:
Monsieur Casson, mesdames et messieurs, je vous remercie.
Pour commencer, je tiens à vous dire que je suis heureux de comparaître devant le comité aujourd'hui.
En tant que CEMD, l'une de mes responsabilités les plus importantes est de veiller à ce que les Forces canadiennes prennent soin de nos hommes et de nos femmes dans leur intégralité. Pour cela, nous devons nous assurer d'avoir le bon leadership à tous les niveaux, d'avoir le bon équipement quand nous demandons à ces hommes et à ces femmes d'effectuer une tâche pour nous, de leur offrir une formation adéquate, de leur garantir des avantages justes afin de compenser pour le travail qu'ils effectuent pour nous, de faire en sorte qu'ils sont préparés physiquement pour faire leur travail et de leur offrir tous les soins nécessaires, la préparation, l'encadrement et l'appui médical et dentaire, ce qui inclut nécessairement la santé mentale. C'est une responsabilité que je prends au sérieux et que les dirigeants des Forces canadiennes prennent au sérieux aussi, je le sais. Ils n'ont même pas besoin de moi pour veiller à ce qu'ils s'en soucient, parce qu'ils s'en soucient.
Je suis content que le comité s'intéresse à cette question. Nous vous félicitons de votre leadership dans ce domaine, parce que je pense que les Forces canadiennes ont vécu des temps difficiles. Nous avons presque brisé les Forces canadiennes au pays, et au sein des forces, nous avons presque brisé le système médical. Par conséquent, l'essentiel de ce que nous avons fait pendant longtemps a été de nous rétablir, tout simplement, de sortir de ce déficit et de nous doter d'une base solide pour pouvoir faire notre travail de la façon dont nous voulons le faire.
[Français]
J'aimerais vous remercier pour votre soutien continu aux hommes et aux femmes des Forces canadiennes.
[Traduction]
Pour vous aider à bien comprendre où nous en sommes —- et je sais que vous êtes déjà très au courant de notre situation sur le plan des soins de santé en général et des soins de santé mentale plus particulièrement —, j'estime essentiel que vous compreniez d'où nous arrivons.
À la fin de la guerre froide, les dividendes escomptés de la paix nous ont poussés à réduire nos effectifs, y compris dans les services de santé offerts aux FC et les autres services de santé, au moment même où nos engagements opérationnels dans le monde dans des théâtres de déploiement intense ont connu leur paroxysme en Croatie, en Bosnie, en Macédoine, en Somalie, au Rwanda, à Chypre et ailleurs. Le nombre de personnes qui réclament le traitement de blessures attribuables à ces opérations ne cesse d'ailleurs d'augmenter encore aujourd'hui, parce que pour la première fois, elles ont assez confiance pour s'exprimer.
[Français]
Le résultat a été une réduction importante de la capacité militaire en soins de santé, ne retenant que les services jugés nécessaires pour les opérations futures. Une décision a été prise de réduire la capacité d'offrir des soins en garnison au Canada, au profit du système de santé publique, décision qui, en dernière analyse, n'a pas servi les besoins d'une force militaire moderne.
[Traduction]
Nous avons fermé des établissements d'hospitalisation à Ottawa, à Valcartier, à Halifax, à Esquimalt et en Allemagne, qui comportaient tous des départements de psychiatrie. Nous avons aussi fermé des services d'hospitalisation en réadaptation et en désintoxication à Valcartier, à Kingston, à Winnipeg, à Esquimalt et bien sûr, en Allemagne, comme nous avons quitté notre base là-bas.
[Français]
Simultanément, les secteurs de santé civils subissaient des pressions financières importantes, et ces derniers ne pouvaient pas pourvoir aux besoins des patients des Forces canadiennes ayant des exigences professionnelles uniques.
[Traduction]
Nous savions vers la fin des années 1990 — et un rapport du chef des services d'examen l'a confirmé —, que notre système de soins de santé militaire était mal en point. Nous l'avions presque détruit. Par conséquent, nous avons lancé le projet de santé baptisé Rx2000.
Rx2000 était notre initiative de réforme des soins de santé (je sais que vous en avez entendu parler), qui touchait tous les aspects de la prestation de soins de santé au Canada et dans les théâtres d'opération à l'étranger. Nous nous sommes attaqués à une multitude de problèmes avec Rx2000: les soins de base; les services de santé mentale; la protection et la promotion de la santé; le recrutement, la rétention et la formation de personnel de santé, ce qui constituait tout un défi; ainsi que d'autres enjeux comme les dossiers médicaux électroniques.
Rx2000 comprenait un examen détaillé et fondé sur la médecine factuelle des pratiques exemplaires en santé mentale. Il en est ressorti un modèle de prestation de soins multidisciplinaire en santé mentale, qui a depuis été validé par un évaluateur tiers et le BVG.
Il est toujours difficile de rétablir des ressources perdues, et c'est un exercice qui prend du temps. Nous savons que quand nous perdons des ressources uniques, il nous faut des années et parfois même des décennies pour les regagner. Je pense qu'il y a des leçons à en tirer pour l'avenir.
Rx2000 a été un premier pas pour corriger bon nombre des lacunes que nous voyions à la fin des années 1990, mais nous n'avons pas adapté nos services à toutes les réalités actuelles. C'était véritablement un mode de survie.
Qu'est-ce qui a été fait depuis?
[Français]
Les Forces canadiennes ont continué à soutenir une approche proactive afin de répondre aux besoins de santé découlant de conflits contemporains. On a apporté des améliorations au système de soins de santé des Forces canadiennes. Nous engageons plus de personnel en soins de santé aux quatre coins du pays afin de pouvoir améliorer les soins offerts dans nos cliniques. Nous élargissons notre programme de gestionnaire de cas afin de mieux répondre aux problématiques de santé complexes dont souffrent certains de nos hommes et de nos femmes. Nous augmentons aussi nos services en santé mentale.
[Traduction]
D'ici la fin de l'exercice en cours, nous aurons embauché 218 professionnels de plus en santé mentale: des psychiatres, des psychologues, des travailleurs sociaux, des infirmières spécialisées, des conseillers spirituels et des conseillers en toxicomanie, pour ne vous donner que quelques exemples. Notre équipe des FC comptera presque 450 professionnels en santé mentale.
[Français]
L'équipe de santé mentale des Forces canadiennes utilise un modèle interdisciplinaire qui comprend une évaluation complète et holistique de la santé mentale et un traitement sur mesure répondant aux besoins de chaque individu.
[Traduction]
Quand les FC ne peuvent offrir de traitement en temps opportun, le personnel est confié à des fournisseurs externes de soins de santé civils.
[Français]
Il est important de reconnaître que l'approche des Forces canadiennes est unique pour ce qui est de l'utilisation de professionnels civils en santé mentale.
[Traduction]
Les FC financent des soins appropriés et nécessaires sans imposer de frais à leurs membres.
[Français]
Le traitement peut être aussi long que nécessaire, pour autant que la thérapie est basée sur des preuves et respecte le guide des meilleures pratiques.
[Traduction]
Cette façon de faire est à la fine pointe des soins de santé mentale au Canada. Nous sommes conscients que l'environnement social peut favoriser des soins et un rétablissement en santé mentale quand on élimine la stigmatisation trop souvent associée aux problèmes de santé mentale.
Nous sommes tous passés par là. Nous saisissons l'ampleur du défi. Il en est ressorti un programme d'aide sociale aux membres et à leurs familles: le programme de soutien social aux victimes de stress opérationnel, qui a été lancé en 2001. Avec un certain succès, ce programme a donné lieu à un partenariat solide, fort, entre nous et Anciens Combattants Canada, auquel participent 40 employés et quelque 120 bénévoles au pays. Nous sommes venus en aide à plus de 3 500 patients, dont plus de 100 familles. Ce programme offre de l'aide individuelle, des groupes de soutien par les pairs au personnel militaire en service, aux anciens combattants et aux familles, ainsi que du soutien social aux familles confrontées à la mort d'un proche.
Ce programme novateur a connu un nouvel élan avec la nouvelle campagne d'éducation destinée à nos membres, hommes et femmes. Cette campagne a été mise sur pied par un groupe composé notamment d'anciens combattants qui se sont remis de problèmes de santé mentale, de cliniciens, de membres de la marine américaine et d'universitaires canadiens. Elle nous aidera à sensibiliser davantage les gens à la santé mentale, à les informer des répercussions du stress opérationnel sur la vie des gens, de leurs pairs, de leurs subordonnés et de ceux qui les entourent et à enseigner au personnel des FC comment aider les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale.
Notre objectif est de donner aux hommes et aux femmes qui servent le pays en uniforme les outils dont ils ont besoin pour reconnaître les signes précurseurs des troubles de santé mentale et prendre des mesures positives. Cette campagne d'éducation s'adresse maintenant aussi aux familles de militaires, afin de les aider à appuyer leurs proches et à mieux composer avec les effets des problèmes de santé mentale dont souffrent les militaires. Les membres de la famille des victimes de problèmes de santé mentale participeront à cette initiative, et ils sont actuellement en ville, cette semaine, pour élaborer le nouveau programme.
Nous veillerons à ce que ces initiatives soient bien harmonisées. Tout d'abord, il y aura un comité consultatif indépendant sur les services de santé mentale, une initiative conjointe entre nous et Anciens Combattants Canada. Encore une fois, c'est une initiative chapeautée par un défenseur d'expérience des victimes de traumatisme lié au stress opérationnel, le colonel à la retraite Don Ethell, un défenseur très dynamique. Je pense que vous avez déjà eu l'occasion de vous entretenir avec lui. Nous allons profiter de l'expérience de vastes groupes de spécialistes de la santé mentale grâce à ce comité.
Nous avons rétabli le comité directeur des Forces canadiennes sur le traumatisme lié au stress opérationnel, qui constitue une tribune pour nos hauts dirigeants, comme moi, pour que nous puissions discuter des meilleures façons d'appuyer les victimes de traumatisme lié au stress opérationnel. Je n'ai jamais cru au pouvoir des comités, et j'ai fait partie du comité directeur sur le traumatisme lié au stress opérationnel. Je pense que nous pourrions en tirer davantage parti si nous attirions plus l'attention de nos leaders.
L'établissement de notre conseiller spécial du chef du personnel militaire, le lieutenant-colonel Grenier, qui a lui-même souffert d'un traumatisme lié au stress opérationnel, a été une étape clé pour le succès des initiatives déjà lancées et avec son équipe, il tablera sur les succès accomplis à ce jour.
Je vais vous dire une chose. Je suis allé à Bridgewater, en Nouvelle-Écosse, il y a à peine un mois, si je ne me trompe pas, pour un rallye en rouge. J'ai eu l'occasion de parler avec M. Jim Davis, qui a perdu son fils en Afghanistan il y a un an et demi, si ma mémoire est bonne. M. Davis, qui connaît beaucoup d'autres familles qui ont perdu des fils ou des filles en Afghanistan, n'était que louages pour cet officier, le leadership et l'appui qu'il a fournis aux familles pendant leurs heures et leurs jours les plus sombres.
Malgré tous ces avancements de taille dans les soins de santé cliniques et non cliniques, nous avons encore beaucoup de défis à relever. Nous le savons tous.
[Français]
Des bases telles que Petawawa et Gagetown, qui ont déployé de larges segments de leurs communautés respectives, sont aux prises avec des services de santé mentale surchargés. Le problème est en partie attribuable à la situation géographique de ces bases et à la difficulté d'attirer et de retenir le personnel de différentes spécialités dans les régions environnantes. Ce défi est commun à la majorité des communautés rurales du Canada. Afin de régler ce problème, les Forces canadiennes s'appuieront sur les centres régionaux en santé mentale dans des zones telles que Ottawa et Halifax.
[Traduction]
Dans son ensemble, le système de soins de santé des Forces canadiennes est fort, mais je crois que nous nous remettons à peine d'un déficit. Nous croyons avoir une base solide sur laquelle ériger le système de soins de santé qui nous semble absolument nécessaire, et nous travaillons fort pour l'améliorer tous les jours. Nous gardons confiance en notre système de soins de santé en général, mais nous continuons de travailler fort pour l'améliorer.
Bien qu'aucun système ne soit parfait, la satisfaction des patients et les évaluations qui nous parviennent d'eux nous montrent constamment que le système de soins de santé répond à la vaste majorité des besoins des patients. Nous aimerions bien qu'il soit parfait. Il ne l'est pas, mais nous travaillons fort pour le parfaire. Nous, les dirigeants, sommes parfaitement conscients de l'incidence des problèmes de santé mentale et des traumatismes liés au stress opérationnel sur nos membres et leurs familles. Nous appuyons activement nos initiatives en santé mentale et faisons preuve du leadership qui nous semble juste et fondamental pour ces personnes. Tous ces efforts nécessiteront l'appui et le financement du gouvernement du Canada dans les années à venir, parce que les effets des traumatismes de santé mentale peuvent parfois se faire sentir des dizaines d'années après le diagnostic initial. Je pense que nos hommes et nos femmes le méritent et qu'ils ont certainement besoin de ce leadership de votre part.
Merci beaucoup. Je suis prêt à répondre à vos questions, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
À mon tour j'aimerais souhaiter la bienvenue au général et le remercier pour les services qu'il a rendus aux Forces canadiennes. Quand le général est venu à Saint-Jean il y a quelques années pour voir son fils recevoir son diplôme, il m'a invité à faire la course avec lui. Compte tenu que nous étions à peu près du même âge et que je m'entraînais à ce moment-là, je pensais être capable de tenir le rythme. Malheureusement, après quelques minutes, j'ai constaté qu'en plus de prendre de l'avance sur moi, il avait des jambes d'un homme de 20 ans environ. Je pense que ça illustre un peu ce que le général a pu accomplir et que ça donne une idée du grand respect qu'il inspirait chez ces hommes et ces femmes. Chaque fois que je l'ai vu en leur présence, il y avait quelque chose de charismatique. Je dirai pour conclure que le Bloc québécois a beaucoup d'admiration pour ce que vous avez fait. Je vous souhaite une très bonne retraite.
Dans votre présentation, vous avez beaucoup parlé de l'aspect curatif, du fait que les gens ayant subi des blessures ou un stress post-traumatique avaient accès à des services à leur retour. Je dois avouer que depuis quelques années, on constate que les Forces canadiennes prennent les maladies au sérieux, surtout le syndrome de stress post-traumatique. Il est vrai que de plus en plus d'efforts sont faits pour aider ces gens à se rétablir. J'aimerais qu'on parle un peu plus de la prévention.
On m'a expliqué qu'on essayait de faire des entraînements le plus près possible du théâtre des opérations. Or, j'ai visité plusieurs de ces endroits et j'ai cru comprendre qu'il n'y avait rien de pire pour un soldat prêt pour la bataille, qui a été entraîné à l'action, de constater des atrocités en ayant à obéir à l'ordre de ne rien faire. J'ai beaucoup entendu parler de Srebrenitza quand je suis allé en Bosnie dans le cadre de la rotation 9. Ça, c'est le passé; maintenant, il faut régler le présent.
Aujourd'hui, des questions ont été posées à la Chambre des communes sur de possibles agressions sexuelles perpétrées par l'armée afghane. On dit que les officiers et les soldats en sont témoins et que les officiers donnent l'ordre de ne pas signaler ces actes.
Vous allez bientôt prendre votre retraite, et je voudrais que vous me donniez votre opinion à ce sujet. J'aimerais aussi que vous me donniez des garanties, à savoir que vous donniez l'ordre à l'ensemble des officiers se trouvant actuellement sur le théâtre des opérations afghan de ne pas exiger que des situations de la sorte soient gardées secrètes et que rien ne soit fait à ce sujet. Ils ne peuvent pas donner des ordres de ce genre. J'aimerais que vous me donniez l'heure juste.
Je suis content que vous soyez parmi nous cet après-midi. Nous pouvons enfin rencontrer la personne responsable des Forces canadiennes. Vous avez une responsabilité à cet égard, et j'ose croire que le problème sera réglé.
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Merci pour votre question, monsieur. Laissez-moi aborder quelques points.
Premièrement, nous avons traversé des moments terribles dans l'ancienne République de Yougoslavie, dans les Balkans, alors qu'en vertu du mandat de la mission, des règles d'engagement et des contraintes juridiques, nous avions des soldats qui étaient là, à assister à l'équivalent d'une épuration ethnique. Nous savons tous de quoi il retourne. Ce fut une époque terrible, et pour les soldats, il était plus difficile de rentrer à la maison avec un sentiment de satisfaction — ce qui constitue un élément essentiel pour rester en santé dans une mission comme celle-là — que pour n'importe quoi d'autre qu'on puisse accomplir dans la vie.
Deuxièmement, lorsque nos soldats, marins et pilotes — car ces forces sont toutes présentes, même si parfois, nous oublions ces dernières composantes — vont à l'étranger pour nous, comme en ce moment à Kandahar, en Afghanistan, ils emportent avec eux les valeurs qui sont chères aux yeux des Canadiens. Ils les appliquent et les respectent tous les jours ici, et c'est ce que nous attendons d'eux.
Troisièmement, nous ne sommes pas l'inspecteur général des forces de sécurité nationale afghanes. Donc, nous ne scrutons pas leurs activités dans leurs moindres détails. Mais pour en revenir à l'essentiel de vos propos, monsieur, laissez-moi simplement dire que si nous nous trouvons en Afghanistan, c'est pour aider le peuple afghan. Oui, nous sommes là pour travailler et aider à construire les forces de sécurité nationale afghanes de manière très directe. Si nous sommes témoins de quelque sévice grave que ce soit — je tente de trouver les mots exacts pour l'exprimer — à l'égard de personnes, je m'attends à ce que mes soldats, marins et pilotes alertent immédiatement leur chaîne de commandement, laquelle, avec l'aide de ces militaires, prendra des mesures pour mettre fin à n'importe quel type de sévices importants.
Au cas où un doute subsisterait là-dessus, j'ai reconfirmé et fait parvenir cette directive dans la chaîne de commandement jusqu'à la province de Kandahar, pour m'assurer que les intentions du Chef d'état-major de la Défense et les nôtres en tant que nation sont absolument claires pour tous, et c'est le cas. Si des sévices graves sont commis envers des Afghans — et je pense que nous en avons eu de bons exemples au cours de la dernière année... Je sais qu'un jeune sergent, par exemple, a été filmé par des caméras de télévision alors qu'il disait « Vous savez, je m'inquiète du fait que si ces gens sont remis aux forces de sécurité nationale afghanes présentes à ce moment-là, ils pourraient être battus, blessés ou tués, et nous n'allons pas faire cela; nous n'allons pas les leur remettre ».
C'est le type de comportement auquel nous nous attendons, et que nous allons renforcer d'un bout à l'autre de la chaîne de commandement. C'est ce que les soldats canadiens nous donnent en tout temps. Nous allons procéder à une enquête pour vérifier si on a été témoin de quoi que ce soit qui a pu se produire par le passé, et pour voir si nous avons fait ce genre de chose. Mais en réponse à ce que vous avez dit, je vous garantis que mes directives et mes orientations en tant que CEMD, qui parcourent la chaîne de commandement, sont tout à fait claires.
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Eh bien, je vous dirais qu'il s'agit là d'un éternel écart. Vous avez mentionné les anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale et même, bien sûr, ceux de la Première Guerre mondiale, quand ils étaient encore vivants, jusqu'aux anciens combattants de l'ex-Yougoslavie.
En fait, je suis même surpris que nous ayons un programme de traitement pour les militaires revenus de Bosnie, de Croatie, de Somalie et autres endroits du genre. Tandis que nous quadruplions les opérations que nous menions dans le monde entier, nous démantelions le système de santé en nous débarrassant de tous ces genres de programmes en raison des pressions dont nous étions la cible. Je suis donc tout à fait étonné que nous ayons pu avoir un quelconque traitement, et je sais qu'il n'était pas très efficace.
Nous avons accompli beaucoup de travail depuis. Mais comme je l'ai dit plus tôt, nous sortons tout juste d'un déficit. En fait, je pense que nous sommes tout simplement retournés à une égalisation des règles du jeu, et il faudra encore quelques mois et années pour en arriver à bâtir le type de système de santé qui pourra réellement s'occuper de tous les gens et de leurs blessures physiques et mentales.
Nous avons progressé. Par rapport à il y a cinq ans, deux ans, voire même six mois, l'évolution a été radicale. Et ce sera encore mieux dans six mois. Je pense qu'un point révélateur est le fait qu'aujourd'hui, nous faisons réellement en sorte que les anciens combattants de ces campagnes plus anciennes se manifestent, parce que la stigmatisation a été quelque peu éliminée. Ils ont confiance qu'ils obtiendront un traitement, et généralement celui qu'il faut.
Mais cela ne camoufle pas, en quelque sorte, le fait que nous demeurons aux prises avec des difficultés importantes. Nous n'avons pas suffisamment de bons intervenants aux bons endroits. Dans une organisation de 87 000 personnes, il aura toujours des gens aux points de vue opposés. Et tous n'auront pas cette vision positive selon laquelle une blessure est une blessure, qu'elle soit physique ou mentale. Nous travaillons quotidiennement à changer cette mentalité.
C'est un processus lent. Mais selon moi, cela constitue presque un changement miraculeux qu'au cours des deux ou trois dernières années, nous ayons pu nous occuper d'un nombre important de blessures et d'un nombre encore plus élevé de troubles de santé mentale, de traumatismes liés au stress opérationnel de troubles de stress post-traumatique. Je crois que le changement a été spectaculaire, et nous voulons simplement poursuivre en ce sens.
Nous avons chaque jour une vision plus claire quant à l'approche à adopter face à cette question. Nous mettons en place de meilleures politiques, et les politiques sont importantes, car elles permettent d'accorder à tous un traitement universel. Ensuite, nous assemblons toutes les différentes composantes dans des endroits comme Edmonton, et spécialement Petawawa et Gagetown. Nous savons que nous avons fait face à des difficultés très particulières dans ces deux derniers endroits.
Donc, je ne présente aucune excuse, madame. Nous avons abattu un travail considérable. Nous avons majoritairement obtenu beaucoup de satisfaction.
Il y a encore des gens qui n'ont pas été examinés assez rapidement par un spécialiste. Nous n'avons peut-être pas repéré assez vite qu'ils étaient en difficulté, ou peut-être ne l'avons-nous pas reconnu. À aucun moment je ne prétends que nous n'avons rien à nous reprocher. Tout ce que je puis vous dire, c'est que les dirigeants sont déterminés à cet égard. Nous y avons véritablement investi des ressources. Et cet homme ici, à ma gauche, l'a fait en notre nom, et en celui des gens là-bas.
Nous continuerons cependant de déployer beaucoup d'efforts, comme vous le savez, pour avoir le genre de spécialistes qu'il faut sur place et les attirer dans des lieux comme Petawawa. Je veux dire que j'adore Petawawa; j'ai fait trois visites là-bas, et j'y passerais le restant de mes jours. Mais ce ne sont pas tous ceux qui ont le type d'expertise dont nous avons besoin qui veulent aller à Petawawa ou à Gagetown. Donc, nous continuons de nous démener quelque peu avec toutes ces questions.
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Je parlerai de la question avec plaisir. Parmi toutes les difficultés uniques auxquelles nous sommes confrontés, les réservistes en constituent une qui est un peu plus grande.
Vous comprenez tous; on ramène des gens, et s'ils souhaitent retourner dans leur communauté, il est parfois difficile de maintenir la communication avec eux. Nous avons pris tout un ensemble de mesures — des mesures très pragmatiques. Si un soldat blessé retourne chez lui en revenant d'Afghanistan, il demeurera en service à temps plein jusqu'à son rétablissement complet, à sa satisfaction et à la nôtre. Donc, il demeurerait un élément de notre unité, et nous le garderions en service à temps plein aussi longtemps qu'il le souhaite.
Qu'il reste chez lui ou dans l'unité, nous travaillons avec l'individu, et de cette manière, nous pouvons lui fournir les soins médicaux directs pour des traumatismes liés au stress opérationnel ou autres types de blessures mentales, ou encore pour des blessures physiques.
C'est un aspect essentiel, car nous avions autrefois la politique selon laquelle on revenait chez soi avec un congé de 30 jours, je crois, puis on retournait à un poste de réserviste classe A pour 35 jours par année. C'est un changement considérable en soi.
Nous avons mis en place un ensemble de plus petits programmes, comme un service d'infirmiers de liaison, où une infirmière a la responsabilité de maintenir le contact avec ces réservistes, peu importe où ils vont.
Nous avons mis l'accent sur la chaîne de commandement des unités de réserve partout au pays. Lorsqu'on accueille, à leur retour dans leurs unités, ces jeunes soldats qu'on a contribué à sélectionner et aidés à se préparer, et avec lesquels on a correspondu et communiqué lorsqu'ils se trouvaient en mission, on a la responsabilité d'assurer par la suite un suivi auprès de ces jeunes militaires, de ces jeunes Sergent Grenier ou Caporal Hillier, et de travailler avec eux durant les prochains jours et mois. Les blessures mentales, parfois, ne sont mises au jour que cinq, six, sept ou dix mois plus tard.
Donc, nous avons pris un ensemble de mesures à cette fin, y compris nous attaquer à ce qui était perçu comme un écart financier entre un soldat de la force régulière et un réserviste.
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Tout d'abord, monsieur Hawn, je vous remercie d'avoir parlé de ces trois jeunes soldats. Samedi dernier, j'ai eu l'occasion d'assister au Gala du Fonds pour les familles des militaires, tenu à Calgary, en compagnie du caporal chef Paul Franklin, de son épouse Audra et de sa belle-mère.
J'ai aussi revu à maintes reprises Will Salikin, un jeune homme incroyable, de même que le caporal Jeffrey Bailey, toujours aussi imposant, depuis qu'ils ont été blessés. Nous avions presque perdu espoir que ces deux jeunes hommes puissent être avec nous ici aujourd'hui; c'est ce qu'on pourrait qualifier de miracle.
Paul Franklin est mon héros. Chaque fois que je sors du lit et que je me plains de mes os qui craquent et de mes muscles endoloris, je pense à ce par quoi est passé Paul Franklin et ce qu'il vit actuellement.
Nous avons changé notre mentalité à l'égard des familles des militaires. Nous mettons la hache dans des centaines d'années de tradition britannique dont nous nous étions, en fait, approprié. Je dis souvent à la blague qu'à l'époque, on nous disait: « Si l'armée avait voulu que vous fondiez une famille, elle vous en aurait fourni une. » C'est ainsi que nous traitions les gens. C'était l'attitude que nous avions à ce moment-là. Nous avons beaucoup évolué depuis. Le fait que le Gala du Fonds pour les familles des militaires, tenu à Calgary samedi dernier, ait accueilli 550 Canadiens venus rendre hommage aux membres des Forces canadiennes ainsi qu'à leurs familles est un signe qu'un changement est en train de se produire.
Nous tenons compte de l'aspect familial dans tout ce que nous entreprenons. Nous invitons les membres de la famille aux séances d'information, aux entraînements préparatoires et aux discussions concernant les missions. Chaque base ou unité importante est dotée d'un centre de soutien au déploiement où nous offrons de l'aide aux familles des membres d'une façon que nous n'aurions jamais pu imaginer des années 1970 aux années 1990.
Nous accueillons les proches des membres des Forces dans les centres d'assistance au déploiement afin de s'assurer qu'ils sont au courant de ce qui se passe et qu'ils reçoivent le soutien nécessaire. Nous préparons ces familles — nous ne le faisons pas nécessairement bien, mais nous y travaillons — à aider l'être aimé à reprendre une vie normale à son retour de mission. Bien qu'il y ait des problèmes à l'occasion, la situation se passe bien dans la majorité des cas. Nous aidons nos membres à s’adapter au retour à la vie familiale et à poursuivre une vie normale. Nous l'avons fait de diverses façons. Il y a la chaîne de commandement et la structure familiale.
Ce que nous faisons également — et je le fais personnellement —, c'est encourager les familles en leur disant de ne pas s'inquiéter, car ce ne sont pas tous les soldats qui éprouveront des difficultés. Je suis allé à Edmonton et j'ai discuté avec les épouses de douze militaires au CRFM. Neuf d'entre eux venaient de rentrer après un déploiement de six mois alors que les trois autres participaient à un déploiement de neuf mois. Je leur ai demandé combien d'entre elles avaient bénéficié des services offerts au CRFM, et la plupart n'y avaient jamais eu recours. Plusieurs ignoraient complètement l'existence de ces services. On a discuté, et je leur ai demandé combien avaient assisté aux séances d'information. Très peu d'entre elles l'avaient fait.
Nous avons changé notre mentalité, n'empêche qu'il y a une responsabilité qui revient à l'épouse, à l'époux et à la famille du membre des Forces armées. Lorsque nous les invitons à une discussion, notamment sur les difficultés, ceux-ci doivent faire l'effort de venir nous rencontrer. Il y a deux côtés à la médaille. Nous travaillons avec les familles chaque jour à cet égard.
Nous avons décidé de bonifier les services offerts par les CRFM. À cet égard, les dirigeants ont tenu une réunion, très fructueuse d'ailleurs, à Toronto, les 23 et 24 mai derniers, au cours de laquelle nous avons discuté des changements à apporter, des ressources à investir et des façons de mieux faire les choses. Nous ne voulons pas travailler en vase clos à Petawawa. Nous voulons nous inspirer de ce qui se fait à Halifax, à Bagotville et à Edmonton.
Nous avons reçu une rétroaction très positive. Dimanche après-midi, au lendemain du Gala tenu à Calgary, je me suis envolé vers Edmonton où j'ai pu rendre visite à deux soldats, qui venaient tout juste de rentrer d'une mission. L'un d'entre eux était le soldat Anthony Price, un jeune homme incroyable, à peine âgé de 22 ans, qui a été blessé au bras et à l'épaule. Il reçoit tout le soutien dont il a besoin et est sur la voie du rétablissement. Il est impatient de reprendre la mission et tient mordicus à y retourner avant que sa rotation ne prenne fin. Notre but, c'est donc de lui permettre de le faire.
L'autre soldat était le major Mark Campbell. Il était accompagné de sa femme Donna, adjudante dans les Forces canadiennes, de sa fille Meaghan, âgée de 9 ans, et de son fils, Steven, âgé de 12 ans. Après avoir discuté avec eux pendant une heure, je peux vous dire qu'ils ont tout le soutien dont ils ont besoin. Ils se sentent bien entourés, et tout cela, c'est en partie grâce à vous, les dirigeants politiques de notre pays. Cet appui signifie beaucoup pour eux.
Par conséquent, vous pouvez constater que nous avons réalisé de grands progrès. Évidemment, il y a encore place à l'amélioration.
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Je pense que l’important, c’est d’avoir un équilibre. Depuis longtemps, nous savons que la distance est un facteur de stress et que, combinée à des risques, elle est doublement stressante.
Lorsque j’étais commandant de brigade à Petawawa au milieu des années 1990, les proches des militaires me disaient que ce n’était pas le déploiement en Bosnie d’une durée de six ou sept mois qui les dérangeait, mais plutôt l’entraînement préparatoire de trois à cinq mois qui faisait en sorte qu’ils étaient séparés pendant un an. Ils se disaient prêts à accepter la durée du déploiement s'ils pouvaient être exemptés de l’entraînement préalable. Nous avons donc fait notre possible pour réduire le temps que les militaires passaient loin de leur famille lorsqu'ils étaient au Canada. Nous essayions autant que possible de les former sur place; par exemple, ils s’entraînaient du lundi au vendredi et retournaient à la maison les week-ends. Nous avons connu un certain succès.
Cependant, lorsque nous avons lancé l’opération en Afghanistan, nous avons réalisé à quel point nous en avions perdu beaucoup au cours des dernières décennies, depuis la Seconde Guerre mondiale et la Guerre de Corée. Afin de rendre justice à nos jeunes hommes et à nos jeunes femmes, ainsi qu’à leurs familles, et de leur donner la possibilité d’aller en Afghanistan et de réussir la mission qu’on leur a confiée, tout en étant prêts à tous points de vue, comme je l'ai dit dans ma déclaration, nous avons dû accroître la formation préparatoire en vue de réduire les risques au plus bas niveau possible. Par conséquent, cela a ajouté un autre facteur stressant. En revanche, nous avons pris cette direction après avoir pris connaissance des risques auxquels s’exposaient nos soldats si nous ne le faisions pas.
Nous avons maintenant acquis suffisamment d’expérience dans les Forces canadiennes, particulièrement dans les forces terrestres qui exécutent le gros de la mission, pour nous permettre de réduire l’entraînement préparatoire. D’ailleurs, je me suis entretenu tout récemment avec le commandant de l’Armée de terre, le lieutenant-général Leslie, et il semble que nous réduisions l’entraînement préalable au déploiement, c’est-à-dire le temps passé loin de la maison, de six ou sept semaines, ce qui n’est tout de même pas négligeable. De plus, nous essayons, autant que possible, d’offrir une formation sur place et de ne déployer qu'un groupe précis dans l’Ouest canadien.
Par ailleurs, nous garantissons une période d'au moins 12 mois au Canada entre les déploiements, à moins de circonstances exceptionnelles, dont nous discutons avec les personnes concernées. En réalité, c’est plutôt entre 18 et 24 mois pour la plupart des membres des Forces canadiennes et plus que cela pour beaucoup d'autres.
Nous avons quelques petits groupes dont la période de répit dure environ 12 mois, et c’est ce que nous voulons changer. Nous prenons diverses mesures à cet égard. Par exemple, nous affectons des soldats de l’extérieur de l’armée de terre, que ce soient des marins ou des aviateurs, pour réduire le niveau de stress qui pèse sur nos soldats; nous garantissons, idéalement, une période de 18 à 24 mois entre les déploiements, afin que les soldats puissent retourner auprès de leur famille et qu'ils n’aient pas d’entraînement préparatoire loin de la maison pendant une longue période; et nous essayons de limiter la durée des déploiements à six ou sept mois, de façon à ce que ce soit avantageux sur tous les plans.
Nous avons obtenu un excellent rendement pour nos importants investissements dans l’accroissement du potentiel militaire et dans l’entraînement, particulièrement dans le théâtre des opérations, où nos membres prennent quelques mois pour se familiariser avec l’environnement et les dernières semaines pour encadrer les nouveaux. Nous voulons les garder le plus longtemps possible pendant qu'ils sont à leur meilleur. Nous savons que c’est environ six ou sept mois, alors nous essayons de respecter cette durée. Je pense que cela sera bénéfique pour tous, surtout au sein des groupements tactiques à l’extérieur.
Des déploiements d’une durée raisonnable, des périodes suffisamment longues à la maison pour bénéficier du soutien de leurs proches et un entraînement préparatoire conçu de façon à passer le moins de temps possible loin de leur famille sont des facteurs qui permettront aux militaires de mener une longue carrière au sein des Forces.
Je vous dirais qu’on s’attend à ce que nos membres servent dans les armes de combat pendant une ou deux périodes de service de quatre ans chacune, puis qu’ils assurent ensuite le soutien logistique du combat dans les Forces canadienne. Ainsi, leurs prochaines missions sont très différentes. On peut donc prendre diverses mesures. En revanche, un marin ou un aviateur doit s’attendre à être déployé tout au long de sa carrière; il n’est donc pas évident de concilier travail et famille et de mener une longue carrière fructueuse.