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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 042 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er décembre 2009

[Enregistrement électronique]

(0905)

[Français]

    Bonjour à tous et bienvenue au sein du Comité permanent de la défense nationale. Il s'agit de la 42e séance. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous allons procéder à une étude de la stratégie de recrutement et de maintien de l'effectif des Forces armées canadiennes.
    Nous sommes heureux de vous accueillir. Nous recevons deux témoins aujourd'hui, le major-général Frédéric Mariage et le colonel Marcel Belleau. Je vous remercie d'être avec nous. Je vais vous laisser la parole pour une période de 10 minutes, et les députés pourront ensuite discuter avec vous.

[Traduction]

    Monsieur le président, nous tenons à vous remercier, vous et les membres du comité, de nous donner ainsi l'occasion de comparaître devant vous.
    Je suis le major-général à la retraite Frédéric Mariage. Je me considère fièrement comme étant un citoyen-soldat. Rappelez-vous de cette appellation, « citoyen-soldat », car cela symbolise le principal motif de notre présence ici aujourd'hui.
    Dans ma carrière civile, j'ai occupé différents postes de cadre chez MacMillan Bloedel, une société forestière de Vancouver. J'ai également été président, PDG et actionnaire de Bois Degro, à Montréal.
    Avant ma retraite de l'armée, j'ai occupé le poste de chef des réserves de 1990 à 1993, et j'ai terminé ma carrière militaire en tant que colonel commandant du corps d'infanterie, le premier réserviste à être nommé à ce poste.
    Je vais maintenant inviter mon distingué collègue à se présenter à vous.
    Je suis le colonel Marcel Belleau. J'ai moi aussi été pendant longtemps citoyen-soldat. J'ai eu l'honneur de commander une unité prestigieuse, le Régiment de la Chaudière, ainsi que le district numéro trois de la milice au Québec.
    Dans ma vie civile, j'ai fait carrière dans le monde universitaire, principalement en administration. J'ai été vice-directeur de l'Université du Québec à Montréal, ainsi que chercheur en études stratégiques.
    Contrairement à ce que d'aucuns pourraient croire, nous ne sommes pas des retraités en mal du port de l'uniforme ou nostalgiques de nos expériences antérieures. Nous sommes des individus qui avons entrepris comme mission de défendre et de promouvoir les intérêts des forces armées en général et, plus particulièrement, les intérêts et les valeurs des citoyens-soldats et des unités de la Réserve des Forces terrestres, aussi appelée la milice.

[Français]

    Qui sommes-nous et que représentons-nous? Nous représentons un nombre important d'anciens officiers supérieurs du Québec: 12 officiers généraux et 65 colonels regroupés dans une association sous l'appellation de Réserve 2000 Québec, ainsi que Reserves 2000 pour nos confrères du Canada anglais qui ne sont malheureusement pas présents aujourd'hui, compte tenu du court préavis avant de comparaître.

[Traduction]

    Nous vivons les mêmes problèmes, et ils regrettent de ne pas avoir pu être ici pour exprimer leurs préoccupations.
    Pourquoi avons-nous demandé à comparaître? La milice et ses citoyens-soldats sont une espèce en péril, les réservistes devenant de plus en plus des soldats-citoyens. L'armée, la force terrestre, travaille au-delà de ses capacités. Cette situation nous a été confirmée dans un rapport intitulé « Strategic Operations and Resource Plan 2008-09 » remis par le chef d'état-major de l'Armée de terre au chef d'état-major des Forces canadiennes.
    Plus particulièrement, il y a une grave pénurie de personnel capable de servir dans l'infanterie. Cela a clairement été exposé dans un article du professeur Granatstein, paru le 20 novembre 2009 dans le Globe and Mail:
Les neuf bataillons de l'infanterie de l'Armée de terre manquent sérieusement de personnel, et certains adjudants sont déjà allés à Kandahar trois ou quatre fois et guettent encore une autre rotation là-bas.
    L'expédition en Afghanistan exerce une ponction sur la somme des ressources disponibles. Avec 60 000 soldats réguliers dans l'armée, la marine et la force aérienne, nous avons déjà bien du mal à maintenir 2 800 hommes et femmes à l'étranger. Et ce total comporte 20 à 25 p. 100 de réservistes.

[Français]

    Les autorités militaires ainsi que le ministère de la Défense nationale ont une méconnaissance de la culture et de l'histoire de la Milice et leurs politiques peuvent contribuer à faire disparaître cette institution. S'ils en sont conscients, ils ne le démontrent pas par leurs actions.

[Traduction]

    Les unités de la milice se font grever et priver de leurs leaders, qui servent à temps plein dans une classe de service différente. Plus du tiers des miliciens rémunérés servent dans cette classe, et ils ne sont pas disponibles pour la formation avec leurs unités respectives. Quant aux rôles confiés à la milice, il y a divergence de vues entre l'administration centrale et le milieu de la milice. Nous sommes devenus une source de main-d'oeuvre disponible dans l'immédiat pour boucher les trous et les lacunes en matière de dotation du côté de la Force régulière.
    Bien que ce rôle soit satisfaisant pour les miliciens ainsi employés, la façon dont les choses se passent est très insidieuse. Elle a un effet très insidieux, écartant lentement mais sûrement le milicien de son rôle premier, celui de servir en tant que citoyen-soldat et non pas en tant que soldat-citoyen. Ce rôle est le seul qui reçoive presque toute l'attention. Il est le seul et unique rôle que les autorités prennent au sérieux.
    La milice est traitée comme étant une source de main-d'oeuvre bon marché, 30 p. 100 de l'effectif total de la réserve travaillant en ce moment à temps plein. En conséquence, le seul rôle que l'on semble traiter un peu sérieusement est celui de renfort individuel. L'effectif de la réserve des forces terrestres est d'environ 20 000. Chaque année, près de 20 p. 100 des membres quittent la force pour diverses raisons. Quelque 3 500 soldats doivent par ailleurs chaque année recevoir de la formation de base, ce qui requiert des instructeurs — qui, la plupart du temps, ne sont pas disponibles —, ce qui nous laisse 12 000 personnes formées, mais il faut alors tenir compte des membres non disponibles et déjà déployés à l'étranger.
    Les unités de la milice ne peuvent pas se reconstituer du fait de l'exode des leaders. Nous nous retrouvons ainsi avec des unités de la milice ne pouvant pas se reconstituer et incapables de faire face à une crise nationale. Aujourd'hui, elles seraient incapables de réagir à une urgence nationale ou à un appel pour venir en aide à des autorités civiles, par opposition à la réaction nationale et on ne peut plus précieuse à la tempête de verglas de 1998 au Québec.
    Ce qui est alarmant est que le milicien est rapidement en train de perdre son statut de citoyen-soldat, et il est maintenant quasi impossible de faire une carrière civile tout en étant actif au sein de la milice. Demander à un milicien de conserver les mêmes niveaux de compétence que le membre de la force régulière s'il se porte volontaire pour un déploiement à l'étranger est une nécessité que l'on peut comprendre, mais lorsque cela est appliqué à tous les réservistes, alors l'on ne tient plus compte de la logique du statut du milicien en tant que citoyen-soldat.
(0910)

[Français]

    Comme ancien militaire, cette situation est inquiétante. Les niveaux de qualification de la Force régulière, qui souvent relèvent de la surqualification, ne sont pas nécessaires pour le milicien et produisent à plus ou moins long terme un effet négatif sur la capacité de la Milice à générer sa propre relève.
    Le système actuel favorise souvent le décrochage scolaire, les school dropouts, et s'adresse particulièrement aux personnes sans emploi. Cette situation peut amener la disparition de l'institution Milice, institution qui servit de base à la participation de plus d'un million de Canadiens durant le second conflit mondial, alors qu'avant ce conflit, les Forces canadiennes armées et régulières avaient un effectif de moins de 4 000 personnes.

[Traduction]

    La participation à la milice de personnes ambitieuses et talentueuses a beaucoup aidé notre pays. Des personnalités bien connues du monde de la politique et de la fonction publique, des éducateurs, des membres des professions libérales, notamment des avocats, des juges, des comptables et des médecins, ainsi qu'un nombre infini de citoyens exerçant différents métiers ont fait d'énormes contributions à leurs régiments et ont, en retour, reçu une formation qui a sensiblement contribué à leur réussite et à l'avancement de leur carrière. Mais cette époque est révolue, et le citoyen-soldat est devenu le soldat-citoyen.
    Au départ, dans le contexte d'une force totale, les rôles confiés à la milice des forces terrestres étaient de demeurer une source de base pour la mobilisation nationale, de renforcer et de soutenir la force régulière, de servir de pont ou de lien important entre les communautés militaire et civile, et de mener des opérations au pays à l'appui des autorités et des pouvoirs civils. À l'heure actuelle le seul rôle parmi cette liste qui soit prise au sérieux est le deuxième: soit renforcer et soutenir la force régulière.
(0915)

[Français]

    L'effet pervers de cette situation est qu'elle contribue à éloigner lentement et sûrement le milicien de son rôle primaire qui est de servir à titre de citoyen-soldat à la défense territoriale, de maintenir le lien avec la communauté dans laquelle vivent ses membres et, ultimement, de servir de base à une éventuelle génération de forces à l'échelle nationale.
    Les problèmes auxquels font face les miliciens, aujourd'hui, sont nombreux et complexes. La structure est établie en fonction de personnel régulier. Les rôles de la Milice ne sont pas clairs, et le système de recrutement est complètement inefficace. Nous avons des délais de recrutement qui varient de quatre semaines à huit mois.
    Il y a un manque d'effectif chronique dans la Milice. Les niveaux de formation exigés sont irréalistes. Les miliciens sont la cible principale d'éventuelles coupes de budgets, ce qui est le cas aujourd'hui avec le déficit que nous connaissons. De plus, ils ne profitent pas d'une protection adéquate malgré les recommandations de l'ombudsman.
    Vous avez encore une minute, général.

[Traduction]

    L'objectif que nous visons est de veiller à ce que tous les éléments de la force totale, force régulière et réserve comprises, possèdent les moyens de bien remplir leurs rôles respectifs, sans servir simplement de solution temporaire ou de bouche-trou pour ce qui manque chez l'autre.
    À cet égard, nous recommandons au ministre de former un groupe de travail spécial composé de trois membres des Réserves 2000 (Canada anglais), trois membres des Réserves 2000 Québec, et trois membres de l'administration centrale de l'Armée/Forces terrestres.
    Nous recommandons que ce groupe de travail fasse au ministre des recommandations sur les questions suivantes, dans les 90 jours suivant sa création: que le comité permanent ici réuni entreprenne une analyse de la structure et confirmation des rôles premiers de la milice et effectue un examen du système de recrutement, de sélection et d'enrôlement; que l'on examine le niveau des membres autorisés et rémunérés au sein des unités de la milice; que l'on examine les exigences de formation maximales qui correspondent à la disponibilité de miliciens et de réservistes, tout en sauvegardant leur statut de citoyens-soldats; que l'on examine les mesures de sauvegarde et garanties pour les miliciens et réservistes servant aux termes de divers contrats de service; et que l'on examine les mesures de sauvegarde visant à stabiliser la structure de base et le leadership au sein des unités de la milice.
    Nous vous demandons de garder à l'esprit le fait que cette situation n'est pas exclusive au Québec, mais vaut pour le pays tout entier.

[Français]

    Merci de votre attention. Nous sommes prêts à répondre à vos questions, si tel est votre désir.
    Je vous remercie de votre présentation.
    Nous allons céder la parole à M. Dosanjh.

[Traduction]

    Merci. Mes excuses pour mon léger retard.
    Monsieur, je sais qu'à la fin de votre rapport vous avez recommandé l'établissement d'un comité. Advenant qu'un tel comité ne soit pas créé, ou que son établissement demande très longtemps, j'ai une question très simple pour vous. Quelles sont les trois principales choses que vous aimeriez voir changer, et quelles ressources, en dollars, ces choses exigeraient-elles?
    Les ressources, en dollars, font partie de la question plus vaste. Quant aux deux choses que nous voudrions, premièrement, notre point de départ est que ce système de milice existe depuis la fondation même de ce pays. Il a évolué au fil des ans, nous servant bien pendant la Première Guerre mondiale et la Seconde Guerre mondiale, comme je l'ai mentionné, sur le plan de la mobilisation, un million de Canadiens servant de l'autre côté de l'Atlantique alors que la force totale comptait 4 000 hommes.
    Ce système est fondé sur un système régimentaire à l'intérieur duquel les gens sont très proches de leur communauté, et cela permet aux civils de participer aux forces armées en servant en tant que citoyens-soldats. Ce système est aujourd'hui sérieusement en danger et il en est arrivé à un point où il vous faut, en tant que politiciens, prendre une décision.
    La décision est celle de savoir s'il nous faut maintenir la milice comme elle devrait exister, avec certaines attributions et charges, ou bien si nous voulons simplement un bassin de réservistes pour servir dans les forces armées lorsqu'ils sont disponibles. Si c'était là la décision des politiciens, nous n'aurions pas besoin de la milice. Nous n'aurions pas besoin du régiment. Nous n'aurions pas besoin de la présence du Canada dans les collectivités rurales de tout le pays. Tout ce qu'il nous faudrait, c'est un gros entrepôt auquel on enverrait des instructeurs et des personnes à former, pour ensuite leur dire, très bien, lorsque nous aurons besoin de vous, nous vous le dirons. Les gars de mon âge parlent de service de suppléance. Lorsque j'avais besoin d'une secrétaire parce que la mienne était malade, j'appelais le service de dépannage et je demandais une secrétaire.
    Il vous faut donc décider de cela. Si vous me demandez ce que nous voudrions tout de suite, c'est à vous, en tant que politiques, de donner l'orientation au MDN et aux militaires et de dire, un instant, il nous faut protéger cette institution, ou alors vous décidez de dire non, merci.
(0920)
    D'après ce que je comprends de ce que vous avez dit — et je suis arrivé un petit peu en retard —, vous souhaiteriez que l'institution soit protégée.
    Nous recommandons qu'elle soit protégée. C'est là notre ferme recommandation, car cette institution a fait beaucoup pour le pays. Je pourrais vous donner le nom de personnes qui sont passées par ce système, des personnes que vous connaissez. Y sont passés des premiers ministres, des juges de la Cour suprême, des gens d'affaires, des avocats. Au Québec, le directeur des poursuites criminelles et pénales est un réserviste et il me disait, car je le connais personnellement, « Si je n'avais pas eu cette formation dans la réserve, je ne serais pas en mesure de faire le travail que je fais aujourd'hui ».
    Nous recommandons donc fermement que cette institution continue de survivre, mais ce n'est pas à nous de décider. C'est à vous qu'il revient de décider de cela.
    Merci.

[Français]

    Merci.
    Monsieur Bachand.
    Bienvenue, mon général et mon colonel.
    J'ai eu le plaisir d'assister à un dîner régimentaire chez les Fusiliers Mont-Royal. D'ailleurs, j'ai reconnu la cravate des Fusiliers Mont-Royal dont mon père faisait partie. J'ai eu beaucoup de plaisir à votre dîner.
    Toutefois, la situation que vous soumettez m'inquiète un peu. Je ne pensais pas que cela se dégradait à ce point. Si je vous comprends bien, le seul rôle qu'on voudrait actuellement voir dévolu à la Milice est le rôle de réserve pour la Force régulière. C'est à peu près uniquement ce que le ministère veut en faire.
    Je comprends qu'au cours de l'histoire, la Milice, au Québec comme ailleurs, c'était autre chose. C'était la proximité avec les autorités civiles. En cas de désastre, une équipe de réponse extrêmement rapide peut intervenir. D'ailleurs, je peux en témoigner moi-même, parce que j'étais à l'intérieur du « triangle noir » lorsque la tempête de verglas s'est abattue sur Saint-Jean, Granby et Saint-Hyacinthe. Aussitôt que les choses ont mal tourné, on a vu arriver en premier les forces réservistes.
    Donc, vous nous dites qu'il y a un changement de philosophie au ministère. Ce changement découlerait d'un document intitulé Strategic Corporations and Ressource Plan, remis par le chef d'état-major de l'armée de terre. C'est donc du général Leslie que vous parlez?
    Je veux simplement apporter une correction. Je n'ai pas lu le document au complet. L'article écrit par des journalistes était intitulé « Les Forces canadiennes, une “armée fantôme“ ». Le général Leslie disait qu'il n'avait pas les effectifs pour pouvoir mener à bien toutes les opérations et toutes les missions qu'on lui confiait. Bien entendu, à cause d'une carence d'effectifs au sein de l'armée régulière, le général Leslie s'est débrouillé en disant qu'il allait utiliser des réservistes.
    Il l'a fait au détriment des autres fonctions qui normalement...
    Il considère ses besoins immédiats, ses besoins de renfort pour ses missions. Je comprends le général Leslie et j'imagine qu'il n'a pas d'autre choix. Nous disons qu'avec ces politiques et tout le système de formation, de recrutement et d'avancement en place dans la Réserve, il agit en fonction de ses besoins. Cela ne date pas juste de la mission en Afghanistan, cela a commencé avec la Bosnie en 1995. C'est donc quelque chose qui se perpétue.
    La Milice est devenue ce qu'on appelle un « club-école » de l'armée régulière. Ce faisant, cela a un impact très pervers sur les régiments et sur les citoyens qui peuvent se joindre à ce système.
(0925)
    Cela pourrait-il aller plus loin en changeant, par exemple, la structure de commandement?
    Auparavant, c'était dirigé par des miliciens dans des secteurs et des districts. Maintenant, on me dit qu'un brigadier-général de la Force régulière commande et que c'est divisé en brigades. Cela démontre encore davantage qu'on s'éloigne du concept de citoyen-soldat.
    La structure de commandement a été changée. À l'époque où l'on a établi ce qu'on a appelé le concept de la « force totale » il y avait les deux éléments. La Milice était dirigée par la Milice et répondait au commandant de l'armée. Au départ, ces deux éléments devaient se compléter et travailler conjointement.
    Maintenant, vous savez comment cela fonctionne dans les Forces armées. Le commandant est membre de la Force régulière et les miliciens sont placés sous son autorité. C'est lui le patron, et il décide et fait ce qu'il veut. Il y a de moins en moins de contribution de la Réserve et de la Milice en ce qui a trait aux décisions à prendre.
    Il y a tout un phénomène d'entraînement sur le recrutement, la formation et le niveau d'effectifs. Tout est interrelié et le système en souffre parce qu'il est de plus en plus centré sur les besoins et la façon de gérer de l'armée régulière. Vous ne pouvez pas gérer un système de citoyens-soldats en utilisant le système qui est utilisé pour la Force régulière en ce qui a trait à la formation, la durée des cours et la programmation des cours pendant l'année. Il faut que vous connaissiez votre clientèle et sachiez comment vous pouvez vous accommoder de cette clientèle. On fait l'inverse. Par exemple, on dit à la clientèle que les cours se tiennent à telle date. Le réserviste essaie donc de se libérer pour pouvoir y assister. Ensuite, on annule le cours pour toutes sortes de raisons. Les vacances avaient été prévues en fonction d'une certaine date, mais ça ne fonctionne pas. C'est retardé d'un an ou deux, etc. Il y a donc tout un effet d'entraînement.
    Cela nuit face aux employeurs qui, normalement, font des efforts pour libérer les gens. Si l'employeur fait un effort et que l'employé revienne en disant qu'il doit plutôt faire autre chose à cause d'évènements extérieurs, cela rend les choses plus difficiles avec les employeurs.
    On semble pousser encore plus loin l'odieux, selon moi. On a de la correspondance qui indique que les réservistes à temps plein vont perdre leur salaire et leurs avantages entre le 1er janvier et le 1er avril, en rotation. Discutez-vous de cela à l'intérieur de vos rangs?
     Cela m'apparaît odieux aussi parce qu'on ne va pas faire cela pour la Force régulière, mais pour des gens qui donnaient leur temps et qui étaient payés. On profite de l'occasion pour leur dire que c'est bien dommage, mais que, pendant un mois, il n'y aura plus d'avantages ni de salaire.
    Quelle est la réaction des réservistes à temps plein?
    Il y en a plusieurs. Lorsque l'ordre d'effectuer des coupes est donné, la première institution touchée est la Réserve. Au fil des ans, compte tenu des besoins de l'armée, de 50 à 60 p. 100 du personnel cadre, officiers et sous-officiers de la Milice, ont été engagés sous ce qu'on appelle des « classes de service ». On a besoin de quelqu'un pour occuper telle position, on offre un service de classe B qui est rémunéré dans une proportion d'environ 85 p. 100 du traitement fixe, et la personne occupe telle fonction dans l'état-major ou encore on lui dit qu'on a besoin d'elle comme instructeur. On ne parle pas de l'Afghanistan mais de service local. Donc, c'est la classe B.
    Parmi les miliciens, on retrouve des personnes qui sont en place depuis 10 ans, et leur contrat est renouvelé chaque année. Vous en avez d'autres qui le sont depuis un, deux ou trois ans. Ce sont des personnes qui, pour la plupart, étaient au chômage ou qui, malgré des fonctions professionnelles peut-être très louables, avaient avantage à se joindre à ce système, car la rémunération était nettement supérieure. Maintenant, en cas de coupe de budget, on commence par abolir ces postes. C'est un des problèmes.
(0930)
    Pourriez-vous conclure en 30 secondes?
    Ces personnes qui en toute bonne foi ont signé un contrat il y a environ un ou deux ans, par exemple, se font dire que malheureusement elles n'ont plus d'emploi et qu'elles doivent partir. Cela crée une certaine pression sur elles et sur leur famille.
    Il y a d'autres coupes: on réduit, au sein des unités, les jours qu'on appelle « de classe A » où les réservistes sont payés pour s'entraîner une ou deux fins de semaine, le soir, etc. On réduit le nombre de ces jours de trois et demi ou quatre jours durant l'année financière. Ainsi, prenez le cas d'un étudiant qui s'engage dans la Milice, qui a décidé de s'enrôler pour payer ses études. Il a tout planifié, il a estimé qu'il allait travailler un tel nombre de jours, que ça lui rapporterait tant d'argent et que ça lui permettrait de payer ceci et cela.
    Il vous reste encore 15 secondes, mon général.
    Tout d'un coup, on arrive au mois de décembre et il ne peut plus compter sur ses quatre jours, donc on le pénalise aussi.
    Merci. À présent, je vais donner la parole à M. Harris.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Merci, général Mariage et colonel Belleau, d'être venus. Je tiens vraiment à vous remercier de m'avoir éclairé, au moins en ce qui concerne ce problème. Chez nous, à Terre-Neuve-et-Labrador, nous avons, bien sûr, le Royal Newfoundland Regiment, qui a vu le jour en tant que milice il y a de cela plus de 200 ans et qui a servi comme unité lors de la Première Guerre mondiale. Il s'agit d'une organisation très respectée.
    Puis-je vous demander si vous pensez si ce qui est arrivé à la place qui revient à la réserve a été délibéré, en ce sens qu'il s'agit d'un changement philosophique mis en oeuvre sans que quiconque s'attaque réellement à toute la question de savoir s'il nous faut des citoyens-soldats à proprement parler et s'ils devraient le demeurer, ou bien si ce changement est le fait d'une nécessité?
    Nous savons ce qu'a dit le général Leslie et ce qui est peut-être, à notre sens, une ambition exagérée, ou une plus large mainmise des Forces canadiennes, surtout en Afghanistan. Est-ce par nécessité que cela est arrivé, ou bien était-ce délibéré? Cela requiert-il un changement philosophique et peut-être un examen de ce dont vous discutez ici?
    Pourriez-vous faire quelque commentaire là-dessus?
    Il s'agit là d'une observation personnelle. Je pense que c'est une combinaison des deux choses. Oui, il y a la nécessité, mais, au sein du ministère, il y a également une philosophie voulant que l'on n'ait pas besoin du système, qu'il est trop coûteux, qu'il est inefficace. D'autre part, les personnes qui ont pris la décision ont passé le gros de leur carrière à servir avec l'armée américaine, qui a un système complètement différent de l'armée canadienne. C'est là une observation personnelle.
    Pour répondre à votre question, c'est une combinaison des deux. Il y a eu, et il continue d'y avoir, des études sur la réduction de la réserve et la fusion d'unités. D'aucuns diraient que ce n'a pas été le cas, mais nous avons vu des documents dans lesquels il est question de ce genre de chose.
    Si vous permettez que je fasse le commentaire suivant, je ne pense pas que la chose ait été présentée aux Canadiens comme relevant d'un choix philosophique. Je n'étais en tout cas pour ma part pas au courant de ce changement philosophique qui s'opère. Je vous remercie tous les deux d'être venus et de nous en avoir entretenus.
    Colonel, auriez-vous quelque chose à dire?
    Si je peux ajouter quelque chose, nous ne nous opposons pas à ce que les réservistes servent à temps plein, car il est une des missions, un des objets de la milice ou de la réserve, d'être une réserve pour la force régulière. Je ne m'oppose pas à cela. Il est tout à fait normal que certains réservistes soient versés à des opérations à l'étranger ou servent ici au Canada à temps plein, mais c'est une question de proportion et de durée.
    En ce qui concerne l'aspect proportion, si vous avez un trop grand nombre de réservistes qui servent à temps plein, ceux à l'extérieur de leurs unités... Ils ne vont pas à l'unité, ils sont à l'extérieur. Nous avons l'exemple d'une unité qui compte 24 officiers. Si vous regardez l'effectif de l'unité, il comprend 24 officiers. Eh bien, c'est une bonne chose, alors de quoi vous plaindriez-vous? Mais 14 de ces officiers viennent de l'extérieur de l'unité, alors il n'y en a en fait que 10 qui en font vraiment partie. Voilà ce que nous disons, c'est-à-dire que la proportion est trop élevée.
    Parfois également la durée est trop longue, car si vous avez un soldat qui est, mettons, capitaine, sergent ou autre, et qu'il a servi à temps plein pendant deux, trois, quatre, cinq ou 10 ans, il aura bien de la difficulté à se trouver un emploi dans le civil lorsque son contrat sera terminé, ou à retourner aux études, car il aura touché 65 000 $, 70 000 $ ou 80 000 $ par an. Comment fera-t-il après coup pour vivre comme un simple étudiant?
    C'est donc une question de proportion et de durée.
(0935)
    Et lorsque le contrat de ce réserviste sera terminé, il est peu probable qu'il retourne à l'unité. Il ne va pas réintégrer son unité de service en tant que soldat de classe A à temps partiel, car il aura travaillé à temps plein. Il aura principalement été considéré comme un membre à temps plein.
    Je devine que le temps dont je disposais est écoulé.
    Il vous reste encore une minute.
    Bien, j'ai encore une question.
    Dans la structure de commandement, l'ancienne structure était telle que les réservistes prenaient leurs ordres d'un général des réserves, mais, aujourd'hui, cela relève du Commandement de la Force terrestre ou du Commandement Canada ou... Dites-moi ce qu'il en est.
    Dans l'ancienne structure, il y avait, si vous vous en souvenez, ce que l'on appelait la Force mobile. Cela était d'ailleurs l'équivalent de l'actuel Commandement de la Force terrestre. Le pays était divisé en secteurs, et ces secteurs relevaient du commandement d'un brigadier des réserves. Celui-ci avait un personnel permanent et ainsi de suite.
    Aujourd'hui, tout relève du Commandement de la Force terrestre, ce qui est bien, mais il n'y a plus de structure pour les réservistes au-dessus de la brigade. Voilà. Par exemple, dans une province comme le Québec — et je parle ici du secteur de l'Est —, il y a un brigadier-général qui est responsable de toutes les forces armées dans la zone, la force régulière et la force de réserve. Ce n'est pas un gros problème en tant que tel, mais cela écarte les réserves de la structure locale.
    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Hawn.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, messieurs, d'être venus. Je vous serais reconnaissant de me donner des réponses brèves, si possible. J'ai pas mal de territoire à couvrir.
    Personne ne remettrais jamais en question l'importance de la milice et des réserves dans l'histoire militaire canadienne. Cela est clair. Pendant la Seconde Guerre mondiale, comme vous l'avez mentionné, nous avons eu une armée, une marine, et une force aérienne d'un million.
    Serait-il juste de dire qu'il serait un peu plus facile d'avoir des unités de réserve autonomes dans une armée d'un million que dans le cadre de Forces canadiennes ayant un effectif de 65 000?
    La logique pour moi est qu'il vous faut davantage de miliciens que de membres de la force régulière.
    Oui, dans une armée d'un million. Clairement.
    Il y a plusieurs choses ici. Vous avez mentionné que pendant la Seconde Guerre mondiale, les miliciens et les réservistes ont servi de base pour le service en temps de guerre. Le Canada est en guerre à l'heure actuelle. Pourquoi la situation d'aujourd'hui serait-elle différente de celle de la Seconde Guerre mondiale?
    Pendant la Seconde Guerre mondiale, il y a eu mobilisation, et des Canadiens ont été mobilisés pour être envoyés à l'étranger, pour se préparer à une éventuelle évasion, et ainsi de suite. Aujourd'hui, nous demandons des remplacements individuels, non pas en vue d'un déploiement en tant qu'unité, comme cela a été le cas pendant...
    En Bosnie, nous avons là aussi déployé des individus d'unités de réserve auprès de la force régulière. Nous avons évolué, passant d'une armée d'un million à une armée de 65 000 soldats. Nous avons évolué de conflits de l'échelle de ceux de la Seconde Guerre mondiale à des conflits de l'envergure de ceux en Bosnie et en Afghanistan. Je vous dirais qu'il y a là toute une différence sur le plan échelle et relativité.
    Diriez-vous que l'expérience acquise par les réservistes en Afghanistan, en Bosnie ou n'importe où ailleurs, lorsqu'ils réintègrent leur unité, est un précieux avantage pour l'unité qui les reçoit?
    Oui, mais la plupart d'entre eux ne retournent pas dans l'unité.
    Eh bien, je ne sais pas quels sont les chiffres et si vous disposez de chiffres précis en la matière ou non. Nous parlons du citoyen-soldat qui est en train de devenir un soldat-citoyen. Je vous dirais qu'en temps de guerre, ce n'est pas là une situation inhabituelle, car l'on prend aux unités des membres, surtout avec une force beaucoup plus petite, qui, par nécessité, deviennent des soldats davantage que des citoyens, dans les circonstances dont nous parlons. Est-ce juste ou non de dire cela?
(0940)

[Français]

    En principe, oui, mais j'aimerais faire remarquer, en tout respect, que nos Forces armées sont en guerre, mais que la population canadienne ne l'est pas. Par conséquent, le raisonnement qui s'appliquait dans le cas de la Seconde Guerre mondiale, en l'occurrence une guerre massive, est difficilement transposable dans la situation actuelle.
    Comme je le disais plus tôt et comme vous le dites également, l'expérience vécue par les réservistes qui participent à des opérations extérieures est très valable. C'est en effet une bonne chose qu'une partie d'entre eux y participent. Le problème est qu'à la fin de leur contrat, ils sont peu nombreux à réintégrer l'unité. Il y a également un problème de proportion, c'est-à-dire que les gens ayant quitté l'unité ne sont pas remplacés. L'unité perd donc ces effectifs. Or ce sont généralement les gens les plus qualifiés qui participent à ces opérations.
    Vous vous privez donc d'instructeurs.

[Traduction]

    Les Forces canadiennes, je dirais, sont confrontées au même défi, celui du recrutement et de la rétention. Il y a quelques différences, mais de manière générale, la situation n'est pas différente pour les réserves comparativement à la force régulière.
    Il vous faut examiner cela aussi pour avoir le tableau d'ensemble
    Où la force régulière devrait-elle obtenir du personnel pour servir et venir augmenter la force régulière dans le cas d'une mission comme celle en Afghanistan? Où trouverait-on ces soldats si on ne les puise pas dans les réserves?
    Pourquoi n'augmentez-vous pas la taille des forces armées régulières et des bataillons?
    Monsieur, c'est facile à dire, mais nous ne pouvons pas nous rendre chez Wal-Mart et prendre des soldats sur les étagères. Il faut les former. Conviendriez-vous que, que la personne soit réserviste ou membre de la force régulière, si elle va participer à une mission comme celle en Afghanistan, il lui faut avoir le même niveau de formation?
    Je suis d'accord avec vous, mais la personne doit alors consacrer du temps à sa formation avant un tel déploiement. C'est ainsi que vous prenez un milicien et que vous le gardez sous contrat pendant 18 mois. Vous le formez pendant sept ou huit mois. Si vous avez une recrue à St-Jean-sur-Richelieu qui est prête à se joindre à la force régulière, alors c'est possible.
    Ce que je suis en train de dire est que...
    Si une force ne suffit pas, où d'autre allons-nous chercher les ressources toutes prêtes dont nous avons besoin si ce n'est dans les réserves?
    C'est bien. C'est là l'une des missions des réserves, mais en faisant cela et seulement cela, vous êtes en train de tuer les réserves.
    Le Canada ne va pas être en guerre pour toujours.
    Cela fait déjà sept ans, soit plus longtemps que ce qu'a duré la Seconde Guerre mondiale.
    À un moment donné, ce sera terminé en Afghanistan. Je dirais qu'il importe de fixer des priorités. Vous faites ce que vous devez faire pour accomplir le travail.
    J'aimerais passer à un point que vous avez mentionné, et qui a également été soulevé par M. Bachand, concernant le fait que l'on coupe dans le personnel et que l'on coupe dans les budgets. Il n'y a pas eu de compressions budgétaires dans les réserves. Le simple fait est que, si un commandant de force de réserve dépense plus que ce que ne prévoit son budget, alors en décembre ou en janvier il y aura des conséquences à cela. Et je vous dirais que, dans certains cas — ceux dont il a un peu été question dans les médias —, le fait est que le commandant local de la force de réserve a dépassé son budget, pour quelque raison. Voilà pourquoi certaines personnes apprennent que leur emploi a été supprimé. Ce n'est pas qu'il y a des compressions budgétaires, c'est que le commandant a dépassé son budget.
    Je suis convaincu que vous disposez de certains renseignements qui sont exacts, mais ce que nous nous avons, conformément à ce qui a été ordonné par le conseil de l'armée, c'est que la classe A doit voir le nombre de jours de formation réduit de 3,5 à 4 jours.
    Pour ce qui est des budgets alloués aux réserves, il n'y a eu aucune réduction budgétaire devant être répartie, mais ce qu'a soulevé M. Bachand résulte directement du fait que les commandants dépassent leurs budgets, et lorsqu'on dépasse son budget, il y a à cela des conséquences. Il y a des conséquences pour moi et ma famille lorsque je dépasse mon budget.
    Je ne dispose pas de ces données. Je suis certain que vous êtes davantage à jour que nous nous le sommes, mais ce n'est pas là ce que nous disent les unités. Quoi qu'il en soit, je ne suis pas en train de contester cela.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Merci, monsieur Hawn.
    La parole est maintenant à M. Wilfert.
(0945)
    Merci, monsieur le président.
    Je m'excuse, messieurs, de ne pas avoir été ici au début. Je dis tout le temps que ma mère aurait voulu avoir des jumeaux, mais je n'existe qu'en un seul exemplaire.
    Premièrement, en ce qui concerne les Jeux olympiques de Vancouver-Whistler, je crois comprendre que les réservistes affectés à plein temps seront au nombre de 14 500. Cela correspond à plus de la moitié de la Force de réserve, censée être composée de soldats à temps partiel. L'effectif va donc être augmenté et ces soldats vont être disponibles 24 heures par jour, sept jours sur sept, au même titre que les membres des forces régulières.
    J'aurais deux questions. Premièrement, vous pourriez peut-être réagir à cette première déclaration: les régiments de la milice, au départ des unités de formation, sont largement devenus des fournisseurs de renforts pour les unités de la force régulière. Clairement, le rythme de la formation dans les unités a ralenti et celui de la production d'un plus grand nombre d'hommes et d'un plus grand nombre de femmes, surtout pour l'Afghanistan, s'est grandement accéléré. Vous pourriez peut-être réagir à cela.
    Mon deuxième commentaire est le suivant. Pensez-vous que les forces de réserve survivront à l'engagement en Afghanistan jusqu'à la fin de l'année 2011?
    Si nous prenons l'exemple des Jeux olympiques, il est tout à fait raisonnable d'estimer qu'il vous faudra pour cette activité particulière un certain nombre de réservistes disponibles à temps plein. Il s'agit là de l'un des rôles des réserves, soit mener des opérations sur le territoire national ou en tout cas y participer, mais, là encore, c'est une question de proportion et de durée.
    J'imagine que le chiffre de 14 000 réservistes employés à temps plein ne correspond pas aux seuls Jeux olympiques, mais ce sera le nombre d'employés à temps plein actifs dans tous les volets du fonctionnement de l'armée. Je ne sais pas où ils iront trouver 14 000 réservistes à temps plein, peut-être sur une étagère quelque part, mais j'imagine qu'il s'agit là du nombre total de réservistes à temps plein.
    Je ne sais pas non plus pendant quelle période ces personnes seront affectées à plein temps à cette opération aux Jeux olympiques. Si c'est pour une période d'un mois, de deux mois, de trois mois, je veux bien. Je suppose que les réserves peuvent faire cela.
    Vous avez également demandé si les réserves survivront à l'engagement en Afghanistan. J'imagine que oui, mais ce que nous tenons à souligner est que, pas seulement pour l'Afghanistan mais pour toutes les opérations devant être menées par le Canada, ou à l'intérieur du pays ou à l'extérieur, le fait d'utiliser un trop grand nombre de réservistes est en train de changer la philosophie de la milice. Ce que nous voulons souligner est que ce devrait être une décision prise par des représentants élus comme vous, et non pas dans les coulisses par le seul ministère de la Défense nationale ou l'état-major. C'est pourquoi nous avons voulu soulever la question devant vous, afin que vous soyez en mesure de prendre la bonne décision pour la population canadienne et que vous ne soyez pas confrontés à une situation dans laquelle vous n'en auriez pas entendu parler et où la décision vous serait parvenue par la porte arrière.
    En ce qui concerne les Jeux olympiques, ils éprouvent de sérieux problèmes pour ce qui est de combler tous les postes nécessaires. Ils ont également fait appel à une autre organisation, celle des commissionnaires, pour fournir du personnel qui serait employé par les forces armées pour aller à Vancouver et à Whistler pour les Jeux olympiques.
    En ce qui concerne l'Afghanistan, les unités sont en très mauvais état du fait que le cadre de leaders n'ait pas été disponible pendant des mois, voire des années. La succession des unités est un grave sujet de préoccupation et intervient également l'effectif autorisé par unité. Monsieur a dit qu'il n'y a pas eu de compressions budgétaires. Peut-être, mais je peux vous dire que le recrutement a été restreint. La plupart des unités ont un quota de 10 à 12 recrues.
    Si vous tenez compte du temps qu'il faut pour l'enrôlement, il est bien difficile de convaincre... C'est chose possible, mais cela exige énormément de dévouement et d'efforts pour convaincre ces personnes d'attendre d'obtenir une décision ou de savoir si elles peuvent s'enrôler ou non. Après cela, intervient le problème de veiller à ce qu'il y ait suffisamment d'argent pour payer ce à quoi ils auront à faire face en tant qu'étudiants.
    Le gros de la clientèle initiale est composé, au départ, d'étudiants.
(0950)
    Puis-je faire un rapide commentaire là-dessus? D'après ce que j'entends, les réservistes reviennent. Ils affichent un degré élevé de formation auprès de la force régulière. Ils reviennent. Ou ils rejoignent les rangs des soldats réguliers ou ils se retirent carrément de la vie militaire. Mais, pour revenir à la question du rythme plus lent dans les réserves... une fois que vous êtes allé à Paris, vous ne voulez plus rester à la ferme. Une fois qu'ils ont vécu cela, ou ils adorent et c'est ce qu'ils veulent poursuivre, ou c'est le cas contraire, et cela a une incidence sur les réserves.
    Un petit pourcentage de ces personnes peuvent intégrer la force régulière, mais ce n'est pas le cas de tout le monde, car il n'y en a pas suffisamment dans le tableau d'effectifs. Certains membres retournent dans leurs unités, mais d'autres ne le font pas ou bien se font accorder une classe B, comme nous l'avons dit tout à l'heure.
    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Payne, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, messieurs, d'être venus aujourd'hui. Vous nous avez fait un exposé intéressant.
    Je suis ancien membre du South Alberta Light Horse, alors j'apprécie beaucoup cette formation. Je considère qu'elle a été extrêmement bonne pour moi. Mon fils est capitaine dans les réserves là-bas aussi. Il vient d'accepter une affectation en tant que membre de classe B.
    Vous me corrigerez si j'ai tort, mais nombre des réservistes qui décident d'intégrer la force régulière n'y sont pas forcés; ils le font de manière volontaire.
    Pour ce qui est du recrutement, donc, ce que nous avons appris l'autre jour dans le cadre de l'exposé que nous a fait le général Semianiw est que le recrutement s'opère à différents niveaux à l'échelle du pays tout entier, pour ce qui est de la façon d'obtenir ces personnes, dont certaines sont manifestement des réservistes. Mon opinion, en tant que réserviste, est que, certes, si la possibilité existe et si l'intéressé souhaite contribuer de cette façon et répond aux critères, alors il s'agit certainement de l'une des fonctions des réserves. Je pense que nous voyons ce cas de figure, et il y a certainement des gens qui retournent aux réserves. Mais comme c'est le cas pour tout autre emploi, les gens passent à autre chose. Ils ne pourront peut-être pas retrouver le poste qu'ils avaient en tant que milicien à temps partiel. Un certain nombre d'entreprises disent que les gens peuvent prendre congé et continuer de servir dans les forces, puis revenir au travail. Ces genres de possibilités existent.
    Nous avons également discuté un petit peu des Jeux olympiques. J'y vois, certes, une formidable occasion pour les réservistes. Il s'agit d'un événement énorme, et c'est ainsi que nous avons également parlé des commissionnaires. Mon souvenir de certains autres Jeux olympiques est que nous y avons également vu ces types de personnes. Je devine qu'il n'y aurait pas que des membres de la GRC et des militaires.
    Vous avez parlé d'un changement dans la structure de commandement. Je ne sais pas à quel moment cette structure a changé. Pourriez-vous éclairer le comité en la matière?
    C'était au début des années 1990. L'on a abandonné le commandement de la milice par des officiers de la milice en faveur d'un concept de force totale, la zone étant alors commandée par un général à une étoile, membre de la force régulière.
    Cela remonte donc à bien avant l'Afghanistan?
    Oui, c'était bien avant l'Afghanistan.
    J'imagine que dans ma vie civile j'ai vu des organisations changer de structure, alors je ne m'attendrais à rien de différent chez les militaires, en tout cas pour être à jour avec ce qui se passe dans le pays.
    Vous avez également parlé de la possibilité que la formation soit ralentie. J'entretiens des rapports plutôt étroits avec mon fils, et je ne suis pas convaincu qu'il m'ait dit que la formation ait ralenti, mais il est possible que les priorités changent du fait de certaines choses. Je ne sais pas s'il appuierait ce genre de déclaration ou non.
(0955)
    Vous parlez de la formation collective ou de la formation individuelle ou...
    De la formation individuelle.
    Non, cela n'a pas ralenti. En fait, l'exigence en matière de formation a augmenté. Le niveau exigé a augmenté.
    Mais pour en revenir à ce que vous disiez au sujet de la classe B, nous ne nous opposons pas à ce que les gens servent dans la classe B; de fait, nous estimons que c'est bon pour eux. Mais, d'un autre côté, il y a des gens qui ne peuvent pas être réservistes du fait des exigences aujourd'hui pour être réserviste.
    Vous avez donc un choix à faire. Ou vous êtes un citoyen-soldat, auquel cas vous êtes un citoyen et un soldat à temps partiel, ou vous devenez presque un soldat à temps plein, et vous êtes un citoyen à temps partiel. Aujourd'hui, le système empêche un grand nombre de jeunes gens de s'enrôler dans la réserve ou d'en faire une carrière, précisément à cause de cela.
    Pour revenir à l'Afghanistan, je considère que l'effort que la réserve fait en Afghanistan est normal et que ce travail doit être fait, mais nous devrions nous interroger quant à l'infrastructure de la réserve. Si les unités ne sont pas en mesure de survivre dans leurs communautés, alors nous croyons que cela marquera la fin de la milice et de la réserve, et c'est là notre propos ici aujourd'hui devant vous.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Paillé.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie d'être parmi nous. Je trouve les discussions très intéressantes et instructives.
     La semaine dernière, M. Bachand a mentionné rapidement les coupes qui vont être effectuées, en alternance, à partir du mois de janvier. J'ai posé une question à ce sujet, mais on n'a pas pu me fournir de réponse. J'aimerais qu'on y revienne.
     Dans le cadre des contrats conclus entre les réservistes et la Défense nationale ou l'autorité responsable, l'employeur respecte-t-il ses obligations? A-t-il le droit de procéder de cette façon, c'est-à-dire d'effectuer des coupes temporaires?
    Évidemment, le droit du travail ne s'applique pas aux Forces armées, comme vous le savez. Lorsqu'un service est terminé, il est terminé. Par contre — et il faut bien rendre à César ce qui est à César —, les contrats sont respectés, normalement. Il reste que pour des raisons budgétaires ou autres, les autorités militaires peuvent mettre fin à un contrat.
    Selon vous, est-ce la première fois qu'un chose de ce genre se produit? Avez-vous au contraire déjà vu une telle situation?
    Je parlais plus tôt de proportion. C'est peut-être la première fois qu'autant de réservistes sont engagés à contrat. À la blague, on a comparé cette situation à un service de dépannage, mais ce n'est pratiquement pas une blague. Ces gens sont considérés comme étant formés, entraînés; on peut faire appel à eux, mais si le travail est terminé, qu'on ait moins besoin d'eux ou qu'on n'ait plus d'argent pour les payer, on peut très bien les libérer.
    Je me demandais quelles conditions étaient offertes aux miliciens ou aux réservistes dans le cadre des contrats qui leur sont octroyés. Comprennent-ils des avantages sociaux? Ce qui m'inquiète surtout, parce que je connais des réservistes, c'est le service offert après les déploiements, au chapitre du soutien. Leur offre-t-on le même soutien qu'aux militaires réguliers?
    Premièrement, pour revenir à la question du contrat, le contrat de classe C doit être mené jusqu'à son terme. Je pense que le contrat de classe B peut être révoqué avec un préavis.
    Deuxièmement, en ce qui concerne la protection du réserviste, parlons du syndrome de stress post-traumatique. Lorsque le réserviste revient, il est sous l'autorité de l'armée pendant un ou deux mois. Ensuite, lorsqu'il retourne dans son unité, en région, les problèmes du syndrome de stress post-traumatique apparaissent longtemps après, peut-être 12 ou 14 mois, et c'est là qu'il est livré à lui-même.
     L'ombudsman de la Défense nationale et des Forces canadiennes a fait 12 recommandations et il a donné aux Forces canadiennes jusqu'à la fin de 2008 pour les mettre en oeuvre. Jusqu'à maintenant, aucune de ces recommandations, à notre connaissance, ne sont suivies. Je pense d'ailleurs — je ne suis pas certain — que certains cas iront en cour puisqu'il y a des réservistes qui discutent avec des avocats pour connaître leurs droits.
(1000)
    J'ai une dernière question et M. Bachand en a peut-être une autre aussi.
     Si vous aviez un geste à poser aujourd'hui, si je vous disais que vous êtes le responsable du dossier et que vous pouvez poser un geste concret, quelle serait votre première solution, votre première action?
    Je me réfère à ce que nous recommandons. Je choisirais le premier sujet, qui est de confirmer les rôles primaires de la Milice et d'analyser la structure.
    Selon vous, ce serait vraiment le premier geste à poser.
    On pourrait commencer par ça. Quel est le rôle de la Milice? Si c'est un rôle, comme le mentionnait monsieur le député, de soutien immédiat à la Force régulière, alors on le saura, et le système devrait s'orienter juste pour ça, si c'est là le désir du pays et des politiciens.
    Ensuite, il faut regarder la structure. La structure est-elle adéquate? Garde-t-on la Milice telle qu'elle est ou si on change sa vocation?
    Je recommande donc de confirmer le rôle, d'étudier ce rôle et de regarder la structure.
    Merci bien.
    Madame Gallant, vous disposez de cinq minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président, et merci, par votre intermédiaire, aux témoins.
    Il me faut corriger les propos de l'intervenant précédent. Il nous faut prendre un peu de recul et, comme l'a indiqué plus tôt M. Hawn, regarder le tableau plus vaste.
    Premièrement, il n'y a eu aucune réduction du budget du ministère de la Défense nationale. Deuxièmement, il n'y a eu aucune réduction quant à la taille de la force de réserve. Il est vrai que le nombre total de postes de classe B a été diminué, mais cela ne signifie aucunement que l'on ait imposé de restrictions, ni congédié qui que ce soit. La force de réserve totale demeure la même. Ceux qui ne sont plus inscrits au service de classe B réintègrent le service de classe A et demeurent des membres actifs des réserves. Conviendriez-vous avec moi que cela correspond à la réalité?
    Je tiens à parler de la bonne volonté déjà manifestée par le gouvernement pour souligner le fait que l'actuel gouvernement appuie fermement les réserves. Premièrement, la stratégie de défense « Le Canada d'abord » comporte un engagement à porter la force de réserve à 30 000, ainsi qu'à équiper les Forces canadiennes avec le matériel nécessaire à leur travail. Une plainte régulière au fil des ans a été que les réservistes doivent toujours composer avec du matériel inférieur, et nous sommes donc en train d'améliorer les choses sur ce plan.
    Nous nous sommes engagés à élargir les Rangers canadiens. Ici encore, nous réaffectons des réservistes, en poste dans des endroits où le besoin est moins grand, là où il existe un besoin évident. Nous sommes à l'écoute du Nord. Il y a eu plusieurs discussions au comité au cours desquelles les gens se sont dit préoccupés par la souveraineté dans le Nord et dans l'Arctique. Nous grossissons donc les rangs des réservistes; nous les réaffectons tout simplement dans ces régions.
    Nous avons mis en oeuvre le régime de pensions pour les forces de réserve. Cela avait depuis longtemps été une pomme de discorde, sous des gouvernements antérieurs, les réservistes n'étant pas traités sur un pied d'égalité par les forces régulières. C'est ainsi que nous avons mis en oeuvre la loi de protection de l'emploi pour les réservistes dans le cadre du Code canadien du travail et de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.
    D'après ce que je comprends, plusieurs provinces sont en train de s'aligner, et il y a, donc, protection d'emploi pour les employés fédéraux qui choisissent de s'enrôler dans les réserves, ainsi que pour les employés provinciaux. Nous avons établi une nouvelle unité de réservistes à Yellowknife et avons ressuscité les Halifax Rifles. Comme je l'ai indiqué, nous continuons de former et d'équiper plusieurs forces de réserve dans l'Arctique.
    Ma question ici concerne le contexte plus large, qui englobe, bien sûr, l'Afghanistan. Je suis certaine que vous serez d'accord avec moi si je dis que cette mission est très dangereuse et demande et exige des préparatifs importants de la part des troupes déployées. Dans ma circonscription de Renfrew-Nipissing-Pembroke, nous avons plusieurs centaines de personnes qui se trouvent présentement aux États-Unis, dans le désert, où elles se préparent au déploiement. Elles s'absentent pendant plusieurs semaines, reviennent, puis quittent à nouveau leurs familles.
    La réserve de l'Armée de terre est pleinement engagée à appuyer cette mission afghane et, de fait, les troupes régulières elles-mêmes disent qu'il est impossible de distinguer entre un réserviste et un membre de la force régulière combattant à leurs côtés. Tous sont très bien formés. Pour ce qui est de la mission en Afghanistan, les réservistes assurent jusqu'à 20 p. 100 des soldats pour chaque rotation.
    Conviendriez-vous que la formation des troupes pour la mission afghane est une grande priorité pour la réserve de l'Armée de terre et pour les Forces canadiennes?
(1005)
    C'est définitivement une grande priorité de veiller à ce que les réservistes qui se portent volontaire pour un déploiement en Afghanistan reçoivent une formation identique à celle de leurs homologues de la force régulière, ou en tout cas très proche. Pour ce qui est de l'Afghanistan, je suis d'accord avec vous.
    Lorsque sont déployées nos forces régulières, libérant un poste qu'aucun membre des forces régulières ne peut remplir, elles font appel aux réservistes pour combler ce poste. Le Parlement a décidé, par un vote, que nous allons nous retirer de cette mission de combat en 2011. N'est-il pas logique qu'au fur et à mesure que ces soldats réintègrent leurs postes réguliers, les réservistes retournent eux aussi à un statut de soldat à temps partiel?
    Je suis d'accord avec vous. Nous ne contestons pas cela. Nous soulignons simplement que pendant les sept années de la guerre en Afghanistan, les unités de la milice ont perdu leurs leaders. Soixante pour cent du leadership de la réserve a été affecté à un service à temps plein, même les membres de la classe D au quartier général ici à Ottawa et dans les provinces. Les gens de l'unité ne sont plus là, le cadre pour les recrues que vous faites venir pour les réservistes qui sont toujours dans la classe A. Vous ne disposez pas des instructeurs pour former ces personnes, car ils ne sont pas disponibles. Vous poussez du côté de la formation de base, car vous ne disposez pas d'un nombre suffisant d'instructeurs. En 2011, nous allons nous retirer de l'Afghanistan, mais il va falloir un certain temps pour revenir à la normale; les dommages ont déjà été faits. Or, nous continuons toujours.
    J'aimerais revenir à la façon dont le système fonctionne à l'heure actuelle. Oui, l'un des rôles de la milice est de veiller à ce que nous appuyions la force régulière déployée. Mais si vous faites cela aux dépens de l'institution, alors vous avez un gros problème. Ce que nous disons est que nous devrions revoir la structure et le rôle de la milice. Nous devrions consentir à la milice les ressources nécessaires pour s'acquitter de tous ces rôles, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle.
    En ce qui concerne ce que vous avez dit au sujet de la protection des emplois, j'ai participé à l'instauration de ce système. J'ai moi-même créé le CLFC. Vous signez si vous voulez vous engager volontairement, mais cela ne veut pas dire que cela va forcément se faire. Je vous demanderais combien de réservistes les personnes qui ont signé ce document ont sur leur liste de paye. Vous constaterez qu'il y en a très peu.
    Merci.
    Monsieur Wilfert.
    J'étais en train de regarder les recommandations que vous avez déposées. Y a-t-il parmi elles un ordre de priorité? Deux grands principes directeurs semblent être qu'il vous faut des ressources et qu'il vous faut assurer l'acquittement du rôle de la milice. Si nous tentions d'accomplir cela, quel serait votre ordre de priorité et quel serait votre calendrier?
(1010)
    Pourriez-vous répéter la question?
    Vous avez distribué une feuille qui comporte des recommandations. En vue de donner suite à vos principales préoccupations, qui sont d'exécuter le rôle de la milice et d'assurer les ressources appropriées, quel serait votre ordre de priorité pour ce qui est de cette liste? Que devrions-nous selon vous faire en premier, et quel serait, pour ce faire, votre calendrier? Nous avons toujours l'Afghanistan jusqu'en 2011, nous avons les Jeux olympiques, nous avons deux sommets internationaux, et nous constatons l'effet de cela sur les unités partout au pays.
    Je dirais que notre priorité devrait être le recrutement et les niveaux de rémunération. Je suis en train de discuter du système et non pas simplement en train de dire qu'il nous faut augmenter le nombre de recrues. Ce que je dis est que vous devriez examiner le système de recrutement — la sélection, l'enrôlement, les cours et la planification. La chose ne fonctionne pas. Nous devrions également examiner les échelles de salaire autorisées pour les unités de la milice, avec, dans l'idée, d'augmenter l'effectif des unités.
    Lorsque vous dites que la chose ne fonctionne pas, pourriez-vous nous fournir ultérieurement...
    Très bien. Disons que je suis un jeune étudiant, car nous commençons la plupart du temps avec des étudiants. Je me présente à une unité, je frappe à la porte et je dis « Je veux m'enrôler, merci ». Vous allez donc remplir tout un tas de papiers et venir une ou deux ou trois fois à l'unité et veiller à ce que tout soit juste, à ce que tous les documents soient là, à ce que les virgules soient au bon endroit, et ainsi de suite, et le tout est ensuite envoyé à un centre de recrutement. Cela dépend de l'endroit où vous vivez.
    On vous convoquera deux ou trois fois au centre de recrutement à Montréal, ou à Trois-Rivières ou à Québec, et il vous faut donc vous rendre au centre de recrutement. Cela peut demander deux visites, mais la plupart du temps il vous faudra vous y rendre trois fois. Puis, si vous avez de la chance et si vous traitez avec un très bon centre de recrutement, au bout de quatre à cinq semaines on vous communiquera la décision et vous saurez donc si vous pouvez vous enrôler et servir au sein de l'unité. D'après ce que nous disent les commandants d'unité, la moyenne à Montréal est de six à huit mois. Il y a quantité de raisons à cela. Je ne dis pas que les centres de recrutement ne font pas leur travail, mais ils ont d'autres priorités. La marine a besoin de gens, alors la milice est là et la marine passe en tête de liste, puis il y aura autre chose, et ainsi de suite.
    L'autre aspect est que le système n'est pas convivial. Le système est axé sur les personnes désireuses de s'enrôler dans la force régulière. Pour la milice, c'est le soir ou en fin de semaine, mais le gros des centres de recrutement ne sont pas ouverts en soirée, ni pendant les fins de semaine.
    Après tout cela, vous êtes enrôlé. On vous envoie alors dans une unité et il vous faut ensuite établir votre admissibilité à différents cours, par bloc. On vous dit alors « Voici le calendrier ». Il y aura de la formation pour tel bloc tel et tel jour. C'est bien. Le système paraît bien, en principe. Mais, en passant, c'est bien dommage, mais faute d'instructeurs ou de ceci ou de cela, ou du fait que le calendrier ne tienne pas compte des étudiants inscrits, de leurs examens, et ainsi de suite, le cours est annulé. Alors ce sera pour l'an prochain. Et ainsi de suite.
    Ce que nous disons, donc, est que le système, l'enrôlement, la sélection et la formation doivent être réexaminés et axés sur votre clientèle, vos clients. C'est ainsi que les choses se passent depuis 25 ans. Cela ne date pas d'hier. Cela fait 25 ans qu'il y a des commissions qui siègent, et le professeur Granatstein a siégé à une commission avec le juge et le général Belzile, et avant cela, il y a eu une autre commission. Ces commissions ont étudié la situation, mais celle-ci ne s'est pas le moindrement améliorée.
    Ce que je comprends, donc, est que nos méthodes n'ont pas suivi ce qui se passe du côté des forces régulières en ce qui concerne le recrutement, les encouragements et la convivialité du système. Est-ce bien cela?
    Merci.
    Cela tombe pile.
    Pile. C'est parfait.
    Monsieur Braid.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous les deux d'être ici ce matin et de vos exposés.
    Je voulais commencer par une question au sujet de l'Afghanistan. Les réserves comptent pour environ 20 p. 100 de nos forces en Afghanistan. Je voulais commencer par avoir votre idée du caractère approprié ou raisonnable de ce nombre, de cette proportion de 20 p. 100. Est-ce là le chiffre auquel s'attendre? Est-il trop élevé? Est-il trop bas?
(1015)
    Êtes-vous en train de me poser la question en ma qualité de réserviste ou bien, mettons, si j'étais commandant de la force terrestre?
    Je pose la question de manière générale, simplement.
    De manière générale. Pour répondre à votre question, puis-je vous lire un extrait de mon texte?
Cette utilisation massive de réservistes imite le modèle américain et, jusqu'à un certain point, le modèle britannique. En effet, en 2005, 46 p. 100 des troupes américaines en Iraq ont été fournies par la Garde nationale, passant d'une réserve stratégique à une force de déploiement identifiée comme « réserve opérationnelle ».
Aujourd'hui, elle a de graves difficultés à recruter sans incitatifs extraordinaires et le soutien des employeurs commence à s'effriter. De plus, les gouverneurs des États craignent même qu'elle ne soit plus disponible pour la défense locale (« Homeland Defence ») et l'aide au pouvoir civil.
Même constat au Royaume-Uni, où l'armée territoriale a perdu des milliers de membres, et où les employeurs ont renoncé à employer des réservistes déployés trop souvent.
    Et j'ai lu la semaine dernière que le gouvernement britannique a réduit le financement consenti à l'armée territoriale, mais il y a eu une telle réaction politique... qu'il lui a fallu renverser la vapeur et rétablir au complet le budget de l'armée territoriale.
    Et je poursuis ma lecture:
De ces constats aux États-Unis et au Royaume-Uni, il faut retenir que l'utilisation massive de miliciens pour combler les postes vacants au sein de l'effectif régulier n'est plus viable au Canada sans des changements majeurs.
    Si je pouvais, donc, vous interroger au sujet de la formation, si je comprends bien votre déclaration et vos réponses à des questions antérieures, vous semblez dire que vous craignez que les réservistes soient en train de se faire sur-former. Je ne suis pas certain de tout à fait comprendre cela. Il me semble que l'inverse — c'est-à-dire que les réservistes soient en train de se faire sous-former — serait beaucoup plus grave. J'aimerais simplement comprendre un peu mieux cela.
    Si le problème est qu'on leur offre une sur-formation du fait de la probabilité qu'ils soient déployés en Afghanistan, alors il est clair qu'il nous faut veiller à ce que nos soldats réservistes soient formés comme il se doit afin d'être en mesure de faire le travail que l'on attend d'eux. Comment assurer cela? Comment concilier cela avec le reste?
    Il n'y a aucun doute... Et ce n'est pas nous qui disons cela. Des généraux de la force régulière, des généraux en poste, sont en train de dire que les membres de la force régulière sont surqualifiés pour ce qui est de toutes les choses qu'il leur faut étudier ou vivre. Si ce schéma est appliqué aux réserves, alors vous vous retrouvez avec des réservistes qui sont surqualifiés.
    Il faut cependant faire une distinction entre ce qu'il faut pour être qualifié pour partir à la guerre et servir en Afghanistan et ce qu'il faut pour être qualifié pour servir en tant que réserviste, en situation normale, en cas de déploiement à l'intérieur du pays face à une situation de crise. Ce que nous disons est qu'il nous faudrait examiner les exigences minimales pour être réserviste. Établissons la formation que doit recevoir un réserviste pour pouvoir faire le travail dont vous autres déciderez que cela s'inscrit dans le rôle de la milice. Puis, par la suite, quiconque, de manière volontaire, a le temps et la volonté requis, et souhaite faire cela, pourra parfaire ses connaissances.
    Puis, clairement, si vous devez alors déployer ces personnes dans un théâtre d'opérations aux fins de combat, alors vous augmentez le niveau de formation, mais il n'est pas nécessaire que la totalité du personnel de la milice et des instructeurs à l'échelle du pays soient formés à cette fin, ce qui est en réalité le cas, et ce qui empêche des jeunes gens, des gens de talent et des gens ambitieux, de s'engager dans la milice. Cela crée par ailleurs ce problème de relève dans les unités.
    Merci.
    La parole est maintenant à M. Boughen, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue, messieurs, et merci de partager une partie de votre matinée avec nous.
    Au fil de la discussion, j'ai beaucoup entendu parler de ce qui est, je pense, une inquiétude au sujet d'une réorientation des réservistes, dans le contexte d'une vérité opérationnelle, et d'aucuns se demandent s'il n'y pas quelque chose qui ne va pas avec la restructuration de la milice telle qu'elle existe aujourd'hui. J'aimerais bien que vous me livriez vos idées là-dessus.
    Il est question ici d'une unité qui a une longue histoire et qui sert depuis longtemps le Canada. Je me demande ce que nous pourrions faire de différent dans la restructuration de l'opération dans son entier.
(1020)
    Ce que nous disons est qu'il nous faut — pas nous, mais vous — réfléchir au genre de réserves que veut le Canada. Il existe deux philosophies différentes en ce qui concerne le maintien de réserves.
    Dans le cas d'un pays comme le Canada, qui ne compte pas une grosse population et qui ni ne veut ni ne peut se permettre une importante force régulière, il vous faut compter sur les réserves pour différents événements. La plus grosse menace, le plus gros événement, pour lequel vous aurez à compter sur les réserves est l'éclatement d'une situation d'urgence nationale — appelez cela comme vous voulez —, auquel cas il vous faut disposer d'une force plus importante. C'est alors que vous comptez sur des structures, des unités, comme nous l'avons fait lors de la dernière guerre mondiale.
    Ou alors vous pouvez avoir un autre système, qui prévoit purement le renforcement des forces régulières avec des individus, et non pas des unités. Ce que nous disons est qu'avec ce qui se passe à l'heure actuelle par la porte arrière, sans que quelque décision que ce soit n'ait été prise officiellement par vous, il semble que l'on soit en train de basculer d'un système à l'autre. C'est cela dont nous voulions vous entretenir.
    C'est là notre préoccupation: il semble que nous soyons en train de basculer du système fondé sur des unités, avec une présence de miliciens un peu partout au pays, vers un genre de système dans le cadre duquel vous n'avez que des individus, que vous formez et que vous expédiez chez la force régulière lorsque celle-ci en a besoin. Voilà quel est notre souci.
    Pour poursuivre un petit peu la discussion là-dessus, si nous consacrons beaucoup de temps et d'argent à la formation d'hommes et de femmes pour la milice... Je vous ai entendu dire dans votre déclaration que le taux de rétention est assez bas. Lorsque les gens reviennent d'une mission, ils ont dans une très grande mesure tendance à quitter la réserve. D'après vous, que pourrait-il être mis en oeuvre pour veiller à ce que les réservistes continuent d'adhérer au programme? Vu le temps, l'énergie et les ressources consacrés à leur formation, il est dommage de les voir partir.
    Quelles sont vos idées là-dessus? Comment faire pour que les réservistes demeurent réservistes?
    Eh bien, en plus d'être un réserviste, vous êtes un bénévole. Si vous voulez faire de la formation en soirée ou en fin de semaine, vous devez en décider ainsi. Si vous ne voulez pas le faire, vous ne vous présentez pas à l'unité, et c'est tout. C'est ainsi que les réserves ont toujours fonctionné.
    Pour que les réserves soient très efficaces, il faut deux choses. Premièrement, il vous faut leur fournir les ressources. Ne changez pas les ressources. Maintenez les ressources et augmentez-les de temps en temps, mais ne vous amusez pas à les faire augmenter et baisser. Deuxièmement, les unités doivent se voir assurer le bon leadership. Le leadership doit venir de la communauté au sein de laquelle servent les réservistes, pour que les gens se connaissent. Vous devez avoir un commandant qui est le leader. Il peut exercer une influence. Il peut convaincre des jeunes ou des actifs de venir suivre de la formation en fin de semaine. Il peut dire qu'ils vont faire ceci, ou qu'ils vont faire cela. C'est ainsi que les réserves ont toujours fonctionné et cela a bien réussi.
    Aujourd'hui, nous nous écartons de ce modèle. Pour ce qui est des ressources, même si vous dites que le budget n'a pas été réduit, allez vivre avec l'unité et vous verrez comment cela fonctionne. Les gens passent le gros de leur temps à faire du travail de comptable, au lieu d'être des leaders. Ce qu'il nous faut, ce sont des leaders pour diriger et convaincre ces jeunes d'y aller et de se faire former. Vu la façon dont le système fonctionne à l'heure actuelle, la plupart des commandants, pas tous, mais la plupart, sont en vérité d'anciens membres de la force régulière qui ou ont quitté la force ou sont partis à la retraite, ont rejoint les rangs de la réserve et qui, du fait de manque de qualifications pour d'autres rangs, sont placés à la tête des unités. Ce ne sont pas des réservistes. Ils ne viennent pas de la collectivité locale.
    S'il ne s'agit pas d'un ex-membre de la force régulière, alors la plupart du temps ce sera un réserviste qui travaille en classe B à temps plein. C'est bon pour lui, il touche un bon salaire, mais là n'est pas le propre du système. Avec ce système — je pourrais vous donner des noms de commandants —, la plupart des maires de grosses municipalités ont commandé l'unité dans leur collectivité. Comme je l'ai dit, il y a des premiers ministres qui ont été dans la milice. Le juge en chef de la Cour suprême — il est maintenant décédé — était dans la réserve. Ces personnes sont le produit de leur collectivité locale, elles connaissent les gens, et parce qu'elles en étaient elles aussi, elles sont un exemple pour les jeunes gens et les travailleurs. Nous nous écartons de cela, et c'est là notre principal souci. C'est ce qui nous préoccupe.
    Aujourd'hui, je ne pourrais pas servir dans la réserve; je ne pourrais pas avoir la carrière que j'ai eue. Des gens comme le président d'une filiale d'IBM m'ont dit « Je veux bien embaucher des réservistes, mais il leur faudra choisir entre être un citoyen ou être un soldat. S'ils veulent être un soldat, je ne peux pas me permettre de les avoir sur ma liste de paye ». Voilà vers quoi mène le système. C'est là notre grosse préoccupation.
    Oui, nous voulons appuyer la force régulière, nous voulons avoir des personnes formées pour les missions de combat, et ainsi de suite. Mais, ce que nous disons c'est qu'il ne faut pas demander à toute la communauté de réservistes d'être comme cela, car si vous le faites, vous allez tuer le système tout entier.
(1025)
    Merci beaucoup.

[Français]

    Général Mariage et colonel Belleau, je vous remercie. Vos présentations ont été très utiles aux députés. Je vous remercie également d'avoir accepté de comparaître malgré ce court délai. En effet, ce n'est que la semaine dernière qu'on vous a invités à comparaître devant notre comité.
    Nous allons suspendre nos travaux pour cinq minutes et continuer la séance à huis clos par la suite.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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