FEWO Réunion de comité
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de la condition féminine
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 17 mai 2005
¹ | 1535 |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal (Fleetwood—Port Kells, PCC)) |
Mme Beth Bilson (ex-présidente, Groupe de travail sur l'équité salariale, à titre personnel) |
¹ | 1540 |
¹ | 1545 |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
Mme Joy Smith (Kildonan—St. Paul, PCC) |
Mme Beth Bilson |
Mme Joy Smith |
Mme Beth Bilson |
¹ | 1550 |
Mme Joy Smith |
Mme Beth Bilson |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
Mme Paule Brunelle (Trois-Rivières, BQ) |
Mme Beth Bilson |
¹ | 1555 |
Mme Paule Brunelle |
Mme Beth Bilson |
º | 1600 |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
L'hon. Paddy Torsney (Burlington, Lib.) |
Mme Beth Bilson |
º | 1605 |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Beth Bilson |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Beth Bilson |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Beth Bilson |
º | 1610 |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
Mme Jean Crowder (Nanaimo—Cowichan, NPD) |
Mme Beth Bilson |
Mme Jean Crowder |
Mme Beth Bilson |
Mme Jean Crowder |
Mme Beth Bilson |
Mme Jean Crowder |
Mme Beth Bilson |
º | 1615 |
Mme Jean Crowder |
Mme Beth Bilson |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
Mme Jean Crowder |
Mme Beth Bilson |
Mme Jean Crowder |
Mme Beth Bilson |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
Mme Susan Kadis (Thornhill, Lib.) |
Mme Beth Bilson |
º | 1620 |
Mme Susan Kadis |
Mme Beth Bilson |
Mme Susan Kadis |
Mme Beth Bilson |
Mme Susan Kadis |
Mme Beth Bilson |
Mme Susan Kadis |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
Mme Joy Smith |
Mme Beth Bilson |
º | 1625 |
Mme Joy Smith |
Mme Beth Bilson |
Mme Joy Smith |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
Mme Joy Smith |
Mme Beth Bilson |
Mme Joy Smith |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
Mme France Bonsant (Compton—Stanstead, BQ) |
Mme Beth Bilson |
º | 1630 |
Mme France Bonsant |
Mme Beth Bilson |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
Mme Jean Crowder |
Mme Beth Bilson |
Mme Jean Crowder |
Mme Beth Bilson |
Mme Jean Crowder |
Mme Beth Bilson |
Mme Jean Crowder |
º | 1635 |
Mme Beth Bilson |
Mme Jean Crowder |
Mme Beth Bilson |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
Mme Jean Crowder |
Mme Beth Bilson |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
M. Russ Powers (Ancaster—Dundas—Flamborough—Westdale, Lib.) |
º | 1640 |
Mme Beth Bilson |
M. Russ Powers |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
L'hon. Paddy Torsney |
º | 1645 |
Mme Beth Bilson |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Beth Bilson |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Beth Bilson |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Beth Bilson |
L'hon. Paddy Torsney |
º | 1650 |
Mme Beth Bilson |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Beth Bilson |
L'hon. Paddy Torsney |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
Mme Helena Guergis (Simcoe—Grey, PCC) |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
Mme Beth Bilson |
La vice-présidente (Mme Nina Grewal) |
CANADA
Comité permanent de la condition féminine |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 17 mai 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1535)
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Nina Grewal (Fleetwood—Port Kells, PCC)): Nous allons commencer par souhaiter la bienvenue à Beth Bilson. C'est l'ancienne présidente du Groupe de travail sur l'équité salariale. Bienvenue.
Vous pouvez commencer votre exposé.
Merci.
Mme Beth Bilson (ex-présidente, Groupe de travail sur l'équité salariale, à titre personnel): Eh bien, il y a un peu plus d'un an le Groupe de travail sur l'équité salariale a publié son rapport final que vous avez probablement vu. C'est un document assez complexe et je ne vais donc pas essayer de le résumer, mais j'aimerais faire quelques remarques à ce propos et attirer votre attention sur un ou deux points particuliers du rapport. Ensuite, je serais très heureuse de répondre à vos questions.
Le groupe de travail était composé de trois membres : moi-même, qui suis professeure de droit à l'Université de la Saskatchewan; Mme Marie-Thérèse Chicha, de l'Université de Montréal, qui est professeure de relations industrielles; et Scott MacCrimmon, qui vit à Ottawa et qui est consultant en équité salariale.
Les deux parties du rapport sur lesquelles j'aimerais attirer votre attention constituent à mon avis la base de toutes les recommandations du rapport. La première est une description au début du rapport de ce que nous avons fait, de la façon dont nous avons exécuté notre mandat, qui consistait à examiner l'article 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne et à envisager des formules de réglementation plus efficaces de l'équité salariale.
Pour exécuter ce mandat, nous avons eu deux types d'activités distincts. Il y a tout d'abord eu les consultations. Nous avons tenu des audiences publiques. Nous avons rencontré de nombreux intéressés. Nous avons organisé des tables rondes auxquelles les employés, les organisations et les employeurs du secteur réglementé au niveau fédéral se sont réunis pour discuter des questions figurant à notre programme de consultation.
La deuxième partie de nos activités a été le programme de recherche. Je pense que tous les documents de recherche sont maintenant disponibles. Ils sont traduits et peuvent servir de référence. Nous avons commandé en tout 28 documents de recherche sur un vaste éventail de sujets. Nous avons rédigé un programme de recherche au début de nos délibérations, nous avons invité les personnes inscrites sur notre liste de correspondants à donner leur avis sur le programme de recherche et nous avons modifié celui-ci, après quoi nous sommes allés chercher des experts sur les sujets figurant à ce programme. Nous avons ainsi réussi à faire couvrir une bonne partie de ces sujets par des personnes expertes dans divers domaines.
L'autre partie du rapport que je voudrais vous signaler particulièrement à ce stade, c'est la partie de l'introduction intitulée « Points en commun ». Dans notre discussion, notamment avec les employeurs régis par le gouvernement fédéral et les organisations représentant des employés et des groupes de défense, nous avons dégagé un certain nombre de points de consensus, c'est-à-dire des points sur lesquels toutes ces parties s'entendaient. Certes, tout le monde n'était pas nécessairement d'accord sur les stratégies à utiliser pour atteindre ces objectifs, mais je pense qu'on peut dire qu'il y avait un consensus sur certains points, et je vais vous les résumer.
Premier point, nous n'avons trouvé personne qui conteste le principe de l'équité salariale. Tous reconnaissaient qu'il est inacceptable de payer des employés différemment en raison de leur sexe et que c'est quelque chose qu'il faut éliminer. Deuxièmement, on s'entendait pour dire que l'équité salariale est un droit humain.
Cela ne veut pas dire qu'il n'y avait pas quelques désaccords sur le type de loi à adopter pour régler le problème. Pour certains, l'équité salariale devrait faire partie de la législation du travail et être administrée par le programme du travail. Pour d'autres, la question devrait faire partie de la législation des droits de la personne, comme c'est le cas actuellement, dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.
Mais indépendamment du cadre législatif choisi, il y avait un accord pour dire que le principe du salaire égal pour un travail de valeur égale est un principe qui fait partie des droits de la personne. Cela s'explique par le fait qu'on le trouve dans beaucoup des engagements internationaux souscrits par le Canada, dans la Charte des droits, et dans les lois provinciales sur les droits de la personne.
Le troisième sujet d'entente pour tout le monde—et ceci comprend les représentants des employeurs—était que les employeurs ont une obligation positive de prendre des mesures pour éliminer la discrimination salariale. Il y a une chose qui a été universellement critiquée dans nos consultations, c'était le fait que l'article actuel de la Loi canadienne sur les droits de la personne soit basé sur les plaintes, le fait que les employés doivent déposer une plainte pour pouvoir soulever le problème du salaire égal pour un travail de valeur égale. Toutes les personnes à qui nous avons parlé, y compris les employeurs, considéraient que, quel que soit le type de loi qui sera mis en place, il faudrait reconnaître explicitement que les employeurs sont dans l'obligation de prendre des mesures positives pour éliminer la discrimination.
Là encore, cela ne veut pas dire que l'on s'entendait parfaitement sur les obligations particulières ou sur les formes que pourraient prendre les obligations, mais tout le monde s'entendait sur l'idée fondamentale de l'obligation positive des employeurs.
Le quatrième point d'accord était le fait que le cadre mis en place, quel qu'il soit, doit être également accessible aux employés syndiqués et non syndiqués. Beaucoup se plaignent de la situation actuelle parce qu'étant donné la complexité de la procédure de plainte en vertu de l'article sur l'équité salariale dans la Loi des droits de la personne, le système est inaccessible pour les personnes qui ne sont pas représentées par des syndicats. Toutes les personnes que nous avons consultées étaient d'accord pour dire que ceci devrait être changé.
Cinquièmement, on s'entendait pour dire que la loi devrait donner davantage de précisions sur les normes à respecter. L'article 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne correspond à ce qu'on pourrait appeler la Loi sur les droits de la personne des années 70. C'était fondé sur l'idée que si l'on énonce un principe général relatif aux droits de la personne, les gens trouveraient la façon de s'y conformer. Eh bien, dans le cas de l'équité salariale, c'est vraiment beaucoup demander. Même ceux qui sont convaincus, ont du mal à savoir exactement ce qu'ils sont censés faire ou ce qui va correspondre à la norme. Ainsi toutes les parties que nous avons rencontrées ont demandé à avoir davantage de précisions sur la norme qu'elles sont censées respecter. Qu'est-on vraiment censé faire?
Sixièmement, tous disaient souhaiter une source neutre d'aide, d'information et de soutien. Beaucoup de gens ont dit qu'ils ne pouvaient pas vraiment respecter les exigences relatives à l'élimination de la discrimination salariale sans une aide quelconque. De nombreuses personnes ont cité le modèle de l'Ontario. La première fois que l'Ontario a adopté sa loi, la Ontario Pay Equity Commission disposait de vastes moyens pour fournir une aide technique, des programmes éducatifs et du soutien. Elle répondait aux questions, aidait les employeurs à faire des comparaisons de rémunération, ce genre de choses. Beaucoup des intervenants ont dit qu'il était important d'avoir ce type de ressources.
¹ (1540)
Le dernier point sur lequel ils étaient d'accord était qu'ils acceptaient et reconnaissaient la nécessité d'un organisme d'arbitrage indépendant pour examiner les questions d'équité salariale, un organisme doté d'une certaine expertise. L'une des préoccupations des personnes à qui nous avons parlé, et c'est d'après ces personnes l'une des raisons pour lesquelles les litiges en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne ont tellement traîné en longueur, était le fait que les membres du Tribunal canadien des droits de la personne qui ont été amenés à trancher ces questions ont dû repartir à zéro à chaque fois. Toutes ces audiences ont duré 300 ou 400 jours, il n'était pas vraiment possible de demander aux mêmes personnes d'entendre plusieurs plaintes. Par conséquent, il n'y a jamais vraiment d'accumulation d'expertise sur les questions d'équité salariale, qui impliquent énormément de complexité technique.
On a dit, et nous le mentionnons dans le rapport, qu'il serait peut-être possible de constituer ce genre d'expertise dans le cadre d'un organisme juridictionnel existant. Que ce soit un organisme distinct qui s'occuperait d'équité salariale, et c'est d'ailleurs ce que nous recommandons dans notre rapport, ou que ce soit un organisme juridictionnel existant, il est clair qu'il faut qu'il existe un organisme indépendant quelconque pour entendre les plaintes de disparité salariale.
Dans l'ensemble, ces personnes voulaient se concentrer sur le premier plan. Autrement dit, elles souhaitaient avoir un système qui permettrait aux gens de trouver une aide, de recevoir des conseils, d'aborder ces obligations de façon positive, dans l'espoir qu'il n'y aurait pas de plaintes ou qu'il y en aurait moins. Mais tous reconnaissaient qu'il y aurait fatalement des différends, des divergences d'opinions, il y aurait forcément des employeurs qui ne respecteraient pas leurs obligations ou des questions auxquelles les parties elles-mêmes seraient incapables de répondre. Dans ces conditions, il était indispensable d'avoir un organisme juridictionnel indépendant.
Je vous ai exposé ces sept points, qui sont les points d'entente des parties avec lesquelles nous avons dialogué, parce que ces sept points constituent la fondation du modèle que nous avons exposé dans notre rapport et des conclusions que nous avons tirées, en nous appuyant sur tout un éventail de sources d'information. Quand nous avons rédigé ces conclusions et nos recommandations, nous avons souvent rappelé ces points de consensus car j'ai eu l'impression, et nous avons tous eu l'impression que c'était une manifestation importante de la volonté des employeurs sous réglementation fédérale, de leurs organisations d'employés et de leurs employés d'oeuvrer à éliminer la discrimination salariale.
Sur ce, je me ferais un plaisir de répondre à vos questions.
¹ (1545)
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Merci, madame Bilson.
Nous allons commencer le premier tour de table. Nous commencerons par les Conservateurs.
Madame Smith.
Mme Joy Smith (Kildonan—St. Paul, PCC): Merci, madame la présidente.
Dans ma province, au Manitoba, nous avons une loi sur l'équité salariale. Si nous voulons avoir une loi au niveau fédéral, avez-vous réfléchi à la coordination que cela va nécessiter pour qu'on ait l'assurance que la loi fédérale appuiera ce qui se fait déjà dans les provinces?
Mme Beth Bilson: Quand nous avons examiné la situation d'ensemble au Canada—comme vous le savez, il y a énormément de variété—nous avons constaté que dans certaines provinces il n'y avait pas de loi, mais qu'il y en a dans certaines autres. En Saskatchewan, par exemple, il y a une sorte d'entente entre le gouvernement et les employés de la fonction publique. C'est un cadre plutôt qu'une loi.
Je crois que ce que nous avons essayé de faire, c'est de recommander un système qui nous semblerait pouvoir fonctionner pour les employeurs sous réglementation fédérale. Je ne vois pas pourquoi il ne serait pas compatible avec les lois provinciales. Il couvre des groupes d'employés différents.
Mme Joy Smith: Merci.
Je sais qu'au Manitoba—je parle du Manitoba, pas de la Saskatchewan—il y a une loi qui a été mise en oeuvre et utilisée. Je me demandais simplement s'il y a vraiment eu un effort concerté pour essayer de discuter avec les provinces qui ont une loi. Je crois qu'il y a en une au Nouveau-Brunswick, et aussi dans une ou deux autres provinces. Vous avez raison, je sais bien qu'il y a des provinces qui n'en ont pas. C'est certain, mais je me demandais s'il ne serait pas possible de s'inspirer de ce qui existe déjà dans certaines provinces pour élaborer cette loi…
Mme Beth Bilson: Je pense qu'on peut dire que nos recommandations s'inspirent effectivement de ces lois. Nous avons examiné toutes les dispositions législatives et nous discutons de divers aspects de ces dispositions dans notre rapport. Je crois que le Manitoba a été la première province à mettre en oeuvre une démarche proactive qui a ouvert la voie aux initiatives ultérieures en Ontario et au Québec, par exemple, des provinces qui sont allées plus loin en élargissant cette notion aux employeurs du secteur privé. Nous avons examiné toutes ces lois et tenté d'en tirer des principes qui nous paraissaient utiles.
¹ (1550)
Mme Joy Smith: J'ai une autre question. Au niveau provincial, vous pouvez avoir le cas—et j'en ai connu certains—d'un employé qui a un problème de rémunération en fonction du sexe. Les employés ont parfois du mal à dénoncer ce genre de situation parce qu'ils risquent de gagner sur un point mais de perdre la guerre. Cela peut avoir des retombées sur leur emploi. Je crois que vous avez parlé d'une inquiétude à propos des employeurs qui pourraient soulever le problème.
Y a-t-il quelque chose à mettre dans le projet de loi ou dans les suggestions pour le texte de loi qui viserait à protéger les employés qui ne sont pas rémunérés correctement, du point de vue de l'équité salariale, de sorte que si ces employés se plaignaient, cela n'aurait pas de répercussions sur leur emploi? Je crois que c'est un point essentiel.
Mme Beth Bilson: Oui, et cela a effectivement été l'une de nos préoccupations. Je pense que nous avons essentiellement répondu à ce problème dans nos recommandations en proposant d'institutionnaliser tout le système, c'est-à-dire de créer un système obligeant l'employeur et les représentants des employés syndiqués et non syndiqués à discuter des modalités salariales de tous les employés et à examiner avec eux les moyens d'éliminer tout ce qui est de nature discriminatoire. Je pense que cela permet d'éviter de concentrer toute l'attention sur l'employé en tant qu'individu.
Cela ne veut pas dire pour autant qu'il n'y aura pas de situations où un employé particulier aura quand même des problèmes qu'il souhaitera soulever, mais se sentira mal à l'aise pour le faire. Je crois que l'expérience de l'Ontario et dans une certaine mesure du Québec—bien que l'expérience du Québec soit plus récente et donc plus difficile à évaluer—a montré que lorsqu'il existe un organisme juridictionnel neutre doté d'une certaine notoriété, les employés osent vraiment demander des renseignements ou demander comment on peut régler leurs problèmes. Mais c'est une préoccupation qui demeure. Que peut-on faire pour les employés qui sont en situation vulnérable et qui n'osent pas aborder ce genre de questions avec leur employeur?
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Madame Brunelle, allez-y.
[Français]
Mme Paule Brunelle (Trois-Rivières, BQ): Bonjour, madame.
Le caucus du Bloc québécois a reçu la visite de membres du Congrès du travail du Canada, de femmes de la FTQ et de femmes de l'Association nationale de la femme et du droit. On nous disait, il y a maintenant un an, que ce rapport sur l'équité salariale avait été déposé. Il y maintenant une loi, et on cherchait à comprendre ce retard. Avez-vous l'impression que ce n'est qu'une question de volonté politique ou si ce rapport a difficilement fait consensus? Était-ce un rapport dissident sur certains aspects, ce qui rendait difficile l'application de cette loi sur l'équité salariale?
[Traduction]
Mme Beth Bilson: Cela fait beaucoup de questions.
Évidemment, je ne peux pas vraiment prétendre savoir exactement qui veut faire quoi, à qui il faut parler ou qui doit prendre l'initiative dans ce domaine. Mon rôle a cessé lorsque nous avons sorti notre rapport.
Ce que je peux vous dire, c'est que nous avions l'impression que les diverses parties, c'est-à-dire les employeurs sous réglementation fédérale et leurs employés étaient assez d'accord pour vouloir un changement. Je suis convaincue qu'il serait possible de présenter ou de mettre en oeuvre une loi, parce que je crois que les gens qui sont les plus touchés par ce problème, c'est-à-dire les employeurs et les employés, ne sont pas satisfaits du système actuel et préféreraient le remplacer par autre chose.
Cela ne veut pas dire pour autant que tout le monde était d'accord pour tout, sur chaque détail des recommandations que nous avons faites, mais je suis convaincue que nous avons bien écouté les deux parties, ou les diverses parties. Le groupe de travail lui même était d'accord sur pratiquement tout. Il y a quelques endroits où il y a des recommandations dissidentes, mais il s'agit de questions de détail bien précises et non de la démarche générale. Je ne sais pas si c'est simplement parce que les gens d'Ottawa ont été très occupés l'année dernière, et c'est probablement vrai, mais on a donné un certain retentissement l'année dernière à ce qu'on pourrait appeler des priorités en matière de droits de la personne ou d'égalité.
D'après moi, les gens qui s'occupent du système seraient prêts à participer à des discussions pour faire avancer le dossier. Je sais que c'est particulièrement vrai des organisations qui représentent les employés, mais je crois que du côté des employeurs aussi, il y a une certaine aspiration au changement. J'espère donc que les choses vont progresser un peu plus rapidement à l'avenir que dans le passé.
¹ (1555)
[Français]
Mme Paule Brunelle: Il est sûr qu'on peut penser que certains employeurs ont des réticences à adopter l'équité salariale. Pour avoir vu ce qui s'est passé au Québec, je comprends que c'est un processus assez complexe que celui de comparer des tâches et des postes de travail, ce qui explique peut-être parfois certaines longueurs. Il reste quand même que, tant qu'on n'aura pas une loi sur l'équité salariale, on ne pourra forcer personne à s'engager dans un processus.
Dans les recommandations de votre Groupe de travail sur l'équité salariale, y a-t-il des priorités qu'on pourrait déceler et par lesquelles on pourrait commencer à sensibiliser les décideurs politiques à l'application d'une loi sur l'équité salariale?
[Traduction]
Mme Beth Bilson: Je crois que la première partie de votre remarque est très juste. Je ne veux pas dire qu'il n'y a pas d'employeurs qui résistent à cette idée et j'imagine même, pour être un peu cynique, qu'il y a probablement des employeurs qui trouvent le système actuel très satisfaisant parce que cela leur évite de devoir faire quoi que ce soit. Ils peuvent attendre que les employés se plaignent et si les employés ne se plaignent pas, ils peuvent continuer à faire ce qu'ils font.
Mais, comme je le disais, l'expérience au Québec est assez récente et n'a pas été beaucoup étudiée. Les recherches qui ont été faites en Ontario ont montré que même si de nombreux employeurs étaient très réticents au départ, dans l'ensemble, beaucoup d'entre eux ont trouvé que c'était une expérience positive; c'est-à-dire que le fait de se renseigner sur ce qu'ils demandaient à leurs employés de faire et sur la valeur des tâches qu'ils leur faisaient accomplir leur a été très utile du point de vue de la gestion de leurs entreprises.
Je crois que cela nous ramène à l'idée de fournir suffisamment d'aide aux employeurs; c'est-à-dire de les aider s'ils trouvent que c'est difficile. Je crois que c'est particulièrement difficile pour les petits employeurs parce qu'ils se disent : « Je n'ai pas les moyens d'engager un expert en équité salariale pour qu'il passe deux ans à essayer d'analyser mes schémas de paie dans mon entreprise ». Mais si l'on peut proposer aux employeurs une forme d'aide plus générique, disons l'aide technique d'une commission ou d'une agence, pour leur montrer que c'est possible et qu'il y a maintenant de nombreux exemples de la façon de structurer un système de paie pour qu'il ne soit pas discriminatoire…
Pour ce qui est d'une campagne publique, l'idée de base de nos recommandations est que la loi devrait proposer un modèle proactif, qu'elle devrait imposer une obligation positive aux employeurs en les faisant discuter avec leurs employés de leurs pratiques de rémunération, et que cette obligation devrait s'appliquer à tous les employeurs sous réglementation fédérale. Et nous avons proposé un genre de régime qui permettrait de le faire.
En ce qui concerne le débat public, je ne sais pas exactement quoi proposer. Je ne suis pas en mesure de lancer ce débat public, mais je sais que l'ANFD, l'Association nationale de la femme et du droit, s'en occupe et fait des interventions à ce sujet. Je sais que cela fait aussi partie de la campagne publique des organisations d'employés.
º (1600)
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Vous aviez une question, Susan? Non. Paddy?
L'hon. Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Merci.
Après avoir écouté votre exposé, je me réjouis que vous ayez entrepris ce travail, car je crois que le défi est en partie de faire comprendre les règles aux gens. Ce n'est pas simplement l'idée que Russ et moi-même touchions le même salaire pour le même emploi, mais c'est aussi le fait que les groupes d'employés sont dominés par les hommes par opposition aux femmes, et c'est que les agents du personnel de nettoyage des écoles, qui sont à dominance masculine, sont payés la même chose que les secrétaires de ces écoles, qui sont à dominante féminine.
En Ontario, la question a été très controversée quand elle a été abordée. J'étais employée du gouvernement provincial à l'époque.
Mme Brunelle a parlé de calmer un peu le jeu, et vous nous avez donné des exemples des types d'aide qu'on pourrait apporter aux petits employeurs, mais en général, est-ce que c'est un domaine dans lequel on pourrait se servir davantage des chambres de commerce, des diverses organisations, par le biais de campagnes, pour expliquer pourquoi les gens méritent d'avoir la même rémunération?
Mme Beth Bilson: Je sais que la loi a été très controversée au départ en Ontario, et c'est encore probablement le cas dans certains milieux. D'après ce que nous ont dit plusieurs observateurs en Ontario, au bout de quelques années, la Commission de l'équité salariale a réussi à sensibiliser considérablement le public. Les gens avaient l'impression que cela commençait à porter fruit.
Ensuite, on a réduit les ressources de cette commission. Elle a beaucoup réduit ses activités, les ateliers pour les employeurs et les activités générales de sensibilisation dont vous parlez, mais je crois qu'elle a quand même fait la différence en rassurant les gens et en leur montrant qu'il n'était pas question de bouleverser complètement leur existence.
Personnellement, j'ai l'impression que c'est une notion difficilement contestable. On est prêt à payer des gens pour faire quelque chose, mais on n'est pas prêt à les payer si ce sont des femmes. Cela me semble assez difficile à justifier.
Je crois qu'une des choses qui ont été clairement exprimées, c'était la nécessité d'une plus grande information publique. Il faudrait que ce soit comme de nombreuses autres questions de droits de la personne. Il faut qu'il y ait une vaste composante de sensibilisation du public pour montrer que c'est quelque chose de positif de vouloir réaliser l'équité sur le lieu de travail.
º (1605)
L'hon. Paddy Torsney: Dans quelle mesure la loi est-elle efficace au niveau des petites entreprises? J'imagine que c'est plus facile dans de grandes entreprises. On a plus de soutien pour les ressources humaines, par exemple, quand on a 150 employés que quand on en a seulement cinq.
Mme Beth Bilson: Je crois qu'il y a trois paliers dans la législation du Québec et qu'il y a trois types d'obligations. Nous avons suggéré que les employeurs qui ont 15 employés ou plus soient tenus d'élaborer un plan. Dans le cas de ceux qui en ont moins de 15, il est quand même illégal de faire de la discrimination. Ces employeurs ne sont pas tenus d'élaborer un plan d'équité salariale, mais nous recommandons qu'on les aide à éliminer la discrimination.
Nous avons rédigé un document intéressant sur la façon d'aider les tout petits employeurs à comparer les salaires.
La législation du Québec est aussi intéressante à cet égard, et c'est une des choses que nous suggérons de mettre à profit. Par exemple, on a créé au Québec des plans sectoriels pour les petits employeurs du secteur du tourisme. Au lieu que chacun de ces petites hôtels soit obligé de faire venir un consultant en équité salariale, l'organisation peut avoir un plan. Chaque employeur a sa responsabilité à son niveau, mais je pense qu'il existe des moyens de répondre au problème des ressources pour que le fardeau soit moins lourd pour les petits employeurs.
L'hon. Paddy Torsney: Dans l'analyse de Lydia Scratch, j'ai été étonnée d'apprendre que la Colombie-Britannique, l'Alberta et Terre-Neuve n'ont pas de loi sur l'équité salariale. C'est choquant en l'an 2005. Bien sûr, on prétexte généralement que l'on n'a pas les moyens de mettre ces dispositions en vigueur ou de payer le même salaire aux femmes parce que les ressources financières ne sont pas suffisantes pour le moment.
Je pose toujours cette question. Pendant combien de temps encore les femmes vont-elles devoir soutenir l'économie avant d'avoir leur juste part? Ne serait-ce pas logique d'être payé pour un travail de valeur égale? C'est peut-être trop logique, ou j'ai eu la chance d'avoir un emploi en Ontario là où c'était déjà fait.
En ce qui concerne les progrès réalisés et la façon dont on a encouragé le gouvernement à mettre la loi en exécution, vous avez donné quelques exemples concrets. Je pense qu'il y a 113 recommandations dans votre rapport. Vous en avez souligné quelques unes sur lesquelles vous aimeriez que nous nous penchions de façon un peu plus approfondie. Pensez-vous que ceci pourrait être prêt et en place assez rapidement, s'il y avait certaines pressions?
Mme Beth Bilson: Nous avons essayé d'examiner la plupart des questions que vous auriez à étudier—si vous voulez bien nous croire sur parole. Le rapport contient beaucoup de détails sur certaines questions précises. Nous ne nous bornons pas à dire qu'il faudrait être proactif, et avoir des comités d'employés. Nous expliquons quelle devrait être la proportion d'employé dans ces comités, ce qu'il faut faire pour les petits employeurs,etc. Nous avons essayé de présenter un cadre qui nous paraît efficace.
L'hon. Paddy Torsney: J'ai encore une question. La meilleure chose à faire est probablement de mettre en oeuvre votre plan. Mais parmi les lois provinciales, y en a-t-il une qui ressort plus particulièrement?
Mme Beth Bilson: Nous avons examiné le cheminement des lois dans diverses provinces, et il y a eu tout un apprentissage. On a commencé par des dispositions de salaire égal pour un travail égal qui sont en vigueur dans la plupart des provinces. Nous avons ensuite examiné la fonction publique du Manitoba, sa démarche proactive à l'égard des employés du secteur public, qui a été reprise au Canada atlantique. En Ontario, cette initiative a été étendue au secteur privé. Ensuite, le Québec est allé plus loin en créant ces structures de commissions patronat-salariés, qui nous ont semblé être une bonne idée. Et d'après nos constatations, c'est probablement le Québec qui est le plus avancé.
º (1610)
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Madame Crowder, c'est à vous.
Mme Jean Crowder (Nanaimo—Cowichan, NPD): Merci, madame la présidente. Je tiens à vous remercier pour votre exposé et votre excellent rapport.
Je voudrais revenir un peu sur l'historique de tout ce sujet avant de poser ma question. J'ai demandé à nos adjoints de retrouver certains jalons historiques pour l'équité salariale. J'ai été choquée de voir depuis combien de temps nous parlions d'équité salariale au Canada. En 1951, il y a eu la Convention no 100 des Nations Unies sur l'égalité de rémunération. Il y a eu la Loi canadienne sur les droits de la personne en 1997. En 1986, la Commission canadienne des droits de la personne a publié son ordonnance sur la parité salariale. En 1995, la Plate-forme d'action de Beijing a aussi parlé de parité salariale.
Vous avez mentionné les délais scandaleux qui ont été nécessaires pour régler certains de ces différends dont plusieurs ne sont d'ailleurs toujours pas réglés 20 ans après. J'ai donc bien apprécié le caractère mûrement réfléchi et la clarté des recommandations de ce document.
Le 4 mars 2005, le comité a reçu une lettre du ministère de la Justice dans laquelle on pouvait lire :
Au cours des mois qui viennent, les fonctionnaires du ministère de la Justice poursuivront leur analyse des recommandations et d'autres approches en vue d'élaborer des options de réforme législative. Il leur faudra pour cela mener des consultations. |
Quand j'ai regardé votre rapport, j'y ai vu des pages et des pages de personnes consultées. Alors quand j'entends parler encore de « mener des consultations », je vois le drapeau rouge s'agiter devant moi. Combien d'années va-t-il encore falloir attendre avant qu'on mette en oeuvre ces recommandations concrètes? Alors je vous pose la question : Faut-il encore mener des consultations? Et dans l'affirmative, en quoi devraient-elles consister? Jusqu'où faut-il les pousser? J'aimerais que les représentants du ministère de la Justice reviennent nous présenter un calendrier d'élaboration et de mise en oeuvre de la loi. Voilà ce que je voudrais voir, car je pense que cela fait assez longtemps que les femmes du Canada attendent.
Mme Beth Bilson: C'est encore une chose sur laquelle je n'ai pas mon mot à dire. J'ai cessé d'avoir une influence quelconque le 4 mai 2004 ou à la date à laquelle nous avons présenté ce rapport. Nous avons essayé d'avoir des consultations aussi poussées que possible. Nous avons essayé aussi de voir jusqu'où les participants étaient prêts à aller, et c'est peut-être ce que veut dire le ministère de la Justice quand il parle de mener de nouvelles consultations.
Mme Jean Crowder: Quand vous parlez des participants, vous voulez parler des employeurs?
Mme Beth Bilson: Les employeurs et les employés sous réglementation fédérale.
Mme Jean Crowder: Il faudrait peut-être demander aux femmes qui travaillent pour ces entreprises jusqu'où elles se sentent prêtes à aller.
Mme Beth Bilson: Oui, effectivement.
Mme Jean Crowder: Ce sont elles qui devraient mener l'offensive.
Mme Beth Bilson: Si l'on veut être réaliste, je crois qu'il faut proposer quelque chose à quoi les gens feront attention et qu'ils pourront respecter. Je crois qu'une de leurs plaintes à propos du système actuel est que même s'ils le veulent, ils ont beaucoup de mal à le respecter.
Nous nous sommes efforcés de voir ce que pensaient les gens et de proposer un ensemble de recommandations qui nous paraissaient réalistes et en même temps, nous espérions, un peu visionnaires, pour faire avancer les choses. Ce qu'il faut faire au-delà de cela, je ne peux pas vraiment vous le dire. Je suis d'accord avec vous. Il y a une chose qui nous a vraiment impressionnés quand nous avons commencé ce travail—et cela n'a pas surpris les gens qui faisaient des recherches dans ce domaine particulier—c'est la persistance obstinée de cet écart salarial et de la différence entre les hommes et les femmes. Nous avons aussi parlé un peu des divers écarts dont sont victimes d'autres groupes désavantagés aussi, sans pouvoir nous attaquer directement à ce problème particulier.
º (1615)
Mme Jean Crowder: Je sais que dans le rapport, à la page 173 de l'anglais, l'ANFD dit clairement qu'on ne peut pas considérer isolément le principe du salaire égal pour un travail de valeur égale. Notre comité a beaucoup travaillé sur l'analyse différenciée selon les sexes et sur le financement de base des groupes féminins, et ces femmes ont donc tout à fait raison de dire que l'équité salariale n'est qu'un élément du tableau et qu'il est essentiel de replacer cette notion dans son contexte. Quand vous parlez de persistance, de manque de progrès du principe d'une rémunération égale des femmes pour un travail de valeur égale, je crois que c'est révélateur, et que tant que nous n'aurons pas une approche à multiples facettes, il sera très difficile d'accomplir ce genre de travail.
Mme Beth Bilson: Oui, et nous soulignons que nous ne parlons que d'une seule question et d'un seul type de stratégie pour essayer de régler le problème. Nous n'avons pas prétendu couvrir tout le reste de la question mais nous affirmons qu'il faut voir notre action dans ce contexte.
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Il vous reste encore un peu de temps.
Mme Jean Crowder: Ah bon? Très bien.
Il y a une chose qui est importante, c'est que vous précisez bien que ce rapport ne traite en fait que des employeurs sous réglementation fédérale, et que par conséquent un important pourcentage de femmes restent en dehors de l'équation, n'est-ce pas? Avez-vous une idée du pourcentage des travailleuses dont on parle?
Mme Beth Bilson: C'était effectivement l'une de nos frustrations. Évidemment, elles sont couvertes par la loi fédérale ou par la loi provinciale.
Mme Jean Crowder: Et il y a des provinces qui n'ont pas…
Mme Beth Bilson: Et il y a des provinces, comme l'Alberta ou la Colombie-Britannique, qui n'ont même pas de loi du tout.
Il y a une chose qui nous a étonnés et un peu frustrés, c'est qu'il n'existe pas d'information fiable sur les groupes qui relèvent de la réglementation fédérale. Les statistiques ne sont pas organisées comme cela. On peut extrapoler en prenant des éléments de certains secteurs industriels particuliers comme les institutions financières, mais même là, des institutions financières provinciales comme les coopératives de crédit ne sont pas couvertes, donc leurs employés feraient partie de ce groupe.
Nous avons fait ce que nous avons pu. Nous décrivons la façon dont nous avons estimé ce nombre. Il y a environ 700 000 employés sous réglementation fédérale et environ 6 000 employeurs sous réglementation fédérale, mais nous ne sommes pas absolument certains parce que, comme je vous le disais, les statistiques ne sont pas conçues de façon à permettre de savoir facilement qui fait partie du secteur fédéral. Il faut faire des recoupements à partir des statistiques existantes mais il n'y a pas vraiment de mécanisme pour obtenir une réponse claire.
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Madame Kadis, allez-y.
Mme Susan Kadis (Thornhill, Lib.): Merci beaucoup. Je crois que ces importantes informations sont très instructives et vont permettre à notre comité d'aller de l'avant. Je sais que ces recommandations sont toutes parfaitement méritoires. Je voudrais simplement vous demander laquelle d'entre elles, si vous deviez établir une liste de priorités, vous considéreriez comme la recommandation la plus vitale sur laquelle il faudrait agir le plus rapidement possible?
Mme Beth Bilson: Il y a beaucoup de recommandations, mais beaucoup d'entre elles découlent des recommandations importantes, donc ce n'est pas si impressionnant que cela le paraît. Il y a probablement beaucoup de choses de détail qu'on peut faire de plusieurs façons. Je pense que ce qui est vraiment important, c'est d'en arriver à imposer une obligation positive aux employeurs, c'est-à-dire d'expliquer qu'il ne s'agit pas d'attendre que les employés se plaignent à quelqu'un de ne pas être payés correctement. Il faut que les employeurs prennent des mesures pour voir comment ils rémunèrent leurs employés, et il faut qu'ils continuent à le faire de façon à éviter toute discrimination. Il faut leur donner de l'aide pour le faire, les guider.
L'une des raisons pour lesquelles ces litiges ont pris tellement de temps—l'affaire de l'Alliance de la fonction publique, par exemple, a traîné 14 ou 15 ans—était qu'il n'y avait pas de réponse catégorique à la question de savoir en quoi consistait un système de rémunération non discriminatoire. Tout le monde avait son propre candidat et ses propres experts, y compris la Commission des droits de la personne. Pendant des mois et des mois, des experts ont défilé devant le Tribunal canadien des droits de la personne pour parler des divers cadres d'analyse des systèmes de rémunération.
Si l'on peut réussir à structurer cela et à orienter les choses, si l'on peut avoir quelqu'un qui peut dire : non, voici ce que vous devez avoir, voici les caractéristiques d'un système de rémunération non discriminatoire, alors je pense qu'on pourra faire avancer les choses.
º (1620)
Mme Susan Kadis: Pouvez-vous aussi nous signaler les leaders parmi les employeurs sous réglementation fédérale? Vous avez dit qu'il y en avait plusieurs milliers qui vous venaient à l'esprit, qui étaient vraiment à la pointe.
Mme Beth Bilson: Il y a 6 000 employeurs, mais beaucoup d'entre eux sont de tout petits employeurs. Il y a aussi de nombreuses stations de radio et compagnies de camionnage qui ont très peu d'employés et qui ne sont pas captées par le radar de toute cette discussion, même s'ils sont membres des organisations avec lesquelles nous avons discuté. Je pense que ce sont probablement les grands employeurs, le Conseil du Trésor, les banques, Postes Canada et les compagnies aériennes.
Mme Susan Kadis: Comment allez-vous faire? Où en sont-ils de leur progression?
Mme Beth Bilson: Disons que le système actuel les incite déjà à faire ce que quelqu'un pourrait leur ordonner de faire. Il faut longtemps pour le leur ordonner. Donc je ne dirais pas qu'il y en a qui ont pris le mors aux dents et qui sont vraiment devenus des employeurs proactifs.
Cela ne veut pas dire qu'il n'y en a pas quelques-uns quand même. Je crois que certains employeurs ont fait des efforts, mais les employeurs qu'on peut considérer comme les meneurs se sont surtout concentrés sur les litiges pour définir les obligations auxquelles ils sont tenus.
Mme Susan Kadis: Donc, j'imagine que pour vous, cette loi est essentielle.
Mme Beth Bilson: Je pense que notre conclusion, c'est que l'autre solution ne semble pas avoir marché. La stratégie qui consiste à attendre que les gens prennent l'initiative dans le contexte actuel ne semble pas avoir réussi.
Mme Susan Kadis: Merci, et merci, madame la présidente.
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Madame Smith.
Mme Joy Smith: Merci.
C'est très intéressant d'écouter vos commentaires. Pendant que vous parliez, une autre question n'est venue à l'esprit. Plus précisément, il s'agit de ce que vous souhaitez voir inclus dans la loi. Vous parlez des petites entreprises et des grosses sociétés, et le problème se pose partout, non? Il est clair que l'équité salariale signifie le même salaire pour le même travail. Est-ce que ceci pourrait s'appliquer pour les mêmes qualifications, et ce genre de choses? D'après moi, ce serait une façon très simple de procéder. Par exemple, si l'on a un diplôme et deux ans d'expérience dans le domaine d'activité, que l'on soit homme ou femme, le salaire devrait être le même. Est-ce que c'est ce genre de choses qui devraient se trouver dans la loi, qui seraient utiles aux employeurs, grands ou petits?
Mme Beth Bilson: Les éléments que l'on trouve actuellement dans les lignes directrices sur l'égalité des salaires, et qui devraient, d'après nous, être pris en considération, sont les qualifications, l'expérience, et les conditions de travail. Ce sont ces facteurs qui sont censés guider le processus maintenant, et nous en sommes satisfaits.
L'équité salariale est une chose compliquée. Il est très difficile d'analyser exactement en quoi consiste un emploi, et quelle valeur représentent les différents éléments du travail, mais il y a maintenant beaucoup d'expertise dans la matière. Il y a beaucoup de gens qui gagnent leur vie en aidant les employeurs à analyser leur structure salariale dans ce cadre. Les qualifications et l'expérience et ces choses-là sont certainement des éléments très importants à cet égard.
º (1625)
Mme Joy Smith: Quel serait l'impact de ceci…? Par exemple, il y a le syndicat des policiers, le syndicat des enseignants. J'étais enseignante et l'on était payé selon son niveau d'études. Dans le secteur de la police, il y a les années d'expérience, et aussi le type de travail que l'on effectue. Est-ce qu'avec cette loi, on tiendrait compte de tous les milieux de travail, qu'ils soient syndiqués ou non?
L'équité salariale, c'est veiller à ce que, particulièrement pour les femmes qui… Je suis toujours surprise de voir combien les femmes sont moins payées—ou même reçoivent des offres salariales—pour le même travail qu'un homme. Par exemple, si un homme vient dans un bureau, on peut lui offrir un salaire plus élevé parce que, je ne sais pas, je suppose que c'est la tradition. En réalité, beaucoup de femmes font vivre leur famille. Est-ce qu'on en tient compte aussi? Est-ce qu'il y a quelque chose qui va répondre à cela?
Mme Beth Bilson: Tout ce que nous avons proposé ici vise justement à répondre à cela. L'idée est d'examiner les emplois, qu'ils soient occupés par des personnes représentées par un syndicat ou pas, et d'étudier attentivement ce que font les personnes qui les occupent—les composantes du travail—afin de déterminer si l'employeur accorde la même valeur à ces composantes lorsque le travail est fait par un homme et lorsqu'il est fait par une femme.
L'objectif est de surmonter certaines des choses que vous avez mentionnées, comme un salaire de départ plus élevé, ou des cas où la rémunération selon le mérite n'est versée que dans les classifications à prédominance masculine, ou ce genre de choses. Cela comprendrait tous ces aspects.
Mme Joy Smith: Vous avez répondu à ma deuxième question.
Je vous remercie.
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Il vous reste encore un peu de temps.
Mme Joy Smith: Ça va. Comme je l'ai dit, Mme Bilson vient de répondre à ma deuxième question. Je pense qu'il faudrait que nous agissions assez rapidement. De nos jours, en 2005, c'est effrayant, non, de s'apercevoir que ce genre de choses existe encore?
Mme Beth Bilson: Nous avons découvert autre chose, d'assez intéressant, c'est que dans les années 1980, je crois, lorsque les lignes directrices sur l'égalité des salaires sont sorties, il y avait un article du Code du travail du Canada sur le salaire égal pour un travail égal. Il a été enlevé dans l'idée que si l'on a un salaire égal pour un travail de valeur égale, il est inutile d'avoir un salaire égal pour un travail égal, mais nous considérons que la question du salaire égal pour un travail égal pose toujours problème, particulièrement dans les métiers spécialisés, par exemple, et dans les postes de cadres, où le genre de choses dont vous parliez tout à l'heure se produit. Nous recommandons par conséquent que l'on remette en place les dispositions concernant le salaire égal pour un travail égal.
Mme Joy Smith: Merci.
[Français]
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Madame Bonsant.
Mme France Bonsant (Compton—Stanstead, BQ): Bonjour.
Je voudrais savoir si l'équité salariale est plus facile à atteindre quand les employés sont représentés par un syndicat.
[Traduction]
Mme Beth Bilson: Les travaux de recherche que nous avons pu consulter ont démontré que le plus gros facteur qui ait contribué à l'élimination de la discrimination salariale ou atténué l'écart salarial était la représentation par un syndicat. Il est évident que les femmes travaillant dans des entreprises syndiquées sont en meilleure position par rapport à leurs collègues masculins, que dans les entreprises non syndiquées.
º (1630)
[Français]
Mme France Bonsant: Je me souviens qu'à mon arrivée, en octobre dernier, j'avais rencontré une jeune journaliste de Radio-Canada. J'imagine que les employés doivent y être syndiqués, car ils relèvent techniquement du fédéral. Une femme et un homme occupaient le même emploi , mais la femme était payée beaucoup moins que l'homme. Avez-vous eu des plaintes à ce sujet? Savez-vous si c'est réglé ou si c'est encore au point zéro? En d'autres termes, est-ce qu'ils négocient, examinent, étudient la question et ne font rien?
[Traduction]
Mme Beth Bilson: Je ne veux pas dire que les syndicats sont parfaits ou qu'il n'y a aucune discrimination dans les milieux de travail syndiqués. Il y a eu des cas de négociations collectives où il y avait des différences entre le salaire des hommes et celui des femmes et le même genre d'inégalité. Mais dans l'ensemble, le fait d'être représenté par un syndicat semble avoir une influence positive sur l'augmentation des salaires des femmes par rapport à ceux des hommes dans le même milieu de travail. Mais il y a des exemples précis, et assez nombreux, de cas où les syndicats eux-mêmes n'ont pas considéré l'égalité comme une très grande priorité.
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Nous allons maintenant passer à Mme Crowder.
Mme Jean Crowder: À Terre-Neuve, une entente sur l'équité salariale a été signée en 1988. Je pense que l'accord a été vraiment atteint en 1991. Le gouvernement avait alors une loi limitant les salaires qui en fait refusait aux femmes le droit de bénéficier de l'entente sur l'équité salariale. Lorsque la Cour suprême a dû se prononcer sur la question, elle a confirmé que le gouvernement avait le droit de ne pas payer ces femmes parce qu'il traversait une crise financière. D'après moi, cela révèle un problème de société dans la mesure où lorsque l'on est aux prises avec des difficultés financières, la cause des femmes est simplement oubliée.
Je voudrais revenir encore à ma question dans ce contexte, à propos du fait que les représentants de la Justice nous ont dit qu'il fallait plus de consultations, étant donné l'ampleur du rapport. Dans vos conclusions au chapitre 5, vous parlez des principales caractéristiques de l'équité salariale—un régime qui présenterait l'équité salariale comme un droit humain fondamental. Le régime serait fondé sur une loi proactive et administrée par des organismes spécialisés exclusivement consacrés à la recherche de l'équité salariale.
Donc nous avons la Cour suprême, qui estime qu'il est acceptable de ne pas payer les femmes. Nous avons un rapport très détaillé qui présente un programme. Le ministère de la Justice a eu maintenant un an pour donner sa réponse. Il nous dit maintenant, parce que le comité a fait pression, qu'il faudrait davantage de consultations. Franchement, je ne vois pas ce qui nous empêche d'aller de l'avant.
Vous avez l'information. Je sais que vous avez dit qu'il fallait consulter les employeurs. Eh bien, ça ne suffit pas.
Mme Beth Bilson: Ils le sont peut-être. Je ne sais pas.
Mme Jean Crowder: Donc vous n'avez pas été consultée pendant l'année écoulée?
Mme Beth Bilson: Non. Comme je l'ai dit, je suis en quelque sorte arrivée à la fin il y a un an. C'est pratiquement la première fois que j'entends parler de quelqu'un qui… Au début, on m'avait dit que des gens le lisaient, etc., mais ce comité est le premier groupe qui entreprend activement…
Mme Jean Crowder: C'est vraiment décevant.
Mme Beth Bilson: Je sais que deux des membres de votre personnel ont repris leur travail dans le domaine des politiques au ministère de la Justice et ont suivi l'évolution de la situation. Mais je crois bien que rien n'a été fait.
Mme Jean Crowder: Certains des témoins que le comité a entendus ne nous ont pas parlé précisément de l'équité salariale mais ont dit que les femmes au Canada en avaient vraiment assez des rapports qui n'aboutissaient à rien. Je serais vraiment déçue si l'on avait là encore un rapport qui n'aboutit à aucune mesure concrète.
Lorsque je suis arrivée au comité, j'ai lu le rapport de la juge Abella en 1984 sur l'équité en emploi, et j'ai été vraiment déçue lorsque j'ai lu un certain nombre des recommandations de ce rapport. Nous pourrions réécrire ces recommandations aujourd'hui, parce que rien n'a changé. Bien sûr, il y a eu certains progrès; je ne dis pas le contraire. Mais c'est un excellent rapport qui n'a pas pu être mis en oeuvre, et 20 ans plus tard, nous pouvons le dépoussiérer et dire, oh, il y a toutes ces recommandations. Je ne voudrais vraiment pas reprendre la discussion sur ce rapport dans 20 ans.
D'après vous, que peut faire le comité pour faire avancer les choses?
º (1635)
Mme Beth Bilson: J'ai l'impression qu'il y a un intérêt au ministère de la Justice. C'est peut-être simplement que le ministère avait d'autres questions à régler, qu'il y avait des choses hautement prioritaires dont il devait s'occuper au cours de cette année, et peut-être que le moment a été mal choisi.
Il y a un autre rapport sur la Loi des droits de la personne qui a précédé le nôtre. Le groupe était dirigé par le juge La Forest et son rapport est sorti avant que nous ne commencions. D'après ce que je sais, la plupart des recommandations n'ont pas non plus été mises en oeuvre, et on a peut-être l'intention de les étudier toutes ensemble. Tant qu'à ouvrir la Loi sur les droits de la personne, autant tout examiner et tout faire. Je ne sais pas.
Nous avons voulu donner aux gens une base à partir de laquelle avancer et formuler des suggestions concrètes quant aux dispositions que la loi pourrait contenir et sur ce qu'il faudrait prendre en considération.
Je ne connais pas la réponse à la question. C'est vous les politiciens. Vous êtes censés savoir comment il faut faire.
Des voix: Oh, oh!
Mme Jean Crowder: Oh, nous le savons.
Mme Beth Bilson: Je suis juste l'une des expertes que vous avez invitées.
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Il nous reste quelques minutes.
Mme Jean Crowder: En fait, j'ai presque terminé. Je voudrais simplement faire un commentaire.
On voit actuellement que le mouvement féminin fait pression pour que l'on fasse quelque chose. Je pense qu'il incombe au ministère de la Justice de donner à notre comité un plan qui précise un échéancier et des mesures concrètes. Ceci me rassurerait quant au sort du rapport.
Ce serait vraiment déplorable de perdre tout cet excellent travail. La précision et l'ampleur de ce rapport sont extraordinaires parce qu'on y a abordé de très nombreuses éventualités, et il y a eu un nombre impressionnant de consultations. Je voudrais vraiment que le ministère de la Justice s'appuie sur cette base solide pour avancer.
Mme Beth Bilson: Si vous avez la possibilité de vous procurer ces documents de recherche… Je pense que vous pouvez les obtenir au ministère de la Justice; ils sont sur CD et peut-être en ligne également, mais ils contenaient beaucoup de bonnes choses.
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Merci.
Monsieur Powers, s'il vous plaît.
M. Russ Powers (Ancaster—Dundas—Flamborough—Westdale, Lib.): Je voudrais tout d'abord remercier les membres du personnel. Nous leur avions demandé de nous préparer une analyse de ce qui s'est passé dans les provinces, et c'est ce qu'ils ont fait, en présentant les choses en perspective. Donc, un grand merci aux membres du personnel.
Bienvenue, madame Bilson.
Comme vous, je viens d'un milieu universitaire en Ontario. J'étais dans une université en Ontario lorsque la Loi sur l'équité salariale a été présentée en Ontario, et je peux vous dire que c'était un véritable cauchemar. Le raisonnement et la motivation étaient bons, mais la loi a été adoptée précipitamment avec des dates limites pour la mise en oeuvre. Je vous présente seulement le point de vue historique. Même si l'on était satisfait de l'esprit de la loi, personne n'était content de la façon dont on entendait la concrétiser. En fait, il y a eu tant de précipitation pour mettre la loi en application que l'on a créé beaucoup de graves problèmes.
J'appartiens à une petite université qui compte environ 7 500 employés à plein temps et à temps partiel. Beaucoup de femmes ont été victimes de la hâte avec laquelle on a procédé à la mise en oeuvre de la loi. La loi a été présentée et l'université s'y est conformée environ en 1993 ou 1994. Elle a été corrigée il y a juste un an, il a donc fallu 10 ans. On est passé par la méthode d'évaluation Hay, et il y a eu des difficultés et toutes sortes de choses, mais je pense que l'on est arrivé à une situation optimale en ce qui concerne la conformité avec la loi.
J'approuve certainement l'idée du comité d'encourager le ministère de la Justice à aller de l'avant d'une façon efficace et productive. En même temps, l'expérience confirme le vieil adage selon lequel souvent tout gâte qui trop se hâte. C'était particulièrement vrai dans ce cas-là.
Vous avez dit qu'il y avait plus de 100 recommandations dans votre rapport. Je n'ai pas encore pu étudier votre rapport en détail comme il le mérite. Y a-t-il certaines choses sur lesquelles vous souhaitez que nous agissions à court et à moyen terme?
º (1640)
Mme Beth Bilson: On nous a demandé de déterminer s'il faudrait apporter des changements au système actuel de l'article 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Notre conclusion était que le problème dans cet article venait, d'après les personnes qui en avaient fait l'expérience, du fait qu'il est basé sur les plaintes. C'est-à-dire qu'il faut vraiment trouver un moyen d'amener les employeurs à effectuer un examen positif de leur structure salariale. Comme vous le dites, il faut procéder de façon réaliste.
L'expérience ontarienne nous a appris beaucoup de choses en ce sens que l'on a essayé de faire les choses trop rapidement et sans ressources suffisantes ou sans aide suffisante pour les employeurs. D'un autre côté, au Québec, la loi était en place mais il ne s'est rien passé pendant un bon moment. D'autres leçons ont pu être tirées de cette expérience.
Nous devons prendre tout cela en compte pour établir des objectifs réalistes dans le temps et ce genre de choses. Il faut surtout essayer de rédiger la loi de façon à imposer une obligation aux employeurs en leur donnant ensuite suffisamment d'aide pour qu'ils puissent accomplir ce qu'on leur demande.
Il y a en fait beaucoup d'expertise en la matière maintenant, après tout ce qui a été fait en Ontario, au Manitoba et au Québec. Il y a des gens qui savent préparer des plans d'équité salariale, et l'on s'entend beaucoup mieux sur ce qui constitue un plan d'équité salariale répondant aux objectifs d'élimination de la discrimination. Le genre de problèmes que vous avez eus avec la contestation de la méthode Hay etc., où chaque consultant avait son propre plan et où un employeur allait le mettre à l'essai, puis quelqu'un allait se plaindre disant que l'on ne parvenait pas vraiment…
M. Russ Powers: Merci.
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Madame Torsney.
L'hon. Paddy Torsney: Actuellement, nous avons une loi qui régit les employés fédéraux, mais c'est par le biais de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
º (1645)
Mme Beth Bilson: C'est exact.
L'hon. Paddy Torsney: Chacun des précédents ayant fait jurisprudence, il y a un système dans les livres. Ici nous voudrions créer une loi plus claire et un système plus proactif, parce que le système actuel ne sert pas bien les intérêts des gens.
Vous êtes d'accord? Nos délibérations sont retranscrites.
Elle a hoché la tête.
Si je me souviens bien, c'est devenu très litigieux et très difficile à utiliser parce que chacun des employeurs régis par la loi fédérale suivait attentivement chacune des causes en disant : « Comment osez-vous? Vous ne pouvez pas en rester là; vous devez faire appel. »
Je me souviens avoir entendu dire au caucus des femmes libérales, « Ne faites pas appel au palier suivant; essayons de nous entendre sur un règlement. C'est ridicule. Nous avons vraiment poussé pour arriver à la dernière entente pour nos propres employés fédéraux et nous avons réussi. » Je me souviens qu'il y avait d'autres groupes d'employeurs qui disaient : « Vous ne pouvez pas en rester là; ce n'est pas bon pour nous; nous nous préoccupons tous de nos systèmes respectifs. »
Y a-t-il d'autres pays qui peuvent aussi donner des exemples de ce qui fonctionne ou est-ce que le Canada est en avance dans ce domaine, que ce soit au niveau provincial ou fédéral?
Mme Beth Bilson: Je sais que c'est difficile à croire, mais le Canada est en fait en avance sur la plupart des autres pays. Je crois que l'on peut dire que c'est la loi québécoise qui représente le niveau le plus avancé.
Il y a plusieurs pays d'Europe où il existe quelque chose d'analogue. Dans les pays scandinaves—par exemple en Suède—il y a des genres d'arrangements ou d'ententes nationaux entre les organisations d'employeurs et les représentants des employés. Ils ont beaucoup de—pas tant de dispositions législatives, mais dans le cadre d'ententes, ils ont des dispositions assez avancées.
Mais je pense que le Canada a en fait essayé davantage de choses et a progressé davantage que les autres pays sur le plan de la loi proprement dite.
L'hon. Paddy Torsney: L'autre chose que nous devrions pouvoir dire aux employeurs lorsque nous allons présenter la loi, c'est que la méthode actuelle… Les gens dépensent tellement d'argent pour payer une bande d'avocats—je n'en veux pas aux avocats—au lieu de régler les différends. Les employés y perdent; les employeurs y perdent. Si l'on peut instaurer un système plus simple, ce sera moins coûteux pour eux à administrer, et l'argent pourra aller aux employés plutôt qu'à des batailles avec les employés.
Mme Beth Bilson: Je pense que c'est vrai. Vous avez vu qu'avec cet article 11, il y a tellement de questions qui ne sont pas résolues, que les employeurs sont presque incités à résister. Regardez l'historique de toutes les demandes présentées par les employeurs dans ces litiges : Est-ce que les syndicats sont habilités à déposer une plainte? Le Tribunal canadien des droits de la personne est-il suffisamment indépendant de la Commission canadienne des droits de la personne?
Dans l'affaire Bell Canada, il y a environ 15 demandes de ce genre, simplement parce que la loi ne donne pas vraiment les réponses à tout cela. Il n'y a rien qui incite les employeurs à ne pas soulever ces questions. Comme vous le dites, tous les employeurs veulent connaître les réponses à ces questions, et il n'y a rien qui les pousse à ne pas le faire et à essayer de trouver une autre solution.
L'hon. Paddy Torsney: Y a-t-il suffisamment de travail ailleurs dans le domaine du droit du travail pour occuper les avocats de façon à ce qu'ils ne résistent pas à la loi? On dirait qu'il y a tout un secteur d'activité qui s'est créé autour de cette loi jusqu'ici.
Mme Beth Bilson: Je suis sûre que l'affaire a été bonne pour certains avocats. Je ne suis pas certaine qu'il y ait vraiment une bonne raison de conserver la loi sous sa forme actuelle.
L'hon. Paddy Torsney: D'accord. Je crois que maintenant que nous avons eu cela… Comme le disait Russ, le cas de l'Ontario a été particulièrement difficile. C'était la plus grosse province et c'était l'une des premières. Le Québec a pu profiter de toute cette expérience pour faire quelque chose de mieux. Espérons que nous allons pouvoir rapidement améliorer le système en étant proactifs pour arriver à une loi qui serve l'intérêt des gens, au lieu de tout faire traîner. Je sais que nous allons encourager les ministres à agir rapidement.
En ce qui a trait aux consultations, il faut encore quelques consultations sur les articles d'un projet de loi—ce n'est pas si grave—pour essayer d'ancrer tout cela, à moins que votre rapport…
º (1650)
Mme Beth Bilson: Non, nous n'avons pas inclus d'ébauche de projet de loi. Bien sûr, il faudrait tester les réactions à…
L'hon. Paddy Torsney: Des articles précis.
Mme Beth Bilson: Oui—une loi spécifique. Je peux comprendre cela.
L'hon. Paddy Torsney: Espérons que ce sont bien ces consultations-là qui sont en cours, et qu'on n'est pas encore en train de se traîner les pieds.
Je sais que nous allons tous parler au ministre et espérons que le comité pourra recommander que l'on agisse rapidement.
Merci.
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Madame Guergis.
Mme Helena Guergis (Simcoe—Grey, PCC): Merci beaucoup d'être venue, madame Bilson. J'apprécie vraiment le travail que vous avez réalisé sur cette question. Nous vous en sommes vraiment reconnaissants.
Je suis désolée d'avoir manqué une grande partie de vos intéressants commentaires et de la discussion. J'avais des appels à faire. Je vous présente mes excuses.
J'ai essentiellement un commentaire. Je trouve très préoccupant que les choses aient pris si longtemps, comme je crois l'avoir entendu dire autour de la table. Après avoir passé tant de temps dans un comité et dans un groupe de travail, passé tant d'années à voyager dans tout le pays, à réunir les renseignements, et à les faire présenter au ministre, je m'inquiète vraiment de voir qu'un an s'est écoulé depuis cette date. Je partage les inquiétudes de beaucoup de personnes autour de cette table, comme je l'ai dit. Il est peut-être temps de cesser de traîner et de passer enfin à la mise en oeuvre.
Merci beaucoup.
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): Madame Bilson, je vous remercie de votre temps et de votre exposé. Nous avons tous beaucoup appris grâce à vous. Encore une fois, merci.
Mme Beth Bilson: Merci de votre invitation.
La vice-présidente (Mme Nina Grewal): La séance est suspendue.
[La séance se poursuit à huis clos]