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INST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY, SCIENCE AND TECHNOLOGY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 8 novembre 2001

• 0908

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): La séance est ouverte. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous allons procéder à l'étude des trois organismes subventionnaires fédéraux, du financement en fonction de l'évaluation par les pairs et du Programme des chaires de recherche du Canada.

Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui M. Robert Giroux, président-directeur général de l'Association des universités et collèges du Canada; M. Paul Davenport, président de l'université de Western Ontario; Mme Bonnie Patterson, présidente de l'université Trent; M. David Barnard, président de l'Université de Regina; et M. Tom Traves, président de l'université Dalhousie.

Nous allons commencer par entendre M. Giroux et ce sera ensuite au tour de ses confrères.

M. Robert J. Giroux (président-directeur général, Association des collèges et universités du Canada): Merci, madame la présidente. Je suis heureux d'avoir l'occasion de poursuivre la discussion que nous avons amorcée avec le comité en mai dernier au sujet des moyens à employer pour renforcer la capacité d'innovation des universités canadiennes.

L'Association des universités et collèges du Canada a pris connaissance avec intérêt de votre rapport de juin 2001 et a noté avec plaisir la reconnaissance, par le comité, du rôle central des universités dans le programme d'innovation national. Quatre recteurs d'université m'accompagnent aujourd'hui: ils vous fourniront des perspectives uniques sur l'importance de faire en sorte que les universités disposent de ressources suffisantes si elles doivent jouer un rôle crucial dans la mise en oeuvre de ce programme.

[Français]

Avant de leur céder la parole, je voudrais décrire brièvement les conditions qui permettront aux universités canadiennes de collaborer efficacement avec les organismes subventionnaires fédéraux et les autres partenaires bailleurs de fonds.

• 0910

Dans nos efforts pour faire progresser notre objectif commun, qui est d'augmenter notre capacité d'innovation à l'échelle nationale, nous devons encourager et soutenir l'excellence dans la recherche, cela dans toutes les parties du système, dans toutes les disciplines et dans toutes les régions du pays. L'excellence ne loge à aucune enseigne en particulier. Pour soutenir et diversifier notre capacité d'innovation nationale, nous devons par conséquent encourager les réflexions et les actions originales là où elles peuvent s'épanouir, et ceci nécessite de notre part un engagement solide et continu pour appuyer un plus grand nombre de chercheurs et d'étudiants diplômés dans un plus grand nombre d'établissements, à des niveaux plus compétitifs mondialement.

Nous croyons que cet engagement est essentiel pour atteindre le but que nous nous sommes fixé, à savoir passer de la quinzième à la cinquième place en ce qui a trait à la proportion des dépenses brutes faites en recherche et développement par rapport au produit interne brut et ainsi réussir à améliorer la qualité de vie et la prospérité économique des Canadiens dans toutes les régions du pays.

C'est pour cette raison que l'AUCC préconise un cadre stratégique qui cherche à renforcer simultanément la compétitivité sur la scène internationale et la capacité de recherche des universités canadiennes. Notre objectif global en matière d'innovation est d'assurer que les universités canadiennes partout au pays pourront contribuer à cet objectif de manière soutenue selon leur mission, leurs priorités et leurs capacités respectives. Comme vous l'avez constaté lors de notre présentation précédente devant ce comité, l'AUCC estime qu'une première étape cruciale pour la réussite de nos objectifs serait que le gouvernement fédéral s'engage à payer les frais indirects de la recherche et qu'une initiative soit mise en place pour établir une capacité de recherche dans les établissements de plus petite taille.

Le paiement des frais indirects de la recherche selon une formule analogue à celle que propose le Conseil consultatif des sciences et de la technologie est une condition préalable indispensable pour améliorer la position des universités canadiennes sur la scène mondiale. Les principales nations rivales, dont les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Australie et le Japon, le font déjà pour la recherche fédérale qu'elles parrainent, ce qui permet d'avoir une base solide incomparable pour mettre en oeuvre de façon dynamique un programme d'innovation national.

Nous devons aussi faire davantage d'efforts pour stimuler et renforcer la capacité d'innovation des universités canadiennes de plus petite taille afin qu'elles puissent continuer à exploiter de façon stratégique le potentiel d'innovation des communautés dans lesquelles elles se trouvent. En proposant une nouvelle initiative fédérale de création de la capacité, nous reconnaissons qu'il faut tirer parti de la flexibilité que présentent les programmes fédéraux existants. L'initiative que nous préconisons pour renforcer la capacité en matière de recherche reconnaît aussi que l'excellence doit être le critère fondamental de tout financement.

[Traduction]

Lorsque les initiatives concernant les coûts indirects de la recherche et le renforcement de la capacité de recherche seront en place, les universités seront en meilleure position pour continuer à promouvoir et à soutenir une large gamme de programmes de recherche financés par les organismes subventionnaires.

La demande de fonds pour la recherche augmentera de manière exponentielle à mesure que de nouvelles idées de recherche voient le jour, que la base d'innovation s'élargit et que le succès s'accroît sur la scène internationale. En fait, les organismes subventionnaires rapportent déjà une croissance importante de la demande attribuable à l'afflux de nouveaux chercheurs dans le système, à un moment où les universités entreprennent de renouveler leur corps professoral. Pour profiter d'éléments existants et en retirer des profits pour le Canada, une augmentation considérable et soutenue des fonds accordés aux organismes subventionnaires est non seulement justifiée, mais essentielle.

Il convient de noter que malgré les nouvelles priorités budgétaires qui émanent des événements du 11 septembre, le congrès des États-Unis maintient le cap et continue à investir massivement dans la recherche universitaire. Aux États-Unis, le budget du National Institute of Health sera augmenté de plus de 3 milliards de dollars américains l'an prochain, et l'on prévoit au moins doubler les niveaux actuels de financement de la National Science Foundation d'ici 2010. Compte tenu de notre propre objectif d'innovation à l'échelle nationale, le Canada ne peut pas se permettre de retarder ses investissements.

Madame la présidente, je vous remercie de votre attention.

J'aimerais demander, nous sommes assis par ordre d'intervention et j'espère que vous n'y voyez pas d'inconvénient—à Tom Traves, le président de l'université Dalhousie et aussi de l'Association des universités de l'Atlantique, d'intervenir en premier. M. Paul Davenport, président de l'université Western et ancien président de l'Association des universités et collèges du Canada interviendra ensuite, puis ce sera au tour de Mme Bonnie Patterson, présidente de l'université Trent, et elle sera suivie de M. David Barnard, président de l'Université de Regina.

Cela vous convient-il, madame la présidente?

La présidente: Tout à fait.

Monsieur Traves.

• 0915

M. Tom Traves (président, université Dalhousie, et président de l'Association des universités de l'Atlantique): Merci, madame la présidente. J'aimerais commencer en vous remerciant de me donner la possibilité de participer à cette discussion et à cette présentation.

Comme on vous l'a dit je suis président de l'université Dalhousie ainsi que de l'Association des universités de l'Atlantique. Si vous le permettez, j'aimerais décrire brièvement le contexte dans lequel se situent mes propos, qui s'expliquent dans un certain sens par mes doubles fonctions.

L'université Dalhousie est essentiellement une université de recherche, dotée d'un éventail complet de programmes de formation générale à tous les niveaux, y compris un nombre appréciable de programmes de doctorat.

Comme on peut s'y attendre dans notre région, toutefois, la plupart de nos universités sont des établissements de petite taille qui dispensent des programmes de premier cycle. Nous avons un large éventail d'établissements. Il y a 17 universités dans le Canada atlantique, qui desservent une multitude de collectivités grâce à leurs différents campus répartis d'un bout à l'autre de la région. La grande majorité de ces établissements, à l'exception, je dirais, de Dalhousie, de l'Université du Nouveau-Brunswick et de l'université Memorial, sont tous des petits établissements, comme je l'ai dit, qui se concentrent principalement sur l'enseignement de premier cycle.

Une autre caractéristique de la région est que nous attirons sur nos campus un nombre important d'étudiants venant d'autres provinces ou d'autres régions. À Dalhousie, par exemple, 40 p. 100 de notre population estudiantine vient de l'extérieur de la Nouvelle-Écosse. Il s'agit d'un phénomène inhabituel au Canada, et de notre point de vue, c'est un des aspects positifs de la vie universitaire, car les étudiants peuvent ainsi rencontrer d'autres étudiants de toutes les régions du pays et même de toutes les parties du monde.

Vu la répartition géographique à travers la région d'un aussi grand nombre de campus, nos universités sont très solidaires des besoins de développement de la collectivité. Il en a toujours été ainsi, mais l'importance de ce phénomène a été renforcée récemment du fait de l'émergence de l'économie du savoir et de la nécessité de transformer la structure économique du Canada atlantique. Nos universités jouent un rôle critique à cet égard.

Nous avons une responsabilité particulièrement importante à cet égard, car au sein de notre région, nous possédons une structure industrielle qui se caractérise surtout par un grand nombre de petites et moyennes entreprises, dont les capacités de recherche et de développement sont limitées. Ainsi, alors qu'à l'échelle nationale, les universités accaparent environ 25 p. 100 du financement total de la recherche, dans le Canada atlantique, ce pourcentage est d'environ 45 p. 100, et il s'ensuit que le secteur privé a un rôle beaucoup plus modeste. Nous avons l'énorme responsabilité de remplir notre mission dans le domaine de la recherche si nous voulons que la région transforme sa structure économique et évolue vers l'économie du savoir.

Dans notre région—je le souligne—nos institutions, quelle que soit leur taille, entretiennent d'étroites relations. Il en va particulièrement ainsi au niveau du cheminement scolaire des étudiants. Un grand nombre des étudiants diplômés qui fréquentent des établissements comme Dalhousie, Memorial ou l'Université du Nouveau-Brunswick sont issus des petites écoles de la région, et il existe par conséquent une très étroite relation dans notre esprit entre la solidité de la préparation qu'ils reçoivent dans ces petits établissements et leurs chances de progresser vers des établissements de recherche plus importants. En outre, les membres des facultés des petits établissements sont fréquemment choisis pour participer à des programmes d'études supérieures dans les grands établissements, où ils ont l'occasion de superviser des recherches et d'enseigner à des étudiants diplômés. Nous avons donc un système très étroitement intégré.

Le résultat, c'est que, peu importe la taille de l'établissement auquel nous appartenons, la recherche, dans toute la région, repose sur une capacité commune. Je crois que collectivement, nous avons le sentiment—que nous avons exprimé à de nombreuses occasions aussi bien aux gouvernements provinciaux qu'aux représentants du gouvernement fédéral—que l'avenir des programmes de recherche et d'innovation au Canada représente un enjeu majeur en ce qui nous concerne.

Dans ce contexte, nos besoins sont donc foncièrement similaires dans leur nature à ceux des universités du reste du pays. Dans une perspective régionale, il y a entre nous des différences subtiles, mais si l'on prend un tant soit peu de recul, je pense qu'il serait juste de dire que, dans la perspective du Canada atlantique tout au moins, nous avons foncièrement dans nos universités les mêmes besoins que ceux des universités situées dans les autres régions du Canada. Ce sont des besoins axés sur le perfectionnement des ressources humaines dont nous disposons pour avoir la capacité d'instruire nos étudiants et de mener à bien les programmes de recherche des établissements de notre région—et des programmes comme les Chaires de recherche du Canada jouent à cet égard un rôle vital—, l'amélioration du matériel dont nous disposons, notamment dans le domaine des sciences et de la médecine, pour poursuivre les recherches que nous avons entreprises—et des programmes comme la Fondation canadienne pour l'innovation sont essentiels à cet égard à cause de l'appui qu'ils apportent—et naturellement, l'accroissement des fonds que nous recevons des organismes subventionnaires pour financer les coûts directs des recherches.

• 0920

Globalement, et de façon générale, je dirais que, dans la région, tous ces programmes bénéficient d'un solide appui. Chacun a sa propre opinion à propos de telle ou telle règle mais, foncièrement, en bout de ligne, nous croyons tous qu'il s'agit de programmes nationaux essentiels, très bénéfiques pour notre région.

En ce qui concerne nos besoins, si l'on se place dans une perspective d'avenir et que l'on constate les handicaps que nous avons, premièrement, en ce qui concerne les coûts indirects des recherches, au fur et à mesure que la recherche se développe et que l'appui, notamment du gouvernement fédéral, progresse—heureusement, et nous nous en réjouissons énormément—cela impose d'importants nouveaux coûts à nos établissements. Chaque fois que nous obtenons une nouvelle subvention, il nous faut alors financer, à même le budget de nos établissements, les coûts que cela entraîne, le nouveau professeur ou l'entretien du nouvel équipement. À l'heure actuelle, personne ne nous accorde ce genre de soutien, mais cela draine nos ressources institutionnelles et en fin de compte, ponctionne ce qui devrait servir à satisfaire les besoins des étudiants.

Deuxièmement—et je pense qu'il s'agit d'un problème national mais il est particulièrement ressenti dans notre région du fait que nous avons un aussi grand nombre de vieilles universités—les infrastructures des campus tombent en ruine, et nous n'avons pas été en mesure de les entretenir correctement. Là encore, alors que nous progressons en tirant parti de tous ces nouveaux programmes, les insuffisances de nos installations fixes deviennent de plus en plus apparentes. Nous avons donc fortement besoin d'un programme d'infrastructure pour restaurer les campus dans bien des domaines.

Voilà ce que je voulais dire au sujet de ce plan d'action, et je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'exprimer sur la question.

En terminant, je vous prie de bien vouloir m'excuser, mais je dois prendre l'avion un peu plus tard ce matin et il va falloir que je m'en aille vers 10 h 30. Je m'excuse d'avance de devoir m'esquiver.

Je vous remercie de votre attention.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Traves.

Il n'y a pas de problème. Nous vous excuserons si nous n'avons pas fini d'ici là.

Je donne maintenant la parole à M. Davenport.

M. Paul Davenport (président, université Western Ontario; Association des universités et collèges du Canada): Merci.

Permettez-moi de commencer en félicitant le comité, et le gouvernement du Canada, de la vision exceptionnelle sous-jacente au plan d'action pour l'innovation. Nous vivons dans une économie axée sur le savoir. Notre future prospérité, en tant que Canadiens, et les types de professions auxquelles peut aspirer notre jeunesse dépendent énormément des investissements que nous effectuons actuellement dans la recherche. Ces investissements ne sont nulle part ailleurs aussi importants que dans nos universités.

Nous sommes donc sur la bonne voie; le plan d'action pour l'innovation est la solution. Permettez-moi de saluer en particulier les investissements qui ont été faits au cours des cinq dernières années dans les organismes subventionnaires; dans la Fondation canadienne pour l'innovation, de manière à ce que nous puissions améliorer nos infrastructures fixes; et dans le Programme des chaires de recherche du Canada, de manière à ce que nous ayons la possibilité de recruter de nouveaux chercheurs de premier plan.

Quelle est l'étape suivante? Que devons-nous faire maintenant dans le prolongement de ces investissements? Je suis convaincu que pour tirer le meilleur parti de ces investissements, nous avons besoin de franchir une autre étape, je veux parler des coûts indirects de la recherche. Vous avez entendu notre président décrire le programme mis en place par nos principaux concurrents, aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en Australie. L'effet positif du financement des coûts indirects, son effet multiplicateur sur les coûts directs de la recherche, est bien compris dans tous ces autres pays. Le système fonctionne bien. Nous pensons que d'énormes avantages peuvent découler de l'introduction d'un tel système au Canada.

J'aime personnellement l'approche adoptée dans le rapport du CCST, où l'effet multiplicateur est modifié en fonction de la taille de l'établissement et où cet effet multiplicateur est particulièrement élevé dans les plus petites universités. Je pense que cela se justifie tout à fait dans notre contexte. Mais comme vous l'entendrez ce matin, toutes nos universités, qu'elles soient grandes ou petites, ont les mêmes besoins.

• 0925

Je voudrais maintenant vous décrire comment ces besoins se manifestent dans mon université.

À l'université Western Ontario, nous possédons une très bonne faculté de médecine. Elle attire des dizaines de millions de dollars en subventions de recherche chaque année. Nous ne touchons actuellement rien pour financer les coûts indirects des recherches qui bénéficient de la plupart de ces subventions, car elles viennent du gouvernement fédéral. Nous devons néanmoins assumer ces coûts. Nous devons fournir l'espace nécessaire. Nous devons fournir le chauffage, l'éclairage et l'électricité. Pour accommoder d'autres chercheurs, nous devons améliorer notre infrastructure informatique et nos bibliothèques. Nous acquittons tous ces coûts en prélevant sur le budget global de l'enseignement.

Nous publions ces chiffres dans notre rapport annuel, que l'on peut lire sur notre site Internet. Notre budget est un document public. Nous estimons que ce montant s'élève actuellement à environ 10 millions de dollars, une somme que nous devons intégrer dans les frais généraux et les autres coûts que nous devons assumer pour gérer la faculté de médecine simplement comme une faculté bénéficiant d'un financement moyen pour le Canada. Je ne parle pas ici d'une faculté qui reçoit un financement supérieur au financement moyen.

Nos étudiants le comprennent, et pour cette raison, ils sont fortement en faveur du financement des coûts indirects de la recherche. Si le président de notre population estudiantine, Mike Lawless, était ici aujourd'hui, il dirait la même chose: les étudiants veulent que ces frais indirects soient financés, car cela mettra fin au détournement des crédits du budget d'enseignement. Son association nationale, l'ACAS, s'est déclarée ouvertement en faveur du paiement des coûts indirects. Il s'agit donc d'une question à propos de laquelle il y a un consensus sur mon campus. Les étudiants, le corps professoral, le personnel administratif sont tous en faveur de ce programme.

Cela revêt toutefois maintenant une urgence particulière, et j'espère que vous le comprenez tous. Alors que s'annoncent un nombre impressionnant de départs en retraite qui s'étaleront sur les dix prochaines années, au moment où se retirent les gens de mon âge et d'un âge plus avancé qui ont été embauchés comme de jeunes enseignants faisant partie des premiers baby-boomers dans les années 60 et 70, on constate dans tous les campus... Prenons l'exemple d'une faculté dont les dix membres partent et où dix sont recrutés; je ne parle même pas en l'occurrence de l'expansion d'une faculté. Les dix membres de la faculté qui partent feront beaucoup moins de recherche que les dix qui arrivent. Les dix membres de la faculté qui arrivent, dans une université moyenne, en science, en médecine, en ingénierie, auront tous besoin de locaux. Ils auront tous besoin de subventions d'équipement. La demande qui s'exercera sera très forte simplement par suite du remplacement des membres du corps professoral qui prennent leur retraite par les nouveaux. Nous en sommes témoins à maintes et maintes reprises.

Vous avez entendu la même chose de la bouche de Tom Brzustowski du CNSNG en ce qui a trait à la demande de subventions de recherche. Cette demande se traduit dans mon milieu par une demande de locaux et de matériel informatique et ainsi de suite.

Comment régler ce problème? Comment peut-on faire en sorte que l'infrastructure soit à la hauteur des demandes? Grâce au financement des coûts indirects de la recherche.

Encore une fois, merci d'avoir élaboré le plan d'action pour l'innovation. L'environnement des universités canadiennes est aujourd'hui complètement différent de ce qu'il était il y a 10 ans. À l'époque, un jeune chercheur aux talents exceptionnels devait se poser la question suivante: Ai-je un avenir au Canada, ou faut-il que j'aille ailleurs pour réussir comme chercheur de premier plan? Nous pouvons maintenant le regarder dans les yeux et lui dire: oui, vous avez effectivement un avenir ici.

Mais faisons en sorte que cet avenir soit prometteur. Faisons en sorte que le plan d'action pour l'innovation bénéficie du financement des coûts indirects de la recherche.

Je vous remercie de votre attention.

La présidente: Merci, monsieur Davenport.

Madame Patterson, s'il vous plaît.

Mme Bonnie Patterson (présidente, université Trent, Association des universités et collèges du Canada): Merci, madame la présidente.

Permettez-moi de situer mes remarques dans leur contexte. Je m'efforcerai d'être concise par crainte de répéter ce que mes collègues qui viennent d'établissements beaucoup plus importants ont déjà dit.

Notre université est la deuxième des plus petites universités de notre province et parmi les plus petites au Canada. Nous avons surtout des étudiants du premier cycle, environ 5 000 étudiants en tout, dont environ 200 poursuivent des études supérieures. Nos activités sont exclusivement centrées sur les arts et les sciences, et nous privilégions les études interdisciplinaires. Pour un petit établissement, nous menons beaucoup de recherches et nous nous situons à peu près au 30e rang sur 92 universités au Canada. C'est une position assez exceptionnelle pour un petit établissement.

Je voudrais maintenant parler de quelques questions qui sont importantes pour nous.

Premièrement, la recherche de l'excellence est fondamentale pour les petits établissements. Nous devons avoir la possibilité de répondre aux normes les plus exigeantes de qualité de la recherche, à la fois sur le plan national et sur le plan international, et les procédures en place pour y parvenir sont d'une importance critique pour nous en termes de réussite.

Un grand nombre de petites universités au Canada se retrouvent confrontées à deux situations. Elles ne sont pas habituellement situées dans de grands centres urbains, et elles ont une importance vitale pour les économies locales et régionales, ainsi que pour l'environnement social et culturel des collectivités au sein desquelles elles sont implantées et qu'elles desservent.

• 0930

Le deuxième facteur, pour beaucoup d'entre nous, est que nos activités sont principalement centrées sur les sciences sociales, et les lettres et sciences humaines. À Trent, par exemple, environ 60 p. 100 de nos activités se situent dans ce domaine. Par conséquent, l'accès aux ressources par l'intermédiaire d'organismes subventionnaires tels que le CRSH est essentiel pour que nos universités puissent soutenir la concurrence, pas uniquement sur le plan régional et national, mais sur le plan international.

En termes de renforcement des capacités en recherche, un grand nombre d'entre nous considèrent qu'il est d'importance vitale pour notre réussite de travailler sur des créneaux très précis. Nous devons développer une masse critique dans certains domaines spécifiques. Certains des programmes du gouvernement fédéral nous ont en fait permis d'occuper notre place actuelle parce qu'ils nous ont donné la masse critique nécessaire pour atteindre l'excellence.

Parmi les cinq principales raisons pour lesquelles les étudiants choisissent de s'inscrire dans une université, vous constaterez que l'excellence du corps professoral sur le plan de la recherche est un des principaux facteurs que les jeunes d'aujourd'hui prennent en considération. Cela s'applique autant aux petites universités qu'aux grandes ou à celles de taille moyenne.

Nous nous sommes rendu compte, du fait que nous avons pu mener à bien plusieurs programmes grâce à l'appui fédéral, que la réussite engendre la réussite. Il est important pour nous d'avoir les ressources voulues pour assumer nos frais indirects, et c'est pourquoi le financement des coûts indirects de la recherche est fondamental. Nous ne construirons jamais les bibliothèques les plus vastes et les plus riches sur nos campus, mais la possibilité d'avoir accès aux ressources des bibliothèques à travers le monde, grâce aux technologies de l'information qui sont maintenant disponibles, représente par exemple un facteur de réussite fondamental.

Notre capacité à équiper nos laboratoires, de manière à limiter les déplacements de nos chercheurs—aussi bien les étudiants que les professeurs—qui ont besoin d'avoir accès à certaines installations fixes est importante. Nous recevons généralement moins de dons. Nous avons moins de flexibilité financière et pourtant nous avons les mêmes besoins en termes de soutien de base et de financement des frais indirects de la recherche que les grands établissements. Maintenant que nous connaissons une plus grande réussite, un de nos besoins pressants se situe, bien sûr, dans le domaine de la recherche et de l'administration des subventions. Voilà un simple exemple de ce que le financement des frais indirects de la recherche nous permettrait de faire de façon plus appropriée.

Je m'arrête ici, vu que mes confrères feront d'autres commentaires qui compléteront les miens, et je vous remercie de consacrer votre temps, vos efforts, votre énergie et votre réflexion à des questions qui ont une importance nationale.

Je vous remercie de votre attention.

La présidente: Merci, madame Patterson.

La parole est maintenant à M. Barnard.

M. David Barnard (président, Université de Regina): Merci.

Je représente l'Université de Regina, mais je pense également représenter les autres universités qui participent au développement de l'innovation aux plans régional, social, culturel et économique. Je vais essayer de situer mon université dans un contexte quelque peu différent.

Nous avons entrepris, ces dernières années, un exercice de planification à grande échelle, qui a donné le jour à un ensemble de thèmes de recherche que nous considérons adaptés aux réalités d'un établissement de taille moyenne implanté dans les Prairies canadiennes. Nous avons renouvelé vigoureusement notre corps professoral, si bien que d'ici l'été prochain, entre 40 et 50 p. 100 de nos enseignants auront été avec nous depuis moins de cinq ans.

L'ensemble de notre activité universitaire dans le domaine de la recherche a progressé plus rapidement que la moyenne nationale, ce qui nous a aidés à contribuer à l'innovation et à l'amélioration de la compétitivité régionale et, nous l'espérons, à la compétitivité du pays. Nous avons planifié et mis en oeuvre un ensemble complet de projets de construction et de rénovation pour nous aider à faire face à ces changements. Nous attirons un plus grand nombre d'étudiants.

Nous rattrapons nos confrères dans les autres régions du pays, dans certains domaines. Par exemple, nous venons tout juste de mettre en place un bureau du transfert de la technologie, financé en partenariat avec la ville. Nous avons entrepris une série de projets de recherche innovateurs que nous jugeons correspondre aux besoins particuliers de notre province.

Dans ce contexte, plusieurs principes sont importants pour nous. Premièrement, je placerai l'évaluation de la qualité. Nous n'attendons pas d'aide pour des travaux médiocres, mais nous avons besoin d'appui pour les travaux novateurs de haute qualité qui sont importants dans notre province.

Deuxièmement, nous avons des préoccupations régionales et non urbaines. Ainsi, en Saskatchewan, il y a de grands espaces, mais une population très peu nombreuse. Un pourcentage croissant de la population est d'origine autochtone. Il s'agit d'une réalité que nous prenons en compte à travers un partenariat avec le Saskatchewan Indian Federated College, mais c'est aussi une réalité sous-jacente à notre programme de développement et à l'établissement de nos priorités.

Il y a, en troisième lieu, notre capacité à construire. On a dit que si, dans le passé, les villes étaient caractérisées par la présence de cathédrales, aujourd'hui, les villes se caractérisent souvent par la présence d'universités en tant que centres d'innovation. Ceux d'entre nous qui cherchent à mettre en place des capacités de développement culturel, économique et social d'un bout à l'autre du pays ont besoin de bénéficier d'un soutien pour appuyer tout un éventail d'activités, notamment d'un soutien régional.

• 0935

Le quatrième principe est le financement de nouvelles recherches. Je l'ai dit, nous avons renouvelé massivement notre corps professoral. La demande que ses membres exercent sur l'université est phénoménale, comme mes confrères l'ont déjà mentionné, tout comme la demande qu'ils exercent sur les organismes subventionnaires.

Il est important que ces jeunes membres des facultés, comme mes confrères l'ont déjà souligné, qui sont généralement plus portés à faire des recherches que ceux qu'ils remplacent et qui contribueront ainsi à l'innovation et à la productivité du pays, obtiennent le soutien nécessaire. Il est essentiel notamment qu'ils obtiennent le financement dont ils ont besoin pour attirer des étudiants diplômés et former un plus grand nombre de chercheurs qui contribueront à assurer l'avenir du pays.

Une autre chose sur laquelle je voudrais insister, c'est le financement des sciences sociales, et des lettres et sciences humaines. Je sais que les discussions ici sont centrées sur l'industrie, la science et la technologie, mais je tiens à souligner la complémentarité de ces disciplines qui contribuent toutes mutuellement au développement intellectuel. En outre, à titre d'exemple, l'un des projets les plus novateurs entrepris par mon université repose sur une collaboration entre le département du génie informatique et le département du cinéma et du vidéo qui doit aboutir à la construction d'un studio laboratoire. Dans le prolongement de cette initiative, nous établissons des partenariats avec l'industrie cinématographique provinciale et nous participons ensemble à la mise au point d'un plateau de tournage qui contribuera encore plus au développement de l'industrie locale. Cela n'a pu voir le jour que grâce au mariage des humanités et des sciences.

J'aimerais, comme mes collègues, insister sur l'importance qu'a pour nous le financement des coûts indirects de la recherche. J'ai mentionné que nous avions entrepris une série de travaux majeurs pour moderniser nos installations. Il nous a fallu, comme nos homologues, pour répondre au développement de nos activités axées sur la recherche et l'innovation, fournir des locaux, loger les services de gestion et de comptabilité, acheter des équipements, mettre en place des bases de données et ce, sur une bien plus grande échelle que ce qu'exigeait la croissance de notre population estudiantine.

J'aimerais également mentionner que même pour des universités relativement petites et récentes comme la nôtre—notre campus n'a qu'à peu près 40 ans—la maintenance pose un problème, car un grand nombre de nos immeubles les plus importants ont été construits pour une durée de vie prévue de quelque chose comme 30 ou 35 ans. Même des universités plus récentes comme l'Université de Regina arrivent au bout de ces premières décennies et doivent entreprendre des rénovations pour répondre à des normes plus rigoureuses en matière de santé et de sécurité.

Une fois encore, j'aimerais vous remercier de m'avoir donné la possibilité de vous présenter quelques facettes du point de vue d'une petite université régionale. Je pense que nos préoccupations rejoignent de bien des façons celles de nos confrères dans d'autres régions.

La présidente: Merci, monsieur Barnard.

Nous en arrivons maintenant aux questions, et je vais commencer par donner la parole à Mme Girard-Bujold.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Merci, madame la présidente.

Messieurs, madame, c'est avec un très grand intérêt que je suis venue ici, au Comité de l'industrie. Je viens d'une région où il y a une université, l'Université du Québec à Chicoutimi. Vous êtes venus nous parler des petites universités et des programmes subventionnaires du gouvernement fédéral, ce qui m'interpelle beaucoup. Il y a beaucoup de choses que j'aimerais vous entendre dire.

Je ne sais pas si vous venez pour la plupart des régions. Vous ne représentez probablement pas de grosses universités comme l'Université de Montréal. Chez nous, en région, les gens trouvent que les petites universités sont pénalisées dans le cadre des subventions que le gouvernement octroie pour l'innovation. Premièrement, cela leur donnerait une trop grosse charge de travail. Elles en ont déjà trop. Elles n'ont pas les locaux nécessaires. Elles ont peut-être les chercheurs qu'elles doivent avoir, mais elles leur demandent... Également, elles disent que les frais indirects, dans le cadre des programmes existants du gouvernement fédéral, sont très onéreux.

Pensez-vous que parmi ces nouveaux programmes, il devrait y avoir des programmes ciblés pour les petites universités, avec des budgets appropriés aux demandes globales de ces universités? C'est ma première question.

M. Robert Giroux: Si vous me le permettez, madame, je vais répondre et je pourrai ensuite demander à mes collègues d'ajouter certaines choses.

Vous avez mentionné deux choses très importantes. Vous avez mentionné le fait que les frais indirects sont très onéreux. Comme vous avez dû l'entendre dire très fermement, parce que chacun de mes collègues l'a mentionné, il est important de payer les frais indirects rattachés aux subventions directes de la recherche.

• 0940

Le Conseil consultatif des sciences et de la technologie a fait une étude des frais indirects. C'est un conseil qui rend compte au gouvernement. Il a recommandé très fortement le paiement des frais indirects, mais il a aussi dit que la charge était proportionnellement plus élevée pour les petites universités que pour les plus grandes universités. C'est pour cette raison que la formule qu'il a recommandée accorderait aux petites universités une somme qui pourrait aller jusqu'à 90 p. 100 des frais indirects. Pourquoi le conseil a-t-il fait ça? C'est pour reconnaître le point que vous avez soulevé. C'est un grand pas dans la bonne direction.

Le deuxième point, c'est qu'on s'est aperçu que les petites universités... Vous connaissez votre université beaucoup mieux que moi, mais je sais qu'étant en région, elle est très bien positionnée pour faire du travail du côté de l'aluminerie, des ressources naturelles, de l'environnement, de la qualité des eaux, etc. Cette université pourrait, si on la positionnait bien, devenir une université d'excellence dans cette recherche. Elle l'est déjà, mais elle a besoin d'une poussée plus forte.

C'est pour cela que nous avons suggéré un programme qui ciblerait les petites universités. Les universités arriveraient avec un plan, elles diraient qu'elles veulent solidifier leur capacité dans tel secteur et elles feraient part de leurs besoins. Ce programme pourrait être disponible pour financer ces universités du côté de la capacité de recherche.

Veux-tu ajouter quelque chose, Paul?

M. Paul Davenport: Madame, j'ai été économiste à l'Université McGill pendant 16 ans. J'ai été membre du Conseil des universités. J'ai travaillé avec des chercheurs à Trois-Rivières sur le développement régional. Joseph Chicha était à la direction à ce moment-là. Comme vous le savez sans doute, il y a beaucoup de niches à Trois-Rivières, par exemple dans le développement régional, où on fait de l'excellente recherche.

Donc, à mon avis, il est possible d'être à la fois assez petit et excellent. Je crois fermement, comme vient de le dire le président, qu'à Trois-Rivières on a autant besoin d'argent pour ces frais indirects de recherche que l'Université de Montréal. Ce sont des universités de tailles différentes, mais les besoins sont les mêmes, et le renforcement de l'excellence se fera de la même façon à Trois-Rivières.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Je suis très heureuse que vous m'ayez précisé cela. Pensez-vous qu'avec le processus actuel, les chercheurs des petites universités sont pénalisés par les pairs qui étudient les demandes de subventions? Je suis d'accord que ce soit évalué par les pairs, mais est-ce que les pairs, lorsqu'ils évaluent des dossiers, prennent vraiment le pouls des régions? Sont-ils conscients de l'importance des régions? Font-ils une analyse pointue des régions? Je me dis toujours qu'on n'a jamais, dans ces comités de sélection, des gens qui viennent des régions. Ce sont toujours des gens qui viennent des grands centres, qui viennent de Montréal, de Toronto et de Vancouver, et qui ne sont pas vraiment conscients de l'importance de la recherche en région, dans nos universités. Est-ce que vous sentez cela?

M. Robert Giroux: Si vous le voulez bien, madame la présidente, je vais demander à Mme Patterson de répondre à la question. Elle est d'une université en région.

[Traduction]

Mme Bonnie Patterson: Merci. Vous posez des questions très importantes. J'ai débuté ma carrière dans un très grand établissement, puis j'ai passé 18 ans dans un établissement de taille moyenne et je suis maintenant dans une très petite université; je comprends donc très bien les enjeux auxquels fait face votre université.

Pour moi, nous avons besoin d'assurer la réussite aussi bien des grandes que des petites universités du Canada. Les cibles que nous avons spécifiquement fixées récemment par le biais de nos programmes se sont avérées extrêmement utiles. Certaines des propositions auxquelles a fait allusion M. Giroux et dont on discute actuellement dans le cadre du processus de consultation continueront de nous aider à cet égard.

• 0945

Un des problèmes fondamentaux auxquels nous faisons face dans les petits établissements, toutefois, quand nous soumettons des propositions qui répondent aux critères d'excellence des conseils subventionnaires ou d'autres types de programmes, ce n'est pas la partialité, mais le niveau des ressources disponibles. Notre expérience démontre que parmi le corps enseignant, il y a de nombreux professeurs, particulièrement les plus jeunes, dans les établissements les plus petits, qui satisfont aux critères d'excellence et dont les activités, de par leur importance et de par leur nature, sont tout à fait à la hauteur de la concurrence. Mais en bout de ligne, quand il ne reste plus d'argent, il y en a dont les travaux ne sont pas financés, non pas à cause de leur qualité, mais faute de ressources suffisantes.

Je pense donc qu'il y deux volets à la question. Premièrement, il faut s'assurer que la structure des programmes est satisfaisante. Je pense que nous avons beaucoup progressé en ce sens, mais qu'il y a encore beaucoup à faire. Mais en deuxième lieu, il y a le niveau des ressources disponibles. L'expérience de nos professeurs démontre que cela constitue un facteur aussi limitatif pour eux que certains autres problèmes d'ordre structurel, auxquels vous avez fait référence.

M. Robert Giroux: Madame la présidente, deux autres de mes confrères aimeraient faire des remarques à cet égard, si cela vous convient. Il s'agit de M. Barnard et de M. Traves.

M. David Barnard: Merci. J'aborde la question avec une certaine appréhension, ayant étudié à Toronto et à Vancouver, dont il a été question dans l'introduction de la question, puis ayant travaillé à Queen's pendant plusieurs années.

Mme Paddy Torsney: Tous de petits établissements.

M. David Barnard: Tous de petits établissements.

L'Université de Regina est assez différente. Je crois que le gouvernement doit s'efforcer d'équilibrer ses objectifs politiques et recourir à des outils complémentaires lorsqu'il s'agit d'atteindre des objectifs complémentaires. Comme je l'ai déjà mentionné, nous avons besoin de mettre nos ressources en valeur et de reconnaître les priorités qui peuvent avoir, dans certaines régions comme à Regina, une plus grande importance que dans d'autres centres plus importants. Mais j'espère que nous n'allons pas nous écarter d'un intérêt marqué pour la qualité et l'excellence, comme base du travail accompli dans notre pays. Comme le président l'a déjà expliqué, il est possible d'avoir des programmes qui capitalisent sur une appréciation générale de l'excellence, et qui reconnaissent également qu'il existe des demandes différentes dans certaines catégories d'établissement.

Il faut donc que nous mettions en valeur notre potentiel. Il faut que les priorités régionales soient reconnues, mais, j'espère, pas au détriment de la qualité, qui doit être à la base de nos activités, comme cela a déjà été dit. Je pense que l'expérience de mon propre établissement à cet égard est encourageante. Mme Patterson pourrait, je pense, dire la même chose de l'établissement qu'elle dirige, lorsque nous nous sommes retrouvés en concurrence avec des établissements de plus grande taille dans le cadre des programmes lancés récemment, nous avons réussi à obtenir des subventions pour des recherches que nous considérons comme étant de très haute qualité dans des domaines importants pour notre région.

M. Tom Traves: J'aimerais répondre et fournir un exemple précis qui se rapporte directement à vos préoccupations, que je partage. Mon université possède une des plus petites écoles de médecine du Canada, et depuis de nombreuses années, quand nous nous soumettions au processus d'évaluation par les pairs utilisé, pour allouer les subventions, par l'ancien Conseil de recherches médicales, nous avions l'impression que nous étions moins compétitifs que des chercheurs qui appartenaient à des grandes écoles de médecine dans de grands établissements.

Nous n'avons jamais eu l'impression que nous faisions l'objet d'une discrimination quelconque, mais nous étions conscients d'une certaine réalité, à savoir que nous formulions une proposition, essentiellement à partir d'une idée intéressante, et qu'on nous demandait ce que nous avions déjà fait pour lancer le projet et quels étaient nos antécédents dans le domaine en question? Nous nous retrouvions en concurrence avec des savants oeuvrant dans des universités qui recevaient plus de dons et qui étaient situées dans de grands centres urbains, et eux, non seulement ils proposaient de bonnes idées, mais ils avaient déjà investi dans le projet des sommes substantielles qu'ils avaient reçues de leur établissement ou de leur province.

Ainsi, devant les deux types de propositions, il était logique de penser que celles provenant des autres établissements étaient supérieures. Les travaux étaient déjà plus avancés. Ils avaient démontré leur capacité dans le domaine. Et, du point de vue de la bonne gestion des crédits de recherche provenant des fonds publics, il était aussi logique d'investir dans l'autre école. Mes collègues le reconnaissaient. Ils ne se sont jamais plaint des règles. Ils souhaitaient simplement avoir la possibilité de concourir dans des conditions similaires.

• 0950

Heureusement pour nous, le Conseil de recherches médicales a mis en place, il y a plusieurs années, un programme qui, si je me souviens bien, s'appelait le Programme de partenariats de recherche. Ce programme réservait un montant déterminé de ce qui était essentiellement des subventions de démarrage—des petites subventions—à plusieurs établissements de petite taille, ce qui nous permettait d'investir dans nos bonnes idées.

Ainsi, quand nous nous mesurions aux chercheurs des universités de plus grande taille et mieux financées, nous avions déjà réalisé les mêmes investissements qu'eux dans nos projets et fait les mêmes progrès. Nous pouvions donc nous mesurer à eux dans un cadre de compétition impartiale. C'est révélateur, le nombre de nos subventions de recherche a augmenté substantiellement par la suite. Et je pense que ce même concept se retrouve dans certaines des suggestions que nous avons présentées à propos des programmes que l'on pourrait envisager.

Ce n'est pas en l'occurrence que le système soit partial, foncièrement, il est basé sur la qualité et l'excellence. Je pense qu'il s'agit de valeurs que nous devons absolument préserver. La question est de savoir comment nous pouvons nous assurer que des établissements différents aux capacités différentes sont en mesure de se faire effectivement concurrence? C'est au centre de ce que nous avons proposé. Nous voulons nous concentrer sur cet aspect-là, plutôt que de chercher à pénaliser tous les intéressés parce que nous aurions un système reflétant un préjugé contre l'excellence et contre la concurrence.

[Français]

La présidente: Madame Girard-Bujold, c'est à vous.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Vous avez dit plus tôt, monsieur Traves, que vous aviez un programme régional. A-t-il été établi avec la province ou s'il a été mis sur pied dans le cadre d'un programme fédéral qui visait à ce que vous puissiez concurrencer les autres universités du Canada d'égal à égal? Est-ce bien ce que vous vouliez dire?

À partir du programme, vous avez adopté des priorités régionales pour vos petites universités. Vous avez dit plus tôt qu'il y a 17 universités, dont deux plus petites, et 21 campus dans la région de l'Atlantique. Si je comprends bien, vous recherchez la globalité de tous ces éléments, ce qui vous permettra de mieux vous mesurer à la concurrence à l'échelle du Canada. Ai-je bien compris?

Ma question porte sur cet aspect des choses. Les universités en région, que vous représentez, devraient-elles adopter la même approche que vous pour être plus reconnues, afin que les pairs saisissent combien est important pour le développement d'une région ce que vous avez ciblé au point de vue régional?

[Traduction]

M. Tom Traves: Vous avez posé deux questions. Pour répondre à la première, je dirais qu'il s'agissait d'un programme national financé par le Conseil de recherches médicales. Ce programme permettait d'obtenir des crédits qui devait être complétés par une somme égale d'origine provinciale, ce que notre province avait accepté de faire. Cela donnait donc naissance à un pool d'investissement pour les types de projets que j'ai décrits tout à l'heure. Mais au départ, l'idée est partie d'un programme national. Je pense que cela a eu un effet multiplicateur en encourageant les provinces à investir de cette manière.

Je dirais que même si les provinces sont, à l'occasion et à juste titre, froissées que d'autres établissent les priorités dans ces domaines, en l'occurrence, elles ont été très heureuses de voir le fédéral investir et ont injecté plus d'argent dans le système pour que la recherche médicale bénéficie des deux sources de financement dans notre région. Je pense donc que cela a été une expérience réussie.

En ce qui a trait à l'établissement des priorités, au ciblage des recherches, et ainsi de suite dans notre région, nous sommes des établissements provinciaux. Nous sommes financés par la province. Nous reconnaissons que nous avons à la fois des responsabilités provinciales et régionales. Naturellement, c'est compliqué par le fait que nous fonctionnons non seulement dans le cadre de juridictions provinciales, mais également dans l'optique d'un contexte régional plus vaste.

Cela dit, nous avons coopéré très étroitement avec des établissements dans toute la région et même à travers le pays. Je pense plus particulièrement au récent Fonds d'investissement de l'Atlantique qui est maintenant en place dans notre région et dans le contexte duquel on a explicitement identifié le besoin de partenariats inter-institutionnels et de coopération régionale. Un investissement substantiel a donc été fait par nos universités en faveur du développement d'une capacité organisationnelle permettant de collaborer beaucoup plus étroitement aujourd'hui que jamais par le passé.

• 0955

Nous reconnaissons également la nécessité de nous focaliser. Mon université est la plus grande des Maritimes, mais nous sommes, par comparaison aux autres grands établissements du pays, une université de taille moyenne. Nous avons seulement 14 000 étudiants, alors que d'autres établissements en ont deux fois, trois fois, voire quatre fois plus. Nous sommes donc conscients de la nécessité de nous focaliser, aussi bien à l'intérieur de notre établissement qu'à l'intérieur de la région.

Quand elles ont élaboré des plans dans le cadre des perspectives offertes par le Fonds d'investissement de l'Atlantique, nos universités ont coopéré pour recenser un petit nombre de priorités régionales. Ces priorités ont été établies au départ par les universités entre elles, mais évidemment en étroite collaboration avec les fonctionnaires provinciaux et fédéraux, par l'intermédiaire de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique et d'Industrie Canada, et un consensus a donc émergé dans la région voulant que ce soit des domaines—il s'agissait de domaines assez évidents—qui sont liés à la structure de notre économie et aux types de débouchés qui existent actuellement dans l'économie du savoir. On a donc affaire à une fusion de perspectives locales et particulières plutôt qu'à des perspectives générales. C'est, je pense, un progrès satisfaisant en ce qui me concerne.

La présidente: Merci.

Merci, Madame.

Monsieur McTeague, s'il vous plaît.

M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.): Merci, madame la présidente.

Bonjour. Certains d'entre vous ont fait allusion aux chaires de recherche, et c'est un sujet qui m'intéresse moi aussi. Ce n'est pas la première fois, je sais, que vous comparaissez devant le comité pour en discuter. Nous avons rédigé un rapport il n'y a pas très longtemps—en juin dernier, si je ne me trompe—dans lequel nous faisions état de nos réserves à propos de la formule de répartition des chaires.

Le programme existe depuis un an. Des objections ont été faites par d'autres, mais l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université ont aussi souligné les faiblesses du programme—il pourrait entraîner certaines disparités entre les nantis et les autres. Je suis conscient que beaucoup d'entre vous viennent de petites universités et que vous avez peut-être plus à dire sur la question.

Mais maintenant que ce programme fonctionne depuis plus d'un an, pourriez-vous parler du problème de la répartition des chaires—les préoccupations que nous avions au départ, en 2000, étaient-elles valides ou non, votre université considère-t-elle ou non que des modifications doivent être apportées et, le cas échéant, quelles devraient être ces modifications?

M. Tom Traves: Je pourrais peut-être commencer. Cette question a certainement causé beaucoup d'agitation dans ma région. Comme je l'ai indiqué, il y a un grand nombre de petits établissements. Le programme a soulevé beaucoup d'appréhension au début, car on craignait beaucoup de se faire dévaliser—que les meilleurs cerveaux quittent nos établissements pour aller dans ceux qui étaient mieux financés et plus importants ailleurs dans le pays. Cette crainte s'est avérée fausse.

Dans mon université, nous avons perdu une personne. Mais parallèlement, nous avons attiré des gens d'autres établissements. Si on analyse la situation dans le contexte de la mobilité normale des gens en fonction de leur carrière, les appréhensions qui existaient au départ ne se sont foncièrement pas avérées.

Un autre élément qui, je pense, s'est révélé très satisfaisant—dans un sens, c'est dans la ligne des observations que j'ai faites à votre collègue il y a quelques instants—c'est que les petits établissements ont reconnu la nécessité de concentrer leurs efforts sur un plus petit nombre de chaires. Je pense qu'ils ont fait un excellent travail.

Ainsi, par exemple, si vous me permettez de citer un exemple, nous nous intéressons beaucoup, naturellement, dans notre région à l'exploitation du pétrole et du gaz, compte tenu du développement des fonds marins. Mes confrères de l'université St. Francis Xavier ont bénéficié, je pense, de six ou de sept chaires. Il s'agit d'un établissement de premier cycle, fréquenté par 3 500 à 4 000 étudiants. Ils ont décrété que leur priorité institutionnelle serait d'utiliser toutes ces chaires pour créer des capacités dans ce domaine.

Parallèlement, dans mon établissement, qui possède des programmes de doctorat dans un grand nombre de domaines liés à l'exploitation du pétrole et du gaz, nous avons également décrété que l'une de nos priorités serait de consacrer peut-être pas toutes nos chaires à ce secteur, mais une bonne partie d'entre elles. Nous avons collaboré très étroitement avec St. Francis Xavier pour mettre en place des activités complémentaires qui s'intègrent les unes aux autres, et assurer une compétence régionale.

Je pense que c'est un bon exemple d'une utilisation novatrice et disciplinée de ce programme. Cela a donné de très bons résultats pour tous les intéressés. Donc, si vous parliez du programme au président d'une petite université comme St. Francis, il se dirait très satisfait du résultat.

• 1000

M. Paul Davenport: Le programme des chaires de recherche du Canada est l'exemple d'une extraordinaire réussite. M. McTeague a raison de rappeler qu'au départ, il avait fait naître de nombreuses appréhensions dans certaines universités qui craignaient de se faire dévaliser et d'être désavantagées. Mais notre expérience jusqu'ici montre que ces chaires ont un effet très positif d'un bout à l'autre du pays.

Elles ont permis de réaliser des choses. Premièrement, elles ont permis le recrutement de personnes exceptionnelles qui n'auraient pas pu être embauchées autrement. Deuxièmement, ce qui est plus important encore, elles nous obligent, individuellement, dans chacun de nos établissements, à identifier et à développer nos compétences.

Dans mon université, les chaires ont eu un effet marqué sur la culture de l'établissement en nous aidant à prendre un certain recul et à chercher à exploiter nos points forts en nous posant les questions suivantes: En quoi sommes-nous les meilleurs dans le domaine des sciences sociales? En quoi sommes-nous les meilleurs en lettres et en sciences? Dans quels autres domaines sommes-nous les meilleurs? Ce programme nous oblige à atteindre une masse critique pour pouvoir nous mesurer aux meilleurs d'Amérique du Nord et dans le monde.

Notre ministre des Finances l'a dit très clairement: dans notre économie axée sur le savoir, être le deuxième, être médiocre, ne suffit pas. Je pense que M. Martin a tout à fait raison. Nous devons développer des domaines de compétence dans certaines de nos universités, comme la mienne, ou dans les plus grandes du pays, pour pouvoir nous mesurer aux meilleurs. Je pense que les chaires nous aideront à le faire.

Le programme des chaires a donné de très bons résultats, et c'est un programme dont nous pouvons tous être fiers.

Mme Bonnie Patterson: Je me fais l'écho d'un grand nombre des remarques de mes confrères, mais je voudrais ajouter une ou deux autres choses. Premièrement, nous avons constaté, en ce qui concerne les chaires, que plus le programme est flexible, plus il est facile et simple de résoudre les problèmes qui se posent dans certaines disciplines. Au moment où certains de nos plus grands chercheurs approchent de la retraite, la possibilité de faire occuper une chaire attribuée à un professeur en fin de carrière par des professeurs débutants, dans deux disciplines, s'est avérée très utile en ce qui nous concerne.

Je tiens à dire que la structure du programme est satisfaisante. Nous avons effectivement constaté une certaine mobilité et nous avons perdu certains enseignants qui sont allés dans des établissements plus importants. Nous en avons accueilli d'autres. Ce sont les effets de la mobilité et de la concurrence dans le milieu universitaire, mais il est important d'avoir une certaine marge de manoeuvre dans le cadre de notre plan stratégique et de nos objectifs en ce qui concerne les chaires.

Nous avons aussi appris, toutefois, que le programme pose deux ou trois problèmes qui sont extrêmement importants pour nous.

Nous avons eu la chance de pouvoir créer des chaires de recherche très tôt, et nous voyons maintenant l'effet d'aimant de ces chaires sur les gens intéressés à poursuivre des études post-doctorales. Or, notre capacité en matière de recherches post-doctorales, du point de vue des ressources, n'est pas la même dans un petit établissement que dans les grands établissements. Le programme soulève aussi d'autres problèmes auxquels nous sommes maintenant confrontés et auxquels nous devons apporter des solutions.

Autre exemple des défis que cela nous pose dans un petit établissement: les chaires dotent, au départ, certains membres du corps professoral d'une capacité particulière qui va leur permettre d'étendre et d'approfondir un certain programme. Toutefois, d'autres professeurs qui ont les mêmes compétences ou des compétences égales, dans le domaine de la recherche ou de l'enseignement, ne bénéficient pas des mêmes opportunités. Dans un petit établissement comme le nôtre, le programme a créé de nouveaux défis intéressants, mais des défis qui mettent toutefois en jeu les ressources.

M. David Barnard: Je voudrais me faire l'écho de toutes les choses positives qui ont été dites par mes confrères. Voilà, à mon avis, l'exemple même d'un programme dans le cadre duquel des objectifs politiques différents ont été accommodés. Au départ, il a été conçu pour exploiter la qualité reconnue, et il a été légèrement modifié pour permettre la création de capacité.

Dans mon université, qui en a bénéficié, nous faisons très attention à la façon dont nous utilisons nos 11 chaires, mais nous nous en sommes servi pour attirer des gens autour desquels nous allons reconstruire.

À l'heure actuelle—mais je ne veux pas donner trop de détails ici—, nous essayons de faire venir au Canada quelqu'un de l'étranger autour de qui nous allons reconstruire l'un de nos départements qui a besoin d'être rajeuni.

• 1005

Si nous n'avions pas eu la chaire et les ressources que cela implique, l'université aurait été obligée, pour attirer cette personne, d'offrir elle-même de tels avantages, ce qui, pour nous, aurait été fort difficile.

Je me fais donc l'écho de tous ces commentaires. Je pense que le programme des chaires soulève des défis, mais que c'est néanmoins une réussite.

M. Dan McTeague: Je n'ai pas d'autres questions, madame la présidente.

La présidente: Madame Torsney.

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Madame Patterson, vous avez dit que l'un des cinq critères de classement les plus déterminants dans le choix d'une université était la qualité de la recherche. Cela m'a un peu surprise parce que j'ai fréquenté un grand établissement. Je dis tout le temps aux étudiants d'aller dans une université où la qualité de l'enseignement est vraiment excellente, parce que c'est plus important.

J'ai un diplôme en administration des affaires et je leur dis de commencer par faire leurs humanités et ensuite, un MBA.

J'ai adoré faire les études que j'ai faites, mais je pense qu'il y a un autre moyen de s'y prendre.

Je leur dis également d'étudier ailleurs au Canada que dans leur ville d'origine est très important parce que cela fait partie également de l'expérience qu'ils acquièrent. Trent et Dalhousie sont définitivement sur ma liste, et je n'ai fréquenté ni l'une ni l'autre de ces universités.

Ce qui m'inquiète, c'est que plus nous nous concentrons sur ces aspects des choses qu'est la recherche et plus nous parlons de prendre 10 millions de dollars du budget de l'enseignement pour soutenir la recherche, plus nous nous retrouvons dans une espèce de course-poursuite vraiment étrange; et moins nous nous occupons véritablement d'enseigner. Le professeur qui inspire vraiment et qui enseigne bien ne participe pas à cette course, et cela tourne à son désavantage.

J'aimerais bien savoir comment vous envisagez cela.

En deuxième lieu, je me demande parfois qui est aux commandes et quel est le processus que vous suivez pour décider de ce qui va être financé. C'est une bonne chose que Peter Adams soit venu ici parce que, naturellement, c'est un excellent professeur qui enseigne dans une grande université.

Nous avons voyagé dans l'Arctique, et il n'y a qu'une seule personne au Canada qui fait des recherches sur l'Arctique. Il a maintenant probablement plus de 70 ans.

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Non, pas du tout.

Mme Paddy Torsney: Non, pas vous; l'autre, celui qui enseigne à Guelph.

Plutôt que d'attirer ce dont vous pouvez tirer le plus de profit, et ce qui peut être la source d'autres fonds de recherche débloqués par des entreprises privées, des gouvernements provinciaux, enfin, l'entité qui s'occupe de la toute dernière priorité, est-ce que quelqu'un réfléchit et se demande: qu'est-ce qui a de l'importance pour l'avenir du pays? Qui donc fait des recherches sur l'Arctique? Quelles sont les choses qui doivent être faites au Canada? Qui est sur les rangs pour les faire? Comment devons-nous nous y prendre pour acquérir cette capacité? Alors que de plus en plus de gens prennent leur retraite, qui s'occupent véritablement de s'assurer que nous finançons ce que nous devrions financer? Peut-être n'est-ce pas un sujet porteur à l'heure actuelle, mais l'environnement du Nord va être porteur à un moment ou à un autre, du moins, c'est à espérer.

M. David Barnard: Vous avez soulevé plusieurs questions. J'aimerais répondre à deux ou trois d'entre elles. Je sens une certaine impatience chez les autres...

Mme Paddy Torsney: Les voilà tous excités.

M. David Barnard: Je note que madame a un diplôme de McGill. Je ne veux en tirer aucune conclusion.

Mme Paddy Torsney: C'est la seule université que vous n'ayez pas fréquentée.

M. David Barnard: Il y a un lien logique entre l'excellence de l'enseignement et l'excellence de la recherche. Vous présentez cela presque comme une dichotomie mais, à mon avis, c'est une fausse dichotomie.

Il serait intéressant de comparer nos expériences concrètes mais, dans mon cas, c'est un excellent professeur qui était également l'un des meilleurs chercheurs du département où il enseignait qui m'a stimulé intellectuellement. Je ne me suis rendu compte de cela qu'une fois passionné par son enseignement. Beaucoup d'autres vous raconteront la même histoire.

Je sais d'expérience, ayant été chef de département et ayant occupé diverses fonctions administratives que, parfois, nos meilleurs professeurs sont également nos meilleurs chercheurs. Il est rare de trouver des professeurs qui savent véritablement stimuler intellectuellement leurs étudiants et qui ne sont pas eux-mêmes stimulés intellectuellement, et impliqués dans des recherches dans leur discipline. Cela peut arriver, mais je ne pense pas que ce soit le cas de la majorité.

J'aimerais répondre à une des autres questions que vous avez posées. Qui s'occupe de ce qui est important? Beaucoup d'universités s'intéressent à des choses qui sont importantes pour le pays et pour nos régions, et agissent en conséquence—en ce qui concerne l'énergie, par exemple.

• 1010

Nous n'intervenons pas dans le Nord, mais en Saskatchewan, c'est certain, nous sommes dans une province où il existe d'énormes réserves de pétrole lourd, sous terre, des réserves inexploitées. Potentiellement, cela représente des milliards de dollars et, toujours potentiellement, des dizaines de milliers d'emplois.

Nous sommes également dans une province qui produit une grande partie de son électricité en brûlant du charbon maigre, ce qui génère des émissions extrêmement nocives. Un de nos projets de recherche a été entrepris en partenariat avec le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial et plusieurs entreprises du secteur privé; il a pour objet de récupérer le dioxyde de carbone provenant des émissions de gaz de carneau rejeté par les grandes centrales électriques de la province, et de le séquestrer sous terre dans de grands gisements de pétrole. Apparemment, cette opération a de merveilleux résultats étant donné qu'elle vous permet de prendre une chose dont on ne veut pas dans l'atmosphère, de la mettre sous terre et de faire jaillir de la terre, grâce à la pression exercée par le dioxyde de carbone, du pétrole lourd.

Le projet auquel nous collaborons, qui est le plus vaste dans le monde à l'heure actuelle, est en cours au sud de la province. Et même si ma propre formation est dans le domaine des sciences informatiques et de la théologie... Je ne suis pas ingénieur du pétrole, mais mes collègues qui le sont me disent que nous sommes bien près, avec ce projet, de mettre au point une technologie miracle.

Je cite cela uniquement à titre d'exemple. Je pense que je pourrais vous en donner d'autres—de différentes réalisations de mon université, et mes collègues pourraient faire de même et vous en citer beaucoup. Par ailleurs, le président pourrait sans aucun doute vous donner des exemples de projets semblables entrepris d'un bout à l'autre du pays.

Je ne crois pas que les universités cherchent uniquement à faire des choses tape-à-l'oeil, qui attirent d'autres fonds. Comme l'a dit le président Davenport, je suis d'avis que nous devrions essayer d'évaluer nos atouts, et que souvent ces atouts sont façonnés par les conditions qui existent dans nos régions et par les priorités régionales auxquelles nous réagissons.

La présidente: Quelqu'un veut-il répondre?

Madame Patterson.

Mme Bonnie Patterson: Merci.

Je comprends un peu vos observations ayant été moi-même doyen de l'École d'administration des affaires et étant actuellement responsable d'un établissement d'arts libéraux et de sciences, ce qui me ravit.

Permettez-moi de préciser un peu ce que j'ai voulu dire quand j'ai parlé de l'intérêt des étudiants à travailler avec des chercheurs de haut niveau. Vous remarquerez que j'ai utilisé l'expression «les cinq principaux critères». Et je pense que vous avez absolument raison de dire que tout en haut de la liste, il y a de bons professeurs, suivi de la réputation des programmes de formation générale très solides. Troisièmement, il y a l'accès aux professeurs et, quatrièmement, le travail avec des chercheurs de première classe. Donc, parmi les critères qui définissent ce qui est important aux yeux des étudiants, la recherche occupe une place de choix.

En ce qui concerne notre établissement, je vais vous donner un exemple qui est peut-être l'opposé de ce qui vous inquiète—c'est plutôt une conséquence heureuse: notre programme d'études canadiennes, un des trois où nous couvrons la matière dans toute son étendue, jusqu'au niveau du doctorat, a en fait donné naissance à notre programme d'études autochtones et à notre programme de science environnementale, à cause des liens entre ces trois disciplines. Ainsi, bien souvent, dans nos établissements, l'interdisciplinarité a des effets qui contrent la tendance à se concentrer sur certains domaines, ce qui vous semble préoccupant.

En ce qui me concerne, je pense qu'il s'agit surtout de trouver le juste milieu. Et vu les ressources de base avec lesquelles nous devons tous travailler à l'heure actuelle, ce qui est important ce n'est pas seulement de trouver les opportunités de financement additionnel par le biais de partenariats ou de projets de développement dans les domaines où il est judicieux de procéder ainsi, mais également d'utiliser cela pour avoir la capacité de soutenir d'autres secteurs où il n'est pas aussi facile d'établir des partenariats. C'est tout à fait le cas dans de nombreux domaines des sciences sociales et humaines. Il n'est pas aussi facile de trouver le partenaire du secteur privé qui va appuyer ce genre de recherche. Il s'agit donc de trouver un moyen de ne pas désavantager ces secteurs. Et c'est également un de nos principaux soucis, non seulement dans la répartition de nos budgets de fonctionnement et de recherche mais également en ce qui concerne la répartition des ressources que nous consacrons aux initiatives axées sur la collecte de fonds, etc. C'est donc le but que nous cherchons à atteindre.

Quoi qu'il en soit, la recherche nous a certainement aidés à cibler précisément nos efforts et à décider dans quel secteur nous allions faire certains types d'investissement, aussi bien du côté de la recherche que du côté de l'enseignement. Je pense que les résultats de cette synergie sont clairs lorsque vous entendez des étudiants parler de ce qui les passionne, de la façon dont un professeur les passionne dans la classe. Souvent, ce qui passionne un professeur est ce qui génère de nouvelles idées, de nouvelles façons de penser, de nouvelles approches analytiques pour la résolution de problèmes. En toute franchise, les recherches qu'effectuent la plupart des membres du corps enseignant les passionnent. Pour certains, c'est l'intérêt pédagogique de la recherche et la façon dont cela influence leur enseignement qui est important; mais pour d'autres, c'est la recherche pure dans leur discipline, et pour nous, encore une fois, c'est une question de trouver le juste milieu.

• 1015

La présidente: Merci, madame Patterson. Monsieur Davenport.

M. Paul Davenport: Je ne vais pas répéter les excellents commentaires de mes collègues. Pour ce qui est de trouver un équilibre entre l'enseignement et la recherche, nous comparaissons devant vous pour parler de la recherche. Si vous venez dans mon établissement, vous y trouveriez une administration qui fait beaucoup de discours et qui écrit beaucoup d'articles sur l'importance d'un bon enseignement.

Vous avez parlé d'une course-poursuite. Nous sommes effectivement engagés à l'heure actuelle dans une course-poursuite, mais cela touche aussi bien la recherche que le recrutement des étudiants. Nous nous efforçons donc d'offrir aux étudiants de premier cycle les meilleurs programmes et les meilleurs professeurs pour attirer les meilleurs étudiants. Et nous devons en répondre. Chaque étudiant a la possibilité de remplir un formulaire où il note le professeur chargé de chaque cours qu'il a pris, et les résultats de cette enquête sont postés sur l'Internet où tout le monde peut en prendre connaissance; tous les étudiants. C'est comme les anciennes évaluations de cours, sauf que maintenant, c'est informatisé et c'est publié sur l'Internet.

La présidente: Je ne publierais pas cela sur l'Internet.

M. Paul Davenport: Nous prenons donc ces choses-là très au sérieux. Je ne voudrais pas que l'on vous donne une fausse impression. Nous ne sommes pas ici parce que nous privilégions la recherche par rapport à l'enseignement; nous sommes ici parce que nous voulons avoir d'excellentes universités et que, pour avoir d'excellentes universités, il faut qu'elles soient excellentes aussi bien en ce qui concerne l'enseignement que la recherche.

Quoi qu'il en soit, pour répondre à votre deuxième question, non, l'élément déterminant n'est pas pour nous simplement de trouver qui est prêt à mettre la main à la poche, absolument pas. Un des grands atouts du système canadien, c'est que nos établissements ont un degré d'autonomie, tout comme les membres du corps enseignant d'ailleurs, qui permet à chaque professeur de faire des recherches sur ce qui l'intéresse. C'est ainsi que nous avons de grands chercheurs dans notre Centre d'études sur la théorie et la critique qui s'intéressent aux littératures et aux cultures du monde entier et qui cherchent à mieux comprendre la culture canadienne en examinant celle d'autres pays. Nous avons d'excellents chercheurs dans le domaine de la philosophie de la science qui approfondissent la signification véritable de la révolution générée par Newton ou de celle d'Einstein, ainsi que les origines de notre savoir, ce qui va très loin et touche par exemple la cosmologie. Enfin, pour vous donner un autre exemple, un exemple très concret, nous avons un centre très actif où l'on étudie la violence dont sont victimes les femmes et les enfants et qui travaille en collaboration avec des groupes communautaires pour les aider à faire face à ce qui est actuellement un problème social urgent.

Rien de tout cela n'a jamais été généré par des subventions de recherche extérieures; ces initiatives sont le fruit des intérêts de nos professeurs, et des intérêts de leurs étudiants. La grande force de notre système canadien vient du fait que notre corps enseignant et nos universités ont assez d'autonomie pour que puissent être entreprises ces recherches d'un intérêt particulier, recherches qui s'avèrent souvent plus utiles à long terme que des recherches qui ont une implication commerciale immédiate.

La présidente: Merci. Monsieur Traves.

M. Tom Traves: Je vais être bref sur la question de l'enseignement. Je pense que mes collègues en ont parlé, mais il y a un mot que vous avez utilisé que je voudrais lier à la deuxième question que vous avez soulevée. Vous avez dit que, en bout de ligne, un des buts que se fixe un bon enseignant, c'est d'inspirer les étudiants, et pour ma part, je ne pense pas que vous puissiez être attiré par quelqu'un qui, lui-même, ne s'investit pas complètement dans ce qu'il fait. Je pense que cet investissement intellectuel, dont vous avez entendu mes collègues vous parler, se situe au-delà de ce qui peut séparer la recherche de l'enseignement. Les deux font partie du même processus.

Mais je pense qu'en fait lorsque l'on parle de s'investir et d'inspirer, on va au coeur des programmes de recherche des universités, Paul en a parlé d'ailleurs. Je pense que les professeurs, quels que soient les stéréotypes que l'on puisse avoir à leur égard, sont aussi préoccupés par les grandes questions de l'heure que n'importe qui d'autre. Ce sont des gens qui lisent beaucoup, qui réfléchissent beaucoup et qui se préoccupent beaucoup du monde qui les entoure; et ils investissent dans l'étude des questions qui leur paraissent importantes. Vous n'allez pas passer les cinq prochaines années de votre vie à étudier quelque chose que vous considérez comme un problème complètement dérisoire. Quel que soit le sujet qui vous absorbe, cela va être quelque chose que vous considérez important et d'ailleurs, je pense, cela transparaît d'une certaine façon dans les priorités de recherche des universités.

Revenons au Programme des chaires de recherche du Canada: si vous considérez les secteurs que nous avons décidé de privilégier pour établir ces chaires dans notre établissement, fondamentalement, il s'agit de la santé, de l'énergie, de l'environnement, de la technologie de l'information et des communications. Ce sont des secteurs qui soulèvent de grandes questions à travers le monde. Il ne s'agit pas de quelque idiosyncrasie particulière à laquelle ne s'intéressent dans leur tour d'ivoire que deux personnes dans le monde; ce sont des questions importantes.

De temps en temps, je pense que c'est vrai, qu'il y a des questions nationales qui émergent et qui ne sont pas traitées pleinement. Il me semble que dans ces cas-là, le gouvernement fédéral a parfois mis en place des mécanismes de financement spéciaux pour stimuler un plus grand intérêt.

• 1020

Dans le dernier budget fédéral, on a réservé une somme d'argent—je ne me souviens pas combien exactement; 150 millions sur cinq ans, si je ne me trompe—pour encourager la recherche sur l'atmosphère et l'environnement dans le contexte du réchauffement de la planète; ce genre de chose. Selon moi, cela démontre très bien que le gouvernement peut dire: nous voulons qu'il y ait plus de recherche dans ce domaine; nous savons que cela va coûter de l'argent; nous voulons attirer votre attention sur ce point et cibler ce domaine important pour que des gens s'y intéressent. Et, bien entendu, à cause de ce financement plus important, il y aura plus de recherche dans le domaine en question.

Ce qui est intéressant, c'est que ce programme n'est pas né parce qu'un bureaucrate d'Ottawa ou quelqu'un au Parlement a décidé que c'était une question importante. Les gens qui, en bout de ligne, l'ont mis sur pied ont bien évidemment été, dans de nombreux cas, incités à le faire par des professeurs d'université qui ont dit: «Il faut faire plus de recherche dans ce domaine. On devrait créer un fonds pour les encourager.» Je pense que ce genre d'investissement et d'inspiration marche, de façon générale, dans 95 pour cent des cas et que dans ces cas-là, cela donne d'excellents résultats 99 fois sur 100.

La présidente: Il va falloir que j'arrête là cette discussion. Avant de passer au prochain intervenant—et à trois autres personnes qui veulent poser des questions—je vais intervenir moi-même parce que je sais que vous devez partir, monsieur Traves. Je ne veux pas me faire l'avocat du diable mais, à vous croire, j'en conclurais que tout va pour le mieux en ce qui concerne la recherche. Je dois pourtant vous dire que la médaille a un revers.

Je vais vous donner un exemple hypothétique. Je ne veux causer d'ennui à personne, mais cela se fonde sur un cas concret. Disons qu'il s'agit d'un chercheur connu de l'Université de Toronto—étant donné que ce type d'université n'est pas représenté ici, je vais m'en prendre à elle—, titulaire d'une bourse d'étude Fulbright qui est transféré à l'Université du Manitoba parce que son épouse a été mutée dans cette ville et qu'il finit par y trouver un poste. Et il est très heureux du poste qu'il trouve à l'Université du Manitoba.

Il rencontre quelqu'un de l'Université de la Colombie-Britannique qui a également été transféré à l'Université du Manitoba parce que son épouse a été mutée dans cette ville. Ils découvrent qu'il y a là un créneau commercial—un créneau qui s'intègre au marché—et ils combinent leurs compétences et font une demande de subvention de recherche et passent des heures, des jours et des mois à travailler en collaboration avec un secteur de l'industrie.

Ils finissent par mettre au point une proposition, et ils n'ont jamais été aussi désespérés auparavant dans leur vie, parce que tout d'un coup, ils se retrouvent à l'Université du Manitoba; ils ne sont plus à l'Université de Toronto ni à l'Université de la Colombie-Britannique, et leur demande n'est pas prise au sérieux comme elle l'aurait été si elle provenait de l'une de ces universités. C'est ce que pensent les gens, et ils le découvrent à travers les questions qu'on leur pose sur les compétences du corps enseignant de leur établissement et sur le niveau de compétence que reflète leur proposition. Ils sont très déçus du processus d'examen par les pairs.

J'évoque ce problème parce que je sais qu'il y a plusieurs demandes provenant de plusieurs établissements différents qui ont été traitées de la même manière que celle de mon exemple hypothétique. Et, vous-même, vous avez reconnu avoir pensé que, peut-être, parce que votre école de médecine était de moindre envergure... Et si l'université ne comprend pas une école de médecine, mais d'un personnel qui possède ce type de compétence? Je sais que le CRM, ou plus récemment les IRSC, ont accordé moins de considération aux universités qui ne possèdent pas d'école de médecine, parce qu'elles ne sont pas jugées comme ayant le niveau de compétence requis.

Donc, même si l'on peut dire qu'il y a des cas où l'on a atteint un certain niveau d'excellence, nous n'avons pas abordé ce que je perçois comme faisant problème. En effet, ce que je vous entends dire ici, c'est: «Tout est merveilleux.» Je ne pense pas que tout soit merveilleux—et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous sommes ici en train de débattre de la question. Nous entendons dire que le processus d'examen par les pairs présente des faiblesses. Nous entendons dire que le processus d'établissement des IRSC pose certains problèmes, qui sont source d'autres difficultés ailleurs. Vous me dites que certaines ont été aplanies, mais cela ne me rassure pas complètement. Et si je vous disais, monsieur Traves, qu'il existe un mouvement en faveur d'accorder à cinq universités du Canada la majeure partie de toutes les subventions en recherche et que la vôtre n'en fait pas partie? Dites-moi ce que vous penseriez.

M. Tom Traves: Permettez-moi de répondre de façon générale à vos observations. J'espère couvrir tous les points que vous avez soulevés. Certes, ce sont des questions préoccupantes à juste titre, et nous en avons discuté entre nous et, naturellement, avec les responsables de chaque université avec qui nous avons eu des conversations à ce propos.

Tout d'abord, j'ai moi-même été dans le passé examinateur dans ma propre discipline pour le compte du Conseil de recherches en sciences humaines. Je pense—je ne peux parler que de ma propre expérience—que fondamentalement, dans ce processus, on se montre ouvert à la qualité des idées et au caractère concurrentiel de la proposition.

• 1025

Il est important de reconnaître qu'il y a beaucoup plus de propositions excellentes que de ressources disponibles pour les financer. Il faut donc prendre les décisions difficiles. Parfois, des gens qui présentent des propositions parfaitement acceptables—c'est une expression plutôt désobligeante, disons plutôt de très bonnes propositions—ne sont pas sélectionnées tout simplement parce qu'il n'y a pas assez d'argent. Vous passez d'une proposition à d'autres sur la liste et à un certain moment, il n'y a plus d'argent, et voilà. Alors que, bien évidemment, le projet suivant sur cette liste est un excellent projet. C'est un problème pour nous et, à mon avis, il est dû en partie au niveau de financement disponible dans ce pays et à la capacité à financer toute une gamme de projets.

C'est un problème extrêmement délicat mais, en bout de ligne, c'est une question de capacité. Il est très important de faire le lien entre les arguments que nous vous avons présentés et qui ont trait à la capacité et les questions que soulève le financement de la recherche en général.

Mon université vient de présenter à la Fondation canadienne pour l'innovation une proposition d'une valeur de 50 millions de dollars—donc, de très grande envergure en ce qui nous concerne et, je pense, d'une envergure appréciable pour qui que ce soit—une proposition qui porte sur l'implantation d'un centre de traitement des maladies cérébrales où l'on s'appuierait sur la recherche médicale en psychologie et en biologie. Pour nous, c'est un projet de très grande envergure et, naturellement, d'une très grande importance étant donné le niveau des ressources que cela implique pour notre établissement.

Nous avons comparu—nous étions à peu près une demi-douzaine—devant un groupe d'experts de la FCI. Il y avait dans ce groupe environ six personnes—deux experts canadiens et quatre venant de divers pays du monde—et ils nous ont mis à l'épreuve. Ce que vous nous dites à propos de ce que vous avez l'intention de faire, c'est très bien, mais pouvez-vous le faire effectivement? Ils nous ont pressés de questions, encore et encore à propos de notre capacité à être à la hauteur de nos ambitions.

L'épreuve a été dure à traverser. D'un autre côté, c'était un processus qui se justifiait totalement. Étant donné que 50 millions de dollars, c'est beaucoup d'argent, vous ne voulez pas donner une telle somme à des gens qui, au bout du compte, ne peuvent pas remplir leurs engagements.

Selon moi, quand on veut se comporter en bon administrateur, c'est le genre d'enquête minutieuse que l'on doit mener. À cause de la rareté des ressources, certains n'en obtiendront pas parce que leur proposition n'a pas le calibre voulu ou encore parce qu'elle ne s'approche pas assez des priorités ou des critères établis pour distribuer les fonds disponibles. Cela peut fort bien aboutir à ce que, lorsque vous combinez toutes les décisions qui sont prises par les divers conseils subventionnaires à propos des différentes sortes de propositions qui leur sont présentées, il y ait une concentration des ressources dans certaines universités. Je pense que c'est inévitable. Il y a bien des endroits où se concentre la population. Dans l'industrie, il y a aussi des concentrations, et c'est la même chose en ce qui concerne les capitaux. Pourquoi n'y aurait-il pas de concentration dans ce secteur également?

Dans ces conditions, l'important, il me semble, c'est de reconnaître que les points forts vont être exploiités. Je ne crois pas que cela soit nécessairement une mauvaise chose. Ça l'est toutefois si le reste du pays est condamné à la portion congrue. Je pense que dans les présentations que nous avons faites sur la création de capacités, nous reconnaissons le problème et nous voulons nous assurer qu'il existe des capacités dans tous les types d'établissements, et dans les différentes régions du pays.

La présidente: Je présume que vous sentez à quel point je suis frustrée à cause des demandes formulées par l'Université de Windsor, un problème que j'ai soulevé plusieurs fois et dont tous les membres du comité sont au courant, j'en suis sûre.

J'ai lu les commentaires de la FCI à propos de ces demandes et ils sont négatifs. C'est très frustrant pour moi de suivre ce processus et d'entendre vos observations car la manière dont nous décidons quelles recherches vont être faites, et nos choix en la matière, sont très importants. Mais quand nous prenons des décisions qui engagent l'avenir, nous ne pouvons pas oublier, je pense, ce qui a permis au Canada de se hausser au niveau où il est parvenu aujourd'hui. Nous n'avons pas de recherche orientée, et je ne suis pas certaine que nous ne devrions pas en entreprendre parce qu'il semble qu'il y ait beaucoup de lacunes à combler. Quand j'entends parler des décisions qui sont prises ou des choses que l'on étudie, je pense qu'il faudrait également s'intéresser à ce qui affecte une grande majorité de Canadiens.

La seule raison pour laquelle je fais le lien avec la proposition de l'Université de Windsor, c'est parce que c'est celle que je connais le mieux. Cette proposition touchait non seulement le secteur de l'automobile mais également la cause la plus fréquente de décès et de blessures parmi les enfants. Et aujourd'hui, nous ne finançons pas de recherche dans ce domaine. Cela me préoccupe énormément de voir ce genre de demande passer aux oubliettes et de constater que le processus ne permet pas de peaufiner les demandes ni d'accorder un financement partiel puisque c'est le principe du tout ou rien qui s'applique. Il semble que ce soit la façon dont fonctionne l'examen par les pairs.

M. Barnard voulait répondre et ensuite, je passerai à la question suivante.

• 1030

M. David Barnard: Merci. Vous soulevez une série complexe de questions. Lorsque je suis arrivé à l'Université de Regina, beaucoup, parmi ceux qui étaient alors mes collègues, m'ont certes dit qu'à leur sens, l'Université de Regina n'était pas traitée sur un pied d'égalité dans le cadre du processus d'examen par les pairs. Ils pouvaient citer des exemples de propositions qui semblaient très solides et qui n'avaient pas été financées.

Mais lorsque nous avons commencé à examiner le nombre de demandes et le pourcentage de celles qui avaient été acceptées, il n'y avait pas de différence entre ce qui se passait à l'Université de Regina et ce qui se passait dans de plus grandes universités du pays. On avait fini par s'attendre à être rejetés et en conséquence, à ne pas participer au processus.

Nous avons incité les gens à s'y intéresser davantage. De fait, même si le taux de réussite n'a pas changé, proportionnellement, le nombre total de demandes qui ont été approuvées a certainement augmenté. Je ne peux faire aucun commentaire sur l'exemple que vous avez donné, mais je sais que notre expérience, au sein d'une relativement petite université, a été tout à fait positive ces dernières années.

Je ne voudrais pas paraître naïvement optimiste à cet égard, mais nous nous sommes attelés à la tâche et nous avons réussi. En ce qui concerne les IRSC, par exemple, nous n'avons pas d'école de médecine, mais nous avons déterminé des sujets d'étude que nous jugeons importants pour notre région, notamment la santé de la population et les déterminants de la santé considérés dans un très large contexte, pas dans le cadre d'une faculté de médecine. Nous venons juste de réussir à faire approuver notre demande et à obtenir une subvention pour poursuivre des recherches dans ce domaine, en collaboration avec nos collègues du CSIS.

Je pense que nous avons tous déjà répondu non lorsque vous nous avez demandé si, à notre avis, la recherche devrait être concentrée dans cinq universités. Mais je ne pense pas qu'exploiter l'excellence aboutira à une concentration de la recherche dans cinq universités.

La présidente: Je dois vous dire que j'ai reçu des lettres où l'on suggère qu'une grande partie de la recherche devrait être concentrée dans cinq universités. J'espère donc que vous veillerez à maintenir votre position en la matière.

Ne voyez là aucun manque de respect à l'égard des cinq grandes universités; bref, je vais passer la parole à l'intervenant suivant parce qu'il ne nous reste plus beaucoup de temps.

Merci, monsieur Traves. Nous vous remercions d'être venu et tous nos voeux vous accompagnent. Nous vous reverrons avec plaisir.

M. Tom Traves: Merci.

La présidente: Monsieur Bagnell.

M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): J'ai une question à propos des besoins des collèges. Ma circonscription est située dans le Nord, dans le Yukon. Je ne sais pas dans quelle mesure le Nord a bénéficié des fonds réservés à la recherche, mais à la dernière réunion des responsables du processus d'examen par les pairs qui portait sur la répartition du financement fédéral de la recherche, l'Association des collèges communautaires du Canada a témoigné.

Ses représentants ont dit avoir le sentiment que la capacité des collèges et des instituts à stimuler de façon significative l'innovation dans l'économie canadienne était grandement sous-estimée. Ils aimeraient voir les collèges inclus dans une plus large mesure dans la stratégie d'innovation du pays, et dans le cadre de financement de la recherche mis en place par le gouvernement fédéral.

Ils ont proposé deux solutions pour y parvenir. Premièrement, le lancement d'une initiative distincte qui permettrait de soutenir particulièrement la recherche menée dans les collèges. Deuxièmement, la modification des critères appliqués à l'heure actuelle dans le cadre du processus d'évaluation des demandes par les pairs pour tenir compte, par exemple, de la charge d'enseignement plus lourde des chercheurs qui travaillent dans les collèges et qui, en conséquence, publient moins par comparaison avec leurs homologues dans les universités. Par ailleurs, les chercheurs employés par des collèges pourraient être plus équitablement jugés si l'on appliquait le système d'examen utilisé actuellement par les organismes subventionnaires fédéraux.

Alors, quelles sont vos opinions sur les suggestions de l'Association des collèges communautaires du Canada concernant le lancement d'initiatives dans le but d'appuyer davantage la recherche menée dans les collèges, ou la modification des critères de l'évaluation par les pairs dans le cadre des programmes qui existent actuellement, de façon à ce que les collèges et les instituts ne soient pas les parents pauvres dans le cadre d'un processus qui, à les croire, est principalement conçu pour les universités?

La présidente: Monsieur Giroux.

M. Robert Giroux: Merci, madame la présidente. Nous sommes bien entendu tout à fait au courant de l'opinion qui prévaut dans les collèges communautaires lesquels, depuis un certain nombre d'années maintenant, ne sont plus du tout représentés dans le milieu de la recherche.

Lorsque l'on a mis sur pied la Fondation canadienne pour l'innovation et ses programmes—et j'ai participé aux travaux de planification—nous avons parlé des collèges. Et c'est ainsi que l'on a créé un fonds spécial pour les collèges. Je pense qu'à l'époque, ils s'agissaient d'une somme d'environ 10 millions de dollars et que les fonds ont pratiquement tous été utilisés. Le processus appliqué pour répartir ces fonds implique des gens qui connaissent les collèges, la façon dont ils fonctionnent et le genre de travaux dans lesquels ils s'engagent.

Maintenant, les collèges participent aux concours généraux organisés par la Fondation canadienne pour l'innovation, mais les groupes d'experts, comme les appelle la Fondation, qui seront organisés à cette fin comprendront des gens qui comprennent les collèges, qui les connaissent et qui sont en bonne position pour les évaluer. Et, à mon avis, c'est ce qu'il faut faire.

• 1035

Oui, c'est vrai que les conseils subventionnaires n'ont pas accordé de financement aux collèges, mais il y a quelques exceptions. Nous comptons parmi nos membres, dans le milieu universitaire, cinq ou six collèges constituants, le University College of Cape Breton, ainsi que les collèges constituants de Kamloops, de l'Okanagan et de la vallée du Fraser, etc. Ils commencent à combiner leurs capacités avec celles des universités dont ils dépendent pour obtenir des fonds des conseils subventionnaires. Nous sommes très ouverts à l'idée d'inclure les véritables collèges communautaires qui n'ont pas les capacités voulues pour délivrer des diplômes universitaires. Si les collèges peuvent répondre aux critères des recherches prises en considération par les conseils subventionnaires, on ne devrait pas les empêcher de le faire.

Il faut toutefois prendre en compte que dans les collèges on fait surtout de la recherche appliquée, de la R-D. Ce genre de recherche est intimement liée au secteur privé, aux entreprises, etc., et il faudrait donc veiller à évaluer véritablement la contribution des recherches en question à la découverte de nouvelles connaissances susceptibles d'être commercialisées à l'avenir.

M. Larry Bagnell: Je pense que l'un des...

La présidente: Monsieur Bagnell, je dois vous arrêter une minute.

M. Larry Bagnell: Pas de problème.

La présidente: Les cloches sonnent. Je ne sais pas si c'est pour nous appeler à voter ni quel est le délai que nous avons. Si c'est une demi-heure, nous allons continuer pendant 15 minutes. Nous attendons de le savoir. Je prie tous les intervenants de garder cela à l'esprit.

M. Larry Bagnell: Pour poursuivre, brièvement, je pense qu'au comité, on s'est beaucoup préoccupé, comme le démontrent d'ailleurs les dernières questions, de l'application des recherches dans la société en général. Par conséquent, je ne vois pas en quoi ce que font les collèges peut être un désavantage. Vous dites qu'il s'agit de R-D, appliquée dans la société, et il me semble que cela répond à certaines des préoccupations qui ont été exprimées au cours de nos discussions.

M. Robert Giroux: Je ne voudrais pas que vous interprétiez mal mes paroles. Je disais simplement que, peut-être, le type de recherche que font les collèges ne correspond pas aux critères ou aux lignes directrices des conseils subventionnaires, et que si l'on décide d'aller de l'avant et de soutenir les collèges, il faudrait adapter ces critères pour répondre à leurs besoins. C'est essentiellement ce que je voulais dire.

M. Larry Bagnell: C'est une des choses qu'ils ont suggérées; adapter les critères. Cela ne vous pose pas de problème?

M. Robert Giroux: Si, mais...

La présidente: Il va falloir que je passe la parole à M. Adams parce que nous allons manquer de temps. Il y a un vote, mais nous avons un délai de 25 minutes. Nous allons continuer pendant 10 ou 12 minutes.

M. Peter Adams: Merci, madame la présidente. Vous le savez sans doute, je ne suis qu'un membre associé du comité et c'est la raison pour laquelle je suis en retard, et je m'en excuse. En ce moment, je suis pris entre deux feux. Mais je vous remercie de me donner la possibilité de poser une question.

Je voudrais d'abord faire une observation sur ce qu'a dit Paddy Torsney à propos du Nord. Je pense qu'un facteur qui n'a pas été pris en compte par aucun des présidents, c'est que le gouvernement fédéral a des responsabilités spéciales dans le Nord. Ses responsabilités se situent en dehors du cadre de la R-D et donc si, comme je le crois, la recherche concernant le Nord est lacunaire, le gouvernement fédéral devrait, comme l'a souligné Tom, je pense, prendre des mesures spéciales à cet égard.

Deuxièmement, pas tant au Yukon d'où vient Larry ni dans les Territoires du Nord-Ouest, mais plus particulière au Nunavut, le potentiel économique de la R-D est extrêmement important dans un territoire où l'économie est défaillante. Mais j'ai jeté un coup d'oeil au mémoire et je pense qu'à juste titre, on n'y parle pas simplement de créer des capacités, mais également de les maintenir, car si nous mettions en place un système qui posséderait toutes les capacités que nous voulons, mais qui n'aurait pas été conçu pour être durable, je pense que cela poserait des problèmes.

Certains d'entre nous s'inquiètent—et Sue, notre présidente, a évoqué un des aspects du problème—des effets de rétroaction négative que pourrait avoir au bout du compte le système sur la création de capacité et pense que l'on devrait sérieusement s'y intéresser. Dans ce contexte, il y a l'idée que la manière dont les fonds sont alloués favorise les plus grandes universités au détriment des plus petites. Certains exemples démontrent que l'on a corrigé le tir, comme c'est le cas en ce qui concerne les instituts de recherche en santé du Canada, et ce qu'a mentionné David à propos du collège autochtone illustre très bien cela. Il me semble que nous sommes passés des méthodes du Conseil de recherches médicales à un mode de fonctionnement qui inclut des régions et des établissements qui n'étaient pas impliqués auparavant.

• 1040

Nous avons discuté des chaires de recherche et il semble que la façon dont elles se répartissent démontre que l'on a accordé plus de considération aux plus petites universités. Toutefois, un de nos collègues a publié un article qui laisse à penser que le soutien des petites universités ne vient pas des grandes mais plutôt de celles de taille moyenne. Quoi qu'il en soit, je pense que la plupart d'entre nous s'accordent à dire que les choses vont mieux en ce qui concerne les chaires de recherche.

En général, on estime que la FCI perpétue la partialité des conseils subventionnaires qui demeurent en place. Je vous pose la question. Et c'est là un des effets de rétroaction négative d'un système jugé partial.

En voici une autre, madame la présidente, et c'est lié au rôle des provinces dans ce dont nous parlons, les études supérieures et la recherche. Je remarque que l'on a mis l'accent sur les coûts indirects de la recherche. En passant, je suis d'accord avec vous sur ce point, mais je pourrais tout aussi bien défendre l'argument contraire juste en utilisant comme exemple les coûts indirects de la recherche. Pourquoi le gouvernement fédéral devrait-il financer les coûts indirects de la recherche? Le gouvernement fédéral devrait le faire parce que les provinces ont systématiquement sous-financé les universités sur le plan des travaux d'entretien, ce genre de chose. Tel est l'argument que l'on peut avancer. À contrario, on pourrait dire que le gouvernement fédéral ne devrait pas agir ainsi car, si le gouvernement fédéral finance les coûts indirects de la recherche, cela encouragera tout simplement les provinces à n'accorder qu'une aide encore moins généreuse à leurs établissements.

Madame la présidente, ma question porte principalement, en premier lieu, sur la partialité. Deuxièmement, que devrions-nous faire au niveau fédéral pour encourager les provinces à investir davantage dans les études supérieures et la recherche et non, au contraire, les décourager de le faire?

La présidente: Merci, monsieur Adams. Je me permets de rappeler à nos témoins qu'il nous reste environ huit minutes. Je vous demande d'être brefs. Je vais commencer par M. Davenport, si vous le permettez.

M. Paul Davenport: La question de la partialité a été soulevée plus tôt par notre président. Permettez-moi de vous dire que je ne vois pas où est le problème. Je suis économiste et je peux vous dire que dans notre milieu, on sait qui sont les meilleurs économistes, qui publient des articles qui ont des échos, et qui sont les jeunes qui sortent du rang. Si quelqu'un passe de l'université A à l'université B, cela n'affecte pas notre jugement lorsque nous faisons une évaluation dans le but d'accorder une subvention de recherche.

Là où le nom de l'université peut entrer en ligne de compte, c'est lorsque quelqu'un fait une proposition qui implique d'énormes infrastructures matérielles, de nombreux équipements. Peut-être y a-t-il trois universités dans le pays qui les possèdent, pas les autres. Si je n'ai pas cela à Western et si je fais une demande qui requiert ce genre de chose, je sais que je vais être désavantagé; et c'est la raison pour laquelle il faut que nous nous concentrions sur nos atouts, et que nous mettions en place ce genre d'infrastructure à l'échelle locale.

Que fait-on devant la déception de chercheurs universitaires dont la demande de subvention a été rejetée? S'il y a plus de demandes qui viennent de Western que de Windsor, il y a plus de demandes de Western qui sont rejetées qu'à Windsor. Parfois, ils viennent me voir et ils défendent leur demande, preuve à l'appui, et nous nous demandons à quoi peuvent bien penser ces imbéciles. Ne sont-ils pas capables de voir que nous sommes le centre national? Ne sont-ils pas capables de se rendre compte de ce que cela signifie pour le pays?

C'est qu'on fait, c'est qu'on se secoue les puces en attendant la prochaine fois. L'examen par les pairs n'est pas parfait, mais c'est de loin le meilleur système auquel on peut penser. J'insiste, c'est le seul qui puisse nous rendre compétitifs sur la scène internationale. Sans l'examen par les pairs, nous nous dirigeons dans une autre direction.

Lorsque M. Martin et d'autres représentants du gouvernement font le lien entre investir dans l'innovation et inverser le déclin de notre productivité par rapport à celle des États-Unis, ils ont tout à fait raison. Pour inverser ce déclin relatif et stimuler notre compétitivité économique, il faut que les subventions soient accordées selon un système concurrentiel. Oui, favorisons la création de capacité. Oui, offrons les programmes spéciaux dont nous avons parlé mais grand Dieu, l'examen par les pairs est au coeur du système qui transforme les dollars en excellence. Abandonnez l'examen par les pairs et vous pouvez aussi bien dire adieu à l'excellence.

Que faire en ce qui concerne les coûts indirects et les provinces? Il y a deux ou trois ans, l'Ontario a mis sur pied un programme de subventions couvrant les frais indirects. Notre ministre a déclaré publiquement que si le gouvernement fédéral couvrait les coûts indirects de la recherche, elle s'engageait à ce qu'il n'y ait aucune réduction des subventions provinciales pour cette raison. Nous la croyons et nous ne manquerions pas de lui rappeler sa promesse. Je pense que vous avez là l'occasion de faire un investissement de premier ordre. Je dois dire

[Français]

la province du Québec fait la même chose. Elle paie les frais indirects des subventions provinciales.

• 1045

[Traduction]

Je pense que vous avez l'occasion de faire un magnifique investissement et qui se traduirait effectivement par une augmentation nette des ressources dont disposent les universités.

La présidente: Juste avant de passer la parole à M. Barnard et à Mme Patterson, nous avons une dernière question. J'ai essayé de la poser. Le comité s'est déjà déclaré officiellement en faveur du financement des coûts indirects et, par ailleurs, le comité n'a jamais dit qu'il s'opposait de quelle que façon que ce soit à l'examen par les pairs. Nous demandons si le processus peut être amélioré de façon à répondre à certaines préoccupations.

Avec tout le respect que je dois à chacun d'entre vous, à titre de présidente, je dois de temps en temps me faire l'avocat du diable parce qu'il est important de considérer tous les aspects d'une question.

Monsieur Barnard.

M. David Barnard: Vous faites du bon travail.

Étant donné que la question des coûts indirects et du rôle respectif des provinces et du gouvernement fédéral à cet égard a été soulevée, un des principes qu'essaient d'appliquer la plupart des organismes lorsqu'ils préparent leur budget, c'est de s'assurer que tous les frais qui découlent des décisions qui sont prises sont assumés ou couverts par la personne qui prend la décision en question. En ce qui concerne les coûts indirects de la recherche, ce qui se passe, entre autres, c'est que les décisions sont prises par des organismes fédéraux, alors que les frais qui en découlent ne sont couverts par personne; et la question qui se pose est alors la suivante: qui devrait les couvrir? Devraient-ils être couverts par la province ou par le gouvernement fédéral?

Il me semble qu'en premier lieu, des frais qui découlent de ce genre de décision devraient être couverts par l'organisme ou par le groupe qui la prend. Le fédéralisme dans ce pays pose déjà assez de problème sans que l'on soit obligé de le contourner.

M. Peter Adams: Ce que je veux souligner, madame la présidente, c'est que la portion du transfert aux provinces, le TSCS, qui est réservé aux études supérieures baisse. Autrement dit, on consacre plus d'argent à autre chose, c'est ce que je voulais souligner de façon générale.

M. David Barnard: Je pense toutefois que c'est un problème plus général que la question spécifique des coûts indirects de la recherche.

Mme Bonnie Patterson: J'ai une observation à faire. Je pense qu'il est très important de voir qui sont les pairs dont nous parlons; et bien évidemment, vous vous intéressez à cette question puisque vous réfléchissez au processus. Pourquoi? Parce que nous sommes pris dans un cycle qui soulève à la fois la question des capacités et des possibilités. Étant donné que les établissements de petite ou de moyenne taille du pays n'ont pas pu se doter d'une capacité de recherche, elles se retrouvent prises dans un cercle vicieux car elles n'ont pas de professeurs en milieu ou en fin de carrière qui peuvent jouer un rôle dans le processus d'évaluation par les pairs.

Beaucoup des programmes qui ont été mis sur pied tentent de résoudre ce problème, et l'un des atouts des chaires occupées par des professeurs en fin de carrière, par exemple, ou de celles qui ont une vocation industrielle et qui sont établies au sein de petits établissements, c'est qu'on les traite avec plus de sérieux et que cela leur permet d'acquérir les capacités nécessaires pour participer au processus d'examen par les pairs, des capacités qui n'existeraient pas autrement.

Je tiens simplement à souligner le caractère cyclique de ce processus et à dire que plus nous intégrons ce genre de contrepoids dans les programmes, plus nous améliorerons notre position au fur et à mesure que le cycle se déroule. Beaucoup de professeurs sont en fin de carrière et prendront leur retraite au cours de la prochaine décennie; il nous faudra mettre en place au sein de nos établissements non seulement une capacité de recherches mais également les moyens nécessaires pour les mener à bien.

La présidente: Merci.

Nous allons devoir conclure car nous devons aller voter, mais je tiens à vous remercier tous d'être venus aujourd'hui.

Nous savons que les universités collaborent très bien par le biais du Réseau de centres d'excellence. Et nous sommes convaincus qu'elles collaborent et qu'elles coordonnent les recherches qui sont effectuées. Et cela nous conforte.

Nous tenons toutefois à vous rappeler que tout comme il y a des hauts et des bas dans la façon dont fonctionne le gouvernement, il y en a également dans l'industrie. Il est facile de dire: remettez votre ouvrage sur le métier et revenez-nous voir, mais après deux ou trois fois, si l'industrie vous dit qu'elle ne veut pas de vous, vous n'allez pas vous présenter encore une autre fois. Personne ne parle d'une demande qui a été rejetée une fois, je pense; ce dont nous parlons, ce sont les demandes qui ont été rejetées à plusieurs reprises. Ceux qui ont été impliqués dans le processus nous parlent du niveau de compétence au sein des groupes chargés des examens par les pairs.

Je tiens également à remercier publiquement M. Davenport et l'Université de Western Ontario d'avoir lancé une nouvelle initiative en collaboration avec l'Université de Windsor au bénéfice de l'École de médecine. On devrait prendre plus d'initiatives de ce genre dans notre pays. Il faut mettre en place des partenariats et utiliser les compétences pour offrir des niveaux de service appropriés au sein de nos collectivités, de façon à ce que des établissements comme l'Université de Windsor où il n'existe peut-être pas une faculté complète puissent bénéficier de ce genre de coordination et de coopération. Je pense que c'est cela que nous devrions envisager à l'avenir.

Il faut que nous allions voter, je m'excuse.

Merci encore. La séance est levée.

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