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INST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY, SCIENCE AND TECHNOLOGY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 15 mai 2001

• 0902

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): La séance est ouverte. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, examen des politiques relatives à la science et à la technologie.

Ce matin, nous allons tenir une table ronde sur la recherche et le développement dans les universités.

Avant de donner la parole aux témoins, j'aimerais donner avis aux membres du comité des travaux prévus pour les deux prochaines semaines.

Nous allons commencer cet après-midi l'étude du projet de loi S-17. Il y aura une séance cet après-midi et une autre jeudi. Il y a ensuite une semaine d'ajournement et nous terminerons cette étude à notre retour.

Au cours de la même période, nos attachés de recherche vont travailler d'arrache-pied. Tout d'abord, Geoff Kieley se penche sur notre examen de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes et Dan travaillera à notre document sur les sciences. Jeudi, j'espère pouvoir brièvement échanger quelques vues avec le comité sur ces deux questions. Vous pourrez peut-être prendre le temps d'y réfléchir avant jeudi, et à la fin de la séance ce jour-là, nous essaierons de voir s'il est possible de leur donner quelques directives, pour la semaine de relâche, quant au document d'information qu'ils prépareront à notre intention.

J'aimerais maintenant accueillir nos témoins. Nous sommes ravis d'avoir parmi nous ce matin des représentants de quatre groupes différents: M. Pierre Fortier, du Groupe d'experts sur la commercialisation des résultats de la recherche universitaire; M. René Simard, président du groupe qui se penche sur le rôle du Canada dans la science et la technologie internationale; M. Bruce Hutchinson, président sortant de l'Association canadienne d'administrateurs de recherche universitaire et M. Robert Giroux, président de l'Association des universités et collèges du Canada.

Je propose que chacun d'entre vous fasse une allocution liminaire, si possible d'au plus cinq minutes, et nous passerons ensuite aux questions, car les membres du comité ont énormément de questions à poser à tous les témoins. Nous procéderons dans l'ordre indiqué, à moins que les témoins ne se soient entendus pour faire autrement.

Cela dit, je donne la parole à M. Pierre Fortier.

[Français]

M. Pierre Fortier (président, Groupe d'experts sur la commercialisation des résultats de la recherche universitaire): Merci, madame la présidente.

Le rapport ayant déjà été publié, je serai heureux de vous en donner un résumé. Je n'ai pas l'intention de parler de chacune des diapositives que j'ai préparées, mais il y en a quelques-unes sur lesquelles j'aimerais attirer votre attention, en particulier sur la deuxième.

Un rapport paru en 1994-1995 disait que le Canada souffrait d'un technology gap. Ce qu'on a appelé le technology gap, c'était l'intervalle beaucoup trop long qui s'établissait entre la recherche et le transfert des résultats au secteur privé. On disait que cela avait un impact sur la productivité de l'économie canadienne.

• 0905

Je passe rapidement sur les autres diapositives pour aller à celle qui est numérotée 8. Le titre de ma présentation est «Commercialisation de la recherche universitaire—Comparaison entre les États-Unis et le Canada». Dans le rapport que nous avons publié en 1999, nous disons:

[Traduction]

Le succès ne doit pas se mesurer par le nombre de licences négociées ou d'entreprises dérivées créées, mais plutôt par les avantages socio-économiques spéciaux que procurent ces activités.

[Français]

Malheureusement, à mon avis, on perd trop de temps à comparer la performance en citant des chiffres sur les brevets qui ont été accordés ou sur les spinoffs qui ont été créés. On devrait passer plus de temps à mesurer

[Traduction]

l'impact économique sur le développement économique du Canada.

Par le biais du gouvernement fédéral, les contribuables canadiens investissent 1 milliard de dollars dans la recherche au Canada, et ils s'attendent à ce que cet investissement se répercute sur le développement économique du pays.

Au bas de l'acétate 8, vous verrez une ligne indiquant les résultats des universités canadiennes, et juste au-dessus, une ligne verte qui montre, en 1998, un rendement de l'investissement équivalent à 2,87 p. 100 pour la recherche effectuée par les universités américaines, contre 0,82 p. 100 pour celles du Canada; si l'on fait une comparaison avec les 15 principales universités, c'est encore plus élevé. Il y a donc une énorme différence entre les revenus produits par les universités américaines et canadiennes.

Cela dit, nous ne citons pas ces chiffres pour souligner un rendement insuffisant, car de nombreuses universités canadiennes ont un excellent rendement et il est vrai qu'elles se sont lancées sur le tard dans la recherche. Si l'on tient compte du fait que l'université de Southern California a adopté une politique de commercialisation en 1926, tandis que le MIT et l'Université du Wisconsin mettaient en place leurs politiques dans les années 60, les universités canadiennes pour leur part n'ont adopté une stratégie de commercialisation que dans les années 90; cela explique en grande partie l'écart dans les résultats positifs de la commercialisation.

L'acétate 11 présente une citation tirée d'un rapport de l'OCDE sur la nouvelle économie, où l'on conclut en fait que cet écart dans les résultats a été dû à l'adoption de la Bayh-Dole Act. En d'autres termes, on dit dans ce rapport que les politiques adoptées en 1980 par les États-Unis ont été à l'origine de ce développement économique, car la technologie mise au point par les universités américaines a été rapidement commercialisée, ce qui a sans nul doute contribué au développement économique des États-Unis.

Dans notre rapport, nous déterminons quatre obstacles: l'absence de politique gouvernementale; le manque de ressources dans les universités; la pénurie de gens possédant les compétences nécessaires pour établir un rapprochement entre le milieu de la recherche et le monde des affaires et une reddition de comptes insuffisante. Nous expliquons les causes de ces quatre obstacles, même si, par exemple, on prend le manque de ressources des universités, certaines provinces ont dernièrement alloué des fonds à leurs universités pour les aider à commercialiser la recherche. Au Québec l'an dernier, un fonds spécial a été créé, mais un peu tard, et nous sommes toujours convaincus qu'il faut accroître les ressources auxquelles ont accès les universités si nous voulons qu'elles obtiennent de bons résultats dans ce domaine.

Si nous passons à l'acétate 14, il faut absolument adopter une disposition pancanadienne, car nous devons fixer des critères bien précis. Même si les universités canadiennes font ce qu'elles doivent pour contribuer à l'économie du pays, certains chercheurs estiment avoir tout loisir d'agir de leur propre chef et même de vendre le fruit de leurs recherches à des sociétés américaines. À mon avis, nous ne devons pas permettre ce genre de chose.

Enfin, nous passons à l'acétate 17. Je sais que vous en avez discuté, car j'ai lu la transcription de certains témoignages que vous avez reçus ces dernières semaines. À mon avis, la reddition de comptes est insuffisante si l'on pense que les universités reçoivent du gouvernement fédéral plus de un milliard de dollars pour financer la recherche. Il est très difficile d'obtenir des statistiques. Statistique Canada essaie depuis deux ou trois ans d'obtenir des données, mais les chercheurs ne sont pas tenus de rendre des comptes.

Dans certains cas, les universités n'obligent pas leurs chercheurs à divulguer leurs projets d'innovation en matière de recherche; les statistiques sont donc pratiquement inexistantes et il est très difficile d'en tirer quelque conclusion que ce soit. Il faut donc améliorer la reddition de comptes.

• 0910

Nos recommandations sont résumées à l'acétate 18. Il faut adopter une disposition visant «l'avantage pour le Canada». Il faut que les chercheurs divulguent à leur université la PI financée par des fonds fédéraux qu'ils commercialisent et l'université doit à son tour la divulguer au gouvernement. Il nous faut adopter une politique sur la propriété de la PI. Il faut prévoir des encouragements et les universités doivent soumettre à l'approbation du fédéral les politiques qui récompensent adéquatement les chercheurs novateurs. En ce qui concerne le financement, nous recommandons que le gouvernement fédéral octroie aux universités des subventions équivalant à 5 p. 100 des fonds de recherche de façon à soutenir la viabilité de leurs bureaux de commercialisation.

La comparaison avec les États-Unis est normale. Notre groupe a examiné la situation en Europe et dans le reste du monde, et il faut faire la comparaison avec les Américains car ils sont les meilleurs au monde dans ce domaine.

[Français]

Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Fortier.

[Traduction]

Je donne maintenant la parole à M. René Simard, qui représente le groupe chargé d'étudier le rôle du Canada dans la science et la technologie internationales.

Monsieur Simard.

[Français]

M. René Simard (président, Groupe d'experts sur le rôle du Canada dans les activités internationales de science et de technologie): Est-ce à mon tour de faire ma présentation?

Merci, madame la présidente.

[Traduction]

Si vous le permettez, je vais faire mon exposé en anglais et en français.

[Français]

Ma présentation de ce matin portera surtout sur les conclusions et les recommandations relatives au rôle du Canada dans les activités internationales de science et de technologie, une tâche que le Conseil consultatif national des sciences et de la technologie du premier ministre a confiée en 1999 au groupe d'experts que j'ai eu le plaisir de présider.

L'étude comprend une série de recommandations qui proposent un schéma directeur clair sur la façon dont le Canada devrait utiliser ses activités internationales en science et technologie pour que le pays soit perçu comme un véritable chef de file dans l'économie du savoir. Le mandat du groupe d'experts se présentait sous forme de trois questions.

Premièrement, quels sont les meilleurs mécanismes pour combler les besoins scientifiques? C'est une question qui s'adresse à la communauté scientifique, qu'elle soit localisée dans les universités, dans les laboratoires du gouvernement ou dans les entreprises.

Deuxièmement, quels sont les meilleurs mécanismes pour combler les besoins technologiques de nos entreprises, surtout celles qu'on visait ici, les petites et moyennes entreprises?

Troisièmement, quels sont les meilleurs mécanismes de gouvernance pour établir les priorités, coordonner les activités et tenir compte des questions associées au commerce et à l'investissement? C'est une question qui s'adresse surtout au gouvernement et à ses politiques en science et en technologie.

D'abord, pourquoi les activités internationales en science et technologie sont-elles si importantes pour le Canada? Je pense qu'il est important de s'attarder un peu là-dessus. Tout d'abord, dans l'économie du savoir, elles sont à la base du commerce et de l'investissement. Le Canada obtient un meilleur rendement de ses produits et services à forte intensité de connaissances, et l'investissement étranger dans les activités technologiques hautement spécialisées est à la source d'emplois fort rémunérateurs et de qualité supérieure.

Je rappelle que le Canada importe 65 p. 100 des nouvelles technologies qu'il utilise, ce qui démontre sa dépendance; que 25 p. 100 des brevets canadiens sont pris avec des collaborateurs étrangers, comparativement à 4 ou 5 p. 100 aux États-Unis; et que nous produisons seulement 4 p. 100 de la littérature scientifique mondiale et que nous devons donc avoir accès à 96 p. 100 des connaissances en provenance d'autres pays.

Troisièmement, une économie du savoir fait appel à une main-d'oeuvre spécialisée. Je parle ici des skills. Il est difficile d'attirer et de retenir les personnes les plus compétentes dans le monde si le Canada ne projette pas l'image d'une société axée sur les connaissances et à l'avant-garde.

Quatrièmement, sur le plan de l'environnement, les solutions aux problèmes comme le réchauffement de la planète et le développement durable reposeront sur une compréhension approfondie et commune de ces problèmes et sur une action multilatérale.

Cinquièmement, du côté de la santé, les épidémies telles que le sida et le virus encéphalitique du Nil, sans parler des épizooties telles que la fièvre aphteuse et la vache folle, ainsi que la migration rapide des maladies due à un accroissement continu des mouvements de population exigent une action concertée de l'ensemble des nations.

Sixièmement, la réglementation est au coeur même du système commercial international et protège la population canadienne. Dans l'économie mondiale, une bonne compréhension des connaissances dont sont issus les nouveaux produits est essentielle pour maintenir la confiance du public et assurer l'accès aux marchés étrangers.

• 0915

Enfin, septièmement, ce sont les individus, les réseaux de recherche, les centres d'excellence et les compagnies situés partout dans le monde qui sont à l'origine des idées et des technologies novatrices.

Les consultations du groupe se sont faites en trois étapes. D'abord, à la première étape, on a fait une collecte et une évaluation de l'information disponible à la suite de consultations par la poste et par téléphone aux niveaux national et international. Puis nous avons tenu six ateliers d'un bout à l'autre du pays, de Halifax à Vancouver, pour consulter à la fois des intervenants en provenance du gouvernement, des entreprises et des universités. Enfin, j'ai rencontré personnellement des cadres supérieurs du gouvernement en plusieurs occasions pour les mettre au courant du progrès du rapport et de ses orientations.

Trois messages sont ressortis des vastes consultations et des travaux d'analyse du groupe d'experts. Premièrement, il y a peu de synergie entre les activités internationales en science et technologie des divers organismes fédéraux. Par conséquent, on atteint rarement la masse critique requise, et l'influence et la crédibilité du Canada en souffrent.

Je vais en donner un exemple. Ici, il y a une décentralisation des activités de science et de technologie, qui sont réparties dans chacun des ministères. Quand la période des restrictions budgétaires s'est produite, tout le monde a coupé là où ça faisait moins mal; donc, tout le monde a coupé dans les activités internationales, ce qui fait en sorte que nous sommes très mal perçus par nos partenaires commerciaux. J'en donne certains exemples. Le Canada s'est retiré du financement de l'IIASA, l'International Institute for Applied Systems Analysis, alors qu'il était un des membres fondateurs. Il s'est retiré en partie du Programme de sondage des fonds marins, l'Ocean Drilling Program, même si nous sommes entourés de trois océans. Le Canada s'est aussi retiré aussi du Human Frontier Science Program, de telle sorte que le mot entendu dans nos consultations sur le plan international, c'est que le Canada fait un peu office de freeloader, que je traduis en français par «pique-assiette», soit un gouvernement qui veut être invité à toutes les réceptions mais qui ne veut pas payer sa place.

Deuxièmement, la plupart des autres pays se sont dotés de mécanismes plus efficaces ou d'un système plus centralisé pour aborder les questions horizontales relatives aux activités internationales en science et technologie. Je donne un exemple. C'est Industrie Canada qui est chargé de développer les politiques de sciences et technologie et c'est le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international qui est chargé de diffuser ces politiques à l'étranger. Il y a très peu de liaison entre les deux, du moins à ce que nous disent les conseillers scientifiques que nous avons consultés dans nos ambassades.

Troisièmement, le Canada accuse un retard par rapport aux autres pays en ce qui concerne les fonds spécialement affectés à la participation aux activités internationales de science et technologie. Le Canada possède environ 500 ententes bilatérales et multilatérales avec d'autres gouvernements ou d'autres organismes de science et technologie, mais il n'y a pas de fonds qui appuie ces ententes internationales.

Je passe maintenant aux recommandations.

[Traduction]

Dans le rapport final se trouvent trois recommandations que j'ai regroupées sous quatre rubriques dans mon exposé: l'intendance, la politique, la science et la technologie. Permettez-moi de commencer par la recommandation sur l'intendance.

Le Canada doit concentrer son processus décisionnel dans le domaine de la science et de la technologie internationales et mieux coordonner les activités dans ce domaine. Le groupe a reconnu que le Canada applique une politique décentralisée en matière de science et de technologie, et la recommandation doit donc en tenir compte pour être acceptable aux yeux du gouvernement.

À cet égard, nous recommandons la création d'un comité exécutif présidé par les sous-ministres d'Industrie Canada et du Commerce international. Un système de comité exécutif a déjà été mis sur pied avec succès dans le cadre du programme Parteneriats pour l'investissement au Canada. Cette approche garantira la synergie nécessaire entre les deux principaux organismes responsables de la S et T internationales. Il jouit déjà de l'appui des deux organismes.

Le comité en question se composera des principaux intervenants dans le domaine de la science et de la technologie, notamment du monde universitaire, gouvernemental et du secteur privé. Un petit secrétariat dirigé par une personne éminente de l'extérieur offrira des services de soutien au comité. Il est évident que cette recommandation pourra très facilement être mise en vigueur à moindres frais.

• 0920

Pour ce qui est de la politique, le Canada doit placer la science et la technologie au premier plan de ses relations internationales. Jusqu'ici, toutes les questions liées à ce domaine ont brillé par leur absence dans notre politique étrangère. C'est en tout cas ce que nous ont dit les conseillers scientifiques en poste à l'étranger, lors de nos consultations.

Nos initiatives en vue de faire du Canada un chef de file en matière d'économie axée sur le savoir, sur la scène internationale, continueront d'être entravées à moins que les échanges et l'investissement d'ordre scientifique et technologique ne soient intégrés à la politique étrangère du Canada. Les résultats des études internationales sont de plus en plus importants pour la négociation des accords et partenariats internationaux. Par exemple, les études sur les changements climatiques ont été et continuent d'être le fondement des négociations qui ont mené au protocole de Kyoto.

Étant donné qu'il n'y a que six conseillers scientifiques et technologiques et cinq agents du développement technologique détachés dans un nombre restreint d'ambassades et de consulats du Canada à l'étranger, et étant donné l'importance croissante des questions liées à la science et à la technologie, le groupe a estimé qu'il fallait accroître le niveau de connaissance et de compréhension de toutes ces questions au sein des nombreux autres représentants canadiens en mission à l'étranger.

La présidente: Monsieur Simard, je vais devoir vous demander de conclure rapidement car le temps file.

M. René Simard: Entendu.

Pour ce qui est de la science, nous recommandons la création d'un nouveau fonds afin de permettre l'accès aux programmes et activités de S et T au niveau international. Ce fonds doit être accessible au monde universitaire, au gouvernement et au secteur privé et être géré par un organisme déjà existant et non ministériel.

Le fonds permettra de financer, pendant une période limitée, des projets de recherche concertés de partenariats internationaux, la participation du Canada dans le cadre des ententes bilatérales et multilatérales et son rôle au sein de programmes et d'organismes de S et T internationaux, ainsi que l'accès du Canada aux installations internationales.

Nous recommandons que l'octroi des subventions de ce fonds se fasse en fonction de critères fondés sur l'excellence, le besoin stratégique et l'impact sur l'innovation. L'octroi devra se faire en tenant pleinement compte des stratégies provinciales relatives à la S et T internationale.

La dernière recommandation touche la technologie. Nous recommandons l'expansion du Programme d'aide à la recherche industrielle, le PARI, du Conseil national de recherches du Canada pour les marchés internationaux. Nous recommandons qu'on se concentre sur les petites et moyennes entreprises et que le PARI finance les ententes entre sociétés.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Simard.

Je vais maintenant donner la parole à M. Bruce Hutchinson, président sortant de l'Association canadienne d'administrateurs de recherche universitaire.

Monsieur Hutchinson.

M. Bruce Hutchinson (président sortant, Association canadienne d'administrateurs de recherche universitaire): Bonjour, mesdames et messieurs. Merci de m'avoir invité à comparaître devant votre comité.

Je représente ici ce matin les administrateurs et le personnel des petites aux plus grandes universités du Canada, et notamment leurs instituts de recherche et les membres de collèges qui participent actuellement à des activités de recherches.

Nos membres s'occupent de toutes les activités d'administration en matière de recherche aux universités, depuis l'établissement de politiques institutionnelles sur la recherche jusqu'aux détails de la gestion des comptes en matière de recherche.

Nous fournissons des renseignements aux chercheurs sur les possibilités de financement de projets de recherches nouveaux et passionnants; nous aidons les chercheurs à préparer des demandes dans le cadre de programmes; nous veillons à ce que toutes les conditions réglementaires soient respectées; nous ouvrons et surveillons les comptes de recherches; nous mettons sur pied des structures de gestion pour les projets de grande envergure; nous surveillons l'élaboration des importants projets institutionnels et faisons rapport aux organismes sur la façon dont les fonds ont été dépensés et nous fournissons des renseignements afin de promouvoir les résultats de la recherche. Dans bon nombre d'universités, nos membres s'occupent également de la commercialisation de la recherche.

Les membres de notre organisme sont des particuliers qui y adhèrent de façon à avoir accès à notre serveur de liste de courrier électronique, pour assister à notre assemblée annuelle et établir des contacts avec d'autres personnes qui font le même travail dans tout le pays, aux fins d'entraide et de perfectionnement professionnel. Les membres qui représentent des instituts de recherche petits et gros se consultent régulièrement pour se demander des conseils par le biais de notre serveur de liste.

Cela vous intéressera peut-être d'apprendre que le nombre de membres de notre organisme a augmenté, passant d'un peu plus de 200 en 1997 à près de 400 en 2001, soit presque le double. Cette augmentation correspond à l'accroissement des effectifs actuels de nos institutions qui estiment désormais devoir faire partie de notre association et des nombreuses personnes que les instituts de recherche ont recrutées parce qu'ils ont eu accès à du financement supplémentaire et à de nouveaux investissements dans le cadre de partenariats.

Pourquoi est-ce que je vous dis tout cela? C'est parce que les personnes en cause, les membres de l'ACARU représentent l'un des coûts indirects de la recherche qui s'effectue dans nos universités et nos institutions de recherche.

• 0925

L'augmentation des membres de l'ACARU constitue une autre forme d'augmentation des coûts indirects qu'ont dû subir les institutions au cours des quatre dernières années, sans aucune possibilité de financement de ces coûts indirects si ce n'est en vertu du programme des chaires de recherche du Canada. Pour ceux d'entre nous qui sont sur le terrain, pour ainsi dire, il est évident que l'accroissement des activités de recherche entraîne une augmentation des dépenses sur le plan des ressources bibliothécaires et des sources d'information pour les professeurs et leurs étudiants, ainsi qu'un accroissement de l'infrastructure de la technologie de l'information, des services de ressources humaines et d'autres coûts indirects, notamment ceux que représentent les membres de l'ACARU.

Même si nous nous réjouissons des nouveaux programmes de financement de la recherche comme la Fondation canadienne pour l'innovation, le programme des chaires de recherche du Canada, le projet Génome Canada et la Fondation canadienne pour les études climatiques et atmosphériques, tout cela représente un nouveau fardeau administratif qui entraîne des dépenses bien concrètes pour ces institutions de recherche. En outre, de façon à offrir une contrepartie au financement de certaines de ces initiatives, des programmes provinciaux et régionaux ont été mis sur pied, mais il faut du temps pour en faire la promotion et les administrer.

Nous ne serons pas sur un pied d'égalité avec notre principal voisin et concurrent tant que la question des coûts indirects ne sera pas résolue. Nos universités et instituts de recherche de tout le pays ont un rôle important à jouer dans le programme d'innovation. Nous devons avoir les moyens d'assumer ce rôle.

Il faut financer les coûts indirects pour permettre aux universités d'améliorer leurs services de technologie de l'information en vue du transfert des données de recherche et de profiter des liens de communication à haute vitesse entre les institutions, d'améliorer les laboratoires de recherche animale, d'assurer des soins aux animaux qui soient sûrs et d'excellente qualité pour l'évaluation des nouvelles méthodes de traitement, d'offrir un meilleur appui aux examens en matière d'éthique humaine et de fournir le soutien administratif qui permette la mise en oeuvre plus rapide des projets approuvés.

En outre, l'information relative aux ressources bibliothécaires à l'intention des chercheurs pourra être financée de façon satisfaisante. Voilà le genre de moyen qu'il faut donner aux universités et à leurs instituts de recherche pour qu'ils soient concurrentiels.

Même si les nouveaux programmes dont j'ai parlé plus tôt contribuent de façon cruciale au programme d'innovation, ces programmes et le renouvellement important du corps professoral qui sera nécessaire au cours des 10 prochaines années vont exercer des pressions énormes sur les conseils subventionnaires qui financent la recherche.

Le financement venant des conseils subventionnaires constitue la base des autres programmes de recherche appliquée. Si l'on veut que les universités et les instituts de recherche réussissent à recruter sur la scène internationale les chercheurs dont nous aurons besoin, il nous faut créer un milieu propice à la recherche fondamentale dans notre pays.

Si nous n'augmentons pas ce financement, nous n'aurons pas assez de chercheurs de haut calibre dont nous avons besoin pour former la main-d'oeuvre de plus en plus pointue dont a besoin le Canada et pour préparer la prochaine vague de professeurs dont nos institutions auront besoin. Il faudra pour cela que les fonds alloués par les conseils subventionnaires augmentent considérablement.

Étant donné que certains des membres de notre organisme participent à la commercialisation de la recherche, je manquerais à mon devoir si je ne parlais pas de l'appui que nous offrons à la commercialisation de la recherche effectuée par les universités. Même si un petit nombre d'entre elles prétendent être concurrentielles au niveau international, la grande majorité n'ont pour l'instant pas les moyens de miser sur leur potentiel de façon à contribuer au développement économique au niveau régional et national.

M. Fortier et les autres témoins de ce matin ont préparé des rapports à ce sujet, contrairement à notre association. Par conséquent, je n'ajouterai rien, si ce n'est qu'il faut accroître l'aide dans ce domaine.

Pour récapituler, si le gouvernement veut atteindre son objectif, à savoir passer du quinzième au cinquième rang pour ce qui est des dépenses brutes en matière de recherche et développement, nous devons créer une énorme capacité au Canada. La création de cette capacité dans les universités est une activité qui exige beaucoup de temps et fait appel à une main-d'oeuvre nombreuse. Il faut parfois de 18 mois à deux ans pour qu'un important projet d'infrastructure de recherche soit mis en place et prêt à produire des résultats concrets.

Je peux vous dire qu'il règne actuellement un climat très enthousiaste parmi nos chercheurs universitaires en raison des nouvelles possibilités de devenir concurrentielles sur la scène internationale, grâce aux nouveaux programmes mis en place. Pour maintenir cet enthousiasme, nous savons, en tant qu'administrateurs de recherche, qu'il faut fournir l'infrastructure institutionnelle nécessaire pour soutenir nos principaux chercheurs et les nouveaux candidats qu'il nous faudra recruter.

En conclusion, je tiens à souligner que la question des coûts indirects est de la plus grande importance pour les universités et les instituts de recherche. Nous devons accroître le financement des organismes subventionnaires pour soutenir la recherche.

Je vous remercie de votre attention.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Hutchinson.

Nous passons maintenant à l'Association des universités et collèges du Canada, représentée par son président, M. Robert Giroux.

[Français]

M. Robert J. Giroux (président-directeur général, Association des universités et collèges du Canada): Merci, madame la présidente, de m'avoir donné l'occasion de me présenter devant le comité.

Dans le discours du Trône de 2001, le gouvernement fédéral a demandé aux Canadiens de souscrire à un programme d'innovation audacieux et visionnaire. Comme vous le savez, le principal objectif de ce programme est de faire en sorte que d'ici 2010, en tant que chef de file mondial en recherche et développement, le Canada passe de la 15e à la 5e place des pays de l'OCDE en termes d'investissements relatifs en recherche et développement, occupant ainsi la place qui lui revient.

L'AUCC applaudit et appuie le gouvernement fédéral dans cet objectif. Pourtant, il faudra plus que des souhaits pour que le Canada atteigne ce but ambitieux de passer de la 15e à la 5e place.

• 0930

Sur cette diapositive, on voit qu'en 1999, avec un ratio de dépenses brutes de recherche et développement par rapport au produit national brut de 1,6 p. 100, l'investissement relatif du Canada en recherche et développement le plaçait loin derrière les autres pays de l'OCDE. Comme le montre la flèche rouge, le Canada devra atteindre au moins un ratio de 3 p. 100 pour rattraper les cinq meilleurs.

Mais, comme vous le savez, c'est dans une période de 10 ans. Pendant ce temps, les autres pays font aussi beaucoup de progrès. Certains pays, comme la Suède et la Finlande, sont déjà en voie d'atteindre les 4 p. 100 d'ici 2010. D'autres pays, comme la Grande-Bretagne, le Japon et les États-Unis, ont aussi pour objectif d'augmenter leur soutien en recherche et développement. Donc, ce sera un défi très fort pour le Canada. D'après nous, le Canada devra tripler d'ici 2010 ses investissements pour s'approcher de cette fameuse cinquième place qu'il convoite.

De par les mesures que le gouvernement fédéral a prises durant ces cinq dernières années, il montre qu'il considère les universités comme des partenaires essentiels pour atteindre ses objectifs ambitieux de recherche et développement. Ces investissements qu'il a faits dans les cinq dernières années attestent ce partenariat. Cependant, pour que les universités contribuent pleinement à la réalisation du programme d'innovation, elles doivent sortir de la crise qu'elles vivent actuellement.

[Traduction]

Madame la présidente, en qualité de porte-parole des universités canadiennes, je suis ici aujourd'hui pour vous dire que les universités ne sauraient être les partenaires essentiels que le gouvernement veut avoir et c'est qu'elles doivent être, à moins que les frais indirects de la recherche ne soient remboursés. De fait, les universités ont atteint un point où elles ne pourront plus assurer l'exécution de la recherche subventionnée par le gouvernement fédéral à moins que l'on apporte une solution réelle à la question des frais indirects.

Madame la présidente, je ne vous apprends rien. Il y a deux ans, votre comité a reconnu, dans son rapport au gouvernement, que l'absence de remboursement des frais indirects compromet sérieusement la capacité des universités de maintenir un environnement de recherche dynamique et concurrentiel à l'échelle internationale. Ces dernières semaines, votre comité a aussi formulé de sérieuses réserves sur la capacité des universités de toutes les régions du pays de constituer des partenaires à part entière dans la réalisation du programme d'innovation. Ces deux questions requièrent l'attention immédiate du gouvernement et ce sont les points clés que je désire aborder aujourd'hui avec vous.

Madame la présidente, M. Hutchinson a déjà parlé en abondance du coût indirect de la recherche. Permettez-moi simplement de souligner qu'étant donné que les universités ne reçoivent aucun remboursement des frais indirects de la recherche subventionnée par le gouvernement fédéral, elles doivent les récupérer d'autres sources. Par conséquent, afin d'appuyer l'entreprise de recherche, elles sont obligées de puiser sans cesse dams les fonds consacrés à l'enseignement et de différer l'entretien. Cette situation crée non seulement des tensions stériles entre l'enseignement et la recherche, mais produit aussi un soutien moins qu'optimal à la recherche. La diapositive qui vous est présentée montre les diverses catégories de frais indirects de recherche.

Il faut réparer cet oubli dans le financement de la recherche universitaire. L'AUCC soutient que le gouvernement fédéral devrait rembourser les frais indirects de la recherche au taux nominal de 40 p. 100 et le rajuster à la hausse pour les petites universités afin de tenir compte du fait que les coûts réels de la recherche qu'elles doivent assumer sont plus élevés.

Mesdames et messieurs les membres du comité, permettez-moi de vous dire pourquoi nous pensons qu'un taux de 40 p. 100 est une exigence minimale. Depuis 1970, l'une après l'autre, les études montrent que les frais indirects de la recherche subventionnée par le gouvernement fédéral ajoutent 40 p. 100 au minimum aux frais directs et aux coûts assumés par les universités pour payer les salaires des chercheurs principaux.

Devant ce fait établi, il est maintenant courant dans de nombreuses universités de demander un remboursement d'au moins 40 p. 100 au titre des frais indirects de la recherche contractuelle. Un rapport du Conseil consultatif des sciences et de la technologie présenté il y a quelques mois appuie aussi ce chiffre. De plus, certains gouvernements provinciaux demandent au gouvernement fédéral de payer ce taux.

Aux États-Unis, le taux moyen de remboursement est de plus de 50 p. 100, et les paiements couvrent un éventail plus large de dépenses en recherche. Les gouvernements de nombreux pays payent aussi les frais indirects de la recherche qu'ils commanditent.

Notre deuxième message clé d'aujourd'hui est qu'en plus du remboursement des frais indirects de la recherche, les petites universités ont besoin d'aide pour développer leur capacité de recherche de manière durable. Comme vous le savez bien, les 92 universités du pays ont le potentiel pour innover. Beaucoup de nos petites universités prouvent constamment qu'elles peuvent exceller en exploitant leurs points forts. Aucun établissement ni aucune région ne détient le monopole des bonnes idées de recherche. Il faut encourager tous les établissements du pays; cela est parfaitement réalisable.

• 0935

Le temps est venu d'une initiative fédérale qui aiderait à créer la capacité de recherche durable et à rehausser les volets de recherche sous-développés des petits établissements pour atteindre le but visé. Cette initiative allouerait par concours des fonds aux petits établissements afin de les aider à ériger des bases et à surmonter des obstacles en instaurant des initiatives ou des programmes régionaux qui reflètent à la fois les priorités des instituts et des régions.

Madame la présidente, le tableau que vous avez sous les yeux présente des défis précis, à savoir les initiatives que l'on pourrait prendre. Nous avons commencé par le défi de faire passer le Canada de la quinzième à la cinquième place dans le domaine de la recherche, tout en reconnaissant que les universités constituent des partenaires clés pour atteindre cet objectif. De toute évidence, pour avancer à la cinquième place, il faudra qu'un nombre croissant de professeurs effectuent plus de recherches et participent à plus de transferts basés sur la connaissance, et ce, dans plus de disciplines.

Pour réaliser ce programme, il faudra augmenter substantiellement le financement des organismes subventionnaires. Il faudra aussi donner plus de soutien direct pour former le grand bassin d'étudiants des cycles supérieurs qui seront nécessaires pour entreprendre des recherches novatrices, non seulement sur les campus, mais aussi dans les centres de recherche gouvernementaux et dans les laboratoires du secteur privé.

Toutefois, pour appuyer cette recherche directe, il importe de résoudre les questions des frais indirects et du renforcement de la capacité de recherche. De nouvelles initiatives visant à trouver une solution à ces deux défis renforceront de façon marquée la base de ressources de recherche des universités. Ces initiatives établiront une assise solide sur laquelle le Canada pourra faire reposer sa future prospérité en tant que pays figurant parmi les plus innovateurs du monde.

Lorsque ces deux éléments fondamentaux seront en place, nous pourrons affronter ensemble les nouveaux défis—et ils sont nombreux—qui nous attendent.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci. Nous passons maintenant aux questions, en commençant par M. Rajotte.

M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, AC): Merci à tous de vos exposés. Je vous sais gré d'être venus nous rencontrer.

Ma première question porte sur l'exposé de M. Fortier et sur le tableau où il compare les universités canadiennes aux universités américaines. Comment ces mesures sont-elles établies? De quels critères vous êtes-vous servis?

M. Pierre Fortier: Comme je l'ai dit, les statistiques touchant les universités canadiennes sont lacunaires. Le rapport de l'AUTM est, à peu de choses près, la seule mesure dont nous disposons. Certaines universités présentent des rapports à une association privée des États-Unis et c'est ainsi que l'on peut comparer les 12 meilleures universités qui envoient des statistiques à l'AUTM.

La diapo de la page 8 porte sur les revenus de licence et la recherche parrainée. En fait, cela ne représente qu'une seule mesure. Nous devrions également avoir—et cela n'existe pas—des chiffres sur les retombées: quels emplois ont été créés, quelle incidence cela a-t-il sur le développement régional? Je dois avouer que les universités canadiennes savent malheureusement très peu de choses quant à l'incidence de leur recherche sur le développement économique du Canada. Je crois qu'on pourrait corriger cette carence en améliorant la recherche dans ce secteur.

Toutefois, comme je l'ai dit dans mon exposé, lorsque David Strangway a comparu ici, il a cité un rapport de Bruce Clayman. Selon moi, M. Clayman est tombé dans le même piège que celui que nous signalons dans notre rapport, au sujet du nombre d'intrants dans l'économie.

Je suis issu du secteur privé où, normalement, on considère que la seule mesure véritable, c'est le bilan. Il ne s'agit pas tant de s'interroger sur ce que l'on fait que d'analyser les résultats. Étant donné que la recherche universitaire est très importante pour le développement économique du Canada, et dans certains cas pour le développement régional de certaines provinces, le critère à retenir devrait être celui des avantages économiques. Les avantages économiques se mesurent au nombre d'emplois et de nouvelles entreprises ainsi qu'à l'expansion des entreprises existantes. Or, malheureusement, nous n'avons pas beaucoup d'information là-dessus. Habituellement, les renseignements dont nous disposons portent sur les revenus de licence et la recherche parrainée. Ces renseignements révèlent qu'en moyenne notre rendement est d'environ la moitié du rendement des États-Unis.

M. James Rajotte: Vous avez dit que nous sommes renseignés quant à l'incidence sur les brevets mais pas sur les emplois et les nouvelles entreprises. Ne faudrait-il pas que nous ayons d'abord ces renseignements, avant de prendre la décision de faire de nouveaux investissements importants en recherche—même pour rembourser les frais indirects?

• 0940

M. Pierre Fortier: Non, je ne crois pas. Il suffit de voir ce qui se passe aux États-Unis. Je crois que nous sommes très jaloux. Beaucoup de pays sont jaloux du développement économique des États-Unis. Il y a un rapport de l'OCDE qui montre que leur politique de commercialisation a été l'une des raisons de leur succès. Ce n'est pas la seule raison, mais c'est une raison importante. Sachant cela, je ne crois pas que nous devrions faire beaucoup plus de recherches pour apprendre ce qui a une incidence sur le développement économique du Canada. Il nous suffit de voir ce qui se fait aux États-Unis et de nous dire que si tel domaine est avantageux pour eux, il l'est pour nous aussi et que nous devons donc nous y aventurer.

M. James Rajotte: En ce qui concerne l'observation de ce qui se fait aux États-Unis, vous avez parlé de réforme de la réglementation; je crois que vous avez mentionné la Loi Bayh-Dole.

M. Pierre Fortier: Il s'agissait de la Loi Bayh-Dole de 1980. Bien sûr, comme je l'ai dit, certaines universités ont adopté des politiques de commercialisation bien avant cela. Toutefois, en 1980, les résultats intellectuels de la recherche financée par le gouvernement fédéral américain appartenaient à ce gouvernement, à Washington. C'était donc très centralisé et cela donnait d'assez piètres résultats. Une des principales décisions prises en 1980 a été d'adopter une mesure législative selon laquelle, à partir de ce moment, lorsque des chercheurs donnent naissance à des concepts intellectuels, ces derniers n'appartiennent plus au gouvernement, mais à l'université où la recherche a été effectuée, l'établissement étant tenu de créer un bureau de commercialisation et d'assurer la commercialisation du concept intellectuel de façon à favoriser les entreprises américaines et préférablement les PME. Il est évident que cette politique a très bien fonctionné. C'est pourquoi, d'une certaine façon, ce que nous recommandons est semblable à ce qui s'est produit aux États-Unis en 1980.

M. James Rajotte: J'ai une autre question. Vous avez parlé de modifier le régime fiscal relativement à l'impôt sur les gains en capital et au traitement fiscal des options d'achat d'actions. Pouvez-vous préciser votre pensée?

M. Pierre Fortier: Mettons qu'un chercheur universitaire fasse de la recherche, qu'il découvre un produit ou une idée utile, qu'une entreprise naisse de ce produit ou de cette idée et qu'au bout du compte cette entreprise émette des actions en bourse. Je ne suis pas un spécialiste de la fiscalité, mais je crois qu'une fois qu'une entreprise est cotée en bourse, les actions qui appartiennent aux chercheurs ont une répercussion fiscale sur son revenu. Si ce chercheur est professeur dans une université, vous avez une idée du traitement qu'il reçoit. Si son invention est très prisée, les répercussions fiscales peuvent être considérables; selon moi, on devrait lui permettre de garder ses actions sans payer tant d'impôt. C'est un des exemples que nous donnons dans notre rapport. Lorsque la société issue de l'invention est créée, lorsqu'elle est cotée en bourse, cela a des conséquences fiscales sur le revenu du chercheur.

La présidente: Monsieur Rajotte, vous pouvez poser une dernière question.

M. James Rajotte: Pour ce qui est des frais indirects, je voudrais poser une question à M. Hutchinson. L'université que je connais le mieux est l'Université d'Alberta. L'an dernier, elle a connu sa meilleure année de collecte de financement. Or, les sommes considérables qu'elle obtient ne servent pas à réduire les frais de scolarité. Comment se fait-il donc que les universités n'absorbent pas ces frais indirects? Deuxièmement, quel serait le meilleur moyen d'indemniser les universités de ces frais indirects? Faudrait-il recourir à un fonds tel que celui de la Fondation canadienne pour l'innovation, ou faudrait-il plutôt envisager un autre fonds?

M. Bruce Hutchinson: La plupart des universités ont recours à des campagnes de financement pour obtenir les immobilisations nécessaires, la construction de bâtiments. À l'université Queen's, que je représente, nous avons des campagnes de financement afin d'accorder des subventions à des professeurs pour améliorer le milieu de l'enseignement et de l'apprentissage des étudiants. Parlons franchement: nous constatons que nos anciens élèves sont plus susceptibles de donner de l'argent pour des choses concrètes et pour subventionner des professeurs que pour ajouter encore un administrateur de recherche universitaire. Même si les anciens aiment bien leur université et même si l'université et eux se complètent bien, ce problème demeure entier.

De plus, notre organisation ne s'est pas prononcée quant à la meilleure façon de financer ce genre de choses. Nous avons trouvé des façons de répartir les fonds provenant de la Fondation canadienne pour l'innovation et du Programme des chaires de recherche du Canada. Personnellement je crois que certains de nos programmes sont fondés sur le montant qu'une université particulière reçoit des conseils subventionnaires, et nous serions très heureux de recevoir une partie de ce financement. Il existe divers mécanismes qui nous permettent de déterminer comment procéder. Je ne suis pas un expert en ce qui a trait à ce genre de politique, mais si c'est ce que nous recevions comme premier jalon, le secteur universitaire serait très heureux.

• 0945

La présidente: Merci.

Nous allons maintenant passer à Mme Torsney, mais j'aimerais vous rappeler que nous accueillerons un nouveau groupe de témoins à 10 h 30. Essayez donc d'être brefs.

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Je pense que ce que vous avez dit, MM. Simard et Fortier, révolutionnerait le secteur universitaire. Est-ce que les universités canadiennes appuient, dans l'ensemble, de telles propositions, monsieur Giroux?

M. Pierre Fortier: Vous parlez de la commercialisation?

Mme Paddy Torsney: Oui.

M. Pierre Fortier: Un rapport a récemment été publié au Québec; on avait invité un groupe d'intérêts formé de professeurs d'université dont certains s'occupaient de commercialisation, et d'autres pas. Évidemment, il faut comprendre que si vous êtes un professeur de littérature ou de psychologie, la commercialisation ne vous préoccupe. Mais pour ceux qui s'intéressaient de très près à la commercialisation, le rapport conclut que leur rendement était parmi les meilleurs aux chapitres du suivi des étudiants du niveau de la maîtrise et du doctorat, du parrainage des travaux de recherche, et de la recherche.

J'ai récemment eu le plaisir de discuter avec M. James Turk. Il est le directeur administratif de l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université...

M. Robert Giroux: L'ACPPU.

M. Pierre Fortier: C'était à l'université McGill, et il représentait tous les gens des universités qui disent, on s'en fout, on n'en veut pas, ce n'est pas logique. Je parlais de l'écart technologique, des problèmes de productivité dans l'économie canadienne—et tout cela est appuyé par des rapports de l'OCDE, d'Industrie Canada et de Statistique Canada. Il niait tout cela. Il disait que toutes les statistiques ne prouvent rien. Évidemment, si vous ne croyez pas que l'économie a besoin d'un petit coup de pouce, qu'il faut mieux la mettre en valeur, vous rejetterez tout ce qui touche la commercialisation.

Peut-être M. Giroux peut-il en parler parce que je ne suis pas le porte-parole des universités, mais je sais que nombre d'universitaires appuient cette idée. Les universités appuient maintenant la politique de commercialisation que nous avons mise de l'avant, à quelques détails près.

La présidente: Monsieur Giroux.

M. Robert Giroux: Très brièvement, madame la présidente, nous appuyons la commercialisation. En fait, nous avons rédigé un exposé de position sur la question—je ne sais pas si nous l'avons fait parvenir au comité; il est possible que nous l'ayons fait parvenir à vos responsables de la recherche—il s'agit d'un document qui fait état des paramètres en fonction desquels devrait se dérouler la commercialisation d'après les universités. Nous citons des statistiques, et nous disons que si toutes les bonnes politiques sont mises en oeuvre, s'il existe le bon type d'appui, et cela inclut les coûts indirects et la capacité des plus petites, nous croyons que les universités pourront tripler leurs activités actuelles, dans le domaine des enregistrements, des brevets, des entreprises dérivées et de certaines activités du genre, tout particulièrement les revenus qu'elles retirent de la commercialisation.

Les universités appuient donc cette proposition. Elles reconnaissent cependant que sur les campus mêmes il n'existe pas de consensus à cet égard, comme M. Fortier l'a signalé, et nos politiques sur la propriété intellectuelle dans les universités varient d'un bout à l'autre du pays. C'est différent de ce qu'on a accompli grâce à la Bayh-Dole Act des États-Unis. Cela dit, notre document fait ressortir que nous pouvons effectuer d'importants progrès dans le domaine de la commercialisation.

La présidente: Monsieur Hutchinson.

M. Bruce Hutchinson: J'aimerais placer la question dans un contexte plus général. Une de nos missions à l'université est le transfert de la connaissance à la société. Cela inclut les sciences humaines, les sciences de la santé et les sciences naturelles.

• 0950

L'autre question fondamentale qui se pose pour les universités est le respect de la liberté de l'enseignement. Si un professeur d'université invente quelque chose, il ou elle devrait avoir le droit de publier les renseignements pertinents. Nous voulons protéger ce droit, nous voulons donc protéger la liberté de l'enseignement.

Je tiens à indiquer que les universités à fort coefficient de recherche du Canada ont déjà des politiques qui appuient la commercialisation de la recherche entourant des inventions universitaires. Certaines en fait ont remporté un certain succès. Permettez-moi de vous donner trois exemples. Je crois que nous sommes tous au courant d'au moins un, l'Université de Waterloo où l'inventeur est propriétaire; l'Université de la Colombie-Britannique, qui a connu un succès assez important, où c'est l'université qui est propriétaire; et ma propre université, l'Université Queen's, qui a réussi dans le domaine de la commercialisation de la recherche où, là aussi, c'est l'inventeur qui est propriétaire et nous avons des ententes sur la façon de commercialiser la recherche et de retirer les avantages qui en découlent.

Je crois que nous pourrions tous dire que ces trois exemples, qui caractérisent des politiques différentes, ont un impact marqué sur les économies locales et sur la commercialisation de la recherche. En fait, à l'Université Queen's, après 15 ans d'efforts soutenus, nous sommes enfin rentrés dans nos fonds. Il s'agit d'un effort de commercialisation dont l'université est en réalité fière. Cet effort est à l'avantage de notre environnement d'enseignement et d'apprentissage global parce que nous pouvons maintenant réinvestir une partie de ces ressources dans la recherche.

Ce n'est donc pas un réalignement complet pour les universités à fort coefficient de recherche. Comme M. Giroux l'a signalé, nous voudrions que les universités du pays tout entier profitent de cette situation, y compris les régions où il y a de plus petites universités, et nous espérons que ces universités et ces efforts pourront être appuyés.

La présidente: Merci.

Monsieur Simard.

M. René Simard: M. Hutchinson a dit ce que je voulais ajouter.

La présidente: Dernière question, madame Torsney.

Mme Paddy Torsney: J'aime beaucoup vous voir analyser le pour et le contre de cette proposition parce que du côté avantages, je crois qu'il est clair que cela représenterait beaucoup d'argent pour les universités, que cela pourrait rendre certains professeurs très riches, et que cela permettrait peut-être également de payer pour certains des coûts indirects.

Du côté désavantages, je vois clairement qu'il y aurait deux types d'universités, qu'elles soient petites ou grandes, où il y aurait des universités qui réussissent très bien et les autres qui réussissent moins bien, et qu'il y aurait des écoles ou des facultés qui auraient un accès complètement différent au financement, sans qu'il y ait nécessairement un appui pour les professeurs de lettres ou de philosophie.

Par exemple, lorsque j'étais à McGill—cela fait déjà très longtemps—on avait un gros problème parce que le gouvernement avait décidé que les secteurs du génie, des sciences et du commerce auraient un soutien, et que les arts et lettres seraient en fait les victimes de cette formule de financement. Il y a eu des querelles incroyables pour savoir qui paierait pour les cours d'économie que nous suivions, qui étaient en réalité des cours sur les sciences humaines, et non pas sur le commerce. On disait «eh bien, la faculté de commerce est très riche, et il en va de même pour le génie, mais quant au reste, oubliez cela, nous n'avons pas suffisamment d'argent pour vous». Cela crée un problème au sein des universités, sur ce que les étudiants vont étudier.

Il est vrai que nous avons un écart de productivité et que nous devons faire quelque chose pour améliorer la situation et trouver de meilleures façons d'alimenter ce superbe moteur. Je crois qu'il faut être très prudent à l'égard de l'autre dimension au Canada, la culture et les sciences humaines. J'aimerais vraiment savoir comment vous comptez composer avec tout cela.

La présidente: Merci, madame Torsney.

Monsieur Fortier.

M. Pierre Fortier: C'est vrai, je suppose, et je suis convaincu que M. Giroux en parlera, il est exact qu'au sein des universités il y a des différences. Si vous étudiez en génie c'est bien différent que si vous êtes en lettres. C'est évident. Mais ce que je veux indiquer clairement, c'est que dans notre rapport nous faisons ressortir le fait que nous ne croyons pas que la commercialisation devrait avoir pour objectif d'assurer des revenus supplémentaires aux universités. Nous disons simplement que si le gouvernement fédéral dépense un milliard de dollars par année pour la recherche, plus 40 p. 100, soit 1,4 milliard de dollars, il s'agit là d'un investissement stratégique, qui devrait servir à appuyer le développement économique du Canada. Ainsi, l'objectif n'est pas d'assurer une augmentation des revenus des universités—quoiqu'une légère augmentation serait possible—mais plutôt d'avoir un impact sur le développement économique du Canada.

Je suis très heureux de voir que l'université est maintenant reconnue. Au début, lorsque j'ai présenté l'ébauche du rapport, je me souviens que certains professeurs d'université avaient dit «ne nous dites pas que cela deviendra un outil dont se servira le gouvernement fédéral pour assurer l'expansion économique». Mais vous savez, tout cet argent vient des contribuables, et ces derniers voudraient voir des résultats. Certains contribuables ne comprennent pas les avantages intellectuels de la recherche dans les universités et les choses du genre; cependant, s'ils voient des résultats comme ceux-ci, à l'avantage du développement économique du Canada, le ministre fédéral des Finances et les ministres provinciaux des Finances auront moins de difficulté à donner plus d'argent aux universités parce que le contribuable dira «on obtient quelque chose en retour».

• 0955

M. Robert Giroux: Peut-être pourrais-je ajouter quelque chose. Lorsque nous parlons de commercialisation, nous parlons d'une certaine activité de l'université. Il est clair qu'on désire faire plus, parce que, comme Pierre l'a signalé, les universités reconnaissent que cette activité contribue au développement économique, et c'est une bonne chose. Mais les universités ont beaucoup d'autres rôles à jouer.

Vous avez identifié un rôle très important—soit l'enseignement, la production de travailleurs intellectuels. Nous ne parlons pas simplement de travailleur intellectuel dans le domaine des sciences. Nous parlons des travailleurs du savoir dans toutes les activités universitaires. Un nombre toujours croissant d'employeurs disent maintenant «Donnez-moi un diplômé en philosophie. Je suis prêt à l'employer. J'ai besoin de quelqu'un qui puisse penser, qui puisse contester, se tourner vers l'avenir, et apprendre plus».

Je ne voudrais pas que le comité croit que la seule chose qui nous intéresse c'est la commercialisation. Nous avons appuyé carrément un soutien supplémentaire pour les universités. Nous avons dit que nous nous inquiétions de certains types de financement ciblé qu'on retrouve dans certaines régions du pays. Nous élaborons actuellement une campagne qui vise à faire ressortir la valeur et l'importance d'une formation en sciences et en arts libéraux, l'importance d'avoir des universités bien dotées en ressources pour s'acquitter de leur mandat. Le principal mandat, évidemment, c'est l'accès de la collectivité et le développement de celle-ci, l'étude de problèmes sociaux et autres qui découlent de l'impact du développement économique, la mondialisation, et tout le reste.

Vous avez donc raison, et je suis heureux que vous ayez soulevé cet aspect. La commercialisation ne représente qu'un petit volet. C'est quelque chose qui est là en fait pour assurer la croissance économique. Une université saine peut avoir un impact dans bien des domaines qui sont tout aussi importants que la commercialisation.

La présidente: Monsieur Hutchinson.

M. Bruce Hutchinson: J'aimerais ajouter brièvement que je suis d'accord avec ce que M. Giroux a dit. La majorité des universités ont maintenant rajusté leur financement interne pour accorder un plus grand appui à la recherche dans le domaine des sciences humaines parce qu'il y a des fonds externes qui sont disponibles pour les autres secteurs. Je crois que vous devez faire confiance aux universités et croire qu'elles réaffecteront leurs ressources en fonction de l'environnement externe. Ces secteurs nous sont très importants.

J'aimerais ajouter, au risque d'aller trop loin, que si nous avions une source de financement pour les coûts indirects liés à la recherche dans les sciences humaines, ça nous permettrait certainement d'affecter ces ressources pour aider ceux qui oeuvrent dans ce secteur afin, en fait, d'appuyer la recherche.

Encore une fois, même si vous investissez dans la commercialisation, cela ne représente qu'une petite portion de nos activités générales comme université, même dans une université comme la nôtre, où nous avons des activités de commercialisation importantes et prospères. Cela n'a qu'un petit impact sur l'ensemble des activités à l'université.

La présidente: Merci beaucoup, madame Torsney.

[Français]

Monsieur Brien, s'il vous plaît.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Tout d'abord, je vous remercie tous. Je crois qu'il y a des suggestions extrêmement concrètes et intéressantes pour stimuler la recherche et le développement dans notre environnement universitaire.

Ma première question s'adresse à M. Giroux. Quel est, à l'heure actuelle, l'avenir d'une petite université sans spécialisation ou sans créneau spécifique de recherche? Je suis extrêmement inquiet pour les petites universités qui n'ont pas une niche d'excellence dans un secteur particulier où il y se fait de la recherche.

M. Robert Giroux: Monsieur Brien, partout au pays, il y a beaucoup d'universités qui ont développé une niche d'excellence en termes de formation dans les domaines des arts et des sciences. Elles forment des gens en vue du marché du travail, ainsi que des gens au niveau du premier cycle qui iront ensuite dans d'autres universités au niveau de la maîtrise et du doctorat. Certaines universités réussissent très bien dans ce sens-là, comme en témoigne le magazine Maclean's. Dans la troisième catégorie du magazine Maclean's, il y a beaucoup d'universités qui ont acquis leur renommée, non pas à cause de leur succès en recherche, mais à cause de leur succès en formation d'étudiants diplômés.

Par contre, chaque université voit l'importance d'avoir un bon mélange de formation et de recherche. La recherche aide les étudiants à approfondir les choses et à être capables de contribuer davantage à l'économie du savoir.

Beaucoup de petites universités ont développé des créneaux intéressants, mais ces créneaux doivent être appuyés et avoir un plus d'aide afin d'avoir un impact encore plus fort dans leur communauté.

• 1000

On peut parler du Québec, que vous connaissez bien. L'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue a développé des créneaux importants du côté de la recherche minière. Elle a établi des partenariats avec les compagnies minières. Les pâtes et papier ont toujours été d'un grand intérêt pour l'Université du Québec à Trois-Rivières. La recherche du côté maritime, du côté des sciences de la mer, a toujours été intéressante pour l'Université du Québec à Rimouski, par exemple.

Donc, il y a des créneaux qui sont développés, mais il faut aider les universités à les développer encore plus. Elles ont de la difficulté à obtenir des fonds des conseils subventionnaires. Elles n'ont pas les infrastructures internes qui leur permettent de concurrencer et d'avoir autant de succès lors des concours. Donc, donnons-leur l'aide nécessaire pour qu'elles puissent avoir plus de succès lors des concours, augmenter leur excellence et développer leur capacité régionale. Le résultat sera qu'elles auront un impact sur l'innovation au niveau régional. Deuxièmement, elles vont produire des diplômés qui seront davantage prêts à aller sur le marché du travail et à faire valoir leurs connaissances.

M. René Simard: Je voulais donner des exemples de petites universités du Québec qui ont chacune des niches d'excellence, mais je pense que M. Giroux l'a fait. Il est certain qu'il y aura une pression sur les petites universités pour qu'elles développent des créneaux d'expertise, et je pense qu'elles ont déjà commencé à le faire.

C'est sûr qu'il y aura toujours une grande différence entre ces universités et certaines universités qui sont très développées dans le domaine des sciences de la santé et qui attirent donc beaucoup d'argent, non seulement des conseils fédéraux, mais aussi des sociétés philanthropiques, qui sont très présentes. Ces universités attirent beaucoup d'argent dans le secteur de la santé parce qu'il y a beaucoup de ressources qui sont là.

En général, les petites universités n'ont pas de faculté de médecine, de faculté des sciences de la santé, mais elles se développent des niches d'expertise et le font, je crois, avec beaucoup de succès.

M. Pierre Brien: Je vais poursuivre avec vous, monsieur Simard. Vous dites qu'il faudrait qu'il y ait un fonds au niveau des recherches internationales, en prenant en considération ce qui se fait dans les provinces au niveau des niches qu'elles ont développées au niveau international.

Est-ce que les provinces sont très actives dans les partenariats internationaux en recherche? Quelle est la situation au moment où on se parle?

M. René Simard: Il y a au moins quatre provinces qui ont des politiques identifiées de sciences et technologie à l'international. La Colombie-Britannique en est une. Elle s'oriente toujours vers l'Asie et elle a des niches d'expertise vraiment très précises. Le Québec, évidemment, est peut-être le modèle. C'est peut-être la province la mieux organisée sur le plan de ses relations à l'international. L'Ontario et l'Alberta ont aussi des politiques de science et technologie à l'international. Elles se sont choisi des créneaux. Pour le Québec, c'est très clair. Il y a, je crois, un Livre blanc de science et technologie qui vient d'être publié par le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Ces quatre provinces, au moins, ont des niches. Pour le fonds dont nous suggérons la création, l'un des critères d'octroi serait d'avoir l'appui d'une province d'où viendrait ce fonds.

Les autres provinces n'ont pas de priorités claires de ce côté-là, mais les quatre provinces que j'ai nommées nous ont dit qu'elles avaient des priorités et qu'elles aimeraient que ces priorités soient respectées s'il y a des projets qui proviennent de leur province.

M. Pierre Brien: Cette question s'adresse à M. Fortier. Si les universités réussissaient à améliorer la commercialisation et le développement de la propriété intellectuelle, est-ce qu'un écart se creuserait entre les petites et les grandes universités? Est-ce qu'il y a une préoccupation à cet égard? Est-ce qu'il y aurait une certaine péréquation dans la récupération des bénéfices?

M. Pierre Fortier: Jusqu'à récemment, au Québec, comme vous le savez, les BLEU, les bureaux de liaison entreprises-Université, étaient assez pauvres, même à l'Université de Montréal. J'en parlais tout à l'heure avec M. Simard. Ils avaient un BLEU de quatre ou cinq personnes. Il n'y avait pas de gens compétents pour évaluer les projets et négocier avec les entreprises de capital de risque.

• 1005

On y fait allusion dans notre rapport. D'ailleurs, la politique du gouvernement du Québec, qui vient d'être adoptée et qui, je crois, est également suivie dans d'autres provinces, est de créer des masses critiques. Le gouvernement a donné un fonds qui est administré par Valorisation-Recherche Québec, mais il a insisté pour que l'Université de Montréal travaille avec l'École polytechnique, l'École des hautes études commerciales et les hôpitaux affiliés. Il a aussi insisté pour que l'Université McGill soit associée avec Sherbrooke et pour que Concordia soit associée avec l'Université du Québec.

Autrement dit, dans le domaine de la commercialisation, il y a un besoin d'avoir des masses critiques. Pour qu'un bureau de commercialisation soit efficace, il faut qu'à l'intérieur de ce bureau, il y ait des experts dans différents domaines: dans le domaine des brevets, dans celui de la négociation légale, dans celui du financement, dans celui de la négociation avec les sociétés de capital de risque. En résumé, on peut dire qu'il faut un bureau de 10 à 12 personnes. Or, pour un bureau de 10 à 12 personnes, si on compte 100 000$ par personne, incluant tout, on parle d'au-delà de 1 million de dollars.

Il est clair qu'une petite université ne pourra pas avoir un bureau comme celui-là. C'est la raison pour laquelle il faut que les petites universités... D'ailleurs, quand j'ai discuté du projet de notre rapport, j'étais allé dans les provinces Maritimes. Les gouvernements du Nouveau-Brunswick et des provinces Maritimes en général favorisent ce système de bureaux de commercialisation qui sont regroupés pour servir plusieurs petites universités. Même au Québec, lors des négociations qui ont eu lieu récemment pour le projet de l'Université de Montréal, certains hôpitaux voulaient faire la commercialisation eux-mêmes. Ils voulaient garder une certaine autonomie. Ils disaient qu'ils voulaient faire cela seuls. Avec raison, le gouvernement du Québec a insisté en disant que s'il donnait de l'argent, il fallait que cela se fasse dans un bureau centralisé pour servir l'Université de Montréal et ses hôpitaux affiliés.

Il y a un besoin d'une masse critique, parce qu'envoyer 50 000 $ à une petite université, ça ne donnera rien. Il faut avoir une masse critique pour avoir un bureau de commercialisation qui soit bien structuré, afin que cela donne des résultats efficaces.

[Traduction]

La présidente: Merci. Merci, monsieur Brien. Encore une fois, j'aimerais rappeler qu'il y a trois autres personnes sur la liste des intervenants et que nous manquons de temps.

Monsieur Alcock, s'il vous plaît.

M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Merci, madame la présidente.

Merci. J'ai beaucoup aimé les exposés, tout particulièrement parce que je suis dans l'ensemble d'accord avec les arguments présentés sur la commercialisation. Cette activité assurera des avantages à la fois aux universités et à l'ensemble du pays. Plusieurs universités américaines qui ont déjà opté pour la commercialisation ont su répondre à certaines des préoccupations qui ont été soulevées.

J'ai une question à poser. Monsieur Hutchinson, j'ai beaucoup apprécié votre exposé présenté au nom de toutes les universités. Je remarque qu'apparemment, l'AUCC semble de plus en plus convaincue qu'il faudrait favoriser cinq universités aux dépens des autres. Je m'intéresse à cette question de soutien des infrastructures. Nous en avons beaucoup parlé entre nous. L'idée de mesure de soutien qui s'ajouterait aux subventions de recherche est accueillie très favorablement.

Le problème—ou du moins, l'une des questions souvent posées—ce sont les transferts aux provinces dans le cadre du TCSPS, que l'on qualifie souvent de soutien destiné aux infrastructures. On s'excuse ensuite en disant qu'on a déjà donné de l'argent aux provinces, qui le remettront aux universités. Voilà le soutien aux infrastructures.

Au cours d'une réunion précédente, on s'est demandé s'il ne serait pas utile de joindre aux subventions de recherche des fonds destinés aux infrastructures, quitte à supprimer carrément le soutien accordé aux provinces dans le cadre du TCSPS. On prétend tout simplement qu'il n'est pas certain que cet argent se rende jusqu'aux universités plutôt qu'ailleurs. Si nous voulons tirer parti de notre investissement en milieu universitaire, il faut trouver un mécanisme garantissant que les fonds soient versés directement aux universités.

M. Robert Giroux: Vous ne m'avez pas adressé la question, monsieur Alcock, mais j'aimerais y répondre.

M. Reg Alcock: Non, elle ne vous était pas destinée.

M. Robert Giroux: Tout d'abord, sur le TCSPS et sur le soutien à la recherche, il est tout à fait indispensable d'élargir les ressources des universités. Le dernier accord entre le fédéral et les provinces sur le TCSPS était entièrement consacré à la santé. L'ensemble du soutien accordé dans le cadre du TCSPS n'a que très peu augmenté.

Pendant un certain temps, les provinces ont dû resserrer, les crédits accordés aux universités, mais dans bien des cas, elles leur ont accordé des augmentations. Les autorités reconnaissent que l'enseignement et les autres fonctions universitaires sont en très forte demande. On prévoit une augmentation de 20 à 25 p. 100 du nombre des étudiants, ainsi qu'un roulement très important chez les professeurs. C'est pourquoi il ne faut pas que le gouvernement fédéral envisage de réduire le soutien accordé actuellement dans le cadre du TCSPS.

• 1010

Évidemment, on a toujours insisté sur l'importance du coût indirect de la recherche. Mais du fait de la croissance du côté de la recherche, à laquelle le gouvernement fédéral a largement contribué ces dernières années, des pressions de plus en plus lourdes s'exercent sur les sources générales de revenu des universités, dont une partie, consacrée précédemment à l'enseignement et à l'entretien, a été détournée vers les fonctions de recherche—et ce sont toutes les activités dont M. Hutchinson a parlé.

Il est donc indispensable, comme nous l'avons dit depuis le départ, d'intervenir aussi bien sur le front du TCSPS que sur celui de la contribution provinciale au budget de fonctionnement des universités, en envisageant de surcroît une augmentation du soutien fédéral à la recherche.

La présidente: Monsieur Hutchinson, voulez-vous également répondre?

M. Bruce Hutchinson: La question m'était adressée, mais je ne suis pas expert en la matière. La réponse de M. Giroux était excellente. Je peux cependant vous dire que sur le terrain, les problèmes sont réels, et que nous avons besoin d'une prise en charge des coûts indirects du soutien à la recherche. Notre organisme n'a pas étudié les mécanismes prévus dans le cadre du TCSPS—nous ne sommes pas experts en la matière—mais comme nous travaillons sur le terrain, nous pouvons constater la nécessité d'une amélioration dans ce domaine.

La présidente: Monsieur Alcock.

M. Reg Alcock: Non, c'est parfait. M. Giroux est intervenu au nom des cinq plus grandes universités, et c'est à nous de voir ce qu'il faut faire pour les autres.

Merci.

M. Robert Giroux: Madame la présidente, permettez-moi de signaler que nous représentons 92 membres, auxquels des nouveaux viennent s'ajouter chaque année. Nous représentons toutes les universités du pays, et c'est à ce titre que nous vous soumettons aujourd'hui cette perspective à deux volets.

Merci beaucoup.

La présidente: Monsieur Alcock, posez votre dernière question.

M. Reg Alcock: Puisque M. Giroux aborde la question, je vais lui demander s'il a consulté ses 92 membres lorsque l'AUCC a décidé d'attribuer ses chaires de recherche de façon sélective, en privilégiant fortement les cinq plus grosses universités. La décision a-t-elle été prise par l'ensemble de l'AUCC, ou par quelques personnes?

M. Robert Giroux: Madame la présidente, monsieur Alcock sait certainement que la répartition des chaires de recherche a été fondée sur les résultats obtenus par chaque université auprès du conseil subventionnaire; c'est ce qui a déterminé l'attribution des chaires. L'AUCC est intervenue à l'époque pour obtenir un mode de répartition différent, qui permet d'attribuer plutôt certaines chaires à de plus petites universités. Nous avons réussi partiellement dans notre démarche—peut-être pas autant que nous l'aurions souhaité—mais grâce à elle, l'attribution des chaires a été modifiée.

Encore une fois, madame la présidente, nous avons les mêmes préoccupations qu'au début. Dans notre mémoire au comité des finances de la Chambre des communes en septembre dernier, nous disions qu'il fallait faire quelque chose pour renforcer la capacité de recherche de toutes les universités canadiennes. C'est pourquoi je me présente devant vous aujourd'hui avec la même requête. À ce propos, une prise en charge des coûts indirects selon une formule qui favorise les petites et moyennes universités devrait augmenter sensiblement leur capacité de recherche.

Merci.

La présidente: En résumé, monsieur Giroux, l'AUCC n'aimait pas le mode de répartition des chaires. Est-ce qu'elle avait une proposition différente?

M. Robert Giroux: L'AUCC a participé à l'élaboration des chaires de recherche et a fait des propositions pour faire attribuer ces chaires à de plus petites universités, contrairement au classement traditionnel fondé sur le financement du conseil subventionnaire. Grâce à cette intervention, 6 p. 100 des chaires ont été attribuées à de plus petites universités.

La présidente: Merci.

M. Reg Alcock: Si vous avez des documents pour le prouver, j'aimerais que vous en fassiez part au comité.

La présidente: Cela vous semble possible, monsieur Giroux?

M. Robert Giroux: Excusez-moi, madame la présidente, je ne suis pas certain que nous ayons des documents à ce sujet. J'ai moi-même participé à cette démarche, et je suis prêt à répondre de mes propos.

La présidente: Merci.

Madame Desjalais, s'il vous plaît.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Dans le prolongement de cette demande, si vous avez participé à cette démarche, pourriez-vous nous présenter un document concernant votre proposition, par opposition au résultat concret? Cela vous paraît-il possible?

• 1015

M. Robert Giroux: Oui, je peux m'engager à vous décrire cette démarche, bien que tous les renseignements, madame la présidence, soient disponibles auprès des conseils subventionnaires. En fait, le CRSH, c'est-à-dire le conseil subventionnaire qui administre les chaires de recherche, pourrait vous expliquer dans le détail comment se fait l'attribution.

Mme Bev Desjalais: Bien. Ce qui nous intéresse, c'est le point de vue de l'AUCC. Vous dites qu'elle a formulé une proposition différente de celle qu'on a utilisée. Nous aimerions connaître cette autre proposition. C'est ce que nous aimerions voir.

M. Robert Giroux: Laissez-moi vous expliquer, madame la présidente. Nous avons participé à la demande initiale. Nous avons fait une proposition qui préconisait une formule d'attribution qui s'écarte un peu de l'ordre déterminé par le financement du conseil subventionnaire. Grâce à notre démarche, à laquelle le gouvernement a été sensible, 6 p. 100 des chaires de recherche ont été accordées à de plus petits établissements, qui ont donc reçu 6 p. 100 de chaires de plus que si on avait simplement appliqué le régime d'attribution fondé sur le financement.

Je peux vous envoyer la documentation, car cette démarche est la nôtre, c'est nous qui avons fait la proposition.

Mme Bev Desjarlais: Avez-vous proposé les 6 p. 100, ou simplement l'attribution de certaines chaires aux plus petites universités?

M. Robert Giroux: Nous avons appuyé la réattribution des 6 p. 100.

La présidente: Merci, madame Desjarlais.

La parole est à monsieur Cannis.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Merci, madame la présidente, et merci à nos témoins.

Évidemment, on repousse ainsi les limites du monde connu. Après avoir entendu les témoins précédents et vous-même aujourd'hui, je trouve encourageant de voir qu'on commence à utiliser des mots comme «commercialisation». Ces dernières années, c'était un mot tabou. Celui qui parlait de commercialisation commettait un péché.

En fait, je suis très heureux d'entendre M. Fortier dire que les universités et les chercheurs vendent à des compagnies américaines des éléments de propriété intellectuelle obtenus grâce à des fonds publics. Évidemment, ce domaine suscite des préoccupations. Pourriez-vous nous parler des obstacles qu'on y rencontre, et nous dire pourquoi ces obstacles existent?

Est-ce à cause des règlements? Est-ce parce qu'au plan interne notre système est trop compliqué, parce que les innovations ne s'accompagnent pas des mécanismes qui garantiraient leur conformité à la réglementation, par exemple? Est-ce que cela fait partie du problème, ou est-ce une question de manque de capitaux, les Canadiens n'étant pas prêts à prendre les mêmes risques que les Américains? Pouvez-vous nous donner des détails à ce sujet?

Vous avez dit aussi que les universités ne parvenaient pas à suivre le développement économique du Canada, alors qu'elles le font depuis longtemps aux États-Unis; ici, on s'attache plus aux questions de propriété intellectuelle qu'à la commercialisation. Se pourrait-il qu'on s'en rende compte aujourd'hui parce que la transparence est plus grande qu'il y a 8 ou 10 ans? La commercialisation pourrait nous aider à rattraper notre retard.

M. Pierre Fortier: Sur le premier point, vous avez raison. Je viens d'une province sur laquelle les curés avaient autrefois, disait-on, la haute main, et où ceux qui gagnaient beaucoup d'argent étaient mal considérés. Même le Québec a beaucoup changé, car nous ne voyons aucun mal au fait de gagner beaucoup d'argent. Je suis heureux de voir que même les universités reconnaissent aujourd'hui que l'un de leurs objectifs est de participer à la construction du Canada; c'est excellent.

Vous avez raison de signaler que nous n'avons accepté la commercialisation que tardivement par rapport à l'Université de Californie du Sud, qui a adopté une politique à cet effet dès 1926. À l'époque, ce n'était pas courant dans les universités canadiennes.

Actuellement, il faut admettre qu'aucune politique n'existe dans ce domaine. L'élément clé de notre rapport, c'est que le gouvernement fédéral a donné un milliard de dollars de fonds de recherche aux chercheurs—non pas aux universités, mais aux chercheurs—alors qu'il n'existe aucune politique sur l'utilisation des fruits de la recherche. Je ne veux pas dire qu'ils soient souvent mal gérés, mais je considère qu'il faudrait avoir une politique de commercialisation au Canada.

• 1020

Puisqu'il s'agit d'un montant de 1,4 milliard de dollars par an et puisqu'on est d'accord sur les 40 p. 100 dont parlaient M. Giroux et M. Hutchison, je dis simplement au gouvernement canadien, comme nous le faisons dans notre rapport, qu'il nous faudrait une politique concernant les bénéficiaires de ces montants. Comme il n'y en a pas, chaque chercheur universitaire peut faire ce qu'il veut. S'il signe un accord de consultation avec une société américaine, à laquelle il transfère ainsi la propriété intellectuelle, on ne peut le lui reprocher, puisque nous n'avons aucune politique à cet égard.

Il faut mettre en place au Canada une politique comportant une clause Canada, en vertu de laquelle la propriété intellectuelle résultant de la recherche doit profiter à des sociétés canadiennes, surtout à des PME, sous forme de retombées ou autrement. C'est très important. Je n'ai pas abordé ce thème au début de mon exposé, mais les universités canadiennes font plus de recherche que celle des autres pays de l'OCDE, à l'exception de l'Italie. C'est tout à fait fondamental et cela fait partie de la stratégie de développement économique du Canada. C'est pour cela qu'il nous faut une politique qui devrait être mise en place par le gouvernement fédéral. Nous disons donc essentiellement au gouvernement fédéral: adoptez une politique qui vous permettra d'imposer, en contrepartie des crédits de la recherche, le respect de certaines règles.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Fortier.

Monsieur Simard.

M. René Simard: Je pourrais vous donner de nombreux exemples concernant nos meilleurs chercheurs ou collaborateurs subventionnés par le conseil subventionnaire fédéral qui, lorsqu'ils ont mis au point une invention, sont allés aux États-Unis pour en obtenir le brevet. En raison de l'absence de toute politique de commercialisation, il est nettement plus profitable pour eux d'obtenir le brevet aux États-Unis. Dans la plupart des cas, on se trouve à perdre entièrement l'exploitation d'une invention canadienne. Il existe de nombreux exemples de ce genre de situation.

M. John Cannis: Comme vous l'avez dit, monsieur Fortier, des termes tels que «exploitation» et «commercialisation», n'ont plus de connotation négative. Je suis heureux d'entendre des gens comme vous les utiliser.

M. Pierre Fortier: Nous ne voulons pas laisser entendre que cela se produit dans la majorité des cas, mais même si cela se produit dans une minorité de cas, c'est trop. Nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre une telle perte.

La présidente: Je vous remercie.

Avant de passer à notre prochain groupe de témoins, j'aimerais poser une question. Nous avons des universités traditionnelles qui font, je suppose de la recherche traditionnelle, et nous leur accordons un certain nombre de chaires en fonction de cette tradition. Je viens d'une région où il y a une petite université, mais mise à part cette région, ce que j'entends dire de la part des représentants d'autres universités, ce que j'entends dans d'autres régions, et ce que j'entends des représentants de l'industrie, c'est que nous ne sommes pas dans la bonne voie. Nous n'écoutons pas les représentants de l'industrie. Nous n'arriverons jamais à passer de la 15e à la 5e place simplement en finançant à nouveau la même recherche ou les mêmes questions. Si nous ne cessons de financer la même recherche et que nous ne prenons aucune mesure vraiment novatrice ou dont l'impulsion provient de l'industrie, nous ne progresserons jamais et nous ne créerons jamais d'emplois. Au bout du compte, c'est le résultat que nous voulons atteindre grâce à notre recherche. Il ne s'agit pas uniquement de faire de la recherche. Au bout du compte, nous tenons à nous assurer que le Canada a des emplois et que les Canadiens peuvent conserver leur emploi. C'est très bien de dire que nous faisons de la recherche, mais si au bout du compte, nous ne maintenons pas ces emplois...

Je vais simplement utiliser le meilleur exemple que je connais, et c'est celui de l'industrie automobile. Nous savons tous qu'il existe 60 à 80 usines d'automobiles dans le monde aujourd'hui, beaucoup trop. Il y en a autant au Canada. Que faisons-nous pour nous assurer de faire preuve d'innovation dans ce domaine, pour nous assurer que ces emplois restent au Canada? D'après ce que je peux constater, pas grand-chose. Je constate que nous faisons la même chose, que nous finançons le même genre de recherche, et je constate que dans le cadre de ce processus d'examen par les pairs, que je considère intéressant, il existe une hiérarchie parmi les chercheurs et que les ingénieurs se trouvent plus ou moins au bas de l'échelle. Pourtant, en réalité, ce sont eux qui créent nos emplois.

Donc, il faut que nous agissions différemment. Je trouve inquiétant d'apprendre que le pourcentage accordé aux petites universités est de 6 p. 100. Et si les petites universités avaient 80 p. 100 des nouvelles idées? Pourquoi reçoivent-elles 6 p. 100 du financement? Je me soucie peu du passé.

Une voix: Vous devriez.

La présidente: Et le passé, c'est que toutes ces universités ont obtenu tout cet argent...

M. Reg Alcock: Ils croient à la concurrence.

La présidente: ...et ont fait toutes ces choses-là. Je me soucie du présent et de l'avenir. Le passé c'est formidable, mais ce dont nous devons nous occuper maintenant, c'est le présent et l'avenir, ainsi que le financement. Ce que je crains le plus, c'est que le Canada demeure en 15e place, peu importe le montant d'argent que nous consacrons au problème. C'est l'une de mes grandes craintes, et j'aimerais une réponse finale avant que nous passions à nos prochains témoins.

• 1025

Monsieur Giroux.

M. Robert Giroux: Tout d'abord, il ne fait aucun doute qu'il faudra un énorme effort de la part de tous les intervenants pour passer de la 15e à la 5e place. Les universités représentent 21 p. 100 de l'activité de recherche. Donc ce n'est pas en finançant uniquement les universités que vous allez atteindre cet objectif. Il est très important que les universités jouent leur part. Il est très important que les universités disposent de ressources suffisantes pour le faire. Mais parmi les pays de l'OCDE, c'est au Canada que les universités bénéficient le plus de partenariats avec le secteur privé, le secteur des entreprises. Environ 12 à 13 p. 100 du secteur privé fait ses recherches dans les universités, et 50 p. 100 de ses contrats de recherche sont passés avec des universités. Le Canada se démarque donc à cet égard parmi les pays de l'OCDE. Donc, j'ai beaucoup de difficulté à accepter que l'on dise que ce n'est pas une solution, que ce n'est pas la voie à suivre. Je pense que c'est l'une des voies à suivre.

Une autre façon de procéder bien entendu consiste à faire en sorte que le secteur privé même, c'est-à-dire principalement les petites et moyennes entreprises, soit en mesure d'établir des partenariats avec les universités. C'est là où les universités dans les régions et les petites universités ont un rôle extrêmement important à jouer pour ce qui est d'établir ce genre de partenariat. C'est pourquoi nous préconisons de leur offrir toute notre aide possible pour leur permettre d'accroître leur capacité en ce sens.

Si vous examinez les recommandations que nous avons formulées, madame la présidente, nous nous orientons dans cette voie. Je sais que le comité a certaines réserves à propos de la méthode utilisée pour accorder des subventions. Il s'agit d'un processus d'examen par des pairs, fondé sur l'excellence, qui a permis de mettre en branle un grand nombre de ces activités. Cependant, lorsque l'on parle à des spécialistes à l'échelle internationale de la meilleure façon de distribuer des fonds pour la recherche et le développement, ils ne cessent de dire que le processus d'examen par les pairs est la meilleure garantie de l'excellence. Je crois que nous devons l'accepter et élaborer d'autres politiques qui nous permettront d'atteindre le résultat voulu.

M. Pierre Fortier: Je tiens à souligner une chose à propos du transfert technologique, particulièrement en ce qui concerne les PME. Une étude faite au Québec il y a quelques années a indiqué que de nombreuses PME n'avaient pas parmi leur effectif d'ingénieurs et de personnes possédant des antécédents en science. Il faut comprendre qu'il est très difficile pour une université de transférer de la technologie à une PME si elle ne compte pas au moins un ingénieur parmi son effectif.

L'Ordre des ingénieurs du Québec a fait campagne et a visité, littéralement une à une, de nombreuses PME partout dans la province pour les convaincre d'embaucher au moins un ingénieur. Il faut qu'à l'université il y ait des gens qui sachent exactement en quoi consiste la technologie pour pouvoir le transférer à quelqu'un d'autre. Lorsque l'on parle de transfert de technologie, on parle de la transférer à un particulier, à un être humain. S'il n'y a pas quelqu'un dans une PME qui comprend ce dont il s'agit, vous perdez votre temps parce que lorsque vous transférez de la technologie, vous ne transférez pas des documents, vous transférez des connaissances, du savoir-faire. C'est un aspect que le PARI, en particulier, a grandement contribué à régler. J'ignore s'il devrait exister un programme pour les PME. Je crois qu'il en existe un au Québec, mais il faut qu'il existe un programme au Canada qui permet de s'assurer que les PME auront au moins un ingénieur parmi leur effectif.

La présidente: Des derniers commentaires? Monsieur Simard?

M. René Simard: Non.

La présidente: Monsieur Hutchinson?

M. Bruce Hutchinson: J'estime que la question de l'examen par des pairs est importante. La plupart des universités appuieraient la concurrence fondée sur l'excellence de la recherche. Il existe des programmes comme celui des Réseaux de centres d'excellence dans l'industrie automobile, qui se trouve en fait basé à votre université à Windsor. Il s'agit d'un programme national dirigé à partir d'une université régionale. Donc je crois qu'il existe des programmes en ce sens mais qui se fondent sur l'excellence des chercheurs.

J'aimerais simplement appuyer le commentaire fait par M. Giroux. Je viens de l'industrie. Je suis entré dans le système universitaire. Les programmes de financement de contrepartie mis sur pied par le gouvernement pour assurer la participation de l'industrie sont en fait importants. À ma propre université, environ 20 p. 100 du financement destiné à notre recherche provient de l'industrie. Nous sommes une université de taille moyenne. Nous nous sommes donnés pour principe d'être une université à fort coefficient de recherche. Nous ne voudrions pas que l'influence de l'industrie, augmente trop car un grand nombre des inventions qui vont stimuler notre économie ne proviennent pas de l'industrie mais de la curiosité des chercheurs qui débouche sur des innovations. Je pense qu'il est réellement risqué de s'aventurer trop loin dans cette voie.

• 1030

La présidente: Je vous remercie.

Je tiens simplement à dire que j'appuie pleinement l'excellence. Je crois qu'il ne fait aucun doute que tous ici présents au comité appuient l'excellence. Je crois aussi qu'il est important, Pierre, que vous parliez de l'innovation et que vous en teniez compte.

Quoi qu'il en soit, nous allons maintenant passer à notre prochain groupe de témoins. Je tiens à vous remercier d'avoir été des nôtres. Nous allons arrêter pendant environ trois minutes pendant que nous changeons de place.

• 1031




• 1036

La présidente: La séance est à nouveau ouverte.

Pour notre deuxième table ronde, nous avons le grand plaisir d'accueillir des représentants de trois conseils subventionnaires. Du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, nous accueillons ce matin M. Thomas Brzustowski, président; du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, nous accueillons M. Marc Renaud, président, et M. René Durocher, le directeur exécutif du Programme des chaires de recherche du Canada; et enfin des Instituts de recherche en santé du Canada, nous avons le grand plaisir d'accueillir également M. Allan Bernstein, le président.

Je propose que vous présentiez tous votre exposé après quoi nous passerons aux questions. Je suivrai l'ordre inscrit ici, en commençant par M. Brzustowski, à moins que vous vous soyez entendus autrement.

M. Thomas A. Brzustowski (président, Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada): Je vous remercie, madame la présidente.

[Français]

Merci de m'avoir invité encore une fois pour vous donner de l'information au sujet de la recherche universitaire.

[Traduction]

J'ai préparé un très bref document pour les membres du comité. Il ne compte que deux pages, j'espère que vous n'y voyez pas d'inconvénient.

La présidente: Non, c'est très bien.

M. Thomas Brzustowski: J'ai trois points que j'aimerais faire valoir à l'aide d'un diagramme qui illustre—et nous l'avons préparé pour que cela tienne sur une feuille de papier—la complexité et la fragmentation de l'appui de la recherche universitaire dans ce pays en sciences et en génie. Même ce diagramme compliqué n'est pas complet, et je vous indiquerai très brièvement comment.

J'aimerais attirer votre attention sur la ligne qui se trouve à environ deux pouces en dessous de la rubrique principale intitulée «gens» à une extrémité et «outils» à l'autre. Si vous examinez les dépenses en commençant par la gauche, les CP—les chercheurs principaux, les gens sans lesquels la recherche n'aurait pas lieu—sont payés en majeure partie par l'université. Lorsque j'utilise le terme «université», c'est la forme abrégée employée pour désigner le budget universitaire de base issu des transferts provinciaux et des frais de scolarité; c'est ce que je veux dire par université. Certains sont payés par le Programme des chaires de recherche du Canada, et dans 170 cas sur environ 9 000, par le programme des chaires du CRSNG. Les autres professeurs, par conséquent, sont payés à même les budgets des universités.

Le CRSNG—il s'agit de la case qui se trouve juste en dessous du titre, intitulée «PHQ découvertes et innovations»—appuie les gens, les découvertes et les innovations. Nous assurons ces trois aspects: la formation de gens extrêmement qualifiés; la recherche fondamentale dont l'objectif est la découverte; et des programmes d'innovation dont l'objectif est de créer des emplois, précisément le but que vous avez formulé, madame la présidente, à la fin de la dernière séance du comité.

Nous appuyons les gens—c'est-à-dire les étudiants des premier, deuxième et troisième cycles et du niveau postdoctoral—de deux façons, et c'est la raison pour laquelle il y a deux séries de flèches qui pointent vers les étudiants. La première, c'est grâce à des bourses qu'ils obtiennent eux-mêmes, et l'autre c'est à même les subventions de recherche versées aux chercheurs principaux. Ils peuvent être payés de l'une ou l'autre façon. En fait, un nombre à peu près équivalent d'étudiants reçoivent une aide financière selon chacune de ces deux méthodes. Nous offrons également une aide financière aux techniciens et adjoints de recherche spécialisés.

• 1040

La quatrième colonne à partir de la gauche est intitulée «Coûts d'exploitation». Il s'agit des coûts directs, des coûts que doit assumer le chercheur principal dans le cadre de sa recherche. C'est la raison pour laquelle nous accordons nos subventions de recherche dans bien des cas en plus d'appuyer les gens.

Si vous passez directement à la colonne de droite, je veux mettre en contraste les dépenses d'exploitation et les coûts indirects, dont le groupe de témoins précédent vous a parlé. Il s'agit des coûts que doivent assumer les universités où se fait de la recherche. Ce sont des coûts très importants qui sont assumés en majeure partie par les universités. Le Programme des chaires de recherche du Canada en assume aussi une certaine partie.

Au milieu, sous la rubrique «outils», nous avons l'infrastructure de recherche pour laquelle la FCI et ses partenaires assument la majorité des coûts d'immobilisation. Sous les dépenses d'exploitation, j'ai mis un point d'interrogation car on ne sait pas qui précisément les assume. La FCI a reçu un certain montant pour payer certaines dépenses d'exploitation mais pas pour l'ensemble des dépenses depuis le début du programme, donc on ne sait pas trop à quoi s'en tenir.

Voilà le diagramme, et j'espère que vous le trouverez utile. Dans les secteurs où des partenaires industriels travaillent en collaboration avec le CRSNG, les partenaires industriels partagent les coûts qui se rattachent aux étudiants ainsi que les coûts du personnel de recherche et les coûts d'exploitation.

J'aimerais maintenant passer aux trois enjeux que je voulais vous signaler à la première page.

Le premier, c'est qu'au cours du dernier concours qui a eu lieu en février, sur 3 000 demandes, 761 provenaient de nouveaux candidats. Il s'agissait de professeurs nommés dans des universités canadiennes qui avaient satisfait aux critères de nomination et qui étaient de nouveaux candidats pour le programme du CRSNG. Notre budget n'a toutefois pas été augmenté de façon à nous permettre d'accorder des fonds à ces personnes. Nous avons décidé d'offrir des subventions à 567 d'entre eux, au niveau de 39 p. 100 des fonds demandés, donc la proportion de candidats qui reçoivent une aide financière est importante. Cependant, le pourcentage du financement demandé qui en a fait été fourni est faible. Cela signifie que nous donnons à beaucoup plus de gens beaucoup moins que ce qu'ils ont demandé, contrairement à ce que nous faisons du côté industriel et dont je vais parler très brièvement.

Nous avons dû le faire à même notre encaisse étant donné que nous ne pouvons pas afficher de déficit. Nous avons dû suspendre les concours dans le cadre d'autres programmes assez vite pour assurer cette encaisse. Il s'agit d'une décision délibérée prise par le CRSNG car, étant donné que les subventions de recherche aux professeurs sont la fondation même de la pyramide sur laquelle tout tient, cela était notre priorité. Nous ne réduirons pas les programmes, mais nous suspendrons les concours pour compenser cet excédent de dépenses dans l'un de nos programmes.

Le deuxième enjeu concerne la FCI, dont j'ai déjà parlé.

Le troisième enjeu concerne les coûts indirects de la recherche. Lors d'une comparution précédente devant ce comité, j'avais rappelé aux membres du comité qu'un certain nombre d'entre nous de la haute direction du CRSNG avaient visité huit universités dans la région atlantique du Canada et cinq dans les Prairies pour déterminer quels étaient leurs problèmes en matière de renforcement de la capacité. Nous étions arrivés à la conclusion que la plupart d'entre elles se rangeaient dans la colonne de droite du diagramme. Pour une raison quelconque, elles n'ont tout simplement pas les installations ni la capacité voulue pour assurer ces services. Nous estimons que le renforcement de la capacité dans les petites universités doit mettre avant tout l'accent sur la prestation de ces services. Cela permettra aux membres du corps professoral de devenir plus productifs et de mieux réussir dans les concours nationaux.

Mon dernier point concerne la recherche appuyée conjointement avec l'industrie. Lorsque la recherche est parrainée conjointement avec l'industrie dans nos programmes de partenariat entre l'industrie et l'université, en moyenne, l'industrie verse à la recherche universitaire 1,60 $ à 1,70 $ pour chaque dollar que nous versons de notre côté. C'est donc la proportion, et elle a augmenté avec le temps. Dans ce cas, le taux de réussite est faible car peut-être 30 p. 100 des demandes sont financées, mais celles qui le sont le sont pratiquement au complet. On exécute un projet ou on ne l'exécute pas. Dans le secteur des subventions à la recherche, nous donnons aux gens suffisamment d'argent pour démarrer, ce qui est très différent.

Je terminerai ici, madame la présidente, et je me fais un plaisir de répondre aux questions.

• 1045

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Brzustowski.

Nous allons maintenant passer à M. Marc Renaud du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada.

[Français]

M. Marc Renaud (président, Conseil de recherches en sciences humaines du Canada): Mesdames et messieurs, bonjour. Merci de m'avoir invité.

[Traduction]

Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vais parler français. La dernière fois que j'ai comparu devant le comité, quelqu'un m'a dit, «Marc, si vous ne parlez pas français ici, qui diable le fera?» J'ai trouvé que c'était un bon argument et c'est pourquoi, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vais présenter mon exposé en français. Je tâcherai de parler lentement.

[Français]

Il y a un service d'interprétation. Il y a un document, qui pourrait vous être distribué, dans lequel il y a une version plus élaborée de ce que je vais vous dire. C'est un document dans lequel il y a un court texte de deux pages et une série de données et de tableaux.

Si j'ai bien compris, la question qui nous est posée ici ce matin est celle de savoir...

Je m'excuse, j'ai oublié de vous présenter René Durocher.

[Traduction]

René Durocher est le directeur exécutif du programme des chaires de recherche. Je tenais à ce qu'il vienne au cas où il y aurait des questions sur les chaires de recherche. Comme vous le savez sans doute,

[Français]

le Programme des chaires de recherche du Canada se rapporte aux trois conseils subventionnaires et à la Fondation canadienne pour l'innovation. Il y a un comité directeur composé des trois présidents, du président de la FCI et d'un représentant d'Industrie Canada. René Durocher est la personne qui, sur le plancher des vaches, contrôle ce programme. Donc, je voulais que René soit là au cas où vous auriez des questions sur ce programme spécifique.

Pour revenir à mon propos central, la question que vous nous posez, si je comprends bien, est celle de savoir en quoi les sciences humaines contribuent à l'innovation, au progrès. Cela sous-entend aussi la question de savoir ce que le gouvernement du Canada pourrait faire pour que cette contribution soit encore plus grande.

Dans le papier qui vous a été remis, il y a quatre sections. La première explique ce qu'est le CRSH. Essentiellement, le CRSH est le principal organisme subventionnaire pour toutes les sciences humaines au Canada. Le CRSH finance des gens en humanités, en sciences sociales, dans les écoles d'administration et de commerce, dans le domaine des sciences de l'éducation de dans le domaine des beaux-arts. Le CRSH couvre vraiment l'ensemble des aspects sociaux et humains des différents dossiers.

Les sciences humaines représentent au Canada plus de la moitié du corps professoral. Les sciences humaines sont représentées dans toutes les universités au Canada, de la plus petite à la plus grande, évidemment. Le rôle du CRSH est donc d'essayer de faire de son mieux pour appuyer la recherche dans ce domaine.

Maintenant, la question qui est posée est: en quoi les sciences humaines contribuent-elles à l'innovation? La première question qu'il faut se poser est: qu'est-ce que l'innovation? Bien sûr, l'innovation est l'introduction aux changements technologiques, mais on a souvent tendance à limiter l'innovation à l'introduction d'un changement technologique. En réalité, l'innovation, c'est beaucoup plus large que ça. C'est toute la capacité de développer de nouvelles idées, de nouvelles connaissances et de les appliquer. Dans ce contexte, la question qui se pose est non seulement celle du changement technologique, mais aussi celle de l'ajustement de nos organisations, de nos institutions, etc. aux changements technologiques. C'est également l'ajustement de nous-mêmes, de nos manières de penser, de faire, d'agir, à cause des changements qui se produisent plus généralement dans l'environnement.

Si c'est ça, l'innovation, quelle est la contribution des sciences humaines? Elles contribuent des connaissances très spécifiques. Il y a toutes sortes d'exemples dans le texte. Elles contribuent toutes sortes de choses pour nous aider à comprendre le changement, à changer nos comportements, à changer nos organisations, à changer nos institutions. Encore une fois, il est difficile de répondre à cette question sans donner plusieurs exemples. Je n'ai pas le temps de le faire aujourd'hui, mais il y en a un certain nombre dans le texte, qui sont extrêmement variables parce que, encore une fois, la quantité de matière grise qu'on met dans la recherche en sciences humaines au Canada est phénoménale.

Maintenant, la dernière question est: qu'est-ce qu'on pourrait faire pour aider les sciences humaines à mieux se développer au Canada et à mieux contribuer à notre devenir collectif? Le ministre des Finances, en octobre dernier, a annoncé une subvention supplémentaire de 100 millions de dollars pour le CRSH, soit 20 millions de dollars par année pour cinq ans, pour aider le Canada à mieux tirer profit de l'entrée dans la nouvelle économie. L'annonce sera faite officiellement par le ministre Tobin le 28 mai, à Toronto. C'est pour nous une bénédiction que d'avoir cet argent, parce que c'est une occasion de demander à nos collègues des universités de relever leurs manches et de voir comment le Canada pourrait faire mieux pour participer à la nouvelle économie. On est très heureux de ça, mais en même temps, il faut quand même savoir que c'est très ciblé comme investissement. Ça porte essentiellement sur les gens dans les facultés de commerce, les économistes, les gens dans le domaine de l'éducation.

• 1050

De manière plus générale, le CRSH est confronté à d'énormes difficultés. Si vous regardez les différents tableaux qui vous sont présentés dans ce petit cahier, vous constaterez qu'au fil des années, si vous regardez la balance ici, au fur et à mesure des investissements du gouvernement, il y a eu énormément d'argent affecté au développement des sciences naturelles, et c'est extraordinaire que ça ait été fait. Évidemment, les sciences humaines vont en bénéficier. Le fait que les Instituts de recherche en santé soient ouverts à la recherche en sciences sociales va changer les choses. Le fait que la Fondation canadienne pour l'innovation va enfin investir dans les sciences humaines va aussi faire avancer les choses. Mais il reste qu'un déséquilibre profond s'est produit, faisant en sorte qu'aujourd'hui, cette année, on dépense 1,5 milliard de dollars en sciences naturelles et seulement 200 millions de dollars du côté des sciences humaines et sociales.

Le problème, évidemment, tient au fait que la balance humaine, elle, est très différente, les sciences humaines étant plus importantes dans nos institutions universitaires.

Je saute par dessus toutes les implications. Évidemment, il y a des implications pour les petites universités et les universités moyennes, mais ça nous cause des problèmes titanesques au CRSH.

Je voudrais prendre juste un exemple. Au bas de la page 6 du document, il y a une tarte. Cette année, le CRSH a connu une augmentation de 20 p. 100 des demandes dans ses subventions ordinaires de recherche. Parmi ces 20 p. 100 de demandes supplémentaires, 60 p. 100 viennent de gens qui sont à cinq ans de leur doctorat, donc qui sont très jeunes. Pour arriver à maintenir un certain taux de succès raisonnable...

Vous ne l'avez pas? C'est une tarte comme ceci. On va regarder la copie anglaise: Standard Research Grants 2001-2002 Outcome of Competition.

Dans ce tableau, donc, on voit que même si on a suspendu le programme des ARUC, des Alliances de recherche université-communauté, même si on a limité nos investissements dans toutes sortes d'autres programmes, on se retrouve cette année avec un taux de succès réel de 36 p. 100.

Ce qu'il est important de savoir, par ailleurs, c'est que quand les comités de pairs font leurs évaluations, ils nous recommandent plus que 36 p. 100. En fait, ils nous recommandent—et vous l'avez en bas du tableau—32 p. 100 d'autres projets pour lesquels on n'a pas les ressources de financement.

Au tableau suivant, on vous donne une comparaison des taux de succès du CRSH et du CRSNG. Je ne dis pas ça pour critiquer le CRSNG. Bien au contraire, c'est le CRSNG qui fait ce qui devrait être fait. Le CRSNG, à l'exception de ce que Tom vient de mentionner, appuie proportionnellement un bien plus grand nombre de projets. L'année dernière, par exemple, on appuyait, parmi les chercheurs seniors, 46 p. 100 des gens qui faisaient une demande contre 76 p. 100 au CRSNG.

Cela a un effet majeur. Si, au CRSH, nous étions capables de financer l'ensemble des gens qui nous sont recommandés, cela ferait la différence qu'on voit dans le tableau qui s'appelle: Increase in SSHRC Standard Research Grants by Regions with Funding of 4A's. 4A's, c'est un mot du jargon pour dire «recommandé, mais non financé». On voit que si le CRSH finançait toutes les petites et moyennes universités qui sont recommandées, celles-ci recevraient un gain proportionnel énormément plus grand. On voit, par exemple, que dans les Prairies, il y aurait 139 p. 100 d'augmentation des projets subventionnés, 136 p. 100 dans les provinces Atlantiques et seulement 56 p. 100 en Colombie-Britannique.

Cela veut dire que les comités de pairs font le travail comme on s'attend à ce qu'ils le fassent, c'est-à-dire qu'ils mettent sur le dessus de la pile, dans le premier tiers, les gens qui ont un curriculum vitae extraordinaire et qui, souvent, travaillent dans des institutions où il y a énormément d'étudiants diplômés et de collaborateurs. Cependant, il y a des petites institutions—et j'ai visité récemment les provinces Atlantiques pendant 15 jours—où il se produit des choses phénoménales. Si seulement on pouvait mieux les appuyer! On voit que les projets qui viennent des petites et moyennes institutions ont tendance à faire partie du deuxième tiers. Les comités de pairs disent que ce sont de très bons projets, mais qu'ils sont moins sûrs qu'ils vont arriver à réussir.

Je vous décris tout ça pour vous dire essentiellement que si on veut que les sciences humaines au Canada arrivent vraiment à contribuer à l'innovation encore plus que par le passé, il faut arriver à faire, par rapport à tout le domaine des sciences humaines, ce qu'on fait cette année par rapport au domaine de la nouvelle économie, donc y investir plus d'argent. Voilà.

[Traduction]

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Renaud.

Nous allons maintenant donner la parole à M. Allan Bernstein des Instituts canadiens de recherche en santé.

• 1055

M. Allan Bernstein (président, Instituts canadiens de recherche en santé): Merci beaucoup, madame la présidente.

Je n'avais pas l'intention de parler longuement des ICFS eux-mêmes car je sais que votre principal domaine d'intérêt est l'innovation et le rôle du gouvernement à cet égard. Permettez-moi de vous dire quelques mots.

Vous vous souviendrez que les ICRS ont été créés par le Parlement il y a presque un an exactement. Le ministre Rock a annoncé leur création le 7 juin dernier, si bien que nous sommes à quelques semaines de notre anniversaire.

Les ICRS sont une nouvelle façon de définir, d'organiser, de financer et de catalyser la recherche en santé. Ils ont un vaste mandat qui va de la recherche fondamentale en laboratoire jusqu'aux recherches dans le domaine des sciences humaines en ce qu'elles touchent la santé—la santé de la population, la recherche en matière de services de santé. Nos programmes et nos structures reflètent ce mandat très vaste.

Je dirais que nous avons quatre sources de financement.

Premièrement, il y a la recherche à l'initiative d'un chercheur—un particulier peut au Canada demander une subvention.

Deuxièmement, il y a les initiatives stratégiques. Nos directeurs sont au nombre de 13, et ce sont des scientifiques qui représentent chacun des 13 instituts. Parmi ces instituts, se trouvent l'Institut de santé des peuples autochtones et des instituts sur la recherche sur le cancer, la génétique, etc., qui s'occupent activement d'élaborer des initiatives stratégiques. Mais j'y reviendrai.

Troisièmement, il y a le renforcement des capacités. Comme mes collègues l'ont signalé à propos du CRSNG, nous finançons des étudiants et des candidats au niveau postdoctoral, ou encore des stagiaires à qui nous offrons des subventions suivant un concours direct.

En outre, nous venons d'annoncer une nouvelle initiative, d'une subvention globale à la formation, qui vise à former des chercheurs en santé pour le XXIe siècle dans des secteurs qu'il faut consolider au Canada. Il s'agira d'un investissement de 4 millions de dollars de notre part, et nous espérons pouvoir trouver divers partenaires dans le secteur privé, auprès des provinces et auprès des organismes caritatifs en matière de santé pour au moins doubler cette somme. Au total, nous appuyons la recherche de 5 000 chercheurs à l'échelle du pays grâce à ces divers programmes.

Il y a un quatrième volet, et c'est celui de l'innovation et du transfert de technologie.

Je vous parlerai volontiers à un autre moment davantage des IRCS. Je dois ajouter que notre taux de succès est très bas. En fait, il est sans doute le plus bas des trois organismes subventionnaires fédéraux représentés ici ce matin.

On a désigné ce siècle comme étant le «siècle de la recherche en santé», le «biosiècle», le «siècle de la génomique»—et j'en passe. Je pense que cela illustre l'emballement extraordinaire qu'a suscité le séquençage du génome humain. Bien sûr, nous sommes maintenant en mesure de comprendre le fondement moléculaire de la biologie humaine, de la santé et des maladies. Les conséquences et les ramifications de cette nouvelle information vont être colossales. Elles vont influencer non seulement la recherche dans les universités et les hôpitaux, mais aussi dans l'industrie et les régimes de soins de santé étant donné la croissance explosive du secteur biotechnologique au Canada et de par le monde.

Je pense que le Canada a une occasion unique, vu l'importance de la recherche et du développement en général, ainsi que de l'innovation et du système de soins de santé, de vraiment jeter les assises d'un fondement solide pour ce nouveau siècle.

À mon avis, il y a des choses qui sont des évidences. D'une part, il y a plusieurs facteurs importants pour cette nouvelle économie, ce secteur de la haute technologie, qui comprend à la fois la technologie de l'information et la biotechnologie. L'un d'entre eux est la centralité des idées et de l'innovation. L'innovation et la nouvelle économie sont axées sur la connaissance qui est le véritable moteur de la croissance économique. Dans tout cela, les gens, le capital humain, des gens hautement compétents constituent la cheville ouvrière permettant de créer cette nouvelle connaissance qui est le pipeline de la découverte.

À mon avis, il faut que le gouvernement fédéral traduise ses théories en action. Si je vous avais adressé la parole il y a cinq ou dix ans, j'aurais dû reconnaître que le gouvernement fédéral avait beaucoup à faire pour appuyer la recherche et le développement et l'innovation. Je pense que depuis cinq ans en particulier, quand on songe aux nouveaux programmes créé par Ottawa pour appuyer la recherche et le développement, l'avancée a été assez remarquable. Il y a eu un changement du tout au tout dans les niveaux d'appui à la recherche au Canada.

Sommes-nous parvenus au but qu'il nous faut atteindre en ce nouveau siècle? Non. Toutefois, je pense que les mesures adoptées sont orientées nettement dans la bonne direction.

• 1100

Je pense que tous les gouvernements ont dans le cas qui nous occupe deux intérêts. D'une part, ils doivent exploiter le pouvoir et le rythme des découvertes scientifiques pour réaliser la prospérité économique, d'autre part, ils doivent veiller à éduquer les Canadiens pour que tous puissent profiter de cette nouvelle économie et y contribuer.

Je pense que nous avons de bonnes raisons de nous inquiéter... il faut que le public soit mobilisé. Quand on songe à l'aspect confidentiel lié à la génomique et à la génétique, par exemple, nous constatons qu'il faut un dialogue permanent avec le public canadien pour qu'il comprenne les enjeux de même que les avantages et les inconvénients potentiels de toute cette nouvelle science. Bien entendu, le reste du monde ne marque pas le pas.

Le gouvernement australien m'a invité à visiter l'Australie dans deux semaines pour parler de notre expérience avec les ICRS. Je vais me rendre dans six villes d'Australie à cette fin.

Madame la présidente, la réaction de l'Australie au défi de l'innovation s'intitule Backing Australia's Ability: An Innovation Action Plan for the Future. Il s'agit d'un ensemble impressionnant de documents relatant ce que l'Australie fait dans ce nouveau siècle. C'est le seul exemplaire que j'ai, mais je vous en fournirai d'autres volontiers. Ces documents couvrent le genre de préoccupations scientifiques exposées devant vous ce matin.

Bien sûr, ce sont les États-Unis qui sont nos voisins. Leur proximité n'est pas que géographique mais culturelle, de sorte qu'ils représentent un puissant pôle d'attraction, un défi que nous rencontrons en permanence ici. Eux non plus ne marquent pas le pas.

Permettez-moi de citer un discours que M. Charles Vest, président du Massachusetts Institute of Technology, prononçait la semaine dernière. À propos des énormes investissements que le gouvernement fédéral fait dans le domaine de la recherche et du développement, dans celui des sciences et celui de la technologie, aux États-Unis, M. Vest avait ceci à dire:

    Le moteur [de l'innovation] ne peut fonctionner que si le gouvernement lui fournit le carburant pour appuyer la recherche fondamentale [...] en tant que nation

... c'est-à-dire les États-Unis...

    nous ne faisons pas ce que nous devrions pour garantir notre puissance future en matière d'innovation.

    Il nous faut convaincre nos dirigeants fédéraux que la recherche fondamentale générale constitue un investissement, et non pas un coût. Il faut les convaincre que l'innovation ne va pas «se faire toute seule».

Ce sont des propos intéressants qui nous viennent des États-Unis, où l'on investit, en tout cas dans le domaine de la recherche en santé, six fois plus qu'au Canada, par habitant. C'est donc un point de vue fort intéressant.

J'ai fait distribuer des documents et à la page 14—et je ne vais pas les parcourir—j'ai inscrit ce qui à mon avis constitue quelques-uns des facteurs clés qui contribueront à l'innovation au Canada.

Évidemment, il nous faut avant tout des gens exceptionnels. C'est sous la rubrique «Facteurs incitant l'innovation». Il nous faut une masse critique en grappes. Je pense que la masse critique est capitale. Il nous faut une infrastructure—je pense que cela est couvert désormais par la Fondation canadienne pour l'innovation, même si on peut en discuter. Nous avons désespérément besoin d'un appui financier pour nos chercheurs qui se compare favorablement à ce qui se fait dans les autres pays. En matière de santé, nous sommes presque à mi-chemin. À mon avis, nous sommes loin de pouvoir concurrencer les autres pays à cet égard.

Si je me permets de critiquer mon propre pays, je dirai qu'il nous faut ici être plus sagaces. Les choses bougent très vite dans le domaine scientifique, surtout dans le secteur de la santé, dans celui de la biotechnologie. Nous, les Canadiens, consacrons beaucoup trop de temps à palabrer sur ce que nous devrions faire et pas assez à agir. Il nous faut être plus vifs à tous les niveaux—dans les institutions fédérales, nos institutions hôtes—s'emparer des nouveaux débouchés. Il nous faut un transfert de la technologie de pointe. Il nous faut un transfert de la technologie articulé.

Si vous vous reportez à la page suivante, ou plutôt à la page précédente, vous verrez un diagramme de pipeline.

La réussite d'un plan d'action pour l'innovation tient à des sociétés d'investissement en capital de risque qui comprennent bien le secteur des biotechnologies. Ce dernier, par contraste au secteur de la haute technologie, reste axé essentiellement sur la recherche fondamentale, sur les complexités du travail en laboratoire et, de plus en plus, sur le lien avec la population. Les sociétés d'investissement en capital de risque de ce pays ont énormément amélioré leur connaissance du secteur des biotechnologies, mais elles ont encore beaucoup à apprendre. Voilà pourquoi les IRSC se donnent pour mission d'élaborer des programmes à l'intention des sociétés d'investissement en capital de risque pour les aider à mieux connaître le secteur.

• 1105

L'avant-dernière acétate décrit la vision de l'innovation de IRSC. Vous y trouverez quelques-uns des programmes que nous avons lancés, à compter de cette année, afin de stimuler l'innovation dans la recherche en biotechnologie et en santé. C'est pour moi le pipeline de la découverte dont le rythme est limité par certains obstacles. Notre rôle, c'est d'agir comme catalyseur chaque fois qu'il y a un obstacle au progrès.

Merci.

La présidente: Merci.

Nous passons maintenant aux questions en commençant par monsieur Rajotte.

M. James Rajotte: Merci, madame la présidente.

Je vous remercie tous de vos exposés. Je les ai trouvés excellents.

Je vais commencer par monsieur Brzustowski—et je suis désolé si j'ai mal prononcé votre nom.

M. Thomas Brzustowski: C'est très bien, merci.

M. James Rajotte: J'ai bien apprécié vos commentaires sur la complexité et la fragmentation des modes de financement de la recherche et du développement puisque je fais le même constat quand j'examine les mécanismes de financement mis en place par le gouvernement fédéral. D'ailleurs, quand j'ai discuté de la chose avec quelqu'un d'un autre conseil subventionnaire, il s'est dit d'avis que, dans bien des cas, le financement versé par l'entremise de la FCI devrait l'être par le CRSNG. Il ne travaillait pas pour le CRSNG, mais c'était son avis. Je me demande s'il n'y a pas double emploi quand le Programme des chaires de recherche du Canada et le CRSNG financent tous les deux les professeurs.

Je ne sais pas si ma question est injuste, mais le CRSNG ne pourrait-il pas faire ce que font la FCI et le Programme des chaires de recherche du Canada, ou est-ce vraiment nécessaire d'avoir deux programmes distincts qui s'ajoutent au CRSNG?

M. Thomas Brzustowski: Permettez-moi de parler d'abord du Programme des chaires de recherche. Bien entendu, le CRSNG joue un rôle dans le Programme des chaires de recherche. Je suis membre du comité directeur, comme le sont mes collègues présidents. À mon avis, le mode d'administration du programme comporte des avantages. Le programme est unique, ciblé, d'une portée limitée. Mais cela a aussi une conséquence. Les titulaires des chaires de recherche du Canada demanderont des fonds d'exploitation au CRSNG, et c'est pourquoi, dès l'annonce de la création des chaires, nous projetons que cela exercera des pressions sur notre budget. Ensuite, certaines des personnes énumérées dans la colonne de gauche frapperont à notre porte pour obtenir du financement pour leur recherche.

Étant donné le processus de sélection, ils seront parmi les meilleurs à se faire concurrence. La pression qu'ils exerceront sera, en moyenne, plus grande que celle qu'exercent les autres demandeurs de fonds. Ils sont dans la première tranche de 6 p. 100 environ.

Quant à la FCI, je pense que c'est une excellente idée d'avoir créé une fondation dont la mission est d'investir de façon ponctuelle dans des grands travaux d'infrastructure, de dépenser les fonds lorsqu'ils sont disponibles au lieu de s'engager de façon durable à financer des projets dont l'échéancier et les coûts sont parfois incertains. Or, depuis quelques années déjà, nous tentons de sensibiliser le comité des finances, votre comité et d'autres encore, ainsi que nos collègues de la fonction publique et les ministres, aux frais d'exploitation de cette infrastructure. Il faut de l'argent pour gérer tout cela. Nous savons que la FCI a reçu des fonds pour l'exploitation d'une partie de cette infrastructure, mais cela ne suffit pas pour couvrir tous les besoins remontant au lancement du programme. Ainsi, il y a certaines installations déjà construites pour lesquelles nous prévoyons recevoir des demandes de financement, à moins que le gouvernement ne modifie le mandat de la FCI.

Je ne vois pas le CRSNG comme un empire à défendre. Je sais que nous sommes des intermédiaires, que nous fournissons des fonds à ceux qui en ont besoin pour faire le nécessaire. Peu importe que les fonds soient acheminés par nous ou par la FCI. Mais les fonds doivent aller là où la demande est la plus grande.

M. James Rajotte: Ainsi, peu importe, à condition que le gouvernement couvre les frais d'exploitation. Que ce soit la FCI ou le CRSNG...

M. Thomas Brzustowski: Je pense qu'il serait plus sensé que la FCI reçoive les fonds nécessaires pour couvrir les frais d'exploitation des installations qu'elle a financées. Elle connaît déjà les projets. Nous continuons de financer l'achat d'outils, de petits instruments, d'équipement, et autres choses du genre, et nous continuerons de le faire. Les demandes de financement pour couvrir les frais d'exploitation des titulaires des chaires de recherche du Canada continueront de nous parvenir exclusivement.

M. James Rajotte: Monsieur Renaud, j'aimerais parler brièvement des sciences sociales. Vous avez relevé la disparité dans le financement des sciences naturelles et des sciences sociales. J'ai moi-même une formation en sciences sociales mais j'ai tendance à approuver de cette disparité parce que—je me fais l'avocat du diable ici—le gouvernement met l'accent sur la commercialisation du savoir et sur l'innovation, de sorte que le financement des sciences sociales semble en quelque sorte corrompre la recherche en sciences sociales. C'est là où l'on met l'accent. Il s'agit moins de stimuler la réflexion indépendante qui ne peut pas réellement se mesurer en termes économiques.

• 1110

J'aimerais entendre votre réaction.

M. Marc Renaud: Bien entendu, les chercheurs du secteur des sciences humaines sont moins voués à la commercialisation de produits que ne le sont nos collègues des sciences naturelles. C'est manifeste. C'est un thème qui revient constamment depuis mon arrivée à Ottawa il y a trois ans et demi.

Est-ce que cela signifie que les connaissances du domaine des sciences sociales n'a aucune valeur? Absolument pas. Il se fait toute une gamme de recherches utiles pour la formulation de politiques. Il suffit de prendre le cas de la télévision. Qui va à la télévision expliquer la société dans laquelle nous vivons? Ce sont des chercheurs en sciences humaines.

Il se fait de la commercialisation dans certains secteurs bien précis. C'est aussi un secteur qui a un potentiel incroyable. Je suis du Québec et j'avoue avoir été stupéfait de voir le traitement que réserve aux sciences humaines le Canada anglais. Au Québec, le financement est beaucoup plus important surtout parce que le gouvernement du Québec y investit beaucoup d'argent. Par conséquent, il y a probablement plus d'experts dans divers domaines. Il y a davantage de débats. La société civile s'intéresse davantage aux grandes questions d'actualité qui nous préoccupent. Il m'apparaît donc injuste de miser tout sur la commercialisation.

Nous sommes témoins de changements étourdissants à l'heure actuelle et ce projet de nouvelles économies que nous allons lancé le montrera très clairement. Il s'agit de savoir comment nous allons nous adapter à tout cela. Comment allons-nous nous adapter aux changements? Ce sont les connaissances résultant de la recherche en sciences humaines qui nous seront les plus utiles à cet égard.

M. James Rajotte: Je partage certainement cet avis sur leur utilité. Toutefois, ce qui me préoccupe, c'est que le gouvernement semble vouloir utiliser de façon optimale les deniers publics et met donc l'accent sur les retombées de la recherche. J'estime que ces retombées sont plus difficiles à mesurer dans le cas des sciences sociales. Les chercheurs en sciences humaines à qui j'ai parlé me disent que pour obtenir du financement, ils doivent s'intéresser à des domaines de recherche à la mode, pour ainsi dire. C'est ce que me disent les chercheurs à qui j'ai parlé.

M. Marc Renaud: Ce n'est pas vrai. Je vous invite à examiner notre système d'examens par les pairs. C'est extrêmement sérieux. Je ne crois pas que ce système d'examen par les pairs soit parfait, mais cela permet un débat extrêmement sérieux sur la qualité des hypothèses et des méthodologies. Nous faisons énormément appel à des appréciateurs indépendants américains. Ils se disent très impressionnés par la qualité de notre système d'examen par les pairs.

Je crois donc qu'il est injuste de dire que c'est une recherche à la mode. Bien entendu, il y a des modes. Nous parlons de sciences humaines, et il est donc inévitable qu'il y ait un certain effet de mode. Toutefois, je ne crois pas que ce soit le cas pour l'essentiel des travaux que nous finançons.

Vous avez parlé des retombées. Il y a toutes sortes de retombées. Comment expliquer que bon an mal an, 65 p. 100 des étudiants de premier cycle soient inscrits en sciences humaines et que 55 p. 100 de nos jeunes poursuivent des études supérieures en sciences humaines? La recherche enrichit aussi la qualité de l'enseignement que reçoivent ces jeunes.

M. James Rajotte: Merci.

M. Bernstein, nous nous demandons constamment comment utiliser au mieux les budgets de la recherche. S'agissant de la recherche en santé, il faut souvent d'importants investissements sur 30 ou 40 ans avant d'obtenir des résultats. Je me demande si vous avez des conseils à nous donner qui nous aideraient à faire le bon choix d'investissements dès le départ.

M. Allan Bernstein: Vous soulevez une excellente question. Dans les domaines que je connais le mieux, la recherche nécessite effectivement un investissement à long terme. Je crois donc que le gouvernement fédéral aurait tort de s'attendre à un rendement rapide pour chacun des multiples projets dans lesquels il investit.

Songez que la révolution génomique, omniprésente dans tous les travaux de recherche en santé auxquels s'intéresse l'IRSC, remonte en réalité aux années 50 et à la découverte que l'ADN avait la forme d'une double hélice et qu'elle était la source des données génétiques.

À cette époque, personne ne songeait à d'éventuelles applications commerciales. D'ailleurs, quand la technologie de l'ADN ribosomique—la technologie du clonage des gènes—a vu le jour dans les années 70, personne n'avait imaginé les retombées économiques.

• 1115

Il faut donc que le gouvernement fédéral fasse le bon choix de programmes et de chercheurs. Il faut réexaminer la situation toutes les x années, où x a une valeur de cinq. Il faut que la recherche soit financée à des niveaux compétitifs au plan international et il faut prévoir un rendement sur investissements.

Je pense qu'il n'est pas téméraire de dire, particulièrement maintenant, que la recherche de qualité, de calibre international, peut toujours donner des retombées économiques. Je n'aurais pas osé dire cela il y a 10 ou 15 ans, mais c'est ce que nous enseigne l'expérience des dernières années.

Mon conseil serait donc d'investir à long terme, d'investir dans l'excellence et de promouvoir et de faciliter le transfert de technologies. C'est le mieux que vous puissiez faire. Misez sur les résultats.

La présidente: Merci, monsieur Rajotte.

Monsieur Lastewka, s'il vous plaît.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Merci, madame la présidente.

Monsieur Bernstein, vous aviez engagé la discussion sur les sociétés d'investissement en capital de risque et sur le fait que... Je m'y connais mal, et je ne sais pas au juste ce que vous tentiez de nous dire et voilà pourquoi j'aimerais que vous nous expliquiez un peu mieux le rôle des investissements en capital de risque, des difficultés que vous avez dans votre secteur et des mesures que vous prenez pour les surmonter.

M. Allan Bernstein: J'aimerais dire d'emblée que la situation s'est nettement améliorée.

Il y a cinq ans environ, on m'a invité à aller rencontrer quelques investisseurs en capital de risque à Dallas pour leur parler de la création d'une entreprise de biotechnologie spécialisée dans la thérapie génique, l'un de mes domaines de prédilection. J'ai été très impressionné. Ils connaissaient tous les chercheurs aux États-Unis, savaient qui faisait quoi. Ils connaissaient tous les intervenants du secteur. Par conséquent, ils faisaient des investissements très risqués mais leur décision était informée.

Quand on ne connaît pas les intervenants, quand on ne connaît pas les chercheurs, on prend moins de risques.

À la même époque, au Canada, une ou deux sociétés d'investissement en capital de risque étaient bien renseignées sur les chercheurs et la nature de leurs travaux. La situation s'est améliorée énormément, mais il reste encore beaucoup à faire.

Dans l'Ottawa Citizen d'aujourd'hui, il y a un article intitulé «Virus on trial» (Virus au banc des accusés), au sujet de John Bell, un chercheur ici à Ottawa au Centre régional de cancérologie. La nouvelle est à la fois bonne et mauvaise. John a reçu du financement de nous, en partenariat avec l'Institut national du cancer du Canada, pour mettre au point un virus qui tuera exclusivement les cellules cancéreuses. Il y a trois ans, il n'a pas réussi à convaincre une société d'investissement en capital de risque de notre pays d'investir dans sa recherche. Il travaille donc avec une société de Bethesda, au Maryland, pour mettre au point ce virus qui fera l'objet cet été d'essais cliniques ici à Ottawa et aux États-Unis.

Nous étions donc heureux de tenir là une belle idée, un projet scientifique d'envergure mondiale, et peut-être une thérapie pour ce qui est évidemment une maladie grave. Mais les investisseurs en capital de risque de notre pays ont refusé d'y donner suite.

Ce n'est pas une critique de ma part. Il s'agit là de décisions fondées, et je n'étais pas au courant de tous les aspects de la question, et ainsi de suite.

En réponse à la dernière partie de votre question, notre rôle au IRSC est celui d'une agence de rencontre, si vous voulez, visant à mettre en rapport le milieu des chercheurs et le milieu des investisseurs en capital de risque pour qu'ils puissent se connaître, comprendre les fondements scientifiques des projets, connaître les divers acteurs, et aussi à initier les investisseurs en capital de risque à un domaine scientifique qui évolue très vite. Il est déjà très difficile de se tenir au courant même quand on est dans le domaine, alors c'est encore plus difficile pour le voisin.

Nous avons donc rencontré le responsable du Fonds de découvertes médicales canadiennes, le Dr Cal Stiller. De concert avec le CRSNG, nous finançons un programme dans les Prairies, qui s'appelle WestLink, et qui a pour but de former les gens dans l'investissement en capital de risque. Nous allons créer d'autres programmes comme celui-là afin d'attirer dans le secteur du capital de risque des personnes qui connaissent le milieu scientifique canadien, qui connaissent la science canadienne.

M. Walt Lastewka: J'ai posé la question parce que, étant donné que j'ai fait des études sur la petite entreprise et l'accès au capital, on en conclut très vite que le plus important, c'est la préparation des petites entreprises, la préparation des chercheurs, qui doivent essentiellement mieux expliquer ce qu'ils font.

Nous avons des fonds de capital de risque dans le Canada atlantique qui attendent là-bas depuis cinq ou six ans, et il s'agit de près de 30 millions de dollars. La dernière partie de ma dernière question avait trait au fait qu'à mon avis, nous vendons mal notre produit aux investisseurs canadiens en capital de risque, si l'on compare notre situation à celle des États-Unis, et il faut que les investisseurs en capital de risque soient non seulement informés maintenant mais aussi à l'avance de telle sorte qu'ils fassent partie de l'ensemble du système, et lorsque le moment vient de réunir des capitaux de risque, ces investisseurs sont déjà au courant. On dirait qu'on oublie de paver la voie et qu'on frappe à la porte seulement quand on est prêt.

• 1120

M. Allan Bernstein: Je n'aurais pas pu dire mieux. Voilà pourquoi j'ai employé cette analogie de l'agence de rencontre. Les deux milieux doivent se rapprocher, se comprendre et comprendre les enjeux scientifiques.

Nos homologues américains, les chercheurs américains, ne sont pas vraiment plus doués que les Canadiens lorsqu'il s'agit d'expliquer leurs idées scientifiques aux investisseurs en capital de risque, mais ces mêmes investisseurs sont tellement au courant des réalisations scientifiques qu'ils savent où aller renifler, et ils savent où aller regarder, et nous devons encourager cela au Canada.

Les choses se sont beaucoup améliorées. Il y a plusieurs organisations qui font un superbe travail. Nous devons en faire davantage et nous servir des pratiques exemplaires qui existent partout au Canada pour aller encore plus loin.

M. Walt Lastewka: Le IRSC n'a-t-il pas la responsabilité de mieux informer les investisseurs canadiens, les investisseurs canadiens en capital de risque, et de s'assurer qu'ils savent à quelle porte frapper partout au pays? Est-ce que cela ne fait pas partie de vos responsabilités?

M. Allan Bernstein: Oui, c'est notre responsabilité. D'ailleurs, regardez au bas de la page 5 de notre documentation, qui est intitulé Pipeline de la commercialisation en biotechnologie, vous allez voir une case qui dit «IRCS», avec une flèche pointant vers les transferts technologiques et l'industrialisation.

L'activité que cela recouvre consiste en partie à faire exactement cela, à unir ces deux milieux. Cette année nous allons, entre autres choses, créer un portail de recherche pour les chercheurs investisseurs en capital de risque, les Canadiens qui s'intéressent à la recherche en santé, ou pour les écoliers de sixième année qui ont un projet scientifique. Le portail pour les investisseurs en capital de risque servira de point de rencontre pour ces investisseurs et pour les chercheurs canadiens et les bureaux de transfert technologique des universités et des hôpitaux qui ont quelque chose à vendre, qui pourront ainsi prendre un contact initial et poursuivre leurs échanges.

M. Walt Lastewka: J'aimerais beaucoup que vous nous parliez de ce que vous faites pour sensibiliser les investisseurs à l'avance.

M. Allan Bernstein: Comme je l'ai dit, je suis très au courant de cela parce que je suis allé à Dallas, où j'ai vu que les investisseurs connaissaient tout le monde. Lorsque je suis rentré au Canada, on m'a invité à prendre la parole devant une grande société d'investisseurs en capital de risque canadienne, que je ne nommerai pas, donnera un cours élémentaire en génétique. Ces gens-là avaient 20 ans de retard sur leurs homologues américains. C'était il y a cinq ans de cela.

La présidente: C'est votre dernière question, monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka: Je suis d'accord avec vous, et à mon avis, il appartient à votre organisme de sensibiliser les investisseurs.

M. Allan Bernstein: J'accepte cette responsabilité.

M. Walt Lastewka: Il y a 10 ou 12 ans de cela, on entendait exactement la même chose dans le secteur de la technologie de l'information. D'ailleurs, nous avions tenu une conférence sur cette question au palais des congrès.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Lastewka.

[Français]

Monsieur Brien, s'il vous plaît.

M. Pierre Brien: Merci, madame la présidente.

Je pense que les illustrations des besoins deviennent de plus en plus concrètes. Je pense que tout le monde est d'accord sur le fait que vous avez besoin de moyens financiers supplémentaires.

Ma question s'adresse autant à M. Renaud qu'à M. Brzustowski. De combien avez-vous besoin, finalement? Vous nous dites que vous avez besoin d'argent supplémentaire. Quels sont vos besoins financiers, que ce soit pour le financement récurrent ou pour d'autres projets spécifiques qui viendraient appuyer vos efforts?

M. Thomas Brzustowski: Ma réponse sera simple. Sur notre site web, vous trouverez notre business case, qui explique que nous avons besoin qu'on double notre budget sur quatre ans. Les besoins et les raisons sont très clairs: nous voulons un budget continu parce que nos besoins sont continus.

Les grands projets sont quelque chose de spécial qui est hors de notre mandat, de notre responsabilité. La création de la Fondation canadienne pour l'innovation me semble être une très bonne idée pour obtenir le financement pour de tels projets.

Nos besoins correspondent au double de notre budget sur quatre ans.

M. Pierre Brien: D'accord. Je vous remercie.

M. Marc Renaud: Nos besoins sont du même ordre. Ils sont expliqués sur l'acétate «Que doit faire le Canada?».

Premièrement, il faut absolument que nous augmentions le soutien aux étudiants, dans le domaine des sciences humaines, au niveau de celui du CRSNG. Présentement, nous finançons 5 p. 100 des étudiants diplômés alors que le CRSNG en finance 10 p. 100. Le montant de notre subvention est de 2 000 $ inférieur à celui du CRSNG.

• 1125

Nous n'avons aucun programme de soutien à la maîtrise, ce qui est une catastrophe pour les petites universités, par exemple de l'Atlantique. Nous n'avons aucun programme de soutien aux étudiants de premier cycle pour les intéresser aux sciences sociales. Simplement pour en arriver au niveau actuel du CRSNG, il nous faudrait 45 millions de dollars. Les programmes sont prêts à partir. Juste pour amener un programme de soutien à la maîtrise à ce niveau, il nous faudrait 20 millions de dollars. C'est notre première demande.

Notre deuxième demande, c'est d'amener notre taux de soutien aux chercheurs au même niveau que celui du CRSNG. Il est important de comprendre que les sciences médicales, les sciences naturelles et le génie sont en avance de 10 ans sur nous pour ce qui est du comportement des chercheurs. Au CRSNG, 80 p. 100 des chercheurs font une demande chaque année. Dans notre cas, c'était à peine 15 p. 100 il y a quatre ans, et c'est maintenant 25 p. 100. Nous constatons donc que de plus en plus de gens s'inscrivent aux concours. Les universités leur disent que s'ils n'ont pas de subventions du CRSH, ils n'auront pas de permanence. Avec cet accroissement radical des demandes, si nous voulons maintenir un taux de succès décent, il faut 45 ou 50 millions de dollars de plus.

Au cours des années, nous avons introduit de nouveaux programmes, de nouvelles manières de faire la recherche. Pour une de celles-ci, les Alliances de recherche université-communauté, nous avons reçu 165 demandes la première année; nous avions assez d'argent pour en financer seulement huit. L'année dernière, nous avons reçu 135 demandes; nous avions l'argent pour en financer 15. Parmi ces 135 demandes, il y en avait 35 qui étaient signées par des chefs de tribu qui avaient des problèmes spécifiques à régler. Il faut donc en arriver à appuyer toute cette nouvelle manière de faire de la recherche. Là aussi, on parle de 50 millions de dollars.

Donc, au total, au CRSH, si nous voulons faire notre travail correctement, il faut qu'on double notre budget; cela représente 150 millions de dollars de plus au cours des prochaines années.

[Traduction]

La présidente: Monsieur Bernstein, désirez-vous répondre?

M. Allan Bernstein: La question ne s'adressait pas à moi...

Des voix: Ah, ah!

[Français]

...mais nous avons le même problème. Les occasions de recherche en santé, en ce siècle, sont incroyables.

[Traduction]

La création de capacité de la FCI et les programmes des chaires ont eu bien sûr une incidence sur la santé. Le tiers des chaires et environ 40 p. 100 des fonds de la FCI sont dirigés vers la recherche en santé. Il existe donc là aussi un besoin énorme, même si je n'ai pas eu à en faire la preuve aujourd'hui. Je crois que cela fera l'objet d'un autre exposé. Vous voulez en savoir plus long aujourd'hui sur notre rôle dans le secteur de l'innovation.

Je dirais que si le Canada veut être concurrentiel à l'échelle internationale dans ce qu'on appelle le «bio-siècle», le siècle de la recherche en santé, le gouvernement fédéral a pour rôle de financer la recherche en santé à un niveau qui soit concurrentiel sur le plan international, et il faut s'attendre à ce que cette aide financière favorise les transferts technologiques vers le marché.

[Français]

M. Pierre Brien: Excusez mon oubli.

J'ai une autre question qui peut s'adresser à vous tous.

Je sais qu'au Québec, une politique scientifique a été adoptée tout récemment. Comment tenez-vous compte de ça dans votre plan d'action? Est-ce que vous avez eu des rencontres? Est-ce que vous avez participé à la définition? Il y a une politique établie. Comment tenez-vous compte de la politique établie dans une province? Je ne connais pas d'autres cas—il peut y en avoir d'autres—mais je sais que le Québec a une politique scientifique. Comment travaillez-vous avec une province qui a une politique scientifique?

M. Marc Renaud: J'ai évidemment beaucoup collaboré avec le Québec, avec le ministre Rochon, avec les agences subventionnaires du Québec essentiellement pour débattre un peu de la question de savoir comment il fallait structurer la recherche au Québec.

L'enjeu majeur du Québec... Le Québec, il y a 20 ans, a adopté une politique scientifique qui a forcé tous les universitaires à travailler ensemble, à créer des centres de recherche. Cela a été remarquablement efficace, de sorte que le taux de succès des chercheurs québécois au CRSH, à ce qui était le Conseil médical du Canada et au CRSNG a augmenté énormément à cause de ça. Ce taux a diminué par la suite. Donc, la question que le gouvernement du Québec se posait était celle de déterminer comment on pouvait arriver à redonner sa compétitivité à la recherche québécoise. Un des éléments clés du rapport et des mesures qui ont suivi ce rapport, c'est la reconnaissance du fait que l'innovation n'est pas seulement technologique, mais aussi sociale.

Vous savez que le Québec va créer un Conseil de la recherche sur la société et la culture et qu'il va tripler les fonds qui y seront affectés. Évidemment, pour les chercheurs dans le domaine des sciences humaines du Québec, c'est formidable. Le problème, c'est ce qui se passe au Canada anglais. Ce genre de recherche est important partout.

• 1130

Donc, nous avons une collaboration très étroite avec le Québec par rapport à cela.

[Traduction]

La présidente: Monsieur Brzustowski.

[Français]

M. Thomas Brzustowski: En sciences naturelles et en génie, on travaillait de façon très efficace avec l'ancien FCAR. On a beaucoup appris de ces personnes, qui avaient de bonnes idées. Au sein des comités de sélection et de politiques, on a beaucoup de membres du Québec qui connaissent très bien la politique scientifique du Québec.

Que je sache, il n'y a qu'une autre province qui a une politique scientifique, et c'est l'Alberta. La politique de l'Alberta est complètement différente, mais on travaille avec eux aussi, avec le nouvel organisme qui porte le nom d'Alberta Heritage Foundation for Science and Engineering Research. L'idée est de promouvoir l'assistance mutuelle des conseils.

[Traduction]

La présidente: Monsieur Bernstein.

M. Allan Bernstein: Il y a des liens très intimes entre les Instituts de recherche en santé du Canada et le Fonds de recherche en santé du Québec. D'ailleurs, trois de nos treize directeurs scientifiques au IRSC proviennent du Québec. Le FRSQ leur a alloué à chacun des fonds qui leur permettront de poursuivre leur recherche tout en demeurant directeurs scientifiques aux Instituts de recherche en santé.

Michel Bureau, le président du FRSQ, préside notre groupe de travail sur les partenariats, ce qui comprend les partenariats avec les provinces. Nous avons donc d'excellents liens partout au Canada. Je dirai que ces liens sont extrêmement serrés. Par ailleurs, bon nombre de provinces repensent maintenant la manière dont elles financent la recherche en santé afin de tenir compte de notre mandat élargi et de la façon dont nous finançons nous-mêmes la recherche en santé, et cela comprend le Québec. La Colombie-Britannique a été la dernière à se joindre au mouvement. La nouvelle fondation qui vient d'être créée en Colombie-Britannique, la Michael Smith Foundation for Health Research, qui porte le nom du défunt Prix Nobel Michael Smith, est fondée sur un partenariat avec les IRSC.

Je suis donc très heureux de voir comment les provinces collaborent avec nous d'une manière très fructueuse, dans une optique complémentaire et synergique, pour financer la recherche en santé.

La présidente: Merci.

[Français]

Merci, monsieur Brien.

Madame Jennings.

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Merci, madame la présidente.

Messieurs Renaud, Brzustowski et Bernstein, je vous remercie de vos présentations.

Mes questions vont s'adresser à M. Renaud parce que le domaine des sciences humaines en est un qui m'intéresse personnellement.

J'ai été frappée par vos tableaux dans lesquels on compare le taux de réussite chez les chercheurs chevronnés et les jeunes chercheurs et celui des chercheurs en sciences naturelles et en génie, ainsi que le pourcentage des fonds alloués par rapport à la taille des universités. Est-ce qu'on peut supposer que dans les sciences humaines, par exemple en médecine, dans le domaine de la recherche en santé, il faut une faculté de médecine et que, par conséquent, ce sont juste les grandes universités qui reçoivent des fonds?

M. Marc Renaud: Une révolution est en train de se produire au sein des Instituts de recherche en santé: on essaie de sortir la recherche en santé des facultés de médecine. On devrait s'attendre à ce que dans 10 ans, il y ait de plus en plus de chercheurs en santé partout dans le système universitaire canadien.

Le tableau montre qu'à ce jour, ils investissent à peine 1 p. 100 de leurs fonds dans le tiers plus petit des universités, alors que dans notre cas, c'est 11 p. 100.

Le Canada est doté d'une structure universitaire qui compte 65 universités de toutes les tailles. La décision que l'on doit prendre collectivement au Canada, c'est de déterminer si on veut garder ce système ou si on veut mettre tout l'argent dans les 15 plus grosses universités.

Je viens tout juste de passer 15 jours dans les provinces Atlantiques parce que je voulais voir de l'intérieur leur problématique. J'ai été renversé par la qualité que j'ai vue. Évidemment, il y a deux facultés de médecine dans les provinces Atlantiques, mais il y a 12 ou 13 autres institutions. Dans le domaine des beaux-arts, c'est un des lieux de par le monde où la recherche de pointe se poursuit. C'est formidable, ce qu'on voit dans les petites institutions d'élite comme St. FX, Acadia et Mount Allison. Par ailleurs, j'ai été obligé de constater qu'ils ont raison de dire que le CRSH les appuie mal. C'est pour ça que quand je suis revenu, j'ai dit qu'on allait examiner ça en détail parce que je voulais comprendre la raison de cette situation. C'est à ce moment-là que je me suis aperçu que les comités classent très haut les très bons chercheurs de ces universités qui font des demandes auprès du CRSH, mais que, parce qu'ils n'ont pas d'étudiants au doctorat et qu'ils ne vivent pas dans un environnement où il y a énormément de chercheurs, ils les classent sous la cote permettant d'obtenir du financement. Donc, c'est évident que si on arrivait juste à augmenter le pourcentage de financement, ça redonnerait le sourire aux chercheurs formidables qui sont dans ces universités.

• 1135

De surcroît, le CRSH a un Programme d'aide aux petites universités, ce que n'ont pas les autres conseils subventionnaires ou qu'ils n'ont pas de la même manière. C'est incroyable, ce que ça a donné au fil du temps.

À l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard, il y a 2 000 étudiants. Ils se sont dotés d'un centre d'études sur la vie dans des îles, qui est reconnu comme un des meilleurs centres au monde sur ce sujet. Il est donc important que nous trouvions le moyen de mettre de l'argent pour développer la capacité de recherche dans ces institutions.

Le problème se pose aussi dans les institutions de taille moyenne. L'Université de Windsor, l'Université de la Saskatchewan, York, l'UQAM sont des universités où il n'y a pas de faculté de médecine, et à cause de la règle arbitraire selon laquelle au plus 20 p. 100 des chaires doivent aller aux sciences humaines, ces universités-là reçoivent très peu des chaires comparativement à l'Université de Montréal ou à McGill ou à l'Université de Toronto.

Donc, à mon avis, on est dans une situation où le déséquilibre est trop fort. Pour répondre à la question que monsieur m'a posée plus tôt, je dirai qu'il est évident qu'il ne faut pas autant d'argent en sciences humaines qu'en sciences naturelles, pour des questions d'équipement, etc. Mais quand c'est rendu à ce point déséquilibré, le Canada se tire dans le pied.

De plus, comme on le sait, les universités ont un problème relié à la question des frais indirects. Comme je le dis partout, les frais indirects, c'est fondamental. S'il n'y a pas plus de soutien direct à la recherche dans le domaine des sciences humaines, où la situation est dramatique, et dans le domaine de mes collègues, à mon avis, le Canada va détruire sa structure d'universités.

Mme Marlene Jennings: Merci beaucoup.

Dans votre réponse à ma première question, vous avez commencé à répondre à une deuxième question que je vais vous poser maintenant. Ça concerne le tableau «Augmentation des subventions ordinaires de recherche du CRSH, financement des 4A par région». Si j'ai bien compris, les 4A sont les demandes qui ont été approuvées, mais qui ne sont pas subventionnées en raison d'un manque de fonds. Quand je regarde les résultats et les conclusions que vous tirez, je me dis que si votre budget était doublé, cela vous permettait de subventionner ces 4A. Je n'ai jamais été forte en statistiques, mais je crois comprendre que dans certaines régions, il y a un plus grand nombre de demandes qui sont approuvées, mais non subventionnées. Donc, si votre budget était doublé, le taux d'acceptation des projets de la région de l'Atlantique augmenterait.

M. Marc Renaud: Oui. En vertu du système de revue par les pairs, on demande aux gens, en leur âme et conscience, de nous dire la qualité relative des projets et la capacité du chercheur de livrer le projet à la lumière de son curriculum vitae.

Il ne peut en être autrement. Quand il voit quelqu'un qui a 10 étudiants de doctorat, qui vit dans un environnement où il y a une profusion de collègues avec lesquels débattre, le comité va dire que celui-là, à qualité égale, a de meilleures chances de réussir que la personne qui donne six cours par année, qui corrige tous ses travaux, qui n'a pas d'assistant de cours, qui travaille l'été et qui, selon son curriculum, a des étudiants de premier cycle. Cependant, les comités nous disent, honnêtement, que ces recherches-là sont bonnes, que le programme de recherche est excellent et que les chercheurs sont bons, mais pas tout à fait de la qualité des autres. Donc, ils tombent dans le deuxième tiers, c'est-à-dire ceux qui sont recommandés mais non financés. C'est là qu'on peut faire une différence rapidement. On appuie sur un bouton, et s'il y a de l'argent qui va dans ce secteur-là, on recrée l'avenir.

Mme Marlene Jennings: On risque aussi de voir des changements quant au pourcentage des fonds alloués par rapport à la taille des universités. Déjà, le CRSH a un meilleur rendement dans l'allocation en fonction de la taille des universités. Ça veut dire que vous allez l'améliorer encore davantage pour les petites et moyennes universités.

M. Marc Renaud: J'ai le tableau. Malheureusement, on ne l'a pas inclus dans la présentation. Pour les petites universités, si on pouvait financer tout ce qui nous est recommandé, il y aurait une augmentation de 261 p. 100. Pour les moyennes, elle serait de 200 p. 100 et pour les petites, de 171 p. 100. Donc, c'est énorme comme clivage.

Mme Marlene Jennings: Pouvez-vous nous fournir une copie de cela?

M. Marc Renaud: Absolument.

Mme Marlene Jennings: Mes questions sont terminées. Merci beaucoup.

• 1140

[Traduction]

La présidente: Merci, madame Jennings.

Monsieur Rajotte.

M. James Rajotte: Je m'adresse à M. Bernstein, à la page 10, vous mentionnez un partenariat entre les IRSC et Rx&D. Pourriez-vous nous dire en quoi consiste ce partenariat pour nous.

M. Allan Bernstein: Avec plaisir. Cela me ramène à ce que je disais plus tôt au sujet de l'intervention du secteur privé, en l'occurrence les investisseurs en capital de risque, mais le secteur privé comprend aussi l'industrie pharmaceutique qui a des liens plus étroits avec les chercheurs en santé. Ce partenariat vise à dynamiser cette sorte de partenariats, à amener l'industrie pharmaceutique internationale à faire davantage de recherche au Canada et à l'inviter à investir dans la recherche dans les universités et les hôpitaux du Canada.

Nous avons bâti plusieurs partenariats. Qu'il s'agisse du cofinancement d'essais cliniques, de recherche sur de nouveaux médicaments, de nouveaux traitements—voyez le tableau, vous allez voir qu'en temps normal, nous contribuons environ 50c pour chaque contribution se situant à peu près entre 1 $ et 4 $ qu'investissent les compagnies—ou du financement des chaires dans toutes sortes de domaines, de la santé féminine à la recherche clinique, qui sont financés par l'industrie pharmaceutique du pays. La part du lion vise en fait à former de jeunes chercheurs cliniques. C'est un aspect très important de notre mandat. Nous avons pour mandat de sortir ce qui se fait dans les labos pour l'implanter dans le vrai monde, et une partie de ce vrai monde, mais non la seule, c'est le secteur clinique. Nous devons faire cela en partenariat. C'est un processus très compliqué. Les partenaires sont entre autres les hôpitaux, les chercheurs, l'industrie pharmaceutique et l'industrie biotechnologique. L'examen confraternel de tous ces programmes est mené par nous, et nous demandons ensuite à la société d'acquitter la facture. Au sein d'un tel partenariat, ce sont les sociétés qui se chargent de financer cela.

L'industrie pharmaceutique dans les autres pays, surtout en Suisse, aux États-Unis et en Angleterre, finance la recherche fondamentale à des niveaux beaucoup plus élevés qu'au Canada. Ce que nous devons faire entre autre chose, c'est aider l'industrie à repérer les grands chercheurs dans notre pays et à financer leurs travaux de la même façon que cela se fait aux États-Unis.

Dans le dernier cycle—notre conseil d'administration s'est justement réuni la semaine dernière—j'ai été très heureux de voir qu'il se faisait une excellente recherche dans le cadre de ce programme conjoint des IRSC et du Rx&D. On finance une initiative en protéomique de protéoniques et d'autres comme celle-là. C'est donc un programme modèle pour nous.

M. James Rajotte: Quand vous créez un partenariat pour un essai clinique et que l'on fait une découverte, comment réglez-vous la question de la propriété intellectuelle?

M. Allan Bernstein: C'est une bonne question. On s'attend à ce que chaque hôpital et chaque université aient des règles claires à ce sujet—pas seulement des lignes directrices, mais des règles—à propos, tout d'abord, du droit de publier toute recherche qui est financée par des deniers publics. Deuxièmement, si une propriété intellectuelle est générée par des fonds publics, nous en détenons la propriété proportionnellement à notre contribution au projet, conformément à la politique de l'établissement hôte. Dans certaines universités et certains hôpitaux, l'établissement possède la propriété intellectuelle, et dans certains cas elle appartient aux chercheurs, mais c'est l'établissement qui a le droit de l'exploiter. Nous n'en sommes pas encore là, mais nous nous attendons à ce que notre contribution nous apporte une part de la propriété au bout du compte.

M. James Rajotte: D'accord. Merci.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Rajotte.

Madame Torsney, s'il vous plaît.

Mme Paddy Torsney: Merci. J'aimerais avoir quelques précisions, mais vous n'êtes pas obligé de me les donner maintenant.

Monsieur Renaud, au sujet de la diapositive «4A» que vous avez mentionnée plus tôt, j'aimerais savoir comment vous ventilez les Prairies et les diverses provinces parce que l'Alberta a sa part dans les Prairies, mais je crois que l'un de mes collègues qui n'est pas ici s'intéresse davantage au Manitoba.

La présidente: Reg Alcock.

Mme Paddy Torsney: Et je demande si vous pouvez nous expliquer quel est le pourcentage des subventions dans le revenu des étudiants.

M. Marc Renaud: L'Université de Toronto voulait savoir comment les étudiants subvenaient à leurs besoins. Elle a procédé à une longue étude—qui a duré en fait une année. L'une des conclusions étonnantes—et c'est ce qu'on voit sur ce tableau-ci—c'était que dans les sciences sociales et les humanités, la proportion des fonds versés aux étudiants était très faible parce que les subventions sont tellement petites. Une subvention moyenne se situe à 17 000 $ par an. C'est peu. Vous nous avez demandé: «D'où vient votre argent?» Nous en recevons très peu des subventions parce que celles-ci sont tellement petites. C'est la différence essentielle.

• 1145

Mme Paddy Torsney: Donc d'où vient le reste de leur argent?

M. Marc Renaud: De leurs parents, j'imagine, ou de leur travail.

Mme Paddy Torsney: S'agit-il d'étudiants pré-diplômés ou diplômés?

M. Marc Renaud: D'étudiants diplômés.

Mme Paddy Torsney: Ce n'est pas brillant.

Mon autre question s'adressait à vous, monsieur Bernstein. Dans votre diapo sur les investissements en capital de risque au Canada en 1999, on a du mal à lire les chiffres parce que c'est très sombre. Vous pourriez peut-être nous donner cela plus tard. Il y a tous les secteurs, mais pas tous les chiffres.

M. Allan Bernstein: Certainement.

Mme Paddy Torsney: Dans vos diapositives sur les sociétés dérivées des fonds d'IRCS, qui profite de l'argent, car nous avons eu un exposé précédent sur les sociétés qui devraient en bénéficier.

Étiez-vous là durant l'exposé précédent?

M. Allan Bernstein: Je n'ai entendu que les cinq ou dix dernières minutes.

Divers individus et groupes profitent de ces retombées. Dans l'ensemble, les universités et les hôpitaux—je parle de ma propre expérience dans une existence antérieure—prennent une participation dans certaines de ces entreprises. Je sais que c'est généralement le cas pour les universités et les hôpitaux du Canada. Parfois, c'est même très important. Aujourd'hui, 10 ou 20 p. 100 de BioChem Pharma, c'est beaucoup d'argent.

Il y a aussi les gens qui travaillent pour ces sociétés, qui en profitent. Ils ont des emplois solides et généralement bien payés dans cette nouvelle économie, donc c'est un avantage direct.

Les chercheurs que nous finançons et qui sont les chercheurs principaux dans les universités et les hôpitaux en profitent aussi. Notamment, ils ont souvent des accords de consultation avec ces sociétés dans lesquelles ils détiennent une participation. Je sais, là encore, que la plupart du temps il y a des règles régissant la proportion de leur revenu qui peut provenir de ce genre d'arrangement.

En toile de fond, nous sommes en concurrence avec d'autres pays sur le marché mondial et nous devons avoir des règles qui nous permettent de soutenir cette concurrence, si c'est à cela que vous pensez.

Le troisième groupe qui bénéficie de cette situation, c'est évidemment le contribuable canadien car ces entreprises génèrent de la richesse et des recettes fiscales, etc., et apportent aussi, il faut l'espérer, de nouveaux traitements pour les maladies.

Mme Paddy Torsney: Tous ces gens-là en profitent donc bien.

J'aimerais avoir votre analyse de la situation de votre financement si nous avions une loi comme la Bay Dole Act. Je ne vous demande pas de nous répondre immédiatement, mais vous devriez voir cet exposé, écouter le témoignage et nous communiquer le produit de votre réflexion.

Mon autre question concerne le financement. Je dois rencontrer quelqu'un qui travaille avec la Canadian Alliance of Brain Tumor Organizations, et notamment un groupe appelé b.r.a.i.n.child, qui regroupe des parents, des familles et des amis. Ils disent qu'il faut augmenter le financement et que l'une des raisons pour lesquelles ce financement est insuffisant est que l'on ne recueille pas suffisamment d'informations statistiques sur les tumeurs du cerveau, par exemple. Selon eux, il y a des statistiques actuellement seulement pour les tumeurs malignes. On ne les enregistre qu'au moment du décès, de sorte que les statistiques sur les tumeurs du cerveau donnent l'impression que la maladie est moins fréquente. Par conséquent, c'est un secteur qui n'obtient pas le financement qu'il devrait avoir, alors que c'est pourtant quelque chose qui bouleverse la vie des familles dans lesquelles on trouve des enfants ou des adultes qui ont une tumeur.

Comment prenez-vous les décisions, et êtes-vous sûr d'avoir toutes les informations voulues.

Deuxièmement, dans ce cas particulier, allez-vous envisager d'affecter plus de crédits à la question des tumeurs du cerveau?

M. Allan Bernstein: J'aimerais vous parler tout d'abord du cas particulier et ensuite de la question plus générale de l'élaboration des priorités, puisque c'est là-dessus que porte votre question.

Je connais très bien le problème des tumeurs au cerveau. Je faisais partie du conseil d'administration du Gerry Spencer Brain Trust. Il est mort d'une tumeur au cerveau.

Mon domaine d'intérêt est la recherche sur le cancer. Je connais donc très bien l'état de la recherche actuelle sur les tumeurs du cerveau au Canada. Il faut augmenter le financement. La question est d'avoir dans ce domaine une capacité suffisante pour intéresser les chercheurs.

• 1150

Par ailleurs, il faut se souvenir que la recherche sur le cancer dépend beaucoup de la façon d'étiqueter les choses. Si je fais de la recherche fondamentale sur les gènes intervenant dans le cancer, je vais parler de tous les cancers, alors dans ce cas, dois-je considérer que cela concerne les tumeurs cérébrales ou les cancers du sein, ou autre chose? C'est une recherche qui a des répercussions extrêmement vastes.

Dans l'exemple que j'ai donné des travaux de John Bell sur ces virus qui peuvent tuer les cellules cancéreuses, personne n'aurait considéré ce travail de Bell comme de la recherche sur les tumeurs cérébrales, et pourtant je sais que c'est un des sites ciblés dès le début pour ces virus. Il s'agit donc beaucoup d'une question de classement.

Pour ce qui est de la réponse générale, je pense que la création des IRSC et la structure des instituts nous permet maintenant de bien établir des priorités pour le financement de la recherche en santé, alors que nous n'avions pas cela auparavant.

L'ancien CRM, le Conseil de la recherche médicale, que présidait mon collègue le Dr René Simard, touchait des subventions qui étaient examinées par des pairs. Nous allons continuer à le faire, mais en outre, les 13 instituts, par le biais de leurs conseils consultatifs et de leurs entretiens avec les chercheurs, établiront des priorités de recherche. Nous aurons donc un apport très important dans le cadre des conseils consultatifs qui regroupent plus de 200 Canadiens.

Nous avons de très bons rapports avec l'Institut national du cancer du Canada, le bras financier de la Société canadienne du cancer. Notre institut de recherche sur le cancer et l'Institut national du cancer du Canada, l'INCC, ont convenu de faire toute la planification stratégique ensemble avec la Société canadienne du cancer, qui est représentée à notre conseil consultatif. Nous bénéficions d'une très bonne participation du grand public, du monde de la recherche, du secteur privé et des sources internationales pour établir nos priorités. Je prends l'exemple du cancer, mais c'est valable pour l'ensemble de la situation.

Certains secteurs ne seront pas financés. Comme mes collègues, nous n'avons pas suffisamment d'argent pour financer les choses au bon niveau, ou pour financer du tout, toutes les grandes recherches partout où on a besoin de ce financement. Nous n'avons tout simplement pas assez d'argent. Si l'on doit fixer des priorités, c'est en partie parce qu'on n'a pas suffisamment d'argent pour tout faire.

Mme Paddy Torsney: Je vais vous dire une chose.

La présidente: Dernière question.

Mme Paddy Torsney: Nous espérons que les IRSC fourniront les fonds dont on a tragiquement besoin, mais il faut que l'on puisse avoir accès à ces personnes et à ces renseignements sur le nombre pertinent d'incidents permettant d'avoir accès aux fonds administrés par ce groupe. Apparemment, les intervenants que vous êtes censé consulter ne semblent pas vraiment en mesure d'avoir cet accès comme ils le devraient probablement.

J'ai entendu parler d'autres organisations, notamment dans le domaine du cancer, qui ne sont pas convaincues que la Société canadienne du cancer les représente aussi bien qu'elle le devrait, notamment dans le domaine du cancer du sein. Donc, faites attention.

La présidente: Merci.

[Français]

Monsieur Brien, avez-vous d'autres questions?

M. Pierre Brien: Oui. Je ne voudrais pas que M. Durocher pense qu'on l'a oublié.

M. Renaud a présenté un scénario qui permettrait d'améliorer la situation des petites universités si on augmentait leur financement. Il y a en quelque sorte une assez grande frustration à l'heure actuelle par rapport à l'attribution des chaires dans les petites universités. Est-ce qu'il y a des plans de travail à l'heure actuelle qui feraient en sorte de rééquilibrer ça un peu mieux ou si vous allez attendre un signal politique du gouvernement qui dirait qu'il est insatisfait de la distribution dans les petites universités? Est-ce que vous êtes en train de revoir un peu le fonctionnement pour affirmer votre volonté d'être plus présents dans les petites universités afin de leur donner la chance d'avoir un rôle de leadership, de ne pas seulement être une succursale qui travaille en partenariat avec d'autres universités?

M. René Durocher (directeur exécutif, Programme des chaires de recherche du Canada, Conseil de recherches en sciences humaines du Canada): Je suis très heureux de la question, monsieur Brien, parce que le Programme des chaires de recherche du Canada est assez exceptionnel justement à cause de cette préoccupation, qui était là à l'origine, de mettre de côté 6 p. 100 des chaires de recherche pour les petites universités. C'était vraiment une excellente décision.

Effectivement, quand vous pensez à une petite université de 4 000, 5 000 ou 3 000 étudiants, qui reçoit cinq ou six chaires de recherche de 200 000 $ par année pendant sept ans ou de 100 000 $ pendant cinq ans, il faudrait un capital de 3 millions de dollars pour établir une telle chaire. Pour une petite université qui reçoit 5 ou 6 chaires, ça peut faire une énorme différence dans sa capacité de recherche, de leadership en recherche. Et il y a des petites universités qui le font: UNBC, University of Northern British Columbia; University of Acadia; Télé-Université. Au Québec, le réseau de l'Université du Québec aura de 60 à 70 chaires. Ce n'est pas rien. C'est considérable.

• 1155

Un des problèmes, c'est que 18 universités, après un an, n'ont pas encore soumis de candidature. Elles ont trois ans pour remplir une chaire. C'est comme si elles n'étaient pas habitués à cela. Je suis allé dans les Maritimes rencontrer des gens pour essayer de les aider et de leur expliquer le programme. Je vais rencontrer des gens du réseau de l'Université du Québec au mois de juin.

On cherche des chercheurs de très haut niveau, des chercheurs exceptionnels. Quand ces gens sont dans une université ou dans un département, il y a 10, 12 ou 15 personnes qui travaillent avec eux. Ils deviennent des moteurs; ils stimulent les autres professeurs, les autres chercheurs. Je pense donc qu'un bon pas a été fait.

Maintenant, on entend des plaintes. On entend des gens qui disent qu'il devrait y en avoir plus. Si on regarde la proportion de chaires par rapport à la population de chacune des régions, on se rend compte que ces deux choses coïncident presque. C'est étonnant.

Par exemple, on va prendre l'Ontario. Tous ont le regard tourné vers l'Ontario, car c'est une province riche et grosse. L'Ontario compte 30,9 p. 100 de la population du Canada. Cette province a 30 p. 100 des chaires. Bien sûr, il y a des déséquilibres, mais la Nouvelle-Écosse, par exemple, qui a 3 p. 100 de la population, a 3,9 p. 100 des chaires. Il y a 77 chaires en Nouvelle-Écosse. Ce n'est pas rien. Ça va donner du dynamisme à ces universités. Il y a des provinces qui sont défavorisées, comme la Saskatchewan et le Nouveau-Brunswick, mais il n'y a pas juste le problème des chaires. On a une réserve de chaires. Elles n'ont pas toutes été distribuées. On s'est dit qu'après la troisième année, on verrait comment distribuer cette quinzaine de chaires.

Il y a de nouvelles institutions qui surgissent. En Colombie-Britannique, on a créé de nouveaux collèges universitaire qui n'étaient pas admissibles mais qui vont le devenir. Il faut donc se donner une petite marge de manoeuvre. Si on peut faire quelque chose pour améliorer la situation des petites universités, c'est sûr qu'on va le faire, mais il faut que les standards soient les mêmes pour toutes les universités. On ne peut pas dire aux petites universités qu'elles sont des clubs mineurs et qu'elles ont donc droit à des chercheurs mineurs. Le but du programme est de trouver 2 000 chercheurs de très haut niveau, et ça vaut pour toutes les universités. Elles sont capables de le faire.

MM. Brzustowski et Renaud ont fait une tournée dans les Maritimes et dans l'Ouest et ont constaté, comme je le fais aussi quand j'y vais, qu'il y a d'excellents chercheurs dans ces universités. J'ai donc espoir qu'au bout du compte, la situation sera assez équilibrée.

La présidente: Merci.

Monsieur Renaud.

M. Marc Renaud: Il y aura une réévaluation du programme dans un an et demi. Dans le protocole d'entente avec le gouvernement, il est clair qu'on va réévaluer tous les paramètres de ce programme à la lumière de l'expérience acquise. Il est important de le dire. Évidemment, on va solliciter l'input de tout le monde lors de cette réévaluation.

À mon avis, et je ne veux pas m'étendre là-dessus longuement, un des enjeux n'est pas celui des petites universités, parce que l'allocation de 6 p. 100 leur donne vraiment un avantage compétitif. Le vrai problème est celui des université sans faculté de médecine. York, Concordia, Simon Fraser et Windsor sont des universités qui, en raison de la disproportion des chaires attribuées du côté des sciences naturelles par rapport aux sciences humaines, perdent au total. Par exemple, l'Université York a à peu près le même nombre d'étudiants que l'Université de Montréal, mais a deux fois moins de chaires. Ce sera remis sur la table au moment de l'évaluation.

La présidente: Merci.

Monsieur Bélanger.

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Merci, madame la présidente.

Est-ce que la participation du secteur privé à une recherche universitaire quelconque a une influence dans l'attribution, par vos conseils, de subventions lors de demandes de ce genre? Est-ce que la participation du secteur privé à un programme de recherche pour lequel l'université cherche une subvention ou une participation financière a une influence ou non?

M. Marc Renaud: Il y a deux programmes où la participation du secteur privé ou du secteur bénévole est importante. Souvent, dans notre cas, c'est moins le secteur privé que le secteur bénévole.

• 1200

Le premier programme est celui des ARUC, les Alliances de recherche université-communauté, où les gens doivent présenter, non seulement une programmation de recherche, mais aussi un partenariat pour s'assurer que les clients, les gens qui sont intéressés à utiliser les connaissances travaillent avec ceux qui les développent. C'est un programme qui a un succès énorme. On a été obligés de le suspendre parce qu'on n'avait pas assez d'argent. C'est un programme dans le cadre duquel il y a une collaboration très étroite entre les chercheurs universitaires et les gens de la communauté, du secteur privé ou ou secteur bénévole.

Voici maintenant un deuxième point. Dans le nouvel investissement qu'on fait dans la nouvelle économie, il y a un soutien très explicite du secteur privé. On a eu plusieurs consultations avec ces gens, et ils veulent mettre l'épaule à la roue.

[Traduction]

M. Thomas Brzustowski: Je dirais deux choses à ce sujet. Premièrement, lorsque nous répartissons les subventions ou que nous les attribuons pour autre chose, nous tenons compte de tous les programmes faisant intervenir des partenaires industriels. Mais je peux vous citer des exemples de cas, et je vais vous en citer un en particulier, où le fait qu'une petite université ait contacté une entreprise industrielle de manière stratégique a complètement bouleversé le montant d'argent que recevait cette université et sa réputation.

[Français]

Je cite l'Université du Québec à Chicoutimi qui, lors d'un concours toujours difficile, a gagné quatre de nos chaires industrielles, qui sont au niveau mondial dans leurs travaux.

M. Mauril Bélanger: Merci.

[Traduction]

M. Allan Bernstein: Je vous donnerai d'abord une réponse générale. Dans un authentique partenariat, les deux partenaires doivent s'influencer mutuellement. C'est le vrai dialogue. Je trouve donc normal que le secteur privé influe dans une certaine mesure sur les chercheurs que nous finançons dans les universités ou les hôpitaux.

Toutefois, ce qui nous intéresse, c'est de financer d'excellentes recherches scientifiques qui permettront d'améliorer la santé des Canadiens. C'est le mandat que nous a confié le Parlement.

[Français]

M. Mauril Bélanger: Merci.

Lorsqu'une université recherche une subvention de vos conseils, est-ce que la participation d'une institution publique, comme le Conseil national de recherches du Canada ou Santé Canada, est considérée utile? Le fait que le Conseil national de recherches du Canada participe à une soumission d'une université quelconque est-il utile pour obtenir une subvention de vos conseils?

[Traduction]

M. Thomas Brzustowski: Puis-je répondre? Certainement, et en fait, nous y attachons tellement de valeur que le CNRC et le CSRNG ont un programme dans lequel nous examinons précisément les bonnes recherches qui intéressent une université, un des laboratoires du CNRC, et un ou deux partenaires industriels. Il y a des crédits prévus pour cela. Il s'agit de projets de grande qualité concernant des recherches plus susceptibles de déboucher sur des applications potentielles que la recherche fondamentale, mais ces projets existent. Ils sont importants, et nous avons à cet égard un programme spécial que nous gérons conjointement avec le CNRC.

[Français]

M. Marc Renaud: Nous avons 18 initiatives conjointes avec des partenaires gouvernementaux, allant des forêts aux affaires intergouvernementales. Les gens mettent la moitié de l'argent et on met l'autre moitié. Il y a un enjeu qu'on peut mieux comprendre. Le problème, c'est qu'il y en a des dizaines et des dizaines à la porte.

[Traduction]

La présidente: M. Bernstein.

M. Allan Bernstein: La seule chose que j'ajouterais, c'est qu'il y a de nombreux projets dont nous souhaiterions pouvoir communiquer les résultats aux autres chercheurs et au public canadien, et que la meilleure façon de le faire, c'est d'avoir un financement public.

Par exemple, nous négocions avec un partenaire du secteur privé et des chercheurs universitaires en vue d'élaborer une base de données, plusieurs bases de données postgénomiques. Mais notre condition, c'est que si nous y participons, il faudra que les résultats soient mis à la disposition de tous les chercheurs canadiens en même temps que de l'entreprise. Cela donne donc une très forte orientation à ce que nous faisons.

La présidente: Monsieur Bélanger, ce sera votre dernière question.

[Français]

M. Mauril Bélanger: Avant de poser ma question, je vais faire un commentaire, une réprimande très gentille à M. Renaud.

Tout à l'heure, vous avez utilisé l'expression «Québec and English Canada». Je vous invite à vous rendre compte qu'on doit parler du Canada français et du Canada anglais. Moi, je suis un député francophone de l'Ontario et je représente un comté où il y a 40 p. 100 de francophones. Il y a aussi le Nouveau-Brunswick, qui est officiellement bilingue. Nous ne sommes nulle part dans votre schéma «Québec and English Canada».

• 1205

[Traduction]

Pourquoi... Enfin, je sais pourquoi; c'est parce que le gouvernement l'a décrété. Mais vous reconnaissez que le CNRC est exclu du financement de la FCI?

M. Thomas Brzustowski: Vous voulez savoir si je le reconnais? Oui, je le reconnais. Est-ce que c'est une bonne chose? Il m'est très difficile de répondre à cette question. Personnellement, j'estime que, vu la taille de notre économie et le rôle que voudrait exercer le CNRC, c'est-à-dire relier les chercheurs et le marché dans de très nombreux domaines et appuyer diverses activités, comme l'élaboration de codes et de normes, le CNRC devrait être à peu près 10 fois plus gros qu'il ne l'est actuellement.

Si l'on développait considérablement le CNRC, peu m'importe d'où il tirerait son financement. Grâce aux programmes que nous menons en partenariat avec le CNRC, nous donnons en fait accès aux installations du CNRC à des professeurs qui n'auraient pas cet accès autrement.

Est-ce que je souhaiterais que le CNRC puisse bénéficier du financement de la FCI? Je pense que cela aurait pu être une bonne idée s'il y avait suffisamment d'argent pour tout cela, et peut-être qu'on s'apercevra rétrospectivement que c'est le cas. Je me contenterai de continuer à dire qu'il faut affecter les crédits là où l'on veut répondre aux besoins nationaux, et que nous ne devrions pas souffrir de cette maladie de l'âge adulte appelée durcissement des catégories.

La présidente: M. Bernstein.

M. Allan Bernstein: Mon collègue l'a dit de façon fort éloquente.

[Français]

M. Mauril Bélanger: Monsieur Renaud, êtes-vous d'accord?

Madame la présidente, j'aimerais qu'on en prenne note et qu'on envisage la possibilité d'en faire une recommandation dans notre rapport: que le Conseil national de recherches ne soit pas exclu des subventions de la Fondation canadienne pour l'innovation. Merci.

[Traduction]

La présidente: Merci, monsieur Bélanger. Je suis sûre que l'attaché de recherche a pris bonne note de cela, comme nous tous.

Avant de conclure, je voudrais vous poser une question. Les professeurs d'université qui présentent des demandes de subventions aux conseils subventionnaires, à la FCI, me disent qu'ils sont fatigués de présenter des demandes et qu'apparemment il n'y a plus d'argent de toute façon. Nous avons beaucoup parlé de ces coûts indirects pour les universités, mais je n'ai pas vu grand-chose ici sur les demandes de subventions. Certains de ces professeurs passent des heures et des semaines à présenter ces demandes, et s'ils échouent, personne ne se préoccupe du coût en dehors de l'université elle-même.

Avez-vous des commentaires à cet égard, M. Brzustowski?

M. Thomas Brzustowski: Tout d'abord, je suis d'accord avec vous. J'ai déjà dit publiquement que, comparativement à leurs homologues aux États-Unis et dans les autres pays du G-7—et je ne suis pas sûr pour ce qui est de la Russie—les chercheurs universitaires canadiens en science et en génie ont beaucoup moins de temps disponible à consacrer à la recherche.

Nous sommes allés les consulter et nous leur avons demandé dans quelle mesure l'examen par les pairs contribuait à alourdir le fardeau. Ils ont répondu que cela contribuait dans une certaine mesure mais que cela en valait malgré tout la peine. Leurs deux plus gros problèmes sont le financement de base peu élevé de l'université qui se traduit par une charge d'enseignement plus lourde et l'absence de services de soutien, et le fait qu'ils doivent rédiger un trop grand nombre de demandes pour un trop grand nombre de programmes pour trop peu d'argent.

Nous sommes en mesure de remédier à ce dernier problème. Nous avons lancé une initiative intitulée Alléger le fardeau qui s'adresse spécifiquement aux chercheurs, grâce à une série de mesures qui d'une part incluront le commerce électronique et d'autre part permettront de fusionner des programmes et de raccourcir les formulaires de demande. Nous faisons un effort conscient pour leur faciliter les choses. C'est ce que nous faisons.

La présidente: Monsieur Bernstein.

M. Allan Bernstein: Je suis d'accord avec ce que Tom vient de dire. J'ajouterais que nous avons lancé un processus au pays faisant intervenir trois conseils et le secteur bénévole de la santé ainsi que les provinces pour faire quelque chose qui semble peut-être très futile mais qui, nous l'espérons, permettra d'alléger le fardeau de nos chercheurs, c'est-à-dire élaborer un formulaire commun pour présenter une demande à n'importe quels organismes de notre au pays de façon à ce que les chercheurs n'aient pas à passer des heures à se demander comment s'y prendre pour faire une demande auprès d'un nouvel organisme qui vient d'être créé, car ils doivent utiliser un nouveau formulaire qui comporte des règles différentes.

Cela semble anodin, mais cela prend énormément de temps, et je ne saurais insister suffisamment et répéter ce que Tom a dit, c'est-à-dire que nos chercheurs passent trop de temps à essayer de savoir comment présenter une demande de subventions aux nouveaux organismes et pas suffisamment de temps à faire de la recherche.

La présidente: Monsieur Marc Renaud.

M. Marc Renaud: Je ne peux que répéter ce qu'ils ont dit. Le phénomène est réel. Nous tentons de faciliter la vie aux gens. Lorsqu'il y a un bon bureau de recherche à l'université, cela simplifie énormément les choses pour le demandeur, car il y a quelqu'un pour relire la demande et l'aider à la modifier afin qu'elle le rende plus concurrentiel. C'est pour cette raison que le financement des coûts indirects que les universités demandent au gouvernement est très logique. Il y a réellement un besoin pour tout simplement aider les gens à faire cela.

• 1210

Ce ne sont pas tant les anciens chercheurs qui m'inquiètent mais plutôt les jeunes chercheurs qui risquent littéralement leurs carrières avec ces subventions.

La présidente: À cet égard, l'une des autres problèmes dont on nous parle, c'est qu'ils rédigent ces demandes et que dans certains cas au début du processus la demande est rejetée sans raison. On ne leur donne aucune justification dans la lettre de refus.

Or, je sais que la création des IRSC est relativement récente: leur son premier anniversaire sera célèbre sous peu. Cependant, je vais vous parler encore une fois de mon récit préféré, de mon anecdote préférée. Je veux parler du projet de l'Université de Windsor, et tout le monde pense sans doute qu'il s'agit d'un projet de construction automobile. En fait, c'est un projet de recherche en santé et en science du comportement, une petite partie d'ingénierie. Or, voici ce que je trouve frustrant: comment pouvons-nous faire progresser ce dossier? Comment encourager les chercheurs à continuer et à faire partie du processus alors qu'on ne leur donne aucune rétroaction?

M. Allan Bernstein: Ils reçoivent une rétroaction. Nous leur fournissons...

La présidente: Très spécifiquement, monsieur Bernstein, le projet dont je parle a été proposé par la Canadian Transportation Research Alliance qui a reçu une lettre de refus des IRSC sans que soient précisés les motifs du refus.

M. Allan Bernstein: Naturellement, je ne peux faire de commentaire au sujet de ce cas en particulier. Je n'en occuperai. Je peux vous dire que nous faisons des commentaires au sujet de toutes les subventions qui font l'objet d'un examen par les pairs. Il y a au moins quatre personnes qui font des commentaires détaillés, soit deux membres du comité, et deux personnes de l'extérieur. Nous fournissons tous ces commentaires.

En fait, si le demandeur choisit de refaire une demande la même année—il y a deux concours par an—il n'a pas à rédiger toute une nouvelle demande. Il lui suffit tout simplement de répondre aux observations des examinateurs.

Nous faisons des commentaires très détaillés sur chaque subvention individuelle qui passe par ici, et je serais très intéressé à examiner le cas dont vous venez de parler.

La présidente: Monsieur Renaud.

M. Marc Renaud: Il serait tout à fait contraire à l'éthique de notre part de ne pas donner les motifs. Lorsque je rencontre des collègues qui disent cela, je leur demande de me le montrer...

La présidente: Je l'ai.

M. Marc Renaud: ...parce que c'est tout à fait inacceptable. Les gens doivent tirer des leçons du processus, n'est-ce pas? C'est notre travail. On nous paie pour faire cela, pour leur fournir des commentaires externes et les commentaires du comité. Si cela n'est pas assez clair, les chercheurs devraient se plaindre.

La présidente: Je pense que je parle d'une étape antérieure, celle de la lettre d'intention. Lors du processus de la lettre d'intention, vous ne donnez pas les motifs de refus, mais je pense que vous devriez le faire. Lorsque je regarde ce projet, je pense que les Canadiens seraient choqués d'apprendre qu'il a été rejeté. Je ne comprends toujours pas pourquoi vous l'avez rejeté.

Nous avons parlé de l'importance de faire de la recherche dans le domaine de la santé, et je suis entièrement pour la recherche, comme la plupart des gens qui sont assis ici autour de cette table.

M. Marc Renaud: Il est plus difficile de fournir... on peut parler de votre conseil, mais chez nous, il est plus difficile de faire des commentaires à l'étape de la lettre d'intention. On a essentiellement trois documents devant soi. On compare cela à un nombre x d'autres lettres d'intention. Ce que l'on peut dire, c'est pourquoi cette personne arrive disons en dixième place plutôt qu'en cinquième place, mais il faut lire les autres lettres d'intention car encore une fois, il faut prendre une décision. Il est beaucoup plus difficile d'expliquer une telle décision que lorsqu'il s'agit d'un projet plus long avec des méthodologies, des hypothèses et divers documents sur lesquels il est possible de faire des commentaires.

Cela ne veut pas dire que toutes les décisions sont arbitraires. Cela signifie tout simplement qu'elles sont plus difficiles à expliquer. Quoi qu'il en soit, nous devrions donner les motifs.

La présidente: À cet égard, brièvement, nous regardons autour et nous nous comparons à bon nombre d'autres pays, nous nous situons par rapport aux autres, et nous examinons des cas. Dans ce cas particulier, je constate que je ne peux toujours pas comprendre après avoir examiné le dossier et après avoir parlé à des gens. Ce n'était pas seulement une université mais un conglomérat de huit universités qui ont présenté une demande. Tout le monde a tendance à croire que parce que je suis de Windsor, la demande venait uniquement de Windsor, mais cela n'a jamais été uniquement une demande de l'Université de Windsor.

Cela étant dit, le Canada arrive au dix-huitième—dix-huitième—rang sur 21 pays en ce qui concerne la recherche sur les enfants et les automobiles. C'est la cause principale de décès et de blessures pour les enfants au Canada, et pourtant lorsqu'une demande est présentée... Je ne vois tout simplement pas comment ce genre de choses—comme Canada, non pas comme chercheur, non pas comme expert, tout simplement comme Canadienne...

J'ai lu les articles dans Toronto Star et dans d'autres journaux. Comment avons-nous pu passer à côté? S'il n'y a pas de rétroaction lors de l'étape initiale... il faudrait qu'il y en ait, car il s'agit là d'une question critique pour tous les Canadiens.

M. Allan Bernstein: Je suis d'accord avec ce que vous dites. Je vais m'en occuper.

Pour revenir sur ce que disait M. Renaud, nous ne fournissons pas habituellement de commentaires à l'étape de la lettre d'intention. Je pense qu'en ce qui concerne le concours dont vous parlez, nous avons reçu quelque 300 lettres d'intention.

• 1215

Il aurait été très difficile de faire des commentaires très détaillés à cette étape, et nous étions très loin d'avoir les fonds nécessaires pour financer 300 demandes. Nous en avons financé dix dans le cadre de ce concours.

L'autre chose que je voulais dire concerne la question spécifique de la sécurité des enfants et des voitures. Notre Institut du développement et de la santé des enfants et des adolescents a présentement des entretiens avec Transports Canada au sujet de cette question même. Il s'agit d'une question très importante.

Pour ce qui est du consortium dont vous parlez, il devrait peut-être revenir à la charge et venir me parler de la façon dont nous pourrions travailler ensemble pour faire en sorte que le projet de réalise.

M. Thomas Brzustowski: Puis-je ajouter quelques mots aux fins du compte rendu? Pour les subventions les plus importantes, les subventions de recherche, CRSNG fournit des commentaires. Par ailleurs, il existe un mécanisme d'appel. Les gens peuvent porter la décision en appel, et l'appel est entendu par une personne bien informée qui n'a pas participé à la prise de décision antérieure.

La présidente: Très bien.

Monsieur Lastewka, vous aviez une dernière observation à faire.

M. Walt Lastewka: J'ai une brève question. M. Bernstein a parlé de la recherche, des fonds consacrés à la recherche, et des produits pharmaceutiques de marque...

M. Allan Bernstein: J'ai parlé des produits pharmaceutiques de marques déposées.

M. Walt Lastewka: Oui. Faites-vous quoi que ce soit au niveau de la recherche ou du développement des produits pharmaceutiques génériques?

M. Allan Bernstein: Nous n'avons pas pour le moment de partenariat avec les sociétés de produits pharmaceutiques génériques. Ces dernières financent certaines activités de recherche au Canada. Si le chercheur qui est financé vient nous voir, naturellement nous examinerons sa demande et nous déciderons de le financer ou non, selon l'excellence. Cependant, nous n'avons pas de partenariat officiel et direct avec les sociétés de produits génériques.

M. Walt Lastewka: Merci.

La présidente: Merci.

Je tiens à vous remercier tous d'être venus nous rencontrer. Vos observations et vos exposés sont très utiles au comité et nous sommes impatients de vous rencontrer à nouveau à l'avenir.

La séance est levée.

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