AGRI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 10 juillet 2003
À | 1010 |
Le président (M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.)) |
M. John Ferraro (président, Retail Ready Inc.) |
À | 1015 |
Le président |
M. Pierre Guillemette (copropriétaire, Maurice Guillemette Inc.) |
À | 1020 |
Le président |
M. Dick Proctor (Palliser, NPD) |
Le président |
M. Dick Proctor |
Le président |
M. Ted Haney (président, Canada Beef Export Federation) |
À | 1025 |
À | 1030 |
À | 1035 |
Le président |
M. Paul Meinema (président, Local 1400 (Saskatchewan), Union internationale des travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce) |
À | 1040 |
Le président |
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne) |
À | 1045 |
M. Ted Haney |
M. Howard Hilstrom |
M. Ted Haney |
À | 1050 |
M. Howard Hilstrom |
M. Ted Haney |
M. Howard Hilstrom |
Le président |
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ) |
M. Ted Haney |
M. Louis Plamondon |
À | 1055 |
M. Paul Meinema |
M. Louis Plamondon |
M. Paul Meinema |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.) |
M. Ted Haney |
Á | 1100 |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Ted Haney |
Á | 1105 |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Ted Haney |
Le président |
M. Dick Proctor |
M. Ted Haney |
M. Dick Proctor |
Á | 1110 |
M. John Ferraro |
M. Dick Proctor |
M. Pierre Guillemette |
M. Dick Proctor |
M. Pierre Guillemette |
Á | 1115 |
Le président |
M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster) |
M. Ted Haney |
Le président |
M. Paul Meinema |
M. Gerry Ritz |
M. Ted Haney |
Á | 1120 |
Le président |
M. Ted Haney |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur |
Á | 1125 |
M. Ted Haney |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Paul Meinema |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Paul Meinema |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Paul Meinema |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Paul Meinema |
Á | 1130 |
Le président |
M. Louis Plamondon |
M. Pierre Guillemette |
M. André Toutant (directeur général, Maurice Guillemette Inc.) |
M. Louis Plamondon |
M. André Toutant |
M. Louis Plamondon |
M. André Toutant |
M. Louis Plamondon |
M. André Toutant |
M. Louis Plamondon |
M. André Toutant |
M. Louis Plamondon |
Le président |
M. Dick Proctor |
Á | 1135 |
M. Ted Haney |
M. Dick Proctor |
M. Ted Haney |
M. Dick Proctor |
M. Ted Haney |
Á | 1140 |
Le président |
M. Dick Proctor |
M. Paul Meinema |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Ted Haney |
Á | 1145 |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Ted Haney |
Le président |
M. Howard Hilstrom |
Á | 1150 |
M. Ted Haney |
M. Howard Hilstrom |
M. Ted Haney |
M. Howard Hilstrom |
M. Ted Haney |
M. Howard Hilstrom |
M. Ted Haney |
M. Howard Hilstrom |
Á | 1155 |
M. Ted Haney |
M. Howard Hilstrom |
M. Ted Haney |
Le président |
M. Louis Plamondon |
Le président |
M. Gerry Ritz |
M. Ted Haney |
 | 1200 |
M. Gerry Ritz |
M. Ted Haney |
M. Gerry Ritz |
M. Ted Haney |
Le président |
M. Howard Hilstrom |
M. John Ferraro |
M. Howard Hilstrom |
Le président |
M. Howard Hilstrom |
M. John Ferraro |
Le président |
M. John Ferraro |
Le président |
M. John Ferraro |
Le président |
 | 1205 |
M. Ted Haney |
Le président |
Le président |
 | 1220 |
M. Robert Weaver (gérant général, Conseil des viandes du Canada) |
 | 1225 |
 | 1230 |
Le président |
M. Nick Jennery (président et directeur exécutif en chef, Conseil canadien des distributeurs en alimentation) |
 | 1235 |
 | 1240 |
Le président |
M. Nick Jennery |
Le président |
M. Paul Fortin (vice-président, A & P Canada Ltée, Conseil canadien des distributeurs en alimentation) |
Le président |
Mme Kim McKinnon (vice-présidente, Conseil canadien des distributeurs en alimentation) |
Le président |
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne) |
M. Robert Weaver |
 | 1245 |
M. Howard Hilstrom |
M. Paul Fortin |
M. Howard Hilstrom |
M. Nick Jennery |
M. Howard Hilstrom |
M. Robert Weaver |
M. Howard Hilstrom |
M. Robert Weaver |
M. Howard Hilstrom |
M. Robert Weaver |
 | 1250 |
M. Howard Hilstrom |
Mme Kim McKinnon |
M. Howard Hilstrom |
Mme Kim McKinnon |
Le président |
M. Dick Proctor |
M. Robert Weaver |
 | 1255 |
M. Dick Proctor |
M. Robert Weaver |
M. Dick Proctor |
Mme Kim McKinnon |
M. Dick Proctor |
Mme Kim McKinnon |
M. Dick Proctor |
Mme Kim McKinnon |
M. Dick Proctor |
M. Paul Fortin |
M. Dick Proctor |
M. Paul Fortin |
· | 1300 |
M. Dick Proctor |
M. Paul Fortin |
M. Dick Proctor |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Robert Weaver |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Robert Weaver |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Robert Weaver |
Mme Rose-Marie Ur |
· | 1305 |
M. Paul Fortin |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Paul Fortin |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Paul Fortin |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Paul Fortin |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Paul Fortin |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Paul Fortin |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Paul Fortin |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Robert Weaver |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Robert Weaver |
· | 1310 |
Le président |
M. Gerry Ritz |
M. Robert Weaver |
M. Gerry Ritz |
M. Robert Weaver |
M. Gerry Ritz |
M. Robert Weaver |
M. Gerry Ritz |
M. Robert Weaver |
M. Gerry Ritz |
M. Nick Jennery |
M. Gerry Ritz |
M. Nick Jennery |
M. Gerry Ritz |
M. Nick Jennery |
M. Gerry Ritz |
M. Nick Jennery |
M. Gerry Ritz |
Mme Kim McKinnon |
M. Gerry Ritz |
Mme Kim McKinnon |
· | 1315 |
M. Gerry Ritz |
Mme Kim McKinnon |
M. Gerry Ritz |
M. Robert Weaver |
M. Gerry Ritz |
M. Robert Weaver |
M. Gerry Ritz |
M. Robert Weaver |
M. Gerry Ritz |
Le président |
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.) |
M. Robert Weaver |
M. Peter Adams |
· | 1320 |
M. Robert Weaver |
M. Nick Jennery |
M. Peter Adams |
Le président |
M. Howard Hilstrom |
M. Nick Jennery |
· | 1325 |
M. Howard Hilstrom |
M. Robert Weaver |
M. Howard Hilstrom |
M. Robert Weaver |
M. Howard Hilstrom |
M. Nick Jennery |
M. Robert Weaver |
Le président |
· | 1330 |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Robert Weaver |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Robert Weaver |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Robert Weaver |
Mrs. Rose-Marie Ur |
Le président |
M. Peter Adams |
Le président |
M. Paul Fortin |
Le président |
Mme Kim McKinnon |
Le président |
· | 1335 |
M. Robert Weaver |
Le président |
M. Howard Hilstrom |
Le président |
M. Howard Hilstrom |
Le président |
CANADA
Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire |
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l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 10 juillet 2003
[Enregistrement électronique]
À (1010)
[Traduction]
Le président (M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.)): Mesdames et messieurs, nous voudrions commencer la réunion.
Je devrais commencer par expliquer les raisons pour lesquelles nous sommes ici aujourd'hui et pourquoi nous avons convoqué tout le monde à cette époque de l'année où, normalement, nous ne sommes pas à la Chambre. Je pense que cela aidera les membres du comité, et aussi nos témoins, à se concentrer sur notre mandat, aujourd'hui.
Depuis quelques semaines, les questions ont été soulevées, sur les raisons pour lesquelles les que payent les consommateurs pour le boeuf restent constants, tandis que le prix à la livre payé au fermier continue de chuter. Des questions ont aussi été posées, très franchement, qui laissent entendre que certains secteurs augmentent injustement leurs profits aux dépens d'autres secteurs de l'industrie. Tandis que nous étudiions la question, très brièvement, à notre réunion du comité du 30 juin, certains membres du comité ont jugé qu'il serait bon que nous l'examinions plus formellement, et de donner aux représentants du secteur de la vente au détail et de l'emballage de l'industrie la possibilité d'exposer leurs perspectives sur le sujet.
Cela étant dit, je voudrais entamer cette réunion, ce matin. Malheureusement, des personnes qui devraient être ici, aujourd'hui pour représenter le secteur de l'emballage ne sont pas ici. Je comprends que tout le monde a eu très peu de temps pour changer ses plans en vue d'être ici ce matin.
Toutefois, certaines personnes sont venues ce matin—et je tiens à remercier chacun de ces témoins—représentant divers secteurs, qui ont fait démontré leur foi dans ce processus et ont choisi d'être ici aujourd'hui, sans avoir eu plus de temps pour se préparer. Je vous remercie beaucoup, chacun, personnellement.
Pour ceux qui ont décidé de ne pas venir aujourd'hui, il y aura une autre audience. Croyez-moi, ce comité les entendra à un moment donné, dont la date sera déterminée un peu plus tard.
J'aimerais maintenant attirer votre attention sur les témoins qui sont ici aujourd'hui. Nous accueillons M. John Ferraro, le président de Retail Ready Inc., qui vient de Toronto, qui va nous présenter ses observations dans un moment.
Nous entendrons Paul Meinema, le président du local 1400 de l'Union internationale des travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce, en Saskatchewan. Merci d'être ici.
Nous accueillons aussi, de Guillemette Maurice Inc., Pierre Guillemette, copropriétaire. Il est aussi membre de l'Union internationale des travailleurs et travailleurs unis de l'alimentation et du commerce; et M. André Toutant, directeur exécutif.
Nous avons aussi invité, de Canada Beef Export Federation, M. Ted Haney, président.
Merci beaucoup d'être venus. Nous apprécierions que vos présentations, ce matin, soient très concises. Il y a beaucoup de questions. Nous vous invitons à commencer tout de suite.
Est-ce vous allez prendre la parole en premier, monsieur Ferraro, ou avez-vous déterminé un autre ordre d'intervention?
M. John Ferraro (président, Retail Ready Inc.): Je commencerai avec plaisir.
Je m'appelle John Ferraro. Je suis le président de Retail Ready Foods.
Notre mission est de gérer les chaînes d'approvisionnement de l'industrie de la viande de façon innovatrice, en donnant à nos relations avec nos clients et fournisseurs une valeur durable. Nous éprouvons actuellement quelque difficulté à offrir une valeur durable à quiconque dans l'industrie du boeuf. Les producteurs, les producteurs primaires, les emballeurs, les détaillants, même nous, les grossistes, avons souffert de la crise actuelle causée par l'EBS et en avons éprouvé des difficultés.
J'ai pris des notes, et je pourrais traiter de plusieurs aspects.
Je pense que le contrecoup que subissent les producteurs est très évident, étant donné qu'ils ont un marché très limité, sinon nul, pour les produits qu'ils fabriquent depuis, en certains cas, aussi longtemps que 18 mois ou deux ans. D'un seul coup, le marché, leurs valeurs et leurs stocks ont chuté, et je pense qu'ils en souffrent beaucoup. Je n'ai pas besoin de m'expliquer.
Les entreprises d'emballage, on le sait, ont des stocks qui sont bloqués dans le monde entier ou qui reviennent des marchés d'exportation ou ils avaient pensé pouvoir les vendre, mais ils en ont trouvé la porte fermée Ils ont perdu au plan de la valeur des crédits, de l'utilisation des capacités d'usine et de la gamme de produits pour lesquels ils n'ont pas de marché ici, au pays.
Vous avez fait ressortir des questions sur ce qui se passe avec les prix au détail, et les détaillants ont, eux aussi, beaucoup à perdre. L'un des aspects que je trouve vraiment très intéressants, c'est l'intégrité du comptoir à viande. Tout d'abord, les détaillants ne peuvent pas faire fluctuer largement leurs prix aux consommateurs. Deuxièmement, ils ont des stocks. Troisièmement, et fait plus important, il y a la question de l'intégrité. Lorsque les médias explosent et que le monde nous dit que notre stock de viande est insalubre, je pense que si les détaillants décidaient de baisser les prix radicalement du jour au lendemain, les clients et les consommateurs fuiraient les comptoirs, remplis de doutes sur la salubrité des aliments et leur intégrité. Je pense que c'est l'une des préoccupations émotives auxquelles il nous faut faire attention.
La bonne nouvelle, c'est que la demande de boeuf semble intacte. Nous avons peut-être observé quelques hoquets du marché la première semaine, mais je pense qu'il est clair que les consommateurs soutiennent l'industrie et continuent de s'alimenter selon leurs habitudes.
L'une des difficultés qu'il y a, du point de vue des détaillants, aussi, c'est que nous entendons parler de la chute des prix des animaux et de l'accumulation des produits dans les congélateurs. Je lève mon chapeau à la Beef Export Federation pour avoir créé des marchés à l'étranger pour des produits que nous ne consommons tout simplement pas chez nous. Il y a une si grande partie des carcasses qui a très peu de valeur au Canada mais beaucoup dans d'autres pays du monde, pour laquelle nous avons créé des marchés.
Les produits qui ont perdu de la valeur et n'ont aucune valeur sur le marché actuellement ne sont pas ceux que les consommateurs achètent normalement au Canada. Je pense qu'un exemple très simple de ceci est que nous exportons beaucoup de ... Je ne devrais pas tellement parler des exportations, puisque M. Haney pourra le faire beaucoup mieux que moi. Cependant, nous exportons beaucoup de graisses, venant du parage de la viande, puisque les Canadiens mangent des viandes plus maigres, et notre marché du détail est plus pour la viande hachée, particulièrement pour des types de coupes plus maigres.
Les détaillants méritent des éloges pour avoir songé à offrir des viandes hachées maigres et plus grasses. Je pense que c'est très pratique pour réduire les stocks et les produits que nous ne vendons pas normalement sur notre marché. On ne peut pas, en un tourne-main, créer des marchés, du jour au lendemain, pour des produits qu'on ne vend pas normalement. Il faut beaucoup de temps pour cultiver ces marchés. Il est très clair que la plupart de ces produits ont plus leur place sur le marché de l'exportation dans le reste du monde.
Voilà, en gros, les principaux éléments dont je voulais parler. Je pourrai certainement étoffer certains points et répondre aux questions tout à l'heure.
Cette crise nous concerne tous, pas seulement les personnes qui sont touchées directement dans l'industrie du boeuf. Je pense que le boeuf est un élément important du produit intérieur du Canada, et que cette crise se répercutera sur notre économie en général. Je suis très convaincu, et c'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui, qu'il nous faut résoudre ces problèmes, non seulement pour l'industrie, mais aussi, je pense, dans l'intérêt de tous les consommateurs du Canada.
À (1015)
Le président: Merci, monsieur Ferraro.
Monsieur Guillemette, voulez-vous être le suivant?
[Français]
M. Pierre Guillemette (copropriétaire, Maurice Guillemette Inc.): Bonjour, messieurs. Je vais vous épargner l'historique de la compagnie parce qu'on me demande d'accélérer.
Notre usine produit de la nourriture animale. Nos produits sont acheminés aux États-Unis à 95 p. 100. Depuis le cas de la vache folle survenu dans l'Ouest canadien, l'exportation de nos viandes non comestibles vers les États-Unis via notre compagnie Guiltant Inc. fait l'objet d'un refus aux frontières par la USDA, la FDA, la APHIS. Puisque 95 p. 100 de notre volume de viandes non comestibles est vendu aux États-Unis, nous avons, depuis le 31 mai dernier, cessé toute récupération dans les abattoirs du Québec et, évidemment, nos opérations d'usine sont fermées à Saint-Grégoire.
Soit dit en passant, ils ont arrêté les permis pour toutes les espèces, autant pour le porc qu'on expédiait que pour le poulet. Toutes les espèces sont touchées dans la viande non comestible. Tout cela a des répercussions catastrophiques sur notre situation financière, et nous voulons vous énumérer ici les raisons principales causant cette situation.
Au dossier, on a incorporé l'histoire de la compagnie, les cessations d'emploi faites à ce jour. Cela arrive à un mauvais moment dans notre développement parce que nous avions des investissements d'un demi million de dollars en cours. Ce qui se passe à ce moment-ci nous cause un préjudice énorme. Évidemment, on doit supporter nos inventaires de plus de 850 000 kilogrammes dont 250 000 sont composés de boeuf, et on ne sait vraiment pas, compte tenu de la situation actuelle, ce qui va arriver au boeuf.
Soit dit en passant aussi, les autres espèces sont touchées dans notre inventaire parce qu'il y a une présomption de contamination, vu qu'on manipulait du boeuf à l'intérieur de l'usine, ce qui fait qu'on ne sait vraiment pas ce qui va arriver, en fait, avec tout notre inventaire.
L'usine étant fermée, on doit maintenir des coûts fixes astronomiques: nos congélateurs coûtent 25 000 $ par mois, on a plus de 4 000 $ en taxes de toutes sortes à payer, les assurances représentent 5 000 $ par mois. C'est une situation catastrophique que l'on vit en ce moment.
Un autre effet moins connu un peu, c'est la rétention de nos clients. Est-ce qu'ils vont nous être fidèles après cette crise? Qu'en sera-t-il de nos fournisseurs, de nos employés? On a dû remercier des employés qui étaient chez nous depuis plus de 20 ans. C'est catastrophique comme situation.
Au dossier, on a joint des lettres envoyées aux ministres fédéral et provincial pour les sensibiliser à notre cause.
En conclusion, pour toutes les raisons énumérées ci-haut, nous ne pouvons pas assurer notre existence future sans l'aide du gouvernement, du moins jusqu'à ce que les opérations redeviennent normales. En gros, c'est ce qu'on vit actuellement.
À (1020)
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Oui, monsieur Proctor?
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Je voudrais faire un rappel au règlement. M. Guillemette dit avoir un mémoire. Pouvons-nous l'avoir?
Le président: Il n'y en a pas assez d'exemplaires, et nous ne faisons aucun reproche, ce matin, parce que personne n'a eu le temps de faire traduire son texte. Apparemment, il n'y a pas assez d'exemplaires de ce mémoire en particulier pour le distribuer à tout le monde. Nous en ferons faire d'autres. Il y en a d'autres qui ont déjà été distribués et ils ne sont qu'en anglais. J'ai parlé à M. Plamondon. Nous comprenons que les circonstances soient différentes ce matin, alors ...
M. Dick Proctor: À titre de suivi seulement, alors. Est-ce que nous l'aurons avant la fin de la réunion?
Le président: Probablement, oui.
Monsieur Guillemette, avez-vous terminé? Nous réservons l'intervention de votre partenaire, monsieur Toutant, pour plus tard.
Nous allons maintenant laisser la parole à M. Ted Haney de la Canada Beef Export Federation.
Nous vous assignons à ce groupe, puisque vous allez être appelé à régler des problèmes hors du pays, justement au sujet de ce dont nous parlons ce matin. Merci d'être venu, monsieur Haney, et je vous laisse la parole.
M. Ted Haney (président, Canada Beef Export Federation): Merci beaucoup de m'avoir invité à vous cette audience. Nous allons au Mexique cet après-midi, avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments et le gouvernement du Canada, pour unir nos efforts aux leurs et tenter d'ouvrir ce marché, qui pourrait bien être la première faille dans le mur qui a isolé notre industrie du commerce international. Au bout du compte, c'est la seule solution possible pour ramener la prospérité dans notre industrie.
Je représente la Canada Beef Export Federation, créée en 1989, avec le mandat d'élargir et de diversifier les exportations de boeuf du Canada. Nos membres représentent à la fois l'industrie canadienne du bétail, aux niveaux provincial et national, et les secteurs de l'emballage et du traitement de la viande.
Les membres de l'organisation ont été dévastés par l'unique cas de EBS et l'impossibilité de faire du commerce qui en a découlé.
La Canada Beef Export Federation a beaucoup fait, depuis sept semaines pour fournir de l'information au gouvernement du Canada et aux membres des marchés internationaux, pour s'assurer que les exigences uniques qu'il faut satisfaire sont, à tout le moins, connues, afin qu'elles puissent être satisfaites.
Nous avons catégorisé pour ce groupe nos mesures prioritaires en trois étapes fondamentales. La première est le rétablissement des marchés internationaux. Nous encourageons le gouvernement du Canada à rechercher la pleine ouverture de tous les marchés internationaux, en commençant par les États-Unis. La deuxième priorité est le Mexique. La troisième, c'est le Japon puis la Corée du Sud et Taiwan. Le marché combiné Hong Kong-Chine vient après. Tous les autres marchés sont nettement moins prioritaires, bien que le règlement des problèmes d'accès à la Russie pourrait très bien être une porte de sortie pour nos produits en l'absence d'autres marchés cruciaux.
Nous demandons que toute exception à la pleine ouverture du marché soit fondée sur des preuves scientifiques relativement aux définitions des matières à risque spécifié. Nous en sommes venus à craindre de ne pas exiger assez, en tant que pays, pour commencer. On m'a dit que tout marché est comme une miche de pain, et qu'il suffit d'en demander un certain nombre de tranches dans la phase initiale du marketing—les jeunes animaux et le boeuf produit avec de jeunes animaux. De fait, une grande part des recettes que nous tirons des marchés de l'exportation des animaux vivants vient du reste de la miche de pain, parce que ce sont des produits qui ne sont généralement pas consommés au Canada.
Alors on pense qu'il vaut mieux tenter d'obtenir l'ouverture pleine et exhaustive du marché pour tous les types de bétail et tous les produits dérivés de ce bétail, même si nous n'y parvenons pas tout à fait. Il vaut mieux essayer, plutôt que de demander trop peu et d'obtenir tout ce qu'on a demandé.
Nous pensons que le processus d'ouverture du marché doit venir d'un effort combiné d'engagement politique, d'engagement technique et d'engagement de l'industrie, de façon simultanée. À cette fin, nous avons demandé que pour les principaux marchés que j'ai indiqués, le bureau du ministre mette des missions sur pied, auxquelles participeraient les conseillers techniques qu'il lui faut, mais aussi l'industrie, pour s'adresser directement aux organes de réglementation de l'étranger. Bien que certains de ces contacts aient été établis par voie électronique, par téléphone, et que l'Agence canadienne d'inspection des aliments, de façon indépendante, avec Agriculture Canada—mais sans l'industrie—soit allé au Japon et en Corée, nous pensons que ces démarches auraient un fondement nettement plus solide aux stades préliminaires si elles étaient faites simultanément aux niveaux politique et technique et à celui de l'industrie, de concert.
Étant donné que les marchés étrangers et leur réouverture sont la plus grande priorité, tout le reste vient du fait que nous n'y avons pas accès aujourd'hui. Notre deuxième priorité est de régler le problème des conteneurs bloqués. Le premier jour de cette crise, nos membres ont perdu près de 25 millions de dollars américains en valeur de produits. Ce sont des produits qui avaient été expédiés vers des destinations internationales le 20 mai, mais n'y sont pas parvenus. La plus grande part de ces produits qui se chiffrent à 25 millions de dollars de produits sont, en fait, bloqués au Japon et en Corée.
À (1025)
Nous avons demandé au gouvernement du Canada, tout d'abord, la prolongation de la période pour commencer à payer les frais d'entreposage et les surestaries, qui coûtent en moyenne 200 $ par jour, par conteneur. Au total, c'est environ 3,3 millions de dollars. Cela s'ajoute aux plus de 25 millions de dollars US de la valeur des marchandises bloquées. C'est pour soulager les pressions que subissent l'industrie et nos clients. Ils ne seraient plus encouragés à simplement se débarrasser de ces produits sur les quelques marchés qui restent ouverts pour les ré-acheminer, ou en fait, de les faire incinérer à l'étranger.
Deuxièmement, nous avons demandé à notre gouvernement d'exercer directement des pressions pour faire en sorte que les produits puissent rester sur le marché. Un quotidien national a, aujourd'hui, en manchette, un article selon lequel le Japon a commencé à exiger l'incinération du boeuf frigorifié frais et des produits qui peuvent contenir des matières à risque spécifiées. Ce sont les produits qui sont dans les entrepôts et les dépôts de conteneurs. Ce n'est pas un développement positif pour l'image de notre industrie sur la scène internationale, ni pour le niveau d'engagement de nos clients japonais à l'égard de notre industrie. Nous insistons donc vivement maintenant pour que le gouvernement du Canada demande la suspension des ordres internationaux de retour et de destruction.
Troisièmement, nous demandons au gouvernement du Canada de négocier très directement avec les organes de réglementation internationaux pour permettre que les produits qui sont bloqués actuellement soient libérés sur les marchés pour être vendus. Il n'y a pas de différence de risque entre le produit qui est arrivé le 20 mai au Japon et celui qui est parti de Vancouver le 20 mai, mais la différence, ce sont ces 25 millions de dollars US de la valeur des produits qui sont bloqués. C'est pourquoi nous demandons au gouvernement du Canada de négocier la libération des produits bloqués au Japon et en Corée particulièrement, et sur d'autres marchés aussi, pour être vendus. Si ce n'est pas possible, nous demandons au gouvernement du Canada de négocier pour que les produits qui sont actuellement bloqués soient libérés sur les marchés lorsque ceux-ci seront à nouveau ouverts pour le boeuf canadien, afin que nous ne nous retrouvions pas dans la situation terrible où 25 millions de dollars de boeuf pourraient être détruits alors que toutes les nouvelles exportations en provenance du Canada seraient acceptées. Cette situation n'aurait aucun rapport au risque. Nous voudrions l'éviter.
Enfin, nous demandons que si les marchés ne sont pas réouverts dans une période raisonnable, que ce soit le 1er août ou le 1er septembre. le gouvernement du Canada lance un programme de rachat des conteneurs bloqués afin que nos membres exportateurs, et parfois nos clients internationaux, n'aient pas à assumer seuls le coût de la destruction de ce produit qui a été acheté. Il ne manquerait plus que nos clients internationaux qui ont subi d'importantes pertes économiques en n'étant pas autorisés à prendre livraison du boeuf canadien doivent ensuite payer pour sa destruction, alors qu'en même temps, ou peu après, nous leur demandons de participer à la reconstruction de nos marchés.
La dernière priorité, c'est le rétablissement du marché. Une fois que le marché aura été réouvert, la fédération a proposé un programme amélioré de développement des principaux marchés. Cela varie assez radicalement selon les marchés, en fonction de la manière dont les consommateurs internationaux ont été sensibilisés à ce cas particulier d'EBS, et de la manière dont les secteurs de l'importation et de la distribution y ont réagi. Nous avons très peu à faire au Mexique. Il y a beaucoup à faire au Japon.
Les ressources additionnelles dont a besoin la fédération, selon nous, dans l'année qui suivra l'ouverture des marchés, se chiffrent à 1,3 million de dollars, et nous demandons au gouvernement fédéral, par l'entremise de son cadre stratégique agricole, de fournir ces ressources pour aider à rétablir notre image et à reprendre nos parts du marché en Asie et au Mexique, nos principaux marchés.
Enfin, outre les 25 millions de dollars américains qu'ont perdus nos exportateurs, le secteur de l'emballage et du traitement de la viande au Canada, dès le premier jour, nos recherches ont conclu que ces membres ont continué de perdre d'importantes sommes, de l'ordre de 15 à 20 millions de dollars supplémentaires dans la première semaine, tandis que la crise se poursuivait. Les prix du bétail n'ont pas baissé, mais les écart entre les exportations et les marges de profit ont entraîné des pertes phénoménales. Les compagnies n'ont pas pu réduire leurs coûts d'exploitation, les mises à pied ont été reportées dans l'espoir que les marchés seraient réouverts dans un délai raisonnable.
Des pertes similaires, de l'ordre de 10 à 15 millions de dollars de plus, ont été enregistrées la deuxième semaine. Même pas les coûts variables n'ont pu être recouverts pendant ces deux semaines d'exploitation.
À la troisième semaine, les coûts variables étaient couverts et certaines contributions étaient faites aux coûts fixes.
À (1030)
À la quatrième semaine, nos membres nous disaient que ces coûts variables et fixes étaient couverts. Et aujourd'hui, selon une analyse économique, le secteur de l'emballage rentre dans ses frais ou fait de modestes profits, mais la limite avait, en fait, été surévaluée.
La valeur du produit qui est mis en entrepôt est sujette à spéculation. L'extérieur de ronde peut valoir 2,49 $ la livre au prix de gros normalement, mais faudrait-il que l'excès de production qu'on ne peut vendre au Canada soit vendu 1,30 $ la livre comme boeuf à haut rendement pour hacher, ou 80 cents, ou 50 cents.? La valeur limite est inférieure à ce qu'elle peut sembler être, parce que la valeur du produit qui est mise en entrepôt est sujette à caution.
Ce n'est pas différent des parcs d'engraissement dont les exploitants sont en négociation avec leur banque et qui tentent d'évaluer le bétail de leur stock. Est-ce que cette bête, qui est prête à l'abattage, vaut 1 000 $, ou 300 $? On pourrait soutenir qu'elle vaut l'un ou l'autre, selon la situation à la frontière lorsque cet animal sera prêt à entrer sur le marché.
Donc, la crise n'est pas terminée, et il ne semble pas, selon nos recherches, y avoir de profits excessifs. Pour citer Kevin Grier, du George Morris Centre , selon l'analyse qu'il fait dans le Canadian Cattle Buyer, de modestes profits sont faits dans le secteur du traitement aujourd'hui, et sans ces profits, la crise que vit notre industrie serait pire, puisque le secteur de l'emballage achèterait encore moins de bétail qu'il ne le fait aujourd'hui.
Là-dessus, je tiens à vous remercier de m'avoir invité ici.
À (1035)
Le président: Merci, monsieur Haney.
J'aimerais dire à l'attention de nos téléspectateurs de tout le pays, aujourd'hui, que les Canadiens ont été très fidèles et ont continué d'acheter les produits du boeuf. Leur appui à l'industrie n'a pas flanché, et nous leur en sommes reconnaissants. Il est très important que les Canadiens ne perdent pas foi dans le système. Nous savons que notre système est sécuritaire, que le produit que nous consommons aujourd'hui est aussi salubre qu'il l'était le 15 mai. Nous les encourageons à continuer ainsi. Nous l'apprécions vraiment.
Nous allons commencer les questions ...
Monsieur Meinema, je m'excuse, je vous reviens. Pardonnez-moi.
M. Paul Meinema (président, Local 1400 (Saskatchewan), Union internationale des travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce): Merci, monsieur le président.
Je m'appelle Paul Meinema, je suis le président du Local 1400 de l'Union internationale des travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce. Nous sommes le plus gros syndicat du secteur privé en Saskatchewan.
Je représente ici aujourd'hui 1 500 membres de notre syndicat, dans tout le pays, qui ont été touchés par la maladie de la vache folle. Permettez-moi de commencer par vous remercier de cette occasion que vous me donnez de comparaître devant votre comité. Je suis heureux que ces travailleurs puissent enfin être entendus.
Nous craignons que nos membres et les travailleurs de tout le pays qui ne sont pas membres de notre syndicat aient été perdus et aient glissé dans les fentes du système. En tant que président d'un vaste syndicat, permettez-moi de vous dire que nous avons vécu une période très difficile. Nous avons affaire à des membres de longue date qui poursuivaient leurs activités courantes, continuaient de vivre leur quotidien, et un jour, pour des raisons absolument hors de leur contrôle, leur horizon est devenu gris et incertain. Certains ont pris des vacances pour éviter la mise à pied, ou ils ont suspendu les projets de leur famille pour l'été. D'autres ne savaient même pas s'ils auraient leur paye suivante.
Nous avons plusieurs membres qui ne sont pas admissibles à l'assurance-emploi, que ce soit des nouveaux employés d'usine, des employés qui ont été blessés ou qui reviennent d'un congé de maternité, comme l'une de nos membres de Moose Jaw, Carrie Sanford, une mère célibataire de trois enfants, qui n'a plus de paye de vacances et qui n'a pas droit à l'assurance-emploi parce qu'elle revient d'un congé de maternité. Elle a travaillé à temps plein à l'usine pendant 13 ans, et elle doit envisager maintenant de recourir à l'aide sociale.
Nous avons des gens qui ont travaillé dans ces usines et qui revenaient de congé de maladie, qui devaient reprendre le travail graduellement mais qui doivent retourner aux indemnités d'accident du travail—encore un coût que devront assumer les collectivités et nos employeurs.
Dans une ville comme Moose Jaw, avec ses 35 000 habitants, une ville agricole, où ces 160 personnes, les employés de l'usine qui a été fermée, trouveront-elles de l'emploi? Quatre-vingt-six de ces employés sont retournés à l'abattoir la semaine dernière pour abattre des petits animaux, pour apprendre ce matin que leur transformateur avait sauté et qu'ils sont encore sans emploi, mais nous espérons qu'ils pourront y retourner samedi.
Je suis sûr que vous savez, par exemple, au sujet de certaines de ces grandes usines au Canada—et nous prendrons l'exemple de Cargill, à High River—qu'il faut près de 15 ans à une telle usine pour avoir un effectif stable qui lui permet de maintenir les niveaux de production nécessaires. D'après ce que j'ai appris, l'usine IBP Lakeside de Brooks, même si elle pratique le partage de postes, perd entre 10 et 15 employés par jour parce que le partage de postes ne paye pas les factures.
Cette crise de l'EBS a touché, directement et indirectement dans tout le pays, 1 500 de nos membres qui travaillent dans les usines d'emballage, les compagnies de transport par camion, les compagnies de sécurité, les parcs à bestiaux et les installations d'équarrissage. Je ne doute pas que d'autres personnes qui ne sont pas membres de notre syndicat ont aussi été touchées.
En Ontario et au Québec, lorsque la tempête de verglas a frappé il y a quelques années, et au Manitoba lorsque la rivière Rouge a débordé, et certainement tout récemment en Ontario, avec les travailleurs de la santé et du tourisme touchés par le SRAS, l'urgence nationale a été déclarée. Pourquoi serait-différent pour nos travailleurs, dans ce secteur? Ce sont, là aussi, des circonstances qui sont hors de leur contrôle.
Cependant, avec l'EBS, bien que le gouvernement ait vite réagi et lancé une enquête—et en passant, ça a été du travail bien fait, en grande partie à l'usine XL de Moose Jaw, pour analyser le bétail—la réaction du gouvernement à ces travailleurs a été d'une lamentable insuffisance. Il est absolument aberrant que Jane Stewart n'ait pas voulu supprimer la période de carence de deux semaines. Ce fonds, qui a des milliards de dollars de surplus—dont pas le moindre ne vient du gouvernement—devrait servir aux travailleurs justement dans ce genre de crise. Que le SRAS ou l'EBS soient la cause du chômage n'a rien à y voir; le fait est que des centaines de contribuables sont touchés, sans que ce soit leur faute, alors que, d'une façon ou une autre, la quarantaine leur ait été imposée par le gouvernement.
J'aimerais savoir pourquoi ces gens-là sont traités de façon si différente? Cette situation est une crise nationale. L'enveloppe de 460 millions de dollars d'aide annoncée en juin n'a toujours pas été livrée. Sur ces 460 millions, rien n'a été prévu pour ces travailleurs. Nous savons que cet argent est destiné aux éleveurs, aux agriculteurs, aux entreprises d'emballage, dont environ 50 millions de dollars pour ces derniers. Nous savons très bien qu'il vaut mieux pour nos membres que l'industrie soit saine. Toutefois, cette industrie ne survivra pas et ne pourra rester saine sans ces travailleurs.
À (1040)
Enfin, il a été question, récemment, d'interdire le boeuf américain au Canada. Ce n'est pas, à notre avis, une solution. Cela pourrait même aggraver la situation. Il faut promouvoir le boeuf canadien, absolument, mais il faut ouvrir la frontière; la fermer ne servirait à rien.
La solution suprême, pour tous les intéressés, c'est que la frontière américaine soit ouverte aux produits du boeuf canadien et non pas seulement aux animaux. Il faut avoir de sérieuses discussions avec le Japon. Cependant, le Mexique au moins s'est montré disposé à faire du commerce avec le Canada. Ce pourrait très bien être notre débouché en Amérique du Sud, et peut-être cela nous a-t-il démontré qu'un unique gros partenaire commercial n'est pas ce qu'il faut dans ce secteur.
Si le produit doit être vendu à des prix réduits, pourquoi ne pas examiner les besoins humanitaires de pays qui pourraient en avoir besoin? Au moins les travailleurs des usines d'emballage et les producteurs pourraient-ils continuer de travailler.
Pour terminer, j'aimerais, encore une fois, vous remercier de cette occasion que vous m'avez donnée de venir parler au nom de nos membres. Je vous demande avec insistance d'accroître vos pressions et de ne pas laisser ces travailleurs, qui sont une partie intégrale de cette communauté glisser dans les fentes. Merci.
Le président: Merci, monsieur Meinema. Je crois que ceci termine nos présentations.
Nous allons passer aux questions. M. Hilstrom a la parole le premier, pour sept minutes.
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Je ne pense pas que le pays, ni le gouvernement, comprennent l'énormité de la crise financière que nous vivons. L'idée des ministres provinciaux de l'Agriculture, particulièrement de la Saskatchewan et du Manitoba—ma province—que nous commencions à fermer la frontière au boeuf américain, dont Paul vient de parler, est tout simplement une mauvaise idée, une idée idiote. J'espère qu'ils cesseront d'en parler.
Je crois que la séance, aujourd'hui, est télévisée, monsieur le président?
J'espère que vos propos parviendront aux premiers ministres. Ils ne semblent pas comprendre que le marché canadien du boeuf, tous nos prix, y compris dans les magasins au détail, sont fondés sur le cours international du boeuf. Le gouvernement n'a pas compris cela lorsqu'il a créé le programme, parce que j'ai lu dans le communiqué de presse que le programme était conçu pour rétablir le marché. C'est physiquement et économiquement impossible de rétablir le marché si on ne cherche qu'à rétablir le marché à l'intérieur du Canada, seulement.
Pour mettre les choses en contexte—Paul en a largement parlé—les voisins de mon ranch au Manitoba ont une trentaine d'années. Ils ont deux enfants de moins de six ans. L'homme travaille dans la construction. Sa femme est dans les champs de foin, avec une faucheuse-conditionneuse, à couper le foin pour le bétail de leur ferme. Ils ont une centaine de têtes de bétail.
Ma femme est passé par là pour les avertir qu'ils avaient quelques vaches sorties de leur parc. Elle s'est arrêtée pour parler à cette voisine. Le sujet de l'EBS est venu sur le tapis. La voisine a éclaté en sanglots parce qu'ils ne peuvent plus payer leurs factures. La marge de crédit et les emprunts doivent être remboursés très rapidement, ici. Elle est là, à couper le foin, avec deux enfants dans le camion, et il travaille dans la construction pour essayer de continuer à vivre et de mettre à manger sur la table. C'est ça, la situation.
Cela étant dit, monsieur le président, j'ai des questions...
Tant qu'à y être, j'ai autre chose à dire. Je suis franc. J'ai déjà annoncé que je ne compte me présenter aux prochaines élections fédérales. Je parle franchement, comme je l'ai toujours fait, depuis que j'ai été élu en 1997. J'ai du mal à croire, monsieur le président, que ce comité de l'agriculture ne peut avoir plus de membres ici, aujourd'hui, pour discuter d'un sujet de cette gravité. J'espère que les médias ne se gêneront pas pour dire haut et fort que nous n'avons pas jugé bon, en tant que comité, de convoquer un nombre convenable de membres pour entendre ces importants témoins.
Je vais maintenant être très bref, puisqu'il ne me reste que très peu de temps, je suppose, après ces déclarations.
Au sujet de l'ouverture des frontières, est-ce que l'industrie, ou l'un ou l'autre d'entre vous, avez été consulté par le gouvernement sur le rôle que vous auriez dans la mise en oeuvre du rapport international des vétérinaires sur les changements à la réglementation? Où cela en est-il dans votre secteur en particulier? Je vous demanderais, à chacun, si le gouvernement vous a consulté à ce sujet. Quand ces règlements et changements seront-ils faits? Est-ce que quelqu'un peut répondre à cette question? Ted, peut-être devriez-vous commencer.
À (1045)
M. Ted Haney: Grâce au processus de table ronde, le secteur et le gouvernement ont effectivement été réunis, et des groupes de travail ont pu être créés. L'un d'eux devait traiter de la mise en oeuvre de règlements sur les matières à risque spécifiées, ce qui est vraiment l'enjeu clé pour le groupe international. Il y a eu des discussions, mais au bout du compte, les échanges ont été assez limités.
L'Agence canadienne d'inspection des aliments semble prête à annoncer une série de mesures de contrôle des MRS ou de l'EBS, et de mesures de surveillance, sans qu'il y ait beaucoup d'interaction avec le secteur sur ce qu'elles devraient être. Il se peut que ce soit en fonction de ce que les États-Unis et le Canada devraient faire ensemble, mais je pense que nous avons convenu que si les États-Unis ne se dépêchent agissent pas d'ouvrir leur frontière, nous ne pourrons pas attendre très longtemps l'harmonisation de la réglementation avec les États-Unis. Ce ne peut être efficace qu'avec une frontière ouverte. S'ils n'agissent pas très rapidement, et nous faudra probablement agir de nous-mêmes en ce qui concerne la politique sur les MRS et la surveillance. Mais il n'y a pas eu beaucoup de discussions ouvertes sur ce qu'elles devraient être, d'une perspective canadienne. Les journaux en parlent un peu. Il y a eu un peu d'interaction, mais du genre l'industrie présente, le gouvernement examine. Nous ne savons pas en détail ce qui est proposé.
M. Howard Hilstrom: Je comprends le concept de marché continental appliqué ici, et que nous devons avoir des règlements qui sont quasi identiques, mais le Canada peut adopter les règlements tout d'abord, et les États-Unis se rattraperont pour ce qui est du concept continental. La raison pour laquelle je dis cela, c'est que le Japon impose comme condition à la réouverture de ses frontières que les recommandations de ce rapport intérimaire soient, de fait, mises en oeuvre. C'est pourquoi il est tellement important que nos frontières soient réouvertes pour d'autres pays. Le Japon devra être satisfait le premier.
Je n'ai pas d'entretiens directs avec Ann Veneman, la secrétaire du ministère américain de l'Agriculture, bien que Stephen Harper soit là aujourd'hui pour discuter avec des gens à Washington, et on dirait que les États-Unis ne vont pas rouvrir de si tôt leur frontière par crainte de perdre ces marchés de l'Asie. Est-il vrai, comme l'ont dit les médias, que les Américains n'ouvriront pas leur frontière tant que les marchés de l'Asie ne seront pas assurés?
M. Ted Haney: Les États-Unis ont déjà usé du prétexte du Japon et de la Corée pour justifier le refus d'ouvrir leur marché à nos produits. Nous avons appris que la Corée a décidé de ne pas imposer aux États-Unis les restrictions sur la certification des pays d'origine, alors on revient au Japon. Nous examinons ce que veut le Japon, mais les États-Unis ont saisi ce prétexte. Nous pensons que les États-Unis pourraient régler cela au moyen de protocoles de ségrégation d'entreprises surveillées par l'USDA tout en ouvrant leur marché au bétail canadien pour le traitement, et au boeuf canadien. Donc, les tergiversations des États-Unis semblent être fondées sur des raisons qui ne sont pas nécessairement fondées scientifiquement. Et on a déjà vu qu'ils peuvent ouvrir leur marché à nos produits même si le Japon n'ouvre pas le sien aussi rapidement. Les États-Unis ont connu la même situation avec l'Uruguay, ils ont décidé d'ouvrir leur marché à l'Uruguay, et l'ont fait, tandis que le Japon ne permettait toujours pas l'importation de produits de l'Uruguay, exigeant...
À (1050)
M. Howard Hilstrom: Est-ce que le Canada interdit encore le boeuf du Japon?
M. Ted Haney: Le Japon n'est pas autorisé, actuellement, à exporter du boeuf au Canada. Nous avons appris que sur une recommandation de l'industrie et après un examen interne, l'Agence canadienne d'inspection des aliments a invité le Japon à faire une demande d'importation directe au Canada, et ce n'est arrivé que tout récemment. Nous applaudissons cette démarche et nous pensons qu'elle aurait dû être faite il y a déjà quelque temps.
M. Howard Hilstrom: Merci, monsieur le président, de m'avoir laissé plus de temps.
Le président: Merci.
Monsieur Plamondon.
[Français]
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): Merci, monsieur le président.
Ma première question s'adresse à M. Ted Haney. Si j'ai bien compris votre intervention, on pourrait procéder par étape. Par exemple, si le veau était exclu de la barrière américaine... Le veau pourrait facilement être exclu puisqu'il n'a pas de relation avec les vaches d'avant 1977 qui étaient nourries avec des moulées animales. Vous avez parlé aussi de viandes animales.
Est-ce qu'il y a eu des discussions à la table ronde pour procéder de cette façon, c'est-à-dire enlever des barrières au niveau de certains produits ou de certaines catégories, dont les viandes animales, par exemple? C'est en lien avec ce que M. Guillemette a dit tout à l'heure, puisqu'il est producteur de viandes animales. Est-ce qu'il y a eu des discussions dans ce sens-là, et est-ce que ça semble vouloir aboutir?
[Traduction]
M. Ted Haney: Les discussions initiales sur la demande ne visant qu'une gamme limitée de produits pour l'ouverture initiale du marché étaient fondées sur l'hypothèse que si nous faisions un compromis en n'ayant qu'une gamme limitée de produits, cela favoriserait une ouverture rapide du marché. Le marché ne s'est pas ouvert rapidement.
Nous disons que dans ce contexte, notre demande doit porter sur une gamme beaucoup plus vaste de produits par crainte que si nous ne pouvons envoyer à l'abattoir que de jeunes animaux, de moins de 30 mois—et les produits du boeuf qui viennent de jeunes animaux—si c'est dans la première ronde d'approbation, il pourrait devenir très difficile, par la suite, d'obtenir l'accès pour les autres produits.
Cela élimine les pressions, et alors, quand on essaie de conclure le reste des ententes, cela devient très difficile à cause de l'impression qui règne que la crise est terminée et que les pressions n'existent plus.
Nous recommandons l'ouverture complète. Par exemple, prenons le veau, c'est sûr que nous allons le recommander, puisque ce sont de très jeunes animaux. Le marché devrait être ouvert, et tous les produits du veau devraient pouvoir y accéder.
Un autre exemple, c'est le bétail d'élevage. Ces animaux sont, soit exportés à l'âge de 30 mois ou plus, ou après l'exportation, comme ils sont intégrés à un programme d'élevage, ils doivent avoir au moins 30 mois. Si nous ne parvenons pas à ouvrir les marchés pour le bétail d'élevage, tout ce secteur de notre industrie, qui est important—il forme l'infrastructure génétique de notre compétitivité—sera sapé, parce qu'il faut exporter ces animaux pour générer les profits qui permettront de continuer d'améliorer et de développer.
Ce pourrait être une perte si nous ne cherchons pas l'ouverture globale des marchés.
Donc, ces discussions étaient en cours. Mais il est clair que la stratégie a changé, et doit changer, parce que nous ne cherchons pas à faire ouvrir le marché dans trois semaines ou un mois; cela fait déjà sept semaines, bientôt huit. Alors, il nous faut l'ouverture complète du marché.
[Français]
M. Louis Plamondon: Monsieur Paul Meinema, vous avez parlé de mesures de soutien provenant des fonds de l'assurance-emploi pour les travailleurs. Vous avez dit que les jeunes familles ou tous ceux qui travaillent dans ce domaine ont des difficultés financières à cause du manque d'emplois. Vous avez parlé aussi de gens qui doivent retourner au travail après avoir été blessés, mais qui n'ont plus de travail et qui se retrouvent donc devant une situation où ils n'ont aucun revenu.
Quelle serait la façon de puiser dans l'assurance-emploi? S'agirait-il, par exemple, d'éliminer les deux semaines d'attente lorsqu'un conflit semblable se produit, comme on l'a fait pour la fièvre à Toronto, par exemple, où on a éliminé, pour les travailleurs touchés, les deux semaines d'attente? Ils touchaient alors l'assurance-emploi immédiatement. Est-ce que vous avez fait cette suggestion au gouvernement ou est-ce que vous demandez que ce soit fait aujourd'hui?
À (1055)
[Traduction]
M. Paul Meinema: Merci.
Nous avons demandé et suggéré au gouvernement, à plusieurs reprises, que la période de carence de deux semaines soit levée. Notre directeur national a écrit à Jane Stewart, et aussi aux représentants du mouvement syndical. Même M. Proctor a demandé à la Chambre l'élimination de cette période de carence. Pour une raison quelconque, on nous répond que c'est impossible.
Alors, nous nous efforçons encore de faire supprimer cette période de carence, et nous cherchons une marge de manoeuvre dans les autres règles de l'assurance-emploi, pour les cas de gens qui ne peuvent pas travailler parce qu'ils sont blessés et qui, maintenant, sont mis à pied et qui devront, en fin de compte, mentir sur leur demande de prestations de chômage en disant «Je suis prêt à travailler, je veux et je peux travailler»... S'ils ne mentent pas, ils n'ont pas droit aux prestations de chômage, parce qu'ils sont blessés et ils ne peuvent pas travailler ailleurs. Ils étaient censés reprendre le travail selon les modalité qui s'appliquent aux accidentés du travail.
Dans certains cas, nous avons pu réintégrer ces gens au programme de prestations, bien qu'encore une fois, ce soit la Commission des accidents du travail et l'employeur qui en assument le coût.
Donc, oui, nous souhaitons un relâchement des règles. Nous ne croyons pas que cette situation soit bien différente de celle du SRAS et de bien d'autres, et nous souhaitons vraiment que la période de carence de deux semaines soit supprimée.
[Français]
M. Louis Plamondon: Je m'adresse toujours à vous, Paul. Dans votre exposé, vous avez parlé d'une solution d'aide internationale. Je présume que vous vouliez dire que le Canada achèterait les surplus des producteurs qui sont actuellement en sol canadien pour les exporter, les donner ou les vendre à bas prix à des pays en voie de développement ou en difficulté.
Est-ce que vous avez fait une demande formelle au gouvernement canadien dans ce sens? Si oui, est-ce que vous avez cité des cas d'autres domaines où cela aurait existé--par exemple, je crois qu'on l'a déjà fait pour le blé--, ou est-ce que vous en parlez simplement aujourd'hui au comité?
[Traduction]
M. Paul Meinema: C'est la première fois que j'en parle à ce comité au sujet du boeuf, mais je sais que le Canada l'a fait dans le passé pour d'autres produits, comme le blé. Je pense que ce serait une solution, qu'elle soit temporaire ou non. Si nous avons ce surplus de boeuf, comme on l'a dit, qui attend dans les ports étrangers, plutôt que de le faire détruire, s'il pouvait être acheté des producteurs et des propriétaires d'usine d'emballage à prix d'escompte, et au moins distribué aux pays qui pourraient l'utiliser à des fins humanitaires... Je pense que le Canada a une assez bonne réputation dans le domaine, et ce pourrait être un autre moyen d'aider l'industrie actuellement.
Le président: Merci, monsieur Plamondon. Votre temps est écoulé.
Nous laissons la parole à Mme Ur.
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Je vous remercie d'avoir répondu à l'invitation de notre comité.
Ce n'est pas parce que nous sommes des politiciens que nous ne comprenons pas la situation. Croyez-moi, nous la comprenons. C'est pourquoi nous sommes revenus ici. Je suis à la Chambre depuis 10 ans, et je n'ai jamais eu à y revenir en été, alors cela vous donne une idée de l'intérêt que le comité porte à la question. La politique, en grande partie, ne passe pas le seuil de cette pièce. Nous sommes ici pour essayer d'agir dans l'intérêt de l'industrie, et j'apprécie que vous soyez ici ce matin.
Je pense que c'est M. Haney qui a demandé si le fait de n'avoir qu'un gros partenaire commercial nous a appris quoi que ce soit? Peut-être devrions-nous élargir nos horizons, envisager d'autres possibilités, et vous avez cité tous les autres pays. Cela ne vous ressemble pas d'avoir tous vos oeufs dans un même panier, mais le fait d'avoir une si grande part du marché des exportations dans un seul pays pourrait être source de quelque difficulté en ce moment.
M. Ted Haney: La Canada Beef Export Federation a été créée en 1990, alors que 95 p. 100 de nos exportations de boeuf allaient aux États-Unis. Nous avions fait l'objet de plusieurs enquêtes sur les droits compensateurs, la menace de l'anti-dumping avait souvent pesé sur nous, et il y avait aussi, à l'époque, le facteur Lehman—des frictions à la frontière relativement à l'inspection des produits et à leur libération sur le marché américain.
Notre fédération a été créée dans le but express d'élargir et de diversifier les exportations. Nos démarches allaient bon train. Cela semble être il y a longtemps, mais il est important de souligner qu'en mai 2003, notre industrie a enregistré des chiffres records d'exportations au Japon. En mai 2003, le Canada a fait parvenir au Japon 2 400 tonnes métriques de boeuf; 1 034 tonnes ont été mises en vente, mais malheureusement, ce qui reste est encore bloqué dans les dépôts de conteneurs et les ports.
En 2002, notre dépendance sur le marché américain avait baissé à 72 p. 100. À ce moment-là, les exportations vers les États-Unis même avaient augmenté de 85 000 tonnes à 330 000 tonnes. Même avec une augmentation aussi radicale des exportations vers les États-Unis, le niveau de notre dépendance était passé de 95 p. 100 à 72 p. 100.
Notre industrie s'est fixé un objectif—et nous sommes encore concentrés sur cet objectif—celui de réduire notre dépendance sur les États-Unis à moins de 50 p. 100 d'ici à 2010, en augmentant les exportations vers l'Asie et le Mexique, de 126 000 tonnes, ou 470 millions de dollars en 2002 à 292 000 tonnes, ou 1,1 milliard de dollars en 2010.
Nous pensons que c'est réalisable une fois que nous aurons traversé cette incroyable période de perturbations et de frustration, mais il faudra pour cela que tous les membres de l'équipe—et le gouvernement, les emballeurs et les traiteurs, les producteurs et les associations qui les représentent—que tous travaillent de concert, sur la réglementation, la promotion, en coordonnant leurs ressources pour y parvenir.
Avant, on ne visait que le profit. Maintenant, c'est devenu une question de survie. Alors, vous avez raison.
Á (1100)
Mme Rose-Marie Ur: Je pense que nous ne pouvons survivre qu'en collaborant. Il ne peut y avoir une personne qui fait d'énormes profits pendant que le reste va d'obstacle en obstacle, et que le producteur primaire en tire peu ou pas de revenu.
Vous avez dit quelque chose d'intéressant dans votre présentation, soit que tout devrait s'appuyer sur la science. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Le Japon devrait probablement être de ceux qui comprennent le mieux ce genre de situation, à part la Grande-Bretagne, puisqu'il a, lui-même, vécu une grande crise. Qu'ils soient si exigeants maintenant...
Des scientifiques internationaux ont dit que notre organisme d'inspection est sans égal. Vous avez dit que les États-Unis pourraient se dissimuler derrière le Japon ou d'en prendre prétexte pour détourner l'attention de leur façon d'envisager de fermer la frontière ou de la tenir fermée.
Il me semble que vous avez dit espérer qu'on puisse régler le problème par le biais du Mexique, s'il pouvait permettre les importations du Canada. J'ai vraiment l'impression que ce pourrait être un orteil glissé dans la porte—pas le pied, l'orteil seulement. Pourriez-vous explorer cette solution?
M. Ted Haney: L'accès aux États-Unis ou au Mexique fera deux choses pour nous : un, il ouvrira la porte à d'énormes volumes, près d'un quart de million de tonnes métriques l'année prochaine, justement pour ces coupes qui sont produites en excès de la demande au Canada—les morceaux de cuisse, d'épaule, et une grande partie des produits faits des petits muscles et des issues. C'est donc un débouché qui soulage la pression pour produire à meilleur coût à la base ou à meilleurs coût. Et en permettant aux marchés de s'ouvrir encore aux produits qui sont fabriqués en surplus de ce qui est consommé au Canada, les volumes de traitement de notre industrie pourront vraiment revenir à une situation plus normale.
La deuxième valeur, et vous en avez parlé, c'est que le Mexique constitue un levier économique et encourage les États-Unis à ouvrir leur marché. Si nous pouvons aller aux États-Unis, et en principe d'ici l'année prochaine, tout le reste sera pareil—mais j'espère que ce ne sera pas aussi long—tout le reste étant pareil, nous déplacerions 175 000 tonnes métriques d'exportation de boeuf des États-Unis vers le Mexique. C'est un facteur potentiel de préjudice économique. C'est un incitatif économique potentiel pour les États-Unis à ouvrir leur marché pour normaliser le commerce afin qu'ils ne souffrent pas de la perturbation des habitudes de commerce du Canada. Donc, le Mexique est une part de la solution.
Au Japon, non que je veuille l'excuser, d'aucune façon, et je ne parle pas non plus en son nom—pendant les trois premières semaines et demie de cette crise, alors que le Japon, lentement et sûrement, raffermissait sa position sur le boeuf canadien et déclarait être près d'envisager d'exiger des certificats de pays d'origine des États-Unis, pendant ces trois semaines et demie, le Canada n'a eu aucun rapport avec les organes de réglementation du Japon.
Deux fois pendant cette période, le Japon a demandé à envoyer ses équipes techniques au Canada, et deux fois sa demande a été rejetée. Ce n'est qu'après qu'il est apparu que le Canada et les États-Unis étaient bien partis pour procéder à une ouverture précoce du marché entre les deux pays, sans pour autant qu'il y ait de dialogue, d'information ou d'interaction avec le Japon, ce n'est qu'alors que le Japon a réagi, à cause du manque d'information. Il n'y avait aucune donnée scientifique. Dans ces circonstances, il a dit «Si le Canada et les États-Unis doivent conclure une entente entre eux pour que le boeuf canadien aille aux États-Unis sans distinction, nous devrons nous protéger jusqu'à ce que notre propre équipe scientifique ait examiné la situation». L'équipe est repartie il y a une semaine à peine.
Alors, nous faisons maintenant pression pour qu'une décision soit prise au Japon. Nous comprenons que le ministère de la Santé est loin d'avoir abandonné la partie. Il est flexible lorsqu'il y a dialogue. Avec de l'information, les principes scientifiques peuvent être appliqués. Fort heureusement, après les trois semaines et demie ou quatre semaines, le Canada a entrepris de dialoguer avec le Japon et d'autres.
Á (1105)
Mme Rose-Marie Ur: Je pense que M. Brian Evans était au Japon aussi.
M. Ted Haney: Il est effectivement allé au Japon la semaine dernière, sans l'industrie; il accompagnait l'ACIA, Agriculture Canada et Santé Canada.
Ce n'est qu'hier, hier soir, que l'un des membres a informé l'industrie des résultats préliminaires de cette mission. Maintenant, au moins, nous pouvons commencer d'agir par le biais de l'industrie japonaise et encourager l'ouverture du marché si nous comprenons la nature des obstacles qui subsistent.
Comme je l'ai dit avant, pour ouvrir les marchés, nous pensons que l'interaction politique et technique, et aussi avec l'industrie, tout ensemble, une interaction concertée et simultanée est bien plus efficace que des efforts déployés de part et d'autre. Mais le Japon a durci sa position en l'absence d'information. Sans information, les principes scientifiques ne peuvent être appliqués.
Je les ai applaudis pour avoir immédiatement envoyé un groupe technique au Canada et avoir convenu de rencontrer M. Evans au retour de cette mission technique. Maintenant, le moment est venu de faire pression pour ouvrir les marchés.
Le président: Merci, monsieur Haney et madame Ur.
Nous allons maintenant céder la parole à M. Proctor.
M. Dick Proctor: Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci tous les témoins d'être venus ce matin. J'apprécie que vous ayez répondu à notre appel au pied levé.
J'aimerais revenir à ce que disait M. Haney... Je savais que le Japon avait demandé très tôt de venir au Canada, et que le ministre de l'Agriculture avait répondu qu'on était tout simplement trop occupés avec l'équipe internationale et tout le reste et que c'était impossible. Je n'étais pas au courant de la deuxième requête, et qu'elle avait aussi été rejetée. Pourriez-vous nous dire quand c'est arrivé? Avez-vous des précisions là-dessus?
M. Ted Haney: Selon les renseignements obtenus du Japon, une seconde demande avait été présentée par le ministre Kamei dans les quelques jours qui ont précédé l'arrivée de l'équipe d'inspection internationale. Ç'aurait donc été aux environs du 3, 4 ou 5 juin.
Vous avez raison, les autorités japonaises ont accepté très ouvertement la première demande de ne pas envoyer leur équipe technique parce que nous étions, pendant la première semaine, tout à fait concentrés sur l'enquête. C'était l'une de ces décisions stratégiques dont il avait été convenu, dans les premières semaines, de concentrer les ressources.
Au moment où le ministre Kamei a présenté sa deuxième demande, l'équipe internationale d'examen avait déjà été créée, sans représentant du Japon. Un pays qui a très peu de cas a, du point de vue de la réglementation, réagi exhaustivement, bien au-delà de ce que la science exigerait, et c'est aussi un client important. Donc, le Japon n'était pas représenté dans cette mission. Je pense qu'il en a pris note. De plus, les États-Unis avaient envoyé une équipe de vérification au Canada à ce moment-là, et le Japon l'a su. Je pense que c'est pourquoi il a fini par être aussi frustré.
M. Dick Proctor: Je vous remercie.
Permettez-moi de poser une question à M. Ferraro. Il me semble vous avoir entendu dire que si les détaillants baissaient leurs prix radicalement, cela confirmerait l'impression que le boeuf canadien est insalubre. Je voudrais être sûr de vous avoir bien compris, de vous citer correctement. Si je l'ai fait, pourriez-vous vous expliquer? J'ai un peu de difficulté à comprendre le fondement de votre argument, comme diraient d'autres.
Á (1110)
M. John Ferraro: Il y a deux raisons. Je voudrais en parler un peu plus, pour que nous comprenions bien ce que j'ai dit.
Tout d'abord, je pense que l'intégrité du comptoir à viande et le maintien de la confiance des consommateurs dans l'immédiat étaient très importants pour l'industrie. Nous avions une très grosse industrie, dans une situation très précaire. Ce qui nous préoccupait tous, je pense, du moins dans le secteur de la distribution, c'était la réaction des consommateurs. Si les consommateurs maintenaient leur confiance dans les produits de notre industrie, ce serait un premier pas sur la voie du rétablissement. Je pense que cela a été fait. Alors je veux parler de l'intégrité comme d'un facteur plus important que l'aspect du prix, en soi.
En ce qui concerne l'évolution des prix à partir de ce moment-là, le marché du Canada est très saisonnier. Je le répète, la CBEF a fait un travail extraordinaire en trouvant des marchés de contrepartie de la demande au Canada, et des marchés qui achètent des produits qui ne sont pas nécessairement consommés au Canada.
Lorsqu'est survenu le problème de l'EBS, c'était une période de pointe de la demande de viandes pour le barbecue et des parties moyennes du boeuf. Presque immédiatement, la production a été suspendue, et un canal d'approvisionnement qui, normalement, est exploité au maximum à cette époque-ci s'est soudain retrouvé avec moins de la moitié des commandes la semaine suivante. Le marché américain, qui fournit aussi beaucoup de viande de la partie moyenne au Canada en période de forte demande, approchait lui aussi de sa période de pointe, la fin de semaine de Memorial Day. À court terme, je pense que cela a créé un approvisionnement très limité, a maintenu les prix très fermement au niveau de l'emballage et de la distribution, jusqu'au consommateur des viandes de parties moyennes.
Le reste des produits qui ont perdu de la valeur n'ont pas nécessairement un marché au Canada. L'influence des détaillants, bien entendu, et la capacité d'agir rapidement passent par le processus de la réclame. Je crois vraiment que les détaillants ont fait la réclame de beaucoup de produits au tout début de la crise de l'EBS, à des prix très réduits. Il y a eu des cas de détaillants, dans l'ouest du Canada, qui ont bradé leurs viandes dans les stationnements, à pleins camions, de la viande hachée à faible ou moyenne teneur en gras, qu'ils vendaient à des prix inférieurs au prix de gros d'il y a neuf ou dix semaines; ils vendaient cela directement aux consommateurs, de la remorque de leurs camions.
C'est donc est un exemple de certaines choses qu'ont fait les détaillants. Ce qui est malheureux, c'est qu'il y a encore beaucoup de viandes qui vont dans les congélateurs et les entrepôts, à des prix qu'on ne comprend pas tout à fait, qu'ils soient réels ou non. Ce sont des produits très difficiles à vendre aux consommateurs du Canada quand il n'y a pas nécessairement de marché eux.
Je pense que ce sont là les deux facteurs des prix et de l'intégrité.
M. Dick Proctor: Je suis sûr qu'il ne me reste pas beaucoup de temps.
Monsieur Guillemette, vous avez dit avoir besoin de l'aide du gouvernement. Je pense que beaucoup de gens de l'industrie, en diraient autant. Pouvez-vous donner au comité, ce matin, quelques précisions? Quel genre d'aide peut-on vous donner, et comment peut-elle vous être fournie?
[Français]
M. Pierre Guillemette: Il est difficile à ce moment-ci d'évaluer les pertes encourues. Plusieurs intervenants de l'industrie ne pourront pas survivre à une telle crise s'ils n'ont pas une aide gouvernementale quelconque. Je parle d'une aide financière, cela va de soi.
De quel ordre devrait-elle être et de quelle façon devons-nous déterminer les pertes encourues? Ce serait du cas par cas, j'imagine. Il est difficile pour moi, ce matin, de cibler exactement les façons de faire.
[Traduction]
M. Dick Proctor: Êtes-vous admissible à une part des 460 millions de dollars de ce programme d'aide qui a été annoncé? Est-ce que votre compagnie est admissible à des mesures d'aide prévues dans le cadre de ce programme?
[Français]
M. Pierre Guillemette: À mon avis, ce qu'on a compris de cet article, c'est que cela touchait les producteurs éleveurs, premièrement. On parle de dates, de pertes de production depuis l'événement. Nous faisons partie de cette industrie, non pas comme producteurs mais bien comme transformateurs. Les pertes encourues sont assez faciles à établir parce que la production a été nulle, du moins chez nous. Il n'y a pas eu de production pour le marché canadien parce qu'il n'existe pratiquement plus. Notre clientèle canadienne fait face à l'exportation de ces produits finis. Le même blocus se produit pour notre clientèle canadienne, donc on a vu l'effondrement subit de notre marché suite à ce cas. Il n'y a donc aucune production, ce qui nous cause un préjudice énorme.
Á (1115)
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Guillemette. Merci, monsieur Proctor.
La parole est maintenant à M. Ritz. Vous avez cinq minutes.
M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster): Merci, monsieur le président.
Messieurs, merci beaucoup d'être venus aujourd'hui nous faire vos présentations, qui sont des plus intéressantes.
Il y a beaucoup de spéculations, dans les médias actuellement, selon lesquelles le Canada ne pourra jamais retrouver la vigueur, dans l'industrie bovine, qu'il avait auparavant. J'aimerais que vous nous disiez ce que vous en pensez. Avec tous les facteurs externes dont il a été question, tous ces marchés qui s'effondrent, etc., pourrons-nous jamais nous en remettre? Est-ce réalisable, ou devrons-nous refondre entièrement l'industrie du boeuf, comme certains le soutiennent?
M. Ted Haney: Il y a des économistes qui prévoient qu'une phase d'expansion de l'économie durera indéfiniment, et il y en a qui prévoient qu'une récession va s'éterniser. Il y en a qui, par frustration, par peur et parce qu'ils y perdent eux-mêmes, qui ne peuvent pas pour l'instant voir de lueur à l'horizon. Le pessimisme culmine, ou il est sur le point de culminer. La crise s'aggrave. Elle devient d'ordre personnel. Les coûts humains sont en hausse. Ce n'est pas un contexte qui soit favorable à de froides prévisions sur les perspectives d'avenir de notre industrie.
Nous pensons que nos objectifs pour 2010, d'augmentation des exportations de 470 millions à 1,1 milliard de dollars sont encore intactes. Nous sommes ébahis par l'engagement des consommateurs canadiens à l'égard de notre industrie et de nos produits. Nous avons foi dans l'engagement des consommateurs, dans l'engagement des importateurs, des distributeurs et des utilisateurs du marché au détail, à l'égard de nos produits au Mexique et en Asie. Nous reprendrons la voie de la prospérité lorsque nous aurons accès à ces importants marchés.
Les États-Unis doivent prendre une décision. Ils doivent ouvrir leur marché. Les preuves scientifiques sont là. C'est là que nous parviendrons à la prospérité.
Je pense que le rétablissement de notre industrie n'est pas seulement possible et probable, elle est indispensable. Mais la crise n'est pas encore terminée, ici, chez nous.
Le président: Monsieur Meinema voudrait répondre aussi.
M. Paul Meinema: Je crois que la qualité des produits canadiens et la réputation de notre organisme d'inspection nous sauveront de cette situation. Je pense, surtout, que le facteur de la frontière américaine, à part peut-être certains des problèmes avec le Japon, est un problème d'ordre politique. Je pense qu'il faut composer avec ce problème de façon directe et avec quelque fermeté pour le régler.
Deux de nos plus grandes entreprises d'emballage du pays sont détenues en grande partie par des intérêts américains. Je ne pense pas qu'il soit de leur intérêt que le produit canadien ne trouve pas son chemin vers les États-Unis. Je pense qu'il nous faut travailler fort, tout comme tous les partenaires—le gouvernement, l'industrie et les syndicats—pour rassurer les gens de l'extérieur du Canada que notre processus d'inspection est plus que valable, qu'il est probablement le meilleur du monde, et que la qualité de notre produit et de l'exécution du travail, ici, est sans égal.
M. Gerry Ritz: Mais pour mettre tout en perspective, ce n'était qu'une vache sur 2 700 qui ont été analysées, ce qui a prouvé que notre système est au-dessus de tout reproche.
Je suis d'accord avec votre affirmation, Ted, qu'en ce moment nous sommes à une étape bête. Cela ne fait que sept semaines, et nous commençons à chercher à qui faire des reproches. Nous en sommes arrivés au point où il y a des gens qui essaient de vilipender certains éléments du secteur. Je ne vois pas les choses ainsi. Les emballeurs essaient de rester en vie, tout autant que tout le monde.
Dans ce contexte, pouvez-vous nous expliquer ou nous dire quel pourcentage une carcasse, aux plans du volume et de la valeur, les Canadiens utilisent vraiment? C'est ce que cherchent les emballeurs, dans le fond. Ensuite, ils doivent trouver quelque chose d'autre dans les à-côtés de coupe pour faire que cette carcasse vaille plus de 35 ou 40 cents, maintenant. Pouvez-vous nous donner un peu une explication de ce concept de volume et de valeur?
M. Ted Haney: Le Canada a consommé environ 950 000 tonnes métriques de boeuf en 2002. Là-dessus, environ 300 000 tonnes étaient des produits d'importation, donc environ 650 000 tonnes de boeuf canadien ont été consommées au Canada.
Notre industrie a produit environ 1,3 million de tonnes métriques de boeuf. À peu près 50 p. 100 du boeuf traité au Canada a été consommé au Canada.
En plus de cela, un équivalent additionnel de carcasses a été exporté, sous forme de bétail vivant. La production totale de notre industrie est d'environ 1,6 million de tonnes, dont seulement 650 000 tonnes approximativement a été consommé au Canada. En 2002, près d'un tiers de notre production a été consommée au Canada.
Si nous pouvions exclure 100 p. 100 des exportations—ce qui n'est pas une recommandation, mais faisons tout de même le calcul—s'il n'y avait pas la moindre importation, alors, la consommation de boeuf canadien au Canada pourrait techniquement être augmentée à 950 000 tonnes. Nous aurions encore 700 000 tonnes de surplus de production.
Les marchés de l'exportation du monde entier—nous avons eu environ 2,2 milliards de dollars en exportations, avec 1,1 milliard de dollars d'exportations de bétail vivant, pour un total de 4 milliards de dollars d'exportations en 2002. Pour traduire ceci en termes de valeur, notre industrie a eu des ventes totales d'environ 7,5 milliards de dollars. Donc, 4 milliards de dollars sur 7,5 milliards ont été exportés. Environ 60 p. 100 de la valeur peut être assignée à ce que vaut un animal nourri—on évaluait antérieurement un animal nourri à 1 300 $. On comprend très facilement qu'une part, de l'ordre de 750 $, de chaque animal de 1 300 $ a été exportée sous une forme ou une autre.
Á (1120)
Le président: Monsieur Ritz, votre temps est écoulé.
Je me demande si M. Haney peut étoffer son explication. J'ai fait des calculs rapides. Si je vous comprends bien, environ 300 000 tonnes de viande sont importées au Canada. Si ce chiffre est correct, d'où vient ce contingent tarifaire de 76 000, et où s'insère ce contingent supplémentaire de 65 000? C'est environ deux fois plus que ce qu'il me semble que nous importons actuellement. Pouvez-vous me donner une explication quelconque de ces chiffres?
M. Ted Haney: En 2002, le Canada a importé—plutôt que des chiffres indirects, je peux tout aussi bien vous donner les chiffres réels—environ 100 000 tonnes métriques de boeuf des États-Unis. C'est une obligation de l'ALENA, qui n'est assujettie à aucun contingent tarifaire. En 2002, approximativement un peu plus de 150 000 tonnes additionnelles ont été importées de pays non signataires de l'ALENA, la Nouvelle-Zélande et l'Australie assumant la plus grande partie de ces 153 000 ou 154 000 tonnes.
Nous avons pris un engagement, à l'OMC, pour ouvrir l'accès à environ 76 000 tonnes. Pour plus de cela, il faudrait la délivrance de licences supplémentaires. La moitié de nos importations de pays non signataires de l'ALENA, en 2002, étaient le fruit de licences supplémentaires. Donc, 75 000 sur 251 000 tonnes en 2002—des produits directs du boeuf, non pas des produits équivalents d'importation de bétail vivant, du boeuf tout court—ou environ 8 p. 100 d'exportations de pays non signataires de l'ALENA et environ 5 p. 100 des importations totales étaient en conséquence de licences supplémentaires.
Le président: Merci.
Madame Ur.
Mme Rose-Marie Ur: En fait, c'est une des questions que j'allais poser. Est-ce que les permis supplémentaires créent actuellement de grandes difficultés pour l'industrie? J'ai une demande d'importation qui remonte à la période du 5 au 11 juin—il s'agit de sociétés demandant du boeuf—qui représente plus de 25 millions de livres de boeuf supplémentaires pour le Canada.
Certains de mes électeurs me posent des questions. Combien de boeuf prévoyons-nous importer au Canada au cours de cette crise? Il ne s'est même pas écoulé un mois, seulement 15 jours.
Á (1125)
M. Ted Haney: Notre industrie continue de croire que le Canada doit respecter tous ses engagements commerciaux, tant dans le cadre de l'ALENA que dans celui de l'OMC. L'ALENA garantit un environnement commercial sans tarif et sans quota, qu'il faut maintenir. En 2002, le Canada a affiché un excédent de 3 milliards de dollars par rapport aux États-Unis. Pour les six derniers mois de cette année, nous aimerions un excédent d'1,5 milliard de dollars et un excédent d'au moins 3 milliards de dollars en 2004. Nous ne voulons donc pas perturber longtemps les courants commerciaux à la frontière américaine.
Pour ce qui est des permis supplémentaires, le secteur de l'élevage de bovins et la plupart de l'industrie de transformation du boeuf, même s'il y a divergences d'opinions du côté de l'industrie de transformation... Les producteurs de bovins s'entendent pour dire qu'il faudrait suspendre les permis supplémentaires pendant cette crise jusqu'à ce que les pays fournisseurs de produits en vertu du processus supplémentaire accordent de nouveau l'accès au boeuf canadien.
Si nous sommes tous de bons négociants, si nous nous appuyons tous sur les données scientifiques, à ce moment-là, l'Australie et la Nouvelle-Zélande, en fonction de l'examen scientifique dont les résultats leur ont été présentés, devraient ouvrir leur marché au boeuf canadien, donnant ainsi un élan aux produits canadiens sur tous les autres marchés de la planète. Si ces deux pays ne décident toujours pas d'accorder l'accès à leur marché, pour des considérations commerciales stratégiques, on se demandera de nouveau pourquoi, au cours de cette crise, le Canada devrait continuer de délivrer des permis supplémentaires.
Nous aimerions qu'au cours de la crise, on s'arrange pour répondre à la demande de boeuf au Canada, lorsque c'est possible, par du boeuf canadien.
Mme Rose-Marie Ur: Monsieur Meinema, vous prétendez que Mme Stewart a eu tort de ne pas déroger à la période des deux semaines du programme AE dans le cas de ceux qui ont été déplacés par suite de la crise EBS. Dans le même ordre d'idées, l'union a-t-elle demandé à ses travailleurs de ne pas payer leur cotisation au cours de cette crise?
M. Paul Meinema: Je ne vois pas le rapport entre ces deux questions.
Mme Rose-Marie Ur: Ah bon?
M. Paul Meinema: Les unions qui représentent ces travailleurs paient mes frais ici. Toutefois, la même question pourrait vous être posée : allez-vous déduire l'impôt de leur AE?
Permettez-moi de dire que ces travailleurs ne versent pas de cotisation pendant cette crise. Même si cette mesure est adoptée, cela n'enlève pas au gouvernement fédéral la responsabilité d'examiner de nouveau la situation. Ces travailleurs n'ont pas beaucoup d'options. Comme je l'ai dit plus tôt, il faut beaucoup d'années avant que ces usines de transformation de la viande disposent d'une main-d'oeuvre stable. À High River—c'est une estimation de ma part—compte tenu du roulement de personnel que j'ai pu observer dans cette usine, il a fallu 15 années pour arriver à une stabilité au sein de la main-d'oeuvre.
Mme Rose-Marie Ur: Comment l'expliquez-vous? Je ne comprends pas pourquoi cela prend 15 ans.
M. Paul Meinema: C'est parce qu'il s'agit d'emplois difficiles. L'industrie a révisé les échelles salariales il y a quelques années; elles ne sont plus ce qu'elles étaient et des correctifs sont apportés dans ce domaine.
Mme Rose-Marie Ur: À combien s'élève le salaire?
M. Paul Meinema: À l'usine de transformation du boeuf de High River, le tarif horaire des travailleurs de production débute à 10 $ et peut atteindre les 16 $.
Près de 500 personnes ont été mises à pied. La plupart de ces employés viennent de Calgary, ce qui représente un trajet de 40 minutes en voiture. La collectivité de High River compte près de 10 000 habitants. Sur les 1 800 travailleurs de cette usine...il n'y a pas 1 800 emplois à High River, et si ces gens trouvaient de l'emploi à Calgary, je ne pense pas qu'ils passeraient 40 minutes en voiture pour venir travailler à High River.
Medicine Hat fournit probablement un tiers de la main-d'oeuvre de l'usine IBP à Brooks. C'est la même situation, sauf que Brooks est légèrement différente, car elle ne dispose pas du logement nécessaire pour les travailleurs de cette usine; les gens viennent donc de Medicine Hat, etc. Lorsqu'on arrive au travail partagé et que donc, deux personnes paient autant d'argent pour l'essence pour effectuer ce trajet de 40 minutes, etc., ce n'est plus rentable pour elles de continuer à travailler à cet endroit-là.
La situation est également incertaine à l'usine XL de Moose Jaw. Si les travailleurs savaient que d'ici deux semaines ils retournaient au travail, ils pourraient chercher quelque chose à Moose Jaw pour faire le pont. L'incertitude toutefois, c'est que nous ne savons pas quand ces gens vont retourner au travail.
Ces emplois du poste d'abattage sont très spécialisés. Ces ouvriers ont beaucoup d'expérience pratique de découpage et doivent savoir ce qu'ils font pour offrir un produit de bonne qualité sans se blesser eux-mêmes ou d'autres. Ils ne peuvent toutefois pas attendre éternellement sans savoir quand ils vont pouvoir retourner travailler.
Á (1130)
Le président: Merci, madame Ur.
Monsieur Plamondon.
[Français]
M. Louis Plamondon: Merci, monsieur le président.
Je voudrais revenir à vous, monsieur Guillemette. Si j'ai bien compris, vous avez dit que votre industrie récupère les abats auprès des abattoirs, c'est-à-dire les coeurs, les poumons, les foies des différents animaux, autant ceux du boeuf que ceux du porc et du poulet. Vous donnez une valeur ajoutée à ces produits que vous congelez par la suite et que vous exportez aux États-Unis dans une proportion de 95 p. 100. Vous avez plusieurs clients aux États-Unis.
Est-ce que vous pouvez nous en nommer trois ou quatre, pour nous donner une idée du genre de clients que vous avez aux États-Unis?
M. Pierre Guillemette: Je vais demander à André de répondre à cette question parce que c'est lui qui s'occupe de la commercialisation.
M. André Toutant (directeur général, Maurice Guillemette Inc.): Actuellement, aux États-Unis, nous faisons des affaires avec des clients majeurs comme Nestlé, Del Monte et Mars. Ils ont tous des divisions manufacturières de nourriture pour chiens et chats. Alors, c'est avec eux que nous faisons la commercialisation et la vente de nos produits directement.
M. Louis Plamondon: Ce que vous produisez, c'est exclusivement pour la nourriture animale, n'est-ce pas?
M. André Toutant: Exclusivement.
M. Louis Plamondon: C'est une usine qui existe depuis plusieurs années. Vous avez une quarantaine d'employés dont une vingtaine ont déjà été congédiés, compte tenu du fait que vous ne pouvez pas produire du tout depuis les événements de la vache folle parce que, justement, tout est barré.
M. André Toutant: Oui.
M. Louis Plamondon: Vous disiez que cela occasionnait un stockage de près d'un million de kilogrammes de nourriture et que le coût de l'électricité était de 25 000 $ par mois pour maintenir ce stockage congelé. Donc, nécessairement, vous ne pourrez pas durer longtemps si vous devez débourser cette somme à tous les mois sans qu'il y ait de production. Présentement, aucune production ne va aux États-Unis.
M. André Toutant: Nous faisions la collection des produits des abattoirs et nous avons cessé toute collection de produits. Nous avons cessé nos opérations complètement parce que nous exportions 95 p. 100 de notre volume. Alors, nous ne pouvons pas continuer à recueillir des produits pour les stocker sans savoir si on pourra les exporter par la suite.
M. Louis Plamondon: Donc, le fait que vous ayez arrêté vos opérations affecte aussi les abattoirs et l'industrie du camionnage qui transporte ces produits, ainsi que vos propres employés et vos cadres.
Maintenant, je voudrais parler de ce que vous espérez obtenir en déposant votre rapport aujourd'hui. Mon confrère Dick en a parlé tout à l'heure en termes de chiffres, mais moi, je voudrais en parler en termes de forme.
Est-ce que vous vous attendez à une subvention? L'idéal, c'est toujours une subvention, mais est-ce qu'une espèce de pont de financement, ce qu'on appelle en anglais un bridge financing, pourrait vous permettre d'éviter la fermeture? Si vous obteniez de la part du gouvernement une aide financière, un prêt temporaire sans intérêt ou à un taux d'intérêt très bas, sans remise de capital ou d'intérêt pour la durée de la crise, cela serait-il suffisant, ou si vous avez besoin d'un peu plus pour éviter la fermeture?
M. André Toutant: Je crois que toute aide est toujours la bienvenue, mais les critères à établir pour savoir si ça devrait être une subvention, une aide directe ou un prêt restent à déterminer. Il faut évaluer la situation exacte avec les autres.
M. Louis Plamondon: Au cas par cas.
M. André Toutant: Oui, exactement.
M. Louis Plamondon: Merci.
Ça va, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: D'accord; nous passons à M. Proctor.
M. Dick Proctor: Merci de nouveau, monsieur le président.
Monsieur Haney, je reviens à vous. J'ai aussi lu cet article à propos de l'incinération de bovins ou de produits de boeuf canadien au Japon dans le journal de ce matin, avec le même chagrin et la même horreur que vous; la question qui se pose à moi est la suivante : pourquoi n'a-t-on pas réglé ce problème avant aujourd'hui? Pourquoi le gouvernement, l'industrie, ou qui que ce soit d'autre, n'ont-ils pas pris des mesures pour éviter pareille situation?
Á (1135)
M. Ted Haney: Je ne peux parler au nom du gouvernement du Canada. Les priorités sont nombreuses et l'accent a été mis sur le programme de secours en cas de catastrophe, pour les parcs d'engraissement essentiellement. Ces deux ou trois dernières semaines, il me semble que le gouvernement se rend compte qu'il faut régler cette question. Malheureusement, le problème est apparu un peu plus rapidement que la solution.
D'après l'un des membres de la délégation au Japon, il semble que l'on tienne absolument à ce que les produits détenus dans les dépôts de conteneurs et les entrepôts de douanes puissent au moins y rester ou être acceptés dans le pays. C'était la semaine dernière. Il semble toutefois que le gouvernement du Japon ait demandé que ces produits soient renvoyés ou détruits.
Deux catégories de produits doivent être détruits ou renvoyés; il s'agit du boeuf réfrigéré qui se trouve dans les dépôts de conteneurs et qui ne doit pas être congelé—il y a maintenant dépassement du délai prévu—et également des produits qui peuvent contenir des matériaux à risque spécifié.
La deuxième catégorie est plus préoccupante. Dans le cas de la première, nous savions qu'il s'agissait d'un bien amortissable assorti d'une durée limite de conservation, surtout lorsque ce produit se trouve dans des conteneurs et des dépôts de conteneurs. Les conteneurs sont parfaits, mais ne sont pas dotés d'un régulateur de température contrairement aux grands entrepôts frigorifiques. C'est le maillon faible de notre chaîne du froid. Ce produit va s'abîmer. Par contre, les produits qui peuvent contenir des matériaux à risque spécifié posent davantage de problème, car il s'agit d'une mesure prise avant clarification de la politique et avant que le Canada lui-même n'ait pu prendre position au sujet de ce que sont les matériaux à risque spécifié dans les aliments. Il y a donc actuellement pas mal de confusion à cet égard.
M. Dick Proctor: Juste une question rapide. Quel pourcentage de bovins sur pied par rapport aux produits de boeuf exportons-nous habituellement, exclusion faite de cette crise, dans une année donnée? Le savez-vous?
M. Ted Haney: Eh bien, en 2002—qui n'était pas une année tout à fait normale, car la sécheresse a causé un vaste mouvement d'animaux d'un an et de veaux vers le sud—nous avons transformé près de 3,5 millions d'animaux au Canada et exporté près de 1,6 million d'animaux. Au cours d'une année normale, nous transformons près de 3,5 millions de bovins et nous en exportons près d'un million. Par conséquent, le rapport entre transformation et exportation est actuellement de 3,5 à 1. L'année dernière n'a pas été normale étant donné que la sécheresse a entraîné le déplacement de toute la production de veaux de l'année vers le sud.
M. Dick Proctor: Dans votre exposé liminaire, vous dites que nous en sommes aux premières étapes de la crise. La question que j'aimerais poser est la suivante : pensiez-vous le 20 mai dernier que vous alliez toujours dire, le 10 juillet, qu'il s'agissait des débuts de cette crise ou pensiez-vous, comme beaucoup d'entre nous, qu'elle aurait déjà pris fin?
M. Ted Haney: Je suis par nature optimiste et cet aspect de ma personnalité m'a poussé à croire que l'on trouverait une solution rapide au problème. Ceci étant dit, j'ai malheureusement cru que le processus allait s'enliser à un point critique que je ne soupçonnais pas à ce moment-là. Nous ne savions pas quels remous nous allions connaître, mais j'étais sûr que des difficultés allaient surgir. Au départ, nous espérions vraiment qu'il y aurait une ouverture en l'espace de deux semaines. C'était un peu trop optimiste, même de mon point de vue.
J'espérais qu'avant aujourd'hui, on aurait vu un certain mouvement, surtout aux États-Unis. Alors qu'un marché d'exportation, le Japon, permettait aux États-Unis de justifier un tel retard, un autre marché d'exportation, le Mexique, va probablement justifier l'ouverture des États-Unis. Par conséquent, un marché servait d'excuse au retard, tandis qu'un autre va inciter à l'ouverture. Il est curieux de voir la façon dont tout cela fonctionne.
Á (1140)
Le président: Une question rapide?
M. Dick Proctor: Oui, pour M. Meinema.
Le gouvernement a refusé de déroger à la période d'attente de deux semaines. Nous pensions, tout comme vous, qu'il aurait dû le faire, mais il ne l'a pas fait. Y avait-il d'autres mesures, toutefois, que le gouvernement aurait pu prendre pour se montrer plus proactif face à cette situation?
Je comprends parfaitement ce que vous dites lorsque vous parlez du temps qu'il faut pour avoir une main-d'oeuvre formée et hautement spécialisée dans une usine à Moose Jaw, High River ou Brooks, en Alberta, où il n'y a pas beaucoup d'autres possibilités d'emploi. Je sais que cela s'applique d'autant plus aux usines de l'Alberta du fait que beaucoup de gens qui y travaillent ne possèdent pas les compétences linguistiques voulues dans l'une ou l'autre des deux langues officielles du Canada; il avait été question de la nécessité d'offrir un programme d'anglais comme langue seconde.
Le gouvernement aurait-il pu être plus proactif et essayer de maintenir ces ouvriers en poste? Au-delà du travail partagé et d'autres éléments qu'il a pu envisager, aurait-il pu en faire plus?
M. Paul Meinema: Oui, je le pense et il aurait probablement fallu considérer la main-d'oeuvre, les travailleurs de ces usines, comme partenaires dans cette situation. À cet égard, effectivement, dans le cas des deux usines, notamment les deux plus grandes, IBP Lakeside et celle de High River, tout genre de programme d'emploi dans le domaine éducatif, essentiellement l'anglais comme langue seconde, aurait été à l'avantage de ces gens, qui auraient continuer à recevoir un salaire et qui en auraient profité à leur retour sur le lieu de travail; dans le pire des cas, un tel programme leur aurait permis de trouver un emploi ailleurs.
Je pense avoir dit dans ma déclaration que les travailleurs formaient un groupe de gens qui sont tombés entre les mailles du filet. On ne les a pas considérés comme une priorité ni non plus comme des intervenants dans cette industrie et ils sont simplement tombés entre les mailles du filet.
Le président: Merci, monsieur Meinema, monsieur Proctor.
Nous passons à Mme Ur.
Mme Rose-Marie Ur: Une question rapide. Le ministre a initialement présenté le programme de prêt sans intérêt pour le producteur primaire et ensuite, le programme d'indemnisation. D'après mes électeurs, dans le sud-ouest de l'Ontario, il y a trois ou quatre semaines, c'est-à-dire au milieu de la crise, le programme de prêt sans intérêt était ce qu'il fallait pour les agriculteurs connaissant des difficultés—cela permettait de les aider pour le coût des intrants—par contre, le programme d'indemnisation, avant l'ouverture des frontières, n'était pas la chose à faire. La situation s'est renversée, puisque les marchés ont fait chuter les prix et selon eux, c'est parce que le programme d'indemnisation a été offert avant l'ouverture des frontières. J'aimerais simplement faire connaître votre point de vue à ce sujet.
M. Ted Haney: Je devrais commencer par dire que la Canadian Cattlemen's Association a fait la promotion de l'indemnisation nationale dès le premier jour et va continuer à le faire.
Ceci étant dit, l'industrie considère que le fait d'endetter encore davantage les opérations en situation de perte ne fait pas partie de la solution, surtout pour les parcs d'engraissement, c'est-à-dire là où s'est produit la première crise. La crise ne fait que commencer à se propager dans le cas de ceux qui ont des animaux d'un an au pâturage et elle ne fait que survenir chez les producteurs vache-veau qui aujourd'hui ont des veaux au pis, mais qui envisagent le sevrage et qui savent bien que la crise va les frapper de plein fouet, à moins que la situation du marché ne change. Par conséquent, dans le cas des parcs d'engraissement, l'industrie est convaincue d'après son analyse que ce premier programme ne répondait pas aux besoins.
Je crois que l'industrie avait demandé un programme plus agressif de secours ou d'indemnisation en cas de catastrophe, sans la diminution du soutien au fur et à mesure de l'abaissement des prix. Si le gouvernement a choisi cette option, c'est pour inciter une augmentation des prix. Même si cet incitatif faisait partie de la structure du programme de secours en cas de catastrophe, l'offre de bovins et de produits de boeuf dérivés a simplement dépassé la demande au Canada, entraînant l'effondrement des prix des bovins sur pied et des produits qui ne se vendent pas facilement au Canada. Par conséquent, même avec un tel incitatif intégré au programme, l'offre a simplement submergé la demande, entraînant l'effondrement des prix.
Je ne connais pas vraiment la situation particulière des producteurs de régions données; il faudrait que je m'en rapporte à la Canadian Cattlemen's Association pour discuter de la dynamique et de la recherche.
Á (1145)
Mme Rose-Marie Ur: Ses représentants ont comparu assez souvent et ont fait d'excellents exposés.
Il est intéressant de voir que vous dites que l'offre de boeuf est extraordinaire. Je suis allée magasiner la semaine dernière dans ma circonscription, et les prix du boeuf n'ont certainement pas baissé. Pourtant, les détaillants ont de la difficulté à localiser des sources d'approvisionnement. D'après un article de Global lundi dernier, les détaillants ont de la difficulté à obtenir suffisamment de produits. Cela me paraît tout à fait intéressant, compte tenu de votre déclaration.
M. Ted Haney: Le Canada procède à la transformation de 3,5 millions de bovins par an en moyenne. Soixante pour cent de cette production est exportée. Ainsi, 40 p. 100 du boeuf provenant des abattoirs nationaux, soit les bovins transformés, sont exportés.
En plus, tous les produits de boeuf provenant des bovins qui sont exportés pour l'abattage sont bien sûr automatiquement destinés à l'exportation. Par conséquent, en 2002, nous avons exporté 70 p. 00 de la production totale. Cette offre existe toujours au Canada, cette capacité existe toujours. La poussée de l'offre vise les usines de transformation. Même si ces usines canadiennes fonctionnaient à plein régime, c'est-à-dire transformaient de 65 000 à 70 000 bovins par semaine, cette capacité ne serait pas égale à l'offre de bovins prêts à être expédiés pour transformation, car notre offre est supérieure, puisque nous exportons des bovins.
C'est un exemple type de l'offre qui dépasse la demande, voire même la capacité, dans ce cas particulier. C'est donc au point de transformation que la baisse du prix de production primaire s'est produite.
Deuxièmement, dans les magasins canadiens, les faux-filets, les New Yorks, les entrecôtes, les aloyaux et même les contre-filets représentent ensemble seulement 20 p. 100 du poids de la carcasse, mais après suppression des parures et de tout le reste, seulement 15 p. 100 environ des produits de viande vendus proviennent de ces morceaux. Nous n'avons pas encore répondu entièrement à la demande canadienne pour ces produits aux niveaux de la transformation, puisque de 30 000 à 40 000 animaux par semaine sont transformés. Cela représente 15 p. 100 de la viande produite à partir de la carcasse qui est essentiellement utilisée sur les barbecues.
Les 85 p. 100 restants de la carcasse, soit les coupes provenant de la hanche, du bloc d'épaule, toutes les viandes fines—poitrine, flanc, jarret, en plus de toutes les parures qui proviennent du faux-filet et de la longe—sont en excédent, à l'heure actuelle. J'ai moi-même vu dans les magasins de détail du filet—ce qui est curieux, car en fait nous sommes en position d'excédent—dont le prix a baissé... j'ai fait quelques courses moi-même—ce qui est une exception—et je me suis aperçu que le filet était à moitié prix... toujours cher, mais à moitié prix. J'ai pu acheter des extérieurs de ronde, deux, complets, au prix de 2,50 $ la livre. Ce n'est vraiment pas cher. Par conséquent, le prix de ces coupes a baissé.
Nous avons un merveilleux été et une formidable saison barbecue, mais le Canada ne peut malheureusement pas équilibrer la production. Pour chaque animal, seulement 150 livres sur 1 000 peuvent être utilisées pour le barbecue. Nous n'avons toujours pas répondu à la demande, mais nous somme en excédent pour ce qui est des autres coupes. C'est l'offre excédentaire dont nous parlons.
Ce sont les 80 à 85 p. 100 de la carcasse, en excédent sur le marché canadien, qui causent de grandes difficultés financières. C'est la principale raison pour laquelle les prix du bovin ont chuté ici, sans compter le fait que l'on a beaucoup plus de bovins à vendre qu'on ne peut en fait en transformer.
Les gens ne vendent pas leurs bovins en ce moment, mais font la queue aux usines de transformation. Le prix est pratiquement secondaire, l'offre de bovin étant tellement supérieure à la capacité de transformation en ce moment. Toutes les définitions du marché sont perturbées par les distorsions vu que nous n'avons pas accès au marché d'exportation; cela n'a aucun sens. Le marché est considérablement perturbé.
Le président: Merci, monsieur Haney, monsieur Ritz.
Monsieur Hilstrom, s'il vous plaît.
M. Howard Hilstrom: Merci, monsieur le président.
Eh bien, cela nous amène au coeur du problème. Le premier communiqué du ministre Vanclief, je le répète, visait à remettre le marché sur pied. C'est la raison pour laquelle 460 millions de dollars ont été injectés. S'agissait-il d'un programme raisonnable? Avait-il une chance de succès le premier jour, le jour où il a été décidé, monsieur Haney?
Á (1150)
M. Ted Haney: Oui, en supposant que les marchés allaient ouvrir sans tarder, et je crois que le ministre Vanclief n'a rien caché à propos de ses entretiens avec la secrétaire Veneman à ce moment-là; il a annoncé que la probabilité d'une ouverture rapide du marché était très élevée, compte tenu des résultats scientifiques, une fois la première enquête terminée. Tout cela est maintenant du passé.
L'industrie canadienne a recommandé de faire des mises au point dans le cas de cette première phase d'indemnisation, de modifier les grilles et les pourcentages, et elle a proposé que l'on passe rapidement à la phase 2, visant les animaux d'un an qui doivent quitter le pâturage. Nous n'en avons pas beaucoup parlé, mais les exploitations de production d'animaux d'un an doivent se débarrasser de ces bovins entre la mi-juillet et le 1er août.
À la phase 3, lorsque le veau commence le sevrage et qu'il est mis sur le marché, si nous n'y avons pas accès, le coût économique pour notre industrie dépasse de loin l'appui disponible actuellement, et y est beaucoup de fois supérieur. Il faut se pencher sur la question maintenant, au cas où nous n'aurions pas cet accès.
M. Howard Hilstrom: C'est tout à fait vrai.
J'ai ici un rapport d'un producteur de Moosehorn, au Manitoba. Savez-vous ce qu'il fait? Nous avons connu un peu de sécheresse à cet endroit-là, sans compter qu'il a trop de bovins, car il ne peut pas les commercialiser. À l'aide d'un gros tracteur, il abat les peupliers; les vaches en mangent les feuilles, en plus de tout ce qu'elles peuvent trouver dans les marécages. C'est la situation que l'on retrouve là-bas.
L'objectif de ce programme est d'abattre 900 000 têtes. Combien de bovins ont été abattus jusqu'à présent, selon vos dernières informations?
Si quiconque a une réponse à cette question, faites signe au président, mais M. Haney est le plus visé, apparemment.
Combien ont été abattus jusqu'à présent?
M. Ted Haney: L'information dont je dispose provient de CanFax, division de la Canadian Cattlemen's Association. Il y est indiqué que la semaine dernière, 47 000 têtes au total ont été transformées, et la moyenne, pour les six semaines précédentes, se situe entre 30 000 et 35 000 animaux.
Par conséquent, il y a augmentation du nombre de bovins transformés, mais nous en sommes toujours à 225 000 bovins sur sept semaines, ce qui est un nombre approximatif. Il pourrait s'agir de 250 000 têtes. Je n'ai pas tous les détails, mais 47 000 animaux ont été transformés la semaine dernière, ce qui dénote une première augmentation du nombre de transformations.
M. Howard Hilstrom: Dispose-t-on de suffisamment de capacité d'entreposage pour la viande qui ne peut être vendue, pour entreposer ces 900 000 têtes qui ne sont pas consommées au Canada?
M. Ted Haney: La capacité d'entreposage est un vrai problème et la suspension temporaire des permis d'importation supplémentaires vise en partie à le régler, à faire en sorte que la capacité d'entreposage disponible pour produits congelés soit réservée pour l'excédent de production.
M. Howard Hilstrom: Prenez garde de ne pas sacrifier à la position du gouvernement à cet égard, Ted, et je vais vous dire pourquoi. Les permis supplémentaires sont délivrés deux mois à l'avance. Le boeuf en question va donc venir de Nouvelle-Zélande et d'Australie, car sa livraison prévue doit se faire dans deux mois. Par conséquent, même si on suspendait tous les permis supplémentaires aujourd'hui, il faut savoir que ce boeuf qui est visé par de tels permis va arriver au Canada. N'est-ce pas le cas, ou peut-on demander à l'Australie et à la Nouvelle-Zélande de ne pas nous envoyer de boeuf visé par les permis supplémentaires?
M. Ted Haney: À mon avis, l'annulation des permis supplémentaires déjà délivrés relèverait de l'héroïsme et ne cadrerait pas avec nos engagements juridiques au sein de l'OMC; je ne suis même pas sûr que ce soit recommandé par l'industrie. Toutefois, il se pourrait bien ...
M. Howard Hilstrom: Non, il ne faut absolument pas procéder de la sorte et on ferait fausse route, mais je veux souligner que ce programme ne marche pas et ne marchera pas. Comme je l'ai dit, même la consommation et la capacité d'entreposage dans notre pays ne suffisent pas pour permettre à ce programme d'écouler 900 000 têtes de bovins. Pourquoi donc l'industrie et le gouvernement persistent-ils à dire que ce problème va être réglé grâce à ce programme de 460 millions de dollars? Il ne va certainement pas l'être.
J'imagine que nous pouvons passer à autre chose.
Á (1155)
M. Ted Haney: Monsieur le président, je crois que la seule véritable solution, c'est en fait la reprise du commerce. Tout le reste atténue la crise jusqu'à un certain point, un peu moins ou un peu plus, mais la seule façon de venir à bout de cette crise, c'est la reprise du commerce. C'est ce qui a été répété à toutes les réunions auxquelles j'ai participé, par toutes les associations qui ont fait un exposé devant un ministère fédéral ou provincial.
M. Howard Hilstrom: Exactement et c'est la deuxième partie du problème auquel est confrontée cette industrie et dont vous avez parlé un peu plus tôt, Ted. C'est l'ouverture partielle des frontières pour les viandes musculaires et ce genre de chose. Est-ce que notre industrie de transformation et toute notre industrie du boeuf—je ne parle pas du détail, mais de l'industrie de transformation et des producteurs primaires—pourraient être concurrentielles sur les marchés internationaux si nous ne pouvons qu'exporter des coupes musculaires et d'autres coupes particulières? Serons-nous suffisamment concurrentiels et en mesure de maintenir notre industrie à son niveau?
M. Ted Haney: Notre industrie réalise près de 160 $ par animal grâce à la vente d'abats rouges—les abats comestibles, tripes, intestins, ainsi que certaines coupes musculaires qui ne sont pas habituellement consommées au Canada. Ce sont d'uniques valeurs en échange. Si nous avons une ouverture restreinte, je crois que près de la moitié de cette somme ne pourra être récupérée, soit 80 $ l'animal. Par conséquent, oui, nous devons être en mesure de vendre les abats rouges et également les produits d'équarrissage. Pour que les produits d'équarrissage puissent servir dans les aliments, légalement et pour les marchés d'exportation, il faudra peut-être prendre certaines mesures, comme l'indique le rapport international, s'efforcer de ne pas aller trop loin et de ne pas introduire de nouveaux coûts. Nous devons toutefois pouvoir obtenir une valeur en échange des produits d'équarrissage, du suif. Nous devons pouvoir produire des produits des abats comestibles et des abats rouges afin d'être véritablement concurrentiels à long terme. Par conséquent, une ouverture plus complète s'impose.
Les produits des animaux plus vieux, qu'il s'agisse des parures et des produits à valeur ajoutée, même s'ils représentent un pourcentage relativement faible de nos exportations, en sont un important élément et répondent aux besoins particuliers des marchés internationaux. Cette source de revenu s'impose pour que l'on reste véritablement concurrentiel sur les marchés internationaux. Tout cela rajoute de la valeur à l'animal.
Le président: Merci, monsieur Hilstrom.
Monsieur Plamondon.
[Français]
M. Louis Plamondon: Ça va.
[Traduction]
Le président: Pas de questions?
Une question rapide, monsieur Ritz.
M. Gerry Ritz: Merci, monsieur le président.
Messieurs, les exportateurs du boeuf ont beaucoup parlé aujourd'hui des mesures diplomatiques...vous allez envoyer des représentants de l'industrie, du gouvernement, en plus de diplomates, etc. J'imagine que c'est probablement la chose à faire. Ted, je sais que vous partez directement pour le Mexique. Avez-vous un plan à long terme, même au cours de la semaine prochaine—si on peut appeler cela le long terme—qui vous permettrait d'aller au Japon et en Corée, ainsi que chez nos autres partenaires commerciaux avec ce même groupe de représentants? Cela va-t-il se produire? Un petit groupe est allé au Japon, mais il n'était pas aussi complet que celui que vous envoyez. Je conviens que c'est la chose à faire. Est-il prévu que vous alliez dans d'autres pays en plus du Mexique?
M. Ted Haney: Pour la première fois, le gouvernement du Canada s'est engagé à fournir des mises à jour quotidiennes de toutes les activités prévues en matière d'ouverture de marché—activités planifiées par le gouvernement—qu'elles prévoient ou non la participation de l'industrie au départ, afin que nous puissions participer aux discussions et disposer de délais suffisants pour nous préparer.
Si nous allons au Mexique, c'est en partie parce que nous n'avons pas pu nous rendre au Japon et en Corée, vu que nous n'avions pas pu assurer la coordination voulue avec l'industrie de manière à transmettre l'information nécessaire à nos organes de réglementation; nous n'avions pas pu non plus participer à la conception d'un sondage de l'industrie pour notre produit et encourager les organes de réglementation du marché hôte à créer un environnement plus ouvert aux négociations véritablement techniques. Je crois que c'est ce qui a été souligné après le départ de cette mission sans l'industrie et je pense que cela a été compris, si bien que notre participation à la mission au Mexique a été en fait approuvée. J'espère participer aux futures missions à destination de Taïwan, de Hong Kong et de la Chine, ainsi qu'à la deuxième visite prévue au Japon et en Corée.
 (1200)
M. Gerry Ritz: Aucune date n'est prévue pour ces autres missions?
M. Ted Haney: Pas pour l'instant.
M. Gerry Ritz: Je me demande pourquoi. Nous sommes en pleine crise et il faudrait nous y rendre le plus tôt possible.
M. Ted Haney: Selon nous, le mode multitâche n'est pas une mauvaise chose pour l'instant. Des activités séquentielles—terminer une tâche avant de passer à la suivante—permettent d'affecter toutes les ressources disponibles à la tâche du jour. Je crois toutefois que le mode multitâche ou multiprogramme où tout se fait simultanément est important et c'est ce qui est également prévu pour le Mexique. Alors que M. Evans et le reste de la mission se trouvaient au Japon, le travail préliminaire pour le voyage au Mexique a été fait, mais c'est une politique précise en termes de processus qui a été mise au point au moment du départ. Nous sommes maintenant en mesure de nous rendre vers le marché suivant d'ici une semaine. Nous devons absolument nous rendre à Taïwan, à Hong Kong et en Chine ainsi que bientôt, dans d'autres pays.
Le président: Monsieur Hilstrom, une question rapide.
M. Howard Hilstrom: J'ai posé la question des ressources à l'ACIA au cours de notre première téléconférence et on m'a répondu: «Oh, oui, nous avons plein de ressources, nous nous occupons de tout». De toute évidence, vu la question du Japon et cette demande de participation, les ressources n'étaient pas suffisantes.
Monsieur Ferraro, les usines de transformation de la viande ont acheté hier aux propriétaires de parcs d'engraissement des animaux sur pied au coût de 35 cents la livre. Elles ont donc fait ces achats et ont procédé à l'abattage. Combien ont payé Loblaws ou une autre société—que vous représentez et dont vous voulez donner l'exemple aujourd'hui—pour la carcasse de meilleure qualité de l'usine de transformation? Combien leur a coûté la livre?
M. John Ferraro: Je ne suis pas au courant des taux du marché aujourd'hui. Le marché a baissé assez...
M. Howard Hilstrom: Vous pouvez demander à d'autres représentants de prendre le micro.
Le président: Ils vont être à la table au cours de la prochaine ronde de questions.
M. Howard Hilstrom: D'accord, vous en avez d'autres qui attendent?
Eh bien, si vous ne pouvez répondre à cette question, pas de problème. Merci.
M. John Ferraro: Disons simplement que les marchés peuvent baisser rapidement.
Le président: Avant de passer aux dernières questions, j'aimerais moi-même en poser deux.
Monsieur Ferraro, à propos du manque d'accès à certains types de boeuf, particulièrement le boeuf haché, la viande à hamburger, un de mes électeurs qui fait régulièrement affaire avec votre société—et qui ne tarit pas d'éloges à l'égard de votre société, soit dit en passant—n'a pas pu la semaine dernière acheter de la viande en boîte pour en faire du hamburger. Il me paraît assez bizarre que l'on ne puisse pas avoir accès à suffisamment de viande à hamburger en ce moment, alors qu'en fait on vient juste de nous dire que c'est ce qui représente le plus gros excédent actuellement.
Pouvez-vous expliquer à ce groupe ainsi qu'à tous ceux qui se trouvent dans nos circonscriptions ce qui se passe? Pourquoi ne peut-on avoir accès à la viande à hamburger en ce moment?
M. John Ferraro: Permettez-moi juste de vous dire qu'en ce qui concerne les matières premières, nous entreposons du boeuf frais périssable à Mississauga. Nous desservons près de 500 clients indépendants en Ontario, et fournir le produit chaque semaine à tous nos clients est notre grande priorité.
En temps normal, dans notre industrie, vous avez malheureusement trop ou pas assez de produits disponibles. Nous ne vivons pas une situation normale. Il a été très difficile de prévoir les commandes et les besoins de nos clients à l'avance et aussi de prévoir la disponibilité de nos fournisseurs. Parmi les produits les plus difficiles à trouver, citons le boeuf haché maigre à 90 p. 100, ou la matière première pour le boeuf haché. Les parures de gras sont toujours disponibles. Je crois donc que cela peut en partie expliquer la différence.
Le président: Vous conviendrez toutefois que les arguments présentés et les déclarations faites ce matin nous porteraient à croire qu'il y a suffisamment de boeuf haché dans notre pays pour permettre à M. Ferraro et à son entreprise de répondre à la demande de ce produit de la part des clients?
M. John Ferraro: Je dois convenir que la demande du consommateur et du client en ce qui concerne les produits du boeuf au Canada est aussi bonne que jamais et j'imagine qu'elle va augmenter au cours des mois de l'été, comme cela se produit dans une année typique.
Le président: Eh bien, je vais vous laisser travailler sur l'accès, car je suis sûr que les Canadiens sauront maintenant, d'après ce que nous avons entendu ce matin, que l'on doit disposer de suffisamment de produit dans notre pays.
J'aimerais maintenant poser une question qui, je le sais, est très délicate : Pourquoi, d'après l'un de vous, nous avons eu tort de ne pas inviter les Japonais à faire partie du groupe international? Pourquoi n'avons-nous pas tenu compte du Japon, connaissant bien la sensibilité de ce pays ainsi que son attitude face à l'EBS? Lorsqu'ils ont indiqué qu'ils souhaitaient participer, pourquoi ne les avons-nous pas invités? Comment interprétez-vous cette situation? Si je vous pose la question, c'est parce que nous n'avons pas ici de représentants de l'ACIA ni du ministère.
 (1205)
M. Ted Haney: L'industrie ainsi que le pays ont acquis de la maturité, je pense, au cours du dernier mois. On fonctionnait, me semble-t-il, en supposant que le Canada pouvait s'appuyer sur son expérience des États-Unis depuis une vingtaine d'années : il suffisait d'obtenir toute l'information et l'interaction là-bas, de travailler étroitement avec nos amis, de trouver la solution, d'arriver à ouvrir le marché, pour que tout se mette en place. Pareilles suppositions auraient peut-être été bonnes il y a 10 ou 15 ans, mais ce n'est plus le cas aujourd'hui. Par conséquent, je crois que nous avons gagné en maturité.
L'industrie a demandé au gouvernement—ce qui était opportun—de donner la priorité à la participation avec les États-Unis, mais priorité et participation exclusive ne sont pas la même chose et c'est là que nous avons fait erreur.
Je dois également reconnaître que lorsque les résultats de l'isolement du Japon ont été connus, le ministre Vanclief a appelé de nouveau le ministre Komai et, se rendant compte que la participation avait été indûment retardée, a rapidement invité l'équipe technique au Japon. Nous sommes retournés avec les experts techniques—oui, sans l'industrie, mais nous y sommes retournés. Une telle attitude est par nature positive.
Le ministre Komai est censé rendre visite au ministre Vanclief samedi. Ce niveau de participation, je le sais, va permettre d'éliminer les difficultés auxquelles nous sommes confrontés au Japon. Le problème se posait à cause d'une différence entre la priorité et l'exclusivité quant à l'ouverture du marché aux États-Unis. Le Japon, la Corée et le Mexique sont devenus des forces dont il faut tenir compte à part des États-Unis, dans la dynamique des marchés d'importation, des marchés d'exportation et de l'interdépendance du commerce mondial du boeuf. Non seulement les prix en découlent-ils, mais il faut également penser aux liens réciproques du pouvoir politique, et chacun de ces pays souverains mérite l'attention et le respect dès le début de n'importe quelle crise ou à l'amorce de n'importe quelle opportunité.
Je crois que c'est ce qui s'est produit. Il s'agissait de suppositions qui passaient pour des vérités indéniables depuis des décennies et qui en fait ont maintenant changé. En raison de cette crise, nous allons toujours considérer nos marchés internationaux plus précieux et en même temps plus précaires que nous ne le supposions dans le passé. Ils ont été sources de rentabilité et de prospérité, et vont continuer de l'être, mais nous n'allons plus jamais les prendre pour acquis.
Le président: Merci beaucoup.
Nous aimerions conclure cette partie de notre étude ce matin. J'aimerais vous remercier, monsieur Haney, d'être intervenu ce matin; monsieur Meinema, de nous avoir fait part de la perspective syndicale, celle des employés; monsieur Ferraro, de nous donner votre point de vue sur le hamburger. Merci beaucoup d'avoir comparu.
Nous comprenons le dilemne de nos amis du Québec. Vous avez apporté une nouvelle dimension à laquelle nous n'avions pas pensé, et nous sommes heureux que vous ayez pu venir. Monsieur Guillemette et monsieur Toutant, merci beaucoup.
Merci à vous tous d'avoir pris le temps, malgré vos nombreuses occupations, de venir à si court préavis. Nous vous en sommes très reconnaissants. Ce que vous nous avez dit ce matin est très encourageant, puisque nous recherchons de l'information. Merci beaucoup.
La séance est levée pour quelques instants afin de permettre aux nouveaux témoins de prendre place—il s'agit d'une courte pause et nous allons reprendre la séance d'ici 10 minutes environ.
 (1209)
 (1218)
Le président: Nous reprenons.
Nous sommes heureux de vous accueillir aujourd'hui. Au cours de mes conversations avec Mme McKinnon—je peux vous dire que nous nous sommes entretenus pendant deux jours, et à un moment donné, il semblait que nous n'allions pas recevoir de représentants de votre organisation. Selon nous, il est très important que les représentants de la vente au détail participent à nos délibérations qui visent à permettre aux Canadiens de savoir ce qui se passe dans l'industrie. Nous voulions également recevoir les abatteurs aujourd'hui, mais aucun n'a accepté ou n'a voulu prendre le temps de venir à court préavis, contrairement à vous.
Je tiens à ce qu'on souligne que vous avez fait cet effort considérable. Je comprends la difficulté—pour nous tous—de se procurer des billets d'avion à si court préavis et d'avoir des exposés fin prêts. Nous vous remercions donc pour tout cela.
Reprenons la séance. Nous recevons M. Robert Weaver, gérant général du Conseil des viandes du Canada. Nous recevons également Nick Jennery, président et directeur exécutif en chef du Conseil canadien des distributeurs en alimentation; M. Kim McKinnon, vice-président; et Paul Fortin, vice-président de A & P Canada Limitée. Nous avons donc les représentants du commerce de détail et nous sommes prêts à entendre vos exposés.
Êtes-vous le premier, monsieur Weaver, ou avez-vous décidé d'un autre ordre?
 (1220)
M. Robert Weaver (gérant général, Conseil des viandes du Canada): Nous n'en avons pas discuté, mais je vais passer en premier.
Bonjour et merci de me donner la possibilité de vous entretenir. Je vous remercie pour commencer, à tout le moins, car j'ai l'impression que je ne vais pas vous remercier à la toute fin. Bonjour malgré tout.
Le Conseil des viandes du Canada est l'association commerciale qui représente à la fois les abatteurs et les transformateurs de viande rouge assujettis à l'inspection fédérale. Elle représente donc certaines des sociétés de boeuf dont vous avez entendu parler, comme Cargill, Lakeside-IBP, Excel, St. Helen's, Better Beef, Delft Blue, Bellivo, au Québec, et Levinoff également. Comme je l'ai déjà dit, nous représentons également les sociétés qui achètent et utilisent le boeuf.
J'ai préparé quelques chiffres sur l'abattage des bovins, car j'ai pensé, d'après ce que m'a dit M. Steckle au téléphone, qu'ils seraient susceptibles de vous intéresser. Ils figurent à la première page du petit rapport que je vous ai remis.
Avant la crise, l'abattage représentait près de 70 000 têtes par semaine—il s'agit de chiffres approximatifs—ce qui correspond à 100 p. 100 de la capacité de l'usine. Au début de la crise, ce chiffre est tombé à 30 000 têtes par semaine. Les abatteurs ont réduit ce chiffre, puisque les exportations ont été interrompues et que le boeuf s'accumulait sur le marché. Ils ont donc diminué l'abattage de 30 p. 100, ce qui correspond à près de 43 p. 100 de leur capacité. Ils l'ont augmenté de nouveau pour passer à 46 000 têtes il y a trois semaines, soit au moment de l'annonce par le gouvernement des programmes d'aide destinés aux producteurs de bovins et du petit programme d'aide destiné au secteur de l'abattage afin d'écouler certains produits. Actuellement, l'abattage se chiffre à 46 000 têtes.
Pour ce qui est de l'effet financier sur notre secteur industriel, on estime que le secteur de l'abattage a perdu 50 millions de dollars au cours des trois premières semaines de cette crise, et il a été le seul à supporter cette perte. Nous parlons ici d'un produit qui a été expédié mais qui n'a pas pu être vendu—ce sont les pertes au niveau des exportations, au niveau de la vente des divers abats comestibles dont vous avez entendu parler dans l'exposé précédent. Bien sûr, au bout de plusieurs semaines où l'on cherchait à diminuer les pertes ou les coûts, des mises à pied ont dû se faire dans tout le pays, et d'autres vont suivre.
Permettez-moi de vous donner l'exemple d'un problème que l'on retrouve dans le secteur du veau, par exemple. Une société produit du veau provenant essentiellement de veaux de race laitière du Québec et de l'Ontario. Pour l'instant, c'est une autre société, Levinoff, au Québec, qui procède à l'abattage de leurs veaux de race laitière. Cette société congèle toute la viande, puisqu'elle ne peut pas l'exporter comme d'habitude; elle se contente de l'entreposer, en espérant que les frontières vont bientôt ouvrir.
J'aimerais faire une observation au sujet des programmes d'appui du gouvernement. Cette information a été revue hier par tous les abatteurs, au cours d'une téléconférence à l'échelle du pays. Ils ont indiqué que le programme d'aide du gouvernement n'est mis à exécution pour l'instant qu'en Alberta et en Saskatchewan. D'après nos abatteurs, aucun chèque n'a été envoyé en Ontario ou au Québec pour l'instant, seulement en Alberta et en Saskatchewan, alors que ce programme a été annoncé il y a trois semaines. En fait, nous n'avons même pas de formulaire de demande ni non plus la version écrite du programme d'aide. Les abatteurs ne l'ont pas reçue.
Les stocks de viande s'accumulent. Comme l'a dit Ted Haney, les Canadiens consomment essentiellement les coupes les plus coûteuses—c'est ce qu'ils aiment—tandis que l'industrie exporte beaucoup d'autres coupes, comme les abats, le foie, le coeur, les tripes, la gaine des rognons et les tendons. Ces produits sont exportés par le Canada ainsi que par les États-Unis.
 (1225)
Dans une grande mesure, la vente de ces abats comestibles et de ces sous-produits a pris de l'ampleur au fil des ans et contribue largement aux recettes de l'industrie qui sinon, ne pourrait pas être rentable.
M. Steckle m'a dit au téléphone il y a deux jours qu'il souhaitait parler de la crise nationale du boeuf et j'ai donc rassemblé de l'information à ce sujet que vous retrouverez à la page 3.
Le système d'approvisionnement en viande au Canada prévoit des stocks pour environ trois semaines. Les programmes d'appui du gouvernement ont été annoncés il y a trois semaines, mais ils ne sont toujours pas mis à exécution en Ontario et au Québec. Nous en arrivons maintenant au moment où les prix en Ontario et au Québec vont diminuer, car lorsque l'on parle de bovin peu cher, il faut attendre un certain temps avant que cela n'ait de répercussion sur le marché. Le prix du boeuf n'a pas simplement diminué de 20 p. 100 le premier jour de la crise. Cela prend du temps. Nous avons également appris que certains détaillants ne vont même pas découper le boeuf avant 18 jours, si bien qu'il y a des écarts de temps.
Dans l'Ouest du pays, les prix ont commencé à diminuer plus rapidement. À mon avis, je crois que c'est parce que le programme d'appui du gouvernement y a débuté il y a trois semaines. Les prix ont diminué pour les coupes à bas prix essentiellement. Comme on l'a dit précédemment, la demande est toujours forte pour les coupes à prix élevé. En fait, il y aurait pénurie dans certains endroits. Il s'agit de ce que l'industrie appelle les viandes moyennes, soit celles de la région des reins. Ces prix sont restés élevés jusqu'à tout récemment et commencent maintenant à baisser dans l'Ouest canadien.
Dans l'Ouest canadien, vous pouvez acheter les autres coupes, comme les bifteck de ronde, etc., à très bas prix. Le boeuf haché, par exemple, est offert à moins d'un dollar la livre. En Ontario, les diminutions de prix que tout le monde attend commencent juste à apparaître.
J'ai fait la même chose que vous, Rose-Marie : je suis allé moi-même dans les magasins il y a une semaine et j'ai moi aussi été surpris de voir que les prix n'avaient pas baissé—mais ils baissent en ce moment même. C'est non seulement le cas des prix en magasin, essentiellement pour les coupes les moins chères et le boeuf haché, que les détaillants offrent en promotion maintenant—et mes amis du CCDA vont probablement vous le dire dans leur exposé, même si je ne l'ai pas encore lu—mais c'est également ce que l'on observe dans la restauration.
Le restaurant Nickels à Hunt Club et Merivale a commencé à offrir il y a quelques jours un faux-filet de 10 onces pour 9,99 $. Grillman's sur Prince of Wales offre un bifteck de côte de 12 onces pour 11,99 $. La baisse des prix commence donc à se produire.
Pour ce qui est du prix du boeuf haché et de la disponibilité de ce produit, le Conseil des viandes du Canada n'a jamais reçu d'appel au sujet de pénurie. En plus, le principal producteur de ce produit provenant de vaches laitières serait soit Lakeside Packers, à Brooks, ou Levinoff, au Québec. Par exemple, si vous utilisez le boeuf haché maigre à 85 p. 100, vous savez qu'il se vend maintenant à des prix plus bas que le produit importé de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande ou de l'Uruguay. Le produit importé lui-même a chuté passant d'environ 1,20 $ la livre à près de 1,07 $, tandis que le produit canadien se vend encore moins cher.
 (1230)
Il a été question du contingent tarifaire au début et j'imagine qu'il va en être de nouveau question. Il y a une chose que je peux dire au sujet de notre organisation, puisque nous sommes des abatteurs ainsi que des transformateurs de boeuf—ce n'est pas à moi de vous conseiller de vous débarrasser du contingent supplémentaire. Beaucoup de nos membres utilisent ce contingent. Nous avons plus ou moins adopté une approche équilibrée.
Il y a plusieurs semaines, le comité du contingent tarifaire a tenu une grande réunion. Il a décidé de recommander à ce moment-là de ne rien changer et de ne pas prendre de mesures comme la suppression du contingent. Comme l'a dit le ministre Vanclief à plusieurs reprises lors de ses conférences de presse et de ses allocutions, ce n'est pas en fermant les frontières que l'on ouvre les marchés d'exportation.
Selon nous, la solution du problème se trouve dans la capacité d'exporter de nouveau. Nous avons recommandé de commencer par le Mexique, car ce pays n'est pas redevable, si vous voyez ce que je veux dire, au Japon et à Taïwan, comme les États-Unis. Selon nous, le Mexique serait le genre de marché qu'il faudrait commencer à ouvrir, car ce pays achète les abats comestibles, etc., qui ne sont pas consommés en grande quantité au Canada ou aux États-Unis. C'est ce qu'il recherche. Ce serait un bon marché pour commencer et la situation se débloquerait.
Je vais en rester là.
Le président: Monsieur Jennery.
M. Nick Jennery (président et directeur exécutif en chef, Conseil canadien des distributeurs en alimentation): Merci, monsieur le président.
Je vais être bref, car je sais que vous voulez consacrer la plupart de votre temps aux questions.
À titre d'introduction, permettez-moi simplement de dire que le Conseil canadien des distributeurs en alimentation, qui est l'organisation que nous représentons, est une association professionnelle sans but lucratif représentant les principales chaînes d'épicerie au Canada ainsi que les distributeurs de services alimentaires. Il s'agit essentiellement de Loblaws, A&P, et Safeway, ainsi que de plusieurs autres petites chaînes régionales, comme Thrifty's ou autres sociétés du genre. Au total, nous représentons près de 80 p. 100 du volume de la distribution de produits d'un bout à l'autre du pays et notre industrie affiche près de 64 milliards de dollars de ventes au détail et près de 11 milliards de dollars du côté des services d'alimentation. Nous employons également un nombre important de personnes, 380 000 environ directement, et près de 500 000 à peu près si l'on tient compte de certains secteurs périphériques.
Je suis aujourd'hui accompagné de Kim McKinnon, vice-présidente du CCDA, qui est la personne contact depuis le premier jour de toute cette crise ESB. En l'espace de deux heures, nous avons prévu les instruments nécessaires et également affecté une personne-ressource qui a été en contact constant avec tous les membres; elle peut donc vous expliquer, en cas de besoin, la position de nos membres sur l'ESB.
Nous nous sommes attachés essentiellement à rassurer le public sur la sécurité du canal d'approvisionnement. J'ai personnellement donné 118 entrevues aux médias les quatre premiers jours. Kim en a fait plus que cela. Je crois que nous avons tous fait un bon travail pour rassurer le public canadien. C'était notre principale priorité.
Je suis également accompagné de Paul Fortin, vice-président des aliments frais et des techniques marchandes pour A&P. Parmi les responsabilités de Paul, citons l'achat et les techniques marchandes relatives à la viande pour A&P; il travaille dans ce domaine depuis 38 ans si bien qu'il connaît bien toutes les pratiques commerciales. Rien ne lui est étranger.
J'aimerais m'attarder quelques minutes sur quatre points essentiels : l'appui du commerce de détail pour l'industrie du boeuf; les prix de détail du boeuf; les pratiques commerciales actuelles et enfin, la consommation du public.
Comment nos membres participent-ils à l'industrie du boeuf? Sur une période de 52 semaines, nous vendons habituellement 2 milliards de dollars de boeuf frais, soit un total de près de 222 millions de kilogrammes. Nous faisons la publicité du boeuf dans les dépliants publicitaires de nos magasins chaque semaine et des exemples vous sont donnés dans la documentation qui est distribuée aux sociétés membres.
Nous appuyons également le Centre d'information sur le boeuf qui est le secteur de commercialisation de l'industrie. Nous avons inclus leur récente brochure que nous avons distribuée dans nos magasins. Ce n'est pas à cause de cette crise, c'est simplement ce que l'on fait habituellement.
Depuis le 20 mai, comme je l'ai déjà dit, nous avons donné des centaines d'entrevues aux médias, pour essentiellement transmettre l'information au public, car nous pensons que le public pose à ses détaillants presque autant de questions qu'au gouvernement et qu'aux organes de réglementation, si pas plus.
Nous avons également participé à chacune des mises au point quotidiennes ESB avec l'ACIA jusqu'à ce qu'elles cessent le 20 juin. Je devrais dire que même si nous parlons beaucoup du commerce de détail, nos membres des services alimentaires sont fortement touchés par les questions comme la fermeture des frontières. Lorsque je dis services alimentaires, je parle de sociétés comme SYSCO et Gordon Food Service, qui sont des distributeurs pour les hôtels, les restaurants et les institutions.
Pour revenir aux prix et promotions des épiceries de détail... Franchement, le boeuf est un produit qui fait l'objet d'énormément de promotions dans une épicerie. Si vous n'avez pas un rayon de boeuf concurrentiel et de qualité, vous ne pouvez pas réussir comme détaillant de la gamme complète de produits. C'est un fait prouvé. Nous prévoyons nos techniques marchandes et notre publicité quatre à six semaines à l'avance, parfois plus. C'est une pratique commerciale acquise depuis plusieurs années, le produit est vendu au prix coûtant et parfois en-dessous. Par conséquent, lorsque vous entendez parler d'articles sacrifiés, c'est ce dont il est question. Pour vous situer dans le contexte, nous faisons près de 1 000 modifications de prix par semaine, car c'est la nature de l'entreprise, qui témoigne également de la compétitivité de l'industrie.
Nous disposons de stocks de trois à quatre semaines et actuellement, pour certaines sociétés, les stocks tendent à durer plus longtemps à cause de l'incertitude relative à la garantie des prix et des quantités dans la situation actuelle, surtout lorsqu'on envisage de faire la promotion d'un produit en août, par exemple.
 (1235)
Je dirais simplement pour la gouverne du comité que les ventes de boeuf d'aujourd'hui par rapport à celles d'il y a un an sont restées assez stables en matière de tonnage. Depuis la crise ESB, les consommateurs ont commencé à avoir davantage de promotions, plus fréquentes, et c'est certainement ce qui va se passer au cours des prochaines semaines notamment.
J'ai des exemples pour tout le pays : chaque grande chaîne importante où d'habitude le hamburger ou la viande hachée coûte 1,89 $, 1,99 $ propose maintenant ce produit à 99 cents. Vous avez des promotions : «Achetez un rôti, obtenez le second gratuitement». Les filets sont vendus à près de la moitié prix. Il s'agit d'une situation sans précédent et je pourrais vous donner bien d'autres exemples, mais je crois que vous comprenez bien la situation.
Les stocks circulent. Quelques prix plus bas sont transmis aux détaillants qui en tirent avantage. Franchement, cela permet d'attirer le consommateur. Il s'agit typiquement du client qui dépense 8 000 $ par an et les détaillants n'ont pas peur de prendre les mesures voulues pour l'attirer dans leur magasin.
J'ai quelques observations rapides au sujet des questions qui ont été soulevées à propos de l'importation du boeuf américain. Certains détaillants—pas tous—achètent du boeuf américain, car il y a pénurie de certaines coupes. Cela fait partie de la dynamique du marché, et ne découle pas la crise ESB. Nous sommes en pleine saison du barbecue et la demande pour les coupes centrales, par exemple, est forte.
Bien sûr, le prix au niveau du détail, à la ferme ou au parc d'engraissement ne correspond pas au coût d'intrant. Il faut prendre en compte le travail, qui se classe au deuxième rang des coûts d'intrant du côté du détail. Il faut parler également des frais généraux habituels en matière d'emballage, de l'équarrissage qui a beaucoup augmenté. Toutefois, les rabais vont continuer de façon très agressive, maintenant et au cours des prochaines semaines.
Je dirais simplement que dans le domaine des rabais—nous avons énormément d'expérience à ce propos—lorsqu'on commence par un prix vedette, on arrive au point où les consommateurs se mettent à remplir leur garde-manger ou à congeler de grandes quantités de produit, plus que la normale, ce qui est considéré comme une baisse des ventes dans l'avenir immédiat. En ce qui concerne le tonnage au cours de l'année, on n'a pas pris d'avance, mais par contre, on a peut-être gagné la loyauté des consommateurs. C'est en partie la nature du processus.
Pour terminer, je dirais simplement que nous continuons à appuyer l'industrie du boeuf. Franchement, il s'agit simplement de bonnes pratiques qui font partie intégrante de notre travail. Nous mettons l'accent sur le consommateur et sur les promotions. Nous représentons de 1 à 2 p. 100 des affaires et le marché réagit très rapidement dès que quelqu'un pratique un prix intéressant. Je proposerais certainement que l'on vise l'ouverture de la frontière, car c'est là que se trouve la solution au problème de volume.
 (1240)
Le président: Merci, monsieur Jennery.
Êtes-vous le suivant, monsieur Fortin?
M. Nick Jennery: Monsieur le président, je dirais simplement que notre déclaration liminaire est courte, car je sais que vous avez des questions bien précises, qui...
Le président: Certainement.
Vous pourriez avoir juste une observation à faire, sinon, pas de problème. Nous allons passer aux questions.
Madame McKinnon?
M. Paul Fortin (vice-président, A & P Canada Ltée, Conseil canadien des distributeurs en alimentation): Nous craignons encore d'aller de l'avant, car nous ne savons pas ce qui pourrait se produire si la frontière rouvrait demain. Quelles en seraient les répercussions sur le coût de la viande aujourd'hui? Il pourrait doubler du jour au lendemain.
Nous nous inquiétons également de ce qui va se produire cet automne. Pour l'instant, il s'agit de 900 000 bovins et 210 000 ont été abattus jusqu'à présent. Près de 700 000 vont l'être sous peu et que va-t-il falloir faire pour réalimenter les canaux d'approvisionnement? Je parle des parcs d'engraissement pour la demande d'octobre et de novembre.
Nous nous inquiétons également du fait que ces bovins sont actuellement à l'engraissage et prennent du poids chaque jour. Le poids moyen, la semaine dernière, était supérieur à 800 livres. Cela veut dire que les portions deviennent plus grosses, alors que ce n'est pas vraiment ce que souhaitent les clients qui préfèrent les portions plus petites.
Je crois que les détaillants essayent d'amortir la crise, comme ils l'ont fait en 1998 lors de la crise du porc. Nous devons nous appuyer sur les marchés intérieurs. J'espère que nous allons en tirer les leçons, à l'instar de l'industrie du porc, et que nous allons travailler plus étroitement avec les détaillants afin de faire la promotion de toutes les coupes, et non seulement de celles auxquelles nous cherchons à habituer les Canadiens.
Nous avons une suggestion à faire; en effet, on ne prévoit que des rabais du prix de la viande, mais ne devrait-on pas envisager une campagne de promotion d'envergure nationale? La saison est sur le point de changer. Les coupes moyennes sont très populaires, mais très bientôt, d'ici la fin août, on va passer aux coupes des extrémités, qui, comme nous l'avons dit, sont en excédent en ce moment. Ne faudrait-il pas lancer une campagne des médias—télévision, radio, n'importe quoi—pour promouvoir le boeuf canadien?
Je me propose maintenant de répondre à toutes vos questions du mieux possible. Merci.
Le président: Merci.
Madame McKinnon.
Mme Kim McKinnon (vice-présidente, Conseil canadien des distributeurs en alimentation): Je suis simplement ici pour répondre aux questions au cas où on m'en poserait.
Le président: Merci.
Monsieur Hilstrom.
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Je pense qu'il est très clair, d'après ce que nous avons entendu, que seule l'ouverture des frontières peut permettre de régler cette crise économique. J'imagine que l'industrie, surtout aux yeux des détaillants, ne veut pas se réorganiser en fonction d'une nouvelle réalité. Elle veut savoir ce que va être cette nouvelle réalité, c'est-à-dire, si on ne peut exporter que certaines coupes, par exemple. On ne va pas se mettre à hacher beaucoup plus de hamburger pour les Canadiens, alors qu'en fait c'est en Asie que l'on veut transformer le boeuf de la sorte. Est-il vrai que cette industrie ne veut pas se réorganiser à ce stade de la crise?
M. Robert Weaver: Tout au début , je crois que bien des gens espéraient que cette crise serait terminée en l'espace de trois ou quatre semaines et qu'elle ne nous inquiéterait plus aujourd'hui. Tout le monde travaillait fort du côté scientifique, menait les enquêtes, rassemblait tous ces bovins et procédait à leur abattage, déterminait les lieux d'abattage et effectuait les tests. On a cru que si tout cela marchait bien, les frontières rouvraient, mais comme vous le savez, ce n'est bien sûr pas encore le cas.
Si on se reporte aux tableaux que je vous ai montrés, lorsque la production est tombée à 30 000 par semaine et que l'on perdait toujours de l'argent à une vitesse phénoménale, beaucoup ont demandé au gouvernement un genre de programme d'aide; c'est la raison pour laquelle le gouvernement a promis une forme de financement pour écouler certains de ces abats comestibles, ces parures à bon marché, etc. C'est ce qu'il leur a permis de continuer. J'ai entendu certains abatteurs de boeuf dire qu'il se pourrait bien qu'ils aient à fermer complètement.
 (1245)
M. Howard Hilstrom: J'aimerais préciser à tous les témoins qu'ils sont ici entre amis. Personne ne va vous attaquer personnellement ou attaquer vos industries. L'information que vous nous avez présentée aujourd'hui est essentielle pour parfaitement comprendre la situation, puisque nous allons faire des recommandations au ministre.
Monsieur Fortin, vous dites qu'il faut faire la promotion de toutes les coupes et je suis d'accord avec vous. Nous avons entendu dire qu'au moment où les coûts nationaux des abatteurs et des détaillants diminuaient légèrement—peu importe les chiffres cités par M. Jennery—l'Australie et la Nouvelle-Zélande baissaient leurs prix. Est-ce bien ce qui va se produire, c'est-à-dire qu'au fur et à mesure de la diminution des prix canadiens dans le but de favoriser une plus forte consommation, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, l'Argentine, ces pays d'embouche, vont continuer de vendre leurs produits moins chers que les nôtres? Est-ce ce qui va se produire? Cela est-il arrivé?
M. Paul Fortin: Eh bien, je ne peux pas parler au nom des autres détaillants, mais la plupart des détaillants de l'Ontario ont tous des programmes de promotion du boeuf canadien—toutes les grandes chaînes. Cela veut dire qu'ils doivent maintenant appuyer l'industrie canadienne du boeuf.
Cela va-t-il se produire dans le cas de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande? Je ne peux pas vraiment répondre à cette question.
M. Howard Hilstrom: Monsieur Jennery, je crois que vous avez dit que la viande importée se vendait moins cher, n'est-ce pas?
M. Nick Jennery: Non, désolé. Permettez-moi de préciser. Étant donné que le boeuf est une catégorie qui fait l'objet de beaucoup de promotion, les articles vedettes sont souvent vendus au prix coûtant ou parfois à un prix inférieur à celui-ci. C'est ce que je voulais dire.
M. Howard Hilstrom: Oui. Eh bien, tout ce que je sais, c'est qu'au Canada, à cause de notre production, de notre climat et de tout le reste, nous ne sommes pas concurrentiels sur le marché d'embouche, exception faite de maintenant, dans cette situation de crise; nous sommes concurrentiels, car si les grands éleveurs pouvaient obtenir de 50 à 60 p. 100 du prix d'un animal, vous vous retrouveriez avec beaucoup de boeuf.
Rick Paskal—et je crois que vous le connaissez tous—m'a dit que les employés des parcs d'engraissement gagnaient 35 cents la livre hier. Qu'est-ce que cela veut dire maintenant? Ils gagnent 35 cents. J'imagine que le gouvernement va leur donner une subvention pour arriver à 70 cents ou quelque chose du genre. Quelles sont les répercussions de ce mécanisme d'établissement des prix au niveau des abatteurs et des détaillants? Pourriez-vous nous en donner une description?
M. Robert Weaver: Le programme d'appui du gouvernement destiné aux abatteurs s'applique simplement à l'équarrissage et à l'écoulement de ces coupes qui étaient vendues surtout sur les marchés d'exportation, ainsi que les parures, et vise à ce que le système ne s'engorge pas. Agriculture Canada a consulté les abatteurs pour leur demander ce qui les obligerait à cesser leurs opérations, et les abatteurs ont répondu que c'était justement cela.
Ils ont perdu tout le revenu de tous ces produits qui étaient auparavant exportés et vendus, mais ils peuvent au moins en écouler une certaine partie, ce qui leur permet de continuer à fonctionner pour assurer la fourniture de coupes musculaires.
M. Howard Hilstrom: J'imagine donc que les produits d'équarrissage sont enterrés.
M. Robert Weaver: Les produits d'équarrissage peuvent servir pour les aliments du porc, du poulet et du poisson.
M. Howard Hilstrom: Cela se fait encore? Je pense qu'il va falloir entendre les représentants de l'ACIA la semaine prochaine, espérons-le.
M. Robert Weaver: Le secteur de l'équarrissage connaît actuellement beaucoup de bouleversements.
 (1250)
M. Howard Hilstrom: C'est vrai. Ils ne peuvent pas s'en servir dans les aliments pour animaux de compagnie ou... Pour ce qui est du poisson, je ne le sais pas. Toutefois, je sais que Rothwsay's ne s'en sert pas dans les aliments pour porcs et volaille. Je ne sais pas si les produits équarris sont utilisés à cette fin.
Quant les consommateurs vont se rendre compte qu'une bonne partie de la viande propre à la consommation humaine est détruite, que vont-ils penser? Le savez-vous? Kim, le savez-vous?
Ils vont être très déçus, surtout quand on songe qu'il y a des personnes qui souffrent de la faim non seulement ailleurs dans le monde, mais également au Canada. Harvey Dann, du Manitoba, a vendu son boeuf un dollar la livre à La Fourche, à Winnipeg. Il y avait des personnes pauvres qui achetaient de la viande et qui en étaient très contentes. Leur régime alimentaire s'est trouvé grandement amélioré du fait qu'ils ont consommé plus de protéines.
Les Canadiens se demandent s'ils vont avoir droit à des baisses de prix ou si la viande va être jetée dans les décharges. Est-ce qu'elle va être vendue à des prix suffisamment bas pour que l'industrie puisse venir à bout de cette crise, étant donné qu'une bonne partie de la viande—pas toute, mais une partie de celle-ci—est consommée par ceux qui peuvent en manger?
Mme Kim McKinnon: D'abord, le consommateur canadien appuie l'industrie, car la demande pour ce produit est demeurée élevée tout au long de la crise, ce qui a grandement contribué à sauvé la situation, car elle aurait pu être pire. Le consommateur canadien fait confiance à l'industrie du boeuf. Il fait donc sa part.
Maintenant, on pourrait l'encourager, au moyen de campagnes de marketing, à acheter plus de boeuf si le prix de celui-ci était moins élevé. Ce serait une solution de fortune, temporaire, car, au bout du compte, on ne consomme que 21 repas dans une semaine. Or, combien de fois par semaine votre famille mange-t-elle du boeuf?
M. Howard Hilstrom: Je suis bien mal placé pour vous répondre, car j'ai un très grande exploitation, et nous mangeons beaucoup.
Mme Kim McKinnon: D'accord, vous êtes sept. Il y a de nombreuses familles qui ne mangent pas de boeuf, qui sont végétariennes. La famille moyenne, elle, consomme du boeuf peut-être deux fois par semaine.
Si la viande hachée se vendait 99 cents la livre, en serviriez-vous une ou deux fois de plus par semaine? Peut-être pendant un certain temps. Ce que vous feriez très probablement, c'est congeler la viande pendant quelques semaines et ne pas acheter de boeuf la semaine suivante. Le problème reste donc entier.
Il y a des personnes qui vont en consommer plus, mais c'est peu probable. Ensuite, on compte sept dîners dans une semaine. Si vous servez un repas de boeuf de plus, quels produits allez-vous laisser de côté? Quels produits allez-vous remplacer par le boeuf? Cela va entraîner de nouveaux problèmes.
Le président: Merci.
Monsieur Proctor.
M. Dick Proctor: Merci beaucoup, et merci à tous les témoins.
Je voudrais poser une question à M. Weaver. Avant que la crise de la vache folle n'éclate le 20 mai, le comité a eu l'occasion de rencontrer, si je ne m'abuse, les responsables de l'ACIA, qui ont parlé des nombreux règlements sur l'inspection des viandes qui existent au Canada. Je présume qu'une fois la crise réglée, nous allons revoir la façon dont nous inspectons les viandes, et ce, dans le but d'uniformiser les règlements en vigueur. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus. Cela fait partie de votre mandat, n'est-ce pas?
M. Robert Weaver: Oui.
Nous connaissons bien la Loi sur l'inspection des viandes et le Manuel des méthodes de l'hygiène des viandes. Ce sont deux documents volumineux. Je n'ai jamais entendu un de nos membres dire que l'Agence d'inspection des aliments devrait assouplir ces règlements. En fait, ils souhaitent plutôt qu'elle les resserre.
Nous savons que la loi et le manuel vont être révisés en raison de la maladie de la vache folle. Cette révision est déjà en cours. Des changements vont être apportés aux matériels à risques spécifiés—les MRS, comme on les appelle. Il va y avoir des changements de côté-là. Nous avons amorcé des discussions à ce sujet avec l'Agence. Des consultations ont également été engagées avec les États-Unis aussi. D'après les représentants du American Meat Institute et de l'Agence d'inspection des aliments, les États-Unis vont sans doute être obligés d'adopter les mêmes mesures que le Canada.
 (1255)
M. Dick Proctor: Oui, parce que le troupeau se déplace sur l'ensemble du continent, comme l'a indiqué le premier ministre Calvert. Le marché est totalement intégré.
Vous avez dit qu'à votre connaissance, aucun abattoir—je sais que vous n'avez pas utilisé ce mot—n'a refusé de collaborer avec l'ACIA. Toutefois, il existe divers paliers, et certains abattoirs plus petits...si j'ai bien compris, vous pouvez vendre de la viande qui n'est inspectée qu'à l'occasion, selon la province dans laquelle vous vous trouvez. Est-ce exact?
M. Robert Weaver: C'est exact.
On a entrepris, il y a plusieurs années de cela, une étude sur la mise en place d'un code national d'inspection des viandes, parce certains membres du comité voulaient savoir quelle était la différence entre les règlements provinciaux et fédéraux. À ce moment-là, personne n'était en mesure de répondre à la question. On a donc réalisé une étude qui a révélé que les systèmes d'inspection des viandes en vigueur dans les provinces non seulement variaient d'un endroit à l'autre, mais étaient différents du système fédéral.
À l'époque, tout comme aujourd'hui, la viande qui n'était pas inspectée par le fédéral ne pouvait circuler d'une province à l'autre ou être exportée à l'étranger. Depuis, on a mis sur pied le programme HACCP. L'industrie fonctionne presque entièrement sous le régime du HACCP au palier fédéral, mais pas au palier provincial ou municipal. Dans certains cas, il n'y a pas d'inspection qui se fait. Donc, la différence entre les systèmes est encore plus grande aujourd'hui qu'elle ne l'était il y a cinq ou six ans.
On songe maintenant à établir un système d'inspection unique, parce que la maladie de la vache folle a été décelée dans un abattoir provincial, chez une seule vache. Toutefois, cela pose problème. On me dit qu'il y a 3 000 petits abattoirs qui ne sont pas assujettis au système fédéral. Il va être très difficile de trouver les ressources nécessaires pour effectuer ce travail.
Toutefois, 95 à 96 p. 100 de la viande produite au Canada, et j'entends par cela le porc et le boeuf, tombe sous le coup du système d'inspection fédéral.
M. Dick Proctor: Merci.
Ma question s'adresse à Mme McKinnon. M. Jennery a dit que l'ACIA a diffusé des bulletins tous les jours, et ce, jusqu'au 20 juin. A-t-elle cessé de le faire, ou est-ce qu'elle effectue des mises à jour hebdomadaires? Y a-t-il eu d'autres mises à jour depuis le 20 juin?
Mme Kim McKinnon: Nous avons communiqué avec les représentants de l'ACIA tous les jours, jusqu'à ce que la partie technique de l'enquête...
M. Dick Proctor: Vous parlez des tests?
Mme Kim McKinnon: Oui. Une fois que les tests ont pris fin et qu'il a été déterminé que l'Agence avait exploré toutes les pistes d'enquête, les rencontres quotidiennes ont été suspendues. Nous obtenons maintenant des mises à jour via les conférences de presse que tout le monde peut suivre.
M. Dick Proctor: D'accord. C'est pour cette raison qu'on a cessé, à partir du 20 juin, de diffuser des bulletins.
Mme Kim McKinnon: Oui.
M. Dick Proctor: Monsieur Fortin, est-ce qu'il y a de plus en plus de consommateurs qui, depuis la crise, souhaitent savoir si le produit qu'ils achètent est d'origine canadienne? Avez-vous noté un changement de ce côté-là?
M. Paul Fortin: Je n'ai noté aucun changement de ce côté-là, car nous faisons la promotion du boeuf canadien depuis des années. Notre stratégie est toujours la même.
M. Dick Proctor: Vous parlez de A & P.
M. Paul Fortin: Oui, et comme je l'ai mentionné, les grands détaillants en Ontario font la promotion du boeuf canadien depuis des années. Ils ont leur propre stratégie. Il n'y a pas eu de baisse de consommation du boeuf. Nous avons réduit le prix du boeuf la semaine dernière et encore cette semaine-ci. Nous en avons vendu plus que prévu. En fait, nous avons manqué de boeuf et nous avons été obligés de le remplacer par un autre produit, ce qui va nous occasionner de nouvelles pertes.
· (1300)
M. Dick Proctor: D'accord.
Vous avez formulé quelques réserves au sujet de la réouverture de la frontière—vous vous êtes demandé si le prix du boeuf allait doubler. Je suppose que vous faisiez allusion, à ce moment-là, à la résistance du consommateur.
M. Paul Fortin: Non, pas du tout.
En fait, les détaillants essaient présentement de savoir combien coûtera le boeuf au mois d'août, à la mi-août, afin de pouvoir constituer des stocks et l'offrir en promotion. Nous savons tous que le prix du boeuf est en train de baisser. Il commence tout juste à baisser. Or, il est difficile, pour l'instant, de savoir combien le boeuf va coûter. Les emballeurs n'osent pas se prononcer, car on ne sait pas ce qui peut arriver du jour au lendemain. Ils n'ont pas encore acheté de bétail. S'ils l'achètent, qu'ils nous fixent un prix et qu'on décide, demain matin, de rouvrir la frontière, le prix va augmenter. Il va peut-être doubler, et ils vont ensuite être coincés.
Ils acceptent des commandes, mais ils ne peuvent pas vraiment nous fixer un prix. Or, nous devons nous organiser trois ou quatre semaines à l'avance. Nous devons préparer les encarts, prendre des photos, les faire imprimer. D'où mon inquiétude.
M. Dick Proctor: Très bien. Merci.
Le président: Madame Ur.
Mme Rose-Marie Ur: Merci d'avoir comparu devant nous aujourd'hui.
Monsieur Weaver, vous avez dit, dans votre exposé, qu'au début de la crise, le nombre de bêtes abattues était tombé à 30 000, ce qui représentait environ 43 p. 100 du cheptel. On est maintenant passé à 46 000 bêtes. Est-ce que cette hausse est attribuable au programme d'aide qui a été annoncé? Pouvez-vous m'éclairer là-dessus?
M. Robert Weaver: C'est effectivement à la suite de cette annonce, il y a environ trois semaines de cela, qu'on a augmenté le nombre de bêtes abattues. À l'époque, certains abattoirs se demandaient s'ils n'allaient pas fermer leurs portes.
Habituellement, le nombre d'animaux abattus est fonction de la demande du marché. Leurs structures de prix et leurs revenus fluctuent, parce que nous évoluons dans un marché libre. Nous ne sommes pas soumis à la gestion de l'offre. Parfois, ils font de l'argent, parfois, ils en perdent. Lorsqu'ils perdent de l'argent, ils ont tendance à réduire le nombre de bêtes qui sont abattues parce que cela atténue leurs pertes. La situation que nous vivons à l'heure actuelle est exceptionnelle. Ils auraient continué d'abattre 30 000 têtes par semaine, ou même moins, si le programme d'aide du gouvernement n'avait pas été annoncé à ce moment-là.
Mme Rose-Marie Ur: Comme vous avez entendu ce que les autres témoins ont dit, vous savez que j'ai posé la même question à l'un de mes électeurs qui travaille au sein de l'industrie. Il a laissé entendre qu'il aurait peut-être fallu attendre la réouverture des frontières avant d'annoncer un programme d'aide. C'est ce qu'il a dit.
M. Robert Weaver: Le programme d'aide est une mesure à court terme qui vise à aider l'industrie à surmonter les moments les plus difficiles de la crise. Il est efficace dans une certaine mesure.
Mme Rose-Marie Ur: Si vous consultez le site Web du ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation de l'Ontario, vous allez y trouver des formulaires, des renseignements sur les responsables du programme, ainsi de suite.
M. Robert Weaver: On s'est demandé pourquoi ils ont mis tellement de temps à intervenir. La ministre Helen Johns doit participer à une réunion vendredi, c'est-à-dire demain matin, à Guelph. Je présume qu'ils vont discuter de diverses choses, y compris des formulaires.
Mme Rose-Marie Ur: Ou peut-être qu'elle va discuter du rapport qu'ils étaient censés lui fournir.
M. Jennery a dit, dans son exposé, qu'il fallait lancer une campagne d'information à l'échelle nationale. Est-ce vous, monsieur, qui avez dit cela, ou monsieur Fortin? Très bien.
D'après le Conseil des viandes du Canada, seulement 13 p. 100 des coupes de viande achetées par les consommateurs servent à faire des grillades. Ce sont donc les autres coupes, le 87 p. 100 qui reste, qui posent problème, vu leur abondance. Vous parlez de lancer une campagne nationale. Je ne pense que nous ayons besoin d'une campagne nationale pour vendre du bifteck, du surlonge ou de l'aloyau. Vous devriez peut-être lancer une campagne pour faire la promotion des hamburgers. Si je dis cela, c'est parce que j'adore les hamburgers. Je ne devrais peut-être pas le mentionner, mais j'ai une belle-fille qui préfère le pain de viande au bifteck.
Si vous voulez lancer une campagne nationale, il faudrait qu'elle porte sur les coupes de viande qui existent en abondance.
· (1305)
M. Paul Fortin: Vous avez raison. Dès que le prix du boeuf haché a diminué, nous avons offert le boeuf haché maigre en promotion à l'échelle de la province. Cela remonte à trois semaines environ. Or, je parle ici d'une campagne qui sera lancée à l'échelle nationale.
L'industrie du boeuf est saisonnière. Ce qui est populaire maintenant, ce sont les coupes du milieu, c'est-à-dire les biftecks, puisque c'est la saison des grillades. En septembre, les gens mangent encore des biftecks, mais aussi, plus de rôtis. Lorsque les légumes sortent en août, ils se tournent vers le boeuf à braiser. Voilà pourquoi je dis que l'industrie a beaucoup à faire... Il faut promouvoir le boeuf. Il faut lancer une campagne. On pourrait, par exemple, publier des recettes à base de boeuf canadien.
Comme je l'ai mentionné, peu importe la campagne, il faut promouvoir le boeuf. Les détaillants ne constituent pas la solution au problème, mais une partie de celle-ci. Il faut indiquer aux consommateurs comment préparer la viande, la choisir, comment apprêter telle ou telle coupe, quand l'utiliser, avec quoi. Voilà ce que j'entends par une campagne nationale. Cette campagne, assortie d'une baisse des prix, va nous aider à écouler une partie de nos produits au Canada.
Mme Rose-Marie Ur: Il n'y a plus d'épicerie A & P dans mon secteur. On a fermé celle de Strathroy. La plus proche se trouve à London. Nous faisions affaire avec eux quand nous vendions des légumes. Je connais bien l'entreprise.
Quels sont les emballeurs avec lesquels vous faites affaire?
M. Paul Fortin: Nous faisons affaire avec des emballeurs de l'Ontario et de l'Ouest.
Mme Rose-Marie Ur: Quand vous concluez des ententes, est-ce que vous signez un contrat avec eux, ou est-ce vous faites affaire avec des emballeurs différents d'une semaine à l'autre?
M. Paul Fortin: Nous faisons affaire chaque semaine avec qui nous voulons.
Mme Rose-Marie Ur: Comme vous le faisiez avec les légumes.
M. Paul Fortin: C'est exact.
Mme Rose-Marie Ur: Rien ne dit que vous allez acheter le produit.
M. Paul Fortin: Nous avons des fournisseurs auprès de qui nous pouvons nous approvisionner chaque semaine, mais nous faisons également affaire avec des fournisseurs d'autres régions du pays.
Mme Rose-Marie Ur: Vous avez également formulé quelques réserves. Vous craignez que si on ouvre la frontière, les prix n'augmentent. Je trouve cela intéressant, car nous sommes confrontés à une crise et que les prix n'ont pas diminué. Or, dès que les prix augmentent, le marché suit. C'est comme pour le prix de l'essence. Il n'y a jamais de stocks en réserve quand les prix augmentent, mais quand ils diminuent, on cherche à écouler ceux-ci. On dirait presque qu'il y a une corrélation entre les deux. Je sais qu'il n'est pas question ici de produit comestible, mais le volet marketing...
M. Paul Fortin: Comme je l'ai mentionné, ce n'est que tout récemment, c'est-à-dire la semaine dernière, que le prix du boeuf a commencé à diminuer. Nous achetons la viande trois ou quatre semaines à l'avance. Les produits ordinaires, eux, sont achetés toutes les semaines. C'est comme cela que nous procédons. Tous les produits offerts en promotion sont achetés quatre ou cinq semaines à l'avance.
J'ai dit plus tôt, à M. Proctor, que même si nous achetons de la viande maintenant en vue de la vendre au mois d'août, nous ne pouvons obtenir un prix ferme. C'est impossible. Si je veux faire la promotion d'un produit—le vendre, par exemple, à 99 cents la livre—je dois en connaître le prix avant que les encarts ne soient publiés.
Pour l'instant, les emballeurs sont prêts à nous fournir la quantité de viande que nous voulons, mais ils ne peuvent nous donner un prix, et c'est quelque chose qui les préoccupe aussi.
Mme Rose-Marie Ur: Mais croyez-vous que cette façon de faire est juste?
M. Paul Fortin: C'est assez exceptionnel. Nous n'avons jamais eu à faire face à une telle crise. Il s'agit d'une situation tout à fait nouvelle. Le prix du boeuf a été assez stable au fil des ans. On pouvait négocier un prix six semaines à l'avance, même si le prix du marché variait quelque peu. On gagne, on perd, on s'y fait. Aujourd'hui, les choses se passent différemment. Le bétail qui, la semaine prochaine, va se vendre 35 cents la livre, pourrait, dès demain, se vendre 70 cents la livre si la frontière était rouverte.
Mme Rose-Marie Ur: L'industrie du boeuf n'a peut-être jamais connu ce genre de situation, mais l'industrie du porc, elle, a vécu une situation similaire il y a quelques années, et les prix n'ont pas diminué. Les emballeurs s'en sont bien tirés. Ils ont acheté le porc 20 cents la livre, tandis que le prix du bacon et du jambon, lui, n'a jamais baissé. Donc, je ne compatis pas tellement avec les emballeurs et les transformateurs étant donné qu'ils se sont parfois très bien tirés d'affaires, au détriment des producteurs primaires.
M. Robert Weaver: Puis-je faire un commentaire à ce sujet?
Mme Rose-Marie Ur: Allez-y.
M. Robert Weaver: Comme tout est une question de cycles, les personnes auxquelles vous faites allusion et qui semblent être avantagées par la situation actuelle se trouvent, en fait, dans le rouge. Le prix du porc est très élevé et elles n'arrivent pas à rentrer dans leurs frais. Elles sont donc touchées elles aussi.
· (1310)
Le président: Monsieur Ritz.
M. Gerry Ritz: Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs, merci d'être venus nous rencontrer aujourd'hui.
Nous ne cessons d'apprendre de nouvelles choses au cours de ces discussions et plus la crise se prolonge, plus l'effet d'entraînement se fait sentir. Personne ne semble tenir compte du fait que les coupes sont de plus en plus grosses, étant donné que le boeuf n'est pas transformé. Nous avons transformé moins du quart, 25 p. 100, de notre cheptel et bien sûr, nos stocks ne sont pas statiques. Ils continuent d'augmenter. Il y a beaucoup de bovins dans les parcs d'engraissement. Nous allons donc nous retrouver avec des coupes plus grosses et nous allons être confrontés à certains des problèmes que vous avez mentionnés pendant des mois, c'est-à-dire tant que le problème n'aura pas été réglé, et cela ne se produira que lorsque nos frontières seront de nouveau ouvertes et que les affaires reprendront.
Avez-vous discuté de la situation avec vos homologues dans les pays qui figurent parmi nos partenaires commerciaux? Est-ce que vous êtes en contact avec le Mexique, qui est censé être un marché très important? Y a-t-il des organismes comme les vôtres, au Mexique, auprès de qui vous pouvez promouvoir le boeuf canadien? Est-ce que des mesures ont été prises de ce côté-là?
M. Robert Weaver: Il y a un conseil des viandes au Mexique, mais nos contacts ont été plutôt limités. Par contre, nous communiquons très régulièrement avec l'American Meat Institute, à Washington. Nous sommes restés en contact avec eux tout au long de cette crise. Nous les avons tenus au courant, tous les jours, des progrès de l'enquête, parce qu'ils achètent beaucoup de boeuf canadien. Nous les tenons également au courant des changements que nous comptons apporter au chapitre des matériels à risques spécifiés, même si nous ne savons pas encore avec précision quels seront ces changements.
M. Gerry Ritz: Est-ce que ces recommandations sont transmises au ministre, pour que nous sachions de quoi il retourne quand nous discutons avec les Américains? J'aimerais poursuivre la discussion avec M. Weaver pendant quelques instants.
M. Robert Weaver: Elles le sont, par l'entremise de l'Agence d'inspection des aliments. Santé Canada s'occupe lui aussi du dossier.
M. Gerry Ritz: D'accord, et vos homologues saisissent bien le message pour ce qui est des mesures que nous devons prendre pour rouvrir le marché américain.
M. Robert Weaver: Ce n'est plus au niveau scientifique...
M. Gerry Ritz: Non.
M. Robert Weaver: Le dialogue se poursuit plutôt au niveau politique et international, puisqu'il est question de la concurrence des marchés. Le dialogue se poursuit à un niveau différent.
M. Gerry Ritz: Merci.
M. Nick Jennery: En ce qui nous concerne, nous restons en contact avec nos homologues ailleurs dans le monde, sauf que les discussions portent surtout sur la sécurité alimentaire. S'il y a un aspect sur lequel les détaillants se concentrent, c'est... Nous savons que nous devons gagner la confiance du public. Les sous-entendus, les questions sans réponses nous ont rendus vulnérables. Les Américains ont, par exemple, toujours pris part aux discussions. Nous avons échangé tous nos renseignements avec eux. Ceux-ci ne sont pas exclusifs, parce que nous savons que l'effet de halo se fait sentir dans les deux sens. Donc, nous collaborons de façon tout à fait naturelle sur ce front, mais ce qui nous intéresse avant tout, c'est la sécurité alimentaire.
M. Gerry Ritz: Donc, vous mettez surtout l'accent sur la sécurité alimentaire. Vos homologues américains saisissent bien le message, à savoir que nos produits sont sans danger?
M. Nick Jennery: Oui.
M. Gerry Ritz: Et est-ce qu'ils répondent en disant qu'ils comprennent bien la situation, qu'ils veulent reprendre les affaires?
M. Nick Jennery: Ils ont accès à ces renseignements de première main. Ils participent à nos discussions.
M. Gerry Ritz: Il y a quatre ou cinq groupes de consommateurs et groupes d'intérêt, aux États-Unis, qui affirment qu'il faut rouvrir la frontière, et c'est peut-être en raison du travail que vous effectuez. Comment pouvons-nous accélérer les choses? Nous exerçons des pressions de l'extérieur. Comment pouvons-nous exercer des pressions de l'intérieur? Le marché américain est très important, en termes de volume. Y a-t-il quelque chose que nous pouvons faire? Y a-t-il quelque chose que vous pouvez faire? Devons-nous adopter une nouvelle approche?
M. Nick Jennery: C'est ce que nous nous demandons.
M. Gerry Ritz: J'espérais que vous alliez me donner la réponse, parce que moi, je ne la connais pas.
Mme Kim McKinnon: D'après les exportateurs, nous devons unir nos efforts au niveau politique, au niveau des associations, au niveau des détaillants. Nous devons tous faire plus. Par exemple, nous travaillons de pair avec nos homologues aux États-Unis, les fabricants de produits alimentaires. Ils veulent qu'on ouvre des frontières. Je suis du même avis qu'eux.
M. Gerry Ritz: C'est très bien. Et sur ce point, je me demande pourquoi on a mis fin aux rencontres qui avaient lieu quotidiennement avec l'ACIA. Est-ce que les tables rondes se poursuivent? Nous devons relancer la discussion, faire passer le même message. Est-ce que les discussions qui ont lieu entre l'industrie, le gouvernement, les détaillants sont suffisantes?
Mme Kim McKinnon: Il y a déjà eu suffisamment de discussions, dans une certaine mesure. Il faut maintenant passer à l'étape suivante. On ne peut pas passer notre temps à discuter...les gens doivent être libres d'agir, de prendre des mesures concrètes. Donc, j'espère que, pour l'instant, les discussions ont pris fin et que les principaux joueurs exercent des pressions sur Washington en vue de faire débloquer le dossier.
· (1315)
M. Gerry Ritz: Vous espérez qu'ils exercent des pressions?
Mme Kim McKinnon: Eh bien, nous comptons beaucoup sur votre aide.
M. Gerry Ritz: D'accord.
Je voudrais revenir à ce que M. Weaver a dit plus tôt. Il n'y a pas de grands établissements d'emballage dans ma région. Il y a Moose Jaw, XL, ainsi de suite, mais ils ne transforment pas mes bovins, ni ceux de mon voisin, de mon beau-frère, et cetera. Une fois que la crise sera terminée—et le système HACCP a été un sujet d'inquiétude pour bon nombre des petits abattoirs—, qu'il n'y aura plus de risque de contamination, que l'innocuité des aliments sera assurée, y aura-t-il encore des abattoirs? Est-ce que les petits abattoirs seront toujours là, ou auront-ils fermé leurs portes? Où pourrais-je faire transformer du bétail pour mon père et ma mère?
M. Robert Weaver: D'après la loi canadienne, vous pouvez produire du boeuf à des fins de consommation personnelle, mais pas pour le vendre...
M. Gerry Ritz: Mais je dois pouvoir le faire transformer en quelque part.
M. Robert Weaver: ...autrement, il doit faire l'objet d'une inspection.
Pour ce qui est de savoir combien d'établissements vont faire faillite ou fermer en raison de cette crise, nous n'avons pas eu le temps de nous pencher là-dessus. Je ne connais pas la réponse à la question.
M. Gerry Ritz: Je faisais plutôt allusion au fardeau réglementaire. Leurs frais généraux sont moins élevés, mais je songe au fardeau réglementaire, à la surabondance de programmes du genre HACCP qui vont avoir pour effet d'écarter ces établissements du marché, parce qu'ils devront dépenser des sommes considérables pour pouvoir remplir ces critères.
À qui vais-je pouvoir m'adresser? Est-ce que je dois commencer à acheter du boeuf en vente libre? Je vais tout simplement vendre mon bétail, et c'est ce que je fais la plupart du temps, et ensuite acheter du boeuf en vente libre, comme tout le monde, de sorte que je ne pourrai plus utiliser le bétail qui m'appartient? Qu'est ce qui va se passer à votre avis?
M. Robert Weaver: Le système HACCP est une norme reconnue à l'échelle internationale qui s'applique à l'inspection des aliments. Elle commence à être utilisée dans de nombreux secteurs différents, et cela englobe les bovins et les porcs élevés sur des fermes. Votre collège, M. Hilstrom, en sait quelque chose. Et cela ne s'arrêtera pas là. Cette norme ne disparaîtra pas. Son utilisation va s'étendre. Or, si ces systèmes ou normes de salubrité des aliments sont jugées acceptables pour la majorité des viandes ou des légumes que nous produisons au Canada, alors elles devraient pouvoir être appliquées de façon générale. Il devrait y avoir une norme de salubrité des aliments au Canada.
M. Gerry Ritz: Ce sont les économies d'échelle qui vont ensuite commencer à prendre effet.
Le président: Monsieur Ritz, votre temps de parole est écoulé.
Monsieur Adams, merci d'être venu. M. Adams préside un autre comité.
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je n'ai pas eu l'occasion d'entendre votre exposé, et je m'en excuse. Merci de la documentation que vous nous avez fournie. Vous avez peut-être déjà abordé la question, et si oui, vous n'avez qu'à le dire.
D'abord, je trouve les conséquences de ce changement, de cette crise qui s'est produite dans l'Ouest, fort impressionnantes. Je représente une circonscription de l'Ontario. Les agriculteurs, bien entendu, les éleveurs-naisseurs, les camionneurs dans ma circonscription—je n'ai pas encore entendu le point de vue des détaillants... Vous avez peut-être déjà répondu à la question, mais je me demande dans quelle mesure cette situation touche les établissements et les points de vente où les mises à pied peuvent être directement attribuées à cette crise. Est-ce que le délai de carence de deux semaines au titre de l'assurance-emploi a été levé, tout comme on l'a fait dans le cas des personnes qui ont été touchées par le SRAS, à Toronto? Vous savez, si vous étiez placé en quarantaine à Toronto et que vous ne pouviez aller travailler, vous aviez droit à l'assurance-emploi pendant les deux premières semaines. Savez-vous si cette restriction a été levée, et si les personnes qui sont mises à pied et qui sont admissibles à ces prestations y ont droit au cours des deux premières semaines?
M. Robert Weaver: D'après ce que je crois comprendre, les exigences en matière d'assurance-emploi n'ont pas été modifiées dans le cas des établissements d'emballage.
M. Peter Adams: La plupart d'entre nous avons des contacts avec les agriculteurs et, même si cela ne les concerne pas directement, il y a des travailleurs au sein du secteur agroalimentaire qui sont touchés. C'est un sujet que nous devrions examiner. Dans le cas du SRAS, l'exigence relative au délai de deux semaines a été levée très tôt, soit une ou deux semaines après le début de la crise. C'est quelque chose que vous devriez considérer, et nous aussi d'ailleurs.
Vous avez parlé, avec Rose-Marie, des prix et de ce qui va se produire quand la frontière va ouvrir de nouveau. Cette crise a permis au grand public de se rendre compte de l'importance de l'industrie que vous représentez, et c'est une très bonne chose, et aussi de voir à quel point vous êtes bien organisés, depuis la ferme jusqu'au point de vente, et combien de travailleurs et de secteurs différents compte l'industrie. C'est bon à savoir. Je sais qu'il existe des façons plus agréables de se faire connaître du public, mais je pense que les retombées, les effets économiques de cette situation, sont extraordinaires.
Par exemple, les camionneurs dans ma circonscription communiquent maintenant avec moi. Je parle d'eux et du travail qu'ils font dans la circonscription. Donc, cette crise à un effet d'entraînement extraordinaire. Nous avons l'occasion de montrer à quel point l'industrie est bien organisée, à quel point les aliments sont sans danger, sécuritaires.
Pour ce qui est de la reprise, parce que c'est l'ensemble de l'industrie qui est touchée en raison du grand nombre de bovins, de veaux, qu'il y a dans le système, ainsi de suite, croyez-vous que l'industrie va réagir assez rapidement quand la frontière va ouvrir? Supposons que la frontière ouvre demain. Allons-nous continuer d'avoir des problèmes pendant un mois, deux mois? Une fois la frontière ouverte, combien de temps faudra-t-il attendre avant que les choses reviennent à la normale?
· (1320)
M. Robert Weaver: Il est très difficile de répondre à cette question, parce que c'est la première fois qu'on se trouve dans cette situation. Comme on peut le voir dans la documentation, le nombre de bêtes abattues est passé de 70 000 à moins de la moitié en une semaine. Entre le vendredi et le lundi suivant, 16 000 bêtes de plus ont été abattues. L'industrie est donc en mesure de faire certains ajustements.
Pour ramener les chiffres à 70 000, il faut prendre bon nom des mesures que vous avez mentionnées, par exemple, trouver des ressources, nous assurer qu'ils ont la formation requise, les rappeler au travail, s'ils ont été mis à pied. C'est difficile, mais c'est ce qu'il faut faire.
M. Nick Jennery: Je tiens à préciser que, du point de vue des détaillants, les ventes de boeuf sont demeurées stables. On a noté des changements au niveau des prix et des coupes disponibles, et cela va continuer tout au long de la crise.
Les mises à pied au sein de notre secteur ne sont pas liées à cette crise. Nous évoluons dans un milieu compétitif. Comme ils touchent un ou deux p. 100 après impôt, il y a des gens qui font faillite, et d'autres qui font de bonnes affaires. Il s'agit d'une situation tout à fait normale.
Ce qui nous intéresse avant tout, c'est la sécurité des consommateurs et c'est le message que nous essayons de véhiculer, et avec raison. Les clients continuent de venir nous voir et d'acheter nos produits.
Par ailleurs, nous avons, entre autres, établi un partenariat avec l'Université de Guelph, mis sur pied un programme de salubrité des aliments, et offert un numéro 1-800, dans les deux langues, à l'échelle du pays, afin de permettre aux consommateurs d'avoir accès à des scientifiques, des nutritionnistes, des conseillers en économie domestique. Comme les médias parlent beaucoup de cette affaire, les consommateurs veulent en savoir plus. Nous avons constaté que les questions se font non seulement de plus en plus précises, mais aussi, de plus en plus nombreuses. Nous comptons poursuivre nos efforts sur ce front.
M. Peter Adams: Merci, monsieur Jennery, d'avoir répondu à la question. Encore une fois, je suis arrivé pendant que vous présentiez votre exposé, et je m'en excuse.
Le président: Merci, monsieur Adams.
Monsieur Hilstrom.
M. Howard Hilstrom: Merci, monsieur le président.
Nous avons parlé des détaillants. Comme Kim l'a mentionné, il y a de nombreux facteurs qui influencent la décision des gens quand ils achètent du boeuf ou un autre produit. Le prix en est un. J'aimerais que les détaillants nous garantissent que le prix ne deviendra pas prohibitif, qu'il demeurera, en fait, à un niveau extrêmement compétitif tout au long de cette crise.
J'ai du mal à croire qu'en cette période de crise nationale—nous subissons tous les jours des pertes d'environ 30 millions de dollars—les producteurs de porc et de volaille vont profiter de l'occasion pour dénoncer le fait que le prix du boeuf est en baisse parce que les stocks sont trop importants. S'ils le font, l'unité nationale va s'en ressentir.
Quand Helen Johns, la ministre de l'Ontario, a déclaré que l'Ontario devrait cesser d'importer du boeuf de l'Ouest, que s'est-il passé? Elle parle de restreindre l'accès au marché. Avez-vous essayé d'obtenir des précisions du gouvernement de l'Ontario?
M. Nick Jennery: Nous estimons que, sur le plan du marketing, les mots « canadien » et « régional » trouvent une résonance chez les consommateurs. Prenez, par exemple, l'industrie du boeuf de l'Atlantique, qui a connu un essor ces dernières années. Ces mots éveillent une certaine loyauté et résonance.
Nous n'avons jamais pensé que nous devions promouvoir le boeuf de l'Ontario. Ce n'est pas le genre de chose que feraient les détaillants canadiens. Nous vendons du boeuf canadien, non pas du boeuf régional. Cette approche ne profiterait à personne puisqu'elle laisserait entendre que la qualité du boeuf est différente, et nous n'avons pas intérêt à dire une telle chose. Le secteur du commerce de détail au Canada est tout à fait d'accord avec cette prise de position.
· (1325)
M. Howard Hilstrom: Tant mieux.
Est-ce que McDonald's du Canada fait partie de vos associations?
M. Robert Weaver: La compagnie Caravelle Foods fait partie de notre association, et elle produit les galettes de steak haché qu'utilise McDonald's. Nous avons communiqué avec elle, hier, elle nous a dit qu'elle avait commencé à utiliser de la viande importée il y a environ un an et demi de cela, et qu'elle avait cessé de le faire le 20 mai. Elle n'utilise maintenant que du boeuf canadien, ce qui devrait relancer la demande.
M. Howard Hilstrom: J'ai, ici, une lettre qui est adressée aux clients de McDonald's. Elle a été rédigée par Bill Johnson, le président-directeur général de McDonald's. La lettre dit que la chaîne McDonald's, au Canada, sert du boeuf—ce qui est très bien—essentiellement canadien à ces quelque trois millions de clients. Le boeuf vient surtout du Canada, mais aussi, depuis plusieurs années, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande. On se demande, en fait, quelle est la quantité de boeuf qui vient du Canada. Je serais très heureux de vous entendre dire, monsieur Weaver, que McDonald's suit l'exemple de la compagnie Dairy Queen du Canada et qu'il n'utilise que du boeuf canadien en cette période de crise nationale. À votre avis, McDonald's ne sert maintenant que du boeuf canadien.
M. Robert Weaver: Comme l'explique la lettre, ils ont commencé à utiliser du boeuf importé d'Océanie, c'est-à-dire de l'Australie ou de la Nouvelle-Zélande. Ils m'ont dit, hier, qu'ils avaient cessé de le faire le 20 mai. Si vous voulez leur parler directement, je peux leur demander de communiquer avec vous et de vous expliquer ce qu'ils font. Je suis certain qu'ils le feraient volontiers.
M. Howard Hilstrom: J'ai parlé aux exploitants locaux de la chaîne McDonald's, et on en trouve dans toutes les grandes villes. Je suis content de le savoir, parce que si les frontières n'ouvrent pas très, très rapidement, vous allez entendre l'expression « crise nationale économique » de plus en plus souvent. Nous faisons déjà face à une crise et elle s'aggrave de jour en jour. Donc, les grandes entreprises, les particuliers, les petites exploitations familiales—les Canadiens vont devoir se serrer les coudes et venir en aide à l'industrie.
J'ai terminé, monsieur le président.
M. Nick Jennery: Monsieur le président, si je puis me permettre, on a soulevé un point très important quand on a parlé du prix et de la concurrence. Le prix du filet est passé de 20 $ à 11,99 $ la livre—c'est sans précédent—et personne n'a dit aux détaillants de poser un tel geste. On a laissé jouer les forces du marché.
Nous sommes une industrie très transparente. J'invite les membres du comité à jeter un coup d'oeil aux encarts. Nous en avons des exemplaires. Nous sommes tout à fait disposés à rendre des comptes au public et au comité. Les prix vont demeurer compétitifs, même quand la crise sera loin derrière nous. J'en suis convaincu.
M. Robert Weaver: Donc, ce que vous espériez est arrivé. Sauf que vous auriez aimé que cela se produise plus tôt.
Le président: Merci, monsieur Hilstrom.
Avant de donner la parole au prochain intervenant, je tiens à dire qu'il y a une autre entreprise canadienne fait la promotion du boeuf néo-zélandais et australien. Il s'agit des Aliments M&M. Je sais que ce sont de grands entrepreneurs canadiens, mais dans l'un de leurs derniers encarts, ils faisaient la promotion d'un produit bien particulier, soit la viande de boeuf importée d'Océanie, plus précisément de Nouvelle-Zélande et d'Australie. Je pense qu'ils devraient plutôt suivre l'exemple de McDonald's, si c'est effectivement ce que fait McDonald's, et que les Canadiens, à tout le moins, devraient, pour l'instant, acheter du boeuf canadien.
Madame Ur.
· (1330)
Mme Rose-Marie Ur: Je voudrais poser une brève question. Ce matin, la Canada Beef Export Federation nous a donné la liste des nations commerçantes avec qui elle fait affaire. Taïwan figure au nombre de celles-ci. Je connais assez bien ce pays, puisque j'y suis allée à quelques reprises.
Savez-vous, monsieur Weaver, combien de livres de boeuf sont exportées vers Taïwan? Je sais que le pays compte environ 22 millions d'habitants, mais j'y suis allée à plusieurs reprises, et j'ai constaté qu'on y vendait très peu de boeuf. En tout cas, ce que j'ai vu ne correspondait pas au boeuf que nous avons ici, au Canada.
M. Robert Weaver: Ils en importent chaque année de plus en plus. En fait, Taïwan représente un marché opportun pour le Canada, et aussi pour le Japon, ainsi que Ted l'a mentionné.
Mme Rose-Marie Ur: Quelles coupes achètent-ils?
M. Robert Weaver: Je ne saurais vous le dire. Je peux me renseigner, mais...
Mme Rose-Marie Ur: Je trouve cela intéressant, parce que leur régime alimentaire est surtout composé...Ils ne consomment pas beaucoup de boeuf, et je me posais tout simplement la question.
M. Robert Weaver: J'ai, dans mon bureau, un graphique qui illustre l'excédent ou le déficit commercial du Canada avec les divers pays à l'échelle internationale. Taïwan et le Japon sont deux des pays avaient lesquels le Canada a un important déficit commercial. Je pense que nous devrions exercer un peu plus de pressions sur le Japon et Taïwan, et aussi sur le Mexique, en raison des excédents qu'ils affichent.
Mrs. Rose-Marie Ur: Vous avez raison.
Le président: Y a-t-il d'autres questions?
Monsieur Adams.
M. Peter Adams: Merci, monsieur le président.
D'abord, j'ai trouvé intéressante la réponse que vous avez donnée concernant les commentaires de la ministre de l'Agriculture, en Ontario. Je tiens à dire que nous avons pris note des commentaires qu'elle a fait au sujet du boeuf qui provient d'autres régions. La ville de Peterborough, d'où je viens, a immédiatement dénoncé ces propos, qui ont soulevé beaucoup de controverse. Personne en Ontario ne partage cet avis. Par ailleurs, vous avez répondu de façon plutôt prudente quand vous avez dit que vous faites la promotion du boeuf canadien.
Je ne suis pas contre le fait qu'il y ait une rivalité commerciale entre les régions du pays. Je ne m'y oppose absolument pas. Monsieur le président, je constate que le dépliant du Centre d'information sur le boeuf met l'accent sur le boeuf de l'Ouest, étant donné qu'il fait la promotion du boeuf de l'Alberta, du boeuf de l'Ouest. On en trouve à Peterborough, et il est vrai que, l'été surtout, on devrait peut-être consommer du boeuf de l'Alberta. Je ne devrais peut-être pas le dire à la télévision, puisqu'il y a des agriculteurs de ma région qui suivent la discussion. Je tenais tout simplement à dire que, à mon avis, une certaine rivalité régionale n'est pas une mauvaise chose.
Je tiens toutefois à répéter que les commentaires de la ministre de l'Agriculture de l'Ontario n'ont pas été bien reçus en Ontario.
Merci, monsieur le président.
Le président: Il n'est pas exagéré de dire que les Canadiens aiment bien le boeuf canadien, peu importe d'où il vient. Nous allons continuer d'en manger.
Je m'en voudrais de ne pas demander à M. Fortin, qui représente A & P, un des plus grands distributeurs de produits alimentaires, et surtout de viande, au pays, s'ils achètent du demi-boeuf. Achetez-vous de la carcasse de boeuf?
M. Paul Fortin: Non. Nous achetons les coupes primaires ou sous-primaires. Certains le font, mais ils sont peu nombreux. C'est le détaillant qui décide. En règle générale, nous achetons des coupes primaires ou sous-primaires que nous offrons en promotion.
Le président: Et vous, madame McKinnon? Y a-t-il quelqu'un, au sein des entreprises que vous représentez, qui en achète...? Je sais qu'il y a des petits détaillants qui achètent encore de la carcasse de boeuf.
Mme Kim McKinnon: Certains de nos membres dans l'Ouest, comme Safeway, sont en fait des transformateurs de boeuf. Donc, oui, ils en achètent.
Le président: Pouvez-vous nous dire combien se vendait le boeuf, le demi-boeuf, la semaine dernière? Le demi-boeuf qu'achète le détaillant se vend à quel prix?
Mme Kim McKinnon : Le savez-vous, Paul?
M. Paul Fortin: Non.
Le président: J'aimerais bien connaître la réponse, car je sais que la carcasse de boeuf, le demi-boeuf, se vendait 91 cents la livre—moins les déductions, bien entendu, ce qui veut dire que l'agriculteur a reçu encore moins. Et pourtant, c'est du boeuf de qualité.
Si nous avons convoqué cette réunion, c'est, entre autres, pour avoir une idée des marges de profit. Nous savons qu'il y a des abats de boucherie et autres produits du genre qui ne peuvent être vendus. Nous savons également que les établissements d'emballage ont reçu une aide de 50 millions de dollars pour qu'ils fassent de la place dans leurs congélateurs pour d'autres produits du boeuf.
Quand les agriculteurs, les producteurs primaires, ont vu le prix du boeuf baisser de 20 cents la livre—un peu plus que cela, en fait—la semaine même où le gouvernement a annoncé son programme d'aide, ils ont eu l'impression qu'on essayait d'empêcher les risques d'abus. Mon rôle est de défendre leurs intérêts, parce qu'ils ne sont pas ici aujourd'hui. Mais c'est l'impression qu'ils ont eu. Les établissements d'emballage ont des explications à fournir aux Canadiens, et surtout aux agriculteurs. Les consommateurs, eux, font peu de cas de cette histoire, parce qu'ils paient le prix demandé. Personne n'a laissé entendre que les prix devraient baisser de façon radicale. Je ne pense pas que cela soit nécessaire. Les consommateurs savent ce que vaut un produit, et ils sont prêts à payer le prix demandé.
Je sais que les agriculteurs ne représentent qu'une partie de l'équation, mais le problème ne s'arrête pas là, car une fois que la frontière sera ouverte de nouveau, ils n'auront pas d'argent pour acheter ces veaux, cet automne. Où vont-ils aller? Au sud de la frontière, et il n'y aura plus de viande à emballer d'ici un an.
Donc, il y a beaucoup de choses à dire sur le sujet. Nous n'avons entendu qu'un seul point de vue aujourd'hui. Je pense que les consommateurs canadiens ont le droit de savoir. La situation est grave. L'industrie connaît de sérieuses difficultés, non seulement à votre niveau, mais également au niveau des emballeurs et des détaillants. Nous savons que les marges de profit sont très faibles, mais nous savons aussi qu'il y a quelqu'un qui fait beaucoup d'argent à l'heure actuelle.
Nous voulons tout simplement savoir si, mis à part les 50 millions de dollars qui ont été annoncés, les établissements d'emballage ont commencé à recevoir de l'aide?
· (1335)
M. Robert Weaver: Non, et ils n'ont pas reçu les formulaires.
Ce que je sais, c'est que les emballeurs m'ont dit que l'industrie doit procéder à l'emballage d'environ 65 000 bêtes par semaine si elle veut atteindre le seuil de rentabilité. En deçà de ce chiffre, elle risque de se retrouver dans le rouge. Ils en sont maintenant à 46 000 bêtes, et ils ne savent toujours pas ce que leur réserve l'avenir.
Le président: Nous savons que les établissements d'emballage sont inquiets, et c'est pour cela que nous voulions les rencontrer aujourd'hui. Ils ne sont pas ici, et je trouve cela dommage. Je vous remercie, M. Weaver, de défendre leurs intérêts, mais nous aimerions bien les rencontrer à un moment donné. Ils sont inquiets, et ils doivent nous dire pourquoi.
Madame McKinnon, avez-vous un commentaire à faire?
Merci d'être venue nous rencontrer.
Oui, monsieur Hilstrom.
M. Howard Hilstrom: Dans le même ordre d'idées, je pense qu'avant le 20 mai, on payait 1,85 $ la livre pour...
Le président: Le prix exact était 1,8460 $.
M. Howard Hilstrom: Vous avez dit 1,8460 $. Au lieu de nous laisser discuter de la question de savoir si le boeuf se vend 35 cents ou 1,85 $ la livre et qui empoche l'argent, l'industrie devrait nous fournir des chiffres concrets et expliquer aux producteurs, entre autres, qu'elle ne réalise pas des profits énormes. Je ne crois pas qu'elle soit en train de réaliser des profits énormes, mais comme l'industrie ne fonctionne pas comme elle le fait en temps normal, les coûts sont beaucoup plus élevés. C'est, à n'en pas douter, un point important.
Le président: Je ne veux pas m'éterniser là-dessus, mais le prix est passé, dès le 9 mai, de 1,8460 $ la livre à 91 cents la livre, ce qui représente moins de 50 p. 100 du prix en vigueur à ce moment-là. Il y a des questions qui restent sans réponses, et ces réponses, nous les voulons.
Je tiens à vous remercier d'avoir répondu si rapidement à notre invitation et de nous avoir aidé à comprendre le point de vue de l'industrie. Nous vous en sommes reconnaissants.
Merci beaucoup.
J'invite les membres du comité à rester sur place pendant quelques minutes. Nous allons nous réunir brièvement à huis clos, et ensuite, nous allons lever la séance.
Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes afin de libérer la salle.
[La réunion se poursuit à huis clos.]