pouvons pas savoir si cette personne a toujours un toit ou non. À mon avis, il faut que les données soient coordonnées à l'échelle du système.
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Il faut savoir comment et à qui vous allez les fournir. Pensez à la population des sans-abri du Canada; prenez cette population et divisez-la comme une tarte. Imaginez un triangle inversé. La pointe du bas de ce triangle inversé représente environ 15 % de la population totale des sans-abri — de 85 à 90 % des sans-abri finissent par s'affranchir de l'itinérance. C'est un problème purement économique. Ils réussissent à s'en tirer sans aide de quiconque, ou presque.
Dans la très grande majorité des cas, les investissements visant le logement abordable, qu'ils viennent du gouvernement du Canada ou des provinces, sont saupoudrés sur toute une gamme de projets. Il n'y a pas de stratégie précise, et cette ressource limitée n'est pas ciblée de façon assez efficace. Si vous utilisiez les investissements publics pour répondre en priorité aux besoins des sans-abri chroniques et épisodiques, cette tranche de 15 % de gens qui utilisent plus de 50, voire 60 % des places dans les refuges d'urgence, ce qui entraîne les coûts les plus élevés pour le système public, vous réduiriez de façon phénoménale le nombre de sans-abri.
En ce qui concerne le marché, avec quelques mesures incitatives... Nous avons par exemple recommandé, dans notre rapport sur l'état de l'itinérance, d'accorder une allocation de logement aux gens qui habitent un immeuble locatif de façon que le logement soit pour eux abordable et qu'ils puissent jouir d'un logement stable. Cela serait amplement suffisant. Il n'est pas nécessaire d'investir beaucoup plus dans les projets d'infrastructure, à court terme. Je le répète, cependant, il existe un vaste éventail de débouchés. Je commencerais par définir le public cible.
Deuxièmement, j'ai constaté que le coût unitaire des logements sociaux est très élevé. Nous nous retrouvons souvent, par exemple, avec un coût de 300 000 $ l'unité. Ici, à Calgary, un des marchés où les unités sont les plus coûteuses, j'ai été capable d'offrir de nouveaux logements — construction classique, quatre étages — à 170 000 $ l'unité. Tout dépend en réalité du type de construction. Comme un des autres témoins l'a mentionné, cela dépend de tous les autres facteurs qui entrent en jeu. Si vous voulez construire une tour en béton dans le centre-ville de Calgary et aménager un poste de pompier au rez-de-chaussée, vous devrez payer de 300 000 à 350 000 $ l'unité.
Le gouvernement fédéral doit définir un peu plus clairement ses priorités et être également plus explicite quant à ce qu'il est prêt à payer et à ce qu'il veut payer.