FEWO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de la condition féminine
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 7 décembre 2004
Á | 1115 |
La présidente (Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.)) |
Mme Jane MacDonald (consultante en soins de santé primaires, Association des infirmières et infirmiers du Canada) |
Á | 1120 |
La présidente |
Mme Margaret Haworth-Brockman (directrice exécutive, Centre d'excellence pour la santé des femmes des Prairies) |
Á | 1125 |
Á | 1130 |
La présidente |
Mme Abby Lippman ( professeure, Université McGill; vice-présidente, Réseau canadien pour la santé des femmes) |
Á | 1135 |
La présidente |
Á | 1140 |
Mme Nina Grewal (Fleetwood—Port Kells, PCC) |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
La présidente |
Mme Jane MacDonald |
Mme Abby Lippman |
Á | 1145 |
La présidente |
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, PCC) |
Mme Jane MacDonald |
Mme Lynne Yelich |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
La présidente |
Mme Paule Brunelle (Trois-Rivières, BQ) |
Á | 1150 |
Mme Abby Lippman |
Mme Jane MacDonald |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
La présidente |
Mme Paule Brunelle |
Á | 1155 |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
La présidente |
Mme Jane MacDonald |
Mme Susan Kadis (Thornhill, Lib.) |
La présidente |
Mme Jane MacDonald |
Mme Susan Kadis |
Mme Jane MacDonald |
La présidente |
Mme Jane MacDonald |
Mme Lynne Yelich |
Mme Abby Lippman |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
 | 1200 |
La présidente |
Mme Susan Kadis |
Mme Jane MacDonald |
Mme Abby Lippman |
La présidente |
Mme Jean Crowder (Nanaimo—Cowichan, NPD) |
Mme Abby Lippman |
 | 1205 |
Mme Jane MacDonald |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
La présidente |
Mme Helena Guergis (Simcoe—Grey, PCC) |
 | 1210 |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
Mme Abby Lippman |
 | 1215 |
La présidente |
L'hon. Paddy Torsney (Burlington, Lib.) |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
 | 1220 |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Abby Lippman |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Abby Lippman |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Abby Lippman |
La présidente |
Mme Jane MacDonald |
La présidente |
Mme Monique Guay (Rivière-du-Nord, BQ) |
 | 1225 |
Mme Jane MacDonald |
Mme Abby Lippman |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
Mme Monique Guay |
Mme Abby Lippman |
 | 1230 |
La présidente |
Mme Jean Crowder |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
Mme Jean Crowder |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
Mme Jean Crowder |
Mme Abby Lippman |
 | 1235 |
Mme Jane MacDonald |
La présidente |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
 | 1240 |
Mme Abby Lippman |
Mme Jane MacDonald |
Mme Abby Lippman |
La présidente |
Mme Helena Guergis |
Mme Jane MacDonald |
Mme Helena Guergis |
Mme Jane MacDonald |
Mme Helena Guergis |
Mme Abby Lippman |
 | 1245 |
Mme Helena Guergis |
Mme Abby Lippman |
Mme Helena Guergis |
Mme Abby Lippman |
La présidente |
Mme Susan Kadis |
Mme Margaret Haworth-Brockman |
Mme Abby Lippman |
Mme Jane MacDonald |
La présidente |
L'hon. Paddy Torsney |
 | 1250 |
La présidente |
Mme Paule Brunelle |
Mme Jane MacDonald |
La présidente |
Mme Lynne Yelich |
Mme Jane MacDonald |
Mme Lynne Yelich |
Mme Abby Lippman |
 | 1255 |
La présidente |
CANADA
Comité permanent de la condition féminine |
|
l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 7 décembre 2004
[Enregistrement électronique]
* * *
Á (1115)
[Traduction]
La présidente (Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.)): Bonjour à toutes, et merci d'être venues.
J'aimerais commencer par rappeler aux membres que c'est la première fois que nous siégeons dans cette salle et que les délibérations d'aujourd'hui sont télévisées, que les caméras tournent.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins. Avant que vous commenciez, j'aimerais vous présenter nos excuses pour le bref préavis que vous avez eu avant la séance. Nous avons organisé ces discussions à la dernière minute car nous ne savions pas que nous disposions du budget, et le choix du moment était important. Mais nous sommes heureuses que vous soyez ici et d'entendre ce que vous avez à nous dire.
Je dois encore vous présenter mes excuses, car il y aura des allées et venues chez mes collègues. Je sais que certaines d'entre elles ne sont pas bien et qu'elles pourraient devoir partir. C'est une mauvaise période de l'année, mais nous ferons de notre mieux.
Nous allons commencer, car nous avons déjà pris du retard.
J'invite Jane MacDonald, de l'Association des infirmières et infirmiers du Canada, à commencer son exposé.
Mme Jane MacDonald (consultante en soins de santé primaires, Association des infirmières et infirmiers du Canada): Merci beaucoup au comité.
Je m'appelle Jane MacDonald. J'ai le plaisir de représenter l'Association des infirmières et infirmiers du Canada.
Au Canada, il y a plus de 230 000 infirmières et infirmiers diplômés. Ils représentent le plus grand groupe professionnel à travailler dans le système de santé canadien, et ce groupe se compose à 95 p. 100 de femmes. La profession infirmière est intimement liée aux effets de sa composition traditionnelle. Malgré un siècle de progrès, la profession souffre depuis longtemps de l'impression qu'il faut peu de formation pour en faire partie, qu'il s'agit d'un talent inné chez les femmes, et que les infirmières et infirmiers ne sont que les aides silencieux des médecins.
Par conséquent, les infirmières et infirmiers ont souvent négligés par les décideurs, tenus à l'écart des décisions concernant le système de santé, sous-payés et sous-estimés. La vérité, c'est que les hommes ne se bousculent pas pour entrer dans cette profession, et c'est là un contraste avec la mixité que nous constatons dans les autres professions de la santé. Tous les sondages de l'opinion publique indiquent que les infirmières et infirmiers forment le groupe professionnel qui suscite le plus de confiance, mais qu'il perçoit un manque de respect envers la profession. Les membres sont insatisfaits de leurs conditions de travail, de la faible part qu'ils prennent aux décisions concernant le milieu de travail et la pratique, et du degré de violence en milieu de travail. Beaucoup d'infirmières et d'infirmiers estiment être traités comme un poste budgétaire à augmenter ou à éliminer en fonction de la conjoncture économique.
Dans ce milieu, la difficulté d'équilibrer les soins à donner aux enfants et aux personnes âgées peut s'opposer à des horaires de travail parfois inflexibles ou imprévisibles. Pour que le système continue de fonctionner, des membres de la profession, surtout des femmes, travaillent plus d'heures supplémentaires que dans toute autre profession. Il n'est peut-être pas surprenant de constater que depuis 15 ans, c'est le groupe professionnel du Canada qui présente le plus fort taux d'absentéisme.
Outre les difficultés liées au rythme et à la charge de travail, la violence psychologique et physique, l'intimidation et le harcèlement sexuel figurent encore parmi les réalités de beaucoup de membres de la profession. Dans ce milieu, les patients et le personnel dirigent encore leurs comportements violents vers les travailleuses, et les infirmières sont les dispensatrices de soins les plus visibles dans la plupart des établissements de santé. Ainsi, en Alberta, 40 p. 100 des infirmières interrogées ont dit qu'elles avaient subi au moins un incident de violence psychologique au cours de leurs cinq derniers quarts de travail.
Le rôle des directeurs de services infirmiers est important pour les infirmiers et infirmières, peu importe où ils en sont dans leur carrière, mais il est indispensable pour les débutants. À cause des réductions budgétaires, beaucoup de postes de gestion de première ligne ont été supprimés ou des gestionnaires ont été obligés d'accepter plus de responsabilités, ce qui compromet leur capacité de bien superviser leur personnel. Au Canada, quelque 5 500 postes de gestion des soins infirmiers ont été éliminés entre 1994 et 2000. Outre l'élimination de la supervision des débutants et du soutien qui semblent essentiels au démarrage de carrières fructueuses en soins infirmiers, les infirmières et infirmiers estiment que l'érosion du rôle des infirmières et infirmiers-chefs a réduit leur participation aux décisions concernant les directives et l'allocation.
Les restrictions et réductions budgétaires de la dernière décennie ont aussi produit une augmentation des postes à temps partiel et temporaires. Dans bien des cas, les emplois à temps partiel et temporaires constituent les seuls points d'entrée dans l'effectif, ce qui réduit l'attrait des soins infirmiers comme carrière. Les finissants, très endettés par leurs études, se sentent obligés de trouver un emploi à temps plein, souvent dans un autre pays, pour rembourser leur dette. Au chapitre du statut d'emploi, il est important de comprendre que beaucoup d'infirmières et d'infirmiers qui ont des emplois à temps partiel travaillent en fait à temps plein, ou même plus. Ils le font en travaillant dans plusieurs unités du même établissement, ou pour des employeurs multiples afin de gagner l'équivalent d'un salaire à temps plein. Dans certains cas, ils fournissent ces services à un coût élevé pour le système. Le fait est que le travail est là et qu'il est rémunéré. Il y a des infirmières et infirmiers prêts à répondre aux besoins, mais la non-correspondance entre l'effectif disponible et le travail offert oblige tous les intervenants à se débattre.
En terminant, l'Association des infirmières et infirmiers du Canada estime qu'il reste beaucoup à faire pour améliorer le milieu de travail et les pratiques qui pénalisent une main-d'oeuvre majoritairement féminine en perpétuant les emplois temporaires, le besoin d'occuper de multiples postes, et les inégalités de longue date en matière de pouvoir et de prise de décision. L'Association des infirmières et infirmiers du Canada a demandé au gouvernement fédéral de se pencher sur ces questions en dirigeant un ensemble d'activités—et en y participant— destinées à renforcer la profession infirmière et à augmenter les ressources humaines dans le secteur de la santé.
Merci beaucoup.
Á (1120)
La présidente: Merci beaucoup.
Je suis simplement l'ordre du jour.
Margaret, s'il vous plaît.
Mme Margaret Haworth-Brockman (directrice exécutive, Centre d'excellence pour la santé des femmes des Prairies): Bonjour. Je suis ravie d'être ici. Je suis la directrice exécutive du Centre d'excellence pour la santé des femmes des Prairies, qui a des bureaux au Manitoba et en Saskatchewan; je suis heureuse de présenter cet exposé au comité permanent. Je présenterai aussi un mémoire écrit à une date ultérieure.
Je comparais à titre professionnel, mais aussi en tant que femme canadienne. Mes propos seront donc de nature professionnelle et personnelle. L'objectif que je poursuis en m'adressant à vous aujourd'hui est de décrire les domaines dans lesquels le Centre d'excellence pour la santé des femmes des Prairies travaille, et de formuler des recommandations importantes sur les déterminants sociaux de la santé, et sur l'amélioration de la santé des femmes, de leur famille et de leur collectivité.
Le Centre d'excellence pour la santé des femmes des Prairies reçoit son financement de base du Bureau pour la santé des femmes et, dans le cadre du Programme de contribution pour la santé des femmes, nous dirigeons un programme complet de recherche, de conseils stratégiques et de communications. Nous avons un vaste réseau de collègues et d'associées parmi les femmes qui travaillent en recherche universitaire, dans la fonction publique et les services régionaux de santé, et parmi nos homologues de tout le pays.
Le Centre d'excellence, qui concentre ses activités au Manitoba et en Saskatchewan, est reconnu pour sa recherche pratique, crédible et pertinente pour les femmes qui vivent ici et qui souhaitent prodiguer des soins et un soutien appropriés. Nous avons pour mandat de mieux comprendre l'influence des facteurs sociaux sur la santé des femmes, particulièrement des femmes qui n'ont pas bien été représentées jusqu'ici dans la recherche et les discussions sur les orientations stratégiques. Nous avons de minuscules bureaux au Manitoba et en Saskatchewan, qui constituent un point de rencontre vital pour les femmes de ces provinces souvent laissées pour compte.
Ces dernières années, nous nous sommes surtout attardées à mieux comprendre les problèmes de santé des femmes pauvres, des femmes autochtones, de celles qui vivent dans les régions rurales et nordiques éloignées, y compris bien sûr le lien entre ces trois groupes, ainsi que la prise en compte des disparités hommes-femmes dans la planification sanitaire et les services de santé. J'aimerais parler brièvement de chacun de ces quatre éléments et vous soumettre quelques recommandations.
La santé ne se borne pas à la gestion des soins de courte durée ni à l'utilisation de la technologie de pointe, même si ce sont des éléments très importants de la qualité des soins de santé. Plutôt, la santé est tributaire de la satisfaction des besoins fondamentaux—un revenu suffisant, un logement, de l'eau propre, une alimentation saine et la participation aux décisions qui nous touchent de près. Il existe des preuves irréfutables selon lesquelles la santé des gens est profondément influencée par des déterminants sociaux et économiques, et on sait aussi qu'un investissement substantiel dans ces facteurs sociaux peut considérablement améliorer la santé.
Malgré des gains réels pour les femmes en général au Canada au chapitre de l'équité, ce sont encore surtout des femmes qui subissent le poids de la pauvreté dans ce pays. Elles sont plus susceptibles d'être pauvres, surtout si elles sont âgées, membres d'une minorité visible, autochtones ou handicapées. Bien sûr, beaucoup de femmes présentent plusieurs de ces caractéristiques. Les femmes représentent la majorité des assistés sociaux, et elles sont surreprésentées parmi les travailleurs pauvres car, souvent, elles occupent des emplois précaires et mal rémunérés.
Le discours qui prévaut dans ce pays a attiré notre attention sur le sort des enfants qui vivent dans la pauvreté, et les statistiques à cet égard sont épouvantables. Mais nous devons reconnaître que si les enfants sont privés, ils vivent sans doute avec des parents, leur mère pour la plupart, qui sont aux prises avec la pauvreté. Le travail accompli au Centre d'excellence pour la santé des femmes des Prairies a permis de souligner l'évaluation que les femmes pauvres font elles-mêmes des effets de la pauvreté sur leur santé et celle de leur famille, ainsi que les avantages de services adéquats, surtout d'un bon logement.
La prévention de la maladie par la promotion, en premier lieu, de conditions sociales et de vie propices à un mode de vie sain a été négligée. En éliminant le Régime d'assistance publique du Canada et en créant le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, on a évacué les principes sous-jacents au RAPC, qui garantissaient le droit des citoyens à un revenu de base et à d'autres biens de première nécessité. La réduction des dépenses fédérales et la souplesse accrue dans l'utilisation des fonds publics signifient que le financement global a été dirigé vers les soins de santé, au détriment de l'aide sociale et d'autres programmes, en dépit d'une multitude de travaux de recherche qui démontrent l'importance d'un revenu suffisant et de services sociaux pour protéger la santé de la population. Nous espérons que le travail de la nouvelle Agence de santé publique du Canada, notamment dans le domaine de la promotion de la santé de la population, constituera une contribution marquante.
Je ne saurais me prononcer au nom des femmes métisses, de celles des Premières nations et des autres femmes autochtones, mais, au Centre d'excellence, nous avons eu le privilège de travailler avec beaucoup de femmes autochtones, y compris au sein de notre conseil d'administration et de notre personnel. Grâce au soutien et à l'habilitation des femmes de la collectivité, on constate une augmentation—encore modeste—des travaux effectués par des femmes autochtones, qui emploient leurs propres méthodes.
Nous recommandons que le gouvernement fédéral continue d'appuyer la recherche et les méthodes de recherche locales, qu'il reconnaisse que la collectivité des femmes autochtones se bat pour obtenir une représentation adéquate dans les tribunes fédérales et nationales, et que les préoccupations des femmes métisses, des Premières nations, inuites et des autres peuples autochtones diffèrent selon la région, les droits juridiques et les collectivités. L'appui soutenu au Groupe de recherche sur la santé et la guérison des femmes autochtones, en voie de devenir un centre d'excellence, peut transformer la manière dont la santé des femmes autochtones est conceptualisée et protégée.
Á (1125)
J'ai eu la chance de participer à un grand projet national sur les préoccupations sanitaires des femmes qui vivent en milieu rural—éloigné—et nordique au Canada. Cette étude a permis de faire un certain nombre de constatations importantes, mais la principale était que les femmes se sentent à l'écart des décisions concernant la santé et les soins de santé, bien que de nombreuses réformes des soins de santé aient été réalisées au nom de l'accès pour les collectivités locales et de l'adaptation à leurs besoins.
En fait, les femmes nous disent avoir l'impression que les décisions sont prises sans elles et que des solutions urbaines leur sont imposées sans égard aux répercussions sur les petites collectivités. Les femmes des milieux ruraux comprennent qu'il y a pénurie de médecins et de personnel infirmier, mais elles nous rappellent que les soins de santé peuvent être incombent aussi à d'autres fournisseurs, tels les dentistes, les sages-femmes, les thérapeutes et les intervenants de la santé mentale. L'accès aux soins pour les femmes des milieux ruraux et leur famille peut reposer sur des modèles de collaboration communautaire.
Les besoins des hommes et des femmes en matière de santé sont différents et, par conséquent, le fait d'être un homme ou une femme est considéré comme un déterminant de la santé. De plus, alors que les relations familiales évoluent, les femmes continuent d'être les principales soignantes pour elles-mêmes et leur famille. Par ailleurs, la majorité des employés des services de santé sont des femmes, comme ma collègue l'a souligné. Leur importante participation au système de santé donne aux femmes une perspective unique sur ce qui fonctionne et sur les changements qui pourraient rehausser son efficacité. Il faut faire une analyse comparative minutieuse des politiques pour comprendre les répercussions différentes sur les hommes et les femmes, et pour formuler d'autres solutions stratégiques afin d'améliorer la santé des femmes.
Ce que nous constatons au Centre d'excellence pour la santé des femmes des Prairies, c'est que tandis qu'on insiste sur les indicateurs et les résultats, les données spécifiques aux hommes et aux femmes ne sont pas disponibles et que, par conséquent, ces analyses sont très difficiles à effectuer.
Pour conclure, j'aimerais soumettre quelques recommandations.
Nous proposons que l'on donne suite aux engagements fédéraux envers l'égalité entre les hommes et les femmes, et que l'on effectue une analyse comparative entre les sexes à tous les échelons de l'élaboration des politiques et des programmes. Il faudrait notamment que toutes les propositions reposent manifestement sur une analyse comparative et de la diversité, et garantir que l'argent dépensé le soit en vertu de politiques fondées sur une analyse comparative entre les sexes.
Nous vous demandons de reconnaître la complexité des voies par lesquelles le revenu et le fait d'être un homme ou une femme influent sur la santé, et le fait que la santé représente un concept culturel et social.
Nous vous recommandons de soutenir les femmes autochtones et de renforcer leur position dans leur collectivité, et de comprendre les importants concepts de la santé ainsi que la manière dont ils varient d'une collectivité à l'autre, pour les femmes des Premières nations, les Métisses, les Inuites et les autres femmes autochtones.
Nous vous demandons de prendre au sérieux la pauvreté chez les femmes, d'éliminer cette pauvreté au nom du droit inhérent des femmes à un niveau de vie décent, pas seulement à cause de leur place dans la famille.
Nous vous proposons de rétablir les politiques et directives fédérales qui requièrent le maintien du droit à la sécurité du revenu malgré la manière dont les transferts de fonds et les responsabilités sont gérés.
Nous vous demandons de produire des logements abordables pour les femmes à faible revenu, et de veiller à ce que le gouvernement fédéral tienne son engagement à fournir de nouveaux fonds et des stratégies pour le logement social à l'intention des citoyens à faible revenu, en s'inspirant de solutions locales et en consultant les femmes des collectivités.
Nous recommandons aussi que le financement des activités de base soit rétabli pour ce qui est des ressources et des organismes communautaires. Le bénévolat ne permet pas de soutenir l'effort qui est requis. Grâce à une infrastructure de base, le travail peut se poursuivre et les membres des collectivités peuvent soutenir et intensifier l'effort fourni jusqu'à maintenant.
Merci.
Á (1130)
La présidente: Abby Lippman.
[Français]
Mme Abby Lippman ( professeure, Université McGill; vice-présidente, Réseau canadien pour la santé des femmes): Merci et bonjour. C'est avec beaucoup de plaisir que je me joins à vous aujourd'hui. Je parlerai en anglais
[Traduction]
afin de ne pas écorcher trop d'oreilles, puisque mon accent, en français et en anglais, trahit mes origines new-yorkaises.
Je suis très heureuse d'être ici. Je représente le Réseau canadien pour la santé des femmes. Je suis coprésidente du conseil d'administration de ce Réseau. C'est à ce titre que je comparais, mais je laisserai probablement aussi échapper quelques commentaires de nature personnelle.
J'aimerais vous brosser le portrait du Réseau. Le Réseau canadien pour la santé des femmes est un réseau national bilingue d'individus, d'organismes et d'établissements qui s'intéressent à la santé des femmes. C'est un centre d'information sur la santé des femmes, qui communique cette information ainsi que des conseils stratégiques aux fournisseurs de soins de santé, aux décideurs, aux médias et au grand public. Tout comme le Centre d'excellence pour la santé des femmes des Prairies, nous sommes membres du Programme des centres d'excellence pour la santé des femmes, qui reçoit l'appui du Bureau sur la santé des femmes. Le RCSF siège à son comité directeur.
Nous jouons également un rôle important au sein de deux groupes de travail nationaux qui reçoivent l'appui de Santé Canada: l'un d'eux est le Comité coordonnateur des femmes et la réforme en santé, et l'autre, l'Action pour la protection de la santé des femmes. Parmi mes autres fonctions, je siège au comité directeur de l'Action pour la protection de la santé des femmes.
Le RCSF est dirigé par des administrateurs bénévoles. Les membres du conseil sont notamment des chercheurs universitaires, des praticiens de la santé et des éducateurs.
Je vais passer rapidement d'un point à l'autre. On nous a donné un préavis très court et peu de temps pour présenter notre exposé. Une grande partie de mes propos font écho à ceux de Margaret, bien que nous ne nous soyons pas consultées pour préparer nos exposés. L'une vient du Québec, et l'autre du Manitoba; c'est ainsi.
Essentiellement, mon principal message est que même si le sujet d'aujourd'hui est la santé, j'espère que vous continuerez de tenir compte du fait que tous les autres aspects qui relèvent de votre mandat, qu'il s'agisse d'enjeux économiques, de justice sociale ou de problèmes internationaux, sont liés à la santé. La santé des femmes doit être envisagée dans une perspective globale. Tout est relié: les enjeux économiques, les questions qui touchent les régions rurales, les politiques d'aide sociale—Margaret vous l'a déjà dit—pour ne donner que quelques exemples. Les conditions de travail sont également importantes, et Jane MacDonald vous l'a dit. Tout influe sur la santé des femmes et des filles.
Cela ne signifie pas que la santé devrait dominer le travail de chacun, partout dans le monde. Ce n'est pas ce que nous préconisons, loin de là. Nous voulons que les répercussions sur la santé soient prises en compte dans les orientations stratégiques qui semblent n'avoir aucun lien avec la santé. Le lien qui existe entre tous ces domaines est probablement le fait que la santé des femmes doit être considérée dans le contexte des droits de la personne et de la justice sociale. Il ne suffit pas de lutter contre la maladie. Il faut aussi considérer les femmes dans le contexte de l'égalité et du droit à l'égalité.
Les cinq points dont je veux parler seront abordés dans le document que nous espérons présenter.
Le premier est le suivant. En 1999, le ministre de la Santé de l'époque a annoncé la Stratégie sur la santé des femmes. Elle était assortie d'un ensemble de promesses ambitieuses et elle était censée paver la voie à des interventions futures. Pour garantir que cette stratégie tienne ses promesses, le RCSF prie instamment ce comité d'inviter le ministre actuel à lui fournir un état de la situation qui décrirait en termes précis et concrets les résultats et les progrès obtenus en regard de la Stratégie pour la santé des femmes de 1999.
Tout le monde aime les examens quinquennaux. Si vous l'invitez maintenant, votre invitation coïncidera avec l'échéance de cinq ans, même s'il ne comparaît pas avant la sixième année.
Nous pressons aussi ce comité de demander au ministre de renouveler la Stratégie, voire d'en élaborer une nouvelle qui s'appliquera pendant la prochaine décennie. Ce qui est essentiel, ce sont des politiques qui tiennent compte des intérêts stratégiques des femmes, pas seulement de leurs besoins immédiats, bien que ces derniers soient importants si nous voulons garantir un changement durable. Les stratégies sont importantes. Nous ne sommes généralement pas friandes des méthodes à la mode, mais la stratégie frappe l'imagination du public et fournit des critères d'évaluation; elle favorise l'élaboration de démarches multisectorielles.
Deuxièmement, au moment d'élaborer cette stratégie renouvelée ou nouvelle, le Réseau canadien pour la santé des femmes vous presse instamment de demander au ministre d'intensifier les timides tentatives pour intégrer l'analyse comparative entre les sexes dans toutes les politiques gouvernementales, de manière à garantir que les femmes et les enjeux qui les concernent sont véritablement pris en compte. Margaret a aussi soulevé cette question, et je ne ferai que la souligner.
Á (1135)
Récemment, des rapports ont été publiés, et je mentionnerai le rapport Romanow, plus particulièrement ses chapitres sur les soins à domicile et l'assurance-médicaments, sur la stratégie en matière de santé mentale et celle stratégie sur un mode de vie sain qui, à notre avis, ne semblent pas avoir pleinement tenu compte de la manière dont ces domaines touchent les femmes différemment des hommes. Les liens qui existent entre les disparités hommes-femmes et la politique sur la santé n'ont pas été adéquatement pris en compte par le passé, et les engagements préalables de l'État nous poussent à insister sur une analyse comparative entre les hommes et les femmes ou,
[Français]
si on veut suivre la méthode utilisée au Québec, les analyses féministes intégrées.
[Traduction]
Il faut toujours que le sexe soit un thème transversal, ce qui ne signifie pas de simplement présenter des données regroupées par sexe, aussi bienvenues soient-elles. Les données regroupées ne font que pointer vers une différence entre les hommes et les femmes sur un thème donné, mais la véritable question est de savoir pourquoi il existe une pareille différence. Quand il n'y a pas de données regroupées par sexe, il faut se demander pourquoi il n'y en a pas. L'absence d'un écart est tout aussi éloquent que sa présence.
Troisième point, toujours dans l'idée de relier les points entre eux, j'appliquerais maintenant le principe à un domaine précis. À notre avis, certains autres genres de rapports ne sont pas établis quand, dans des discussions sur la réforme des soins de santé primaires, on ne porte pas une attention particulière à l'accès réduit des femmes à des maisons de naissance qui offrent sécurité et soutien, pas plus qu'on ne s'arrête au taux de plus en plus élevé d'infertilité et d'infections transmises sexuellement. C'est vrai qu'on a besoin de services axés sur les femmes, mais il faut aussi apporter des changements structuraux qui permettront en réalité aux femmes de faire ces choix.
Nous sommes nettement favorables au renforcement des services et des programmes de soins primaires, à l'idée d'élargir le genre de fournisseurs de soins de santé qui sont inclus et de traiter ceux qui sont considérés comme étant les fournisseurs les plus courants avec le respect qui leur est dû pour répondre à leurs besoins.
Malheureusement, trop souvent, répondre à un besoin de soins primaires est encore perçu comme le fait d'administrer un médicament. Le RCSF est très préoccupé par l'influence indue des pharmaceutiques et de l'industrie biotechnique qui embrouille le programme de santé. La fabrication de pilules semble être la priorité numéro un en soins primaires. La médicalisation se poursuit au même rythme, et il faut investir dans des moyens concrets de prévention et de promotion de la santé. Je pourrai vous en donner des exemples plus tard, si vous le désirez.
Ensuite, parmi les autres points qu'il faut relier aux questions de santé intéressant les femmes, il ne faut pas oublier ceux qui sont centrés sur les politiques et les pratiques qui mènent à une croissance soutenue de la féminisation de la pauvreté au Canada.
Je vous jure que nous ne nous sommes pas concertées.
À nouveau, tout comme pour les analyses comparatives entre les sexes, on semble s'arrêter à la forme plus qu'au fond lorsqu'il s'agit des déterminants structurels de la santé. On en trouvera une énumération complète dans la « Stratégie pour la santé des femmes » de 1999, mais on semble les avoir en grande partie oubliés lors de l'élaboration subséquente des politiques, politiques qui selon nous entraîneront encore plus d'iniquité chez les femmes et creuseront davantage le fossé entre les hommes et les femmes.
Quand on demande au ministre de la Santé—ce que nous espérons que vous ferez—si la stratégie pour la santé des femmes va être renouvelée, il faut faire en sorte de connaître avec précision la façon dont les déterminants seront pris en compte et savoir pourquoi, comme nous estimons que c'est le cas, on a si peu donné suite à tout ce qui est connu au sujet des conditions de risque dans lesquelles vivent les femmes et comment elles nuisent à la santé. Pourquoi persiste-t-on à tort à mettre l'accent sur des comportements individuels plutôt que sur les conditions sociales qui limitent ou accroissent ce que peuvent faire les femmes pour demeurer en santé?
La dernière observation que j'aimerais vous faire aujourd'hui est la suivante. Une façon de réagir à cette absence de mobilisation est de dire que nous avons besoin—à nouveau, cela rejoint ce que disait Margaret—d'une société civile active, prospère et saine pour faire en sorte que les divers points entre les politiques sociales, économiques et autres sont reliés à la santé. Malheureusement, la capacité de fonctionnement de ces groupes a été gravement entamée par la baisse du financement de base des groupes de revendication des femmes et de revendication de l'équité. L'attention constante portée aux partenariats public-privé a détourné le gouvernement du fait qu'il est peut-être possible de faire plus en vue de promouvoir et de protéger la santé des femmes. Il faut réinvestir dans les groupes communautaires, dans la société civile, pour qu'ils puissent travailler avec les femmes aux préoccupations qui leur sont propres en matière de santé.
En guise de conclusion, le RCSF est très heureux de voir que votre groupe a mis la santé à son programme de travaux et il espère que vous réussirez à relier les points entre eux de manière à aboutir véritablement à la promotion et à l'amélioration de la santé des filles et des femmes au Canada. Le RCSF s'engage à collaborer avec vous et avec tous les autres à l'atteinte de ces objectifs.
Je vous remercie.
La présidente: Je vous remercie beaucoup.
Permettez-moi simplement de donner quelques explications. J'ignore si c'est la première fois que vous venez témoigner devant un comité, mais nous avons des règles de fonctionnement. Il existe un ordre de préséance pour prendre la parole. Le premier tour de table est de sept minutes pour chaque intervenant, ce qui inclut à la fois la question et la réponse. Je suis plutôt souple en tant que présidente, mais j'essaie tout de même de maintenir un certain ordre.
Qui, chez les conservateurs, va être le premier? Notre vice-présidente, madame Grewal.
Je vous remercie.
Á (1140)
Mme Nina Grewal (Fleetwood—Port Kells, PCC): Merci, madame la présidente.
J'aimerais remercier Jane, Abby et Margaret d'avoir pris la peine de venir nous faire des exposés. Ils nous seront certes très utiles. Je vous en suis reconnaissante.
La Colombie-Britannique a annoncé une stratégie provinciale pour la santé des femmes, en octobre 2004, en faisant ressortir les enjeux importants de la santé pour les femmes en Colombie-Britannique, par exemple la santé mentale, l'utilisation problématique de substances et les toxicomanies, les maladies cardiovasculaires, le diabète, le VIH/sida, le cancer du poumon et du sein et les chutes.
En fait-on assez pour les femmes à l'égard de ces enjeux en matière de santé partout au pays? Quelles sont certaines des approches de promotion de la santé et de prévention de la maladie utilisées en réponse à ces préoccupations? Quel a été le rôle du gouvernement fédéral à l'égard d'enjeux comme les toxicomanies, la santé mentale et la prévention de la maladie chez les femmes?
Mme Margaret Haworth-Brockman: Cette stratégie pour la santé a été élaborée en collaboration avec ma collègue Lorraine Greaves, du Centre d'excellence de la Colombie-Britannique pour la santé des femmes, de sorte que je connais plutôt bien l'historique du dossier.
En fait-on assez dans les domaines que vous avez mentionnés? On peut toujours dire que ce n'est jamais assez. Par le passé, on n'a jamais vu les femmes comme un groupe distinct de celui des hommes, mais la situation s'améliore de ce côté-là. Les essais cliniques sont plus précis, et on tient compte des besoins différents de gestion et de traitement pour les femmes. La situation est certes en train de changer.
Toutefois, pour ce qui est du VIH/sida par exemple, nous allons constater, comme le dirait ma collègue venue de l'autre bout du pays, Barbara Clow, que les femmes risquent plus d'avoir le VIH/sida en raison des conditions socio-économiques dans lesquelles elles vivent.
Voyons à titre d'exemple ce qui s'est passé dans certains pays comme l'Afrique du Sud, qui se croyait à l'abri par rapport aux autres pays du continent. Voyez dans quel état elle se trouve actuellement. Nous craignons que le même phénomène ne se produise au Canada si des mesures appropriées ne sont pas prises pour tenir compte des besoins particuliers des femmes.
Il est constamment question de la santé mentale des femmes. Je crois que c'est en grande partie attribuable au fait que les femmes subissent de nombreuses pressions, qu'elles ont une charge de travail, un rôle et des responsabilités différents et qu'elles ont le sentiment de manquer de pouvoir quand vient le temps de prendre des décisions qui les intéressent, que ce soit au sein de leur ménage ou au travail.
Je vais m'arrêter là et laisser ma collègue prendre la relève.
La présidente: Jane MacDonald, après quoi ce sera à nouveau votre tour, madame Lippman.
Mme Jane MacDonald: Je vois deux questions. Vous avez demandé ce que le gouvernement fédéral faisait. Le Fonds pour l'adaptation des soins de santé primaires finance des projets innovateurs partout au Canada, à la recherche de différentes façons de soutenir les collectivités qui travaillent aux soins de santé primaires. Un de ces moyens est de passer par les centres de santé communautaire qui s'attaquent à certaines des questions que vous et vos collègues examinez en vue d'accroître la participation des collectivités locales, des personnes qui vivent dans la collectivité, à leurs soins de santé. Il existe donc des moyens innovateurs qui sont envisagés. Ce n'est pas parfait, mais au moins des personnes essaient de trouver différents partenariats dans la collectivité et d'accroître la participation des femmes et d'autres membres de la collectivité.
L'autre question concerne la santé mentale et la génération sandwich, les soins prodigués de manière informelle, qui pour les infirmières et infirmiers et d'autres, particulièrement les femmes, représentent un enjeu de taille. Votre comité pourrait prendre l'initiative et, avec un peu de chance, le gouvernement fédéral prendra l'initiative dans ce dossier en vue d'appuyer les soignants.
Mme Abby Lippman: En réponse à cette question, j'aimerais simplement ajouter qu'il importe de savoir non seulement ce qui se fait, mais aussi la manière dont cela se fait. Il existe beaucoup d'études et beaucoup de données à l'égard de certaines de ces questions, et la préoccupation que bon nombre d'entre nous avons est que ces données dorment quelque part, que les politiques sont élaborées ailleurs et que les liens entre les deux ne se font pas. Il importe de savoir non seulement où se situent les problèmes, mais aussi comment nous allons les régler et puiser à même la richesse de l'information venue des groupes de femmes elles-mêmes, des chercheurs, pour faire progresser le dossier.
C'est pourquoi j'ai dit qu'il est fort bien d'avoir toutes ces stratégies, mais que je crains, en ce qui concerne la stratégie pour la maladie mentale, qu'elle ne semble pas tenir compte du sexe à certains égards. Par ailleurs, elle semble donner beaucoup plus de poids au traitement pharmacologique des problèmes de santé mentale des femmes et beaucoup moins aux causes réelles du cafard dont elles souffrent parfois. C'est là qu'il faut réfléchir à la nature du problème et à sa solution.
Á (1145)
La présidente: Je vous remercie.
Madame Yelich.
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, PCC): Ma question sera vraiment très courte. Je ne me sens pas trop bien aujourd'hui.
Vous avez mentionné les rôles et les responsabilités au travail et dit qu'il faudrait que les femmes acquièrent plus de pouvoir. Comment prévoyez-vous qu'elles pourraient le faire? Madame MacDonald, vos observations au sujet des infirmières m'ont beaucoup plu, car je suis fermement convaincue que les compressions se font sur les dos des infirmières et, bien entendu, de l'équité en matière d'emploi. Je crois que c'est ce qui arrivé dans l'est du Canada; elles n'ont pas reçu une rémunération adéquate. Mais comment peut-on acquérir ce pouvoir? Nous pouvons changer les rôles et les responsabilités de l'intérieur, peut-être, ou nous pouvons donner de l'orientation, mais quand il est question de pouvoir, comment s'y prendre?
Mme Jane MacDonald: Il existe divers moyens. On peut notamment se servir du système d'éducation. Il y a toute la question du regroupement sous un même toit des différentes facultés de manière à ce que les infirmières ne soient pas isolées des médecins, des dentistes et des travailleurs sociaux pendant leurs études. Tous suivent leurs cours en même temps et ensemble, de sorte qu'ils s'habituent à être des collègues. Ils ont chacun leurs compétences spéciales, mais ils sont essentiellement des collègues.
L'autre moyen est de mettre en place des structures qui font en sorte qu'il y a une représentation non seulement de la profession d'infirmières, mais aussi d'autres professionnels qui sont sous-représentés ou mal représentés dans les structures de gestion. Ainsi, ce ne serait pas seulement un groupe qui aurait voix au chapitre. Durant les années 90, certaines de ces structures ont été essentiellement abolies, de sorte qu'il faut les remettre en place en tenant délibérément compte des enjeux de pouvoir qui en découlent.
Mme Lynne Yelich: Parce que malheureusement, dans le cas des infirmières, les questions gravitent toujours autour de la main-d'oeuvre, non pas des autres rôles et responsabilités. Par exemple, songez simplement à toute la documentation dont sont responsables actuellement les infirmières; un tel fardeau et de si lourdes responsabilités sont imposés aux infirmières qu'elles ont beaucoup de difficultés à faire leur travail.
Toutefois, j'aimerais vous poser une question précise. J'avais mentionné les rôles et les responsabilités. Pourriez-vous nous dire coment vous vous y prendriez? Donnez-moi un exemple dont la façon dont vous le feriez.
Mme Margaret Haworth-Brockman: J'ignore si je serai capable de trouver un exemple rapidement, mais pour reprendre les propos de Mme MacDonald, il faut donner l'exemple en établissant des normes et des lignes directrices qui font en sorte qu'on fait vraiment de la consultation communautaire et que ces consultations sont vraiment représentatives. Or, la collectivité pourrait comprendre les personnes qui travaillent dans les emplois particuliers dont nous parlons ou dont les rôles et responsabilités sont à l'étude. Donc, la femme vivant en milieu rural est-elle suffisamment indemnisée non seulement pour son temps de déplacement et, peut-être, une gardienne, mais pour le temps personnel qu'elle ne consacre pas aux autres choses qu'elle fait habituellement? Car il faut reconnaître qu'elle a pris le temps de venir pour une consultation, probablement parce que c'est une chose à laquelle elle croit, et cela signifie que quelque chose d'autre ne se fait pas.
Je constate actuellement avec horreur que les femmes décrivent davantage un ressac tant dans leurs collectivités que dans leurs milieux de travail. Je suis donc en train de décrire les attitudes et le milieu antiféministe dans lequel elles évoluent, et j'en suis très troublée. Elles sont inquiètes de leur emploi, de qui va s'occuper de leurs familles, de leur sécurité personnelle, de toutes ces choses qui relèvent des rôles et des responsabilités.
La présidente: Je vous remercie.
Madame Brunelle.
[Français]
Mme Paule Brunelle (Trois-Rivières, BQ): Bonjour, mesdames. Je suis heureuse de vous rencontrer aujourd'hui.
Vous avez toutes parlé de la santé des femmes. Les déterminants sociaux sont évidemment très importants pour la santé des femmes. On sait que lorsqu'on parle de santé, on doit aussi parler de revenu, de statut social, de travail et d'un ensemble de problèmes. À tout cela s'ajoute la difficulté des juridictions. Nous savons que la santé est de la compétence des provinces, et c'est donc une autre problématique qui s'ajoute au reste.
Comment travaillez-vous avec les provinces, puisque la santé est de la compétence des provinces, et comment vous assurez-vous de ne pas créer de problèmes de double juridiction, ce qui compliquerait les multiples problèmes qui existent déjà?
Á (1150)
Mme Abby Lippman: J'imagine que c'est à moi que vous avez posé cette question.
Je suis très consciente des compétences provinciales et fédérales. Je réponds la plupart du temps en anglais parce que je pense mieux dans cette langue. Les interprètes me trouvent difficile puisque je passe d'une langue à l'autre.
Je travaille avec le Réseau québécois d'action pour la santé des femmes, et nous sommes très conscientes des différences.
[Traduction]
Cependant, j'estime qu'essentiellement, les questions que nous tentons de régler au sujet des déterminants au sein d'un organisme fédéral comme le RCSF ou de tout centre d'excellence, de même qu'au sein des organes provinciaux, sont les mêmes. Je ne suis ni juriste, ni parlementaire, mais il me semble qu'une fois que les principes sont établis, les provinces peuvent y adhérer tout en faisant les choses à leur façon. Le Québec a cette option de le faire à sa manière, et c'est habituellement ce qu'il fait. Je ne crains donc pas de piétiner des plate-bandes tant qu'il existe, au sein de la province comme telle—et je parle maintenant en tant que Québécoise—un moyen de faire en sorte que nous respectons les mêmes principes et les mêmes processus que nous encouragerions en tant que membres, par exemple, du RCSF au niveau fédéral.
J'ignore si cela répond à votre question. Il faut toujours frapper un juste équilibre, et pour la plupart de ces déterminants structuraux, certaines provinces ont beaucoup mieux réussi à fixer des conditions que d'autres. J'estime que les provinces auraient beaucoup à apprendre les unes des autres en ce qui concerne les formules efficaces. Le programme de garderies au Québec a servi de modèle à toutes les autres. Le réseau des CLSC avait l'habitude de servir de modèle au reste du pays pour la réforme des soins primaires. J'estime que le Québec a détruit son réseau de CLSC en ciblant mal les compressions, et j'aimerais voir le Québec investir dans un modèle de soins primaires qui nous ramène au point où nous en étions.
J'espère que ces propos répondent à certaines de vos questions.
Mme Jane MacDonald: Pour ce qui est de la question des compétences également, je suppose que l'Association canadienne des infirmiers et des infirmières aimerait toujours faire valoir que le gouvernement fédéral, par l'intermédiaire de Santé Canada, a le quatrième régime de soins de santé en importance au Canada et qu'il est responsable de la santé des Autochtones et des Premières nations. En tant que leaders, Santé Canada et le gouvernement fédéral peuvent faire beaucoup en fait d'initiatives relatives aux soins primaires et en travaillant avec les collectivités, y compris les collectivités autochtones, à améliorer leur santé et, avec un peu de chance, à fournir une base de partage avec d'autres juridictions au Canada. Toutefois, la question des compétences est épineuse, non seulement au niveau du gouvernement fédéral et des provinces, mais également au sein même de la profession des soins infirmiers. Elle est aussi un problème pour la profession. C'est une question qu'il faudrait étudier.
Mme Margaret Haworth-Brockman: J'aimerais renchérir sur ce qu'ont dit les deux autres. Quand j'ai mentionné les questions de compétences, je songeais notamment aux femmes métisses qui ne relèvent pas de la compétence de Santé Canada et qui sont souvent ignorées d'autres façons. Par ailleurs, nous, au Centre des Prairies, et nos collègues sommes chanceuses d'être mandatées pour prodiguer des conseils en matière de politique à tous les niveaux. Nous avons donc d'excellentes relations avec nos deux gouvernements provinciaux et nous sommes capables de prodiguer certains conseils. Je ne suis pas sûre qu'il faille forcément éviter un chevauchement des compétences. Le gouvernement fédéral a un rôle de leadership à jouer et c'est à lui qu'il revient d'énoncer des lignes directrices essentielles partout au pays, de sorte que les provinces y donnent suite et s'assurent que les questions intéressant les femmes font partie de leurs réflexions.
La présidente: Il vous reste du temps.
[Français]
Mme Paule Brunelle: On peut s'entendre pour dire que le gouvernement qui est le plus proche des femmes et des personnes en général est le mieux placé pour connaître les soins à donner et les priorités à établir.
J'aimerais vous poser une question supplémentaire. On observe le phénomène du vieillissement de la population. Les femmes âgées sont en général les femmes les plus pauvres et elles ont des problèmes de santé. D'autre part, les femmes plus jeunes et pauvres et leurs enfants se préparent sûrement des lendemains très difficiles: ils auront des problèmes de santé. Quelles priorités ce comité-ci, au palier fédéral, devrait-il se donner pour les 10 prochaines années? À quoi devons-nous travailler au palier fédéral?
Á (1155)
[Traduction]
Mme Margaret Haworth-Brockman: Je tiens à dire que je suis entièrement d'accord avec vous et je crois avoir mentionné qu'on oublie souvent de tenir compte des femmes âgées quand il est question des pauvres au Canada. La priorité consiste selon moi à maintenir le revenu de base et la sécurité de revenu pour tous nos concitoyens en insistant particulièrement sur les femmes, car il faut tenir compte du revenu personnel. Le revenu du ménage n'est peut-être pas distribué à tous les membres du ménage et il ne l'est peut-être pas équitablement. Nous avons déjà pris des mesures pour faire en sorte que l'argent aboutisse dans les mains des bons membres de la famille, et il faut se rappeler que la dynamique du pouvoir est présente à tous les niveaux.
La présidente: Je vous remercie.
Une autre d'entre vous, mesdames, a-t-elle une réponse rapide à faire? Dans la négative, nous allons passer au prochain intervenant.
Mme Jane MacDonald: En plus de la question du revenu, il faut que le système de santé se concentre sur la promotion de la santé et la prévention de la maladie. Un virage complet s'impose... L'accent mis sur les soins aigus ne permettra tout simplement pas d'obtenir les résultats que nous souhaitons.
Une voix: Ou plus d'accent sur le mode de vie.
Mme Jane MacDonald: Oui, sur le mode de vie.
Mme Susan Kadis (Thornhill, Lib.): Merci, madame la présidente. Je vais essayer d'être brève parce que nous n'avons pas beaucoup de temps.
Je vais commencer par souhaiter la bienvenue à tous les témoins.
Quel serait selon vous le plus important obstacle à la santé des femmes, s'il est possible de résumer ainsi? Par ailleurs, à quoi attribuez-vous le manque évident de respect et d'appui à l'égard des professionnels des soins infirmiers et cela a-t-il entraîné une réduction des hommes et des femmes qui s'orientent vers cette profession?
La présidente: Qui souhaite répondre à la première question? Jane.
Mme Jane MacDonald: Quel est le plus gros obstacle actuellement à l'entrée dans la profession des soins infirmiers?
Mme Susan Kadis: Non, tout simplement à la santé des femmes.
Mme Jane MacDonald: À la santé des femmes? Je mentionnerais probablement à nouveau la question du revenu et du manque d'appuis communautaires. Nous répondons à la première question, c'est bien cela?
La présidente: Vous pouvez répondre aux deux.
Mme Jane MacDonald: Vous souhaitez que je réponde aux deux? D'accord.
Pour ce qui est de ceux qui ne se dirigent pas vers les soins infirmiers, nous avons eu en réalité... Nous continuons d'avoir des candidats aux études en soins infirmiers, ce qui est bon. Toutefois, il ne faut pas oublier les conditions de travail, le niveau de stress, l'état de santé des infirmières et des infirmiers et les problèmes qui les accompagnent. Donc, des personnes se dirigent encore vers les soins infirmiers et veulent y faire carrière, mais le travail devient ingérable, ce qui n'a rien de nouveau. Le problème a été repéré il y a 15 ou 20 ans déjà. Les rapports à ce sujet sont là. Les données statistiques existent aussi. Donc, quoi qu'il arrive, nous n'avons pas atteint ce que Linda Duxbury a qualifié de besoin urgent de changer. Des infirmières et des infirmiers continuent encore, malheureusement, de faire le travail. Ce n'est pas qu'ils ne veulent plus travailler, mais que les conditions de travail sont très difficiles.
Mme Lynne Yelich: … [Note de la rédaction: inaudible]... les systèmes d'éducation, il faut qu'ils suivent cinq années de cours plutôt que deux. Le programme de soins infirmiers en deux ans n'existe plus, si j'ai bien compris, de sorte que ce serait nettement un désavantage.
Mme Abby Lippman: Oui. J'aimerais régler la situation des infirmières et des infirmiers. Je ne peux pas parler en leur nom, mais s'il est question des plus importants défis ou obstacles, je crois que la pauvreté est nettement un facteur et que l'on s'entendrait tous là-dessus. Je peux commencer toute discussion en affirmant que les plus grandes menaces à la santé des femmes sont la violence et la pauvreté—mais la pauvreté précède habituellement la violence.
L'autre source de préoccupation dont j'aimerais parler et à laquelle j'ai déjà fait allusion est ce que nous percevons comme une remédicalisation des préoccupations des femmes sous guise de l'approche du mode de vie et de la pilule pour tout prévenir. Cette préoccupation prend de plus en plus de place parce qu'elle détourne l'attention de la vraie raison pour laquelle les femmes ont ce problème au départ.
Ce qui me préoccupe, c'est de savoir qu'on traite avec des pilules tous les maux qui affectent les femmes, qu'on voit des problèmes médicaux partout, allant du syndrome du troisième jour—tout le monde fait une grave dépression après l'accouchement et il faut la traiter—jusqu'aux petites contrariétés de la vie. J'estime qu'il faudrait que nous prenions tous note du signal d'alarme donné par les scandales récents entourant le Vioxx et, encore plus, le Depo-Provera, et que nous reconnaissions que les questions relatives à la santé des femmes ne sont pas seulement médicalisées, mais qu'on refuse aussi de les voir en dehors du contexte pointu actuel. Il faut se pencher sur le vitalisme de ce qui arrive aux femmes. Quand nous intervenons dans la vie d'une jeune femme, qu'arrivera-t-il lorsqu'elle sera plus âgée? Le véritable scandale du Depo-Provera le montre bien, de même que la transposition des connaissances qu'ont les groupes de femmes depuis 30 ans dans le domaine de l'élaboration des politiques.
Mme Margaret Haworth-Brockman: J'aimerais ajouter quelque chose aux propos de mes deux collègues; je m'oppose également à ce qu'on me propose tout le temps des traitements en fonction de mon sexe.
Le logement est aussi un autre domaine sur lequel ce comité pourrait avoir une influence. Nous avons amplement parlé du revenu de base, mais le logement est un autre sujet à discuter. Il y a d'ailleurs divers groupes de réflexion stratégique et tables rondes sur diverses formes de logement approprié—l'uniformité n'est pas nécessaire, mais il faut que les solutions proposées soient axées sur les besoins de la région et des gens. Une façon d'alléger le fardeau des femmes qui vivent dans la pauvreté en ce qui a trait à leurs rôles et responsabilités est d'encourager le développement de projets de logement—pas seulement la construction d'habitations, mais également leur gestion et entretien pour en assurer une certaine durabilité.
 (1200)
La présidente: Il vous reste encore un peu de temps.
Mme Susan Kadis: En ce qui a trait aux récentes ententes, dont les détails restent à déterminer, et à l'annonce récente du financement qu'allouera le gouvernement fédéral aux provinces, j'ai l'impression que vous ne croyez pas que ça sera suffisant si on n'en fait pas bénéficier les bonnes personnes. Pouvez-vous donner d'autres détails à ce sujet? Avez-vous eu des discussions, par exemple, avec le ministre ou d'autres intervenants responsables, et quelle est votre plus grande préoccupation concernant la façon dont l'argent sera utilisé?
Mme Jane MacDonald: La grande préoccupation de l'AIIC est à quoi servira l'argent alloué; c'est probablement notre plus grande crainte.
Mme Abby Lippman: Au sein du RCSF, on se demande surtout où ira l'argent. Aujourd'hui, je ne parle que d'enjeux fédéraux au nom du RCSF, mais celui-ci a constamment et vigoureusement exigé des comptes sur la façon dont sont dépensés les fonds, ainsi que demandé que des rapports pertinents soient transmis.
Un de mes enjeux préférés est la création d'emplois proprement dite comme moyen de sortir une femme de la pauvreté. C'est un repère. Vous pouvez dire qu'un certain nombre d'emplois ont été créés, mais si ce nombre n'a pas été interprété à la lumière d'une analyse comparative entre les sexes, nous ne connaîtrons pas les facteurs qui permettent aux femmes d'obtenir un emploi. Auront-elles accès aux services de garde dont elles ont besoin pour aller travailler? Le revenu qu'elles retireront d'un emploi au salaire minimum sera-t-il en bout de ligne inférieur à ce qu'elles recevraient sur l'aide sociale? Quels sont les moyens à leur disposition pour prendre soin d'un parent âgé qui vit chez elles?
La création d'emplois ne suffit pas; je ne dis pas de ne pas créer d'emplois, mais seulement que ce n'est que le début. Si on ne tient pas compte de tout le contexte... Voilà pourquoi j'ai parlé du besoin de rendre des comptes après avoir effectué une analyse comparative entre les sexes pour savoir si les fonds alloués auront directement changé les situations d'inégalité et d'inéquité. Voilà, d'après moi, les mesures qui doivent être prises pour changer cette situation de même que pour influer tant soit peu le taux de chômage.
La présidente: Merci.
Madame Crowder.
Mme Jean Crowder (Nanaimo—Cowichan, NPD): J'aimerais remercier les panellistes de leurs exposés instructifs. Le seul inconvénient, c'est qu'une bonne partie de ce que nous avons entendu aujourd'hui se reflète constamment dans les propos de bon nombre de témoins.
J'ai deux questions. L'analyse comparative entre les sexes est un sujet qui est également soulevé assez souvent. Certains des témoins étaient préoccupés par le fait qu'il y a une politique à cet égard depuis 1995, mais qui n'a pas été mise en oeuvre de façon générale au gouvernement. Aussi, les gens se demandent si cette analyse est faite de façon significative. Avez-vous des commentaires à ce sujet?
Ma deuxième question porte sur les déterminants sociaux et économiques de la santé. Pendant quelques années, le site Web de Santé Canada affichait une liste de ces déterminants. Quelqu'un parmi vous a mentionné—ce sont peut-être mes propres mots—que nous fonctionnons en compartiments. Bien que Santé Canada reconnaisse les déterminants sociaux et économiques de la santé, bon nombre de politiques à cet égard relèvent d'autres ministères. Avez-vous des recommandations pour favoriser l'intégration des efforts déployés? Je sais que ce sont deux questions complexes, mais...
Mme Abby Lippman: Tout ce que je peux dire, c'est que je pose les mêmes questions que vous; je vous remercie donc de les poser.
En ce qui a trait à l'exécution d'analyses comparatives significatives, c'est ce que nous réclamons depuis longtemps. Des mesures sont prises en ce sens au moment où l'on se parle, mais on se demande comment amener les divers ministères et organismes à le faire et à inciter l'Organisation mondiale de la santé, le Royaume-Uni, les États-Unis et le Bureau pour la santé des femmes du Canada à élaborer des trousses d'information et à offrir de la formation pour faire comprendre aux gens de quoi il s'agit. Je ne sais pas, mais peut-être que ce comité, qui se penche sur la condition féminine, pourrait exercer une certaine influence en rappelant aux responsables leur engagement à cet égard, en leur demandant s'ils le font et comment ils s'y prennent. Cela revient au rapport que nous avons demandé initialement sur la stratégie du ministre concernant la santé des femmes.
En ce qui a trait aux déterminants, nous travaillons effectivement en compartiments. Non seulement est-il déplorable qu'ils existent, mais ils sont en plus mal utilisés; s'il est question d'un déterminant social dans le domaine de l'éducation, on demandera aux femmes pourquoi elles n'ont pas poursuivi leurs études. On fait cela sans comprendre ce qui peut pousser une jeune femme à mettre fin à ses études. Si on parle de l'activité physique, il ne faut pas prendre pour acquis que tout le monde peut s'habiller et aller au centre sportif à la fin de la journée car ce n'est tout simplement pas accessible à tous; il faudrait plutôt se demander pourquoi les femmes ne peuvent pas marcher dans la rue en toute sécurité.
Je crois qu'il faut abolir ces compartiments. Je suis peut-être un peu idéaliste et romantique, mais j'imagine qu'à mon âge j'y ai droit. Je pense que ce comité pourrait jouer un rôle de surveillance de la condition féminine. Notre vie ne se divise pas en sections. Je ne peux pas figurer dans la pile économique ici, puis dans l'autre pile sur le logement ou encore dans celle de la santé. Je suis une personne entière; alors qu'allez-vous faire? Je ne veux pas paraître agressive, mais en ce qui concerne la condition féminine, nous devrions pouvoir examiner tous ces éléments ensemble.
Des ressources ont été créées et nous serons ravis de vous fournir tout ce qui est disponible et nous vous encourageons à en créer d'autres.
 (1205)
Mme Jane MacDonald: J'aimerais donner mon opinion sur les compartiments. Ceux et celles d'entre nous qui travaillons dans ce domaine depuis de nombreuses années connaissons l'existence de ces compartiments, tout comme vous. C'est aussi difficile de gérer ces compartiments au niveau communautaire que gouvernemental.
Je vais vous donner un petit exemple. Il y a quelques semaines, à Ottawa, a eu lieu la conférence de l'Alliance pour la prévention des maladies chroniques au Canada. Cette conférence a été intéressante, et l'AIIC a participé à sa planification. Dans le passé, les gens atteints de maladies chroniques, comme les maladies du coeur, les maladies pulmonaires, etc., ont toujours mis principalement l'accent sur la maladie. La planification de la conférence a été intéressante et on sentait au sein du comité énormément d'enthousiasme car les gens prenaient conscience que les maladies chroniques ne sont pas qu'un problème physique, mais qu'il y a beaucoup d'autres facteurs qui influent sur la façon dont on vit avec une maladie chronique et qui déterminent l'espérance de vie et les façons d'y faire face.
La conférence a été très stimulante. Il y a eu plus de 600 personnes associées à divers groupes, dont des enseignants. On a donc eu des gens du domaine de l'éducation, du milieu communautaire et vos intervenants de la santé. Les participants se parlaient, étaient enthousiastes et ont commencé à comprendre et à mettre en pratique certains des éléments qui entourent les déterminants sociaux. Ce n'était pas parfait, mais au moins les gens des divers secteurs discutaient entre eux, et le niveau d'enthousiasme à la conférence était très captivant. Je ne sais pas à quoi tout cela va mener, mais il y avait David Butler-Jones et Carolyn Bennett. Tous ces gens étaient réunis dans une salle où ils devaient se parler et écouter ce que les autres avaient à dire sur ce qui se passe au Canada et dans les différentes collectivités relativement aux maladies chroniques.
Ce n'était qu'un exemple pour illustrer que nous devons briser ces compartiments consciemment et stratégiquement car chacun renferme une sagesse rarement communiquée.
Mme Margaret Haworth-Brockman: J'apprécie votre question sur l'analyse comparative entre les sexes et sur les raisons derrière son manque d'application.
Au Centre, nous avons fait quelques projets intéressants dans ce domaine. Le processus a été long car nous avons dû vivre avec les délais gouvernementaux. Nous avons découvert que si nous donnions aux gens des exemples d'application pratiques de l'analyse comparative entre les sexes, d'une façon qui diffère de ce qu'on trouve dans la théorie et les manuels, les gens comprenaient mieux. L'élaboration d'applications pratiques qui touchent le travail quotidien des gens semble fonctionner.
Par le truchement du CEDAW, nous avons d'excellents exemples de façons de s'assurer que les questions sexospécifiques sont prises en compte en tout temps et ne sont pas ignorées. J'aime rappeler aux gens que les femmes ne sont pas un groupe d'intérêt particulier et que ce volet ne s'ajoute pas à leur travail, mais devrait plutôt en faire partie intégrante.
Mes deux collègues ont bien exprimé le besoin d'intégrer les compartiments. L'Agence de santé publique serait un point de départ intéressant. Nouvellement créée, l'Agence comprend les enjeux.
Il est utile, toutefois, de se rappeler qu'il ne suffit pas d'injecter des fonds dans la santé. Nous le savons déjà puisque nous en avons la preuve. Je peux d'ailleurs vous donner des tonnes et des tonnes d'exemples. Pour contrer les arguments, il pourrait être utile de mentionner aux diverses tables de discussion que ça favorisera la santé.
La présidente: Merci.
Voilà qui termine la période des témoignages.
Madame Guergis.
Mme Helena Guergis (Simcoe—Grey, PCC): Merci beaucoup d'être ici. J'ai un chat dans la gorge; j'espère que je ne perdrai pas la voix.
Le sous-comité de la condition féminine avait produit un rapport sur les questions non résolues concernant le cancer du sein. On m'a dit que ce rapport a été déposé en 1992. Le Réseau canadien du cancer du sein a fait remarquer que bon nombre des recommandations figurant dans le rapport n'ont pas été mises en oeuvre et que même si des installations régionales de traitement du cancer ont été mises sur pied, les régions rurales demeurent privées de traitements efficaces contre le cancer.
Plusieurs questions ont été soulevées dans le rapport, mais je ne vais en lire que trois : l'accès au programme de dépistage du cancer du sein et du cancer du col utérin diffère-t-il d'une région à l'autre? Les femmes inuites et des Premières nations ont-elles accès aux mêmes services de prévention et de traitement offerts aux autres femmes canadiennes? La communication d'informations entre les chercheurs et le public sur les risques du cancer du sein et sur sa prévention est-elle efficace? Quelles sont les mesures prises pour communiquer avec les populations difficiles à joindre?
Voici ma dernière question. Ma mère a survécu au cancer du sein, comme ses deux soeurs. On m'a suggéré d'essayer un test de dépistage génétique. Avez-vous des informations qui pourraient m'éclairer?
 (1210)
Mme Margaret Haworth-Brockman: Je vais laisser le soin à Abby de répondre à votre dernière question car c'est sa spécialité.
Il existe des différences régionales en ce qui a trait au dépistage du cancer du sein et du cancer du col utérin puisque c'est un domaine qui est principalement de compétence provinciale. Heureusement, des groupes comme le RCCS aident à cerner les problèmes.
À ma connaissance, les femmes inuites et des Premières nations semblent avoir accès à des services adéquats de dépistage et sont dans la même situation que les autres femmes qui habitent en milieu rural, en région éloignée ou dans une collectivité du Nord.
Les déplacements posent de grandes difficultés aux femmes. Elles n'ont peut-être pas une voiture. Elles doivent parfois s'absenter pour une journée. Elles doivent prendre des dispositions pour leurs enfants ou autres personnes à charge.
Les gens ne sont pas nécessairement au courant des risques du cancer ni des mesures de prévention s'ils n'ont pas les outils pour se renseigner. Il n'est pas donné à tous d'avoir accès à un ordinateur ou d'en posséder un. Il se peut qu'il n'y ait qu'un ordinateur dans un centre communautaire disponible à des heures impossibles. De plus, qui détermine qui pourra l'utiliser?
Dans le cadre de notre projet pancanadien en milieu rural, on nous a dit que les outils d'éducation ne parviennent pas aux femmes, que le niveau de langue est trop élevé et qu'il faudrait plutôt utiliser un langage vulgarisé que peuvent comprendre les gens.
Il y a certaines choses très fondamentales que l'on peut faire. L'utilisation d'unités de dépistage mobiles est une façon de répondre à un besoin immédiat, particulièrement en ce qui a trait au dépistage du cancer du col utérin chez les femmes inuites, autochtones et du Nord.
Il ne faut pas oublier que les femmes métisses ne sont pas nécessairement prises en compte. Elles sont particulièrement marginalisées.
Mme Abby Lippman: Je vais vous donner mon opinion, ce qui pourrait faire des vagues. D'abord, le dépistage du cancer du col utérin et celui du cancer du sein sont deux choses distinctes. Le dépistage du cancer du col utérin devrait être accessible à chaque femme canadienne qui en a besoin. Je vais laisser de côté la question du cancer du col utérin pour me concentrer principalement sur le cancer du sein.
J'ai participé à un forum sur le cancer du sein, qui a été énormément stimulant. Dans les années 1990, lorsqu'on a mis sur pied tout le programme concernant les mesures de lutte contre le cancer du sein, j'ai présidé le sous-comité de la recherche du forum auquel ont participé des femmes atteintes de ce cancer, des survivantes, des chercheurs, etc. J'aimerais aborder trois ou quatre points.
Pour commencer, il faut faire la distinction entre le dépistage et la prévention. Le dépistage ne fait aucune prévention; il ne sert qu'à déceler précocement une maladie. Je collabore avec un groupe qui s'intitule Sensibilisation au cancer du sein Montréal ainsi qu'avec d'autres groupes qui ne sont pas particulièrement en faveur de la mammographie comme mesure de dépistage chez toutes les femmes, bien que pour certaines cet examen soit approprié. Lorsque l'on fait un examen de dépistage, cela nous permet de faire un diagnostic précoce. Nous ne sommes plus certains de la pertinence de la mammographie pour déceler tôt des cancers car nous ne savons pas s'ils sont latents sans risque de se développer, comme c'est parfois le cas pour le cancer de la prostate; nous mettons donc les femmes dans une situation très difficile. Nous ne croyons pas que la mammographie convienne à toutes les femmes. La mammographie est un outil de dépistage, pas de prévention.
Malheureusement, nous n'en savons pas beaucoup sur la façon de prévenir le cancer du sein, ce qui est déplorable car beaucoup d'argent a été injecté dans la recherche fondamentale sur le développement du cancer du sein, les médicaments et les interventions pharmaceutiques mais très peu dans la recherche approfondie des causes environnementales du cancer, particulièrement du cancer du sein. On a associé à certains autres cancers des facteurs professionnels, ce qui n'est pas le cas pour le cancer du sein.
Nous sommes particulièrement heureux de voir que dès l'année prochaine, si ce n'est pas déjà fait, tous les cosmétiques devront porter une étiquette sur laquelle seront indiqués les produits chimiques qui entrent dans leur composition car certains produits sont une source de préoccupation, comme le phthalate et d'autres produits qui commencent par « phth » mais que je n'arrive pas à prononcer car j'ai la bouche un peu sèche. Nous ne sommes pas certains de leurs effets. Nous devons le découvrir, mais les efforts de recherche ne se sont pas consacrés sur les aspects environnementaux. Certains groupes rédigent des documents pour informer les femmes sur les questions à poser. Nous avons besoin de ces données épidémiologiques.
En ce qui a trait aux aspects génétiques du cancer du sein, je ne peux vous répondre sans en savoir beaucoup plus car je ne suis pas médecin. J'ai eu de la formation en génétique, entre autres, mais il ne serait pas approprié que je vous réponde selon le peu d'information que vous m'avez donnée. Le test de dépistage génétique du cancer du sein est un outil qu'on utilise parfois. Je n'en dirai pas plus à ce sujet. C'est du côté de la prévention, toutefois, que l'on a réellement manqué notre coup.
 (1215)
La présidente: Merci.
Madame Torsney, suivie de Mme Guay.
L'hon. Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Je me souviens de l'anecdote sur la femme qui consulte un vieux médecin à propos de ses maux d'estomac. Plutôt que d'ordonner une batterie d'examens, il lui demande : « Comment vont les enfants? Comment se porte votre mari?»
Voilà où sont les problèmes. Il faut parvenir à certains compromis. Je suis de la génération qui a grandi avec l'OHIP en Ontario. On se disait qu'il y avait un remède à chaque mal et qu'il nous le fallait tout de suite. Nous perdons donc un aspect de cette approche holistique.
Madame Lippman, je trouve fascinant votre engagement dans le domaine du cancer du sein. Comme vous semblez toutes partager le même avis quant aux principaux déterminants de la santé et comme votre approche est si holistique, je me demande si on ne nous aurait pas proposé des solutions différentes, advenant que nous ayons accueilli aujourd'hui des groupes s'occupant du cancer du sein ou du col de l'utérus ou encore de santé mentale des femmes. Je crois que tous commencent à comprendre qu'il faut beaucoup plus et que nous devons examiner des questions comme le renforcement de l'autonomie, la réduction de la pauvreté et ainsi de suite.
Parlons de la façon d'accorder le financement de base—car vous avez toutes parlé de la nécessité de ce mode de financement—, quelles modalités devrions-nous suivre si nous revenions à une certaine forme de financement de base? Financerions-nous des groupes déjà constitués, empêchant ainsi la création de certains groupes de femmes en milieu rural? Disposerions-nous d'une liste qui s'allongerait sans cesse? Y aurait-il notamment un pourcentage maximum? Même les provinces recevaient les mêmes montants d'argent, mais les proportions diffèrent selon la province, en matière d'aide sociale. Au Nouveau-Brunswick, il peut s'agir de 50 p. 100, mais la proportion de personnes vivant de l'aide sociale est si faible par rapport à celle de l'Ontario que j'ignore comment les gens parviennent à survivre que pendant trois jours par mois.
Comment rétabliriez-vous une certaine forme de financement de base?
Je m'adresse particulièrement à vous, madame Haworth-Brockman : de quelle façon votre centre a-t-il participé aux consultations sur l'IPAC? Je sais que, dans ma collectivité, un nombre impressionnant de personnes se sont réunies pour parler de logement et de sans-abri, se penchant sur certains de ces facteurs sous-jacents. Notre collectivité, qui compte naturellement des sans-abri, est aux prises avec le risque que courent les gens de devenir un sans-abri, ce qui signifie souvent qu'une proportion trop élevée dispose d'un revenu restreint pour satisfaire ses besoins en matière de logement et qu'un très grand nombre vit dans des habitations inadéquates.
Je serais très désappointée si vous n'avez pas participé aux consultations, mais j'espère que ce n'est pas le cas ou que nous pourrons vous convaincre. Ma principale question est la suivante : comment nous y prenons-nous avec le financement de base?
Mme Margaret Haworth-Brockman: Je ne suis pas sûre de pouvoir vous répondre immédiatement, mais j'aimerais beaucoup me pencher sur le rétablissement du financement de base. Actuellement, des organisations très utiles déploient énormément d'efforts pour remplir chaque demande de projet et établir les rapports nécessaires. Je crois qu'il faut rendre des comptes, mais cela nécessite beaucoup de ressources et ne permet pas d'offrir l'infrastructure de base. Nous devons, je pense, abattre certains des obstacles qui nous entravent. Un point de départ pourrait être Condition féminine Canada, qui finance les projets individuellement en fonction de certaines priorités.
Je ne peux que parler du Manitoba et de la Saskatchewan, où je travaille avec les fonctionnaires des bureaux régionaux de Condition féminine Canada. Ceux-ci entendent parler d'un projet, ils vivent dans la collectivité et ils sont au courant des problèmes. Ils pourraient aider à jeter les bases de ce qui pourrait devenir le rétablissement du financement de base. Pour l'instant, je m'en tiendrai à cela.
Je n'ai pas encore participé aux consultations sur l'IPAC, mais nous avons récemment appuyé quelques projets axés sur les besoins des femmes en matière de logement, ce dont nous nous occupons. Nous exhortons nos interlocuteurs à donner les résultats des analyses sexospécifiques. Notre travail se situait à un autre niveau, mais nous collaborons avec les personnes participant à ces discussions. Heureusement, nous avons rencontré certains des interlocuteurs clés indispensables, surtout au Manitoba, mais pas en Saskatchewan.
 (1220)
L'hon. Paddy Torsney: Des membres de votre réseau ont-ils participé aux consultations locales sur l'IPAC?
Mme Margaret Haworth-Brockman: Oui. En fait, un ancien employé y a participé, et des groupes communautaires locaux ont adopté ses principes sur l'analyse sexospécifique. Cependant, ce n'était pas moi. J'avais délégué cette responsabilité.
L'hon. Paddy Torsney: Il y a eu cependant une certaine participation.
Mme Margaret Haworth-Brockman: Oui.
L'hon. Paddy Torsney: L'une d'entre vous peut-elle nous proposer ce que nous pouvons faire à propos du financement de base?
Mme Abby Lippman: Il me semble que le financement de base comporte deux aspects. Premièrement, il y a l'argent qui est redistribué dans la collectivité, mais ce qui me préoccupe, ce sont les groupes financés. Est-ce que c'est cela que vous voulez dire?
L'hon. Paddy Torsney: Oui, c'est cela que je veux dire.
Mme Abby Lippman: Très bien.
On pourra me taxer d'hérésie dans mes recherches, mais je pense entre autres que les meilleures solutions proviennent des petits groupes qui collaborent et qui sont au courant de leurs problèmes. Nous employons l'expression «solution universelle», mais cela ne s'applique pas. Chaque solution doit être opportune.
Je pense que nous n'avons simplement pas tabler sur la structure et les nombreux avantages qu'offrent les groupes de femmes déjà constitués. Il est temps de reconnaître ce qui est accompli et de préciser les responsabilités de chacun et d'essayer par la suite de faciliter les choses par rapport à ce qui doit être accompli.
Il ne s'agit pas de projets d'envergure. Ils ne nécessitent pas beaucoup d'argent. Ce qu'il faut vraiment, c'est le financement de base et non le financement ponctuel. À mon avis, on consacre beaucoup trop d'heures à remplir des demandes de subvention en fonction des priorités du moment, car lorsque la demande parvient aux autorités, les priorités ont changé et le groupe en cause perd tout son personnel. Il faut mettre un terme à cela.
L'hon. Paddy Torsney: Cependant, accordons-nous 50 ¢ par membre de votre organisation? Assumons-nous les frais des lignes téléphoniques, notamment, et la moitié du loyer? Je parle vraiment des modalités. Comment choisissons-nous? Recevez-vous des crédits parce que votre groupe existe depuis cinq ans, depuis deux ans... Comment de nouveaux groupes pourront-ils être créés?
Mme Abby Lippman: Je ne peux vous répondre. J'aimerais bien pouvoir le faire. J'aime à me croire intelligente, mais je ne le suis pas. Je proposerais de constituer un cercle de réflexion regroupant ces groupes communautaires qui ne sont pas mis à contribution et je leur demanderais ce dont ils ont le plus besoin. La solution pourrait être un employé à temps plein ou le paiement du loyer.
Comme on consulte abondamment sur tous les sujets, il ne coûterait pas cher et il serait très productif d'essayer de répondre à ces questions. À cet égard, Condition féminine Canada pourrait montrer l'exemple.
La présidente: Pourriez-vous répondre très succinctement, madame MacDonald?
Mme Jane MacDonald: La consultation pourrait se révéler très utile, de même qu'une réflexion sur les solutions à long terme. Dans l'ensemble du Canada, des groupes font double emploi. Les regrouper pour leur permettre de s'exprimer constituerait probablement une mesure très positive que le comité pourrait prendre. Mais je penserais en fonction du long terme, c'est-à-dire au moins cinq ans.
La présidente: Merci.
Madame Guay.
[Français]
Mme Monique Guay (Rivière-du-Nord, BQ): Merci, madame la présidente. C'est avec plaisir que nous vous revoyons dans cette nouvelle législature.
Mesdames, merci beaucoup pour vos présentations.
J'aimerais faire un commentaire sur le désengagement du gouvernement fédéral de certains dossiers. C'est pour cela qu'il y a aujourd'hui plusieurs problèmes chez les femmes. Vous connaissez nos inquiétudes à l'égard des compétences des paliers de gouvernement. Vous parliez tout à l'heure des femmes autochtones. S'il est un dossier dans lequel le gouvernement n'a pas fait son travail, c'est bien celui de la santé des femmes autochtones. Il y a un sérieux problème à cet égard. Il est certain que le gouvernement doit bouger, car il s'agit de sa compétence et de sa responsabilité.
En ce qui a trait au logement social, la SCHL, depuis bientôt 10 ans, se désengage totalement de l'aide financière, même dans le cas des édifices qui lui appartiennent encore dans toutes les provinces. C'est devenu pratiquement désuet. Aujourd'hui, on demande aux provinces de reprendre cela, mais ce n'est pas de cela que nous avons besoin. Nous avons besoin qu'on nous donne à nouveau des subventions au logement pour que nous puissions rénover des logements et en construire de nouveaux. Il y a un désengagement non seulement au niveau de la santé, mais aussi au niveau du logement. Ainsi, on appauvrit les femmes, les familles et les personnes âgées. Les femmes âgées en souffrent beaucoup. Dans chacun de nos comtés, il y en a qui ont des problèmes de logement. Puisqu'elles n'ont pas les moyens de se payer un logement normal, elles attendent un logement social.
Il faut examiner non seulement la situation sur le plan de la santé, puisque la santé est de la compétence des provinces, mais la situation dans son ensemble. Mon inquiétude est qu'il y ait encore des chevauchements. Vous disiez plus tôt que les infirmières subissaient de mauvais traitements et un manque de respect. Ce sont elles qui ont le plus haut taux d'absentéisme. Il y a une association des infirmières canadiennes. Faites-vous affaires avec les associations? Il y en a une au Québec. Travaillez-vous conjointement? Mettez-vous sur pied des choses qui peuvent vraiment fonctionner, ou si chacun fait sa petite affaire sans communiquer avec les autres? Si vous réussissez à faire certaines études qui pourraient bénéficier à d'autres paliers, vous devez les partager. Il faut s'entraider.
Vous n'avez pas beaucoup parlé de cet aspect des choses, et j'aimerais entendre vos commentaires.
 (1225)
[Traduction]
Mme Jane MacDonald: En ce qui concerne les infirmières, l'Association des infirmières et infirmiers du Canada—et le gouvernement fédéral a effectué quelques études au cours des deux dernières années—a essayé de regrouper, pour son étude sur la profession, les différentes catégories, afin que les infirmières autorisées, les infirmières auxiliaires autorisées et les autres se penchent sur ces questions dans l'ensemble du Canada. Cette étude a été exécutée de concert avec les gouvernements fédéral et provinciaux.
Cette question a été étudiée et fouillée. Il y a eu beaucoup de collaboration au Canada, ce qui est bien, car ça n'a pas toujours été le cas.
Je dirais donc que nous avons effectivement essayé de collaborer.
Mme Abby Lippman: En matière de paiements de transfert notamment , je ne pense pas que personne d'entre nous s'opposerait à l'usage que vous souhaiteriez en faire. Ils doivent être répartis entre les différents secteurs et non pas uniquement entre les diverses provinces.
À mon avis, il est également intéressant que, dans le seul domaine de la santé, le RCSF travaille auprès de la francophonie hors Québec, des Franco-Manitobains et des autres groupes, même s'il oeuvre sur la scène fédérale. Nous entretenons des relations très étroites avec ces groupes, tout comme c'est le cas dans toutes les provinces. Nous n'avons pas de filiale provinciale, comme telle. Nous essayons d'uniformiser nos mesures et, au bout du compte, rien ne vaut la cohérence.
Mme Margaret Haworth-Brockman: J'ajouterais simplement que je suis tout à fait d'accord avec vous au sujet des crédits fédéraux et des graves problèmes en découlant. L'arrêt du financement de la part de la SCHL pose particulièrement problème. Elle semble axer maintenant ses programmes sur l'accession à la propriété privée et non plus sur le financement public ni sur l'exigence que les propriétaires fournissent à leurs locataires un logement décent et adéquat.
À mon avis, nous sommes très privilégiées au Prairie Centre d'avoir accès à des ordinateurs, comme c'est le cas pour nos collègues du RCSF et des autres associations professionnelles. Nous pouvons échanger nos connaissances sur les nouvelles études effectuées. Nous figurons sur des listes de diffusion électronique. L'information qui y est véhiculée est vraiment importante. Chaque association peut travailler individuellement en fonction de ses besoins pour ensuite mettre en commun toutes les connaissances ainsi acquises.
L'information est accessible. Quel que soit le moyen utilisé, nous serions ravis de la diffuser.
[Français]
Mme Monique Guay: Permettez-moi de faire un dernier commentaire, madame la présidente. Ce sera très court.
Vous dites que vous coopérez. J'espère que cette coopération va s'accroître. Quand on n'a pas d'endroit convenable pour se loger, tout le reste suit: la santé se détériore et les enfants vivent dans la pauvreté. Si on n'est pas capable de se nourrir convenablement parce que tout l'argent sert à payer le loyer, tout le reste suit. À mon avis, c'est une priorité. Il y a déjà 10 ans que le fédéral s'est désengagé de ce domaine. Je sais que vous êtes très préoccupées par la santé, mais vous voudrez peut-être y inclure le logement. C'est extrêmement important à tous les niveaux. Chez les autochtones, le problème est criant présentement, et il faut que le gouvernement s'engage de nouveau à ce niveau. Ayant des surplus de 45 milliards de dollars, il pourrait très facilement investir dans le milieu.
[Traduction]
Mme Abby Lippman: Lorsque nous parlons de santé, nous disons toutes les trois que ce sont les résultats et non les moyens qui nous intéressent. Autrement dit, nous ne préconisons pas que tout cet argent soit investi dans les services de santé au sens strict de ce dernier terme. À mon avis, nous sommes unanimes : le logement, la sécurité individuelle, les emplois et la non-violence sont tous des facteurs qui déterminent si une femme sera en santé ou non. C'est dans ce sens qu'il faut déterminer où axer les efforts.
Je souscrirais à vos propos. Si vous avez compris que j'ai proposé de consacrer tous les fonds à la santé, je vous signalerai que ce n'est pas vraiment ce que je voulais dire. Comme je pense l'avoir précisé au début, je ne veux pas que tous les fonds soient destinés à la santé, parce que cela équivaut habituellement à les accorder aux services médicaux qui, d'après moi, n'en ont pas autant besoin que la promotion de la prévention. Les traitements seront offerts parce que les investissements privés sont suffisants et que les entreprises privées peuvent engranger des profits en mettant au point ces traitements. Le secteur privé ne réaliserait pas autant de profits en investissant dans le logement, l'alimentation, la sécurité et la non-violence. Et c'est là où il incombe au gouvernement d'intervenir.
 (1230)
La présidente: Madame Crowder.
Mme Jean Crowder: Merci.
Je croule sous le poids de l'information figurant dans les rapports, les études et les recherches. Nous sommes très au courant des problèmes, mais nous ne semblons pas pouvoir agir. Il y a tout juste deux semaines, Campagne 2000 a publié un rapport sur l'état de la pauvreté chez les femmes et les enfants au pays. Je suis originaire d'une collectivité comptant beaucoup d'Autochtones. Ma collègue du Bloc a abordé la question du logement, et la situation du logement dans les réserves autochtones est effroyable en ce qui concerne l'aqueduc et les égouts.
L'une d'entre vous a évoqué le fossé entre la politique et la stratégie. Je croirais que beaucoup de membres du comité n'ont vraiment rien entendu de nouveau des témoins qui comparaissent. Je vous pose la même question que celle que j'ai adressée au groupe de témoins précédent : que proposeriez-vous pour sortir de l'impasse par rapport à l'information disponible et à l'inaction? Autrement dit, la situation des femmes et des enfants empire au Canada.
J'ignore si vous pouvez nous formuler des recommandations précises susceptibles de nous aider à sortir de cette impasse, afin que nous puissions vraiment réaliser des progrès sur un très grand nombre de ces dossiers.
Mme Margaret Haworth-Brockman: Je laisserai mes deux autres collègues répondre exhaustivement à ces questions. D'après notre expérience, je dirais que nos relations avec les fonctionnaires se sont grandement améliorées. De plus, il semble qu'il soit essentiel d'exécuter des travaux de recherche pertinents qui portent directement sur ce qu'il faut accomplir.
La recherche est effectuée. Les gens veulent vraiment élaborer une politique pertinente et déploient tous les efforts nécessaires en s'y employant. Ils sont débordés dans leur travail. Nous devons—et nous y sommes parvenus à certains égards, jusqu'à présent—traduire ces efforts dans les faits—et sans vouloir utiliser le langage propre à l'application des connaissances—pour démontrer en fait l'applicabilité de la recherche et fournir l'information probante dont on a toujours besoin dans la documentation.
Mme Jean Crowder: Pouvez-vous faire parvenir au comité des exemples de ce que vous préconisez?
Mme Margaret Haworth-Brockman: J'en serais ravie.
Mme Jean Crowder: Cela serait merveilleux. Je vous en remercie.
Mme Abby Lippman: Je pense qu'il y a une autre approche, qui est en quelque sorte générale : ceux qui élaborent la politique devraient mettre la main à la pâte en collaborant avec ceux qui apportent l'information. Les choses ne bougeront pas, sans cette collaboration à un niveau supérieur qui va au-delà de la simple présentation du rapport en s'informant de ce qu'il en adviendra. Le rapport sera simplement classé quelque part.
Il pourrait simplement s'agir de dire : « Si vous intervenez à cet égard, nous le ferons ensemble dès le début.» Nous voulons, par exemple faire évoluer la question du logement social. Quels sont les fonctionnaires qui en seront responsables? Qui apportent l'information et les données? Faisons-les collaborer. Mettons-les à contribution et demandons-leur d'agir. Nous voulons voir un changement d'ici cinq ans. Autrement dit, les données nous permettent de montrer que les responsables des politiques n'interviendront pas à moins que vous ne commenciez à les mettre à contribution dès le début du processus.
Je viens de penser à une autre approche : mettre également à contribution les Instituts de recherche en santé du Canada, qui possèdent beaucoup de données sur ce qui est bon pour la santé et sur ce qui ne l'est pas. Il faut demander à ses responsables quelles connaissances ont été transmises dans les collectivités et quelles mesures ils prennent pour favoriser l'évolution de ces dernières. Les IRSC doivent être des partenaires des industries pharmaceutiques. Il faut plutôt établir des partenariats sans but lucratif avec les groupes communautaires et les astreindre à respecter ces normes.
 (1235)
Mme Jane MacDonald: C'est une question pertinente. À mon avis, il serait très intéressant de tenir un autre débat sur ce thème lors d'une séance stratégique.
Je voudrais cependant préciser quelques points. Premièrement, il faut que les conseils d'administration consultent les gens. Je ne suis pas convaincue que le genre d'échange que nous avons aujourd'hui se produit au sein des conseils d'administration. Ils peuvent dire qu'ils comprennent les déterminants de la santé ou qu'ils y souscrivent, mais je ne suis pas sûre que ce soit les cas. Il faudrait que les conseils d'administration essaient de consulter les membres de la collectivité qui éprouvent des difficultés ou vivent des expériences pénibles, et pas nécessairement les gens comme nous.
Cela m'amène à faire un autre lien. Vous souhaiterez peut-être envisager des moyens de former les membres de la collectivité afin qu'ils puissent participer à ces réunions. Il n'est pas facile d'y participer puisque vous devez posséder certaines compétences. Voilà donc une mesure très concrète qu'il est possible de prendre à l'égard des membres de la collectivité et des personnes qui travaillent aux différents niveaux.
Les visites dans la collectivité sont toujours un de mes sujets de prédilection. J'ai l'impression que de nombreux responsables des politiques ont... Ils ont leur vie privée, et bon nombre d'entre eux sont des parents, des femmes. J'essaierais probablement de tabler sur certains de ces aspects.
Je reviens aux pourvoyeurs de soins, à la génération sandwich. Il faut essayer de se pencher d'une façon positive sur certaines des questions avec lesquelles les femmes sont aux prises dans la bureaucratie. Il faut les mettre à contribution dans la recherche de solutions. Les visites dans la collectivité sont toujours efficaces, si vous pouvez trouver les collectivités pertinentes et les personnes opportunes avec lesquelles aborder ces questions.
Ce ne sont là que des idées que je vous lance.
La présidente: Merci.
Y a-t-il d'autres questions? Madame Kadis ou madame Torsney.
L'hon. Paddy Torsney: Il me semble que ce dont vous parlez touche aux droits fondamentaux de l'être humain et aux droits des femmes. Je reviens à peine du Kenya, où nous avons visité des bidonvilles horribles et le seul centre d'aide aux victimes d'agressions sexuelles qui existe dans tout le Kenya. Les choses qui ont été mises sur pied là-bas, nous les tenons pour acquises. Malheureusement, avec les problèmes qu'engendrent la frustration, l'absence d'égalité et tout le reste, la fréquence des viols est alarmante. C'est le pire exemple, mais cela nous amène à réfléchir sur tout ce que nous avons réalisé ici et sur tout ce que nous devons protéger.
Je m'interroge sur le rôle de l'éducation et je me demande dans quelle mesure l'éducation que nous donnons aux garçons et aux filles les amène à comprendre qu'il s'agit de droits et d'égalité. Comment produire ce changement générationnel pour ne plus avoir ces frustrations et pour ne pas reculer dans certains domaines où nous faisons des gains?
Madame MacDonald, vous avez parlé des personnes qui siègent aux divers conseils. J'aimerais espérer que nous soyons plus nombreuses à siéger à ces tables. Dans ma communauté, nous avons un conseil de planification sociale très dynamique, qui réunit de nombreux dirigeants du monde des affaires ainsi que des intervenants des services sociaux. Ces gens disent pourquoi c'est important pour tout le monde dans la collectivité. Leur directeur fait partie de notre conseil de développement économique, parce que c'est ainsi que fonctionne notre communauté, et je crois que c'est un bon exemple d'intégration.
Un agent immobilier m'a demandé un jour si c'était vrai qu'il y avait des gens dans notre communauté, parce qu'il n'avait jamais remarqué. Qui d'autre qu'un agent immobilier parcourt tout le territoire d'une collectivité? Je voulais lui indiquer les quartiers puisqu'il semblait ne pas avoir remarqué les endroits où se trouvent des gens un peu vulnérables.
Personne n'a mentionné le rôle des conseils de planification sociale. Je crois qu'ils existent dans un grand nombre de collectivités partout au pays. Comment intégrer ce qu'ils font et traduire en mesures concrètes les recherches qu'ils effectuent et voir à leur intégration dans les services de nos collectivités? C'est là où l'on traite des facteurs déterminants de la santé, où l'on parle des conséquences d'un manque de nourriture, où l'on identifie les besoins en programmes de petit déjeuner, entre autres, où l'on incite les gens d'affaires à jouer leur rôle ainsi que les agences de services sociaux qui existent sous une forme ou l'autre dans toutes nos communautés.
Vous pouvez aborder l'un ou l'autre de ces sujets, si vous voulez.
Mme Margaret Haworth-Brockman: Pour répondre à votre question sur le rôle de l'éducation, selon moi, l'éducation est directement liée à la promotion et à la prévention de la santé, et ce rôle suscite toujours de belles paroles, mais on n'y prête jamais toute l'attention qu'il mérite.
Le Centre d'excellence pour la santé des femmes des Prairies travaille effectivement avec les conseils de planification sociale à l'échelle locale, probablement comme un grand nombre de nos collègues, parce que ces conseils ont aussi une expertise et des ressources extraordinaires.
Je voulais également mentionner qu'on peut se servir des modèles de développement économique communautaire et des modèles de développement communautaire pour amener les femmes à prendre part à des discussions signifiantes, pour faire en sorte qu'elles se sentent les bienvenues et pour leur donner les moyens de participer. Le Centre d'excellence pour la santé des femmes des Prairies commence à peine à s'avancer dans ce genre de travail. Nous sommes sur le point de publier une étude qui porte précisément sur les très jeunes femmes qui risquent de perpétuer le cycle de pauvreté et sur la façon de s'attaquer au problème.
 (1240)
Mme Abby Lippman: On a terminé une étude tout récemment, qui était parrainée. Ma mémoire me fait défaut et je ne me souviens plus qui l'a parrainée, mais j'ai participé au volet qui a été effectué à Montréal. L'étude a été réalisée à quatre ou cinq endroits au pays, à partir du YWCA de Montréal. Ce projet visait à savoir comment on peut encourager les femmes à participer à la politique municipale. On y trouve certaines constatations très intéressantes sur le choix du moment, lorsqu'une femme peut se faire entendre à l'hôtel de ville.
Je crois qu'il s'agit d'utiliser ces groupes locaux et ces structures locales tels qu'ils existent. Ce sont eux qui devront rassembler les pièces et se faire entendre, parce qu'ils voient ces personnes, contrairement à votre agent immobilier ou à votre collègue ou peu importe, parce qu'ils savent qu'elles vivent ces choses.
Mme Jane MacDonald: J'allais simplement dire que j'étais d'accord avec vous en ce qui a trait au rôle des écoles, son importance, et comment, souvent... Nous ne les oublions pas, mais comme j'ai moi-même deux enfants dans le système scolaire, je sais qu'il est très facile de voir l'école comme un monolithe avec lequel il est difficile d'interagir. J'encourage le comité à écouter les éducateurs qui font des choses novatrices et essentielles auprès de nos jeunes, qui ont à coeur de créer des milieux réconfortants et qui s'intéressent à ce qui doit être fait dans le monde. Il y a de très belles choses qui sont réalisées.
Trop souvent, nous oublions qu'il est difficile de trouver le lien, en particulier entre la santé et l'éducation, même si ce devrait être très évident. Le personnel infirmier de santé publique était très actif dans les écoles. Il l'est moins maintenant, mais le lien est essentiel.
Mme Abby Lippman: Puis-je faire quelques commentaires à propos des écoles? Il s'agit peut-être d'une particularité locale, d'une situation qui se trouve seulement au Québec.
Un des groupes avec lesquels je travaille s'inquiète que le seul matériel disponible dans la province pour l'éducation des filles en matière de santé sexuelle est fourni par des compagnies pharmaceutiques. Il n'y a pas de place pour du matériel communautaire. Il n'y a aucun programme pour les infirmières dans les écoles. La santé est devenue l'affaire de tous au Québec. J'espère que c'est différent dans les autres provinces. Mais au Québec à l'heure actuelle, c'est le professeur de géographie ou d'histoire qui va s'en charger. On est éparpillé. Il est peut-être utile d'en parler, mais ces enseignants ne savent pas nécessairement comment intégrer adéquatement la santé dans leur cours. Je crois qu'on a confié l'éducation en matière de santé à l'industrie pharmaceutique. Je voulais simplement que cela soit dit.
La présidente: Merci.
Est-ce qu'il y a d'autres questions chez les conservateurs?
Mme Helena Guergis: J'ai deux questions. Concernant la sécurité du personnel infirmier, puisque c'est lui qui se retrouve en première ligne à traiter des cas de SRAS et d'autres maladies, croyez-vous qu'on a su répondre aux préoccupations du personnel infirmier à cet égard?
Mme Jane MacDonald: En partie. Le problème n'est pas complètement réglé, parce que le personnel infirmier qui travaille à temps plein est insuffisant, ce qui a contribué aux problèmes qu'on a connus avec le SRAS. Certains membres du personnel infirmier avaient des postes temporaires et travaillaient donc dans différents secteurs, ce qui créait un risque pour eux et pour la communauté également.
On s'est attaqué à ce problème, mais le personnel infirmier est toujours insuffisant. Certains correctifs ont été pris dans les milieux de travail pour qu'ils soient plus sécuritaires en cas de maladie comme le SRAS, mais ce n'est pas parfait.
Mme Helena Guergis: Pourriez-vous envoyer au comité de la documentation plus détaillée sur ce sujet?
Mme Jane MacDonald: Bien sûr.
Mme Helena Guergis: D'accord, merci.
Mon autre question porte sur la pilule du lendemain, qu'on peut maintenant obtenir facilement sans ordonnance. Je m'inquiète pour les jeunes filles des écoles secondaires qui ne sont peut-être pas bien renseignées et qui ne se protègent pas. Selon vous, doit-on s'inquiéter de l'accès que l'on donne aux jeunes filles?
Comprenez-moi bien. Cela ne me dérange pas. Je me demande simplement si elles n'y auront pas recours trop souvent, etc.
Mme Abby Lippman: Je fais partie d'une coalition qui cherche à faire en sorte que le gouvernement inscrive la pilule du lendemain dans ce qu'on appelle l'annexe II, ce qui signifie qu'une ordonnance d'un médecin ne sera plus nécessaire. Nous aimerions aller plus loin pour que cette pilule soit entièrement disponible sans aucune ordonnance, comme vous l'avez mentionné, ce qui ne sera pas le cas pour l'instant.
Nous avons examiné très attentivement les données. Il n'y a aucun risque associé à la pilule. Les données concernant les jeunes filles montrent qu'après avoir pris la pilule une fois, elles ont tendance à utiliser davantage des condoms. En d'autres mots, cela leur a servi d'avertissement.
Il n'y a aucune raison pourquoi une jeune fille ou n'importe quelle femme doit être conseillée par un pharmacien pour pouvoir obtenir un médicament. Notre seule préoccupation, c'est que lorsque la pilule deviendra disponible sans ordonnance, les prix pourraient augmenter et les jeunes filles n'auraient plus les moyens d'en acheter. Ce sera donc important que les provinces surveillent les prix.
Je travaille avec un groupe qui déteste pratiquement tous les médicaments—les anti-drogues—mais dans ce cas-ci, nous faisons des pressions pour que la contraception d'urgence soit approuvée et offerte sans ordonnance; vous entrez et vous achetez. Cette mesure n'incite pas à la promiscuité. Elle n'entraîne aucun risque pour la santé. Vous pouvez la prendre—ou plutôt prendre les deux pilules—en tout temps. Vous n'avez même pas besoin d'attendre les 12 heures. C'est passablement inoffensif et c'est presque moins risqué que d'acheter des aspirines sans ordonnance, si je peux risquer de dire cela.
 (1245)
Mme Helena Guergis: D'accord. Je m'inquiétais davantage des jeunes filles qui ne se protègent pas en sachant qu'elles peuvent prendre cette pilule. Vous me dites qu'il y a des données...
Mme Abby Lippman: Dans les pays où des études ont été réalisées, on constate qu'elles commencent à mieux utiliser les condoms et d'autres formes de contraception. On ne veut pas en prendre deux fois. On n'est ni des récidivistes, ni des habituées. On y a recours en cas d'accident—j'ai fait une erreur, je n'étais pas prête, mais je le suis maintenant.
Mme Helena Guergis: Ces données nous seraient très utiles.
Mme Abby Lippman: Nous vous les remettrons avec plaisir.
La présidente: Merci.
Je vais donner la parole à Mme Kadis, puis à Mme Brunelle, et nous conclurons ensuite notre réunion.
Mme Susan Kadis: Oui, je dois dire que nos discussions ont été extrêmement éclairantes. Nous avons tenu plusieurs réunions sur ces questions et les témoignages s'accumulent—beaucoup de thèmes sont récurrents—alors c'est très utile pour moi qui est une nouvelle députée.
Selon vous, quel rôle notre comité doit-il jouer pour améliorer la santé des femmes?
Mme Margaret Haworth-Brockman: J'encourage le comité et tous ses membres à ne pas s'éloigner des enjeux qui touchent les femmes et à faire prendre conscience à tout le monde—vos collègues et d'autres femmes avec qui vous travaillez—que les femmes ne forment pas un groupe d'intérêt spécial. Nous ne sommes pas ici pour attirer votre attention sur les préoccupations d'un groupe minoritaire. Je vous encourage dans ce sens et je vous félicite pour votre engagement, et j'espère que vous vous sentez en mesure d'affirmer qu'il ne s'agit pas ici d'un groupe d'intérêt spécial, mais bien de la majorité de la population.
Mme Abby Lippman: Je répéterais simplement ce que j'ai dit au tout début. Lorsque vous abordez des questions de santé, vous devriez inviter le ministre de la Santé et lui remettre un bulletin sur ce qu'il a fait depuis 1999, sur la stratégie en place, et lui dire que vous voulez une nouvelle stratégie. Amenez-le à inclure dans ces rapports les autres sujets dont vous entendez parler—l'habitation, l'alimentation, la sécurité—et toutes ces autres choses dont vous parlent les personnes qui comparaissent devant vous. Dites-lui que ces enjeux doivent être intégrés au rapport sur la santé des femmes. On ne veut pas seulement savoir que xnombre de femmes subissent une mammographie. On veut un tableau plus complet.
Mme Jane MacDonald: Je vous vois comme des défenseurs et comme des modèles pour les femmes qui ne peuvent peut-être pas s'exprimer comme vous le faites autour de cette table. Si vous pouvez amener la problématique des femmes, des familles et des enfants au niveau où elle devrait être... Je suis ravie que vous fassiez ce travail. L'AIIC en est absolument ravie et nous vous appuyons et nous allons travailler avec vous autant que nous le pouvons. C'est là, je crois, où vous avez le pouvoir. C'est vous qui avez le pouvoir.
La présidente: Nous ne voulons pas créer des attentes que nous ne pourrons pas satisfaire.
Madame Kadis, vous aviez encore quelques minutes...
Merci beaucoup. Nous nous reparlerons. Merci de votre aide. Je comprends que vous avez accepté de nous envoyer certains documents.
Madame Torsney.
L'hon. Paddy Torsney: Vous avez dit que plusieurs personnes devaient recevoir une formation ou être encouragées à comparaître devant les comités, et les comités se déplacent parfois, ce qui facilite un peu les choses. Mais puisque notre réunion est télédiffusée aujourd'hui, j'aimerais en profiter pour transmettre le message d'intérêt public suivant : nous encourageons les gens à s'adresser à notre comité et à tous les comités de la Chambre des communes. Ils peuvent consulter le site Internet www.parl.gc.ca pour voir ce que font les comités. En fait, la Chambre des communes prévoit un budget pour amener les gens à comparaître devant les comités.
Nous encourageons les gens. C'est beaucoup mieux d'avoir trop de gens qui veulent venir nous rencontrer que d'être obligés de partir à leur recherche. J'ai déjà été vice-présidente du comité des finances, et je sais qu'il est très difficile d'entendre la voix des femmes. À toutes les femmes qui nous regardent, si vous avez un point de vue à partager—individuellement ou en groupe—vous pouvez participer. Nous voulons que plus de gens sachent cela.
Lorsque nous étions aux finances, nous essayions également de passer le message que si la garde des enfants posait problème, nous allions tenter d'y remédier. Si les gens ont des problèmes de garde d'enfants, ils devraient nous en faire part pour que nous tentions de trouver une solution, si ces problèmes les empêchent de venir témoigner. Ils peuvent également envoyer des mémoires par écrit.
Quant à ce que vous avez dit un peu plus tôt, madame MacDonald, je crois que nous pouvons parler davantage du rôle de l'éducation et de l'importance de faire comprendre à plus de gens que les droits des femmes sont des droits de la personne et qu'il s'agit d'un enjeu général qui touche de nombreux domaines. Je crois qu'il est important de s'en souvenir, en particulier cette semaine.
 (1250)
La présidente: Merci.
Madame Brunelle.
[Français]
Mme Paule Brunelle: Madame MacDonald, il y a une chose qui m'a frappée lorsque vous avez commencé votre intervention.
Vous avez parler de l'érosion du rôle de l'infirmière-chef. Comme vous le savez, au Québec et ailleurs, on a de la difficulté à recruter des médecins. Entre autres, dans les régions du Québec, on a de la difficulté à attirer des médecins. Je me demande s'il y a un lien entre cette érosion et le fait que les infirmières ne peuvent pas poser certains gestes médicaux. Si les infirmières avaient le droit de poser certains gestes médicaux, cela pourrait être une solution à cette pénurie de médecins, me semble-t-il. Nous parliez-vous dans ce sens?
[Traduction]
Mme Jane MacDonald: Lorsque nous parlions de l'érosion du rôle de l'infirmière-chef, nous voulions dire qu'à l'intérieur des structures bureaucratiques d'un grand nombre d'établissements de soins actifs et également dans le domaine de la santé publique, ce niveau de gestion a été aboli. Ce sont maintenant d'autres personnes.
Pour répondre à votre question sur les autres rôles que les infirmières pourraient jouer dans le système, au niveau des soins de première ligne, il y a une importante initiative à l'heure actuelle, qui est financée par Santé Canada par l'entremise du Fonds pour l'adaptation des soins de santé primaires, qui vise à examiner le rôle des infirmières praticiennes et à déterminer comment ces infirmières peuvent jouer un rôle plus actif et plus approprié dans la prestation des soins de santé primaires partout au Canada, en particulier dans les régions rurales, dans les régions mal desservies et ailleurs également. C'est tout un exercice qui consiste à examiner les tâches interdisciplinaires et multidisciplinaires. Alors, oui, nous suivons cela de très près.
La présidente: Merci.
Avez-vous une question?
Mme Lynne Yelich: Je me demandais s'il était difficile de devenir infirmière praticienne. Quels sont les obstacles?
Je suis d'accord. Nous avons un réel besoin d'infirmières praticiennes, compte tenu de la pénurie de médecins, mais comment faire? La chose est-elle simple, compte tenu des études que vous avez faites? Est-ce qu'il en faut beaucoup plus pour parfaire votre éducation et être en mesure de faire cela?
Mme Jane MacDonald: Nous pouvons certainement fournir plus de renseignements au comité sur les infirmières praticiennes et leur préparation, puisque le projet est en marche présentement à l'AIIC. Pour devenir infirmière praticienne, vous devez d'abord avoir un diplôme de base en sciences infirmières. En plus de ce diplôme, il vous faut, partout au Canada, plus d'études, plus de formation ainsi qu'une expérience pratique. Il y a des obstacles, puisqu'il faut suivre un programme de formation et d'études pour y arriver.
Mme Lynne Yelich: Je crois que c'est Abby qui a mentionné, à propos du cancer du sein, que la recherche variait d'une province à l'autre. Je crois que vous avez dit que c'était la recherche, peut-être seulement sur le cancer du sein, mais pourquoi certaines provinces offrent-elles plus de services que d'autres?
Mme Abby Lippman: Pour les décisions qui sont prises relativement au cancer, la plupart des provinces—mais pas toutes—ont une organisation qui s'occupe des soins aux personnes atteintes de cancer et qui coordonne les choses. En Ontario, la situation est passablement bonne à comparer à celle des autres provinces. Ça dépend. Au Québec, il y a eu un programme de dépistage par mammographie pour les femmes de 50 ans et plus, et nous venons de terminer une étude qui montre là où ce programme ne remplit pas ses promesses.
La question de l'accès est un couteau à double tranchant, à mon avis. En d'autres termes, quel devrait être le pourcentage de femmes qui subissent une mammographie? Personnellement, je ne milite pas en faveur de la mammographie. Ce n'est pas quelque chose que j'ai beaucoup préconisé. Je suis davantage en faveur de la prévention, alors je ne suis probablement pas la bonne personne à qui vous devez demander quel devrait être le niveau de dépistage par mammographie.
Chaque groupe qui a établi un programme a déterminé le nombre de ses bénéficiaires, et il s'en tient à cela. Mais il y a des différences dans l'accès aux services, quand on songe au moment où vous pouvez les recevoir. À certains endroits, on utilise des appareils de radiographie mobiles qui peuvent être déplacés, alors qu'à d'autres endroits, vous devez vous rendre sur place. Ça varie selon la politique qui a été adoptée, et ce sont des décisions strictement provinciales.
 (1255)
La présidente: Je vous remercie toutes deux d'être venues ici, en particulier avec un si court préavis. Je crois que je peux parler au nom de tout le monde en disant que nous en avons appris beaucoup. Certaines des choses que vous avez présentées étaient passablement nouvelles pour nous, mais, en gros, ce sont des thèmes que nous avons abordés par le passé, en particulier sur le financement de base et l'analyse comparative entre les sexes. Je vous remercie beaucoup.
Si vous avez d'autres renseignements, je vous prie de les envoyer à la greffière, qui nous les fera ensuite parvenir.
À mes collègues du comité, j'espère de vous revoir—la santé aidant—, de l'autre côté du corridor, ce soir à 17 h 30. Nous accueillons un grand nombre de délégations.
Merci.
La séance est levée.