HUMA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent du développement des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 18 novembre 2004
Á | 1115 |
La présidente (Mme Raymonde Folco (Laval—Les Îles, Lib.)) |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
La présidente |
Mme Christiane Gagnon |
La présidente |
Mme Christiane Gagnon |
La présidente |
La présidente |
Mme Christiane Gagnon |
La présidente |
Mme Christiane Gagnon |
La présidente |
Á | 1120 |
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD) |
La présidente |
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam, PCC) |
La présidente |
Mme Christiane Gagnon |
La présidente |
L'hon. Peter Adams (Peterborough, Lib.) |
La présidente |
M. Paul Forseth |
La présidente |
L'hon. Peter Adams |
La présidente |
M. Peter Van Loan (York—Simcoe, PCC) |
La présidente |
Mme Christiane Gagnon |
Á | 1125 |
La présidente |
Mme Christiane Gagnon |
La présidente |
Mme Christiane Gagnon |
La présidente |
Mme Jamie Crane (présidente, Local 95, University College of Cape Breton Students' Union) |
La présidente |
M. Peter Lewis (vice-président, Fondation canadienne de bourses d'études) |
La présidente |
M. Paul Forseth |
La présidente |
Mme Jamie Crane |
La présidente |
Mme Jamie Crane |
Á | 1130 |
La présidente |
M. Peter Lewis |
Á | 1135 |
La présidente |
Mr. Yves Lessard (Chambly—Borduas, BQ) |
La présidente |
M. Yves Lessard |
La présidente |
Á | 1140 |
Mme Sylvie Lévesque (directrice générale, Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec) |
La présidente |
Mme Sylvie Lévesque |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Sylvie Lévesque |
Á | 1145 |
Mme Lorraine Desjardins (chargée de projet, Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec) |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Lorraine Desjardins |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. André Lareau (professeur, Université Laval, témoignage à titre personnel) |
Á | 1150 |
Á | 1155 |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. Barry Devolin (Haliburton—Kawartha Lakes—Brock, PCC) |
Mme Jamie Crane |
M. Barry Devolin |
M. Peter Lewis |
M. Barry Devolin |
Mme Sylvie Lévesque |
 | 1200 |
M. Barry Devolin |
Mme Lorraine Desjardins |
M. Barry Devolin |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. André Lareau |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. Ed Komarnicki (Souris—Moose Mountain, PCC) |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. Ed Komarnicki |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. Peter Lewis |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Christiane Gagnon |
 | 1205 |
Mme Lorraine Desjardins |
Mme Christiane Gagnon |
M. André Lareau |
Mme Christiane Gagnon |
M. André Lareau |
Mme Christiane Gagnon |
M. Yves Lessard |
 | 1210 |
M. André Lareau |
M. Yves Lessard |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Alexa McDonough |
 | 1215 |
Mme Jamie Crane |
M. Peter Lewis |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
L'hon. Peter Adams |
 | 1220 |
Mme Jamie Crane |
L'hon. Peter Adams |
 | 1225 |
Mme Jamie Crane |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. Peter Van Loan |
M. Peter Lewis |
M. Peter Van Loan |
M. Peter Lewis |
M. Peter Van Loan |
M. Peter Lewis |
M. Peter Van Loan |
M. Peter Lewis |
M. Peter Van Loan |
M. Peter Lewis |
M. Peter Van Loan |
L'hon. Peter Adams |
M. Peter Van Loan |
L'hon. Peter Adams |
M. Peter Van Loan |
 | 1230 |
M. Peter Lewis |
M. Peter Van Loan |
M. Peter Lewis |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. Jean-Claude D'Amours |
 | 1235 |
M. André Lareau |
M. Jean-Claude D'Amours |
M. André Lareau |
Mme Sylvie Lévesque |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Christiane Gagnon |
Mme Sylvie Lévesque |
Mme Christiane Gagnon |
 | 1240 |
M. André Lareau |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. Mario Silva (Davenport, Lib.) |
 | 1245 |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. André Lareau |
M. Mario Silva |
M. André Lareau |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Jamie Crane |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Alexa McDonough |
Mme Jamie Crane |
 | 1250 |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Alexa McDonough |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. Peter Lewis |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Jamie Crane |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
L'hon. Peter Adams |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Sylvie Lévesque |
 | 1255 |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. Peter Lewis |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Jamie Crane |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. André Lareau |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
CANADA
Comité permanent du développement des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 18 novembre 2004
[Enregistrement électronique]
* * *
Á (1115)
[Traduction]
La présidente (Mme Raymonde Folco (Laval—Les Îles, Lib.)): La séance est ouverte.
Permettez-moi d'abord de vous présenter mes excuses pour être arrivée en retard.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Madame la présidente, avant de commencer, j'aimerais bien qu'on s'entende sur un point. Je sais que nous devions discuter de certaines questions concernant le fonctionnement du comité.
La présidente: Vous parlez du comité ou du sous-comité?
Mme Christiane Gagnon: Est-ce qu'on n'aura pas à voter plus tard sur certains engagements de notre comité?
La présidente: Donnez-moi un petit instant, s'il vous plaît, madame Gagnon.
Mme Christiane Gagnon: Est-ce que nous pourrions remettre à la prochaine réunion les discussions sur les enjeux dont va traiter notre comité?
La présidente: Si le comité en décide ainsi, je suis prête à accepter cette suggestion.
Tout d'abord, je vous présente mes excuses, à tous et à toutes, pour mon retard. Vous savez ce que c'est: on a tous le même problème.
[Traduction]
La présidente: Mme Gagnon a présenté une proposition...oh, excusez-moi. Commençons par le début.
Nous tenons aujourd'hui une vidéoconférence et, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 14 octobre 2004, nous examinons le projet de loi C-5, Loi sur l'aide financière à l'épargne destinée aux études postsecondaires.
[Français]
Comme vous pouvez le constater à l'ordre du jour, nous entendrons d'abord des témoins par le biais d'une vidéoconférence. Pour la deuxième partie, on a prévu les travaux du comité.
Si j'ai bien compris, compte tenu du fait que des documents ont circulé, en l'occurrence la motion de M. Tony Martin, et que les membres du comité n'ont pu en prendre connaissance, Mme Gagnon suggère que cette partie des travaux du comité soit remise à mardi prochain. C'est exact, madame Gagnon?
Mme Christiane Gagnon: Nous recevons deux ministres mardi prochain.
La présidente: Ça irait donc à jeudi prochain, étant donné qu'on a encore le même problème.
C'est bien ce que vous suggérez?
Mme Christiane Gagnon: En effet, mais je n'avais pas eu l'information concernant le programme de mardi. Est-ce qu'il est trop tard pour décider...
La présidente: Parlez-vous du document intitulé « Éventuels points à l’ordre du jour du sous-comité de lacondition des personnes handicapées »? C'est bien celui-là?
Je suggère donc ce qui suit:
[Traduction]
...et j'ai besoin de la collaboration des membres du comité. Je propose que nous commencions par examiner les modalités de la séance immédiatement—et nous n'avons pas beaucoup de temps pour cela, puisque nos témoins attendent pour la vidéoconférence—et que nous changions l'ordre de nos travaux d'aujourd'hui. La vidéoconférence serait donc le deuxième point à notre ordre du jour.
Si je vous demande votre collaboration, c'est que je devrai partir pour me rendre à une réunion d'urgence à 12 h 15. Cette proposition me semble raisonnable, parce que j'ai eu l'impression—mais je peux me tromper—que la plupart étaient d'accord au sujet de la motion de M. Martin et que nous pourrions en traiter rapidement, même en ce qui a trait aux détails.
Premièrement, seriez-vous d'accord pour que nous discutions immédiatement de la question du comité et que nous passions tout de suite après à la vidéoconférence?
[Français]
Oui, madame?
Á (1120)
[Traduction]
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Merci, madame la présidente.
Je suis entièrement d'accord pour que nous traitions cette question rapidement, car on m'a garanti qu'il y aurait unanimité sur la motion. Ce qui m'inquiète cependant, c'est que nous devrions tenir compte de nos témoins, qui attendent déjà depuis près d'une demi-heure. S'il y a unanimité sur la motion, je serais d'accord. Mais s'il y a controverse, et ce n'est pas ce qu'on m'a dit, j'hésiterais beaucoup à modifier l'ordre de nos travaux, car après tout, c'est Tony Martin qui a présenté cette motion.
Pourriez-vous vérifier auprès des membres s'il y a unanimité?
La présidente: C'est une bonne proposition. Laissez-moi vérifier.
Paul.
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam, PCC): Les représentants du Parti conservateur sont prêts à traiter rapidement cette motion. Nous avons toujours eu un sous-comité comme celui-là. Nous devrions mettre aux voix rapidement la question de sa création, et le comité pourrait se rencontrer plus tard pour déterminer qui en serait membre.
[Français]
La présidente: Quelle est la position du Bloc?
Mme Christiane Gagnon: Je n'y vois pas d'objection. On va donc s'en tenir à cette proposition. Par contre, je pensais qu'on avait un surplus de travail.
La présidente: Pour le NPD, ça va.
Quelle est la position des libéraux?
L'hon. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Nous avons la même position.
La présidente: Merci beaucoup, chers collègues.
J'ai devant moi la motion du sous-comité, qui se lit comme suit:
Que, par application des alinéas 108(1) a) et b) du Règlement, un Sous-comité du Comité permanent du développement des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées soit établi, et que conformément à l'alinéa 108(2) du Règlement le sous-comité étudie la condition des personnes handicapées; |
Que le Sous-comité soit présidé par un membre du Parti libéral et composé de quatre membres ou membres associés du comité comme suit: un membre du gouvernement, un membre du Parti conservateur, un membre du Bloc québécois et un membre du Nouveau Parti démocratique à être nommés suivant les consultations usuelles avec les whips et inscrits auprès du greffier; |
Quelqu'un veut-il débattre de cette partie?
Très bien, je continue:
Que le Sous-comité fasse rapport de ses conclusions et de ses recommandations au comité permanent. |
Que le Sous-comité soit autorisé, sauf si la Chambre en ordonne autrement, à convoquer des personnes et à exiger la production de documents et de dossiers, à se réunir pendant que la Chambre siège, à entendre des témoignages, à se réunir seulement lorsque le Comité permanent ne siège pas, à moins que celui-ci n'en décide autrement, à faire imprimer au jour le jour des documents et à permettre à son président, en l'absence de quorum, de tenir des réunions, d'entendre des témoignages pourvu qu'au moins trois membres incluant l'opposition soient présents; |
Que si le président du Sous-comité était incapable de remplir ses fonctions au moment d'une réunion, il pourrait désigner un autre membre du Sous-comité pour le remplacer; |
Que les changements de membres du Sous-comité soient effectués selon les alinéas 114(2) b) et c) du Règlement; |
Que le Comité alloue au Sous-comité des fonds suffisants pris sur son budget afin de lui permettre de rembourser des frais raisonnables de voyage et de séjour à des témoins qui auront comparu devant lui; |
Que le Sous-comité puisse retenir les services d'analystes de la Bibliothèque du Parlement; |
Qu'il soit aussi autorisé à retenir les services de conseillers, de professionnels, de personnel de soutien et de sténographes selon ses besoins. |
Sur ce point précis, je me suis renseignée auprès de représentants de la Bibliothèque du Parlement. Évidemment, il leur sera difficile de mettre à notre disposition une personne chargée de faire de la recherche. Cependant, ils sont prêts à faire des efforts, d'ici Noël, pour mettre un professionnel à notre disposition. Ils sont présentement à la recherche d'un professionnel qui pourrait assumer cette tâche.
Paul.
[Traduction]
M. Paul Forseth: Par conséquent, comme l'a proposé la représentante du NPD, et conformément à ce que vous venez de lire, à ce qui est imprimé et au document que j'ai sous les yeux, je propose que vous mettiez la question aux voix.
La présidente: Merci.
(La motion est adoptée)
L'hon. Peter Adams: Madame la présidente, j'invoque le règlement. J'aimerais bien... Je prie les témoins de nous excuser, mais Alain Boire a soulevé des questions au sujet des coûts du projet de loi C-5. J'ai ici des documents que j'aimerais faire circuler.
La présidente: Merci. Tout à fait
Monsieur Van Loan.
M. Peter Van Loan (York—Simcoe, PCC): Avant que nous en terminions avec cet avis de motion, la représentante du Parti conservateur au sein de ce sous-comité sera Carole Skelton, qui est porte-parole de—
La présidente: Madame Skelton.
Nous n'avons pas choisi de représentant à l'heure actuelle.
Vous laisserez le—
Mme Christiane Gagnon: Je l'en informerai cet après-midi.
Á (1125)
La présidente: Je propose que les autres questions soient reportées à jeudi prochain ou, si ce n'est pas vraiment urgent, au mardi suivant, afin que nous ne laissions pas attendre nos témoins un peu partout au pays. Êtes-vous d'accord?
Des voix: D'accord.
La présidente: Très bien.
Merci beaucoup, chers collègues. J'apprécie votre collaboration.
Je tiens à vous rappeler un dernier détail. Jeudi prochain, dans une semaine, nous entreprendrons l'examen article par article du projet de loi C-5. Je demande aux représentants de chaque parti de commencer à rédiger leurs amendements, s'ils ont l'intention d'en proposer. Merci beaucoup.
Vous avez une question?
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Voulez-vous les amendements aujourd'hui?
La présidente: Non, nous commencerons l'étude article par article jeudi prochain. Je vous demande donc de nous proposer des amendements le plus rapidement possible, de les faire rédiger dans les deux langues, évidemment, et ainsi de suite.
Mme Christiane Gagnon: D'accord.
La présidente: Tout va bien? J'accélère beaucoup le processus, mais enfin...
Premièrement, à titre de témoin, nous entendrons Mme Sylvie Lévesque, directrice générale de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec, et Mme Lorraine Desjardins, chargée de projet pour ce même organisme.
Nous allons aussi entendre M. André Lareau, qui est professeur à l'Université Laval.
Nous continuerons la vidéoconférence avec Mme Jamie Crane, présidente du local 95 du University College of Cape Breton Students' Union.
[Traduction]
Madame Crane, nous entendez-vous?
Mme Jamie Crane (présidente, Local 95, University College of Cape Breton Students' Union): Oui, je vous entends.
La présidente: C'est bien. Bienvenue, madame Crane, et merci de votre patience.
Nous entendrons également M. Peter Lewis, vice-président de la Fondation canadienne des bourses d'études à Vancouver. Bienvenue, monsieur Lewis. Pouvez-vous nous entendre?
M. Peter Lewis (vice-président, Fondation canadienne de bourses d'études): Oui, je vous entends, merci.
La présidente: Très bien.
M. Paul Forseth: Puisqu'il peut y avoir un léger retard, pourrions-nous commencer par entendre d'abord les témoins par vidéoconférence?
La présidente: D'accord. C'est une très bonne idée.
Conformément à ce que propose M. Forseth, qui n'est pas notre trésorier mais qui devrait peut-être l'être...
Une voix: Non, il... [Note de la rédaction : Inaudible...à ce comité.
La présidente: Il porte toujours une chemise grise, je l'ai remarqué.
Nous allons donc commencer par notre témoin du cap Breton. Vous avez cinq minutes pour présenter votre exposé, madame Crane. Nous entendrons ensuite M. Lewis, à Vancouver, qui disposera lui aussi de cinq minutes. Nous passerons ensuite à la Fédération des associations de familles monoparentales et aux représentants de l'Université Laval. Les représentants de ces organisations auront chacun cinq minutes, après quoi nous poserons des questions, qui seront adressées à n'importe lequel d'entre vous.
Cela vous va?
[Français]
Merci beaucoup.
Nous commençons donc par Mme Jamie Crane, présidente du local 95.
Madame Crane.
[Traduction]
Allez-y.
Mme Jamie Crane: Est-ce que vous m'entendez bien?
La présidente: Très bien.
Mme Jamie Crane: Je témoigne devant vous aujourd'hui au sujet du projet de loi C-5, non seulement à titre de dirigeante d'un groupe d'étudiants dans l'une des régions les plus défavorisées du pays, mais aussi à titre de future bénéficiaire visée par ce projet de loi. Bon nombre de gens sont du même avis que moi : ce projet de loi est tout simplement une erreur. Je suis probablement la preuve vivante de la véracité de cet argument.
Je suis étudiante et j'élève seule deux enfants. Je m'inquiète constamment de savoir comment je vais payer mes frais de scolarité et mes frais supplémentaires d'études postsecondaires, et comment je pourrai payer à mes enfants des études collégiales ou universitaires si des mesures plus rigoureuses ne sont pas prises pour que l'enseignement postsecondaire devienne une priorité au Canada.
Il existe des moyens pertinents d'aider les étudiants, et les bourses fondées sur les besoins en sont un excellent exemple. La présentation de ce projet de loi montre qu'on se rend compte que nous avons besoin d'aide. Le problème, c'est que ces efforts sont mal orientés, qu'ils sont vains et que les bons d'études seront loin de résoudre le problème pour les futurs étudiants. En fait, on mettra de côté de l'argent dont les familles qui en ont le plus besoin ne pourront fort probablement pas bénéficier.
Les familles à faible revenu ne seront probablement pas en mesure de cotiser chaque année de gros montants, si même elles peuvent investir dans des régimes enregistré d'épargne. Ajoutez à cela les minces 2 000 $ que le gouvernement versera en bons d'études du Canada, et vous verrez que la somme ne sera pas suffisante pour permettre à un enfant d'une famille à faible revenu, ou même à revenu moyen, d'entamer des études, compte tenu du rythme auquel les frais de scolarité augmenteront, estime-t-on, au cours des 10 à 20 prochaines années.
Il importe également de souligner qu'un bon nombre de gens—mais pas tous—se rendent enfin compte que les femmes ont été tenues trop longtemps à l'écart du marché du travail, des études supérieures et du gouvernement. C'est ce qu'ont dit la plus part des grands partis politiques de notre pays. Mais comment pourra-ton corriger ce problème si nous perdons notre à temps à débattre de projets de loi qui ne feront rien pour aider les plus pauvres de notre société? Si nous voulons augmenter le taux de participation des femmes, Il faudra leur donner les outils dont elles ont besoin pour cela. Il faut favoriser les études au moyen de subventions fédérales fondées sur les besoins et non au moyen de régimes d'épargne et de bons d'études.
Les régimes enregistrés d'épargne-études sont loin de donner espoir à une jeune mère de deux enfants. Ce n'est pas que je manque de motivation ni que je ne comprenne pas ce régime, c'est tout simplement que je n'ai pas d'argent. C'est bien beau de dire qu'avec l'aide de certaines entreprises, je pourrais ouvrir un compte d'épargne-études auquel je n'aurai à verser chaque année qu'une cotisation minime. Mais pour ceux d'entre nous qui vivent sous le seuil de la pauvreté, le fait est que chaque dollar a déjà affecté aux besoins plus immédiats, par exemple la garderie ou le chauffage. Nous sommes bien prêts à planifier en fonction des vingt prochaines années, mais nous n'en avons pas les moyens.
Pour conclure, j'estime que la création du bon d'études canadien est une solution superficielle à un problème bien plus vaste. Il vaudrait bien mieux que le gouvernement fédéral travaille de concert avec les provinces pour mettre sur pied un régime de bourses fondé sur les besoins afin que l'aide offerte profite à ceux dont vous savez qu'ils en ont vraiment besoin. Si le gouvernement fait de l'éducation une priorité, tout le pays voire le monde entier admirera notre régime au même titre que notre régime de soins de santé.
Je vous exhorte à tenir compte de ces considérations peut-être plus personnelles—et je m'en excuse—, lorsque vous déciderez d'adopter ou de rejeter ce projet de loi. L'enseignement post-secondaire au Canada doit être réformé de façon fondamentale. Il s'agit d'un programme social, et il faut immédiatement lui accorder la priorité.
Une fois que vous aurez entendu vos autres témoins, je serai prête à répondre à vos questions, même si elles sont d'ordre plus technique. Je suis consciente de vous avoir présenté une opinion plus personnelle. Je sais que vous avez déjà entendu beaucoup d'arguments plus techniques. Je me ferai donc un plaisir de répondre à toutes vos questions, que ce soit sur mon témoignage ou autre autre chose, au cours des 30 à 60 prochaines minutes.
Á (1130)
La présidente: Merci beaucoup, madame Crane.
Permettez-moi de vous dire que ce que nous recherchons, ce sont des points de vue personnels comme le vôtre et que nous sommes ravis d'avoir eu une perspective aussi positive que la vôtre sur le sujet. Merci beaucoup.
Nous passons maintenant à M. Peter Lewis de Vancouver.
Monsieur Lewis.
M. Peter Lewis: Bonjour. Je représente la Fondation fiduciaire canadienne de bourses d'études, mais j'interviens aussi comme père de six enfants. J'ose espérer que mes enfants feront des études supérieures, et ils savent que l'occasion leur en sera offerte. Toutefois, il y a encore aujourd'hui trop d'enfants canadiens qui arrivent au secondaire sans avoir l'intention de faire des études supérieures. Trop d'enfants décrochent au cours du secondaire parce qu'ils ne comprennent pas la valeur de l'éducation. Pour eux, la solution ne réside pas uniquement dans de meilleurs programmes d'aide financière ou dans des frais de scolarité moindre, car la question est complexe et difficile à résoudre. Toutefois, la solution, c'est en partie de nourrir chez eux cette attente et de leur faire comprendre que quelqu'un croit en eux suffisamment pour investir dans leur avenir.
Nous croyons en la valeur des REEE, parce que notre expérience nous a appris qu'ils donnent des résultats. Chaque année, nous donnons de l'argent à des dizaines de milliers d'étudiants canadiens, et chaque année nous entendons ces mêmes étudiants ainsi que leurs parents nous expliquer à quel point ces régimes d'épargne les ont aidés à concrétiser leurs rêves. D'après les recherches, l'épargne-études joue un rôle important : 74 p. 100 des enfants disposant d'un régime d'épargne-études font des études supérieures, par comparaison à 50 p. 100 pour ceux qui n'en ont pas. D'après notre propre expérience, environ 80 p. 100 des jeunes qui peuvent compter sur notre régime d'épargne font des études supérieures.
On peut évidemment se demander si c'est l'existence de ce régime qui les encourage à faire des études supérieures, ou si c'est plutôt le fait que les familles prédisposées à encourager leurs enfants sont plus susceptibles d'épargner à cette fin. Je pencherais en faveur de cette dernière éventualité. En effet, les familles qui valorisent d'emblée les études supérieures sont aussi plus enclines à épargner à cette fin, mais si nous encourageons un plus grand nombre de familles à épargner en vue des études supérieures, je suis convaincu que cela aura un effet d'entraînement sur cette prédisposition.
Les REEE ont des avantages qui dépassent de loin uniquement les avantages financiers. À notre avis, ces régimes comportent quatre avantages distincts.
D'abord, c'est un outil important, car il permet aux parents de communiquer de façon concrète leurs attentes à leurs enfants.
Deuxièmement, cela donne au jeune enfant, très tôt dans la vie, une image de lui faisant des études supérieures. Il ne faut pas attendre que l'enfant soit au secondaire pour lui parler des études supérieures. Il faut qu'il comprenne très jeune qu'il peut faire des études supérieures.
Troisièmement, ces REEE soulignent la valeur des études. Lorsque les enfants voient leur famille mettre de côté de l'argent en vue de cet objectif, ils comprennent que leur famille accorde beaucoup d'importance aux études supérieures.
Enfin, les REEE aident à financer le coût des études supérieures. Ils ne permettent pas nécessairement de couvrir tous les coûts, mais ils aident à réduire l'écart et la dépendance des étudiants à d'autres formes de soutien financier. Trop de familles canadiennes n'épargnent pas en vue des études supérieures. Ce qui est encore plus préoccupant, c'est que trop de familles à faible revenu n'épargnent pas à cette fin. Pourquoi? Nous savons que plus de 60 p. 100 de ces familles à faible revenu ne le font pas faute de revenu disponible. D'autres peuvent avoir des priorités différentes. De plus, elles ne connaissent pas les régimes d'épargne ni les subventions qui y sont associées. À titre de promoteurs de REEE, nous souscrivons sans réserve au projet de loi parce qu'il va droit au but dans la lutte contre les obstacles empêchant les Canadiens de souscrire à ces régimes si importants.
Le projet de loi comporte quatre éléments qui sont à nos yeux importants. En premier lieu, il vise les familles à revenu faible et modeste, ce qui est opportun comme objectif. Deuxièmement, il encourage ces familles à cotiser, ce qui nous permet, comme promoteurs de ces régimes, de les conforter dans leur mentalité d'épargne et de créer des attentes chez leurs enfants. Troisièmement, il offre une chance de partenariat pour les gouvernements provinciaux et les parents pour encourager l'épargne. Quatrièmement, il met l'accent sur les enfants à charge.
Nous aimerions vous faire certaines recommandations précises.
D'abord, le projet de loi traite de cotisations donnant droit à des subventions, mais seulement si elles sont versées par le souscripteur. La Loi de l'impôt sur le revenu autorise les cotisations lorsqu'elles sont versées par le souscripteur ou au nom de celui-ci. Par conséquent, le projet de loi devrait être amendé pour qu'il permette que toutes les cotisations à un REEE, quelles qu'elles soient, donnent droit à des subventions.
En deuxième lieu, il existe des obstacles au versement des fonds sur les REEE, ce qu'il faudrait abolir. Nous savons qu'un nombre accru d'étudiants à temps partiel suivent des études postsecondaires, mais le projet de loi limite le versement de l'aide aux études à ceux qui étudient à temps plein. La Loi de l'impôt sur le revenu devrait être modifiée pour permettre ce versement aux étudiants à temps partiel.
De plus, la limite de 5 000 $ sur les premiers paiements sur le régime nous semble irréaliste et devrait être éliminée : les parents devraient donc pouvoir avoir accès au REEE en fonction de leurs besoins réels.
À titre de fiduciaires d'un régime d'épargne-études, nous croyons qu'il est urgent d'adopter cette loi. Nous hésitons à investir dans les changements nécessaires au système pour rendre le programme possible tant que le projet de loi n'aura pas été adopté. Il est également impératif de l'adopter pour que le programme albertain puisse être lancé en partenariat avec le programme fédéral.
Á (1135)
En guise de conclusion, nous réitérons l'importance que nous accordons aux REEE, et nous souscrivons sans réserve au projet de loi. Il s'agit ici d'une stratégie visionnaire à long terme qui changera le dialogue autour de la table de cuisine et engagera les familles dans la planification des études supérieures de leurs enfants dès leur petite enfance. Nous félicitons le gouvernement d'avoir abordé ainsi le problème, dans une vision qui, nous en sommes convaincus, profitera aux futures générations de Canadiens.
Merci.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Lewis; monsieur Lewis...
Mr. Yves Lessard (Chambly—Borduas, BQ): Monsieur Lewis parlait extrêmement vite par rapport à l'interprétation.
[Français]
La présidente: Il est trop tard. Je ne peux plus rien y faire maintenant.
M. Yves Lessard: Pouvez-vous faire quelque chose pour les suivants?
La présidente: Ce sera exactement le contraire pour les suivants, en effet.
Je vous demanderais, mesdames et messieurs, de ne pas oublier que pendant que vous parlez, il y a la traduction simultanée. Je vous prierais donc de donner le temps aux interprètes de faire leur travail pour nos collègues anglophones.
Á (1140)
[Traduction]
Je remercie M. Lewis et Mme Crane, à qui je demande de rester avec nous, car nous aborderons la période de questions dans quelques minutes à peine.
[Français]
Je cède maintenant la parole à Mme Sylvie Lévesque, directrice générale de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec.
Madame Lévesque, c'est à vous.
Mme Sylvie Lévesque (directrice générale, Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec): Bonjour. Notre présentation sera faite par deux personnes. J'en lirai la première partie et Mme Desjardins, la deuxième.
La présidente: Respecterez-vous les délais prescrits?
Mme Sylvie Lévesque: Nous devrions être capables de respecter les délais sans problème. Je vous remercie de votre invitation.
La Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec existe depuis déjà 30 ans. Si, à l'origine, elle fut mise sur pied pour regrouper les familles monoparentales, depuis 1995, elle intègre dans ses rangs les familles recomposées. Plus récemment, des groupes de pères se sont également ajoutés à son membership. Aujourd'hui, la fédération regroupe près de 60 associations provenant de toutes les régions du Québec.
Au fil des ans, la fédération a mené des actions importantes visant le mieux-être des familles monoparentales et recomposées. Au milieu des années 1990, elle s'est impliquée activement dans les luttes qui ont mené à l'adoption, au Québec, de la loi 60, Loi facilitant la perception des pensions alimentaires.
À la même époque, la fédération déposait un recours collectif inscrit au fédéral et au provincial, la cause Susan Thibodeau, demandant que la pension alimentaire versée pour les besoins exclusifs des enfants ne soit plus imposable. Cette démarche a d'ailleurs mené à l'adoption du projet de loi C-41 en 1997 et à la défiscalisation de ces montants.
De plus, en 1998, la fédération présentait des recommandations devant le Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants dans le cadre du projet de loi C-22 visant à modifier la Loi sur le divorce.
L'année suivante, en 1999, la fédération participait, avec 10 autres organismes oeuvrant auprès des femmes et des familles, à la consultation sur la fiscalité canadienne.
La mise en place de mesures concrètes et adaptées aux besoins particuliers des responsables de familles monoparentales, leur permettant un meilleur accès aux études, figure parmi les demandes portées de longue date par la fédération. Celle-ci est d'avis que l'une des meilleures façons d'accéder à des emplois de qualité et d'échapper à la pauvreté est de parfaire son éducation. Malheureusement, dans les faits, l'accès à l'éducation est trop souvent limité pour les responsables de familles monoparentales et leurs enfants. D'une part, la double tâche d'éduquer des enfants et de poursuivre des études à temps plein est souvent trop lourde et a pour effet d'en décourager plusieurs. D'autre part, les programmes d'aide financière aux études étant surtout conçus pour les étudiants en formation initiale, ils sont peu adaptés aux besoins particuliers des parents étudiants.
Déjà, au moment de sa création, en 1998...
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Forseth): Pardon, mais je vous demanderais de ralentir pour aider nos interprètes. Merci beaucoup.
[Français]
Mme Sylvie Lévesque: J'essaie de respecter les délais; nous avons beaucoup de choses à dire.
Déjà, au moment de sa création, en 1998, la fédération était peu favorable à la Subventioncanadienne pour l'épargne-études, jugeant que cette mesure était inéquitable et neprofitait qu'aux mieux nantis. Non seulement les familles aisées ont déjà accès à de nombreux avantages fiscaux du fédéral, mais elles disposent de revenus leur permettant largement de financer les études postsecondaires de leurs enfants. Or, l'accès à l'éducation de qualité étant l'un des plus sûrs moyens de lutter contre la pauvreté, il devrait figurer parmi les priorités du gouvernement fédéral, bien avant l'octroi d'avantages fiscaux aux mieux nantis.
Bien que les intentions du projet de loi C-5 soient louables, puisqu'on veut majorer la Subvention canadienne pour l'épargne-études afin de favoriser les familles à plus faible revenu, nous croyons qu'elle demeurera inaccessible pour un trop grand nombre de familles canadiennes et québécoises. Ainsi, même si les familles dont le revenu ne dépasse pas 35 000 $ peuvent bénéficier d'une subvention de 40 p. 100, peu d'entre elles réussissent, dans les faits, à épargner en vue des études de leurs enfants, les surplus étant rares ou rapidement absorbés par des besoins plus immédiats.
Les familles monoparentales sont parmi les plus pauvres et sont loin d'être en mesure d'épargner, plusieurs d'entre elles ne disposant même pas de revenus suffisants pour couvrir leurs besoins essentiels. Selon les données publiées en 2002 par le Conseil national du bien-être social, le taux de pauvreté chez les familles monoparentales constituées de la mère et de ses enfants demeure encore de cinq à six fois plus élevé, en moyenne, que le taux de pauvreté des couples avec ou sans enfants. Selon Statistique Canada, la proportion de familles monoparentales dirigées par une femme et vivant sous le seuil de faible revenu avant impôt était de 47,6 p. 100 en 2000, comparativement à 11,4 p. 100 pour les familles biparentales.
Le second reproche pouvant être adressé à la formule du Bon d'études est sa limitation en raison de l'âge. En effet, dès que le bénéficiaire a atteint 21 ans, le gouvernement fédéral reprend les sommes qu'il a versées et ne laisse dans le régime enregistré d'épargnes-études que les intérêts et les économies de la famille. Or, comme l'éducation collégiale est gratuite au Québec, il n'y a que ceux qui iront à l'université qui pourront bénéficier du Bon d'études, ce qui ne laisse qu'un an ou deux pour utiliser l'argent versé par le fédéral.
Á (1145)
Mme Lorraine Desjardins (chargée de projet, Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec): Un autre problème inhérent au projet de loi C-5 est, selon nous, son incapacité à fournir des solutions adéquates au déséquilibre fiscal qui sévit au Canada. Ni le Bon d'études ni la majoration de la Subvention canadienne pour l'épargne-études n'aident le Québec à maintenir la qualité de son système d'éducation, puisque ces mesures ne lui permettent pas de le faire. Ces mesures permettent tout au plus à certains individus parmi les mieux nantis d'assumer une part des coûts de leurs études postsecondaires, mais n'améliorent en rien la qualité de l'enseignement qu'ils reçoivent.
Pour donner suite aux recommandations de la Commission Romanow, le gouvernement fédéral a récemment divisé le transfert social en deux: un transfert en matière de santé et un transfert en matière de programmes sociaux. Il faudrait que le projet de loi C-5 soit accompagné d'une majoration du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, puisque c'est dès maintenant, et non dans 18 ans, que les étudiants et les étudiantes ont besoin d'un soutien financier et d'un enseignement de qualité.
La résolution du problème de déséquilibre fiscal et la restitution équitable du transfert aux provinces permettraient notamment au gouvernement du Québec, qui est le mieux en mesure de comprendre la réalité québécoise, d'appuyer adéquatement ses étudiants et ses étudiantes, notamment en bonifiant son régime de prêts et bourses.
Rappelons que depuis les années 1960, le Québec a entrepris un important rattrapage au niveau de l'éducation. En plus d'offrir la gratuité scolaire aux niveaux primaire et secondaire, notre province s'est dotée d'un réseau gratuit de collèges d'enseignement général et professionnel. De plus, le Québec privilégie depuis plusieurs années le gel des frais de scolarité dans les universités, lesquels se situent actuellement à moins de la moitié de la moyenne canadienne. Ces diverses mesures ont notamment permis au Québec de parvenir à des résultats spectaculaires en matière de scolarisation.
Or, à maints égards, le Québec se trouve pénalisé par la politique fiscale canadienne, notamment en ce qui a trait aux crédits fiscaux relatifs aux études pour les étudiants, les ex-étudiants et leurs parents. Ces crédits d'impôt sont le transfert des crédits pour études et frais de scolarité, le crédit pour frais de scolarité et le crédit pour études. Après les hausses des frais de scolarité dans le reste du Canada, les crédits d'impôt du gouvernement fédéral ont augmenté d'environ 60 p. 100 entre 1998 et 2003, passant de 800 millions de dollars à près de 1,3 milliard de dollars.
Étant donné les sommes qu'épargne Ottawa au Québec en raison du plus faible coût des études postsecondaires et dans le but d'assurer une plus grande équité, le gouvernement fédéral pourrait créer un éventuel transfert aux provinces réservé spécifiquement à l'éducation postsecondaire.
Finalement, la FAFMRQ s'inquiète des coûts d'administration...
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Forseth): Pardon, madame Desjardins, mais vous avez déjà pris sept minutes et demie. Je vous demanderai de conclure et de résumer la suite, après quoi nous passerons aux autres témoins.
[Français]
Mme Lorraine Desjardins: Selon nous, les mesures proposées dans le projet de loi C-5 ne feraient qu'ajouter aux pénalités que subit déjà le Québec en matière de fiscalité canadienne; en outre, elles n'aident pas les familles à faible revenu. Nous proposons donc que le gouvernement fédéral bonifie le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux et règle le problème de l'iniquité fiscale.
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Forseth): Merci beaucoup.
Nous passons maintenant à M. Lareau, de l'Université Laval.
[Français]
M. André Lareau (professeur, Université Laval, témoignage à titre personnel): Bonjour et merci. Je ne vous ferai pas part de la position de l'Université Laval, mais bien de ma position personnelle.
La proposition du projet de loi C-5 d'augmenter les sommes consacrées au financement des études postsecondaires peut, à première vue, sembler intéressante, puisqu'elle aurait théoriquement pour effet de diminuer l'endettement des étudiantes et étudiants. Toutefois, il en est tout autrement.
Sur la forme, afin de bénéficier du Bon d'études prévu au projet C-5, le parent doit initier le processus de mise en place du régime d'épargne-études. Il est clair que la méconnaissance du système fiscal créera des injustices, puisque plusieurs de ces parents n'ont jamais eu à côtoyer les courtiers qui offrent ce produit, n'ayant jamais eu d'économies suffisantes pour justifier le recours à un courtier.
L'État devrait-il offrir ce produit à l'hôpital, dès la naissance du bébé? Il ne serait pas surprenant que les courtiers se pointent à l'hôpital et joignent leurs trousses d'information à leurs plus sincères félicitations aux nouveaux parents. Rappelons-nous la situation dénoncée il y a environ cinq ans, alors que des milliers de personnes âgées n'avaient pas reçu leur supplément de retraite puisqu'elles n'en connaissaient pas l'existence. L'ignorance engendre l'iniquité.
Selon le projet de loi C-5, la somme versée au titre de la Subvention canadienne pour l'épargne-études sera bonifiée. Sur le plan purement financier, d'un point de vue théorique, on ne peut pas être opposé à l'idée de venir en aide aux plus démunis. Toutefois, l'aide atteindra-t-elle réellement sa cible, et l'offrant a-t-il le mandat d'offrir une telle aide? Il est clair que les familles ayant un revenu de moins de 35 000 $ ne sont pas en mesure d'utiliser substantiellement un tel abri fiscal, puisque c'est effectivement d'un abri fiscal qu'il s'agit.
La publication émanant du gouvernement fédéral intitulée Dépenses fiscales et évaluations 2004 prévoit que des dépenses de l'ordre de 125 millions de dollars par année pour 2004 et de 140 millions de dollars pour 2005 seront consenties à l'épargne-études.
Il est important de saisir que ce régime constitue une sérieuse entorse aux règles fiscales normales, soit les règles d'attribution, en vertu desquelles un parent qui transfère des sommes au bénéfice de son enfant doit néanmoins inclure, de façon générale, dans son propre revenu les rendements gagnés par ces sommes. On comprendra que l'objectif de fractionnement du revenu est ici totalement contourné par le biais de l'épargne-études.
Or, bien que nous n'ayons retracé aucune statistique sur le sujet, il est clair que les familles plus aisées profitent davantage de ce programme d'épargne-études. Non seulement l'État donne-t-il son aval au fractionnement du revenu au bénéfice des mieux nantis, mais il leur offre aussi une subvention de 20 p. 100 du montant de l'investissement. Il s'agit, somme toute, d'un programme de bourses d'études octroyées en priorité aux mieux nantis. L'État offre ainsi une bourse à condition que le parent dépose l'équivalent de cinq fois le montant de la bourse dans un compte bancaire. Si le programme était publicisé de cette façon, la société ne pourrait le tolérer.
Quel est l'impact fiscal découlant du retrait des sommes provenant du régime? C'est justement l'enfant de la famille aisée qui aura le moins besoin de travailler lors de ses études et qui, n'ayant pas de revenu à déclarer autre que le retrait provenant du régime d'épargne-études, n'aura aucun impôt à payer sur ce retrait, puisqu'il n'aura aucun autre revenu. L'enfant provenant de la famille moins favorisée doit généralement gagner des sous durant ses études, et le retrait provenant du régime d'épargne-études s'additionnera au revenu d'emploi, ce qui pourra engendrer des impôts payables sur la somme reçue.
Pourtant, un des objectifs de la fiscalité est de répartir équitablement la richesse. Comment justifier qu'une aide financière de l'État cible en priorité les mieux nantis? En résumé, la famille aisée est la grande gagnante du fractionnement du revenu occasionné par le régime d'épargne-études, et c'est elle qui profite des sommes, puisque l'enfant est susceptible d'avoir moins besoin de travailler.
Si le fédéral devait maintenir son implication dans le régime d'épargne-études, pourquoi n'offrirait-il pas une chance égale à tous? Avoir des enfants est un choix personnel, mais qui implique une responsabilité collective. Les 140 millions de dollars seraient mieux investis s'ils étaient répartis parmi l'ensemble des enfants et non seulement chez les mieux nantis.
Voici l'objet de notre deuxième préoccupation. La tendance du fédéral à saupoudrer des sommes dans les programmes de développement social doit être revue dans son ensemble. Elle constitue, de façon à peine déguisée, une poursuite du Programme de commandites, puisqu'elle assure que le gouvernement fédéral sera présent dans la vie des citoyens dès leur naissance.
Le gouvernement fédéral a le pouvoir de lever les impôts requis pour rencontrer les exigences fiduciaires qui lui sont imposées. Il reçoit ces sommes à titre de fiduciaire des citoyens, et lorsqu'il en perçoit trop, il doit leur remettre la différence.
Á (1150)
Quand je me rends au magasin afin de m'acheter une chemise de 48 $ et que je remets un billet de 50 $ au marchand, je m'attends à ce que celui-ci me rende ma monnaie et non à ce qu'il décide de rénover son magasin avec le trop-perçu.
Le fédéral est en train de procéder à d'importantes rénovations, particulièrement lorsqu'il s'agit de sommes dans les domaines de l'éducation et de la santé. Dans la mesure où l'application d'une aide fiscale est liée à une dépense préalable, la situation est encore plus dramatique. C'est justement ce qui se produit dans le cas de l'épargne-études, où le bénéfice fiscal est octroyé à condition qu'une dépense préalable soit effectuée par le parent. Le bénéfice fiscal n'est pas octroyé en fonction de l'âge ou du statut de la personne, et il est évident que seuls les mieux nantis peuvent en jouir.
Une situation similaire existe aussi dans le domaine de la santé à l'égard du crédit de frais médicaux, octroyé uniquement à ceux qui ont les moyens d'engager des frais médicaux. Il s'agit bien sûr d'un financement parallèle des soins de santé qui ne peut être toléré, puisque les provinces possèdent toute la structure administrative requise, autant en santé qu'en éducation, pour ne nommer que ces secteurs. Pourquoi le fédéral s'entête-t-il à dépenser dans ces secteurs?
Il semble que depuis que le déficit zéro a été atteint, le fédéral se plaît à embellir certains programmes par l'entremise de la fiscalité. L'atteinte de l'équité horizontale ne doit pas se faire au détriment du respect des juridictions, puisqu'il est clair que les contribuables seraient beaucoup mieux servis par les structures mises en place par les provinces, qui possèdent déjà la connaissance et l'organisation requises. Il leur manque toutefois le financement.
Le fédéral a le mandat d'assurer une saine gestion de l'État. Pour ce faire, il prélève des impôts afin de s'assurer que les dépenses qui sont effectuées le soient dans le cadre de son mandat. La tendance moderne de l'État fédéral est toutefois inversée. Il prélève les impôts et distribue ensuite les sommes reçues selon l'ampleur de l'excédent. Il outrepasse ainsi clairement le mandat qui lui a été confié.
Dans la décision rendue par la Cour suprême du Canada en 1995, dans l'affaire Symes c. Canada, la juge L'Heureux-Dubé, alors dissidente, s'exprimait ainsi: « La décision d'avoir des enfants n'est pas assimilable à toute autre décision de « consommation ». » Si la tendance actuelle n'est pas renversée, l'enfant deviendra un tel bien de consommation.
Je vous remercie.
Á (1155)
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Forseth): Merci beaucoup. Vous avez vous aussi parlé pendant sept minutes et demie, ce qui équilibre un peu les choses.
Nous commençons par le Parti conservateur et M. Barry Devolin.
M. Barry Devolin (Haliburton—Kawartha Lakes—Brock, PCC): Merci.
Merci à tous nos témoins.
J'ai une question à laquelle je demanderais à tous nos témoins de répondre brièvement. Sur la foi de ce que vous et les témoins qui vous ont précédé nous ont dit, il saute aux yeux que, pour beaucoup, ce projet de loi-ci ne va pas assez loin et ne résout pas les graves préoccupations que pose le financement des études postsecondaires.
J'ai été récemment élu pour la première fois au Parlement. Je me demande si je dois appuyer un projet de loi qui peut être considéré comme un pas dans la bonne direction, mais qui devrait être suivi par de nombreux autres pas... Autrement dit, croyez-vous que je devrais appuyer ce projet de loi-ci, si imparfait soit-il, ou me recommandez-vous plutôt de le rejeter et d'obliger le gouvernement à refaire ses devoirs?
Vous pourriez peut-être répondre selon l'ordre dans lequel vous avez parlé. Mme Crane.
Mme Jamie Crane: Je crois que je comprends votre situation de nouveau député. Vous vous inquiétez de savoir s'il faut adopter ce projet de loi et s'il peut avoir des effets nuisibles à l'avenir, n'est-ce pas?
À mon avis, il ne faut pas l'adopter. En outre, si vous voulez prendre des mesures pour aider les étudiants à long terme et faire des études postsecondaires une vraie priorité, il faudrait rejeter tout cela en bloc, si je puis m'exprimer ainsi. Il faudrait éliminer les REEE et investir l'argent que le gouvernement y verse dans des bourses fédérales fondées sur les besoins, un régime qui pourrait être mis sur pied de concert avec les provinces. Je suis d'accord avec un des autres témoins sur le fait qu'il faut céder aux provinces des transferts sociaux particuliers au titre des études postsecondaires afin qu'elles utilisent cet argent là où il doit l'être.
Mais effectivement, ce projet de loi devrait être rejeté. C'est au moment où sont prises les décisions budgétaires qu'il convient d'examiner cette question et de voir à ce que les régimes actuels soient remplacés par des bourses fédérales fondées sur les besoins. Vous verriez alors qu'un tel régime serait beaucoup plus efficace en ce qui concerne l'argent dépensé par le gouvernement fédéral et la promotion des études postsecondaires. En bout de ligne, c'est le résultat qu'aurait une telle mesure.
M. Barry Devolin: Merci, madame Crane.
Monsieur Levis.
M. Peter Lewis: Comme je l'ai dit dans mon exposé, j'estime que cette question est beaucoup plus complexe et qu'il ne s'agit pas simplement de donner aux finissants du secondaire des bourses fondées sur les besoins. Ce qu'il faut entre autres, à mon avis, c'est trouver des moyens d'amener les familles à envisager très tôt les études postsecondaires de leurs enfants et à en parler avec eux. C'est ce qui en fait la valeur. C'est bien au-delà d'une aide financière; c'est un outil qui encouragera les familles de tout le pays à discuter d'études supérieures avec leurs enfants lorsqu'ils sont jeunes et à les orienter en ce sens.
C'est un élément important de cette mesure. Je ne suis pas assez stupide pour dire que cela réglera tous les problèmes, mais c'est, à mon avis, un élément important d'une approche progressive pour corriger la situation.
M. Barry Devolin: D'accord, merci monsieur Lewis.
Madame Lévesque.
[Français]
Mme Sylvie Lévesque: Comme nous l'avons dit plus tôt lors de notre présentation, nous vous recommandons de voter contre le projet de loi, et cela pour les raisons que nous avons soulignées. Selon nous, ce projet de loi aurait pour effet d'aider les familles les mieux nanties. Nous croyons que tous les enfants et toutes les familles canadiennes et québécoises doivent avoir les mêmes droits et doivent pouvoir bénéficier des mêmes mesures d'accès aux études. Un peu comme la dame l'a mentionné, nous croyons qu'il faut effectuer les transferts nécessaires aux provinces, particulièrement au Québec, pour que nous continuions à faire ce que nous faisons déjà au chapitre des études postsecondaires à long terme, pour le bien des enfants, des familles et de l'ensemble du Québec.
 (1200)
[Traduction]
M. Barry Devolin: Merci.
Madame Desjardins.
Mme Lorraine Desjardins: Probablement.
M. Barry Devolin: Bon, d'accord, vous êtes du même avis.
Voilà.
Le vice-président (M. Paul Forseth): : Monsieur Lareau.
[Français]
M. André Lareau: Selon moi, appuyer un tel projet équivaut tout simplement à élargir davantage le fossé entre les riches et les pauvres. Si le fédéral souhaite sérieusement accorder de l'aide financière aux jeunes et faciliter l'accès aux études postsecondaires, il doit tout simplement retourner les sommes aux provinces, qui sont les mieux placées pour connaître les besoins de leurs citoyens et les moyens de mettre en oeuvre des mesures d'aide relatives aux études postsecondaires.
Pour moi, il est clair que si l'on veut faciliter l'accès aux études postsecondaires, il faut voter contre le projet de loi.
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Forseth): Merci.
Nous allons maintenant passer à M. Ed. Komarnicki. C'est encore la même période de sept minutes.
M. Ed Komarnicki (Souris—Moose Mountain, PCC): Je n'ai qu'une seule question, et elle s'adresse à M. Peter Lewis.
En théorie, ce que vous avez dit semble logique. Mais selon les autres témoins, on pourrait mieux utiliser l'argent, soit en s'attaquant au problème sous un angle plus général, en réduisant les frais de scolarité ou en offrant des bourses fondées sur les besoins, soit en s'attaquant au coût et en ciblant plus particulièrement les personnes qui n'ont pas les moyens de faire des études.
En principe, ces mesures pourraient être efficaces, mais à votre avis, le problème est-il abordé sous un mauvais angle et pourquoi ne cible-t-on pas particulièrement ceux qui ont le plus besoin d'aide?
Le vice-président (M. Paul Forseth): Je vous demande d'être bref, s'il vous plaît.
À qui s'adresse la question?
M. Ed Komarnicki: À M. Peter Lewis.
Le vice-président (M. Paul Forseth): D'accord, merci.
M. Peter Lewis: Je suis plutôt d'avis, pour ma part, que le projet de loi vise ceux qui en ont le plus besoin. D'ailleurs, il est prévu que l'on examine les moyens de subsistance avant de verser les fonds. Autrement dit, ceux-ci ne seront versés qu'aux familles qui en ont besoin.
Je ne voudrais certes pas prétendre que c'est la panacée. Il nous faut tout de même bénéficier aussi de bons programmes d'aide financière. Il faut continuer à offrir un programme universel de bourses en fonction des besoins. Mais le projet de loi fait partie de l'objectif général qui est d'encourager les familles à faible revenu à viser les études supérieures dès le plus jeune âge.
Créer des fonds qui seront à la disposition des enfants à la fin de leurs études secondaires ne constitue qu'un élément de la solution plus générale, et c'est pourquoi nous nous souscrivons au projet de loi.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Merci beaucoup.
Nous passons maintenant à Mme Gagnon du Bloc québécois.
Merci.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Je remercie nos invités d'être présents et de nous aider à prendre une décision qui n'est pas facile.
Je trouve que le gouvernement est habile. On a l'impression qu'il a souvent des intentions cachées lorsqu'il dépose ses projets de loi, car on ne sait pas trop où il s'en va. Il semble vouloir aider les familles défavorisées, mais si on vote contre ce projet de loi, y aura-t-il des conséquences pour les familles défavorisées? Serons-nous blâmés parce que nous l'aurons rejeté? Le gouvernement est capable de se servir de cela lors d'une prochaine élection.
D'autre part, je me pose une question. Selon le gouvernement, ce projet de loi pourrait permettre de sensibiliser les familles défavorisées à l'idée d'essayer d'avoir accès aux études. On a entendu quelques arguments de ce genre, mais depuis que nous avons entrepris l'étude de ce projet de loi, nous avons entendu peu de personnes qui l'appuient.
On nous a laissé entendre que le projet de loi allait favoriser ce type de sensibilisation et démontrait qu'on se préoccupait des familles défavorisées. Ainsi, on leur offre de l'argent qui pourrait être disponible dans 15 ans. Pensez-vous que cela pourrait motiver les familles défavorisées?
Vous dites que les familles ne se prévaudront pas de ces mesures parce qu'elles ne sont pas au courant. Elles ne feront pas de démarches pour y avoir accès. La même chose s'est produite dans le cas du Supplément de revenu garanti. Pouvez-vous me convaincre que ce programme va faire en sorte que cette sensibilité s'accroisse?
Vous pouvez répondre à tour de rôle.
 (1205)
Mme Lorraine Desjardins: Il me serait très difficile de vous convaincre que ce genre de programme servira aux personnes les plus démunies.
Je voudrais revenir à ce que M. Lewis a dit à propos du type de famille qui cotisait au régime enregistré d'épargne-études. Il s'agissait, selon lui, de familles qui étaient déjà sensibilisées à l'importance de l'éducation en général et de l'éducation postsecondaire en particulier, etc. En disant cela, on insinue que les familles qui ne cotisent pas à un régime enregistré d'épargne-études ne sont pas sensibilisées à l'importance d'une bonne éducation, alors que ce n'est pas du tout le cas.
Les familles que nous représentons--les familles monoparentales et à faible revenu--n'ont tout simplement pas le choix. Elles n'ont pas d'épargne. Elles n'ont même pas le luxe de penser à ce qu'elles feront avec leur épargne puisqu'elles n'en ont pas. Dans bien des cas, elles vivent sous le seuil de la pauvreté. Même les familles à faible revenu qui ne vivent pas sous le seuil de la pauvreté n'ont pas d'épargne. L'argent est consacré à des choses plus urgentes, comme payer le loyer.
Mme Christiane Gagnon: Par contre, le montant de 3 000 $ serait réservé à cela. Il s'agirait d'un fonds pour les enfants sur lequel les familles pourraient compter. Elles n'auraient pas à investir ce montant de 3 000 $, car c'est le gouvernement qui le ferait pour elles. Ne pensez-vous pas que cela inciterait les gens à penser qu'on tient compte de leurs besoins et qu'ils pourraient compter sur cette somme de 3 000 $?
Qu'en pensez-vous, Monsieur Lareau?
M. André Lareau: On ne peut pas être contre l'idée d'aider les gens les plus défavorisés. Cependant, si la somme qui est versée pour les familles défavorisées peut atteindre 3 000 $ après une vingtaine d'années, on peut se demander quelle est la vraie somme qui est versée par l'État fédéral pour un enfant.
Si un parent investit 2 000 $ pour son enfant chaque année, l'État fédéral versera 400 $ pour cet enfant. Quand il aura atteint l'âge de 18 ans, cela totalisera 7 200 $. Pourquoi l'État fédéral verse-t-il plus d'argent pour une famille favorisée, une famille bien nantie que pour une famille défavorisée? En effet, il s'agit d'un montant plus élevé que trois fois la somme de la famille défavorisée pour qui on investit 2 000 $, en espérant que ce montant de 2 000 $ deviendra un montant de 3 000 $ avec le temps.
Il y a donc un déséquilibre marqué ici. Pourquoi ne pas prendre toutes les sommes qui sont investies dans ce programme et les répartir, ce qui serait plus bénéfique pour tous les enfants? Ce serait peut-être un moindre mal si le fédéral s'entêtait à investir dans ce projet. Autrement, on aiderait surtout, et de façon très spécifique, les gens les plus aisés de la société.
Mme Christiane Gagnon: Merci. Vous nous avez aussi dit, monsieur Lareau, que le régime qui est présentement à l'étude constituait une entorse au régime fiscal. J'aimerais que vous nous expliquiez votre idée.
M. André Lareau: C'est dans la mesure où un parent transfère des sommes à son enfant. Si, par exemple, je dépose 1 000 $ dans le compte de banque de mon enfant, les revenus d'intérêt générés par cette somme seront imposés sur mon revenu à moi comme parent, tant et aussi longtemps que l'enfant n'aura pas atteint l'âge de 18 ans. L'État veut donc tenter de contrer le fractionnement du revenu à l'intérieur de la cellule familiale.
Or, l'épargne-études est ici une entorse, puisque le parent qui a les moyens d'investir dans l'épargne-études investit des sommes dans la fiducie. Les revenus gagnés sont, pour l'instant, à l'abri de l'impôt et s'accumulent tant et aussi longtemps qu'ils ne sont pas retirés au bénéfice de l'enfant. Ainsi, le parent n'est pas imposé sur les rendements de ce montant. C'est uniquement lorsque les sommes seront retirées du régime qu'elles seront imposées, alors qu'elle seront entre les mains de l'enfant qui, de façon générale, n'aura pas un revenu suffisant pour payer de l'impôt.
Si le parent était imposé à un taux de 50 p. 100 et gagnait, par exemple, 100 $ d'intérêt par année sur cette somme, il aurait 50 $ d'impôt à payer. Dans le cas présent, il n'y aura pas d'impôt payable par le parent. C'est donc une entorse majeure aux règles d'attribution prévues par la loi.
Mme Christiane Gagnon: Merci.
Il reste une minute. Yves, veux-tu poser une question?
M. Yves Lessard: Ma grande question portait sur les revenus. Je voulais justement qu'on clarifie l'aspect sur lequel on vient de vous demander des précisions.
En résumé, si je comprends bien, on vient de dire que les sommes investies par le parent dans le compte d'épargne-études de l'enfant ne sont pas imposées.
 (1210)
M. André Lareau: Ce sera effectivement le cas tant et aussi longtemps qu'elles ne sont pas retirées du régime. La difficulté en ce qui a trait au bon d'études, notamment, est que la totalité du bon d'études fera partie du revenu de l'enfant. En revanche, lorsque le parent investit une somme dans l'épargne-études, seuls le rendement provenant de cet investissement ainsi que la subvention de l'État seront imposés dans le revenu de l'enfant, et non pas la contribution du parent, puisqu'il s'agit d'une contribution non déductible.
On s'entend pour dire que tout le bon d'études fera partie du revenu de l'enfant. De nombreux enfants doivent travailler pour gagner de l'argent pour payer leurs études, surtout dans les familles défavorisées. Ainsi, l'addition du revenu d'emploi de cet enfant et du bon d'études fera en sorte qu'il pourra y avoir une récupération fiscale du bon d'études, parce que l'enfant aura gagné 9 000 $ ou 10 000 $ dans l'année. Ici, on vise particulièrement les étudiants qui suivent des cours secondaires professionnels et qui se qualifieront ici. Si un enfant qui suit un cours de mécanicien effectue un stage rémunéré de huit mois, il gagnera peut-être 9 000 $ ou 10 000 $ et paiera de l'impôt sur le bon d'études.
M. Yves Lessard: Ce bon d'études ne devrait-il pas être...
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Forseth): Pardon, mais vous avez largement débordé du temps alloué.
Nous passons maintenant à Mme McDonough, du NPD.
Mme Alexa McDonough: Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins d'avoir comparu ce matin.
J'aimerais poser ma première question à Jamie Crane, qui s'est exprimée en premier. Comprenez-nous bien : ne vous excusez surtout pas auprès du comité de lui avoir fait part de votre expérience personnelle. Vous avez décrit votre situation en des termes qui nous ont tous convaincus que vous êtes exactement le genre de personne que le projet de loi présume, voire prétend, pouvoir aider. Et pourtant, vous avez répété ce que nous avions entendu de la part des autres organisations étudiantes qui ont comparu au nom de tous les étudiants du Canada, soit la FCEE, l'ACAE et les groupes régionaux qui se sont exprimés à ce sujet—à savoir qu'il est faux de prétendre que le projet de loi réussira à combler l'écart.
Je ne cherche pas à provoquer, mais nous avons entendu Peter Lewis affirmé que ce projet de loi vise à modifier votre vision des études supérieures et qu'il faut vous sensibiliser à l'importance de l'éducation. Pourtant, vous nous avez expliqué que, même si vous étiez une mère aux études, vous ne pourriez aucunement profiter du programme, même si vous êtes en train aujourd'hui de poursuivre des études pour assurer l'avenir de vos enfants pendant les 18 prochaines années.
Les trois autres groupes de témoins, qui ont repris à leur compte les témoignages précédents au comité, auraient-ils quelque chose à rajouter ou à demander aux représentants de la Fondation canadienne de bourses d'études, pour mieux comprendre le point de vue de ce dernier?
Je voudrais tout de même poser une question à Peter Lewis : d'après l'information que vous nous avez présentée, vous gérez aujourd'hui des actifs de 1,6 milliards de dollars et administrez un total de 407 000 régimes. J'imagine que vous ne pouvez nous répondre sur-le-champ, mais pourriez-vous préciser au comité deux points? D'abord, d'après vos renseignements, quelle est la participation du gouvernement dans les actifs de 1,6 milliards de dollars que vous gérez? Deuxièmement, si le projet de loi était adopté, vous attendez-vous à une augmentation du nombre de régimes et de fonds que vous auriez à gérer, au-delà des 407 000 régimes et des, 1,6 milliard d'actifs que vous avez actuellement? C'est parce que nous voudrions comprendre quelle incidence le projet de loi aura sur l'administration des bourses d'études comme les vôtres, puisque les gestionnaires comme vous semblez être les seuls à souscrire sans réserve à ce que le gouvernement propose de faire.
 (1215)
Mme Jamie Crane: Pour revenir à ce qui a été dit, mais sans vouloir trop insister, je dois dire en toute déférence que l'idée qu'il faut absolument convaincre les familles à faible revenu qu'elles doivent promouvoir l'instruction chez leurs enfants, me semble tintée d'arrogance. Voilà ma première réaction.
Maintenant, sur un plan plus personnel qui vous fera peut-être sourire, sachez que mon fils de sept ans a déjà décidé qu'il voulait devenir vétérinaire. Par conséquent, il s'est rendu à plusieurs reprises chez ses grands-parents pour utiliser l'Internet en vue de découvrir où, au Canada, il pourrait étudier lorsqu'il aura 18 ans. Vous comprenez que j'ai du mal à accepter l'affirmation que les familles à faible revenu n'encouragent pas les études collégiales et universitaires de leurs enfants.
La grande question pour moi, c'est de savoir comment payer les frais de scolarité. Ce n'est pas que nous refusons d'encourager nos enfants à étudier, mais cela peut sembler cruel jusqu'à un certain point, surtout si l'on sait que le gouvernement ne nous aide aucunement en ce sens et que l'on n'aura pas les moyens de les envoyer, quand ils auront 18 ans, faire des études, là où nous croyons que c'est le mieux.
Regardez simplement le rythme auquel augmente les frais de scolarité: en Nouvelle-Écosse, l'élève qui entre aujourd'hui en première année devrait débourser environ 100 000 dollars pour obtenir un diplôme de premier cycle à l'université. Il ne me viendrait jamais l'idée de dire que l'aide financière est néfaste, mais il est ridicule de prétendre que 3 000 $ encourageront les jeunes à aller étudier et leur permettront de commencer des études supérieures. C'est tout simplement absurde et inutile.
Ce qu'il nous faut, c'est une réforme fondamentale, alors que vous proposez ici un programme social. On ne cesse de répéter qu'il faut faire avancer l'instruction postsecondaire. J'aimerais bien que Peter Lewis, qui gère un régime d'épargne-études, réponde aussi à cette question. Il affirme que beaucoup profitent du régime qu'il offre. Pourrait-il nous donner des chiffres qui expliqueraient quel type de familles profite des REEE et quel est leur revenu?
Je ne sais si j'ai le droit de poser la question, mais je le fais de toute façon.
M. Peter Lewis: Malheureusement, je ne puis vous donner ces chiffres, car nous ne recueillons pas ce type de données dans nos dossiers. Mais je voudrais cependant réagir à certains commentaires.
D'abord, je ne voulais certes pas laisser entendre que les familles à faible revenu ne valorisent pas l'instruction supérieure. Ce n'est évidemment pas le cas. Toutefois, les recherches montrent que ceux qui ont les revenus les plus faibles tendent à sous-estimer la valeur des études supérieures et à en surestimer les coûts. Autrement dit, ils sont mal informés, même si ce n'est pas le cas de toutes les familles, naturellement.
Ce que le projet de loi propose n'est qu'un outil, et n'est certes pas la panacée. C'est un outil et un pas dans la bonne direction qui aidera une famille à inciter son enfant, dès sa petite enfance, à faires des études supérieures. Cela ne veut pas dire qu'il n'existe pas déjà des familles qui travaillent d'arrache-pied pour orienter leurs enfants vers cet objectif. Mais nous croyons qu'il est important que, dans le plus grand nombre de familles possibles, on en parle avec les enfants dès leur jeune âge.
Et je tiens à vous féliciter de la façon dont vous avez poussé vos enfants à avoir de hautes aspirations.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Merci beaucoup.
Nous passons maintenant à M. Peter Adams, du Parti libéral.
L'hon. Peter Adams: Merci, monsieur le président.
J'aimerais m'adresser à Jamie Crane, mais j'aimerais aussi que les autres réagissent à mes commentaires.
Je sais, d'entrée de jeu, que l'accès aux études supérieures au Canada est une question extrêmement complexe. À l'heure qu'il est, le Canada a le taux de participation le plus élevé du monde occidental. Malheureusement, en dépit de l'augmentation extraordinaire du nombre d'étudiants, il reste que les familles à faible revenu tirent toujours de l'arrière.
De plus, rappelons-nous que nous vivons dans un système fédéral et que, comme on l'a si bien signalé plus tôt, le gouvernement fédéral ne peut limiter les frais de scolarité. Nous accueillons aujourd'hui les témoins du Québec, province qui impose les frais de scolarité les plus faibles au collègue et à l'université; par ailleurs, nous accueillons aussi un autre témoin de la province où les frais sont les plus élevés au Canada pour l'université et où le nombre d'étudiants de premier cycle est le plus faible aussi au pays. Néanmoins, c'est un système que je respecte.
Le gouvernement fédéral a notamment instauré la prestation nationale pour enfants ainsi que le supplément de cette prestation. J'aime à croire qu'il favorise ainsi l'accès aux études supérieures, mais il faut savoir que certaines provinces ont décidé de récupérer ces montants. Je ne sais pas ce qu'il en est dans votre province, Jamie, mais ma propre province, l'Ontario, la récupère auprès de ses citoyens à faible revenu.
Il existe également le programme de bourses du millénaire qui octroie 3 000 $ de subventions aux étudiants qui reçoivent des prêts aux études. Dans ma province, cette subvention est aussi récupérée chez les étudiants qui vivent de l'aide sociale. Je suis bien obligé d'accepter cette réalité, car les provinces ont le droit d'agir ainsi, même s'il s'agit d'un programme fédéral.
Dans le cas des REEE, presque toutes les provinces ont, lorsqu'un citoyen demande de l'aide sociale, accepté de ne pas tenir compte du fait qu'il est détenteur d'un REEE. Autrement dit, ce compte est en quelque sorte protégé, et le gouvernement fédéral peut donc agir sans que les provinces ne minent ce qu'il essaie de faire.
Le programme est très ciblé et vise, en premier lieu, à aider les gens à faible revenu; en second lieu, il vise à donner de l'argent aux jeunes—pas à leur famille, mais aux jeunes eux-mêmes—de sorte que ceux-ci peuvent à un moment donné utiliser les fonds accumulés pour continuer à apprendre, soit pour une formation en apprentissage, soit pour un cours par correspondance, par exemple. Contrairement à ce qu'on a laissé entendre, ces fonds ne doivent pas être utilisés avant l'âge de 21 ans : ils peuvent être conservés dans le compte jusqu'à ce que le titulaire atteigne 40 ans.
Le pire des scénarios, ce serait qu'un jeune découvre à l'âge de 21 ans que le responsable, soit son parent ou la société d'aide à l'enfance, n'a pas pendant 15 ans profité du programme. En effet, supposons qu'un jeune souscrive aujourd'hui à un compte enregistré d'épargne comme celui-là : il recevra 500 $ à sa naissance, puis 100 $ par année pendant 15 ans. Autrement dit, avant l'âge de 21 ans, ce jeune se retrouverait avec une subvention d'au moins 2 000 $. Imaginez donc qu'un jeune découvre que, si son parent ou la société d'aide à l'enfance avait ouvert un compte à son nom, il aura pu y accumuler jusqu'à 2 000 $, plus l'intérêt couru pendant toutes ces années.
Les provinces ont même le droit de venir se greffer au programme fédéral. On nous dit, en effet, que l'Alberta va injecter des montants équivalents, et d'autres provinces pourraient leur emboîter le pas dans les mêmes circonstances. Tout cela est très avantageux pour les enfants qui veulent avoir accès aux fonds accumulés et les utiliser pour des voyages d'études, pour des cours, pour l'achat de livres ou d'un ordinateur, etc. Il suffit d'encourager les familles à ouvrir un compte au nom de leur enfant—et on leur offre 25 $ pour les aider à cet égard. Même si elles n'injectent rien pendant 15 ans, la simple existence du fonds encouragera les enfants à poursuivre leurs études sous une forme ou une autre.
 (1220)
Mme Jamie Crane: Je pourrais réagir à plusieurs égards. Mais pour répondre à votre question, c'est bien que je vienne de la Nouvelle-Écosse.
Bien sûr, le gouvernement propose de mettre de côté de l'argent auquel les enfants pourraient avoir accès dans 18 ans. On parle ici de 2 000 $. Mais je répète que cela ne représente qu'une infime partie des coûts, si l'on considère qu'obtenir un diplôme de premier cycle pourrait coûter environ 100 000 $.
Je vis en Nouvelle-Écosse et, dans cette province, les bourses du millénaire n'ont rien fait pour aider les étudiants. Je sais bien que l'on ne peut vous le reprocher, mais il faut répéter que les étudiants de la Nouvelle-Écosse n'ont pas vu l'ombre des 3 000 $ de bourse du millénaire. Il n'existe pas de système...
L'hon. Peter Adams: Je m'excuse de vous interrompre ainsi, Jamie, mais il y a un décalage entre les vous et nous. L'idéal, ç'aurait été que vous soyez ici pour que le contact soit plus facile.
Vous venez de donner l'exemple des bourses du millénaire. Mais dans le cas qui nous occupe, on veut mettre l'argent dans les mains de l'étudiant, sans nécessairement que cela représente la totalité des frais de scolarité en Nouvelle-Écosse.
Soit dit en passant, l'argent ne doit pas uniquement servir aux étudiants du niveau collégial ou universitaire. Il peut servir à des étudiants qui ont atteint la quarantaine—vous pouvez même faire certains calculs—pour leur permettre de continuer à apprendre durant toute leur vie. C'est pour qu'ils sachent qu'ils ont accès à un peu d'agent, même si cela ne doit représenter, avec l'intérêt accumulé, que 3 000 ou 4 000 $, s'ils n'ont pas pu investir quoi que ce soit dans le fonds pendant toutes ces années.
D'ailleurs, le jeune de 15 ou 16 ans qui ouvre un compte d'études pourrait y verser de l'argent jusqu'à ce qu'il atteigne 40 ans. Ces fonds pourraient fructifier et pourraient même lui permettre de retourner aux études à l'âge de 40 ans. Comprenez-vous?
Il ne s'agit pas ici d'avoir assez d'argent dans le fonds pour payer les frais universitaires qui sont très élevés en Nouvelle-Écosse. Ce serait l'idéal, bien sûr. Mais il faut avouer que, malgré tout, vous avez un excellent système d'éducation dans votre province. Mais comprenez-vous mon point de vue? L'objectif de ce fonds-ci n'est pas le même que celui du programme des bourses du millénaire.
 (1225)
Mme Jamie Crane: D'accord, mais laissez-moi finir : je voulais simplement vous faire comprendre qu'il est extrêmement coûteux de faire des études postsecondaires, particulièrement en Nouvelle-Écosse.
Je voudrais terminer en trente secondes : cela me fait peur de voir que le gouvernement fédéral planifie ses programmes sociaux en fonction du scénario du pire ou en se basant sur le fait que ces programmes ne nuiront à personne. Je trouve que l'éducation postsecondaire mérite que plus que cela au Canada.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Merci.
Nous revenons maintenant aux conservateurs. M. Van Loan, vous avez cinq minutes.
M. Peter Van Loan: Je m'adresse à M. Lewis.
Vous avez fait, sauf erreur, trois suggestions utiles d'amendement. J'aimerais que vous me les expliquiez. Je me suis tellement occupé d'assurance-emploi, que je dois me réhabituer à tous les autres sujets à chaque fois.
Vous dites d'abord : « Nous proposons une modification du paragraphe 5(1) du projet de loi C-5 afin que les cotisations versées par le souscripteur ou au nom de celui-ci puissent donner droit à des subventions.» Veuillez nous expliquer pourquoi c'est important.
M. Peter Lewis: Deux choses. D'abord, c'est que cela laisse place à la confusion. La Loi de l'impôt sur le revenu permet des cotisations versées dans le REEE par le souscripteur ou au nom de celui-ci. Mais le projet de loi ne fait référence qu'aux cotisations versées « par » le souscripteur. Mais qu'est-ce qu'une cotisation faite au nom d'un souscripteur? Cela porte à confusion.
Il y a une chose qui est importante : regardez le cas des enfants dont quelqu'un d'autre a la charge. Il est prévu que l'organisme ou l'établissement qui en a la charge peut ouvrir un REEE à titre de souscripteur. Or, il est peu probable que l'organisme souscripteur continue à verser des cotisations et que l'enfant dont il a la charge puisse profiter au maximum du bon d'études. Toutefois, s'il arrivait qu'un établissement privé veuille cotiser à un REEE, il est important que cela lui soit permis et que les cotisations faites en son nom dans le régime puisse donner droit aux subventions.
M. Peter Van Loan: Essentiellement, c'est pour permettre à d'autres cotisants de donner accès à la subvention, n'est-ce pas?
M. Peter Lewis: Pour cet enfant, on donne accès à un REEE, c'est cela.
M. Peter Van Loan: Est-ce que les grands-parents et d'autres membres de la famille pourraient se prévaloir de cela? Sont-ils inclus de ce que vous tâchez d'obtenir?
M. Peter Lewis: Oui, en effet. Il est intéressant de rappeler qu'un grand-parent peut faire des versements dans un REEE actuellement. Très souvent, le régime est instauré par un parent ou un grand-parent. Tous ces versements donneront droit à des subventions, mais actuellement, il peut exister plusieurs comptes pour le même enfant.
Si l'on faisait cette modification, toutes les cotisations seraient versées au même régime pour un bénéficiaire, ce qui simplifierait l'administration ultérieurement.
M. Peter Van Loan: Je me reporte au deuxième amendement qui vise la disposition 146.1(2)(g.1)(i)(A) de la Loi de l'impôt sur le revenu pour permettre le versement de paiements d’aide aux études pour les études à temps partiel. Ces paiements sont-ils prélevés du REEE?
M. Peter Lewis: Oui. Il s'agit de sommes versées à un étudiant sur un REEE. Il s'agit des sommes investies dans le régime auxquelles s'ajoutent les subventions et, en l'occurrence, le bon d'études.
M. Peter Van Loan: Et vous souhaiteriez que cela soit à la disposition des étudiants à temps partiel. Ce n'est pas le cas actuellement, n'est-ce pas?
M. Peter Lewis: La loi actuelle limite ces paiements aux études à temps plein. Nous pensons que ces indemnités devraient être proportionnelles au coût réel, et si un étudiant étudie à temps partiel, il devrait avoir accès également à ces avantages—encore une fois, proportionnellement au coût réel.
M. Peter Van Loan: Très bien.
L'hon. Peter Adams: J'invoque le règlement, monsieur le président. Ces sommes sont disponibles dans des conditions très souples. Je pense qu'il faut bien comprendre cela. Comme nous l'avons dit, ces sommes peuvent servir à l'achat de manuels ou à autre chose. Elles sont certainement disponibles pour un seul cours, par exemple, et assurément pour un étudiant inscrit à temps partiel dans un établissement.
M. Peter Van Loan: Pourquoi M. Lewis demande-t-il alors que l'on modifie la loi à cet égard? C'est ce que j'essaie de comprendre.
L'hon. Peter Adams: Je le répète, je demande...
Que je sache, monsieur Lewis, ce que je viens de dire est juste. Nous allons certainement nous pencher là-dessus. L'intention—et nous convenons qu'il s'agit de somme importante s'il n'y a pas eu de cotisation—, c'est de fournir de l'argent pour les cours et les dépenses afférentes.
M. Peter Van Loan: D'accord.
Le dernier point est celui qui concerne la limite à 5 000 dollars pour l'indemnité d'études si l'étudiant a suivi un programme de moinsde 13 semaines consécutives au cours des 12 mois précédents. Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s'agit?
 (1230)
M. Peter Lewis: Selon la loi actuelle, l'étudiant qui suit les cours du premier semestre d'un programme postsecondaire ne peut tirer que 5 000 dollars et il est obligé pour cela de suivre plus de 13 semaines consécutives de cours. Je crois savoir qu'on impose ces conditions pour éviter les abus. C'est tout à fait louable. Cependant, nous pensons qu'on devrait supprimer ces conditions pour permettre aux familles d'avoir accès à ces fonds en fonction de leurs besoins. On pourrait certainement faire les contrôles nécessaires par la suite pour repérer les abus mais, selon nous, l'imposition de ce maximum pénalise la majorité des étudiants bien intentionnés et travailleurs, tout simplement pour éviter que quelques personnes abusent du système.
M. Peter Van Loan: Expliquez-moi. Pourquoi aurait-on besoin de plus de 5 000 dollars pour les premiers trois mois? Pourquoi devrait-on pouvoir avoir accès à davantage?
M. Peter Lewis: Un étudiant universitaire par exemple a des frais de scolarité à payer. Si vous voulez ne faire qu'un seul versement pour les frais de scolarité et si vous ajoutez le logement et les manuels, vous avez largement dépassé les 5 000 dollars. On peut faire valoir qu'on a tout simplement à payer par versement et que la plupart des universités le permettent. Nous estimons que c'est un système qui crée des complexités inutilement tout simplement pour se prémunir contre quelques cas éventuels d'abus.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Merci beaucoup.
Nous passons au côté libéral. La parole est à M. D'Amours.
[Français]
M. Jean-Claude D'Amours: Merci beaucoup, monsieur le président.
J'ai 31 ans et j'ai terminé mes études universitaires il n'y a pas très longtemps. J'ai fait sept années d'université et obtenu différents baccalauréats. Je peux vous dire que si j'ai pu faire des études, c'est grâce aux prêts étudiants. J'ai étudié au Nouveau-Brunswick, parce que je viens du Nouveau-Brunswick. Si un programme comme celui qui est présenté aujourd'hui avait existé à ce moment-là et qu'il avait suffi que mes parents ouvrent un compte pour qu'un certain montant d'argent s'y accumule tout seul, sans que mes parents y contribuent quoi que ce soit, lorsque j'ai commencé l'université, j'aurais eu au moins cette somme. Pour ma part, je me tourne vers l'avenir. On peut se tourner vers le passé, mais il y a une question d'avenir dans tout cela. Depuis que nous recevons des témoins, je suis étonné... J'aurais aimé cela si quelqu'un, dans le passé, avait eu une vision d'avenir semblable. Ainsi, lorsque je suis arrivé à l'université, j'aurais eu au moins cela.
Au Nouveau-Brunswick, on parle aujourd'hui de prêts. Les témoins parlent de toute la question de l'impôt. Si je me souviens bien, en tant qu'étudiant, je ne voyais là aucune différence. J'avais la possibilité de réclamer des crédits d'impôt sur ma déclaration de revenus parce que j'étais allé à l'université. Je recevais chaque année un papier me permettant de réclamer des crédits dans ma déclaration de revenus, ce qui diminuait certains revenus que je gagnais en travaillant pour financer mes études. En fait, je désirais non seulement financer mes études, mais aussi travailler. Ces crédits me donnaient la possibilité de réduire mon revenu imposable. Quand on parle de l'étudiant qui fait un stage rémunéré, je trouve cela fort un peu. Vous savez qu'il y a des modalités qui permettent d'obtenir certains crédits pour réduire le revenu imposable. Par conséquent, ce que vous dites me surprend, monsieur Lareau.
Aujourd'hui, dans certaines provinces, il y a un tollé parce qu'on veut transformer les bourses en prêts étudiants. Nous avons d'ailleurs vécu cela au Nouveau-Brunswick. Étant proactif, le gouvernement fédéral se dit qu'il va aider dans une perspective d'avenir, non pas en donnant des prêts, mais en fournissant ce qu'on peut appeler une bourse.
Je dois vous dire que ce n'est pas parce que les gens gagnent aujourd'hui tel revenu qu'ils vont gagner la même chose dans 10 ans. Ils vont essayer de trouver des occasions d'augmenter leur revenu. Ce n'est pas parce qu'une personne est riche qu'elle va nécessairement se prévaloir d'un régime d'épargnes-études. Elle peut choisir d'investir son argent dans un REER.
Je suis aussi étonné de ce que vous dites concernant les courtiers. Je vous dis beaucoup de choses, et vous aurez peut-être la chance d'y réagir d'ici la fin. Presque tout le monde va dans une banque, que ce soit pour toucher son chèque de paye ou autre chose. On peut ouvrir un compte d'épargne-études sans être sollicité par qui que ce soit. Je vous laisse répondre étant donné qu'il me reste moins d'une minute.
 (1235)
M. André Lareau: Mais encore faut-il connaître le système qui existe. Vous parlez du Nouveau-Brunswick. Je le connais un peu parce que j'ai enseigné trois ans à l'Université de Moncton, mais il n'y a aucun rapport. Imaginez qu'il s'agisse de votre enfant. La fiscalité est un système de subventions. Si votre enfant reçoit un chèque de 100 $ du fédéral parce que vous êtes pauvre, alors que le voisin d'à côté reçoit un chèque de 400 $ par année parce qu'il est riche, allez-vous trouver que c'est équitable? On ne peut pas être contre l'aide financière octroyée aux jeunes. Nous avons l'air de gens qui sont contre les mesures sociales, mais ce n'est pas cela du tout. C'est à l'iniquité qui se dégage du programme global de l'épargne-études que nous nous opposons. Votre enfant reçoit 100 $ alors que celui du voisin d'à côté reçoit 400 $, et vous dites que c'est juste et c'est équitable?
M. Jean-Claude D'Amours: Monsieur Lareau, on a entendu des commentaires selon lesquels des gens, malgré leurs difficultés financières, réussissaient chaque mois à mettre de côté un petit montant destiné à leur permettre éventuellement d'avoir accès à des sommes additionnelles. Peu importe où on est, on a toujours des choix à faire.
À mon avis, il est un peu injuste de trancher de façon draconienne entre les classes de la société en fonction des salaires. Ces gens ont quand même le droit de recevoir de l'aide. Le but du programme est d'améliorer l'éducation et l'avenir des jeunes.
M. André Lareau: Vous demanderez à une famille qui compte deux parents ayant deux enfants et dont le revenu familial annuel est de 28 000 $ combien d'argent elle met de côté par année.
Mme Sylvie Lévesque: J'aimerais faire une intervention de deux minutes à ce sujet. Je serai brève.
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Forseth): Excusez-moi. Je dois passer au Bloc. Il a droit à cinq minutes. Vous pourrez peut-être inclure vos remarques dans la réponse suivante.
Merci.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: J'aimerais entendre cette réponse.
Mme Sylvie Lévesque: André Lareau parlait d'une famille où on trouve deux parents qui ont deux enfants. À l'instar de madame, nous avons précisé que le revenu d'une famille monoparentale qui compte deux enfants n'était même pas de 28 000 $. C'est beaucoup moins. On parle ici de 10 000 $, 12 000 $ ou 14 000 $ par année. M. D'Amours a dit qu'il y avait des choix à faire. Or, comme on l'a dit plus tôt, le choix consiste d'abord à nourrir ses enfants. Il faut ensuite réussir à les vêtir pour qu'ils puissent sortir et aller à l'école.
Quand on en est à essayer de combler ses besoins essentiels, comment est-ce qu'on réussit à penser à l'avenir de ses enfants? À mon avis, ces parents y pensent, mais ils ont très peur de ce qui va se passer car leurs revenus ne leur permettent même pas de subvenir à leurs besoins essentiels.
Notre témoignage allait un peu dans ce sens. Même si certains disent qu'il n'y a pas d'iniquité, nous disons pour notre part qu'il y en a. Je pense que l'écart entre les mieux nantis et les moins nantis augmente de plus en plus.
Mme Christiane Gagnon: C'est un projet de loi dont les objectifs, peut-être louables à la base, n'atteindront pas leur cible. On en convient. Cependant, il y a les REEE pour les familles qui gagnent un salaire de plus de 35 000 $. Il y a aussi une autre catégorie de personnes qui est ciblée par ce projet de loi.
Si jamais nous nous opposons à ce projet de loi, une partie de la population, qui aurait aimé que ce programme soit bonifié, sera mécontente. Quant aux autres, il faut chercher une solution, dans le cadre du développement social, qui tienne compte des compétences des provinces.
Vous avez tout à fait raison. Il y a le déséquilibre fiscal et le Transfert social canadien. On est de ce combat. On sait combien il en coûte au Québec de ne pas répondre aux attentes de la population. Il est très difficile d'analyser ce projet de loi. La plupart des gens nous ont dit que c'était un mauvais projet, qu'il ne ciblait pas les personnes appropriées et que c'était trop peu, pour tout dire, des peccadilles. Même ceux qui étaient favorables au projet de loi nous ont dit cela.
C'est un projet de loi au sujet duquel il est assez difficile de trancher. Nous sommes aussi confrontés à ce problème. Nous sommes d'accord sur l'ensemble des arguments que vous avez présentés ce matin. Cependant, nous nous demandons si on peut le bonifier. Peut-on y inclure une certaine forme de justice en ce qui concerne le REEE et les 100 $ ou 400 $ qu'on y investit? Je sais que c'est inéquitable, mais avez-vous des solutions à nous proposer?
Le gouvernement veut que nous proposions des solutions qui répondront de façon positive aux attentes concernant ce projet de loi.
 (1240)
M. André Lareau: Le document intitulé Dépenses fiscales et évaluations 2004 précise que le programme devrait coûter environ 140 millions de dollars l'an prochain. Si ce programme continuait, pourquoi ne répartirait-on pas ces sommes entre tous les enfants de ce pays, en accordant une certaine priorité à ceux qui en ont le plus besoin?
On pourrait se servir de l'exemple du crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants du Québec. C'est un crédit d'impôt remboursable et inversé, c'est-à-dire qu'il octroie 75 p. 100 des frais de garde aux familles qui gagnent moins de 27 000 $ par année. Ce pourcentage va en décroissant et ce, jusqu'à concurrence de 26 p. 100 pour les familles dont les revenus sont plus élevés.
De cette façon, si on voulait aider tous les enfants--et il est normal de vouloir le faire--, on pourrait répartir les 140 millions de dollars entre tous les enfants de ce pays, en accordant la priorité aux familles plus défavorisées.
Est-ce qu'on veut que ces fonds demeurent dans un régime d'épargne-études géré par des fondations ou des fiducies? Peut-être, mais il faut mieux répartir la somme.
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Forseth): Merci.
Maintenant nous allons passer aux libéraux. Monsieur Silva, vous avez cinq minutes.
M. Mario Silva (Davenport, Lib.): L'un de nos arguments faisait intervenir toute la notion d'actif et d'économie sociale. Je pense qu'il faut répéter cet argument. Sans avoir beaucoup trimé, vous obtenez cet argent, mais vous savez que vous pouvez y compter, pour des études supérieures ou un apprentissage continu.
Pour ma part, je me suis occupé d'enseignement pendant bien des années et je suis très conscient du problème des frais de scolarité, problème très compliqué. Ce problème n'est pas vécu de la même façon dans d'autres pays—voire dans diverses régions de notre pays et dans les établissements.
Les choses sont telles que, dans certaines universités comme l'Université de Toronto, qui est ma ville, la difficulté ne vient pas de l'accès à l'éducation. La difficulté provient du manque de places à l'université, car il y a un trop grand nombre de candidats. En fait, la plupart sont refusés à cause de la taille de l'effectif étudiant. Dans bien des universités, le nombre d'inscriptions a grimpé énormément. Au Canada, il existe des frais de scolarité, ce qui n'empêche les étudiants de s'inscrire, alors que les études sont gratuites dans certains pays.
J'ai étudié en France.
[Français]
Je peux dire honnêtement que lorsque je poursuivais mes études en France, la plupart des étudiants là-bas ne provenaient pas de familles pauvres. C'est peut-être un argument fautif que d'attribuer tout cela aux frais de scolarité. C'est plus compliqué que cela. C'est la raison pour laquelle je pense que c'est un projet de loi très important pour rendre la situation plus favorable.
 (1245)
[Traduction]
Je voudrais revenir à l'argument de départ, c'est-à-dire la constitution d'un actif—et j'essaie de me souvenir du terme exact—car le gouvernement veut que l'on sache qu'il prend les moyens de conscientiser la population à l'importance de l'apprentissage continu.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Qui veut répondre? Nous allons lever la séance vers 13 heures moins une. La communication avec Vancouver va être interrompue à ce moment-là. Il faut donc répondre rapidement.
Allez-y.
M. André Lareau: Pour répondre, je demanderais s'il s'agit-il d'un programme juste. C'est la question que je pose. Mettez-vous un instant à la place de quelqu'un qui gagne 26 000 dollars par année.
M. Mario Silva: Mais la solution de rechange serait de ne pas instaurer de programme.
M. André Lareau: Si votre revenu familial est de 26 000 dollars alors que celui de votre voisin est de 125 000 dollars, votre voisin recevra 400 dollars par année du gouvernement fédéral alors que vous n'en recevrez que 100. Est-ce juste? Il faut que la fiscalité soit juste.
Si vous investissez 2 000 dollars dans un régime d'épargne-études pour votre enfant et que le gouvernement vous verse 20 p. 100 de 2 000, cela représente 400 dollars. Toutefois, si vous n'avez pas l'argent pour investir, vous toucherez 100 dollars pour chaque enfant. Est-ce juste? La fiscalité doit être juste. En l'occurrence, elle ne l'est pas.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Jamie Crane, voulez-vous vous attaquer à cette question?
Mme Jamie Crane: Oui. Je voudrais ajouter quelques remarques. C'est très bien de dire que vous vous intéressez aux étudiants qui sont dans le système mais—reprenez-moi si je me trompe—je pense qu'il s'agit ici d'essayer d'aider ceux qui autrement ne pourraient pas accéder aux études.
C'est une question d'accès, et je tiens à le dire. Ce n'est pas une question d'effectif étudiant tout simplement. Il s'agit de permettre à ceux qui, autrement, n'auraient pas la possibilité de faire des études.
Le vice-président (M. Paul Forseth): La parole est à Mme McDonough pour cinq minutes.
Mme Alexa McDonough: Je sais que certaines organisations d'étudiants ont fait des recherches sur l'effectif. Ces recherches ont montré que l'effectif a continué d'augmenter, mais que l'accessibilité des familles à faible ou à modeste revenu a diminué avec pour résultat une représentation nettement moindre des familles à faible revenu.
Si, parmi nos témoins, certains ont des renseignements supplémentaires sur cet aspect, le comité leur serait reconnaissant de les lui fournir.
Je tiens à dire que nous entendons actuellement les derniers témoins au cours de notre étude du projet de loi C-5. Je constate que divers porte-parole expriment leurs frustrations, face à l'idée que nous devrions tout simplement adopter ce projet de loi, parce que c'est mieux que rien et que la seule autre solution serait de ne rien faire.
L'un de nos témoins accepterait-il de développer ce qui pourrait être une solution de rechange, une autre façon d'investir les deniers publics. Quel est le modèle pour créer...?
Je sais que Jamie Crane s'est reportée en particulier au modèle de l'assurance-maladie; elle a dit qu'il faudrait une approche pancanadienne, établir des principes très clairs qui s'appliqueraient à l'éducation. Pouvez-vous nous dire quels éléments il faudrait réunir pour atteindre l'objectif souhaité et annoncé quand on a présenté cette mesure législative. Nous avons entendu dire que nous n'avions pas là l'instrument le plus juste, ni le plus efficace pour accomplir le nécessaire. Quelle serait une autre façon d'investir ces sommes tout en respectant les critères de justice, d'efficacité et d'équité?
Mme Jamie Crane: Ce que j'ai expliqué tout à l'heure est mon point de vue personnel sur la façon de mettre en place un meilleur régime. Il faudrait, au moment du budget, adopter une loi budgétaire qui supprimerait les REEE pour les remplacer par des subventions accordées selon les besoins. Je pense que c'est la meilleure façon de procéder et le meilleur usage possible des deniers fédéraux injectés dans un programme social.
Je sais qu'on ne cesse de répéter qu'on ne peut pas contrôler les initiatives des provinces, mais le gouvernement fédéral peut choisir l'affectation des sommes destinées à l'éducation. Il faudrait adopter une loi budgétaire où figureraient des subventions accordées selon les besoins.
Je le répète, quand on envoie de l'argent dans les provinces, il est extrêmement important que tout transfert social soit affecté à tel ou tel programme social, de sorte que, si l'argent est destiné à la Nouvelle-Écosse par exemple, on indique que c'est précisément aux fins de l'éducation postsecondaire.
 (1250)
Le vice-président (M. Paul Forseth): Madame McDonough, il vous reste deux minutes.
Mme Alexa McDonough: Je cède mon temps à nos témoins, s'ils veulent répondre à la question. Autrement dit, il ne suffit pas de dire : « Gardons ceci, car c'est mieux que rien.» Chacun de nous doit se demander quelle serait une meilleure façon d'investir ces deniers publics pour atteindre l'objectif déclaré, à savoir favoriser l'accès à l'éducation postsecondaire pour les étudiants des familles à faible revenu.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Monsieur Lewis, voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Peter Lewis: Vous aurez compris que nous appuyons le projet de loi qui, à notre avis, va droit au but. À notre avis, c'est la voie à suivre. J'ignore si je suis en mesure de proposer une solution de rechange, si ce n'est que je répéterais ce que vous m'avez déjà entendu dire, à savoir que le projet de loi n'est pas la panacée et qu'il doit s'inscrire dans tout un train de mesures visant à corriger une situation complexe. Mais nous souscrivons toujours à un programme qui vise à injecter plus de fonds dans les transferts sociaux afin d'encourager les études postsecondaires.
Voilà les objectifs que nous appuyons. Mais je répète que ce projet de loi constitue un élément important d'un ensemble de mesures. Permettre la constitution d'un actif, c'est important sur le plan de la politique sociale. C'est une mesure que nous encourageons fortement.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Jamie Crane.
Mme Jamie Crane: Nous parlons ici d'un projet de lui qui est fondamentalement mal conçu, car il n'aidera en rien les gens qu'il prétend vouloir aider. Deviser tranquillement autour de la table des bons d'études, cela ne résoudra en rien le problème. Nous savons que le Canada compte des familles très pauvres. Je le répète : il faut accorder la priorité aux études postsecondaires et à toutes les formes d'études supérieures, pour que les familles canadiennes puissent avoir accès à celles-ci sans avoir à choisir du montant qu'elles auront à verser.
Ce projet de loi laisse l'entière responsabilité aux familles et leur demande de décider si elles peuvent ou non épargner à cette fin, alors que cet objectif devrait être inscrit dans une vision collective que partageraient les fédéral et les provinces.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Monsieur Adams, allez-y.
L'hon. Peter Adams: Monsieur le président, j'aurais quelques commentaires à faire, après quoi les témoins pourraient y réagir ou dire autre chose en guise de conclusion.
Vous n'avez pas besoin de répondre si vous ne le souhaitez pas, mais j'aimerais vous demander si vous savez ce que font vos provinces respectives à l'égard de la bourse de 3 000 $ qui sera versée aux étudiants impécunieux pour leur première année d'études partout au Canada. Il s'agit, je le répète, d'un programme qui sera instauré, et nous ne savons pas—même si nous le devrions dans une certaine mesure—ce qu'en feront les provinces.
André a suggéré que les provinces voudront peut-être l'utiliser à des fins utiles, mais nous ne savons pas, lorsque nous verserons les fonds, si elles les récupéreront à d'autres fins. Or, le projet de loi permettrait au gouvernement fédéral de savoir exactement à quoi servira l'agent.
Quelqu'un a dit qu'il ne fallait pas qu'il y ait de lien avec une banque, une caisse populaire ou une coopérative de crédit. Je pense pour ma part qu'il est avantageux pour une famille d'ouvrir un compte, même si elle a peu de moyens d'épargner. Ainsi, l'ouverture d'un compte à la naissance d'un enfant peut être un geste très symbolique pour la famille; en effet, même si la famille ne verse pas d'argent dans le compte chaque mois lorsqu'elle n'est pas en mesure de le faire, la Caisse populaire lui enverra un avis jusqu'aux 15 ans de l'enfant, et celui-ci saura que quelqu'un a ouvert un compte en son nom. C'est cela qui est important.
Soit dit en passant, si une famille peut se permettre de verser un peu d'argent pendant les 15 années de vie de son enfant, il faut savoir que, chaque fois qu'elle y verse 10 $, le fonds s'accroît de 4 $ de plus. Par conséquent, pendant les 15 années de vie du compte, chaque 10 $ versé vaut 14 $. Il ne faudrait pas l'oublier.
Monsieur le président, si les témoins ont quelque chose à dire en guise de conclusion, je les écouterai avec plaisir.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Madame Lévesque, vous étiez l'une de ceux qui voulait réagir.
[Français]
Mme Sylvie Lévesque: Je pense que c'est M. Silva qui disait plus tôt qu'en France et dans plusieurs autres pays, ce sont des enfants de familles mieux nanties qui poursuivent des études postsecondaires ou universitaires. C'est ce que nous disons aujourd'hui. À notre point de vue, ces familles n'ont peut-être pas besoin de plus que ce qu'elles ont déjà. Elles ont déjà les moyens de payer des études à long terme à leurs enfants.
Le fédéral devrait mieux répartir la richesse et permettre à des familles moins bien nanties d'envoyer leurs enfants aux études, au lieu de donner de l'argent à l'ensemble des gens. Il faudrait qu'il donne de l'argent aux provinces pour que le Québec, notamment, ait les fonds nécessaires pour améliorer le système qu'il a déjà.
 (1255)
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Forseth): Nous pourrions peut-être écouter nos témoins de la vidéo-conférence, car je crois que nous allons perdre notre liaison télévisuelle dans cinq minutes environ. L'un ou l'autre d'entre vous a-t-il quelque chose à dire pour terminer?
Monsieur Lewis, allez-y.
M. Peter Lewis: Nous voudrions répéter que nous appuyons le projet de loi qui va droit au but et qui s'inscrit dans un ensemble de mesures visant à corriger une situation complexe. Le projet de loi donnera les résultats escomptés, à notre avis, car il sensibilisera les Canadiens à l'importance d'épargner en vue des études supérieures; Il accroîtra l'épargne chez les familles à faible revenu, et il représente, à notre avis, une façon visionnaire de corriger le problème à long terme.
Merci beaucoup.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Merci.
Jamie Crane
Mme Jamie Crane: J'exhorte tous ceux qui voteront pour le projet de loi à se rappeler qu'il est fondamentalement mal conçu, car il ne corrigera pas le problème; il ne s'agit pas uniquement de sensibiliser les familles.
C'est plutôt une question d'accès aux études supérieures pour une grande partie de notre population, et le gouvernement doit refaire ses devoirs. Il devrait substituer les bourses aux prêts.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Monsieur Lareau.
[Français]
M. André Lareau: Pour moi, il est important que le fédéral reconnaisse la compétence des provinces, notamment dans les domaines de la santé et de l'éducation. Bien qu'il s'agisse d'un pouvoir de dépenser qui appartient au fédéral, pourquoi ne pas reconnaître qu'il y a des instances qui existent déjà et qui ont la compétence nécessaire pour tenter de contrer le décrochage scolaire? On peut bien penser aux études postsecondaires, mais on devrait commencer par penser à
[Traduction]
Il faut d'abord finir ses études primaires et secondaires.
[Français]
Après cela, on pourra aider les étudiants au postsecondaire. En versant l'argent aux provinces, on va s'assurer d'aider les enfants à terminer leurs études secondaires, et ensuite d'autres sommes pourront être investies au postsecondaire.
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Forseth): Merci beaucoup. Cette discussion a été très utile, et nous remercions les témoins de leur contribution.
Je rappelle aux partis que, s'ils veulent proposer des amendements précis au projet de loi, ils devront penser à les faire rédiger immédiatement. Si vous avez des amendements de forme à proposer, veuillez en aviser notre greffier et vous en occuper directement.
Merci.
La séance est levée.