FEWO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de la condition féminine
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 10 février 2005
¹ | 1515 |
La présidente (Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.)) |
Mme Florence Ievers (coordonnatrice, Condition féminine Canada) |
¹ | 1520 |
Mme Hélène Dwyer-Renaud (directeur, Analyse comparative entre les sexes, Condition féminine Canada) |
¹ | 1525 |
¹ | 1530 |
Mme Florence Ievers |
¹ | 1535 |
¹ | 1540 |
La présidente |
Mme Nina Grewal (Fleetwood—Port Kells, PCC) |
Mme Florence Ievers |
Mme Hélène Dwyer-Renaud |
¹ | 1545 |
Mme Nina Grewal |
La présidente |
Mme Nina Grewal |
Mme Joy Smith (Kildonan—St. Paul, PCC) |
Mme Hélène Dwyer-Renaud |
La présidente |
Mme Paule Brunelle (Trois-Rivières, BQ) |
Mme Hélène Dwyer-Renaud |
¹ | 1550 |
Mme Florence Ievers |
Mme Paule Brunelle |
Mme Florence Ievers |
La présidente |
Mme Susan Kadis (Thornhill, Lib.) |
Mme Hélène Dwyer-Renaud |
¹ | 1555 |
Mme Susan Kadis |
Mme Florence Ievers |
Mme Susan Kadis |
Mme Florence Ievers |
Mme Susan Kadis |
La présidente |
Mme Jean Crowder (Nanaimo—Cowichan, NPD) |
º | 1600 |
Mme Florence Ievers |
Mme Jean Crowder |
Mme Florence Ievers |
Mme Jean Crowder |
Mme Florence Ievers |
Mme Jean Crowder |
Mme Florence Ievers |
La présidente |
Mme Jean Crowder |
Mme Hélène Dwyer-Renaud |
La présidente |
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, PCC) |
Mme Florence Ievers |
º | 1605 |
Mme Lynne Yelich |
Mme Hélène Dwyer-Renaud |
Mme Lynne Yelich |
Mme Hélène Dwyer-Renaud |
La présidente |
L'hon. Paddy Torsney (Burlington, Lib.) |
Mme Hélène Dwyer-Renaud |
º | 1610 |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Hélène Dwyer-Renaud |
L'hon. Paddy Torsney |
La présidente |
Mme France Bonsant (Compton—Stanstead, BQ) |
Mme Hélène Dwyer-Renaud |
Mme Florence Ievers |
º | 1615 |
Mme Hélène Dwyer-Renaud |
Mme Paule Brunelle |
Mme Florence Ievers |
La présidente |
Mme Jean Crowder |
Mme Florence Ievers |
Mme Jean Crowder |
º | 1620 |
Mme Florence Ievers |
La présidente |
Mme Florence Ievers |
La présidente |
Mme Florence Ievers |
La présidente |
CANADA
Comité permanent de la condition féminine |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 10 février 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1515)
[Traduction]
La présidente (Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.)): Chers collègues, je déclare la séance ouverte. Il y a méprise, je crois, chez certains au sujet de l'heure. Pourtant, l'avis de convocation précisait bel et bien 15 h 15. Nous allons donc commencer tout de suite. La réunion doit durer jusqu'à 16 h 45, mais je sais que certains doivent partir plus tôt. J'aimerais donc que nous ayons fini à 16 h 30 et, s'il y a moyen, un peu plus tôt, parce que d'autres devront partir avant cette heure.
Je souhaite à nouveau la bienvenue à Florence et à ses collègues. Aujourd'hui, nous entamons l'étude sur l'analyse comparative entre les sexes.
Si vous voulez bien commencer, Florence.
Mme Florence Ievers (coordonnatrice, Condition féminine Canada): Madame la présidente, je vous remercie beaucoup.
J'aimerais d'abord préciser aux membres du comité que je suis accompagnée aujourd'hui de deux collègues de Condition féminine Canada, soit Hélène Dwyer-Renaud, directrice de l'Analyse comparative entre les sexes, et Nanci-Jean Waugh, directrice des Communications et des Consultations.
C'est avec un réel plaisir que nous venons ici aujourd'hui vous parler de l'analyse comparative entre les sexes, mieux connue chez nous sous le sigle ACS. Comme vous le savez, l'ACS est un outil, une des composantes vraiment cruciales pour faire progresser l'égalité des femmes au Canada. En plus des mesures visant à rehausser la pratique systématique de l'ACS, il faut un mécanisme fédéral fort en vue de coordonner l'évolution de la politique au sein du gouvernement et de soutenir les organismes de représentation des femmes et les groupes qui revendiquent l'égalité.
J'aimerais dire, madame la présidente, que nous avons reçu sur notre site Web votre rapport et vos recommandations, ce dont nous vous remercions beaucoup.
L'ACS fait partie d'une approche à deux volets appelée « intégration de considérations liées à l'égalité entre les sexes », qui a été introduite en 1995 dans le cadre du Programme d'action de Beijing et qui prévoit qu'on poussera encore plus loin les efforts en vue de soutenir l'égalité des sexes. Cette approche adoptée à l'unanimité par tous les pays présents, y compris le Canada, inclut à la fois d'intégrer des considérations liées à l'égalité entre les sexes dans toutes les pratiques gouvernementales et d'élaborer des politiques propres aux femmes. Depuis 1995, grâce au Programme fédéral d'égalité entre les sexes, suivi du Programme d'action pour l'égalité entre les sexes, les mesures adoptées par le gouvernement du Canada en la matière ont reflété cette approche à deux volets de manière à obtenir des résultats.
L'ACS était l'engagement déterminant du programme fédéral de 1995. Le gouvernement s'engageait à faire en sorte que toutes les mesures législatives et les politiques à venir comporteraint, quand il y aurait lieu de le faire, une analyse visant à déterminer si elles pouvaient avoir des répercussions différentes sur les femmes et sur les hommes. Cet engagement était réputé être la coresponsabilité de Condition féminine Canada qui jouerait un rôle de renforcement des capacités, d'une part, et des différents ministères qui appliqueraient les connaissances à l'élaboration des orientations et des programmes, d'autre part.
[Français]
En 1999, Condition féminine Canada a créé la Direction de l'analyse comparative entre les sexes chargée de fournir le leadership et la vision en la matière. La direction a reçu le mandat de promouvoir l'intégration du point de vue des femmes et des hommes aux processus gouvernementaux et de prendre des mesures visant à renforcer les capacités, par exemple élaborer un outil et améliorer les compétences et les connaissances.
Les buts de la Direction de l'analyse comparative entre les sexes sont les suivants: promouvoir une compréhension commune des concepts et des pratiques exemplaires; promouvoir l'utilisation d'outils et d'indicateurs communs; et aider à montrer la façon d'améliorer les résultats des politiques et des programmes de manière à favoriser l'égalité entre les sexes.
L'ACS est l'une des cinq composantes du Programme d'action pour l'égalité entre les sexes. La mise en oeuvre de la politique de 1995 a été lente et inégale. Diverses perceptions, compréhensions et investissements de ressources au sein des ministères ont produit divers résultats et davantage de défis pour les différents ministères concernant diverses questions.
Au départ, certains ministères clés tels que l'ancien Développement des ressources humaines, DRHC, Santé Canada, Justice, Affaires indiennes et du Nord, Citoyenneté et Immigration et l'ACDI se sont distingués en prenant l'initiative de créer leur propre programme de formation et leur propre infrastructure, par exemple des bureaux de coordination des activités d'intégration, des considérations liées à l'égalité entre les sexes ou des réseaux de spécialistes en égalité entre les sexes.
On a estimé toutefois qu'il était nécessaire d'accélérer l'intégration de l'ACS à tous les processus gouvernementaux. Le gouvernement a donc réitéré, en 2000, son soutien à l'ACS dans le Programme d'action pour l'égalité entre les sexes.
En 1999, lors de la création de la Direction de l'ACS, CFC a aussi adopté une stratégie de mise en oeuvre afin de faciliter l'intégration de la pratique de l'ACS au processus d'élaboration des politiques et des programmes à l'échelle de l'administration fédérale. Hélène vous fournira de plus amples détails sur cette stratégie un peu plus tard.
[Traduction]
Le Programme d'action pour l'égalité entre les sexes se veut une stratégie coordonnée et cohérente visant à faire progresser l'égalité entre les sexes de deux manières : tout d'abord, de manière délibérée ou concentrée, en s'attaquant aux problèmes d'exclusion et de discrimination vécus par les femmes, entraînant ainsi des initiatives fondées sur le sexe en rapport avec des questions comme la pauvreté, la violence et les femmes autochtones; ensuite, de manière égalitaire, en reflétant visiblement la réalité des femmes par rapport à celle des hommes dans l'élaboration des politiques et des programmes gouvernementaux. C'est là l'objectif global de la stratégie relative à l'ACS. La Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés en est un bon exemple.
Dans le cadre de l'ACS, notre approche consiste à promouvoir des éléments horizontaux pour en arriver à une vision élargie et à une mise en oeuvre de l'ACS dans l'ensemble des ministères, notamment à offrir un cadre conceptuel qui soutient les structures institutionnelles et fait la promotion de pratiques exemplaires fondées sur l'expérience internationale. C'est de là que vient une partie du leadership consolidé confié à Condition féminine Canada dans le Programme d'action pour l'égalité entre les sexes.
L'autre approche consiste à travailler en partenariat avec des ministères en vue d'identifier des projets dans lesquels peut être introduite systématiquement l'analyse comparative entre les sexes de manière à mettre en pratique la théorie.
Hélène.
¹ (1520)
Mme Hélène Dwyer-Renaud (directeur, Analyse comparative entre les sexes, Condition féminine Canada): Merci.
Nous avons en fait élaboré une stratégie en six points (formation, conception d'outils, études de cas de politique, recherche/ information/éducation/promotion, évaluation et reddition de comptes, et coordination). Vous trouverez un résumé de mes propos dans les diapositives 4 à 8.
Pour ce qui est de la formation, en 1999, nous savions que la mise en oeuvre concrète passait par un transfert des connaissances et des compétences et qu'il fallait aller au-delà des spécialistes de l'égalité entre les sexes. Nous avons adopté un cadre d'élaboration des politiques et des programmes familiers à la plupart des analystes de politique et, grâce à des études de cas et à des exemples, nous avons élaboré un cursus grâce auquel les participants ont appris de quelle façon les réalités socio-économiques des hommes et des femmes sont différentes, la façon de remettre en question des hypothèses au sujet des rôles assignés à chaque sexe et comment intégrer des considérations liées à l'égalité entre les sexes à toutes les étapes pertinentes de l'élaboration de programmes et de politiques grâce à de la recherche, à de la consultation, à l'élaboration d'options et à la communication, tout au long de l'exécution et de l'évaluation des programmes.
Une formation personnalisée a donc été conçue et offerte aux analystes de politiques et de programmes de Citoyenneté et Immigration, de la Défense nationale, de Patrimoine canadien et du Comité fédéral de la participation des femmes dans le domaine des sciences et de la technologie qui regroupe des représentants de 15 ministères. Un programme de formation du formateur a été également conçu. Nous comptons maintenant dans les régions 11 formateurs anglophones et 9 formateurs francophones qui offrent de la formation nationale et internationale. En décembre 2004, des pourparlers avec la nouvelle École de la fonction publique du Canada ont mené à une entente visant à inclure notre formation ACS dans son programme d'enseignement. Nous sommes également en train de discuter avec ses dirigeants de l'idée d'élaborer ensemble un outil de sensibilisation de la haute direction à l'analyse comparative entre les sexes.
En tandem avec cette formation, il fallait concevoir de nouveaux outils et de nouvelles aides pour aider les hauts fonctionnaires à faire des analyses pour déterminer si un programme ou une politique aura des répercussions différentes sur les femmes et sur les hommes. Les outils actuels, comme les guides ministériels qui aident à définir un enjeu stratégique au moyen de questions ou de listes de points à vérifier, la collecte améliorée de données et l'utilisation d'indicateurs fondés sur le sexe, fourniront tôt ou tard de meilleures données, permettront de mieux comprendre les tendances et de se faire une idée plus juste de la situation des femmes par rapport à celle des hommes, le résultat prévu étant que les conséquences non intentionnelles seront détectées plus vite, plutôt qu'après coup.
Nous exécutons des projets pilotes en tant qu'études de cas de politiques comme méthodes utiles pour évaluer le processus et les résultats anticipés. L'expérience révèle que, pour obtenir le meilleur résultat, l'analyse comparative entre les sexes devrait être introduite graduellement dans un ordre choisi de secteurs de dépenses. De fait, nous encourageons des ministères à aller au-delà de la simple acquisition de formation et de faire un lien durant l'apprentissage avec un projet concret qui donne des résultats tangibles.
Nous en sommes au tout début de la formation d'une masse critique de projets. Nous exigeons qu'une série de critères de sélection soit respectée. Par exemple, nous évaluons des projets pour voir s'ils fourniront probablement des résultats concrets liés à l'égalité entre les sexes et leur probabilité de le faire avec succès. Nous exigeons l'appui des hauts fonctionnaires du ministère grâce à un protocole d'entente signé avec eux. Nous demandons aussi que les résultats soient rendus publics, c'est-à-dire qu'ils soient inclus dans les rapports d'étape annuels du ministère.
Parmi les projets pilotes entrepris jusqu'ici, on compte des travaux menés de concert avec Citoyenneté et Immigration. Nous entretenons des liens de longue date avec CIC. Un protocole d'entente a été signé par Condition féminine Canada et le ministère en vue de poursuivre des activités de formation et d'élaboration d'outils. Par conséquent, le ministère applique un outil d'évaluation de l'impact aux règlements d'application de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Une série d'ateliers en milieu de travail et de cours de formation sont offerts aux analystes du ministère pour les aider à appliquer l'ACS, et nous les avons appuyés dans l'élaboration d'une politique relative à l'analyse comparative entre les sexes et d'un processus de planification stratégique.
À Patrimoine canadien, la formation en matière d'ACS a été offerte en avril 2003 à la direction des programmes d'appui aux langues officielles. La formation se concentrait sur les ententes Canada-communauté et sur les problèmes avec lesquels sont aux prises les femmes de groupes minoritaires francophones. Le programme a depuis lors revu ses méthodes de fonctionnement de manière à y intégrer une perspective axée sur la comparaison entre les sexes, y compris l'évaluation des propositions de projets, de même qu'un léger changement aux critères qui souligne l'inclusivité des ententes Canada-communauté et élargit de la sorte le processus, de manière à inclure plus de femmes de la minorité francophone.
¹ (1525)
À la Défense nationale, la formation ACS est axée sur le besoin d'accroître les connaissances des employés civils et militaires au sujet de considérations relatives au sexe et à la diversité dans diverses politiques et divers programmes, y compris ceux des ressources humaines.
Nous sommes en train de négocier avec le ministère de l'Infrastructure de la formation qui sera offerte dans le cadre d'un projet pilote. Parmi les éventuels domaines évalués, on compte—et je précise que je ne suis pas une experte du mandat du ministère de l'Infrastructure—la gouvernance de la construction et des méthodes de construction, la sécurité en matière d'incendie, les conditions de l'eau de mer, la modélisation des digues ou le pergélisol. Nous sommes aussi en train de discuter d'initiatives rurales avec deux conseils fédéraux et des gouvernements provinciaux de l'Ouest.
Parmi les autres intéressés qui viennent frapper à notre porte pour obtenir de la formation, il y a des gouvernements provinciaux et territoriaux comme celui de la Saskatchewan, des ONG comme l'Ontario Women's Health Council et d'autres pays, notamment deux provinces d'Afrique du Sud.
[Français]
Instinctivement, nous savions dès le début que le succès dans la pratique d'une analyse comparative entre les sexes nécessiterait de l'information concernant les pratiques exemplaires, la compilation de cette information, ainsi que les activités de promotion et d'éducation distinctes de la formation régulière.
On croit généralement qu'il existe une corrélation directe entre la connaissance de considérations liées à l'égalité entre les sexes au sein d'une organisation et le degré de succès de la mise en oeuvre de l'analyse. Nous avons fait un travail considérable pour accroître la sensibilisation, promouvoir une compression commune des concepts de l'ACS et encourager les pratiques exemplaires chez nos partenaires.
Nous avons créé un centre de ressources en ACS, nous avons distribué 8 000 trousses d'information depuis 2003, nous avons organisé deux foires et une conférence ouverte au public, nous avons fait plus de 75 présentations lors de conférences et autres activités, nous avons créé un bulletin électronique et nous avons produit 40 études de cas.
Quant à l'évaluation de l'efficacité et l'efficience de l'analyse et des processus connexes à cet égard, la Direction de l'analyse comparative entre les sexes fait la promotion de la notion d'un processus d'évaluation continu commençant par la capacité individuelle évaluée après la formation offerte, passant à celle des organisations à l'aide d'un sondage qui sera administré en mars et finissant avec un modèle de mesure du rendement en ACS qui fournit un moyen de mesurer la façon dont les considérations liées à l'égalité entre les sexes, y compris l'intersection avec la race, la diversité, l'âge, les handicaps et autres facteurs, sont intégrées proactivement dans la planification et la mise en oeuvre de chaque étape de l'élaboration des politiques et des programmes.
Condition féminine Canada, à titre d'organisme chargé d'exécuter un mandat horizontal et vertical et de favoriser la mise en oeuvre de l'ACS, travaille de façon stratégique à éclairer et à influencer les mesures que prennent les autres ministères pour intégrer l'ACS et pour mettre en oeuvre des changements visant à réaliser l'égalité entre les sexes.
La Direction de l'ACS préside un comité interministériel sur l'ACS auquel participent 13 ministères. À l'origine, le comité servait de forum pour le partage d'information sur les pratiques exemplaires, mais en 2002-2003, nous avons modifié son mandat afin qu'il serve davantage de forum d'acquisition de connaissances pour aider à la création, à l'animation et à nos activités d'ACS au sein des ministères de l'administration fédérale.
¹ (1530)
[Traduction]
Bien sûr, des progrès sont également accomplis dans d'autres ministères. Pour ce qui est de la formation, comme vous le savez peut-être, l'ACDI a été une pionnière dans ce domaine pendant plus de 15 ans et elle est en train de revoir l'ensemble pédagogique en vue de l'améliorer.
Citoyenneté et Immigration, Affaires indiennes et Nord canadien, Santé Canada et l'ancien ministère du Développement des ressources humaines ont tous adapté la trousse de formation de Condition féminine Canada à leurs besoins ministériels. Tous les ministères que j'ai mentionnés utilisent également comme exemples des programmes et des politiques relevant de leur mandat dans toute la formation qu'ils offrent dans l'espoir que ces fonctionnaires mettront en application leurs connaissances en vue d'améliorer leur travail.
Cependant, ce que je tenais vraiment à souligner, c'est la mise en place de l'infrastructure. Nous avons tous pris conscience que le facteur clé du changement est le fait que la structure organisationnelle est tout aussi importante que la formation individuelle pour intégrer et soutenir la pratique de l'ACS. Nous concentrons de plus en plus nos efforts pour convaincre les ministères de passer, si je puis m'exprimer ainsi, de la capacité individuelle à la capacité organisationnelle.
On commence à en voir des exemples intéressants sur la scène fédérale. Encore une fois, à Citoyenneté, pour satisfaire à l'exigence de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et pour continuer de renforcer sa capacité, le ministère a élaboré un cadre stratégique quinquennal relatif à l'ACS pour la période allant de 2005 à 2010. Le cadre établit les objectifs, les principes, les activités et les étapes d'établissement de rapport du ministère en fonction des plans d'activités des directions.
À Santé Canada, un plan de mise en oeuvre de cinq ans a été lancé en 2003 sous les auspices de la stratégie relative à la santé des femmes. Le plan inclut une politique d'analyse comparative entre les sexes, des projets comme l'élaboration d'indicateurs de la santé des femmes et de l'appui à la recherche en vue d'offrir aux hauts fonctionnaires du ministère un leadership stratégique et du soutien analytique.
L'ancien ministère du Développement des ressources humaines a mis en oeuvre une politique ministérielle concernant l'ACS afin d'encadrer ses engagements et ses efforts soutenus. Il a aussi créé un réseau de conseillers sur les enjeux homme-femme, des personnes formées en ACS qui servent de point de contact avec les fonctionnaires de la direction pour le partage d'information sur l'ACS. Ce ministère a depuis lors été scindé en deux ministères distincts. Ressources humaines et Développement des compétences Canada ainsi que Développement social Canada sont en train d'évaluer la meilleure façon de miser sur ces acquis pour faire progresser encore plus l'ACS au sein de leurs ministères respectifs.
La Direction des questions féminines et d'égalité entre les sexes d'Affaires indiennes et Nord canadien coordonne la mise en oeuvre de la politique d'analyse de l'égalité entre les sexes de ce ministère en faisant en sorte qu'elle est reflétée dans tous les secteurs d'activité du ministère, à l'administration centrale comme dans les bureaux régionaux. Par exemple, le ministère exige que tous les mémoires au Cabinet reflètent l'application de l'analyse comparative entre les sexes. La Direction des questions féminines est appuyée dans ce travail par un réseau de représentants de l'analyse comparative entre les sexes ou RACES—ils sont forts sur les sigles, là-bas—de toutes les directions et régions.
Enfin, le ministère de la Justice a adopté une politique relative à l'analyse de l'égalité entre les sexes en 1997. Dans cette politique, il exige l'analyse de chaque question pour en évaluer l'impact sur l'égalité entre les sexes. Le ministère examine actuellement des moyens d'améliorer l'intégration de la pratique de l'ACS dans toutes ses activités.
Mme Florence Ievers: Pour ma part, bien que j'aie eu la chance de voir des progrès réalisés dans l'intégration de l'ACS au sein du gouvernement du Canada, il reste certains défis à relever avant de pouvoir vraiment parler de durabilité. Bien qu'aucun ministère ne soit officiellement obligé de rendre compte de la pratique ou de l'intégration de l'analyse comparative entre les sexes au sein de son organisme, il existe des mécanismes officieux de reddition de comptes, par exemple le suivi des activités ministérielles par le comité interministériel qu'a mentionné Hélène, des sondages périodiques aux fins d'établissement de rapports internationaux—je songe notamment au Commonwealth, à l'OEA ou aux Nations Unies dont nous avons parlé, plus tôt cette semaine, dans le cadre de l'examen de « Beijing + 10 »—, en encourageant des projets pilotes axés sur les résultats, c'est-à-dire des résultats mesurables, et en effectuant des évaluations des trousses d'information en matière d'ACS et de la formation offerte.
Actuellement, il n'y a pas d'instance officielle chargée de veiller au respect de la politique de 1995 en matière d'ACS. L'exception à la règle, que j'ai mentionnée tout à l'heure, a été l'adoption de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés qui exige qu'un rapport soit fait chaque année au Parlement. Le besoin d'une meilleure reddition de comptes concernant l'égalité entre les sexes un peu partout au gouvernement du Canada et le peu de progrès dans la mise en oeuvre de l'ACS au sein du gouvernement ont été relevés en 2003 par le Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes comme des points qu'il fallait améliorer.
L'engagement pris en 1995 à l'égard de l'ACS a été réputé une responsabilité partagée entre, comme je l'ai dit, Condition féminine Canada qui joue un rôle de renforcement de la capacité et les ministères individuels, responsables de déterminer quelles lois ou politiques pourraient affecter les hommes et les femmes différemment et se prêteraient donc bien à l'application cohérente d'une perspective axée sur la comparaison entre les sexes.
Au fil des ans, nous avons observé que les ministères sont bien disposés à offrir la formation, mais qu'ils ne sont pas forcément prêts à être tenus responsables de l'application systématique et générale des nouvelles connaissances. Ils souhaitent le faire sélectivement et, plus souvent, lorsqu'il existe un lien direct avec une question sexospécifique comme l'égalité en matière d'emploi ou lorsque des groupes revendiquant l'égalité entre les sexes ont réussi à forcer la main du gouvernement pour qu'il change une politique ou un programme. L'exemple qui me vient à l'esprit dans ce cas est la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.
¹ (1535)
[Français]
La résistance peut aussi découler du fait qu'avant d'entreprendre un projet d'analyse comparative, il est souvent nécessaire d'écarter la notion que Condition féminine Canada et la Direction de l'ACS exécuteront le travail pour le ministère concerné. La situation est rendue plus complexe par le fait que, étant donné qu'un projet d'ACS suppose la modification des méthodes de travail et des attitudes et la nécessité d'être informé des questions liées à l'égalité entre les sexes, c'est souvent faussement interprété comme une pression sur la charge de travail et entraîne donc une hésitation chez les ministères à contracter un engagement.
Malheureusement, l'absence d'obligation, la résistance interne et l'absence de responsabilités partagées ont entraîné, au fil du temps, souvent une réduction de la capacité des ministères à assurer l'égalité entre les sexes. Il n'y a pas d'encouragement inhérent des ministères à remplacer les championnes ou les champions lorsque ceux-ci s'en vont ou à rétablir des bureaux de coordination, des activités d'intégration, des considérations liées à l'égalité entre les sexes lors d'une réorganisation.
Les bureaux de coordination des activités d'intégration des considérations liées à l'égalité entre les sexes jouent plusieurs rôles au sein d'un ministère, depuis la promotion de l'égalité jusqu'au renforcement de la capacité de faire l'analyse à la surveillance et à la présentation de rapports sur les progrès. Ces rôles font partie des structures institutionnelles qui peuvent faciliter la capacité organisationnelle, tant au point de vue de l'égalité entre les sexes que celui de l'ACS.
[Traduction]
Un dernier problème, bien qu'inoffensif, semble constamment miner nos efforts en matière d'ACS. En effet, les différents termes employés depuis 1995 pour décrire ce que nous tentons de réaliser sèment la confusion. Voici ce que nous avons réussi à dégager de cette confusion.
En Europe et sur les tribunes internationales, l'intégration des considérations liées à l'égalité entre les sexes est interprétée comme signifiant qu'il faut une approche à deux volets pour abolir la discrimination fondée sur le sexe et pour défendre les droits de la femme en tant qu'être humain. Une stratégie consiste à se concentrer délibérément sur les questions de discrimination et d'exclusion auxquelles font face les femmes. L'autre, complémentaire, consiste à refléter visiblement la réalité des femmes par rapport à celle des hommes dans la conception des politiques et des programmes des gouvernements.
Le point de départ de cette stratégie délibérée est un problème particulier aux femmes, comme la violence. Elle se concentre exclusivement sur la situation des femmes, et on s'efforcerait de redresser la situation, faisant ainsi progresser l'égalité des femmes. Le point de départ de la seconde stratégie est une politique ou un programme non sexiste, dans le cadre duquel les réalités socioéconomiques différentes des hommes et des femmes sont occultées. Voilà où, selon nous, l'analyse comparative entre les sexes a une valeur ajoutée et, à nouveau, la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés en est un bon exemple. En repérant les facteurs qui pourraient nuire à la réalisation des résultats, l'ACS devrait contribuer à l'adoption des mesures qui conviennent et à réduire, si ce n'est à éliminer, les éventuelles disparités entre hommes et femmes dans de nombreux aspects de la vie, faisant ainsi progresser l'égalité entre les sexes.
Comme vous le savez, quand des délégués du monde entier se réuniront à New York pour faire l'examen « Beijing + 10 », les feux seront braqués sur le Canada, qui devra montrer quels progrès ont été accomplis sur le plan d'égalité entre les sexes et la pratique de l'analyse comparative entre les sexes. Le gouvernement du Canada a la possibilité de miser sur les acquis et de passer à l'étape suivante, soit d'officialiser l'obligation d'obtenir des résultats sur le plan d'égalité entre les sexes et d'utiliser l'ACS. Pour y arriver, il devra établir un lien entre une série claire d'objectifs et de résultats prévus et d'importants écarts, des indicateurs clés et des points-repères à développer. Il faut établir un mécanisme officiel d'établissement de rapports et renforcer la coordination horizontale des mesures gouvernementales.
La moitié du travail est déjà faite en réalité. Nous avons choisi des représentants qui peuvent assurer le leadership et la vision en définissant les priorités stratégiques et en favorisant l'essor de l'égalité entre les sexes et de l'analyse comparative dans ce domaine. Les recommandations du Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes ont fait ressortir les grandes priorités auxquelles le Canada doit s'attaquer. Condition féminine Canada dirige un effort interministériel en vue de développer des indicateurs de l'égalité entre les sexes, et notre formation et nos outils d'analyse comparative sont en réalité de calibre mondial.
Ce qu'il faut vraiment, selon moi, c'est de réunir tous ces éléments dans un cadre officiel de reddition de comptes pour que le Canada conserve son leadership, reconnu partout dans le monde, en matière d'égalité entre les sexes.
Je crois savoir, madame la présidente, que votre comité va entreprendre une étude de l'analyse comparative entre les sexes. Nous suivrons de près les résultats de ces travaux puisqu'ils représenteront pour nous une importante source d'information lorsque nous chercherons à élaborer une orientation relative aux plans et aux priorités du Canada en matière d'égalité des femmes et d'égalité entre les sexes pour l'année 2005 et au-delà.
Madame la présidente, c'est tout ce que j'avais à dire.
¹ (1540)
La présidente: Je vous remercie beaucoup.
Avec votre permission, chers collègues, je vais proposer que, plutôt que d'avoir sept minutes durant le premier tour de table, nous n'en ayons que cinq, de manière à ce que les choses se déroulent rondement.
Madame Grewal, êtes-ce vous qui prendrez la parole en premier de ce côté-là de la table?
Mme Nina Grewal (Fleetwood—Port Kells, PCC): Merci, madame la présidente.
Je tiens à remercier les témoins de leurs exposés.
Ma question est fort simple. L'analyse comparative entre les sexes n'est pas une fin comme telle, mais plutôt un outil à utiliser pour réaliser une plus grande égalité entre les hommes et les femmes. Dans quels domaines les écarts à ce chapitre sont-ils les plus grands? De quelle façon ont été élaborés les indicateurs de l'égalité en vue de déterminer si l'écart se referme dans ces domaines? Dans l'affirmative, comment ces indicateurs ont-ils été transmis à toutes les composantes du gouvernement fédéral et au grand public? Et, s'ils se referment effectivement, de quelle façon les méthodes et outils d'analyse comparative entre les sexes intègrent-ils les différences entre les divers groupes de femmes, par exemple entre les nouvelles immigrantes, les femmes autochtones et les femmes handicapées?
Mme Florence Ievers: Je vous remercie beaucoup d'avoir posé ces questions.
Vous avez parlé d'écarts. Tout au long de nos rencontres et de notre dialogue, nous en avons mentionné certains. En fait, je viens tout juste d'en mentionner quelques-uns. La pauvreté chez les femmes est très marquée, surtout au sein de certains groupes de femmes comme les mères chefs de famille monoparentale, les groupes de femmes immigrantes, certaines femmes doublement ou triplement désavantagées.
Comme il en a été question mardi dernier, nous demeurons très préoccupées par la violence à l'égard des femmes et, plus particulièrement, par la situation des femmes autochtones. Quand je parle de femmes autochtones, je ne me limite pas à la violence. Je parle aussi de leurs droits juridiques et humains qui sont bafoués. Ce sont là les problèmes cernés par le Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, mais ce sont des problèmes connus, et je suis sûre que des groupes sont venus vous exposer leurs points de vue à l'égard de certains d'entre eux.
Comment nous y prenons-nous pour élaborer des indicateurs? Nous travaillons de très près avec Statistique Canada. Nous avons publié plusieurs documents au fil des ans intitulés « Les femmes au Canada ». Parfois, nous avons aussi publié des documents intitulés « Les femmes et les hommes au Canada ». Vers la fin du Programme quinquennal d'action pour l'égalité entre les sexes, nous sommes en train de faire une analyse plus détaillée des écarts, des obstacles que doivent encore surmonter les femmes, et nous sommes en train d'élaborer une série d'indicateurs, en collaboration avec Statistique Canada et nos collègues d'un peu partout au sein du gouvernement fédéral.
Pour ce qui est de l'application de l'analyse comparative entre les sexes et de son impact sur la race et d'autres facteurs, je vais demander à Hélène de vous donner plus de détails.
Mme Hélène Dwyer-Renaud: Je vous remercie.
Pour ce qui est de la façon dont fonctionne l'outil, comme je l'ai mentionné dans l'exposé, nous nous conformons essentiellement au cadre stratégique que connaissent tous les analystes de politique. Selon le stade où vous en êtes dans l'élaboration d'une politique, que vous soyez en train de faire des consultations ou d'élaborer des options, ou encore de réunir des données, il est entendu que vous tiendrez également compte dans ce que vous faites de la diversité chez les femmes et de la diversité entre les hommes et les femmes. C'est là un processus entendu au sein de l'analyse comparative entre les sexes.
Je crois avoir mentionné un outil que nous avons élaboré, soit le modèle de mesure du rendement. Par ce modèle, on tente de voir quel impact a l'ACS sur les différentes étapes de l'élaboration de la politique. Le modèle tente de le faire en faisant des recoupements avec la race, la diversité, l'âge et tous les différents facteurs. Cela fait partie de la méthode d'analyse comparative entre les sexes.
¹ (1545)
Mme Nina Grewal: Me reste-t-il du temps?
La présidente: Un peu, oui.
Mme Nina Grewal: Je vais le donner à Joy.
Mme Joy Smith (Kildonan—St. Paul, PCC): Je voudrais vous poser une question que j'ai en tête depuis mardi dernier. Vous parlez d'analyse comparative entre les sexes et de ces merveilleux outils que vous essayez de mettre au point, mais comment arrivez-vous à prouver qu'il y a eu discrimination et exclusion dans le cas d'une personne qui s'est vu refuser un emploi, qui n'a pas été sélectionnée pour un poste?
Nous avons parlé de violence, des préjudices matériels que subissent les femmes qui se retrouvent dans des situations difficiles. Or, nous constatons que les outils d'analyse comparative entre les sexes comportent de nombreuses lacunes quand nous abordons des domaines qui ne sont pas si faciles à analyser. Avez-vous réussi à recueillir des données concrètes à ce sujet?
Mme Hélène Dwyer-Renaud: J'espère être en mesure de répondre à votre question, mais ce que vous cherchez peut-être, ce sont des exemples qui relèvent plutôt d'une politique qui s'applique également aux hommes et aux femmes, où les différences ne sont pas si évidentes. Plusieurs exemples sont utilisés par les ministères, mais il y en a un en particulier qui me vient à l'esprit, et c'est celui des maladies cardiovasculaires. C'est l'un des exemples fournis par Santé Canada. Il est intéressant de voir comment ils s'y prennent pour montrer les différences qui existent entre les hommes et les femmes, comment certains facteurs—les tendances d'usage de la cigarette entre les hommes et les femmes, le genre d'exercices qu'ils font ou non—peuvent contribuer à sauver la vie de femmes atteintes de cette maladie, et aussi influer sur les soins donnés à l'hôpital lorsqu'une personne est victime d'une première crise. Comme vous l'avez sans doute vu dans la presse dernièrement, les femmes ne sont pas traitées de la même façon que les hommes quand elles arrivent à l'hôpital, parce qu'elles n'ont pas les mêmes symptômes; elles ne présentent pas les mêmes symptômes.
Nous utilisons beaucoup d'exemples de ce genre dans la formation que nous offrons, pour que les gens comprennent que ce qui semble non discriminatoire à première vue cache de nombreuses différences quand on examine les choses de plus près. Et cela vaut pour tous les domaines socio-économiques. Nous pouvons trouver des exemples dans presque tous les secteurs d'activité.
La présidente: Merci.
Madame Brunelle.
[Français]
Mme Paule Brunelle (Trois-Rivières, BQ): Bonjour, mesdames. C'est toujours un plaisir de vous revoir.
J'ai essayé, par rapport à cette analyse comparative entre les sexes, de prendre des exemples concrets, de voir comment on peut travailler avec cela. Je siège également au Sous-comité de l'examen des lois sur le racolage, qui se penche sur la prostitution et le racolage, où vous avez parlé de Citoyenneté et Immigration Canada comme d'un endroit où--vous nous le direz--cela est peut-être bien implanté.
La question que nous nous posions à ce comité est la suivante. On nous disait qu'il y a beaucoup de femmes immigrantes et que la plupart d'entre elles sont des travailleuses du sexe. Est-on assez avancé pour aller chercher des données pour prouver ce qu'on sous-tend dans les ministères?
Je me posais aussi une question au sujet de l'équité salariale. On veut travailler à l'équité salariale entre les hommes et les femmes. Je crois que c'est un engagement qu'a pris le Canada. Est-on suffisamment avancé pour, à tout le moins dans le cas des salariés qui concernent le gouvernement du Canada, avoir une analyse détaillée qui nous permette de prouver que l'équité salariale a peut-être encore du chemin à faire dans les ministères?
Mme Hélène Dwyer-Renaud: En ce qui concerne les données sur la prostitution, je ne suis vraiment pas une experte en la matière. Cependant, si on prend le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, je sais qu'il a pris l'engagement de commencer à examiner tout ce qu'il fait et de ventiler ses actions en fonction des deux sexes. Je tiens donc pour acquis qu'il est en train de faire ce genre de travail, quoique si on regarde son dernier rapport sur la législation, on constate que sa façon d'en faire rapport est encore un peu floue. Je crois que c'est un défi, d'une certaine façon, pour un ministère de cette envergure, que de commencer à examiner les types de données recueillies pendant des années et peut-être faire un meilleur travail dans cette collecte de données.
Je dois cependant avouer que les ministères font preuve de bonne foi, parce que dans l'exercice que nous faisons présentement avec les indicateurs sur l'égalité entre les sexes, nous avons une bonne représentation de ministères qui veulent effectivement avoir de bonnes données avec lesquelles effectuer leur travail. Si celles-ci ne sont pas disponibles maintenant, elles le seront sous peu, parce que c'est un engagement que nous avons pris.
¹ (1550)
Mme Florence Ievers: En ce qui concerne la question de l'équité salariale, il est clair que le gouvernement et Condition féminine Canada appuient l'équité salariale parce que c'est un élément essentiel à l'amélioration de l'autonomie économique des femmes. Le gouvernement a mis sur pied un comité pour étudier cette question. Condition féminine Canada a participé aux travaux de ce comité. Le gouvernement du Canada a le rapport. Il est en train de l'étudier, et Condition féminine Canada participe à ses délibérations. C'est une question très importante pour les femmes.
Mme Paule Brunelle: Il semble que votre tâche consistant à intégrer cette analyse comparative entre les sexes soit énorme. Le fait qu'il n'y ait pas d'obligation pour les ministères constitue-t-il quelque chose que le comité devrait essayer de changer? Vu qu'il n'y a pas d'obligation, la persuasion, c'est beau, mais peut-on penser que l'implantation sera vraiment très longue?
Mme Florence Ievers: Cela fait dix ans que nous avons obtenu l'engagement du gouvernement sur l'analyse comparative entre les sexes. On a abordé les étapes une à une. En 1995, on avait le plan fédéral, qui impliquait 24 ministères. Le rôle de Condition féminine Canada consistait à bâtir la capacité pour aider les ministères à faire leur travail. C'était une responsabilité, comme je l'ai dit, double. Condition féminine avait sa part à faire de son côté, mais les ministères devaient faire la leur.
Ce dont on s'est rendu compte, quelques années après cet engagement, c'est qu'il était difficile pour les ministères, même avec le guide qu'on avait mis sur pied, de pouvoir réaliser cet objectif. Donc, en 1999, à Condition féminine Canada, on a créé la Direction de l'analyse comparative entre les sexes et on a réaffirmé la nécessité d'accélérer les processus pour bâtir la capacité à Condition féminine Canada entre 2000 et 2005.
Nous arrivons maintenant à la fin de cette stratégie et nous nous rendons compte--vous nous avez entendu le dire--que les progrès sont très intéressants à certains égards, mais moins à d'autres. Je crois que nous sommes rendus au point où la persuasion a moins d'effet. Je vois, dans la collaboration et le travail que nous faisons avec plusieurs ministères, que la volonté est là et qu'il y a une sensibilisation qui était beaucoup moins présente il y a cinq ans. Je crois que nous sommes probablement rendus au point où les mécanismes de responsabilisation devront avoir du mordant, pour pouvoir faire en sorte que les ministères, à l'échelle du gouvernement, puissent faire leur travail.
Nous avons également dit que c'est un processus qu'il n'est pas nécessairement souhaitable d'appliquer à pleine grandeur. Je pense qu'il est utile de le faire par étape. Un ministère comme le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, par exemple, à cause de la loi et de ses dispositions qui l'obligent à faire rapport au Parlement sur l'analyse, s'est doté--Hélène en a parlé--d'un plan sur cinq ans pour pouvoir soutenir les efforts d'analyse comparative. Ayant un exemple d'une politique où c'est requis, je pense que le ministère a réalisé que ce n'était pas si mystérieux que de faire cela. Les bonnes pratiques, les bons exemples, les projets-pilotes dans un ministère aident souvent à créer un effet boule de neige.
[Traduction]
La présidente: Merci.
Madame Kadis.
Mme Susan Kadis (Thornhill, Lib.): Merci, madame la présidente.
Toujours dans le même ordre d'idées, existe-t-il des pays qui exigent que l'on fasse des analyses comparatives entre les sexes? Est-ce que cette pratique est implantée de manière efficace?
Mme Hélène Dwyer-Renaud: Certains pays font de ces analyses une obligation en l'exigeant dans leurs lois, par exemple. Toutefois, d'après ce que nous pouvons constater, que ce soit via nos recherches Internet ou dans le cadre de nos discussions avec des délégations du Canada, il reste encore beaucoup à faire pour mettre ce principe en pratique. Tout dépend de l'approche adoptée par le pays. Certains ont peut-être décidé d'en faire une obligation, mais n'ont pas donné de formation, d'outils ou de précisions de de sorte que les fonctionnaires ne savent pas vraiment comment procéder. D'autres se sont peut-être dotés d'outils, comme l'a fait le Canada, mais sans décréter ces analyses obligatoires. Donc, pour répondre à votre question, il reste encore beaucoup à faire à ce chapitre.
¹ (1555)
Mme Susan Kadis: Vous avez parlé de la nécessité de mettre au point un mécanisme ou un cadre de responsabilisation. Je suis d'accord avec vous sur ce point. Est-ce le genre de recommandation que notre comité pourrait faire? Est-ce que votre ministère a recommandé la mise sur pied d'un tel mécanisme, ou insisté sur la nécessité d'en établir un?
Mme Florence Ievers: Nous sommes sur le point d'achever l'élaboration du programme d'action pour l'égalité entre les sexes et de réfléchir à sa mise en oeuvre, de concert avec nos collègues à l'interne et avec ceux d'autres ministères. Mais le comité a certainement un rôle majeur à jouer à ce chapitre, et nous attendons avec impatience de voir vos recommandations.
À notre avis, il faut désormais intensifier nos efforts dans ce domaine. Le ministre responsable de l'examen des dépenses, que vous avez rencontré, a dit qu'il tenait compte des facteurs liés à l'égalité entre les sexes dans son travail. Le ministre des Finances, répondant récemment à une question à la Chambre des communes, a déclaré que son ministère prenait ces facteurs en considération lors de l'analyse des politiques. Je ne veux pas présumer des résultats de vos discussions, ou de celles que nous allons avoir à l'interne avec notre ministre et nos partenaires au sein du gouvernement fédéral, mais je pense que le moment est venu d'intensifier nos efforts sur ce front.
Mme Susan Kadis: Les lacunes observées au chapitre de la mise en oeuvre sont attribuables à de nombreux facteurs, que vous avez décrits. Est-ce que cette situation relève de l'absence d'un mécanisme de responsabilisation solide ou d'un manque de ressources financières? J'essaie de comprendre. Quels sont, à votre avis, les véritables obstacles qui nuisent à la mise en oeuvre de cette pratique?
Mme Florence Ievers: Hélène peut me corriger si je me trompe, mais selon moi, l'argent n'est pas nécessairement un facteur, sauf si vous avez besoin de recueillir des données pour évaluer les répercussions d'une politique sur les femmes et les hommes. Il y a des ministères qui n'en recueillent aucune et qui auraient peut-être intérêt le faire.
Nous n'avons pas accompli autant de progrès que nous l'aurions souhaité. Nous pensions que le concept allait grandement contribuer à promouvoir l'égalité des sexes quand le gouvernement a adopté cette politique en 1995.. Or, nous nous sommes rendu compte que nous devons continuer de renforcer les capacités et de démystifier les défis que pose l'intégration de l'analyse comparative entre les sexes aux programmes et aux politiques qui sont élaborés.
C'est ce que nous faisons, et c'est ce qu'ont fait de nombreux ministères, comme Citoyenneté et Immigration, qui ont élaboré leurs propres cadres. L'École de la fonction publique du Canada a accepté d'inclure l'analyse comparative entre les sexes dans son programme. Nous sommes en train de voir, de concert avec elle, comment cette formation peut être appliquée aux cadres, étant donné que l'engagement à cet égard doit venir d'en haut.
La LIPR n'est pas le fruit du hasard. La ministre responsable voulait que l'analyse comparative figure dans la loi et l'a clairement fait comprendre à ses fonctionnaires. Ces derniers ont fait appel à nos services. Nous avons travaillé de concert avec Citoyenneté et Immigration, qui a ensuite été en mesure d'élaborer une loi d'avant-garde qui prévoit le dépôt d'un rapport sur les efforts déployés en matière d'analyse comparative entre les sexes.
Si l'engagement ne vient pas d'en haut—et je fais allusion aux ministres, aux sous-ministres, aux sous-ministres adjoints—il sera très difficile pour le reste de l'appareil gouvernemental de suivre.
Mme Susan Kadis: Merci.
La présidente: Merci.
Madame Crowder.
Mme Jean Crowder (Nanaimo—Cowichan, NPD): Je tiens encore une fois à vous remercier de votre exposé. Je crois comprendre que le travail effectué par le ministère est qualifié, à l'échelle internationale, de novateur et sans précédent. On en parle volontiers.
Mes questions recoupent celles de mes collègues. Comme vous l'avez mentionné, la CEDAW a dénoncé le manque de progrès réalisés dans ce domaine. Le rapport annuel de rendement du Canada ne contient aucune information sur l'analyse comparative entre les sexes.
Vous avez soulevé plusieurs points. Vous avez dit, très clairement, qu'il faut faire preuve de leadership sur le plan politique, mais surtout au niveau de la haute direction. Je pense que la plupart d'entre nous sont d'accord avec vous sur ce point.
Ceux d'entre nous qui suivent le dossier de l'équité en matière d'emploi depuis 20 ans savent qu'il est facile de manifester un attachement de pure forme à une question. J'ai travaillé pour le gouvernement fédéral à un moment donné. Nous avons élaboré des plans d'équité en matière d'emploi qui, sur papier, semblaient impressionnants, mais qui n'ont pas donné les résultats escomptés.
Certains témoins nous ont dit qu'il fallait éviter d'adopter, à l'égard de l'analyse comparative entre les sexes, une approche qui manque de rigueur. Il est vrai qu'il faut changer les attitudes, mais je me demande si le ministère ne serait pas en mesure de prendre d'autres initiatives s'il bénéficiait d'un soutien au niveau politique ou s'il disposait des ressources nécessaires. Pouvez-vous commenter?
º (1600)
Mme Florence Ievers: Comme je l'ai mentionné, nous n'effectuons pas d'analyses comparatives entre les sexes pour les ministères.
Mme Jean Crowder: Très bien.
Mme Florence Ievers: Les ministères doivent les effectuer eux-mêmes.
Mme Jean Crowder: Y a-t-il des choses que vous pourriez faire à l'appui de cette initiative s'il existait une volonté politique d'agir ou si vous aviez les ressources nécessaires?
Mme Florence Ievers: S'il y avait un mécanisme de responsabilisation en place, Condition féminine Canada serait en mesure de surveiller de plus près les résultats donnés par les analyses comparatives entre les sexes. Pour l'instant, ce mécanisme n'existe pas. Voilà pourquoi nous estimons que les mesures de responsabilisation doivent être renforcées. Ce rôle de surveillance pourrait être assuré par Condition féminine Canada ou quelqu'un d'autre.
Mme Jean Crowder: Mais vous avez acquis tellement d'expérience dans ce domaine que ce rôle vous conviendrait parfaitement.
Mme Florence Ievers: Il est vrai que nous avons acquis beaucoup d'expérience dans ce domaine, mais c'est le cas aussi de nombreux autres ministères, et ils savent mettre celle-ci à profit. Condition féminine Canada a pour rôle de renforcer les capacités et d'agir comme catalyseur. Nous coordonnons les efforts, nous réunissons les responsables, nous essayons d'offrir des pistes de solution. D'autres font aussi de l'excellent travail.
La présidente: Il vous reste encore du temps.
Mme Jean Crowder: J'aimerais poser une question au sujet de certains ministères, dont celui de l'Immigration. Quand j'ai jeté un coup d'oeil au plan qu'ils avaient établi il y a deux ans—malheureusement, je ne l'ai pas avec moi—je me suis demandée si des mesures de suivi avaient été prises pour évaluer les changements positifs qui avaient été enregistrés sur le plan de la politique. Avez-vous des exemples concrets à fournir à ce sujet? Il y avait une liste de propositions visant la formation du personnel et autre chose du genre, mais est-ce que ces efforts ont contribué à améliorer la situation des femmes et des enfants?
Mme Hélène Dwyer-Renaud: Je crois comprendre qu'ils ont élaboré un plan d'activités, ce qui veut dire essentiellement que chaque direction a établi des objectifs en matière d'analyse comparative entre les sexes, ou en matière de promotion d'égalité des sexes, dans ses domaines d'activité. Le plan couvre la période 2005-2010. Je ne sais pas si nous allons voir des résultats très rapidement, mais je dirais que d'ici un an, vous allez sans doute avoir des résultats que vous pourrez mesurer dans la pratique.
Je sais qu'ils sont très ouverts et qu'ils diffusent de l'information sur leur site Web. J'encourage les membres du comité à le consulter. lls transmettent beaucoup de renseignements sur leurs activités, mais je sais qu'ils sont conscients du fait qu'ils doivent redoubler d'efforts s'ils veulent obtenir plus de résultats. Voilà pourquoi ils ont élaboré ce plan.
La présidente: Merci.
Madame Yelich.
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, PCC): Merci.
La ministre Frulla a déclaré au comité, lors de sa comparution, que le gouvernement du Québec procédait automatiquement à des analyses comparatives entre les sexes, sans qu'on l'oblige à le faire. Est-ce que Condition féminine Canada sait combien de temps il a fallu pour le Québec de mettre cette pratique en oeuvre? Quel est votre avis là-dessus?
Mme Florence Ievers: Je dirais que le Québec a consacré beaucoup d'efforts à cette question. Il a entrepris plusieurs projets-pilotes avec certains ministères, tout comme nous l'avons fait. Je ne sais pas si les analyses comparatives entre les sexes sont effectuées systématiquement dans l'ensemble du gouvernement, mais je sais qu'il y a un comité de haut niveau—je pense qu'il existe toujours —composé de ministres et de sous-ministres qui suivent les progrès réalisés par le gouvernement du Québec au chapitre de la promotion de l'égalité entre hommes et femmes. J'imagine que l'information transmise au comité résulte, en partie, de la mise en oeuvre des analyses comparatives, mais je dis cela alors que je ne sais pas exactement ce que fait aujourd'hui le gouvernement du Québec à ce chapitre.
º (1605)
Mme Lynne Yelich: Je voudrais avoir des précisions au sujet des études de cas de politiques que vous êtes en train d'effectuer au sein du gouvernement de la Saskatchewan. S'agit-il d'études de cas sur l'analyse comparative entre les sexes? Qu'entendez-vous par des « études de cas de politiques au moyen de projets-pilotes » ?
Mme Hélène Dwyer-Renaud: Il s'agit, dans le cas de la Saskatchewan, de formation. Le gouvernement a réorganisé l'ensemble des programmes de promotion de la femme, de sorte que la responsabilité des analyses comparatives entre les sexes relève maintenant du cabinet du premier ministre. Ils ont décidé de faire appel à des spécialistes qui vont former tous les fonctionnaires de la Saskatchewan. C'est ce qu'ils essaient de faire.
Pour ce qui est de la formation, ils utilisent différentes études de cas et différents exemples. Je peux vous les fournir, sauf que je ne les ai pas avec moi.
Mme Lynne Yelich: Il y a donc quelqu'un au sein du gouvernement de la Saskatchewan qui s'occupe des analyses comparatives entre les sexes. Expliquez-moi exactement ce qu'ils font. Je présume que les statistiques constituent l'outil le plus fréquemment utilisé, mais que font-ils quand ils forment les personnes dans le domaine de l'analyse comparative entre les sexes?
Mme Hélène Dwyer-Renaud: Cela dépend du poste qu'occupe le fonctionnaire. Bien que la formation soit assurée de façon linéaire, nous savons tous que l'élaboration des politiques, elle, n'est pas un processus linéaire. Essentiellement, la formation consiste à expliquer aux fonctionnaires comment appliquer l'analyse comparative entre les sexes dans différents domaines. S'ils s'occupent de collectes de données, s'ils travaillent comme chercheurs ou statisticiens, par exemple, ils vont apprendre comment améliorer la qualité des recherches qu'ils formulant les questions autrement, en examinant les différents domaines d'activité et les banques de données, en recueillant des données de manière plus efficace.
Mais ce n'est pas tout. S'ils s'occupent de communications, ils vont apprendre comment être plus sensibles aux besoins de certains groupes communautaires qui n'ont peut-être pas toujours été les principaux groupes clients du gouvernement, comment transmettre certains renseignements ou encourager la participation au sein des groupes de discussion. Ils ont peut-être consulté le même groupe de personnes au cours des trente dernières années et n'ont peut-être jamais songé à ouvrir le processus à ceux qui sont visés par la politique ou le programme qu'ils élaborent.
Il est question ici d'examiner la politique sous tous les angles, et non pas uniquement de recueillir des données. Si vous évaluez un programme qui existe depuis cinq ans, quel genre de questions allez-vous poser?
L'évaluation est un bon exemple, parce que le gouvernement effectue habituellement une analyse des coûts et des avantages, sauf qu'il ne se demande pas vraiment si la politique contribue à améliorer la situation de ceux qui en tirent partie. C'est de ce genre de formation dont il est ici question. Elle porte, en fait, sur les activités au jour le jour. En tant que fonctionnaire, comment tenez-vous compte des considérations liées à l'égalité entre les sexes dans l'exercice de vos fonctions?
La présidente: Merci.
Madame Torsney.
L'hon. Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Je n'aime pas entendre les gens s'excuser quand ils arrivent en retard à une réunion, mais je viens tout juste de rencontrer un groupe d'écoliers à qui j'ai dû expliquer ce que fait le comité et pourquoi ce travail est si important. Ils étaient fort intéressés. Il s'agissait d'écoliers de septième ou huitième année.
Je me demande si vous avez des exemples qui montrent—et j'ai tendance à croire que l'argent est roi à Ottawa et ailleurs—que, dans les faits, si le gouvernement de la Saskatchewan compte investir tant d'argent dans la formation, c'est parce qu'il va finir par réaliser des économies ou que le processus d'analyse comparative entre les sexes présente de véritables avantages économiques.
Mme Hélène Dwyer-Renaud: Je ne sais pas si nous sommes en mesure de démontrer que les analyses comportent es avantages économiques. Nous pourrions sans doute vous donner quelques exemples tirés de l'expérience du gouvernement du Québec, qui a procédé à des analyses quand la pratique est entrée en vigueur. Je sais qu'ils avaient l'habitude d'utiliser un exemple dans le domaine de l'assurance des soins de santé, soit celui des services qui ont été désassurés, et qu'ils ont évalué l'impact de cette décision sur les hommes et les femmes et les coûts que cela a fini par entraîner.
Il existe quelques exemples que nous pouvons compiler et envoyer au comité, si cela l'intéresse.
º (1610)
L'hon. Paddy Torsney: Il est possible que, dans certains cas, on ait changé l'orientation d'une politique après avoir effectué l'analyse, et que ce faisant, le gouvernement ait vraiment réalisé des économies. Il serait utile d'avoir ces renseignements, pour ceux d'entre nous qui ont des doutes.
Mme Hélène Dwyer-Renaud: J'aimerais ajouter qu'il existe aussi beaucoup d'exemples à l'échelle internationale.
La Banque mondiale effectue depuis des années des analyses économiques sur les répercussions qu'entraîne l'absence d'analyses comparatives entre les sexes. Si le comité le souhaite, nous lui ferons également parvenir ces renseignements.
L'hon. Paddy Torsney: Je ne sais pas ce qu'en pensent les autres, mais je trouve cela très fascinant. J'espérais moi aussi qu'on nous montre à un moment donné comment cela fonctionne et ce que cela signifie. Les gens parlent beaucoup d'analyses, mais sans nécessairement voir les avantages qu'elles présentent. Je pense qu'il serait utile d'avoir des exemples concrets.
La présidente: Merci. Nous sommes en train de nous en occuper.
Madame Bonsant.
[Français]
Mme France Bonsant (Compton—Stanstead, BQ): Bonjour.
Quels sont les obstacles, nouveaux ou déjà existants, à l'implantation de l'analyse comparative entre les sexes dans les agences et ministères fédéraux?
Je connais des gens qui ont travaillé pour l'équité salariale. Certains ministères fédéraux l'ont eue, mais d'autres ne l'ont pas encore. Pouvez-vous nous donner des exemples d'obstacles rencontrés?
Mme Hélène Dwyer-Renaud: Florence en a parlé dans sa présentation. S'il n'y a vraiment pas de volonté politique qui vienne de plus haut et si la demande n'y est pas, il est difficile pour les gens de comprendre qu'ils doivent le faire.
Les ministères que j'ai cités en exemple ont des énoncés. Un sous-ministre peut souhaiter connaître l'impact d'un projet de loi sur les femmes et sur les hommes, et en connaître la différence. Si ces demandes ne sont pas faites très clairement, on voit difficilement comment les gens pourraient y répondre. Il y a des gens qui reçoivent de la formation, qui sont très enthousiastes et qui retournent à leur poste pour commencer à faire leur travail, mais si le contexte organisationnel ne l'a pas demandé ou ne s'attend pas à cela, ce n'est pas encouragé. Voilà un exemple d'obstacle.
Mme Florence Ievers: Certains croient que cela implique des frais supplémentaires. Comme Mme Torsney le mentionnait, il arrive que lors d'une analyse comparative, des sommes substantielles s'ajoutent aux frais du gouvernement. Mais si l'analyse comparative n'est pas faite, certains effets peuvent se manifester beaucoup plus tard.
Prenons pour exemple les politiques sur les pensions. Si, dans le système des pensions, les femmes n'avaient pas accès à la clause d'exclusion pour élever des enfants, elles pourraient être beaucoup plus pauvres au cours de leur vie. C'est donc un bénéfice.
On a étudié l'effet de cette clause sur les hommes et sur les femmes qui en bénéficiaient. Il en est ressorti clairement que, pour les femmes qui ne sont pas sur le marché du travail pendant cinq ou six ans, ces années ne comptent pas. Cependant, elles sont quand même calculées dans le nombre d'années pendant lesquelles elles ont travaillé, ce qui réduit leur pension considérablement. En faisant cette analyse au moment où la politique est établie, cela évite au gouvernement de créer d'autres programmes et de dépenser d'autres sommes pour des femmes qui seront plus pauvres à l'âge de la retraite.
Par contre, les ministères ne le voient pas toujours du même oeil. Ils s'imaginent qu'on n'a ni les ressources, ni les moyens, ni le temps d'ajouter cela à tout ce qu'il faut déjà faire pour développer un programme ou une politique. Le rôle de Condition féminine Canada, plus particulièrement au cours des cinq dernières années, a été de développer les outils, les mécanismes et la formation pour faciliter la tâche des ministères et pour démystifier les obstacles à l'application plus uniforme de cette politique.
º (1615)
Mme Hélène Dwyer-Renaud: Effectivement, « démystification » est un bon mot. Ce n'est pas de la mauvaise foi, c'est que les gens n'ont pas vraiment compris qu'il pouvait y avoir des différences pour les hommes et les femmes.
En matière d'équité salariale ou d'équité en matière d'emploi, il est très intéressant de constater que les ministères qui en ont fait l'expérience peuvent passer très facilement à l'étape de l'analyse comparative. Il est beaucoup plus facile de l'introduire lorsqu'un travail de conscientisation est déjà fait.
Mme Paule Brunelle: Pour pouvoir l'implanter, il est souvent nécessaire que des appuis politiques viennent de plus haut.
Est-ce que Condition Féminine Canada ne pourrait pas travailler à des problèmes importants, graves et prioritaires pour les femmes? Cela convaincrait les politiciens que c'est important, puisque cela affecte beaucoup de personnes. Cela pourrait donc devenir une façon différente de travailler.
Mme Florence Ievers: Je vais vous donner l'exemple du dossier de la garde des enfants. Il s'agit d'une politique qui est en train de se développer au niveau fédéral, et qui implique les provinces et les territoires. La dimension des femmes est essentielle, mais il n'est pas évident que cette dimension serait prise en compte dans un monde où tout est neutre.
On travaille maintenant avec le ministère fédéral, qui est en train de développer ses politiques. On peut y contribuer. Voilà une politique qui va avoir un effet très important, non seulement sur les femmes, mais aussi sur les hommes, les familles et les enfants au Canada.
Il y a d'autres dossiers prioritaires que j'ai mentionnés plus tôt: la pauvreté chez les femmes, la violence, les femmes autochtones et le travail atypique où les femmes sont mal servies.
[Traduction]
La présidente: Merci.
Madame Crowder.
Mme Jean Crowder: En ce qui concerne l'analyse de la politique gouvernementale, l'AFAI vient tout juste de publier un rapport qui examine les mesures budgétaires fédérales des dix dernières années. Je ne sais pas si vous connaissez ce rapport. Il met en évidence le fait que souvent les questions qui touchent les femmes sont traitées de façon peu concrète. Vous mentionnez les dispositions d'exclusion prévues dans le RPC; or, ce qui n'a pas été fait concrètement, c'est l'analyse.
Un grand nombre de femmes vont prendre leur retraite au cours des 10 à 15 prochaines années. Les femmes occupent des emplois non conventionnels et gagnent encore aujourd'hui en moyenne 30 cents de moins pour chaque dollar que les hommes. Un défi de taille guette les aînées, car elles risquent de vivre dans la pauvreté si on ne procède pas à une analyse à cet égard.
Cet exemple démontre qu'on n'a pas véritablement tenu compte des femmes dans l'analyse de la politique. Je sais que vous savez de quoi je parle. Une partie du problème, c'est qu'on a souvent l'impression que c'est toujours à recommencer puisqu'il y a seulement 65 femmes députées au Parlement sur les 308 sièges. Faire en sorte que les questions qui touchent les femmes et les enfants occupent une place concrète sur la liste des priorités nationales constitue un véritable défi parce qu'il y a encore des décideurs qui n'y comprennent tout simplement rien.
Je me demande si vous n'avez pas un conseil à offrir au comité à cet égard. Je ne vous demande pas de nous dire quoi faire, mais de nous suggérer des outils et des mécanismes pour nous permettre de défendre notre cause avec plus d'ardeur.
Mme Florence Ievers: Après ce que je viens d'entendre, je crois que vous avez une idée bien précise de la direction que vous voulez prendre et je ne veux pas m'avancer sur ce terrain.
Nous avons des défis à relever. Nous savons à quel niveau se situent les disparités. Le Comité de l'ACDI, l'AFAI et nombre d'autres organismes les ont relevées. Je suis certaine que vos électeurs vous en font part. Les statistiques que nous réunissons sur les disparités, les résultats du programme d'action pour l'égalité entre les sexes et la marche à suivre, présentent les mêmes données.
Mme Jean Crowder: Je crois qu'il serait utile, comme on l'a suggéré plus tôt, de donner un exemple concret, car l'exercice est révélateur. Si on prend une mesure législative, la Loi sur l'assurance-emploi, par exemple, on constate qu'elle défavorise manifestement les femmes et les enfants ainsi que les hommes qui occupent des emplois saisonniers à temps partiel, c'est-à-dire des emplois non conventionnels. Le fait d'assujettir cette loi à une analyse comparative entre les sexes nous permettrait probablement de voir de quelle manière on aurait pu traiter différemment la question. Cet exemple illustre bien dans quelle mesure les femmes sont désavantagées.
º (1620)
Mme Florence Ievers: Si le comité souhaite qu'on passe systématiquement en revue la façon d'appliquer l'analyse comparative entre les sexes, nous sommes disposées à le faire, mais c'est à vous de décider.
La présidente: Nous en prenons bonne note et nous allons probablement vous revenir à ce sujet.
Je surveille l'heure de près. J'ai une courte question à poser.
L'autre jour à la Chambre, M. Goodale a fait allusion au fait qu'il avait demandé aux ministères d'assujettir à une analyse comparative entre les sexes tous les documents destinés au ministère des Finances. Votre charge de travail a-t-elle augmenté ou faites-vous face à une demande accrue?
Mme Florence Ievers: Si on a demandé aux ministères de le faire, la responsabilité leur incombe donc. Ils ne feraient pas nécessairement appel à nous, comme groupe responsable du développement des capacités, pour que nous fassions pour eux une analyse comparative entre les sexes. Si le ministre des Finances s'attend à ce que les ministères réalisent une analyse—et nous avons mentionné un certain nombre de ministères qui ont les outils nécessaires pour le faire—je suppose qu'ils en ont tenu compte dans leur plan d'action.
La présidente: C'est ce qui me préoccupait, c'est-à-dire de savoir s'ils avaient ou non les outils pour le faire.
Mme Florence Ievers: Bon nombre d'entre eux disposent des outils nécessaires. Certains sont moins outillés que d'autres, mais comme c'est ce qu'on leur a demandé de faire, j'espère qu'ils vont s'y plier.
La présidente: Merci.
Nous allons conclure là-dessus.
Merci beaucoup d'être revenues devant le comité. Je crois qu'on a demandé clairement que vous reveniez pour nous donner plus de renseignements à ce sujet et nous allons recommuniquer avec vous.
Merci à toutes mes collègues. La séance est levée.