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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 008 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 23 mars 2009

[Enregistrement électronique]

(1540)

[Français]

    Bonjour à tous. Je déclare notre huitième séance ouverte.
    Conformément à l'ordre du jour, nous recevons aujourd'hui, comme témoin, un représentant de l'ambassade de la Russie.

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, ainsi qu'à la motion adoptée le lundi 2 mars 2009, ceci est une séance d'information sur l'incident récent lors duquel un aéronef militaire russe a approché l'espace aérien canadien.

[Français]

    Nous allons maintenant entendre le témoin de l'ambassade de la Fédération de Russie sur cette question, M. Dmitry Trofimov, chef de la Section des affaires politiques.
    La parole est à vous, monsieur Trofimov.

[Traduction]

    Sénateurs, députés, mesdames et messieurs, c'est pour moi un immense honneur et un grand plaisir que d'être invité devant l'un des comités centraux de la Chambre haute du Parlement canadien.
    En fait, j'aurais dû commencer à l'anglaise par de menus propos sur le temps: il fait beau — du moins il le faisait — mais c'est un peu frais, et espérons que cela n'a rien à voir avec le sujet dont nous allons traiter aujourd'hui.
    Pour ce qui est de l'épisode qui nous réunit aujourd'hui, on pourrait le qualifier de bien des façons. On pourrait employer les termes « malentendu, méprise, interprétation erronée des faits »... [Note de la rédaction: inaudible], ou quoi que ce soit d'autre. Analysons donc toute la situation, mais en essayant de ne rien exagérer à l'extrême; nous, au moins, ne le faisons pas.
    Je commencerai avec ce qui est arrivé. Le 18 février 2009, deux aéronefs stratégiques de longue portée russes, des Tupolev 95MS, qui avaient décollé de la base des forces aériennes de la Fédération russe à Engels, dans la région de Saratov, ont survolé l'Arctique jusqu'à la mer de Beaufort, où ils ont fait demi-tour. La frontière entre l'Alaska et le Yukon était à quelque 200 kilomètres. C'était un vol régulier préplanifié dans l'espace aérien international. Le vol a été effectué conformément à la formation militaire régulière du ministère de la Défense russe, et aux plans de patrouille aérienne dans les latitudes du Nord, et la réglementation aérienne internationale a été rigoureusement respectée.
    Neuf jours plus tard, une conférence de presse a eu lieu à Ottawa, où ont été entendus les commentaires tant du premier ministre, Stephen Harper que du ministre de la Défense, Peter MacKay. Le seul commentaire public des États-Unis, puisque, comme vous l'avez dit... J'ai commencé par dire que c'était aux abords de deux frontières et de deux pays. Alors, l'unique commentaire public des États-Unis est venu du général américain Gene Renuart, commandant du Commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord, et c'est que, selon lui, les Russes se sont conduits de manière professionnelle; ils ont respecté les règles internationales de souveraineté aérienne et n'ont pas pénétré l'espace aérien interne de l'un ou l'autre pays.
    D'après moi, l'analyse de toute cette affaire comporte plusieurs aspects. D'abord et avant tout, nous devrions voir la situation sous l'angle du droit international. Comme vous le comprendrez, les relations entre les pays au XXIe siècle, sont, d'abord et avant tout, fondées sur le droit international. Quand il s'agit de vols internationaux, les règles particulières devraient s'inspirer des traités internationaux pertinents, qu'ils soient multilatéraux ou bilatéraux.
    Deuxièmement, il y a la question particulière de la notification, qui est en partie un enjeu juridique, mais c'est surtout une question de confiance mutuelle, qui en soit devrait être fondée sur l'équilibre des intérêts ce qui, en un mot, signifie quelque chose de très simple: la réciprocité.
    Le troisième élément et une question très populaire et très répandue ces temps-ci: y a-t-il un programme caché? Autrement dit, pourquoi les Russes font-ils ceci?
(1545)
    La quatrième chose est la question de la rhétorique politique, qui semble être sur l'écran radar à la fois des médias et du public, mais qui pourrait être très préjudiciable. Dois-je vous rappeler que l'anti-américanisme aigu ou, de façon générale, l'anti-occident aigu était auparavant extrêmement répandu dans l'ancienne Union soviétique, tandis que l'anti-Russie aigu semble être extrêmement populaire de l'autre côté de la montagne? La guerre froide est terminée depuis fort longtemps, mais malheureusement, la mentalité de la guerre froide persiste; c'est déplorable. Toute cette rhétorique sur « the Russian Bear in the air », ou l'ours russe dans le ciel, qui fait rage aux Communes et dans les médias — ce sont des choses même pas d'hier, mais d'avant-hier. Mise à part l'utilité que peut avoir cette rhétorique à l'échelle nationale, si tant est-il qu'elle en a, elle ne peut être utile aux relations entre pays. Quoi qu'il en soit, j'aurais dû dire que les seuls ours qui comptent vraiment de nos jours sont ceux qui sont responsables de cette chute de nos marchés boursiers, que ce soit à Londres, New York, Toronto ou Moscou.
    La dernière chose, mais non la moindre, c'est qu'alors que nous analysons toute cette affaire, il nous faudrait ne pas en négliger le contexte. Il ne faut pas oublier nos relations bilatérales. Il ne faut pas oublier ce que les Allemands ont appelé le zeitgeist, ou l'esprit du temps qui, à ce que je peux voir, au diapason de ce qui s'est passé et à ce qui s'est dit.
    Naturellement, je suppose, la plupart d'entre vous connaissez par coeur ce discours célèbre qu'a fait Lord Palmerston en 1848 devant le Parlement britannique, quand il a rappelé à tout le monde que la Grande-Bretagne n'avait « aucun allié éternel » et aucun « ennemi perpétuel ». Tous les intérêts britanniques sont « éternels et perpétuels », a-t-il dit, et « ces intérêts », nous devons « les protéger ». C'est un principe tout à fait fondamental.
    Nous devrions tenir compte, quand nous analysons des situations comme celle-là, d'où sont les intérêts véritables du Canada, et où sont les intérêts réels de la Russie. Quels sont les intérêts et quel est le contexte de notre coopération bilatérale qui est, sans le moindre doute, mutuellement bénéfique, que ce soit en Afghanistan, où nous soutenons les efforts des Canadiens par tous les moyens à notre disposition, notamment, ces derniers temps, par le partage avec les Canadiens de renseignements qui, bien souvent, sont des plus utiles? Ce n'est rien dire de toute notre collaboration en Arctique, qui a jeté les bases de ce pont de l'Arctique depuis 2007, tandis que nous sommes aussi des partenaires extrêmement importants dans les dossiers de la collaboration internationale en Afghanistan, du terrorisme international, du désarmement international, des conflits régionaux, et quoi encore.
(1550)
    Ceci me rappelle une autre chose encore. En novembre dernier, j'ai participé à un débat au Collège Ashbury intitulé, si je peux en faire une traduction libre, « le Canada devrait renforcer son armée en prévision de la prochaine guerre froide ». Le conférencier d'honneur était l'un des militaires les plus connus du Canada, le général Rick Hillier. Sa réponse à la question était d'une clarté limpide. Est-ce que le Canada devrait renforcer son armée? Oui. Est-ce que ce devrait être en prévision de la prochaine guerre froide? C'est complètement absurde, naturellement non. Ce type de menace russe de guerre froide n'est plus. La véritable menace, comme il la définit, n'est plus un « bear », un ours; c'est un panier de crabes. C'est la combinaison du terrorisme international avec le trafic de drogue, les conflits régionaux, la piraterie, et tout le reste. La liste est très longue. Vous la connaissez par coeur aussi, à ce que je peux voir. Je suis tout à fait d'accord.
    En fait, on m'a dit dès le tout début que je n'aurais pas beaucoup de temps pour les observations préliminaires. À ce que j'ai compris, nous aurons environ une heure pour les questions et les réponses. Je vous remercie de votre attention et je suis prêt à répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Trofimov. J'apprécie vos observations.
    Notre premier intervenant sera M. Wilfert.
    Je sais que vous partagez votre temps avec M. Coderre, monsieur Wilfert.
    C'est juste, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur, d'être ici aujourd'hui.
    Vous avez exposé ce qui est apparemment une contradiction entre les propos du gouvernement russe et ceux du ministre de la Défense nationale. Le 27 février, j'ai écrit à Son Excellence, l'ambassadeur de Russie au Canada, M. Mamedov, et je tiens à préciser que j'ai reçu de lui une réponse prompte et cordiale. Dans sa lettre, il dit qu'il n'y a malheureusement pas de traité ou d'entente pertinente entre la Russie et le Canada ou la Russie et l'OTAN, lequel stipulerait un échange régulier de notifications relativement aux activités militaires aériennes. Il a néanmoins dit que la Russie a conclu une entente avec les États-Unis dans le cadre de l'accord START de 1991.
    À votre avis, monsieur, serait-il avantageux pour le Canada et la Russie de conclure ce genre d'accord officiel relativement à cette question? Comment, selon vous, cela se ferait-il?
    Je vous remercie.
    Pour commencer, permettez-moi de tirer au clair plusieurs enjeux juridiques parlant de la question des avis et pour répondre à votre question directe, si vous le voulez bien.
    Très brièvement, tout d'abord, du point de vue du droit international, la seule question qui se pose est sur la corrélation des définitions de l'espace aérien international et de l'espace aérien national. Alors toutes les notes qui, dans la plupart des cas, pourraient s'appliquer en ce qui concerne les vols d'aéronefs militaires, par exemple, s'inscrivent dans ce qu'on appelle la Convention relative à l'aviation civile internationale de Chicago de 1944, avec tous les règlements qui en découlent concernant l'espace aérien national.
    L'espace aérien national, si je peux me permettre de vous le rappeler, comprend l'espace aérien qui surplombe le territoire national, soit le bloc de terrains avec les eaux territoriales adjacentes qui, selon la Convention de 1992 des Nations Unies sur le droit de la mer, se prolonge jusqu'à 12 milles nautiques, ou 22,2 kilomètres — si je ne me trompe pas, mais c'est une approximation — ce qui signifie que quoi qu'il soit arrivé dans la zone d'environ 200 kilomètres de la ligne de côte, que ce soit du Canada ou des États-Unis, ne concerne en rien le règlement de cette Convention de Chicago de 1944. Par contre, cette situation concerne le règlement sur l'espace international, qui s'applique aussi à la Convention de Chicago, mais seulement quand il s'agit d'aéronefs civils.
    L'article 3 de la Convention de Chicago stipule qu'il y a des règles spéciales, mais assez différentes. L'une s'applique à ce qu'on appelle un aéronef d'État, soit un aéronef qui est utilisé aux fins de l'armée, des douanes et de la police. C'est exactement le cas, et il n'y a pas un seul article, que ce soit dans la Convention de Chicago ou dans toute autre convention internationale en vigueur, qui pourrait concerner les aéronefs militaires quand ils volent dans l'espace aérien international.
    Il y a des cas très particuliers, comme celui qui touche au traité de l'Antartique de 1959, qui vise uniquement les zones démilitarisées, mais c'est tout à fait différent.
    Alors, si nous parlons de l'Arctique, il n'existe rien que nous pourrions considérer comme une obligation internationale de fait relativement à un comportement ou l'autre s'il ne s'agit que d'un vol de formation aérienne — naturellement, je ne parle pas d'activité militaire —, ou quand il est question de notification.
    En ce qui concerne les notifications — et je parle de la période de la guerre froide — dès le début du processus de détente qui s'est amorcé au début des années 1970, les deux parties ont réalisé qu'il y avait réellement une zone grise dans le droit international et qu'il fallait faire quelque chose pour réglementer, d'une manière ou d'une autre, les vols d'aéronefs militaires, ce qui a finalement marqué le début d'un climat de confiance à plusieurs niveaux — et de mesures de renforcement de la sécurité fondées sur un éventail de traités internationaux et bilatéraux — de fait, russes ou soviétiques et américains à l'époque — et multilatéraux. L'un de ceux-là est le document de Stockholm de 1986...
(1555)
    Je dois vous interrompre. Votre ambassadeur dit clairement qu'il n'y a pas de traité pertinent entre le Canada et la Russie ou l'OTAN et la Russie, et il a dit que c'est regrettable. La question que je vous pose, c'est si à votre avis, il serait avantageux pour le Canada et la Russie de conclure pareille entente et, dans l'affirmative, que proposeriez-vous?
    Le seul instrument efficace et efficient que nous ayons en ce moment, c'est l'accord START I, qui vient à échéance le 5 décembre de cette année. C'était le seul accord bilatéral international qui stipule de telles notifications. Alors la première chose, ce serait de laisser la Russie et les États-Unis... en espérant qu'après tout cela, le bouton de redémarrage sera poussé. Tout indique que cela arrivera et pourrait arriver, alors laissons la Russie et les États-Unis s'asseoir à la table de négociation et renouveler l'accord START I ou en conclure un tout différent, de manière à maintenir ces procédures de notification, parce que c'est le seul élément que nous pourrions utiliser. De fait, si les Américains sont constamment tenus au courant — comme ils l'ont été dans ce cas particulier — qu'ils décident de transmettre ou non ces renseignements au Canada est une toute autre paire de manches. Je pense qu'on pourrait naturellement réfléchir à la possibilité de pousser l'examen de cet aspect particulier et, en fait, le dialogue politique extrêmement approfondi...
    Monsieur Trofimov, je vous remercie. Le temps nous manque. Vous pourrez répondre à cette question à un autre moment.
    Monsieur le président, je considérerai que c'est un oui, parce que je souligne que dans la lettre de l'ambassadeur, il n'est pas question de START.
    C'est naturellement oui. C'est seulement qu'il faudra passer par des voies diplomatiques normales et par les procédures normales pour que ce soit mis en oeuvre, rien de plus, mais il faudra quelque temps pour cela.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Bachand, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Trofimov, je vous souhaite la bienvenue. Vous avez dit que les appareils qui ont survolé ou qui sont venus près de l'espace aérien du Canada étaient des Tupolev Tu-95, communément appelés Bears. J'imagine que ces avions sont dotés de la plus récente technologie GPS.
    En volant à l'aide d'un GPS, pouvez-vous vous approcher à quelques centimètres de l'espace aérien du Canada sans vraiment y pénétrer? Ces avions sont-ils dotés de cette technologie?
    Veuillez me répondre brièvement, car j'ai trois autres questions à vous poser.
(1600)

[Traduction]

    C'est une question assez technique, et pour commencer, ce n'est absolument pas de mon domaine. Je tiens à préciser que je n'ai jamais volé dans un aéronef militaire, pas une seule fois dans ma vie. Je crois savoir qu'il devrait être muni de quelque chose comme ce dont vous parlez, certainement. Si je vous comprends bien, vous sous-entendez que les avions de n'importe quel pays pourraient voler très près, jusqu'à quelques centimètres de la zone interdite de l'espace aérien national. La plupart du temps, aucun des joueurs internationaux ne le fait. En fait, des avions américains ou de l'OTAN, qui ont d'ailleurs des équipages canadiens à leur bord, survolent très régulièrement les abords de St. Petersburg, à peu près sur les mêmes fondements juridiques dont j'ai parlé, parce que rien ne l'interdit. Naturellement, nous préférerions tous deux qu'il n'y ait pas du tout de tels vols, théoriquement, mais cela signifie que nous ne ferons qu'aller de l'avant avec le désarmement et nous allons particulièrement nous concentrer sur les bombardiers. Eh bien, la Russie a dit à de nombreuses reprises être en faveur de réductions radicales des bombardiers, d'abord et surtout, des forces armées russes et américaines, c'est certain.

[Français]

    Pour votre information, les Tupolev sont dotés d'un équipement extrêmement précis leur permettant de longer la frontière de très près.
    Est-il possible que des missions russes soient menées afin de tester l'efficacité de la réaction du NORAD? Cette approche a beaucoup été utilisée il y a quelques années. En venant près de l'espace aérien canadien, les Russes tentent-ils de revenir à cette approche afin de vérifier l'efficacité de la réaction du NORAD?

[Traduction]

    Eh bien, encore une fois, j'ai précisément parlé de ce qu'on appelle le principe de réciprocité, qui est l'un des principes fondamentaux des relations internationales. Si nous parlons de vols dans l'espace aérien qui sont très près de l'espace aérien national, alors naturellement, nous amènerions à la table des négociations tous les participants actifs de ces vols militaires internationaux, les participants de tous les pays concernés, dont les États-Unis, le Canada, la France et le Royaume-Uni. Ceci, à mon avis, ferait un débat approprié. Je le pense. Autrement, il serait assez difficile de se concentrer du côté russe. D'ailleurs, comme nous n'avons pas entendu la moindre observation émanant de Washington, à part la déclaration dont j'ai parlé du directeur de NORAD, le commandant américain qui était, comme vous l'admettrez certainement, assez positif, cela signifie quelque chose de très simple. C'est que chacun est tout à fait au courant des activités normales de formation de l'autre.
    Il y a un autre aspect important, si je peux me permettre, pour que vous compreniez, dans ce cas particulier, aux motifs des Russes de faire ces vols. Une réponse très brève serait l'efficacité opérationnelle, la fiabilité et la responsabilité internationale. Je vais m'expliquer. J'ai récemment jeté un coup d'oeil sur...
(1605)

[Français]

    Je dois vous interrompre, sinon je ne pourrai pas poser mes questions. Je vais vous les poser tout de suite, et si vous n'avez pas le temps d'y répondre — le président me dit en effet qu'il reste deux minutes —, j'aimerais que vous m'envoyiez vos réponses par écrit. Est-ce possible?
     On affirme que la Russie déploie présentement des efforts à l'échelle internationale pour démontrer sa capacité militaire, non seulement en ce qui concerne les avions et le domaine spatial mais aussi en ce qui concerne le domaine maritime. Des gens disent que la Russie veut démontrer sa grande efficacité militaire, qu'elle est maintenant sortie de sa torpeur et veut encore s'assumer en tant que puissance mondiale. J'aimerais connaître votre point de vue là-dessus.
    Pour ce qui est de ma deuxième question, j'aimerais savoir si, à votre avis, le fait que cet incident ait eu lieu précisément la veille de la visite du président américain était un hasard et, le cas échéant, pourquoi. Si ce n'était pas un hasard, j'aimerais savoir quelle était l'intention de la Russie.
    Enfin, des commentateurs politiques canadiens nous disent que le gouvernement conservateur veut hausser la présence militaire dans l'Arctique et que pour ce faire, il doit démontrer qu'un adversaire redoutable vient de temps à autre frôler nos frontières. Que pensez-vous de cette affirmation?
    Monsieur Trofimov, vous disposez de 30 secondes.

[Traduction]

    D'accord.
    Quant à savoir si c'était une coïncidence, naturellement, ce n'était rien d'autre. Ce n'était pas une coïncidence marquante, mais ce n'était rien d'autre qu'une coïncidence, parce que c'est une question de budget pour l'armée, d'un côté comme de l'autre. C'est quelque chose qui est planifié à l'avance pendant un an ou six mois avant. C'est exactement de la même manière que fonctionne l'armée canadienne.
    En ce qui concerne la deuxième partie de votre question, étant un diplomate étranger et, par conséquent, étant un visiteur au Canada, je préfère m'abstenir de faire des hypothèses sur les motifs du gouvernement du Canada.
    Je vous remercie.
    Merci.
    Madame Black.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie beaucoup de comparaître devant notre comité aujourd'hui. Nous apprécions le temps que vous nous consacrez.
    Dans vos observations préliminaires, vous avez dit, et vos propres sources militaires ont été citées comme ayant dit que ces vols sont des missions régulières d'entraînement, et que le Canada en est régulièrement avisé à l'avance. Vous avez aussi dit que le général américain de NORAD a déclaré qu'il en avait été averti. Et pourtant, les sources canadiennes, y compris un membre de ce comité sénatorial permanent de la défense nationale, ont contesté ces affirmations en disant que le Canada n'avait pas été averti. Cette contradiction me rend plutôt perplexe. Il me semble que c'est un peu inquiétant qu'il y ait ce genre de pannes des communications entre le Canada et la Russie, que ce soit au plan diplomatique ou militaire.
    Pourriez-vous nous dire quel est le processus de votre côté, le côté russe, pour prévenir le gouvernement canadien avant l'un de ces vols, c'est-à-dire combien de temps à l'avance il est prévenu, par quel ministère et le niveau de l'employé qui procède à cette notification? Quelle forme prend-elle? Aussi, quelles mesures, le cas échéant, sont prises pour vérifier que la notification a été reçue par son destinataire?
    J'ai une autre question, alors j'apprécierais que vous me laissiez le temps de la poser aussi. Je vous remercie.
    Je vous remercie.
    Tout d'abord, la Russie n'a pas dit avoir notifié le Canada, spécifiquement. Il a été dit à plusieurs reprises que les pays adjacents au trajet de ce vol ont été notifiés. À ce que je comprends de cette déclaration — parce que je sais comment cela fonctionne — c'est très simple. Nous en avons déjà parlé. Nous avons ce qu'on appelle les centres de réduction du risque nucléaire, où les États-Unis, conformément à l'accord bilatéral de 1987... Nous avons l'accord START I, qui comporte le protocole spécifique de notification. Quand il s'agit des vols militaires, comme je l'ai dit depuis le tout début, aucun autre instrument international ne fait qu'il soit obligatoire, d'un côté comme de l'autre, de partager ces renseignements avec les autres parties, alors tous ces renseignements sont directement transmis aux États-Unis.
(1610)
    À NORAD?
    En fait, ce n'est pas forcément transmis à NORAD. Quand je dis les États-Unis, je veux dire Washington.
    En ce qui concerne NORAD, ces mesures de confiance — et de renforcement de la sécurité que nous — par « nous » j'entends la communauté internationale d'abord et avant tout, les États-Unis et ensuite l'Union soviétique — avons commencé à élaborer au début des années 1970, comportaient, au bout du compte, des mesures non obligatoires, qui sont encore appliquées des deux côtés, et qui pourraient aussi inclure NORAD. De fait, nous avons récemment eu des entretiens bilatéraux avec l'effectif militaire du Canada. C'était le 21 janvier ici, à Ottawa. Le groupe du Canada a expressément soulevé la question de ces notifications, mais seulement sur un plan particulier. Il a exprimé de la gratitude, au nom de NORAD, pour les notifications à NORAD sur les vols. Nous n'étions pas obligés de le faire, mais nous l'avons fait quand même.
    Merci beaucoup.
    Il se pourrait donc que le Canada n'en ait pas été directement avisé.
    Non.
    Je vous remercie d'avoir clarifier ce point.
    L'Arctique préoccupe beaucoup le Canada dernièrement, et pas seulement à cause de cette histoire d'avion, mais également à cause de la question du passage du Nord-Ouest et des sous-marins. Je crois que c'est un aspect beaucoup plus important de notre souveraineté dans l'Arctique que les vols d'entraînement qui pourraient s'approcher de notre espace aérien; je vais donc vous poser quelques questions bien précises. Si le temps vous manque, j'aimerais beaucoup que vous nous répondiez plus tard.
    Pourriez-vous nous dire quelle est la position de la Russie sur le statut juridique de la route maritime du Nord et du passage du Nord-Ouest? Votre gouvernement convient-il que ce sont des eaux territoriales canadiennes? Les sous-marins russes effectuent-ils des missions dans le passage du Nord-Ouest? La Russie met-elle en oeuvre des processus d'avertissement semblables avant que des sous-marins russes ne partent en mission dans l'Arctique canadien? Enfin, quelles mesures prend-t-on pour éviter les collisions ou les accidents entre des sous-marins russes ou canadiens ou d'autres vaisseaux qui pourraient se trouver dans les eaux arctiques?
    Merci.
    Bien, cela fait beaucoup de questions, je l'admets.
    Non, je comprends si vous voulez nous répondre plus tard par une autre méthode, mais j'aimerais beaucoup que vous nous répondiez.
    Oui, je n'en doute pas. En ce qui concerne l'Arctique, j'ai plusieurs remarques d'ordre général.
    Je ferai d'abord remarquer que de nos jours, les deux pays se consultent régulièrement. Cette année, il y a déjà eu une série de consultations à Moscou. La deuxième série aura lieu au cours du printemps, plus près de l'été, ici, à Ottawa, entre les deux ministères des Affaires étrangères.
    Il y a eu un très important échange d'experts et de représentants des ministères des Affaires étrangères l'an dernier. Le fondement de toutes ces consultations et de ces échanges était l'attitude générale des deux parties, qui est très simple. Il faut tenir compte des dispositions du droit international et de la Convention des Nations Unies de 1982 sur le droit international de la mer, et tant le Canada que la Russie respectent scrupuleusement les dispositions du droit international. Nous pouvons parfois ne pas être d'accord, mais ce droit constitue des assises solides pour les deux pays.
    Il y a également un très...
    Vous n'avez pas assez de temps pour répondre. Je dois donner la parole à M. Hawn.
    Je suis désolé. Bien sûr.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Merci, monsieur Trofimov, de témoigner. J'essaierai d'être bref.
    En août 2007, le président Poutine a indiqué que les patrouilles aériennes reprendraient, laissant ainsi entendre qu'elles seraient plus fréquentes. Il a également fait remarquer, avec justesse d'ailleurs, que le droit international ne prévoit pas de normes obligatoires selon lesquelles les États doivent informer les autres pays des vols effectués au-dessus des eaux internationales bordant leur territoire.
    Il existe deux types d'espaces aériens, l'espace international et l'espace national. Il y en a également un troisième. Nous avons, tout comme vous, ce que l'on appelle des zones d'identification de défense aérienne, où nos pays s'intéressent aux aéronefs qui les traversent. En 2007-2008, les zones d'identification de défense aérienne du Canada et des États-Unis ont été pénétrées à 30 reprises. NORAD a intercepté 28 de ces vols, le Canada étant intervenu à huit reprises. Des avis n'ont été émis que dans trois cas. Je doute donc que l'on émette des avis. Et ces renseignements sont tirés de documents de NORAD.
    À mon avis, nos intérêts dans l'Arctique concernent de toute évidence l'économie, l'environnement, ainsi que la sécurité et la souveraineté. Récemment, le vice-amiral Oleg Burtsev, de la Russie, a fait savoir que son pays était prêt à utiliser des sous-marins pour assurer ce que les Russes considèrent comme leur souveraineté dans l'Arctique. Pourriez-vous nous en dire un peu plus long sur cette déclaration?
(1615)
    Ici encore, il y a plusieurs aspects à prendre en compte.
    Vous avez tout d'abord fait mention des zones d'identification de défense aérienne des États-Unis et du Canada. Ces zones sont également utilisées par d'autres pays, comme l'Australie, le Japon et l'Islande. Il s'agit de zones autoproclamées qui ne sont pas strictement conformes au droit international actuel.
    Je ne remets pas en question votre droit de voler dans cet espace aérien. Vous en avez le droit. Pourriez-vous commenter les affirmations de l'amiral Burtsev, je vous prie?
    Vous savez, lorsqu'il est question d'aéronefs ou de sous-marins, il importe de se rappeler qu'ils devraient parcourir les airs ou les mers. Sinon, ils vont tout simplement rouiller sur place.
    Pour répondre à cette remarque en particulier, je vais vous donner un exemple. Il y a quatre ans, l'IISS a publié des données dans The Military Balance concernant les prétendues heures de vol. Ces heures étaient en moyenne les suivantes pour les forces aériennes: 275 pour les Américains, 210 pour les Canadiens, 207 pour les Britanniques et 25 pour les Russes.
    Et les sous-marins?
    En ce qui concerne les sous-marins, la fiabilité est essentielle. Il faut que ces sous-marins fonctionnent efficacement. Pourquoi? Je répondrai en donnant comme exemple un incident très récent, qui s'est produit le 4 février. Aucun sous-marin russe n'est concerné, en fait. Il s'agit de la collision entre un sous-marin britannique et un sous-marin nucléaire français, tous les deux armés. Eh bien, des évaluations sommaires ont permis d'établir que ces appareils transportaient approximativement le tiers du potentiel nucléaire de ces deux pays. Nous avons frisé une catastrophe sans précédent...
    Tout cela est bien intéressant, monsieur, mais qu'est-ce que cela a à voir avec l'intention de la Russie d'utiliser ou non des sous-marins pour assurer ce qu'elle considère sa souveraineté en Arctique ?
    Laissez-moi dire quelque chose de très simple: peu importe ce que la Russie fera dans l'Arctique, ce sera dans la plus stricte observation du droit international, point à la ligne. Rien ne sera fait qui ne soit autorisé par ce droit.
    Nos deux pays ont des positions assez semblables. Nous sommes dans le même bateau. Nous coopérons dans l'Arctique, et je parle ici de vraie coopération. Nos opérations de recherche et de sauvetage dans cette région, qui sont, en fait, des activités trilatérales avec les États-Unis, illustrent bien ce qui se passe réellement.
    En ce qui concerne les propos dont vous avez parlé, les deux parties font bien des déclarations, mais il faut tenir compte de la réalité ici. Dans les faits, on constate que les deux parties coopèrent, pour leur bénéfice mutuel. On peut donner une foule d'exemples de cette coopération mutuellement bénéfique dans l'Arctique. Naturellement, nous n'agirons jamais, dans quelque circonstance que ce soit, en contradiction avec les dispositions du droit international. C'est une chose certaine.
(1620)
    C'est bien.
    Avant de laisser la parole à ma collègue Mme Gallant pour une brève question, je reviendrais aux citations. Je vous en donnerai une de Ronald Reagan — et mes intentions sont amicales ici — et cette citation est la suivante: « Trust, but verify », ce qui signifie qu'il faut faire confiance, mais vérifier quand même. Voilà ce qui intéresserait les deux parties.
    Je laisse maintenant la parole à Mme Gallant.
    Je vous remercie de nouveau d'avoir accepté notre invitation à témoigner devant notre comité, ainsi que du travail et de la coopération de votre pays dans la lutte contre le terrorisme.
    Ma question porte sur le deuxième point. Dans votre témoignage, vous avez utilisé le mot « réciprocité » à quelques reprises. Lorsqu'il est question de réciprocité — et nous parlons ici de l'incursion des appareils Bears dans notre espace aérien —  affirmez-vous que les jets de combat canadiens envahissent l'espace aérien russe?
    Merci.
    Avec tout le respect que je vous dois, je ferai remarquer que nous ne parlons pas de l'incursion d'appareils russes dans l'espace aérien national du Canada. Pareil incident ne s'est pas produit, et aucun des représentants officiels des trois pays n'en a jamais fait mention. Nous parlons de vols dans l'espace aérien international, qui sont passés à proximité de l'espace aérien national des pays concernés.
    Ma remarque sur la réciprocité est très simple: les jets du Canada, des États-Unis, du Royaume-Uni ou de l'OTAN, si on parle en général, passent à proximité de l'espace aérien national russe et eux non plus ils n'y pénètrent pas.

[Français]

    Merci, monsieur Trofimov.
    La parole est à M. Coderre.
    Je suis impressionné, monsieur Trofimov. Si vous voulez faire de la politique canadienne, il y a, dans notre Parlement, ce qu'on appelle un filibuster. On vous pose une question, vous parlez pendant sept minutes, le temps passe et ça fonctionne à merveille. C'est un compliment que je vous fais.
    J'aimerais qu'on revienne à deux questions extrêmement sérieuses. Beaucoup de Canadiens nous écoutent aujourd'hui.
    Premièrement, la Russie reconnaît-elle la souveraineté du Canada dans l'Arctique? Je veux une réponse simple. Répondez par oui ou par non. Je devrai vous interrompre, si vous n'êtes pas assez bref.

[Traduction]

    Je vous répondrai par deux phrases. Tout d'abord, oui. Ensuite, des procédures de cartographie sont actuellement en cours. La Russie l'a déjà fait en 2007, et le Canada terminera un processus semblable d'ici 2013. Et en fait, la commission internationale pourra examiner tous les documents. C'est tout.
    D'accord. Vous me dites donc que vous admettez la souveraineté du Canada dans l'Arctique.
    Cela ne fait aucun doute.
    Ma deuxième question est la suivante: lorsque vous envoyez des sous-marins — et je ne fais pas référence ici à La poursuite d'Octobre Rouge — est-ce que vous avisez, oui ou non, les autorités canadiennes lorsque vous vous approchez de la frontière? Vous avez dit qu'il n'y avait pas d'avis concernant l'espace aérien; nous parlons maintenant des sous-marins. Est-ce que vous envoyez un avis lorsque ces sous-marins passent à proximité de nos eaux territoriales?
    J'ai deux choses à dire ici aussi. D'abord, j'ai 45 ans, ce qui signifie que je ne suis pas assez jeune pour tout savoir.
    Ensuite, il existe des règlements internationaux assez semblables — et naturellement, des conventions et des traités différents — qui fonctionnent de façon assez similaire.
(1625)

[Français]

    Vous ne voulez pas répondre ou vous ne le savez pas. C'est correct.
    Voici mon autre question. Le premier ministre du Canada, dont le rôle est de protéger l'intégrité et la souveraineté du territoire, a dit, après la réaction du ministre de la Défense concernant les avions, les bombardiers, qu'il y avait de plus en plus d'incursions agressives de la part des autorités russes.
    Pouvez-vous faire un commentaire à ce sujet? Vous pouvez prendre deux minutes, car ça en vaut la peine.

[Traduction]

    D'accord. C'est très gentil de votre part. Je vais essayer.
    Premièrement, en ce qui concerne la question initiale, quand je dis qu'il y a des règlements internationaux explicites, je n'entends pas par là que je ne sais pas, mais que je ne connais pas tous les détails. Mais ce que je veux dire, c'est qu'il n'y a pas eu d'incursion de la part des Russes dans l'espace aérien ou les eaux territoriales du Canada.

[Français]

    Monsieur Trofimov, je veux que vous compreniez aujourd'hui que je suis d'accord que nous ne sommes pas en guerre froide et que nous ne devons pas jeter de l'huile sur le feu.

[Traduction]

    Je suis tout à fait en faveur d'un dialogue entre nos deux pays, nous ne faisons donc pas intervenir la politique là-dedans. Mais les Canadiens veulent savoir. Lorsque tous les renseignements sont supposés être classifiés et que nous avons ce genre de discussion, les Canadiens veulent savoir. Notre souveraineté dans l'Arctique est essentielle à nos yeux, et s'il y a des sous-marins qui s'y trouvent alors qu'ils ne le devraient pas, nous voulons le savoir. C'est la seule raison pour laquelle nous posons ces questions, avec le plus grand respect.
    Pour commencer, disons clairement que nous parlons d'un certain sous-marin qui n'est pas supposé être là. J'ai, bien franchement, une question très simple: de quel sous-marin s'agit-t-il, à qui appartient-il et où était-il exactement?
    L'hon. Denis Coderre: Eh bien, nous posons des questions...
    M. Dmitry Trofimov: Quand nous savons clairement à qui appartient le sous-marin en question, il y a des règlements internationaux différents.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Trofimov. Nous apprécions votre réponse.
     J'aimerais maintenant donner la parole à M. Boughen, du Parti conservateur.

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur le président. Je partagerai mon temps avec M. Payne.
    Merci de passer une partie de la journée avec nous pour nous aider à comprendre la situation en répondant à nos questions. En restant dans la même veine, j'aurais quelques questions à vous poser.
    Tout d'abord, à quoi servent ces genres de vols, selon vous? Est-ce pour former les compétences de pilotage ou est-ce une sorte d'opération tactique? En observant les pays, nous pouvons voir que la Russie possède une grande partie du Nord, tout comme le Canada. Pourquoi un aéronef aurait-il à s'approcher d'une frontière internationale? Je ne suis pas certain que ça devrait se produire.
    Ensuite, s'il n'y a pas de lien de communication présentement, ne considérez-vous pas que ce serait une bonne idée de commencer à nouer avec le Canada et les États-Unis des liens semblables à ceux qui sont tissés en Amérique, pour que de tels incidents ne tournent pas au vinaigre et qu'il ne se produise pas d'événements qui n'ont pas lieu d'être simplement par manque de communication?
    Merci.
    Il faut commencer par chercher le pourquoi. Quand on a un coureur, il devrait courir. Autrement, il n'y a aucune raison d'avoir un coureur. Si nous regardions ce problème d'un autre angle, il faudrait examiner les possibilités de désarmement. Faisons-le alors. Qu'il n'y ait plus un seul bombardier ou sous-marin nucléaire dans l'espace aérien ou dans les hautes mers internationales. Mais c'est une chose très différente. La situation actuelle est un héritage que nous — les Russes, les Américains, les Britanniques, les Français — avons de la guerre froide. Il faudra inévitablement un certain temps pour en arriver un jour à un désarmement radical. Je ne sais pas... [Inaudible ... un sanctuaire quelconque. Pendant cette période, nous devons avant tout garantir l'efficacité et la fiabilité opérationnelles pour empêcher les divers sous-marins d'entrer en collision comme les bâtiments français et britannique.
    Nous devrions favoriser et accentuer les mesures de renforcement de la confiance et de la sécurité. En fait, n'eût été du manquement des Américains à l'égard du traité ABM conclu en 2002, pendant la période de l'administration, nous en serions maintenant rendus à START II et III plutôt qu'à START I et nous aurions des dispositions bien plus détaillées concernant la publication d'avis, ce qui profiterait éventuellement non seulement à la Russie et aux États-Unis, mais à tous les autres pays, y compris le Canada.
    Le remède est très simple. Retournons à la case départ. Nous l'avons déjà fait symboliquement avec les Américains lors de la réunion qui a eu lieu récemment entre Sergei Lavrov et Hillary Clinton. C'est tout ce que je dirai sur la voie à suivre. C'est un conseil très simple ou général, mais c'est très compliqué, en fait.
    Pour ce qui est du lien de communication, c'est une zone grise, je l'admets. C'est un problème, ce qui est en quelque sorte déplorable. Mais la meilleure façon de discuter est à la table de négociations en empruntant les voies diplomatiques normales. En fait, j'aurais dû...
(1630)
    Il vous reste une minute.
    D'accord.
    Nous pourrions utiliser les échanges relatifs à START entre les instances militaires, par exemple, pour instaurer le dialogue entre les experts, parce que la question est extrêmement complexe. Ce n'est pas du pelletage de nuages, mais bien des discussions très pointues. Donc, même si, de façon générale, nous n'aurions jamais quoi que ce soit à redire sur ce processus — ça vaudrait la peine de l'essayer — c'est vraiment fort complexe. Au coeur du problème se trouve le processus de désarmement, que nous devrions nous employer à faire progresser.
    En fait, nos partenaires canadiens, je devrais l'admettre, jouent un rôle extrêmement important, qu'il s'agisse de la non-arsenalisation de l'espace, du Traité de non-prolifération, du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires ou d'un autre processus.

[Français]

    Merci, monsieur Trofimov.
    Monsieur Paillé.
    Je vais poser une seule question et céder ensuite la parole à M. Bachand.
    La population peut percevoir cet incident de deux façons. D'un côté, elle peut penser que le vol respectait les normes et que c'est plutôt la réaction du gouvernement qui devrait être remise en question. D'un autre côté, elle peut considérer que ce vol, tout en respectant la zone légale internationale, était dans une zone grise et constituait une façon de plus pour la Russie de revendiquer sa souveraineté dans l'Arctique.
    Quelle perception se rapproche le plus de la vôtre?

[Traduction]

    Tout d'abord, je ne commenterai pas les déclarations officielles faites ici au Canada. Je préférerais attirer votre attention, une fois de plus, sur le fait que depuis l'incident dont nous parlons et qui s'est produit très près de deux États, il n'y a eu aucun commentaire ou réaction des États-Unis, que ce soit de la part des autorités ou du public. C'est révélateur. C'est le premier point que je voulais soulever.
    Ensuite, j'imagine qu'il existe une autre zone grise — le problème de l'interopérabilité des différentes lois nationales et internationales lorsqu'il est question des zones autodéclarées d'identification de défense aérienne qu'ont établies plusieurs pays, comme les États-Unis, le Canada, l'Australie et le Japon. Dans le cas du Canada, la limite de cette zone va jusqu'à 300 kilomètres, si je ne me trompe. Vous devriez toutefois consulter votre propre armée, car je ne suis pas un expert. Mais cette zone s'étend certainement jusqu'à la région où a eu lieu cet incident, ou épisode, pour être plus précis.
    Ainsi, du point de vue du droit international, il ne s'est absolument rien passé, un peu comme lorsqu'un aéronef des États-Unis ou de l'OTAN a longé l'espace aérien national de la Russie. À l'époque, nous avons considéré qu'il ne s'était rien passé. Nous n'avons fait aucun commentaire, aucune déclaration. Nous n'étions probablement pas très contents, mais cette réaction découle de la période de la guerre froide. Nous ne pouvons revenir aux traditions et aux pratiques d'antan du jour au lendemain, à notre grand regret d'ailleurs, car nous le voudrions bien. Il faudra pour cela des décennies, probablement moins, mais tout dépend des politiciens. Naturellement, ces derniers devraient faire preuve d'un peu plus de souplesse et d'ouverture d'esprit pour recourir aux voies diplomatiques normales afin de discuter de ces questions.
    Merci.
(1635)

[Français]

    Lorsqu'un incident de ce genre se produit et qu'il vient aux oreilles du public, vous devez recevoir des instructions de Moscou. Si je me fie à la réponse que vous venez de nous donner, Moscou vous a dit que rien d'illégal ne s'était produit.

[Traduction]

    En toute franchise, ce que je vais vous dire ne suit pas les instructions que j'ai reçues de Moscou, mais vient de ma perception des différentes conventions internationales. Si vous me suivez, vous en arriverez facilement aux mêmes conclusions. Comme je l'ai dit plusieurs fois, un fait est un fait. S'il existe une disposition particulière dans le droit international, une convention ou un traité, les choses sont comme elles sont, que cela vous plaise ou non. Selon le droit international, la Russie et ses appareils n'ont rien fait qui contrevienne à ce droit. Nous ne sommes peut-être pas heureux que ce droit n'englobe pas toutes les sphères qu'il devrait théoriquement couvrir, mais c'est une autre histoire.

[Français]

    Merci, monsieur Trofimov.
    Cela met fin à ce segment de notre séance. J'aimerais vous remercier au nom du comité d'avoir accepté de témoigner aujourd'hui et d'avoir participé très activement à la réunion. Vous avez été volubile et vous nous avez très bien informés.
    Je vais suspendre nos travaux pour cinq minutes.

[Traduction]

    Je vous remercie beaucoup, tout le plaisir était pour moi.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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