RNNR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
CANADA
Comité permanent des ressources naturelles
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 12 juin 2008
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour tout le monde. Nous poursuivons notre étude de la décision d'Énergie atomique du Canada Limitée et du gouvernement du Canada de mettre fin au projet de réacteurs MAPLE et de ses conséquences sur la fourniture d'isotopes.
Nous accueillons aujourd'hui Shela Fraser, vérificatrice générale du Canada.
Madame la vérificatrice, je vous donne la parole pour votre brève déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux questions. Vous m'avez dit que vous pouvez rester jusqu'à 12 h 30, ce dont nous vous remercions. Je sais qu'il y a un problème d'horaire. Si vous pouviez nous présenter la personne qui vous accompagne, nous allons commencer tout de suite.
Merci de votre présence.
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de nous avoir invités à présenter notre rapport d'examen spécial d'Énergie atomique du Canada Limitée. Je suis accompagné de Jean-Pierre Plouffe, directeur principal et responsable de cette vérification.
Comme vous le savez déjà, nous avons comparu devant le comité en janvier pour discuter des résultats de notre rapport sur EACL, peu après que la société l'ait publié sur son site Web. Par souci de commodité, je vous ai remis un exemplaire de ma déclaration liminaire de ce jour-là. Vous constaterez que le paragraphe 12 contient une remarque sur les deux réacteurs nucléaires MAPLE. En résumé, nous disions qu'il y avait eu des retards et des dépassements de coûts et que la Société n'avait toujours pas résolu certains problèmes techniques.
Monsieur le président, nous n'avons pas fait d'autre étude à ce sujet depuis notre rapport de 2007. Par conséquent, nous ne pouvons pas exprimer d'opinion sur les derniers développements, comme la décision de mettre fin au projet MAPLE.
[Français]
Nous procédons actuellement, en collaboration avec un covérificateur, à la vérification des états financiers de 2007-2008 de la société. Les états financiers vérifiés seront intégrés au rapport annuel de la société, qui sera communiqué au Parlement par le ministère des Ressources naturelles. La société prévoit présenter son rapport annuel au ministre avant la fin du mois. Étant donné que le rapport n'a pas encore été rendu public, vous comprendrez certainement qu'il m'est impossible de faire des commentaires sur le rapport ou sur les résultats de notre vérification.
Sur ce, je conclus ma déclaration d'ouverture. Nous serons heureux, monsieur le président, de répondre aux questions des membres du comité. Merci.
[Traduction]
Merci, madame la vérificatrice générale.
Nous passons directement aux questions en commençant avec le critique de l'opposition officielle, M. Alghabra.
Allez-y, vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Bonjour, madame Fraser. C'est un plaisir de vous revoir devant le comité.
Vous aviez parlé dans votre rapport du contrat de 40 ans avec MDS Nordion. Vous aviez mentionné simplement qu'EACL a un contrat d'approvisionnement de 40 ans. Aujourd'hui, nous entendons EACL soutenir que ce contrat était conditionnel à l'achèvement du réacteur MAPLE.
Que pouvez-vous nous dire à ce sujet? Je suppose que votre Bureau s'est penché sur ce contrat. Qu'en pensez-vous?
Évidemment, monsieur le président, j'ai pris connaissance du témoignage de ces derniers jours. Il semble y avoir un désaccord entre EACL et MDS Nordion au sujet de l'interprétation de ce contrat. Nous laisserons bien sûr aux avocats le soin de régler ce différend, avec toutes les conséquences éventuelles qui peuvent en découler. Nous examinerons cette question lorsque nous procéderons à la vérification des états financiers de la Société.
Je sais qu'il y a un différend d'ordre juridique et je ne vous demande pas d'exprimer un jugement à cet égard. Toutefois, votre Bureau vérifie et supervise en règle générale la manière dont les sociétés d'État ou les ministères gèrent leurs activités. Dans votre déclaration, vous aviez parlé d'un contrat de 40 ans. Donc, si je comprends bien, l'opinion de votre Bureau est qu'il y avait un contrat d'approvisionnement d'isotopes d'une durée de 40 ans, n'est-ce pas?
Quand nous avons produit ce rapport, même la Société estimait, comme nous, qu'un contrat d'approvisionnement de 40 ans était en vigueur. Je crois comprendre d'après le témoignage recueilli par votre comité que la Société estime que cet engagement ne tient plus à cause de la décision de ne pas mener le projet à bien, ce qui est la cause du litige. Évidemment, je suppose que cette question devra être réglée au moyen de négociations entre les deux parties ou d'une action judiciaire.
Sur un sujet différent, lors de votre dernière comparution devant le comité vous aviez parlé de votre préoccupation au sujet du congédiement de Mme Keen et de ses ramifications. Vous aviez dit que, selon vous, cela risquait d'avoir un effet de paralysie chez les fonctionnaires.
Lorsque le ministre s'est présenté devant le comité, il nous a dit, ainsi qu'aux médias, qu'il a la conviction que la Commission prorogera la licence du NRU en 2011. Certains y ont vu un message très fort adressé à la Commission pour lui dire qu'elle ferait mieux de renouveler la licence en 2011.
Je ne voudrais pas vous mettre dans une situation difficile...
... mais nous savons que vous êtes tout à fait capable de faire face à des situations difficiles, comme vous l'avez toujours démontré dans le passé, avec beaucoup d'éloquence. J'aimerais donc avoir votre opinion à ce sujet.
Un rappel au règlement, monsieur le président. Le ministre a dit qu'il travaillerait avec la CCSN et avec EACL pour faire en sorte que la licence soit prolongée. Je pense qu'il faut être précis dans ce qu'on dit ici.
Je reviens donc sur cette question. Certaines personnes se demandent pourquoi le ministre aurait dit qu'il avait la conviction que la Commission allait proroger la licence alors que nous savons déjà que la commissaire précédente, ou la présidente de la Commission, a été congédiée parce qu'elle n'avait pas fait ce que le ministre lui demandait.
Je ne ferai évidemment aucun commentaire, monsieur le président, sur la raison pour laquelle le ministre peut avoir dit telle ou telle chose.
Ce que je peux vous dire, c'est que la Commission a certainement la réputation de faire son travail avec beaucoup de rigueur, comme tous les Canadiens s'y attendent étant donné l'importance de son rôle comme instance de réglementation d'une industrie très importante. Je pense que nous nous attendons, comme tout le monde, à ce qu'elle continue à s'acquitter de cette fonction avec rigueur, en menant les inspections qui sont nécessaires et en donnant l'assurance que, si la licence est prorogée, c'est une décision appropriée.
Le projet de réacteur MAPLE semblait être en difficulté quand votre Bureau a fait sa vérification et vous en avez parlé dans votre rapport. En outre, nous avons vu une note d'information présentée au ministre en novembre dernier pour lui exposer trois options : maintenir le cap, changer le type de combustible ou mettre fin au projet. Dans la note, on disait que la dernière option était préférable, c'est-à-dire mettre fin au projet et négocier un règlement avec MDS Nordion. On y disait cependant aussi que cela coûterait 7 millions de dollars par mois, si je me souviens bien. C'était en novembre et nous sommes maintenant à la mi-mai.
Pensez-vous que cette dépense de 7 millions de dollars par mois était sage, même si nous avions en novembre une note d'information du ministre lui disant que la bonne décision était d'annuler le projet?
Comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, monsieur le président, je ne peux faire aucun commentaire à ce sujet. Nous n'avons mené aucune autre étude sur cette question depuis notre examen spécial de mars 2007.
Le problème est que nous avons vu des rapports de votre Bureau et des notes d'information au ministre sur l'avenir incertain du projet. La décision a été prise rapidement, sans consulter le client, qui avait un contrat de 40 ans. Maintenant, l'approvisionnement en isotopes est toujours menacé car nous n'avons pas de plan B.
Ce n'est pas une question, c'est un commentaire.
Tout cela est très troublant. Beaucoup de Canadiens ont encore beaucoup de doutes au sujet de l'approvisionnement en isotopes et attendent avec impatience qu'EACL et le gouvernement disent quels sont leurs plans pour assurer cet approvisionnement.
Durant votre vérification, avez-vous vu d'autres plans qu'EACL...
Monsieur Alghabra, vous avez largement dépassé votre temps de parole.
C'est maintenant au tour de Mme DeBellefeuille, pour sept minutes.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Bienvenue, madame Fraser. C'est toujours agréable pour moi de dire que votre famille est originaire de Dundee, qui est située dans mon comté. Je le répète chaque fois parce que c'est une grande fierté pour nous.
Madame Fraser, une question me trotte dans la tête à la suite du témoignage de MDS Nordion. Quand une société d'État conclut un contrat avec une entreprise privée et que des fonds sont engagés, quel est le pouvoir du gouvernement? Dans ce cas-ci, on peut parler d'un échec qui coûte très cher au contribuable et à l'entreprise privée, soit plus d'un demi-milliard de dollars. Quand le gouvernement peut-il décider que c'est assez? La société d'État investit de l'argent, et le gouvernement fournit une aide financière, mais c'est quand même une société d'État indépendante et une entreprise privée, MDS Nordion, qui ont conclu un contrat. Finalement, ceux et celles qui vont payer pour cet échec et ce mauvais partenariat d'affaires, ce sont les contribuables.
À quel moment le gouvernement peut-il ou doit-il intervenir? Dites-moi quel est son niveau de responsabilité, afin que je saisisse mieux ce dont il est question.
De façon générale, le gouvernement, le ministre peut toujours donner certaines directives à une société d'État. Le gouvernement dispose de divers mécanismes pour ce faire. Il peut utiliser le plan d'affaires, dans lequel la société d'État fait état de ses activités prévues pour la prochaine année. C'est pour cela qu'on a dit à plusieurs reprises que le plan d'affaires d'Énergie atomique du Canada n'avait pas été approuvé pendant de longues périodes. Cet organisme fonctionnait sans l'accord du gouvernement quant aux mesures qu'il envisageait.
Vous dites qu'il fonctionnait sans l'accord du ministre. Le ministre s'en était-il aperçu? Cela a-t-il provoqué un litige?
Oui. À l'époque, nous avons signalé que le plan d'affaires n'avait pas été approuvé. Selon ce mécanisme, le gouvernement donne son accord sur les activités d'un ministère et sur la direction que ce dernier entend suivre.
Il y a un autre mécanisme qui est encore plus précis et qui consiste, pour le gouvernement, à donner des directives à une société d'État par l'entremise d'un ministre. Je vais donner un exemple qui est bien connu. Le ministre a donné la directive à Postes Canada, qui est une société d'État, de maintenir le service de livraison rurale. Le gouvernement peut exiger d'une société d'État qu'elle prenne certaines mesures. À tout moment, il peut intervenir pour indiquer à une société d'État quoi faire.
Je rappelle au comité que lors de notre dernière vérification ou dans le cadre de l'examen spécial qui s'est terminé à la fin mars, la société indiquait toujours qu'elle croyait satisfaire aux conditions de l'entente et que les réacteurs MAPLE entreraient en fonction en 2008.
D'accord.
Un expert indépendant, M. Waddington, nous a dit que lorsque des experts indépendants ont analysé le projet MAPLE, ils n'avaient trouvé aucune solution au problème de conception du réacteur MAPLE et que, par conséquent, ce dernier ne pouvait pas produire d'isotopes. Le projet s'est poursuivi et on a continué d'y investir. En 2006, Énergie atomique du Canada, à la suite d'une mésentente, a rouvert le contrat pour signer une entente comportant différentes conditions. À ce stade, plusieurs doutaient même que le réacteur MAPLE puisse voir le jour.
Quand Énergie atomique du Canada a négocié une nouvelle entente avec Nordion, je m'explique mal pourquoi le gouvernement n'est pas intervenu pour signaler que les contribuables risquaient fort de devoir investir davantage, de faire face à un litige éventuel et de devoir verser des compensations. De toute évidence, il y avait des problèmes importants.
En 2006, le gouvernement aurait-il dû intervenir pour avertir Énergie atomique du Canada qu'il s'agissait là d'un risque financier énorme, plutôt que de lui laisser signer cette entente? En fin de compte, ce sont les contribuables qui devront payer la facture.
Aujourd'hui, avec du recul, il est peut-être évident que les difficultés étaient plus sérieuses qu'on ne pouvait l'estimer à l'époque. De toute évidence, la corporation et même MDS Nordion croyaient alors qu'il y aurait des solutions techniques et qu'ils pourraient résoudre les problèmes. Sinon, pourquoi auraient-ils signé cette entente?
Le 31 mars 2007, lors de l'examen spécial, on recevait toujours des experts techniques de la corporation qui se disaient confiants de trouver des solutions. Je présume qu'à l'époque, on se fiait à ces experts ou peut-être à d'autres qui croyaient, eux aussi, qu'une solution était possible.
Je ne sais pas si c'est juste ou non de qualifier ce dossier de fiasco financier, mais il reste que l'argent investi dans ce projet vient des contribuables.
Croyez-vous que ces événements méritent que votre bureau fasse un examen très en profondeur, question de mieux comprendre la situation? Aurait-on pu travailler davantage et éviter cet échec, plutôt que d'engloutir ces sommes considérables?
Nous nous retrouvons en 2008 avec un vieux réacteur qui a presque 60 ans. Nous n'avons pas de solution à court terme, étant donné qu'on a retiré le projet MAPLE, et le besoin d'isotopes médicaux existe toujours. On a sous-entendu que le permis pourrait être prolongé jusqu'en 2016. En effet, selon le témoignage de MDS Nordion, la situation serait moins inquiétante d'ici 2016. Ne trouvez-vous pas que ça mérite une étude plus approfondie, question de voir comment cette affaire a été gérée sur les plans financier et contractuel?
Honnêtement, je m'attends à ce que la société elle-même fasse une analyse de ce que lui a appris toute cette histoire, et à ce que le gouvernement se penche sur la question. Je vous dirai franchement que pour notre part, nous ne possédons pas l'expertise nécessaire pour bien évaluer les questions techniques qui sont en jeu et la gravité des problèmes soulevés. Beaucoup d'aspects hautement techniques sont en cause. À cet égard, nous nous fions à des experts de ce domaine et à la commission. Je crois qu'il serait profitable que la société et le gouvernement fassent cette analyse et en tirent des leçons pour l'avenir.
[Traduction]
Merci, monsieur le président.
Je commencerai en disant que beaucoup des questions que j'ai posées à d'autres témoins portent essentiellement sur la question du risque. Je comprends parfaitement que vous disiez à Mme DeBellefeuille que vous n'avez pas d'expertise en ingénierie, etc. Ce n'est pas votre domaine. Toutefois, nous avons entendu la semaine dernière des témoins nous dire que non, non, c'était un projet à faible risque, alors que ce n'était pas vrai. Nous avons entendu des témoins nous dire la semaine dernière que c'était un projet à risque élevé.
Rétrospectivement, on peut constater que même avant le MAPLE 2, il y avait le MAPLE X qu'on a décidé de ne pas construire parce qu'il n'allait pas marcher. C'était trop risqué, je suppose, dans le contexte de la fin des années 80 et du début des années 90.
Cela dit, j'aimerais revenir au rapport du vérificateur général du 2 avril 1998. À la page 12, il y a un passage concernant les projets d'immobilisation. Je vous donne une seconde pour le trouver.
Voici ce qu'on y dit : « Nous avons vérifié la gestion, par EACL, de deux projets qui en étaient aux premières étapes de la construction : le projet MMIR à Chalk River qui prévoit la construction de deux réacteurs MAPLE et d'une installation de traitement... Ces deux projets comportent des risques importants pour EACL. Le projet MMIR est assujetti à des délais et à des budgets serrés ainsi qu'à des exigences réglementaires inattendues. » Donc, dans votre rapport de 1998, vous disiez qu'il y avait un risque élevé.
À votre avis, EACL avait-elle les outils voulus de gestion du risque dans ses systèmes, dans sa culture, à l'égard de ce projet, etc.? Si oui, pourquoi? Sinon, pourquoi? Qu'aurait-elle dû faire à ce moment-là?
Je précise que je ne mentionne ici qu'un aspect du problème.
Monsieur le président, permettez-moi de poursuivre la lecture de ce rapport de 1998. Au paragraphe suivant de ce passage — cela concerne à la fois le projet CANDU en Chine et les réacteurs MAPLE —, nous disions que « les deux projets en sont aux toutes premières étapes. Dans ce contexte, nous avons constaté que la gestion de chacun des projets était appropriée au regard des normes de projets reconnues ». Nous nous étions penchés alors sur l'étape de la construction et nous avions constaté, à cet étape vraiment préliminaire de définition du projet et de détermination des rôles et des responsabilités, que les choses étaient faites de manière adéquate.
Pour ce qui est de l'examen spécial effectué en 2002, le projet avait évidemment beaucoup avancé et nous avions alors soulevé un certain nombre de questions concernant la gestion de l'assurance de la qualité dans la Société. Des préoccupations avaient alors été exprimées à ce sujet.
Nous parlions de faiblesses du point de vue de l'assurance de la qualité qui risquaient d'entraîner des dépassements de coûts et d'échéancier. Il y avait plusieurs faiblesses dans le programme d'assurance de la qualité, la principale étant que son application manquait de cohérence. Nous avons indiqué ici qu'un certain nombre de vérifications avaient été effectuées entre 1999 et 2001 au sujet du projet de réacteur MAPLE, qui s'appelait à l'époque le MMIR.
On avait mentionné un certain nombre de problèmes, notamment des retards. Nous avions aussi mentionné en 2001 qu'un certain nombre de mesures avait été prises pour corriger les faiblesses identifiées mais que l'organisme de réglementation continuait d'exprimer certaines préoccupations. Cela est évidemment devenu le problème majeur — les problèmes techniques qu'on n'a pas réussi à résoudre.
Vous voyez très bien où je veux en venir.
Entre le rapport de 1998 et le rapport de 2001-2002, certaines mesures ont été prises mais, à l'évidence, elles étaient insuffisantes. S'agissait-il d'un problème spécifique à ce projet-là ou, selon vous, d'un problème systémique? Y avait-il des problèmes de gestion du risque dans toute la culture de la Société? Cette question n'a pas été explicitement abordée entre 1998 et 2001. Y a-t-il là un problème global ou s'agit-il uniquement d'un problème particulier à un projet, du point de vue de la gestion du risque?
Il y avait un certain nombre de problèmes. Comme nous l'avons dit ici au sujet du programme d'assurance de la qualité, nous pensions en fait que c'était une question assez sérieuse pour la qualifier de lacune importante. Lacune importante signifie qu'il y a une faiblesse suffisamment grave pour affecter les activités et le succès de la Société.
Il s'agissait là d'une de trois lacunes importantes constatées en 2002. Ça ne concernait pas que le réacteur MAPLE. Selon ce que je lis, le projet MAPLE était le plus important mais les lacunes représentaient un problème plus général dans toute la Société.
Merci.
Il vous reste un peu de temps, monsieur Trost, mais un changement a été apporté au Règlement il y a un mois ou deux et nous sommes maintenant tenus de demander le consentement unanime pour continuer une fois que la cloche a commencé à sonner. Auparavant, nous avions l'habitude de continuer jusqu'à ce qu'il reste une dizaine de minutes avant le vote.
J'ai besoin du consentement unanime. Je vous demande de continuer cette séance avec la vérificatrice générale pendant une vingtaine de minutes, ce qui nous laissera 10 minutes pour regagner la Chambre. Êtes-vous tous d'accord avec cette proposition?
M. Anderson.
Nous aurons seulement la vérificatrice générale. Nous ne voulons pas la retarder. Je sais qu'elle ne peut pas rester car elle a d'autres engagements.
Nous allons continuer jusqu'à 12 h 20, ce qui nous donnera assez de temps pour aller voter.
Des voix: D'accord.
Le président: Monsieur Trost, il vous reste deux minutes.
Merci, monsieur le président.
À votre avis, entre les rapports de 2002 et de 2005, EACL a-t-elle continué à améliorer ses outils et procédures de gestion du risque?
Oui, nous avons dit dans le rapport que les méthodes de gestion dans ce domaine s'étaient améliorées et que la principale question soulevée dans notre examen spécial de 2007 était la nécessité de régler certaines questions d'ordre stratégique, dont certaines concernant les réacteurs MAPLE, mais que cela était essentiellement relié aux fonds qui seraient nécessaires. Il s'agissait de sommes importantes et on ne pouvait pas dire avec certitude d'où elles viendraient. Nous avions aussi exprimé certaines préoccupations au sujet des retards mais l'essentiel concernait le financement.
Je ne sais pas si vous pourrez répondre à cette question mais, comme on l'a souvent mentionné, EACL et ses clients sont convenus en septembre 2005 de mettre fin à leur entente originelle et de la remplacer par un accord d'approvisionnement de 40 ans, daté du 22 février 2006. D'autres témoins nous ont dit qu'il y avait eu d'autres problèmes techniques et qu'on commençait à réaliser à ce moment-là qu'il y avait des problèmes graves avec le coefficient de puissance positive.
À votre avis — et je vous pose cette question du point de vue financier, pas du point de vue de l'ingénierie —, si vous savez que vous avez des problèmes graves avec votre technologie de base et que vous n'avez pas de plan de secours, signer un accord de 40 ans dans ce genre de situation témoigne-t-il d'une bonne politique de gestion du risque?
Il est très difficile de parler de ce cas précis car il faudrait déterminer quelle était la gravité de ces risques. Quand nous avons effectué nos vérifications, c'est-à-dire la vérification financière de mars 2007 et l'examen spécial, essentiellement à la même époque, la Société nous avait certainement dit qu'elle pensait que ces difficultés d'ordre technique seraient résolues et qu'elle respecterait les engagements reliés à cet accord.
Cela étant, d'un point de vue général de gestion, je ne pense pas qu'on signe généralement un accord de 40 ans si l'on pense qu'on ne sera pas capable de le respecter. Ça ne tiendrait pas debout.
Il est possible — et c'est là où je voulais en venir — que la Société ait peut-être été un peu trop optimiste sur le plan de l'ingénierie et que les problèmes n'aient pas été pleinement communiqués aux gestionnaires.
Ce n'est pas une question à laquelle vous pouvez it répondre, c'est simplement un constat que j'exprime devant ce comité en me demandant ce qui a bien pu se passer.
Merci, monsieur Trost. Je vous arrête sur cette réflexion à voix haute.
Madame Bell, voulez-vous sept minutes? Vous n'étiez pas ici quand votre tour est arrivé mais, si vous voulez, vous avez la parole.
Veuillez excuser mon retard. J'ai été retenue en Chambre à cause des changements.
Je regrette ne pas avoir entendu votre déclaration ni les questions qui ont été posées depuis. Veuillez m'excuser si certaines de mes questions sont répétitives.
Nous sommes évidemment ici pour parler de l'examen et des rapports de la vérificatrice générale sur EACL, mais en ce qui concerne les isotopes. Je crois me souvenir que vous aviez parlé dans votre rapport d'un financement insuffisant sur plusieurs fronts. Est-ce que ce financement insuffisant a nui d'une manière quelconque au travail nécessaire pour s'assurer que les réacteurs MAPLE soient opérationnels?
Pas à ma connaissance. Ce n'était pas une question de financement insuffisant mais plutôt un problème d'ordre technique qu'on n'a pas pu résoudre.
Quand nous avons parlé du financement des MAPLE, la Société estimait, à l'époque de l'examen spécial, qu'il faudrait consacrer des sommes sensiblement plus élevées à la continuation du travail de recherche et de développement. Elle avait dit avoir la conviction de pouvoir résoudre les problèmes techniques mais que cela exigerait des fonds supplémentaires à cause des retards encourus. Quant à savoir d'où viendraient les fonds supplémentaires, qui allaient s'ajouter aux autres fonds nécessaires pour le développement des CANDU avancés ou pour les installations de Chalk River, cela n'avait pas été précisé. C'est la question que nous avions soulevée, c'est-à-dire que la Société était confrontée à ces défis stratégiques et qu'elle aurait à résoudre cette question de financement car, évidemment, cela allait nuire à ses possibilités d'avancer sur ces trois fronts.
Voulez-vous ajouter quelque chose, monsieur Plouffe? Non?
Pour la prochaine génération des CANDU, y avait-il plus d'argent consacré à la recherche, au développement et à la production de cette technologie, à l'époque, ce qui a peut-être nui aux MAPLE? Si l'on avait pu obtenir plus d'argent à l'époque, je me demande si l'on n'aurait pas pu affecter plus de techniciens pour résoudre les problèmes des MAPLE?
Je n'en sais vraiment rien, monsieur le président. C'est une question qu'il faudrait poser à la Société.
Le NRU de Chalk River sera en existence beaucoup plus longtemps que prévu. Avez-vous une idée des fonds qui seront nécessaires pour son exploitation à long terme? Je soupçonne que non.
Nous faisons une vérification financière chaque année, le 31 mars. Nous effectuerons à nouveau un examen spécial dans quatre ans, parce que nous sommes tenus d'en effectuer un tous les cinq ans. Nous le ferons donc à la date prévue.
En 2012 et il n'était censé durer que jusqu'en 2011. Je me demande si vous pourriez effectuer un examen spécial plus tôt, étant donné ces problèmes.
Ce n'est pas prévu. Nous verrons comment la situation évolue. Évidemment, durant notre vérification financière, nous nous pencherons sur les conséquences de la décision d'arrêter le projet MAPLE, ce qui aura des conséquences financières sur la Société, de deux manières que je devrais peut-être expliquer au comité.
Premièrement, certains coûts ont été capitalisés dans les états financiers de la Société et, chaque année, nous devons faire ce que nous appelons un test de dégradation pour nous assurer que ces actifs ont encore de la valeur. Ce sera fait cette année.
En outre, en vertu des principes de comptabilité, chaque fois qu'on met fin à un projet ou à une partie d'une opération, on doit procéder à l'estimation de tous les coûts de cette décision. Il faut évaluer tous les coûts reliés à l'interruption du projet, même les coûts s'appliquant à plusieurs années dans le futur, et les enregistrer dans les livres comptables. C'est un autre aspect de la question que nous examinerons, tout comme, bien sûr, nous nous pencherons sur les accords et sur les conséquences potentielles des diverses décisions.
Cela aura évidemment certaines conséquences sur les états financiers du 31 mars 2008. Comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, ces états financiers ne sont pas encore publics mais ils devraient se trouver dans le rapport qui sera déposé à la fin de ce mois, je crois.
La décision de mettre fin au projet a été prise durant l'exercice budgétaire 2008-2009, ce qui veut dire que tous les coûts figureront dans les états financiers du 31 mars 2009, l'an prochain. Bien sûr, nous allons travailler avec la Société pour nous assurer que tous ces coûts sont adéquatement évalués et documentés, pour nous permettre de faire la vérification.
Merci.
Nous retournons maintenant à l'opposition, avec M. Scarpaleggia, puis M. Alghabra s'il reste assez de temps.
Il y aura assez de temps. Je n'ai pas participé à cette étude et je n'ai donc pas beaucoup de questions à poser.
J'ai entendu une rumeur, si je peux appeler ça ainsi, selon laquelle les coûts avaient été terriblement sous-estimés dès le départ, d'un facteur de cinq ou six, et qu'il y avait déjà eu des dépassements par rapport aux estimations pour tout le projet avant même qu'on donne le premier coup de pelle. C'est ce qu'on m'a dit.
J'ai aussi entendu dire qu'il y avait des problèmes de gestion interne tellement graves que la Société — ou plus précisément, je suppose, l'équipe du projet MAPLE — avait commencé à perdre ses scientifiques.
J'aimerais savoir si vous avez des informations à ce sujet.
Cela n'a jamais été mentionné dans aucun de nos rapports et je ne peux donc vraiment rien vous dire à cet égard.
Merci.
Madame Fraser, comme vous êtes l'instance ultime de supervision des finances et des ressources du gouvernement...
Merci, et c'est pourquoi je vais vous poser la question qui vient.
Je vous remercie de cette précision mais j'ajoute que nous ne pourrions certainement pas faire notre travail efficacement sans votre aide.
À votre avis, quelles mesures doivent être prises si un gouvernement est sur le point de privatiser une société d'État? Quelles sont les mesures de diligence raisonnable ou les consultations qu'il faut entreprendre, et auriez-vous un rôle à jouer avant la prise de décision?
Comme vous l'avez dit, il y a évidemment un certain nombre de mesures de diligence raisonnable qui s'imposent. Tout d'abord, bien sûr, il faut faire une analyse des options. Il faut aussi effectuer une très bonne évaluation de l'entité considérée car le prix final découle toujours d'un processus de négociation, ce qui suppose que le gouvernement a une très bonne idée de ce que vaut l'entité.
Comme dans toute négociation, il faut déterminer les concessions qu'on est prêt à faire. Quelle en est la valeur? Quelles ententes ou quels engagements à long terme devront être obtenus? Comment va-t-on protéger les biens publics dans ce contexte, s'il y en a? Comment va-t-on protéger la sécurité publique? Toute société d'État joue, ou devrait jouer, un rôle d'intérêt public. Comment va-t-on gérer cet aspect? Il ne s'agit pas simplement de vendre les actifs ou l'entreprise, il s'agit aussi de tenir compte des éléments reliés aux politiques publiques. Ensuite, il faut avoir de très bons négociateurs, capables de comprendre les aspects commerciaux de l'opération.
Il est fort peu probable que nous ayons jamais quoi que ce soit à voir dans ce contexte, sauf peut-être si l'on nous demande d'exprimer un avis sur la manière dont la transaction se refléterait dans les comptes de l'État.
Dans ce cas, comment pouvons-nous assurer que toutes ces étapes sont respectées? Y a-t-il un système de contrôle et de vérification au sein d'un ministère, ou de votre Bureau? Sinon, notre seule possibilité est-elle d'examiner l'opération après-coup, alors que la décision a déjà été prise?
Évidemment, la décision de politique publique est cruciale dans ce contexte et nous n'exprimons jamais d'opinion sur les politiques publiques.
Nous avons effectué certaines études dans le passé lorsque certains biens publics ont été privatisés. Je sais que nous en avons fait une au sujet des aéroports, au sujet de Petro-Canada et, je crois, au sujet de Nav Canada aussi. Nous avons donc examiné un certain nombre de privatisations dans les années 90 afin de voir comment elles avaient été gérées et quelles leçons on pouvait en tirer.
Donc, nous n'avons pas la possibilité de demander à un service comme le vôtre de faire une vérification du processus pour garantir que tous les facteurs que vous avez mentionnés sont pris en compte : les politiques publiques, l'intérêt public, et la prudence des hypothèses financières formulées avant la vente.
Je sais que, dans certains cas, comme l'octroi de contrats, par exemple, des contrôleurs d'équité ou des experts de cette nature ont un rôle à jouer. Je suppose que cela pourrait aussi s'appliquer à ce genre de transaction mais je pense que tout dépend réellement de la qualité des gens qui s'en occupent. S'il y a une équipe de négociation, ce sont vraiment la qualité, l'expertise et les connaissances des membres de l'équipe qui jouent un rôle crucial dans le succès de la transaction.
Merci, monsieur Alghabra.
Madame DeBellefeuille, avez-vous des questions à poser? Prenez simplement deux minutes, et je laisserai les deux dernières minutes à M. Allen.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je vais poursuivre notre discussion entamée plus tôt, madame Fraser. Vous avez dit ne pas avoir l'expertise pour porter un jugement sur les contrats qu'Énergie atomique du Canada a signés avec MDS Nordion.
Si, en tant que vérificatrice, vous n'avez pas les outils nécessaires pour procéder à une vérification et que vous vous en remettez à Énergie atomique du Canada pour ce faire, cela ne revient-il pas à faire confiance au loup dans la bergerie? Celui qui demande de l'argent au gouvernement et aux contribuables pour poursuivre une étude est le même qui affirme que les projets sont viables.
Vous dites que comme vérificatrice, vous n'avez pas l'expertise pour évaluer ces contrats. Dans ce cas, serait-il plus sage, à l'avenir, d'exiger que des projets d'une telle envergure et comportant des risques financiers soient confiés à des experts indépendants afin que le gouvernement et la société d'État puissent prendre une décision dans l'intérêt des contribuables?
Je pourrais peut-être clarifier certaines choses. Par exemple, au paragraphe 6 de l'examen spécial, on précise ne pas avoir fait d'évaluation technique de la sécurité et de la sûreté des installations parce que cette évaluation est assumée par l'agence de réglementation de la commission. On se fie donc à l'évaluation d'une tierce partie indépendante de la corporation.
Ces gens ont dit être satisfaits à certains égards, et on se fie à eux. Par exemple, en ce qui concerne la question de la gestion des déchets, ils avaient approuvé le plan. Nous ne voulions pas nous mettre à vérifier tout ça parce que nous ne sommes pas des experts en matière de déchets nucléaires. Pour ce qui est du projet MAPLE, ils ont dit que la compagnie n'avait pas respecté leurs exigences et qu'ils n'étaient pas satisfaits. On se fie à eux, et dans le cadre de discussions avec la corporation, on essaie de voir quelle est la gravité de la situation. Quoi qu'il en soit, nous ne faisons pas nous-mêmes à une autre évaluation technique des installations.
[Traduction]
Merci, monsieur le président. Merci, madame Fraser, d'être ici.
Ma question sera relativement brève mais je ne sais pas si la réponse le sera aussi.
Je voudrais envisager le problème du point de vue plus global des politiques publiques. Ma question est reliée aux sociétés d'État et aux décisions qu'elles prennent.
En ce qui concerne EACL, nous avons vu au moins deux projets de ce genre s'embourber, dont les MAPLE. Globalement, quel genre de mécanisme de gestion du risque y a-t-il dans ces sociétés d'État pour que nous sachions... Ou que pouvons-nous mettre en place pour réduire le risque que des sociétés d'État signent ce genre de contrat quand il s'agit d'une nouvelle technologie comme celle-ci? Que devrions-nous faire mieux?
Évidemment, nous parlons ici de projets qui comportent certains risques, et beaucoup de sociétés d'État oeuvrent dans des domaines qui comportent des risques — les ministères aussi, d'ailleurs. C'est un facteur inhérent à toute activité et on peut pas dire non plus qu'on n'entreprendra que des projets qui ne comportent aucun risque.
Je voudrais revenir aux principes de base, surtout pour les sociétés d'État, c'est-à-dire à la composition des conseils d'administration, à l'expertise des administrateurs et à la possibilité qu'ils ont de faire appel à des experts externes pour les aider à évaluer ce que leur disent les gestionnaires. Il s'agit aussi du genre de supervision exercée, de l'excellence des pratiques de gestion des projets de construction ou d'aménagement, de la réalisation périodique d'examens indépendants, ce qui pourrait prendre la forme de vérifications internes — il n'est pas absolument indispensable que ce soient des vérifications externes — des informations fournies au conseil d'administration et au gouvernement.
Voilà certaines des choses qu'on peut faire, avec aussi, je pense, tout simplement une bonne évaluation régulière de la gestion du risque. Il existe beaucoup de processus standard dans ce domaine et, en fait, le gouvernement s'est doté d'une assez bonne politique sur la gestion du risque. Cela ne veut pas nécessairement dire qu'il n'y aura jamais de projets qui déraperont et qu'on trouvera toujours des solutions, ce qui n'est peut-être pas possible.
Merci, madame Fraser, et merci monsieur Allen.
Nous devons mettre fin à la séance pour aller voter. Merci beaucoup, madame Fraser et monsieur Plouffe, d'être venus aujourd'hui. Veuillez m'excuser pour cette interruption mais, comme vous le savez, nous ne pouvons pas tout contrôler, ici.
Merci beaucoup. Je suppose que nous n'aurons pas le temps de revenir après le vote. Si quelqu'un a des questions à poser au sujet des prochains témoins, veuillez les communiquer au greffier ou me téléphoner et nous en parlerons. J'espérais avoir le temps d'en parler aujourd'hui mais ce ne sera pas possible.
La séance est levée.